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Décisions | Chambre de surveillance

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C/2072/2020

DAS/264/2022 du 13.12.2022 sur DJP/85/2022 ( AJP ) , ADMIS

Normes : LaCC.3.al2; CC.518
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/2072/2020 DAS/264/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 13 DECEMBRE 2022

 

Appel (C/2072/2020) formé le 7 mars 2022 par Monsieur A______, domicile professionnel sis ______ [GE], comparant en personne.

* * * * *

Arrêt communiqué par plis recommandés du greffier
du 15 décembre 2022 à :

 

- Monsieur A______
______, ______ [GE]

- Madame B______
______, ______ [GE]

- Monsieur C______
Monsieur D______
c/o Me François CANONICA, avocat
Rue François-Bellot 2, 1206 Genève.

- JUSTICE DE PAIX.

 


EN FAIT

A.                     a) E______, né le ______ 1932, originaire de F______ (Zürich), est décédé le ______ 2020 à G______ (Genève).

Il a laissé pour héritiers sa veuve, B______, née le ______ 1964, et ses deux fils, C______ et D______, nés d'une précédente union, respectivement les ______ 1964 et ______ 1966.

b) Par testament du 11 février 2019, feu E______ a désigné A______, avocat, aux fonctions d’exécuteur testamentaire de sa succession. Il a réduit par codicille du 12 mars 2019 son épouse à sa réserve légale.

c) B______ a déposé le 1er septembre 2020 une plainte à la Justice de paix, sollicitant la destitution de A______ de sa fonction d’exécuteur testamentaire, en raison notamment de conflits d’intérêts et de sa partialité dans l’exercice de ses fonctions.

Elle lui reprochait notamment de ne pas payer ses factures personnelles, ni celles de ses enfants étudiants avec les liquidités disponibles de la succession, de ne pas procéder à la vente de la centaine de tableaux de la succession en vue d'obtenir des liquidités, de lui "réclamer" un loyer exorbitant pour la villa qu'elle occupait, d'avoir laissé les fils de son époux ouvrir le coffre-fort se trouvant sur le lieu de travail de celui-ci, de ne pas finaliser l’inventaire successoral, de vouloir la contraindre à quitter son poste de gérante de la [société civile immobilière] H______, propriétaire de deux biens immobiliers à I______ (France) et de ne pas délivrer le certificat d’héritiers, malgré ses diverses sollicitations.

d) Par décision du 18 décembre 2020, la Justice de paix a débouté B______ de toutes ses conclusions, fait instruction à A______, en sa qualité d’exécuteur testamentaire de la succession de E______, de collaborer avec elle et de renseigner équitablement tous les héritiers ainsi que de délivrer le certificat d’héritiers sollicité, réparti les frais exposés par le greffe et mis un émolument à charge de B______ et de A______. La Chambre de surveillance a déclaré irrecevable, faute de motivation suffisante, l’appel formé par B______ contre cette décision (DAS/6/2022 du 12 janvier 2022).

e) B______ a déposé en conciliation au Tribunal de première instance le 21 janvier 2021, une action en nullité des dispositions pour cause de mort des 11 février 2019 et 12 mars 2019 de feu E______.

f) Par décision du 8 février 2021 (DJP/77/2021), non contestée par les parties, la Justice de paix, considérant que le dépôt de cette action rendait la dévolution incertaine, a restreint les pouvoirs d'exécuteur testamentaire de A______, lequel devait se limiter aux actes de gestion conservatoire nécessaires dans le cadre de la succession de feu E______, et s'abstenir de tout acte de liquidation qui pourrait porter préjudice aux droits des opposants, jusqu'à accord entre les parties, droit jugé dans une éventuelle action en nullité ou en réduction ou, si aucune action n'était introduite, jusqu'à péremption desdites actions.

g) Par courrier du 7 avril 2021, la Justice de paix a informé A______ du fait qu’il était inutile de procéder aux démarches d’établissement d’un certificat d’héritiers, dans la mesure où une procédure en contestation des dispositions testamentaires était actuellement pendante par-devant le Tribunal civil.

