Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/1047/2024 du 12.12.2024 ( AI ) , REJETE
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
| ||
A/4136/2023 ATAS/1047/2024 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 12 décembre 2024 Chambre 3 |
En la cause
A______
| recourant |
contre
OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE | intimé |
A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né en avril ______ à Manille, a été adopté en Suisse à l’âge de 14 ans.
b. Deux ans plus tard, il a commencé à travailler chez B______. Il a ensuite enchaîné plusieurs petits boulots (room service, nettoyage de bureaux, employé de bureau à l’aéroport, vendeur dans une boutique de montres, vendeur de souvenirs).
c. En 2011, l’assuré a quitté la Suisse pour les Philippines, où il a essayé de lancer un restaurant avec son épouse. Ce projet n’ayant pas réussi, il est rentré en Suisse en 2014 et a divorcé.
d. Depuis juillet 2014, il est au bénéfice de l’aide sociale. Le dernier emploi qu’il a exercé était celui de chauffeur privé.
B. a. Le 31 mai 2021, l’assuré a déposé auprès de l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI) une demande de prestations, en invoquant des tendinites calcifiantes multiples, un diabète de type II, des troubles anxio-dépressifs modérés et une hypertension artérielle.
b. Ont été recueillis durant l’instruction, notamment, les éléments suivants :
- Le docteur C______, pneumologue, dans un rapport du 12 septembre 2022, a retenu le diagnostic de syndrome sévère d’apnées du sommeil, diagnostiqué en mai 2022 (40 apnées/heure). Il a précisé que le patient avait été mis sous CPAP [Continuous Positive Airway Pressure] depuis juillet 2022, mais qu’il n’utilisait l’appareil que deux heures par nuit. Le pneumologue ne s’est pas prononcé sur la capacité de travail de l’assuré.
- Dans un rapport du 13 septembre 2021, le docteur D______, spécialiste en médecine interne générale et médecin traitant de l’assuré, a indiqué que son patient souffrait depuis juillet 2017 de calcifications tendineuses avec inflammation interdisant tous les travaux de force, ainsi que de douleurs chroniques de la colonne vertébrale, sans autre étiologie que des contractures musculaires sur un trouble de l’adaptation.
Le médecin a expliqué que son patient, auparavant chef d’une entreprise de nettoyage, avait bien gagné sa vie avant de faire faillite. Il avait ensuite travaillé comme chauffeur privé, avant de se retrouver au chômage et à l’aide sociale. C’est là qu’on l’avait incité à demander les prestations de l’assurance-invalidité.
Le médecin a exprimé l’avis qu’à défaut de pathologie nouvelle, un travail adapté améliorerait la santé de son patient. Il a ajouté que si l’assuré était en arrêt de travail au début de sa prise en charge, il ne l’était plus désormais. Il restait certes des limitations à la capacité de travail, mais l’asthénie présente au début du suivi et les céphalées s’étaient améliorées sous médication. Quant au diabète, une fois diagnostiqué, les glycémies avaient bien évolué. Les épisodes d’asthénie avaient été corrigés par la prise de sucre.
- Le docteur E______, psychiatre, dans un rapport du 19 septembre 2022, a conclu à un trouble dépressif récurrent épisode moyen. Le psychiatre a expliqué le parcours de son patient et précisé que ce dernier avait débuté la consommation d’alcool à l’âge de 16 ans. C’est à son retour en Suisse, en 2014, lorsqu’il a divorcé, qu’ont débuté les décompensations dépressives. S’est ensuite installé un trouble dépressif récurrent. S’y sont ajoutés, en 2016, des symptômes d’allure psychosomatique. Le médecin a évoqué un possible trouble somatoforme (les plaintes douloureuses étant au premier plan), tout en admettant que des problèmes somatiques pourraient expliquer en partie les douleurs. Les limitations fonctionnelles retenues étaient les suivantes : impossibilité de soutenir un rythme régulier et limitations relationnelles consécutives à l’irritabilité et à l’épuisement liés aux douleurs. D’un point de vue strictement psychiatrique, le médecin a jugé son patient apte à exercer à 50%. Il a souligné l’amélioration partielle du trouble dépressif, sous traitement et avec un soutien psychothérapeutique.
- Le docteur F______, neurologue au service de chirurgie orthopédique des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), dans un rapport du 6 octobre 2021, a indiqué n’avoir examiné le patient qu’une seule fois, le 11 septembre 2018. Le patient présentait une symptomatologie douloureuse chronique sous forme de cervicalgies avec des céphalées cervicogènes chroniques secondaires, symptomatologie qui s’expliquait par la contracture importante de la musculature cervicale. Les examens radiologiques (imageries par résonance magnétique cérébrale, cervicale, dorsale et lombaire) étaient rassurants. Le médecin préconisait une reprise du traitement physique par physiothérapie et l’adoption d’une bonne posture. L’examen clinique était sans particularité, hormis la présence d’une légère contracture au niveau de la région cervicale. Avaient été retenus les diagnostics de cervicalgies chroniques et céphalées cariogènes. Les limitations fonctionnelles étaient les suivantes : éviter le travail en hauteur, le port de charges de plus de 10 kg et la position assise - surtout tête penchée en avant - plus d’une heure. Au-delà, le médecin ne s’est pas prononcé sur la capacité de travail de son patient.
