Décisions | Tribunal administratif de première instance
JTAPI/700/2025 du 26.06.2025 ( AMENAG ) , REJETE
En droit
Par ces motifs
| RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| POUVOIR JUDICIAIRE
JUGEMENT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PREMIÈRE INSTANCE du 26 juin 2025
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dans la cause
Monsieur A______, représenté par Me Julien PACOT, avocat, avec élection de domicile
contre
DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OCEN
1. Monsieur A______ est propriétaire de la parcelle n° 1______ de la commune de B______ (GE), sise ______[GE].
2. Le ______ 2024, le département du territoire (ci-après : DT) lui a délivré une autorisation de construire (DD 2______) portant sur la transformation de la villa existante sur sa parcelle en trois appartements de haute performance énergétique (HPE), avec rénovation énergétique, création de deux lucarnes et d’une véranda, pose de PAC et de sondes géothermiques et rénovation du garage.
3. À teneur des informations disponibles sur la plateforme de l’État de Genève SAD-Consult, le chantier a été ouvert le 10 avril 2024.
4. Le 10 juillet 2024, par l’intermédiaire du bureau d’architectes C______ Sàrl, M. A______ a sollicité, via la plateforme du Programme Bâtiments, l’octroi d’une subvention pour la rénovation complète avec CECB (mesure M-13 du barème de subventions) du bâtiment visé par l’autorisation de construire susmentionnée.
Selon le rapport de conseil CECB Plus établi le 13 juin 2023 par le bureau d’études D______ SA, les travaux de rénovation énergétique HPE (variante B) impliquaient notamment, s’agissant de l’enveloppe du bâtiment, des travaux d’isolation de la toiture, de la terrasse, des façades et du plafond des sous-sols.
5. Le formulaire de demande, signé et daté du 15 juillet 2024 et reçu par l’office cantonal de l’énergie (ci-après : l’OCEN) le 19 juillet 2024, indiquait que les travaux devaient débuter le 15 juillet 2024 et prendre fin le 31 mai 2025.
Ce formulaire comportait, en page 3, les conditions générales et spécifiques à respecter pour l’octroi de la subvention. En particulier, il était stipulé, sous la rubrique « dépôts et traitement des dossiers », que « la requête en subvention doit être déposée avant le début des travaux faisant l’objet de la demande de subvention, par exemple au moment de la délivrance de l’autorisation de construire ou de la validation du dossier d’exécution avant travaux (V30T) » et que « l’octroi d’une subvention ne constitue pas un droit pour celui qui la sollicite ».
6. Par courriel du 16 octobre 2024, le bureau D______ SA, indiqué comme contact technique dans la requête, a relancé l’OCEN.
7. Par courrier du même jour, l’OCEN a invité le bureau D______ SA à lui transmettre la preuve que les travaux n’avaient pas débuté, ainsi que le récapitulatif des coûts liés à la rénovation énergétique.
8. Par courriel du 1er novembre 2024, le bureau D______ SA a exposé que les travaux de rénovation énergétique avaient débuté courant du mois d’août et transmis divers devis et soumissions ainsi que le procès-verbal de chantier du 16 juillet 2024.
9. Par décision du ______ 2024, l’OCEN a rejeté la demande de subvention au motif que les travaux faisant l’objet de ladite demande avaient déjà débuté lors du dépôt de la requête du 15 juillet 2024. Il ressortait en effet du procès-verbal de chantier du 16 juillet 2024 que la toiture et les radiateurs des combles et du premier étage étaient déjà démantelés à cette date-là.
10. Le 4 décembre 2024, une séance s’est tenue dans les locaux de l’OCEN avec l’architecte en charge du projet. À cette occasion, la chronologie des travaux a été discutée.