h) Le 28 avril 2021, la Justice de paix a autorisé A______ à introduire une action au nom de la succession de feu E______ devant le Tribunal judiciaire de J______ (France), en vue de la désignation d’un mandataire chargé de convoquer une assemblée générale de la H______, ayant pour ordre du jour la révocation de B______ en tant que gérante de la société et la désignation d’un professionnel de l’immobilier en lieu et place.

i) Par courrier du 24 septembre 2021, B______ a sollicité de la Justice de paix la reconsidération de cette décision. Elle souhaitait demeurer gérante de la H______ et que cet actif lui soit attribué dans le cadre du partage. Elle s'est plainte du comportement de l'exécuteur testamentaire, considérant qu'il agissait de manière abusive, en voulant la remplacer dans sa fonction de gérante par un ami proche de C______, alors qu'elle gérait correctement la société, et qu'il refusait de lui attribuer celle-ci dans le cadre du partage.

j) Le 14 octobre 2021, C______ et D______ ont conclu au rejet de la requête en reconsidération, les démarches de l’exécuteur testamentaire étant, selon eux, conformes à sa mission. B______ empêchait, quant à elle, notamment, l'établissement de l'inventaire de la succession et l'estimation du bien immobilier qu'elle occupait.

k) Le 8 novembre 2021, A______ a conclu au rejet de la requête de reconsidération de B______. Il avait sollicité l'autorisation de la Justice de paix d'introduire action devant le tribunal compétent en France afin de préserver les intérêts de la H______, dès lors que B______, qui n'avait pas convoqué d'assemblée générale, ni présenté de rapports d'activités, ni de comptes sociaux depuis des années, ne remplissait pas ses devoirs de gérante et ne disposait pas des compétences suffisantes pour l’exercice de cette fonction, en sus du conflit d’intérêts manifeste résultant de l’action en nullité des dispositions testamentaires qu'elle avait déposée au Tribunal de première instance, tant à l'encontre de ses co-héritiers, que de lui-même. Il existait également un risque d'aliénation des biens immobiliers constituant l'actif principal de ladite H______, par sa gérante actuelle, qui se disait en manque de moyens financiers. Elle multipliait par ailleurs la saisine de la Justice de paix pour s'opposer aux actes d'exécution nécessaires au partage successoral, en se plaignant, sans raison, du comportement de l'exécuteur testamentaire.

l) Par courrier du 17 novembre 2021, reçu le 24 novembre 2021 par la Justice de paix, B______ a reproché à l’exécuteur testamentaire d’avoir, sans l'en informer ou la consulter préalablement, adressé un courrier à la Commission de surveillance des professionnels de la santé et des droits des patients (CSPSDP), considérant qu'il prenait "fait et cause" pour ses deux co-héritiers. Elle lui reprochait de l'ignorer lors des décisions importantes concernant la succession, le comportement de l'exécuteur testamentaire à son égard étant devenu insupportable.

Elle a joint à son courrier copie de la lettre du 22 septembre 2021 adressée par l'exécuteur testamentaire à la CSPSDP. Celui-ci remettait à ladite commission une copie du signalement effectué le 24 avril 2019 par le Dr K______ au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant, concernant feu E______. L'exécuteur testamentaire prétendait que l'état de santé de feu E______ présenté par ledit médecin (trouble neurologique de type Parkinson affectant ses capacités cognitives) ne correspondait pas à la réalité. Il en voulait pour preuve les certificats médicaux établis par le médecin traitant et la neurologue de feu E______, qui attestaient de sa capacité de discernement. Selon lui, B______ avait "probablement largement influencé" le Dr K______ dans l'établissement de son diagnostic. Le signalement du médecin, établi sur les seuls dires de B______ et à l'appui d'une demande de mise sous curatelle de ce dernier "afin de protéger ses biens matériels", était intervenu quelques semaines après que feu E______ ait réduit son épouse à sa réserve légale, ce qui laissait perplexe. Il souhaitait porter à la connaissance de ladite commission le comportement du Dr K______.

m) Par plis du 30 novembre 2021, la Justice de paix a adressé aux parties les échanges d'écritures reçus, dont le courrier du 17 novembre 2021 de B______, et les a informées que la cause était gardée à juger.

