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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/6922/2023

ACJC/616/2025 du 12.05.2025 sur JTBL/674/2024 ( OBL ) , RENVOYE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/6922/2023 ACJC/616/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 12 MAI 2025

 

Entre

FONDATION A______, sise ______ [GE], appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 18 juin 2024, représentée par Me Pierre OCHSNER, avocat, OA Legal SA, place de Longemalle 1, 1204 Genève,

et

Madame B______, domiciliée ______ [GE], intimée, représentée par Me Razi ABDERRAHIM, avocat, Rive Avocats, rue François-Versonnex 7, 1207 Genève.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTBL/674/2024 du 18 juin 2024, le Tribunal des baux et loyers a déclaré inefficace le congé notifié le 16 novembre 2022 à B______ pour le 31 décembre 2022 concernant l'appartement de 4 pièces situé au 5ème étage de l'immeuble sis no. ______, rue 1______ à Genève (ch. 1 du dispositif), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 2) et dit que la procédure était gratuite (ch. 3).

B. a. Par acte expédié le 11 juillet 2024 à la Cour de justice, la FONDATION A______ a formé appel contre ce jugement. Elle a conclu à son annulation et, cela fait, à ce que la validité de la résiliation notifiée le 16 novembre 2022 soit constatée, à ce que B______ soit condamnée à évacuer immédiatement de sa personne, de ses biens et de tout tiers, l'appartement de 4 pièces situé au 5ème étage de l'immeuble sis no. ______, rue 1______ à Genève, à ce que l'exécution de l'évacuation soit prononcée, à ce qu'elle soit autorisée à faire appel à un huissier judiciaire et à ce que B______ soit déboutée de toutes autres conclusions, le tout avec suite de dépens.

b. Dans sa réponse du 12 septembre 2024, B______ a conclu au rejet de l'appel, subsidiairement à ce qu'un délai raisonnable d'une année lui soit accordé afin de trouver un logement convenable.

c. La FONDATION A______ a répliqué, persistant dans ses conclusions.

d. Les parties ont été informées par la Cour le 9 décembre 2024 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure:

a. La FONDATION A______ (ci-après : A______), bailleresse, et B______, locataire, sont liées par un contrat de bail portant sur un appartement de 4 pièces situé au 5ème étage de l'immeuble sis no. ______, rue 1______ à Genève.

b. Par jugement du 2 mars 2015 rendu dans la cause opposant B______ à la SOCIETE IMMOBILIERE C______ SA, qui était à l'époque bailleresse de l'appartement précité, le Tribunal des baux et loyers a notamment donné acte à B______ de ce qu'elle acceptait le principe d'un état des lieux annuel, avec pour première échéance le 31 mars 2016, la fixation de cet état des lieux devant impérativement passer par l'intermédiaire de son conseil, lequel était alors Me D______.

c. Le 6 décembre 2016, Me D______ s'est adressé à E______, alors gérante de l'immeuble, pour se plaindre de ce qu'une visite avait eu lieu dans l'appartement de B______ sans qu'il n'ait été prévenu, contrairement à ce qui avait été convenu en 2015. Il précisait que son mandat et l'élection de domicile en son étude couraient toujours et qu'il n'avait pas l'intention de révoquer son mandat.

d. Dès le 1er janvier 2022, la F______ (ci-après : F______) a repris la gérance de l'immeuble.

e. Le 4 avril 2022, la F______ a adressé un courriel à Me D______ en vue d'organiser un rendez-vous avec B______ pour procéder à un état des lieux, conformément au jugement d'accord du 2 mars 2015; trois dates étaient proposées.

Demeurant sans nouvelle de Me D______, la F______ a relancé l'intéressé le
26 avril 2022 puis le 22 septembre 2022, lui rappelant, d'une part, qu'elle ne pouvait pas contacter directement B______ et, d'autre part, que celle-ci devait permettre l'accès à son logement.

f. Face au silence de Me D______, la F______ lui a adressé le 12 octobre 2022 un courrier recommandé par lequel elle mettait en demeure B______ de contacter la régie dans un délai de trente jours afin de pouvoir organiser la visite de son appartement. Il était précisé qu'à défaut, le bail serait résilié.

Ce courrier a été adressé le même jour en copie à B______, à qui il était demandé de prendre connaissance du courrier adressé à son conseil et "d'agir en conséquence".