- Dans un rapport du 14 novembre 2021, le docteur G______, rhumatologue, a fait état d’une épicondylite gauche, de douleurs aux pieds sur troubles statiques et d’une tendinopathie calcifiante achilléenne. Il a aussi mentionné des douleurs à la station debout prolongée et à la mobilisation du coude gauche, tout en concluant à une capacité de travail de 100% tant dans l’activité habituelle que dans une activité adaptée.
c. Une expertise a été demandée au service médical régional, plus particulièrement aux docteurs H______, spécialiste FMH en médecine physique et rééducation et rhumatologie, I______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, et J______, spécialiste FMH en médecine physique et réadaptation.
Dans leur rapport du 14 décembre 2022, les médecins du SMR n’ont retenu aucune atteinte psychique.
En revanche, ils ont admis, à titre de limitations fonctionnelles sur le plan somatique : s’agissant des épaules : pas de travail prolongé bras au-dessus de l’horizontale, pas de mouvements répétés d’abduction-adduction des bras, pas de soulèvement de charges au-delà de 3 kg s’agissant du membre supérieur gauche, au-delà de 5 kg s’agissant du membre supérieur droit ; s’agissant du rachis cervical : pas de rotations rapides de la nuque, pas d’attitude prolongée de la nuque en extension, limitation dans l’élévation des bras ; s’agissant du rachis lombaire : pas de mouvements répétés de flexion/extension du tronc, pas d’attitude prolongée en porte-à-faux, pas de position assise ou debout prolongée au-delà d’une heure ; en raison des troubles statiques des genoux et des pieds : pas de marche au-delà du kilomètre, pas de montée/descente répétée d’escaliers, pas de position statique debout plus de vingt minutes ; globalement : pas de port de charges répété au-delà de 5 kg.
Cela a conduit les experts à retenir une totale incapacité de travail dans les activités de nettoyeur ou de chauffeur depuis le 11 septembre 2018 (date à laquelle l’assuré avait consulté le Dr F______ pour des cervicalgies). En revanche, ils ont considéré que l’assuré avait conservé une capacité de travail de 100% dans une activité adaptée ménageant la nuque. Cela étant, ils ont admis, sur le plan rhumatologique, une péjoration progressive avec, en juillet 2020, des douleurs des pieds en relation avec des troubles statiques, une épicondylite gauche, un début d’arthrose au niveau du coude gauche, au point de réduire, à compter du 22 février 2021 (date de l’IRM de l’épaule gauche), la capacité à exercer une activité adaptée à 75% (2 x 3 heures par jour), avec une baisse de rendement de 20%, correspondant à une capacité de travail de 60% dans une activité adaptée. Les experts ont expliqué que, même s’agissant d’une telle activité, la capacité était diminuée en raison des atteintes dégénératives multiples touchant les membres supérieurs et les régions cervicale et lombaire et des troubles statiques marqués au niveau des genoux et des pieds.
d. L’OAI s’est alors livré à une comparaison des revenus pour calculer le degré d’invalidité.
Il a comparé le revenu qu’aurait réalisé l’assuré en 2021 en exerçant à plein temps son activité, à savoir CHF 62'054.-, à celui qu’il aurait réalisé la même année en exerçant une activité adaptée à 60%, à savoir CHF 39'175.- (Enquête suisse sur la structure des salaires [ESS] 2020 TA1_tirage_skill_level = 5'261.- pour 40 h./sem. = 5'484.- pour 41,7 h./sem. = 65'809.- en 2020 = 65'292.- en 2021 = 39'175.- à 60%). La comparaison conduisait à un degré d’invalidité de 36,87%, arrondi à 37%.
Il a été retenu que, sans invalidité, l’assuré aurait continué à travailler dans le domaine du transport, raison pour laquelle l’OAI s’est basé, s’agissant du revenu avant invalidité, sur l’ESS 2020, TA1_tirage_skill_level secteur privé, ligne 49-53 (transport et entreposage), niveau 1 (4'874.- pour 40 h./sem. = 5'168.- pour 42,4 h./sem. [durée normale hebdomadaire de travail dans ce domaine] = 62'015.- en 2020 = 62'054.- en 2021).
e. Par décision du 9 novembre 2023, l’OAI a nié à l’assuré le droit à toute prestation.