B.                     Par décision du 23 février 2022 (DJP/85/2022), la Justice de paix a rappelé A______ à ses devoirs d’impartialité et de renseigner équitablement les héritiers (ch. 1 du dispositif), adressé un avertissement à A______ (ch. 2), débouté B______ de toutes autres conclusions (ch. 3) et mis les frais exposés par le greffe et un émolument de 1'200 fr., à raison d’un tiers à charge de B______ et de deux tiers à charge de A______ (ch. 4).

En substance, la Justice de paix a rejeté la requête en reconsidération formée par B______, relevant que l’exécuteur testamentaire, en sollicitant l’autorisation d’ouvrir action au nom de la succession devant le Tribunal de J______ (France), poursuivait un but précis, soit celui de demander la désignation d’un mandataire chargé de convoquer une assemblée générale des associés de la H______ ayant pour ordre du jour la révocation de B______ en tant que gérante de la société et la désignation d’un professionnel de l’immobilier, précisant que cette démarche s’inscrivait dans une logique soucieuse d’une gestion neutre et professionnelle de la H______, propice à la bonne administration du patrimoine successoral et qu’aucun fait nouveau ne permettait de remettre en question l’opportunité de l’autorisation délivrée le 28 avril 2021. Elle a également considéré irrecevables les conclusions en attribution de biens successoraux de la concernée et l'a ainsi déboutée de toutes ses conclusions.

Elle a ensuite estimé que A______ avait outrepassé ses pouvoirs d’exécuteur testamentaire en dénonçant à la CSPSDP le signalement effectué par le Dr K______, dès lors qu’il ne s’agissait pas d’un acte de gestion conservatoire nécessaire dans le cadre de la succession. Au vu des nombreux différends ayant eu lieu par le passé à ce sujet, il pouvait raisonnablement s’attendre à une réaction de la part de B______, de sorte qu’il lui incombait de l’en informer préalablement ou d’en requérir l’autorisation auprès de la Justice de paix. En conséquence, il y avait lieu de rappeler l’exécuteur testamentaire à ses devoirs d’impartialité et de renseigner équitablement les héritiers, et de lui adresser un avertissement, lequel était en l’état suffisant pour préserver les droits des héritiers, étant relevé que toute plainte ultérieure pourrait donner lieu à la destitution de celui-ci, si elle s’avérait fondée.

C.                     a) Par acte du 7 mars 2022, A______ a formé appel contre cette décision, sollicitant l’annulation des chiffres 1, 2 et 4 de son dispositif, en tant que ce dernier met une partie des frais à sa charge. Cela fait, il a sollicité le renvoi de la cause à la Justice de paix pour nouvelle décision après administration contradictoire des preuves dans le sens des considérants, et conclu au déboutement de B______ de toutes ses conclusions, sous suite de frais et dépens.

Subsidiairement, il a conclu au constat par la Cour de ce qu’il n’avait pas outrepassé les pouvoirs qui lui étaient accordés en tant qu’exécuteur testamentaire, à l’annulation de l’avertissement qui lui a été adressé et au déboutement de B______ de toutes ses conclusions, sous suite de frais et dépens.

En substance, il se plaint d’une violation de son droit d’être entendu, la Justice de paix ne lui ayant pas donné la possibilité de se déterminer sur le courrier du 17 novembre 2021 de B______, lequel lui a été transmis en même temps que le pli indiquant que la cause était gardée à juger.