11. Par courrier du 6 décembre 2024, le bureau C______ Sàrl a demandé à l’OCEN de revoir sa position.
Les travaux de rénovation n’avaient pas commencé au moment de la requête de subvention. Seuls des travaux de sondage et de préparation avaient été entrepris afin d’avoir une connaissance globale du bâtiment qui datait des années 1930 et dont l’état laissait à désirer. L’annonce d’ouverture du chantier avait été faite trois mois avant le dépôt de la demande de subvention au vu de la nécessité de poser des échafaudages au mois d’avril afin de permettre l’installation de nichoirs pour la nidification des martinets noirs. Ces derniers venaient chaque année nicher sous la toiture de la villa et faisaient l’objet d’un programme de protection. Le 3 juin 2024, ils avaient obtenu la validation par l’OCEN du dossier d’exécution avant travaux (V30T). Le 13 juin, le bureau d’études D______ SA, en charge du dossier thermique et de la demande de subvention, leur avait demandé le devis général et le planning du projet pour compléter la requête, documents qui étaient en cours de modification suite aux éléments découverts lors des sondages. En raison d’un incendie dans les combles du bâtiment dans la nuit du 14 au 15 juin 2024, l’envoi desdits documents n’avait eu lieu que le 21 juin 2024. Aucune relance n’avait été faite auprès du thermicien, lequel n’avait complété la demande sur la plateforme que le 10 juillet 2024. À partir de fin mai 2024, ils avaient commencé à détuiler la toiture et à retirer la ferblanterie afin de connaître l’état des chevrons et autres éléments de la charpente. Ils avaient également démonté les faux plafonds des combles qui risquaient de ne plus tenir à plusieurs endroits et déposer les radiateurs en vue de leur réinstallation à la fin de chantier, le propriétaire ayant la volonté de réutiliser un maximum d’éléments de la villa existante. Une fois toutes les données connues, le contrat d’entreprise avait été signé le 16 septembre 2024 et le contrat pour la géothermie le 12 août 2024.
12. Par courriel du même jour, le bureau C______ Sàrl a notamment fait parvenir à l’OCEN un reportage photographie des différentes phases du chantier de rénovation réalisé entre les mois d’avril et novembre 2024.
13. Par courriel du 9 décembre 2024, l’OCEN a informé M. A______ que les nouveaux éléments apportés ne lui permettaient pas de revoir sa décision, les interventions réalisées sur la toiture du bâtiment antérieurement au dépôt de la requête en subvention consistant déjà en des travaux énergétiques.
14. Par acte du 16 décembre 2024, M. A______, sous la plume de son conseil, a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation et au renvoi du dossier auprès de l’OCEN afin qu’il lui accorde la subvention sollicitée.
L’OCEN avait fait une application erronée de l’art. 21 al. 5 du règlement d’application de la loi sur l’énergie du 31 août 1988 (REn - L 2 30.01), en ce sens qu’aucun travaux faisant l’objet de la demande de subvention n’avait été exécuté avant le dépôt de cette dernière. Le démontage de la toiture, qui avait débuté à la fin du mois de mai 2024, avait pour objectif de procéder à des sondages et à une analyse préalable de l’état de la charpente, à savoir des travaux préparatoires visant à définir les interventions nécessaires et à affiner le budget de construction. Le budget définitif pour les travaux de charpenterie avait d’ailleurs été établi à la suite desdits travaux et le contrat d’entreprise signé le 16 septembre 2024. De plus, même si le permis avait uniquement porté sur la transformation de la villa existante, sans amélioration énergétique, la toiture aurait de toute façon due être rénovée, au vu du mauvais état de la charpente. Les travaux de démolition de la toiture n’étaient ainsi pas liés à l’assainissement énergétique fondant la demande de subvention. La plus-value sous l’angle énergétique relevait de la pose d’une sous-couverture, d’une isolation et d’un revêtement composant ensemble l’enveloppe thermique du bâtiment qui, elle, faisait effectivement partie du concept d’assainissement énergétique pour lequel une subvention était requise. N’ayant entrepris aucuns travaux de ce type avant le dépôt de la requête, l’exigence temporelle de l’art. 21 al. 5 REn avait été respectée.
À titre subsidiaire, dès lors que le rejet de la requête de subvention aboutissait à une situation manifestement injuste, confinant à l’arbitraire, il fallait admettre l’existence d’une lacune improprement dite et le tribunal était invité à procéder à une interprétation en équité de l’art. 21 al. 5 REn à la lumière de l’art. 26 de la loi fédérale sur les subventions (RS 616.1 – LSu), qui admettait des exceptions quant à l’exigence temporelle, notamment pour l’exécution de certains travaux de base.
Enfin, la décision querellée, qui le privait d’une subvention de CHF 79’800.-, avait un impact considérable sur sa situation financière, alors même qu’une telle sanction ne se justifiait pas.
15. Dans ses observations du 7 février 2025, le DT, soit pour lui l’OCEN, a conclu au rejet du recours, s’en rapportant à justice s’agissant de sa recevabilité. Il a transmis son dossier.