Le 13 octobre 2022, Me D______ a répondu ne plus être constitué pour les intérêts de B______ et que l'élection de domicile était révoquée. Il demandait à la F______ de contacter directement la précitée.

g. Par avis de résiliation adressé à B______ le 16 novembre 2022, la A______ a résilié le contrat de bail pour le 31 décembre 2022, se prévalant de l'art. 257f CO.

h. Par requête du 14 août 2023, la A______ a déposé devant le Tribunal, après l'échec de la tentative de conciliation, une requête en évacuation de la locataire, sollicitant également du Tribunal la constatation de la validité et de l'efficacité de la résiliation ainsi que l'évacuation directe de la locataire.

i. B______ n'a pas déposé de réponse écrite à la demande.

j. Le 8 décembre 2023, dans le cadre des premières plaidoiries, B______, par la voix de son conseil, a conclu à ce que soit constatée la nullité de l'art. 7 du contrat de bail (selon lequel elle acceptait le principe d'un état des lieux annuel dont la fixation devait impérativement passer par l'intermédiaire de son conseil Me D______) et l'inefficacité de la résiliation et donc, au rejet de la requête. Subsidiairement, elle a conclu à ce qu'un délai raisonnable lui soit octroyé pour trouver un logement. Selon elle, son ex-mari était responsable du mauvais état de l'appartement.

G______, représentant la A______, a affirmé que les visites annuelles de l'appartement n'avaient pas pu avoir lieu car B______ ne répondait ni au téléphone ni aux courriels ni lorsque la régie se déplaçait. Depuis 2015, il y avait peut-être eu deux visites, soit un nombre inférieur à celui qui avait été convenu. Celles-ci avaient permis de constater que l'appartement était dans un état déplorable, à savoir qu'il "sortait complètement du cadre normal d'un appartement".

B______ a exposé qu'elle vivait avec trois de ses enfants, sa fille de
18 ans et demi, son fils de 15 ans et demi et sa fille de 14 ans. Il y avait eu plusieurs visites de l'appartement. Elle vivait une situation très difficile depuis deux ans car sa fille de 21 ans s'était fait violer. De plus, son père était décédé un an auparavant et elle était tombée gravement malade. Sa situation était très pénible et elle avait dû gérer toute seule la situation de sa fille aînée, qui avait tenté de se suicider. Enfin, B______ a déclaré que son appartement était dans un bon état et que son assistante sociale avait fait une demande pour lui trouver un autre logement.

G______ et B______ se sont mis d'accord pour organiser une visite de l'appartement dans les meilleurs délais et ont demandé à être reconvoqués dans un délai de trois mois.

k. Lors de l'audience du 1er mars 2024 devant le Tribunal, les parties ont indiqué qu'une visite de l'appartement avait pu avoir lieu. Le conseil de la A______ a précisé qu'il n'était pas présent mais qu'il lui avait été rapporté que l'appartement était dans un état déplorable, qu'il y avait notamment des trous, que les murs étaient tachés et que les plinthes étaient tachées et arrachées. La A______ a persisté dans ses conclusions.

B______ a affirmé que la régie était informée des trous depuis de nombreuses années car ceux-ci faisaient suite à des interventions d'ouvriers en lien avec des dégâts d'eau. Elle a persisté dans ses conclusions, demandant subsidiairement qu'un délai d'un an minimum lui soit octroyé pour trouver un logement.

Le Tribunal a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience.

l. Dans son jugement du 18 juin 2024, le Tribunal a considéré que la bailleresse n'avait pas mis la locataire en demeure de respecter son devoir de diligence. En effet, lorsque la gérance de l'immeuble avait nouvellement été confiée à la F______, celle-ci avait cherché à faire l'état des lieux annuel de l'appartement tel que convenu par jugement du 2 mars 2015, en passant par Me D______, qui était conseil de la locataire au moment du jugement. Il ne ressortait pas de la procédure – et la bailleresse ne l'avait pas allégué – qu'entre la réponse du conseil de la locataire du 13 octobre 2022 et la résiliation du 16 novembre 2022, la bailleresse aurait mis en demeure la locataire d'user de l'appartement avec diligence, en lui demandant par exemple de cesser de faire du bruit ou d'importuner ses voisins. Quant au courrier du 12 octobre 2022, s'il contenait une mise en demeure, celle-ci ne consistait pas en une mise en demeure d'user avec diligence de la chose louée, mais uniquement en une demande de contacter la régie pour effectuer un état des lieux. Or, le simple fait de ne pas avoir contacté la F______ dans le délai requis ne pouvait pas être assimilé à une violation par la locataire de son devoir d'user avec diligence de la chose louée. Il en allait de même du fait que le conseil de la locataire n'avait pas été diligent en ne réagissant pas durant plusieurs mois aux sollicitations de la régie.