Au surplus, il expose que c'est dans le cadre de la procédure civile en annulation des dispositions testamentaires intentée par B______ à l'encontre de ses cohéritiers et de lui-même qu'il a adressé le courrier litigieux à la CSPSDP. B______ fonde son action civile sur le fait que feu E______ était atteint de la maladie de Parkinson, qui lui aurait provoqué des troubles cognitifs, de sorte que la rédaction de ses dispositions pour cause de mort ne serait pas le fruit de sa libre volonté. L'offre de preuve principale de B______ dans la procédure civile qu'elle a initiée consistant dans le signalement du Dr K______ au Tribunal de protection du 24 avril 2019, il considère qu'il était de son devoir, en sa qualité de partie à la procédure, de soumettre les faits portés à sa connaissance, en relation avec ledit signalement, à la CSPSDP. Cette communication n'entre cependant pas dans le cadre des actes de gestion successorale soumis à autorisation préalable de la Justice de paix, de sorte qu'il n'avait pas à solliciter l'autorisation de celle-ci pour effectuer cette communication. Quant à B______, elle reconnaît dans son courrier du 17 novembre 2021 avoir été informée de la démarche. Tous les héritiers l'ont été dans le cadre du mémoire-réponse qu'il a adressé au Tribunal de première instance le 4 octobre 2021. Pour le surplus, la Justice de paix n'expose pas en quoi il aurait adopté un comportement partial et aurait renseigné les héritiers de manière inéquitable. Au contraire, toutes les informations transmises aux héritiers l'ont été de manière coordonnée. C'est donc à tort que la Justice de paix a retenu qu'il avait outrepassé ses pouvoirs d'exécuteur testamentaire. En tout état, l'avertissement prononcé est excessif, dès lors qu'aucun manque de diligence de sa part n'a été relevé, tant dans sa décision du 18 décembre 2020, que dans la décision contestée du 23 février 2022, qui déboute B______ de ses conclusions concernant sa plainte du 24 septembre 2021. Il a au contraire toujours rempli sa fonction avec diligence. Il conteste par ailleurs les frais mis à sa charge, B______ ayant été intégralement déboutée de sa demande de reconsidération et de sa plainte du 24 septembre 2021.

b) C______ et D______ s'en sont rapportés à l’appréciation de la Cour.

c) B______ a conclu à la confirmation de la décision entreprise. S'agissant du courrier litigieux, elle relève que l'exécuteur testamentaire savait qu'elle était opposée à la dénonciation du Dr K______, lequel est un témoin important dans le cadre du procès civil qu'elle a intenté et qu'il a ainsi voulu "nuire" à ce procès. Elle n'avait pas été consultée avant l'envoi de ce courrier à la CSPSDP. Elle considère que l'exécuteur testamentaire ne gère pas la succession de façon équitable et impartiale, de sorte que l'avertissement qui lui a été adressé est parfaitement justifié.

d) C______ et D______ ont adressé à la Chambre de surveillance l’ordonnance de condamnation du 30 mars 2022 rendue par le Ministère public à l’encontre de B______, la déclarant coupable de vol de tableaux appartenant à feu son époux.

e) A______ a répliqué le 8 avril 2022, persistant dans ses conclusions.

f) B______ a dupliqué le 28 avril 2022 indiquant avoir formé opposition à cette ordonnance pénale et persistant dans ses conclusions.

EN DROIT

1.                       1.1 Les décisions du juge de paix, qui relèvent de la juridiction gracieuse et sont soumises à la procédure sommaire (art. 248 let e CPC), sont susceptibles d'un appel, dans le délai de dix jours (art. 314 al. 1 CPC) à la Chambre civile de la Cour de justice (art. 120 al. 2 LOJ), si la valeur litigieuse est égale ou supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

Les causes successorales sont de nature pécuniaire (arrêt du Tribunal fédéral 5D_133/2010 consid. 1.1).

1.2 En l'espèce, l'appel a été interjeté dans les délai et forme prévus par la loi, par l'exécuteur testamentaire dont la qualité pour recourir est admise puisque la décision querellée le concerne personnellement dans le cadre de sa fonction, dans une succession comprenant divers actifs immobiliers et mobiliers, dont la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr.

Il est en conséquence recevable.

1.3 La Cour revoir la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

2.                       2.1.1 Le Juge de paix est l'autorité compétente pour exercer la surveillance des exécuteurs testamentaires, administrateurs d'office, liquidateurs officiels et représentants de la communauté héréditaire (art. 3 al. 2 LaCC).

2.1.2 Selon l'art. 518 CC, si le disposant n'en a ordonné autrement, les exécuteurs testamentaires ont les droits et les devoirs de l'administrateur officiel d'une succession (al. 1). Ils sont chargés de faire respecter la volonté du défunt, notamment de gérer la succession, de payer les dettes, d'acquitter les legs et de procéder au partage conformément aux ordres du disposant ou suivant la loi (al. 2).