16. Par réplique du 5 mars 2025, le recourant a persisté intégralement dans ses explications et conclusions, relevant notamment que contrairement à ce qu’affirmait l’autorité intimée, il comptait sur la subvention sollicitée pour réaliser son projet de rénovation et l’avait budgété dès l’origine. Il avait d’ailleurs pris des choix constructifs à la lumière de ce paramètre financier.
17. Par duplique du 21 mai 2025, l’autorité intimée a elle aussi persisté intégralement dans ses observations et conclusions.
18. Les arguments formulés par les parties ainsi que les éléments résultant des pièces figurant au dossier seront repris et discutés, en tant que de besoin, dans la partie « en droit » ci-dessous.
1. Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la loi sur l’énergie du 18 septembre 1986 (LEn - L 2 30) (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).
2. Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).
3. Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a) ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b).
En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce. Il n’en résulte toutefois pas que l’autorité est libre d’agir comme bon lui semble, puisqu’elle ne peut pas faire abstraction des principes constitutionnels régissant le droit administratif, notamment la légalité, la bonne foi, l’égalité de traitement, la proportionnalité et l’interdiction de l’arbitraire (ATA/489/2020 du 19 mai 2020 consid. 3a ; ATA/1000/2018 du 25 septembre 2018 consid. 2).
4. La Confédération peut soutenir les mesures de nature à favoriser l’utilisation économe et rationnelle de l’énergie, le recours aux énergies renouvelables ainsi que la récupération des rejets de chaleur (art. 50 de la loi sur l’énergie du 30 septembre 2016 – LEne - RS 730.0).
5. La Confédération accorde aux cantons des contributions globales destinées aux mesures d’encouragement visées aux art. 47, 48 et 50 LEne (art 34 al. 1 2e phrase de la loi sur la réduction des émissions de CO2 du 23 décembre 2011 – LCO2 - RS 641.71).
6. Le Programme Bâtiments (cf. vwww.leprogrammebatiments.ch) de la Confédération et des cantons constitue un pilier important de la politique climatique et énergétique de la Suisse. Il repose sur l’art. 34 LCO2. Ce programme assiste, à l’aide de subventions, la diminution de la consommation d’énergie et les émissions de C02 des biens immobiliers. Les mesures de construction subventionnées sont l’isolation thermique de l’enveloppe du bâtiment, le remplacement de chauffages fonctionnant à partir d’énergies fossiles ou d’électricité par des systèmes de chauffage recourant aux énergies renouvelables ou par le raccordement à un réseau de chauffage, des rénovations énergétiques complètes ou des rénovations par étapes de grande ampleur, ainsi que des constructions neuves répondant à la norme Minergie-P. Les cantons définissent individuellement les mesures de construction qu’ils encouragent et les conditions sur la base du Modèle d’encouragement harmonisé des cantons (ModEnHa 2015 ; consultable sur le site Internet de la Conférence des directeurs cantonaux de l’énergie, www.endk.ch).
À teneur du ModEnHa 2015 (cf. page 13, rubrique « traitement des demandes »), les demandes doivent être déposées avant le début des travaux et les projets déjà en chantier ou achevés ne donnent plus droit à une contribution.
7. À Genève, les demandes de subventions sont adressées à l’OCEN via la plateforme internet du Programme Bâtiments et sont traitées en application de la LEn et de son règlement d’application du 31 août 1988 (REn - L 2 30.01).
8. La LEn a pour but de favoriser un approvisionnement énergétique suffisant, sûr, économique, diversifié et respectueux de l’environnement (art. 1 al. 1 LEn). Elle détermine les mesures visant notamment à l’utilisation rationnelle et économe de l’énergie et au développement prioritaire de l’exploitation des sources d’énergies renouvelables et indigènes (art. 1 al. 2 LEn).
Le Conseil d’État arrête les dispositions nécessaires à son exécution (art. 25 al. 1 LEn), ce qu’il a fait en édictant le REn.
9. En collaboration avec les communes, le canton peut favoriser, par des subventions, des dégrèvements fiscaux ou des prêts, l’utilisation rationnelle de l’énergie et l’utilisation d’énergie renouvelable (art 20 al. 1 LEn ; cf. aussi art. 16 al. 1 REn). La participation financière de l’Etat n’est accordée que si ces mesures ont été approuvées par les organes compétents selon des critères de qualité portant notamment sur les économies réalisables (art. 20 al. 2 LEn).