Il ne pouvait dès lors pas être inféré du simple fait que la locataire n'avait pas réagi dans le délai de trente jours qui lui avait été imparti le 12 octobre 2022 en vue d'un état des lieux qu'elle aurait violé son devoir de diligence à un point tel que le maintien du bail serait devenu insupportable pour la bailleresse. Le congé extraordinaire notifié le 16 novembre 2022 était donc inefficace et la bailleresse devait être déboutée de ses conclusions en évacuation.

EN DROIT

1. 1.1 La voie de l'appel est ouverte contre les décisions d'évacuation, lorsque la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC), alors que la voie du recours est ouverte contre les décisions du Tribunal de l'exécution (art. 309 let. a CPC;
art. 319 let. a CPC).

Pour calculer la valeur litigieuse dans les actions en expulsion initiées selon la procédure de l'art. 257 CPC, il faut distinguer les cas où seule est litigieuse l'expulsion en tant que telle, de ceux où la résiliation l'est également à titre de question préjudicielle. S'il ne s'agit que de la question de l'expulsion, l'intérêt économique des parties réside dans la valeur que représente l'usage des locaux pendant la période de prolongation résultant de la procédure sommaire elle-même, laquelle est estimée à six mois. Si en revanche la résiliation des rapports de bail est également contestée, la valeur litigieuse est égale au loyer pour la période minimale pendant laquelle le contrat subsiste si la résiliation n'est pas valable, période qui s'étend jusqu'à la date pour laquelle une nouvelle résiliation peut être signifiée; comme il faut prendre en considération la période de protection de trois ans prévue à l'art. 271a al. 1 let. e CO, la valeur litigieuse correspondra en principe au montant du loyer brut (charges et frais accessoires compris) pendant trois ans
(ATF 
144 III 346 consid. 1.2.1 et 1.2.2.3 - JdT 2019 II 235 pp. 236 et 239; arrêt du Tribunal fédéral 4A_376/2021 du 7 janvier 2022 consid.1).

1.2 En l'espèce, la résiliation du bail est litigieuse. Le montant du loyer annuel du logement, charges comprises, n'a pas été allégué. Il est cependant vraisemblable, au vu de l'appartement loué, qui comporte quatre pièces, que trois années de loyer représentent une somme supérieure à 10'000 fr.

La voie de l'appel est donc ouverte.

1.3 L'appel a été interjeté dans le délai et suivant la forme prescrits par la loi (art. 130, 131, 311 al. 1 CPC). Il est ainsi recevable.

1.4 L'appel peut être formé pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) et constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). L'instance d'appel dispose ainsi d'un plein pouvoir d'examen de la cause en fait et en droit; en particulier, le juge d'appel contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).

2. L'appelante conteste que les conditions de résiliation de l'art. 257f CO ne seraient pas remplies.

2.1 Aux termes de l'art. 257f al. 3 CO, lorsque le maintien du bail est devenu insupportable pour le bailleur ou les personnes habitant la maison parce que le locataire, nonobstant une protestation écrite du bailleur, persiste à enfreindre son devoir de diligence ou à manquer d'égards envers les voisins, le bailleur peut résilier le contrat avec effet immédiat; les baux d'habitation et de locaux commerciaux peuvent être résiliés moyennant un délai de congé minimum de 30 jours pour la fin d'un mois.

La résiliation prévue par l'art. 257f al. 3 CO suppose la réalisation des cinq conditions cumulatives suivantes: (1) une violation du devoir de diligence incombant au locataire, (2) un avertissement écrit préalable du bailleur, (3) la persistance du locataire à ne pas respecter son devoir en relation avec le manquement évoqué par le bailleur dans sa protestation, (4) le caractère insupportable du maintien du contrat pour le bailleur et, enfin, (5) le respect d'un préavis de trente jours pour la fin d'un mois (arrêts du Tribunal fédéral 4A_284/2024 du 17 décembre 2024 consid. 4.2; 4A_468/2020 du 9 février 2021 consid. 4.1; 4A_457/2013 du 4 février 2014 consid. 2).