L'exécuteur testamentaire est soumis à la surveillance de l'autorité qui a le pouvoir d'ordonner l'exécution ou d'interdire un acte déterminé et de prendre des mesures disciplinaires dont la plus grave est la destitution de l'exécuteur testamentaire pour cause d'incapacité ou de violation grossière de ses devoirs (arrêt du TF 5A_414/2012 c.4.1). L'autorité de surveillance vérifie les mesures prises ou projetées par l'exécuteur testamentaire; cependant les questions de droit matériel demeurent du ressort des tribunaux ordinaires (ATF 90 II 376 c.3), en sorte qu'elle n'est pas compétente pour se prononcer sur une action en révocation de l'exécuteur testamentaire à cause d'une situation double créée par le testateur - ou du moins connue de lui - et d'un grave conflit d'intérêts qui en résulte. Une telle révocation ne peut être obtenue que par une action en nullité de la disposition à cause de mort instituant l'exécuteur testamentaire (art. 519 et 520 CC) à savoir une contestation de nature civile ordinaire qui doit être tranchée au cours d'une procédure contradictoire et dans laquelle l'exécuteur testamentaire a qualité de partie (ATF 90 II 376 c.3; arrêt du TF 5A_ 414/2012 cité).

Si l'existence d'un conflit d'intérêts créé ou connu du testateur (p. ex. legs à l'exécuteur testamentaire) ne peut être invoquée dans un but de révocation par devant l'autorité de surveillance, les motifs liés à la violation des devoirs de l'exécuteur testamentaire et l'existence de conflits d'intérêts apparus postérieurement au décès du testateur sont en principe recevables dans le cadre de la surveillance de l'autorité de surveillance (arrêt du TF 5A_414/2012 cité).

2.1.3 Le droit d'être entendu est une garantie de caractère formel, dont la violation entraîne en principe l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours au fond (ATF 135 I 279 consid. 2.6.1, JdT 2010 I 255). Ancré à l'art. 29 al. 2 Cst. féd., il garantit au justiciable le droit de s'exprimer avant qu'une décision soit prise à son détriment, d'avoir accès au dossier, de prendre connaissance de toute argumentation présentée au tribunal et de se déterminer à son propos dans la mesure où il l'estime nécessaire (ATF 139 I 189 consid. 3.2). Il ne confère en revanche pas le droit d'être entendu oralement (arrêt du Tribunal fédéral 5A_225/2011 du 9 août 2011 consid. 3.2) et ne s'oppose pas à ce que l'autorité mette un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de forger sa conviction, quand bien même le procès est soumis à la maxime inquisitoire (arrêt du Tribunal fédéral 5A_11/2014 du 3 juillet 2014 consid. 2.1).

2.2 En l'espèce, la procédure instruite par la Justice de paix portait sur la demande de reconsidération formée par B______ de la décision du 28 avril 2021 autorisant l'exécuteur testamentaire à déposer une action devant le Tribunal de J______ (France) en vue de la désignation d’un mandataire chargé de convoquer une assemblée générale de la H______, ayant pour ordre du jour la révocation de B______ en tant que gérante de la société et la désignation d’un professionnel de l’immobilier en lieu et place, ainsi que sur la plainte du même jour formée par B______, laquelle se plaignait précisément du fait que l'exécuteur testamentaire voulait la destituer de son rôle de gérante de la H______, pour la remplacer par un ami proche de C______ et du fait qu'il ne lui avait pas "octroyé ladite H______" sur sa part d'héritage. L'appelant a eu la possibilité de s'exprimer sur ces deux points, et notamment sur les reproches formulés à son encontre par B______ dans ses écritures du 8 novembre 2021. Dans les considérants de sa décision, la Justice de paix a traité de cette plainte et a retenu que la démarche de l'exécuteur testamentaire pour ouvrir action devant le tribunal français compétent s'inscrivait dans une logique soucieuse d'une gestion neutre et professionnelle de la H______, propice à la bonne administration du patrimoine successoral. Ainsi, elle a estimé qu'aucun reproche ne pouvait être formulé à l'exécuteur testamentaire dans l'exécution de son mandat, sur le sujet qui interpellait B______, en rappelant à celle-ci que la Justice de paix n'était pas compétente pour lui attribuer un bien précis de la succession, pas plus du reste que l'exécuteur testamentaire, ce que cette dernière n'a pas remis en question, n'ayant pas formé appel contre la décision de la Justice de paix et le raisonnement tenu à ces sujets.