L’Etat peut participer par une aide financière à des travaux, notamment en matière d’amélioration thermique des bâtiments ou d’utilisation d’énergies renouvelables, conformes aux objectifs de la loi (art. 15 REn).
S’il s’agit d’une subvention, qui peut être accordée afin de favoriser le recours aux énergies renouvelables en substitution d’agents énergétiques non renouvelables (art. 16A REn), l’aide financière ne constitue pas un droit pour celui qui la sollicite (art. 16 REn).
Le DT, soit pour lui l’OCEN (art. 1 al. 1 REn et art. 6 al. 1 let. d du règlement sur l’organisation de l’administration cantonale du 1er juin 2018 - ROAC - B 4 05.10), est compétent pour accorder une telle subvention (art. 19 al. 1 REn).
Le montant de la subvention accordée en application de l’art. 16A REn est déterminé sur la base de directives établies par le département, qui tiennent compte notamment de l’efficacité économique et énergétique de l’installation en accord avec les objectifs de la loi (art. 20 al. 2 REn).
Le requérant doit produire toutes les pièces permettant l’examen de sa requête tant du point de vue technique, énergétique que financier (art. 21 al. 1 1ère phr. REn) et cette dernière doit être déposée avant le début des travaux faisant l’objet de la subvention (art. 21 al. 5 REn).
10. Le tribunal de céans a déjà eu l’occasion de juger que « l’art. 21 al. 5 REn concrétise le principe, découlant de l’art. 20 LEn, selon lequel la subvention doit avoir un caractère incitatif. Selon la pratique du département, la subvention n’est dès lors octroyée que pour autant qu’elle constitue un élément déterminant dans la décision de procéder à des travaux énergétiques. Or, le fait d’entreprendre de tels travaux et de les achever sans avoir requis une subvention et obtenu confirmation de son attribution laisse conclure que le requérant dispose des moyens financiers pour payer lesdits travaux sans aide étatique et que la subvention ne constitue pas un élément déterminant dans sa décision de procéder à ces travaux énergétiques. En effet, si la subvention était l’élément clé poussant un administré à effectuer des travaux énergétiques, il attendrait la confirmation de son obtention avant de les entreprendre, ce qui n’est pas le cas si cette possible subvention ne lui est pas indispensable. Le fait d’exiger le dépôt de la demande de subvention avant le début des travaux permet également de pouvoir informer le requérant s’il obtiendra effectivement une subvention, laquelle n’est pas forcément octroyée même si le projet soumis respecte tous les critères de qualité. Il est en effet possible que l’autorité intimée ait entièrement épuisé le budget de l’année en cause et qu’elle ne puisse dès lors plus aider financièrement aucun requérant. Elle peut aussi devoir, par manque de fonds, procéder à des arbitrages parmi les demandes qui lui sont soumises et ainsi devoir en refuser certaines. Il y a ainsi un réel sens à exiger d’un administré qu’il dépose la requête en octroi d’une subvention avant le début des travaux qu’il envisage. Cette exigence ne peut ainsi être qualifiée de chicanière. Par ailleurs, cette condition, qui est rappelée tant sur le formulaire de requête de la subvention que dans les conditions générales du Programme Bâtiments «GEnergie 2050 », ne complique pas à outrance la procédure à suivre pour obtenir une subvention, laquelle n’est, il convient de le rappeler, pas un droit. Il ne peut par conséquent être considéré qu’elle entrave de manière injustifiée et disproportionnée le but légal d’utiliser des sources d’énergies renouvelables et respectueuses de l’environnement » (JTAPI/490/2022 du 11 mai 2022 consid. 8 et JTAPI/569/2020 du 9 juillet 2020 consid. 8). Le tribunal a également rappelé, s’agissant de l’autorité, que « si elle dispose d’un pouvoir d’appréciation en la matière, celui-ci ne lui permet pas de s’affranchir du respect des conditions posées par la loi (cf. JTAPI/569/2020 du 9 juillet 2020 consid 8), y compris dans le but de « sauver le climat, conformément à l’urgence climatique déclarée en 2019 par le Conseil d’Etat » (JTAPI/490/2022 du 11 mai 2022 consid. 8).
11. En l’espèce, il est établi que le recourant a procédé à des travaux de démolition de la toiture à la fin du mois de mai 2024, soit antérieurement au dépôt de sa demande de subvention.