Le comportement du locataire (condition n° 1) doit constituer une violation de son devoir de diligence ou un usage de la chose en violation des stipulations du contrat (ATF 132 III 109, consid. 5 p. 113; 123 III 124, consid. 2a p. 126). Le manquement reproché au locataire doit atteindre une certaine gravité (ATF 134 III 300,
consid. 3.1 p. 304).

Cette violation peut consister dans le refus de procéder aux opérations préalables à des réparations que le locataire doit tolérer conformément à l'art. 257h al. 1 CO (arrêt du Tribunal fédéral 4C.306/2003 du 20 février 2004 consid. 3.3
in SJ 2004 I 439) ou dans le refus d'autoriser l'inspection de la chose louée dans les cas prévus à l'art. 257h al. 2 CO (arrêt du Tribunal fédéral 4A_286/2015 du
7 décembre 2015, consid. 3.1 et les références citées).

L'application de l'art. 257f al. 3 CO suppose que la violation par le locataire de son devoir de diligence rende le maintien du contrat insupportable pour le bailleur (condition n° 4). Comme la résiliation doit respecter les principes de la proportionnalité et de la subsidiarité, il faut en effet que le maintien du bail soit insupportable pour le bailleur. Cette question doit être résolue à la lumière de toutes les circonstances de l'espèce, antérieures à la résiliation du bail. Elle relève du pouvoir d'appréciation du juge (art. 4 CC).

2.2 En l'espèce, l'appelante a tenté à plusieurs reprises en 2022 (les 4 et 26 avril,
22 septembre et 12 octobre) de planifier une visite de l'appartement de l'intimée avec l'avocat dont il avait été convenu qu'il devait organiser les états des lieux prévus par le jugement du 2 mars 2015. Ledit avocat n'a pas donné suite à ces demandes puis il a informé l'appelante de ce qu'il n'était plus constitué pour la locataire, après l'envoi de la mise en demeure du 12 octobre 2022 seulement. Cette dernière lui a donc été valablement adressée, conformément à ce que le jugement précité prévoyait. L'intimée n'est donc pas fondée à se prévaloir de ce que l'art. 7 du contrat ne serait plus applicable du fait que l'avocat n'était plus constitué. L'intimée allègue par ailleurs nouvellement qu'elle n'a pas été informée des courriers visant à organiser la visite de l'appartement, ce qui est irrecevable. L'allégation n'est en tout état de cause pas décisive puisqu'il avait été convenu que l'appelante devrait contacter l'avocat de la locataire; un éventuel manquement de la part de ce dernier à informer la locataire de la demande de l'appelante ou d'informer l'appelante qu'il ne serait plus constitué pour le compte de l'intimée ne peut être opposé à l'appelante. L'intimée admet en outre qu'une copie du courrier du 12 octobre 2022 lui a été remise, et elle ne pouvait pas ignorer que la demande de visite s'inscrivait dans le cadre de ce qui avait été convenu en 2015 et avait donné lieu au jugement du
2 mars 2015. En ne donnant pas suite aux demandes de l'appelante, la locataire a donc violé son devoir de diligence résultant de l'art. 257h al. 2 CO.

L'intimée a invoqué, pour expliquer son absence de réponse aux sollicitations de l'appelante, des difficultés personnelles résultant du viol de sa fille, du décès de son père et du fait qu'elle serait tombée gravement malade, sans plus de détail permettant d'apprécier l'impact sur elle de ces circonstances. Celles-ci sont apparues après 2015, de sorte que même avant qu'elle rencontre les difficultés invoquées, l'appelante avait de la peine à pouvoir visiter l'appartement et avait dû intenter une action judiciaire. En outre, il n'apparaît pas qu'après la survenance des circonstances mentionnées, l'intimée aurait omis de s'occuper de ses affaires administratives, de manière générale ou plus particulièrement en lien avec le bail. Il n'a notamment pas été allégué qu'elle aurait négligé de payer son loyer ou qu'elle le paierait avec retard, ni même qu'elle aurait omis de donner suite à d'autres sollicitations. Il ne peut donc être retenu que l'absence de réaction de l'intimée aux demandes de visite de l'appartement présentée par l'appelante avait pour cause les difficultés personnelles qu'elle a alléguées. Ces difficultés ne seraient pas, en tout état de cause, opposables à l'appelante.