Dans un courrier du 17 novembre 2021, B______ a formulé un nouveau reproche à l'encontre de l'exécuteur testamentaire, soit celui d'avoir adressé à la CSPSDP un signalement effectué en 2019 au Tribunal de protection par le Dr K______, fait nouveau, sans rapport avec le contenu de sa plainte initiale, si ce n'est le manque d'impartialité qu'elle ne cesse de reprocher à l'exécuteur testamentaire. Or, cette nouvelle plainte n'a pas été transmise à l'exécuteur testamentaire pour détermination. Ainsi, la Justice de paix ne pouvait, en se fondant sur le seul courrier de la plaignante, rappeler l'exécuteur testamentaire à ses devoirs d'impartialité et de renseigner équitablement les héritiers, et lui adresser un avertissement, sans violer son droit d'être entendu, alors même qu'il était personnellement concerné par les reproches formulés. Les chiffres 1, 2 et 3 du dispositif de la décision entreprise doivent ainsi être annulés.

Ce nonobstant, il n'est pas nécessaire de renvoyer la cause à la Justice de paix, dès lors que l'envoi du courrier concerné, dont l'exécuteur testamentaire explique la nécessité par sa position de partie défenderesse devant le Tribunal de première instance, échappe au contrôle de la Justice de paix, dès lors qu'il n'a pas été réalisé dans le cadre du mandat de l'intéressé, qui se limite à la conservation et à la gestion du patrimoine successoral. Cependant, compte tenu de sa position procédurale dans le cadre de l'action en nullité de testament, laquelle vise sa fonction d'exécuteur testamentaire, la question de la nomination d'un administrateur d'office de la succession pourrait se poser, jusqu'à droit connu sur la qualité d'exécuteur testamentaire de l'intéressé, ce que la Justice de paix peut, voire doit, examiner d'office, étant précisé que la présence d'un exécuteur testamentaire n'empêche pas la désignation d'un administrateur d'office de la succession.

3.                       La Justice de paix a arrêté, dans sa décision, les frais exposés par le greffe et un émolument de 1'200 fr., qu'elle a mis à raison d'un tiers à la charge de B______ et de deux-tiers à la charge de A______. Il ne se justifie aucunement, au vu du résultat de la procédure de reconsidération et de plainte, de mettre deux-tiers de ce montant à la charge de A______, de sorte que celui-ci sera exonéré du paiement de la somme mise à sa charge.

La totalité des frais de la Justice de paix, lesquels ne sont pas contestés dans leur montant, seront mis à la charge de B______ qui succombe entièrement (art. 106 al. 1 CPC).

Le chiffre 4 du dispositif sera ainsi annulé et reformulé entièrement pour plus de clarté.

4.                       Compte tenu du résultat de la procédure d'appel, l'émolument de décision, arrêté à 500 fr., sera mis à la charge de B______, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC), et compensé avec l'avance de même montant, qui reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC), B______ étant condamnée à rembourser à A______ la somme de 500 fr. avancée par ce dernier.

B______ sera également condamnée au versement de dépens en faveur de l'appelant à hauteur de 1'000 fr. (art. 86 RTFMC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l’appel formé le 7 mars 2022 par A______ contre la décision DJP/85/2022 rendue par la Justice de paix le 23 février 2022 dans la cause C/2072/2020.

Au fond :

L'admet.

Annule les chiffres 1, 2, 3 et 4 du dispositif de cette décision.

Cela fait :

Dit que les frais exposés par le greffe de la Justice de paix à hauteur de 1'200 fr. sont mis à la charge de B______.

Condamne B______ à verser la somme de 1'200 fr. aux Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Sur les frais d'appel :

Met à la charge de B______ un émolument de décision de 500 fr, lequel est compensé avec l'avance de frais de même montant effectuée, laquelle reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne B______ à restituer à A______ la somme de 500 fr.

Condamne B______ à des dépens en faveur de A______ à hauteur de 1'000 fr.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.