Il fait toutefois valoir que ces interventions ne consistaient qu’en de simples travaux préparatoires et de sondages, lesquels ne seraient pas couverts par la demande de subvention.
Cet argument ne peut être retenu.
Les travaux préparatoires - ou travaux préalables - désignent, comme leur nom l’indique, des interventions réalisées en amont du chantier proprement dit, destinées à en faciliter la mise en œuvre. Il peut s’agir notamment de relevés, d’opérations de piquetage et de déblaiement, de la mise en place de protections ou encore de l’installation d’échafaudages (cf. code des frais de construction CFC : https://www.vd.ch/fileadmin/user_upload/themes/territoire/construction/batiments_publics/directives-constructions/01/A151.pdf ; consulté le 18 juin 2025). Les travaux de sondage, quant à eux, constituent une catégorie spécifique de travaux préparatoires. Ils visent à analyser la nature du sol ou de l’ouvrage existant, notamment en vue d’identifier la présence éventuelle de polluants (tels que l’amiante) ou d’évaluer la stabilité structurelle. Ces interventions peuvent consister en des carottages, des forages, des tranchées exploratoires ou la pose d’instruments de mesure par exemple. Dans le cadre d’un projet de rénovation, leur finalité est essentiellement diagnostique et préventive.
Or, en l’occurrence, il ressort des éléments du dossier, en particulier du reportage photographique réalisé entre avril et novembre 2024, qu’à fin mai-début juin 2024, la toiture du bâtiment avait déjà entièrement été démontée. Les photographies des 29 mai, 2 et 6 juin 2024 montrent en effet clairement que la couverture et l’isolation ont été retirées, laissant la charpente complétement à nue. De tels travaux, compte tenu de leur ampleur et de leur nature, ne sauraient être qualifiés de simples travaux préparatoires ou de sondage.
Par ailleurs, contrairement à ce que soutient le recourant, ces travaux portent manifestement sur les éléments visés par le projet de rénovation énergétique, objet de la demande de subvention. Conformément à l’art. 12D al. 3 REn, il y a en effet rénovation au sens de la loi lorsque des constructions ou des éléments de constructions sont touchés par des travaux qui modifient la performance énergétique du bâtiment. Sont notamment considérés comme travaux de rénovation les interventions portant sur l’isolation de l’enveloppe du bâtiment, telles que l’isolation de la toiture, des façades, des planchers, ainsi que le remplacement des fenêtres.
En l’occurrence, la variante B retenue par le recourant dans sa demande de subvention prévoit expressément des travaux d’isolation de la toiture. Il est donc manifeste qu’en procédant à la dépose complète de la toiture dès le mois de mai 2024, soit des travaux portant sur l’enveloppe du bâtiment, le recourant a amorcé les travaux de rénovation énergétique faisant l’objet de sa demande de subvention. Contrairement à ce qu’il affirme, les travaux de rénovation énergétiques ne sauraient se limiter aux seules interventions constructives, mais incluent également les opérations de démolition nécessaires au remplacement des éléments à rénover. S’agissant de la toiture, le retrait de l’isolation existante constitue une étape indispensable à sa réfection conforme aux exigences énergétiques.
Dans ces conditions, il ne saurait être soutenu que les interventions réalisées sur la toiture avant le dépôt de la demande étaient sans lien avec les travaux faisant l’objet de la subvention ou qu’ils étaient dépourvus de composante énergétique.
Partant, c’est à juste titre que l’OCEN a considéré que les travaux en lien avec la demande de subvention avaient débuté avant le dépôt de celle-ci, sans qu'il importe en l'espèce de déterminer précisément la date de ce dépôt, qu'il s'agisse de la demande effectuée en ligne le 10 juillet 2024 ou de la signature du formulaire ad hoc le 15 juillet 2024.
Il n'est pas non plus déterminant, à cet égard, que les travaux de charpenterie n’aient été adjugés que le 16 septembre 2024, dès lors que les interventions ayant une incidence sur la performance énergétique du bâtiment avaient déjà été entreprises bien avant le dépôt de la demande.