Les visites annuelles de l'appartement avaient été requises par l'appelante au vu de l'état "déplorable" de celui-ci, qui sortait "complétement du cadre normal". Il doit donc être considéré qu'en l'absence de possibilité pour l'appelante de s'assurer régulièrement de l'état de l'appartement, le maintien du contrat est intolérable, au vu du risque de dégradation supplémentaire. L'intimée semble contester devant la Cour les allégations de l'appelante selon lesquelles l'appartement serait dans un état déplorable, ce qu'elle n'avait toutefois pas fait devant le Tribunal, alléguant au contraire que son ex-mari serait responsable du mauvais état de l'appartement, respectivement des ouvriers qui seraient intervenus à la suite de dégâts d'eau. L'intimée ne peut donc se prévaloir du fait que l'appelante n'aurait pas prouvé ses allégations puisqu'elle a implicitement admis que l'appartement avait subi des dégâts et que seuls les faits contestés doivent être prouvés (art. 150 al. 1 CPC).

Quelques visites de l'appartement ont certes été effectuées après le jugement du
2 mars 2015, puis à la suite de l'audience tenue le 8 décembre 2023 dans le cadre de la présente procédure. Il ne peut cependant être exigé de l'appelante qu'elle doive intenter une procédure judiciaire chaque fois qu'elle souhaite pouvoir accéder à l'appartement loué.

Pour le surplus, l'avis selon lequel l'intimée devait contacter l'appelante dans un délai de 30 jours, faute de quoi le bail serait résilié, constitue une mise en demeure valable, tendant à ce que l'intimée respecte son obligation contractuelle découlant de l'art. 257h al. 2 CO; l'intimée n'a pas contesté l'avoir reçu. Contrairement à ce que l'intimée soutient, le courrier du 12 octobre 2022 met bien cette dernière en demeure de contacter l'appelante afin de pouvoir organiser la visite de son appartement. L'intimée n'a par ailleurs pas soutenu que la résiliation du bail lui aurait été adressée avant l'échéance du délai de 30 jours.

Dès lors, en définitive, au vu de ce qui précède, il doit être considéré que les conditions d'application de l'art. 257f al. 3 CO sont remplies, contrairement à ce que le Tribunal a retenu. Le jugement attaqué sera donc annulé en tant qu'il a déclaré inefficace le congé notifié à l'intimée le 16 novembre 2022 pour le
31 décembre 2022.

3. Le congé étant valable, l'intimée ne dispose plus d'aucun titre juridique l'autorisant à rester dans les locaux loués depuis l'expiration du bail le 31 décembre 2022 et en continuant à les occuper, elle viole l'art. 267 al. 1 CO. Il sera statué à nouveau dans le sens que l'évacuation requise sera dès lors prononcée.

4. L'appelante a également réclamé l'exécution de l'évacuation.

4.1 Conformément à l'art. 236 al. 3 CPC, sur requête de la bailleresse qui a obtenu gain de cause, le Tribunal qui a prononcé l'expulsion peut également ordonner les mesures d'exécution nécessaires, à savoir l'évacuation forcée prévue à l'art. 343
al. 1 let. d CPC.

Le Tribunal des baux et loyers exerce les compétences que le Code de procédure civile attribue au tribunal de l’exécution, pour les jugements ordonnant l’évacuation d'un locataire rendus par le Tribunal des baux et loyers et par la chambre des baux et loyers de la Cour de justice (art. 89 al. 2 LOJ). Lorsqu’il est appelé à statuer sur l’exécution d’un jugement d’évacuation d’un logement, il siège en présence des représentants du département chargé du logement et de représentants des services sociaux (art. 30 al. 3 LaCC).

4.2 La Cour n'est pas compétente pour statuer sur les mesures d'exécution, de sorte que la cause sera renvoyée au Tribunal pour qu'il statue sur ce point.

5. À teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 11 juillet 2024 par la FONDATION A______ contre le jugement JTBL/674/2024 rendu le 18 juin 2024 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/6922/2023.

Au fond :

Annule ce jugement et cela fait, statuant à nouveau:

Condamne B______ à évacuer immédiatement de sa personne, de ses biens et de tout tiers, l'appartement de 4 pièces situé au 5ème étage de l'immeuble sis no. ______, rue 1______ à Genève.

Renvoie la cause au Tribunal des baux et loyers pour statuer sur les mesures d'exécution sollicitées.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN, Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Monsieur Jean-Philippe ANTHONIOZ, Monsieur Damien TOURNAIRE, juges assesseurs; Madame Victoria PALAZZETTI, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.