De même, le fait que le recourant comptait sur la subvention pour financer son projet est sans incidence juridique, étant rappelé que, conformément à la jurisprudence citée plus haut, celui qui entame les travaux avant le dépôt de sa demande de subvention donne l'indication qu'il est déterminé à procéder indépendamment de cette source de financement. Il faut manifestement tenir le même raisonnement dans le cas du recourant, le début du chantier ayant laissé la charpente à nu bien avant le dépôt de la demande de subvention : à ce stade, un renoncement au projet semblait inenvisageable et même un retour à la situation préexistante aurait impliqué la pose de matériel neuf et une main-d'œuvre pour un coût important. Les conditions générales applicables à l’octroi des subventions, mentionnées tant dans le barème de subventions en vigueur que sur le formulaire de requête de la subvention (rubrique « dépôt et traitement des dossiers »), stipulent par ailleurs clairement que la demande doit être déposée avant le début des travaux. Les subventions ne peuvent donc être accordées que pour des travaux futurs et non des travaux réalisés ou en cours. Il convient enfin de rappeler que la subvention ne constitue pas un droit pour celui qui la sollicite et relève du pouvoir discrétionnaire de l’autorité administrative (cf. art. 16 al. 2 REn).
Par conséquent, l’autorité intimée, qui applique strictement les conditions légales posées en matière de subvention, n’a nullement violé le droit, ni abusé ou mésusé de son pouvoir d’appréciation en refusant d’entrer en matière sur la demande de subvention au motif que les travaux avaient débuté avant le dépôt de celle-ci.
12. Le recourant fait valoir que la décision querellée aboutit à une situation injuste, voire arbitraire. Il invoque à cet égard l’existence d’une lacune improprement dite de la loi, qu’il conviendrait de combler par une interprétation en équité à la lumière de l’art. 26 LSu.
13. Lorsqu’il octroie des subventions, le canton est tenu de se conformer aux principes généraux régissant toute activité administrative (ATF 138 II 191 consid. 4.2.5 et les références), soit notamment le respect de la légalité, de l’égalité de traitement, de la proportionnalité et de la bonne foi, ainsi que l’interdiction de l’arbitraire (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_719/2020 du 30 juin 2021 consid. 5.1).
14. Une décision est arbitraire si elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté ou heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l’équité, non seulement dans ses motifs, mais également dans son résultat (ATF 148 IV 409 consid. 2.2; 143 I 321 consid. 6.1).
15. En l’occurrence, comme vu précédemment, le refus d’entrer en matière sur la demande de subvention repose sur une application correcte du droit en vigueur, en particulier l’art. 21 al. 5 REn, qui prévoit expressément que le dépôt de la demande doit intervenir avant le début des travaux faisant l’objet de la subvention. C’est le lieu de rappeler que le tribunal de céans a considéré que l’art. 21 al. 5 REn concrétise le principe, découlant de l’art. 20 LEn, selon lequel la subvention doit avoir un caractère incitatif.
Au surplus, l’analogie faite par le recourant avec l’art. 26 LSu n’a pas lieu d’être, en l’absence d’une lacune improprement dite. Comme déjà relevé précédemment, l’octroi d’une subvention ne constitue pas un droit pour celui qui la sollicite. De plus, celle-ci est soumise à des conditions, non remplies en l’espèce. Au demeurant, non seulement le droit fédéral est plus restrictif puisqu’il subordonne le début des travaux à l’obtention d’une décision d’octroi de subvention, mais le recourant n’avance aucun élément justifiant qu’il puisse être dérogé à la condition du dépôt préalable de la demande exigée par le législateur cantonal.
16. Il résulte de ce qui précède que l’autorité intimée qui dispose d’un pouvoir discrétionnaire en matière de subvention n’a pas outrepassé son large pouvoir d’appréciation ni n’est tombé dans l’arbitraire en prononçant la décision querellée.
17. En tous points mal fondé, le recours sera rejeté.
18. En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s’élevant à CHF 900.- ; il est couvert par l’avance de frais de même montant versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PREMIÈRE INSTANCE
1. déclare recevable le recours interjeté le 16 décembre 2024 par Monsieur A______ contre la décision du département du territoire du ______ 2024 ;
2. le rejette ;
3. met à la charge du recourant un émolument de CHF 900.-, lequel est couvert par l’avance de frais de même montant ;
4. dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
5. dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l’objet d’un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L’acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d’irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.
Siégeant : Olivier BINDSCHEDLER TORNARE, président, Damien BLANC et Carmelo STENDARDO, juges assesseurs.
Au nom du Tribunal :
Le président
Olivier BINDSCHEDLER TORNARE
Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.
| Genève, le |
| La greffière |