L’OAI a retenu, à l’issue de l’instruction médicale, que si l’assuré avait été en incapacité totale de travail depuis le 11 septembre 2018, il aurait pu exercer une activité adaptée à son état de santé à 100% à compter du 11 septembre 2018, réduite à 60% dès le 22 février 2021.
L’OAI a constaté par ailleurs que, la demande de prestations n’ayant été déposée qu’en date du 7 juin 2021, le droit à la rente ne pourrait s’ouvrir qu’à compter du 1er décembre 2021 au plus tôt.
La comparaison du revenu que l’assuré aurait pu obtenir dans son activité habituelle (soit CHF 62'054.-) à celui qu’il aurait pu réaliser en exerçant une activité adaptée à 60% (soit CHF 39'175.-) conduisait à une perte de gain de CHF 22'879.-, correspondant à un taux d’invalidité de 37%, insuffisant pour ouvrir droit aux prestations.
C. a. Par écriture du 11 décembre 2023, l’assuré a interjeté recours contre cette décision en concluant principalement, à l’octroi d’une rente d’invalidité de 100%. Il a également demandé à ce que l’Hospice général soit appelé en cause, demande qu’il justifie par le fait que c’est ce dernier qui lui a suggéré de déposer une demande de prestations auprès de l’assurance-invalidité et par le fait que l’Hospice général sera touché par le sort du recours, puisqu’il pourra, cas échéant, réclamer le remboursement des montants qu’il a versés.
En substance, le recourant allègue que « le taux d’invalidité attesté médicalement est de 100% » et que dès lors, rien ne justifie de s’en écarter. Selon lui, si la prise en compte d’une activité adaptée est admise, elle ne saurait l’être de façon « purement abstraite et sans aucune précision ». À cet égard, il rappelle que l’expert lui-même a suggéré que l’activité adaptée devrait être « traduite en termes de métier par un spécialiste en réadaptation ».
Il reproche au surplus à l’intimé de ne pas avoir pris en compte ses atteintes psychiques.
Pour le surplus, il fait grief à l’intimé de ne pas avoir procédé au calcul du degré d’invalidité en tenant compte d’une capacité de travail de 60%.
Par ailleurs, il souligne que près d’une année s’est écoulée entre l’expertise et le prononcé de la décision et rappelle que le SMR a constaté que son état se péjorait rapidement.
Enfin, il souligne son âge (57 ans).
b. Invité à se déterminer, l’intimé, dans sa réponse du 9 janvier 2024, a conclu au rejet du recours.
Il relève que l’expert n’a objectivé aucune atteinte psychique invalidante et qu’il a expliqué les raisons qui l’ont amené à s’écarter des diagnostics retenus par le psychiatre traitant. Il en tire la conclusion que c’est à juste titre qu’une capacité de travail de 100% a été retenue d’un point de vue psychiatrique.
D’un point de vue somatique, l’expert rhumatologue a conclu à une capacité de travail de 100% dès le 11 septembre 2018 et de 60% dès le 22 février 2021 dans une activité adaptée. L’intimé considère que le recourant n’apporte pas d’élément concret susceptible de remettre en cause les conclusions des experts à cet égard.
Il rappelle pour le surplus que, pour prétendre des mesures de réadaptation professionnelle, il faut que celles-ci soient nécessaires et de nature à rétablir, maintenir ou améliorer la capacité de gain. Or, en l’occurrence, son service de réadaptation a estimé que de telles mesures n’étaient pas indiquées au regard du profil de l’assuré et de son absence de motivation pour de quelconques mesures. À cet égard, il a été relevé que, depuis des années, l’assuré n’avait entrepris aucune démarche de réinsertion professionnelle. Enfin, l’intimé soutient que le recourant n’établit pas en quoi des activités simples ne seraient pas exigibles de sa part au vu des limitations retenues. Il n’y a pas lieu, dans ce contexte, d’examiner dans quelle mesure la situation concrète du marché du travail lui permettrait de retrouver un emploi.
c. Le 9 février 2024, l’assuré a persisté dans ses conclusions.
Il souligne que le rapport d’expertise du SMR a constaté la dégradation progressive de son état de santé, démontrée d’ailleurs par le passage d’une capacité de travail de 100% en septembre 2018, à 60% en février 2021, soit une chute de 40% en 27 mois, correspondant à une diminution de 2% par mois en moyenne. Or, le rapport du SMR remonte à 2022 et est antérieur de plus d’une année à la décision litigieuse. Selon lui, son état de santé aurait dès lors dû être actualisé avant que l’intimé ne statue.
L’assuré a produit à l’appui de son recours, notamment :
- un historique de ses médicaments ;
- un rapport d’IRM de la colonne cervicale du 22 novembre 2022 (spondylodiscarthrose modérée C5-C6, sans argument en faveur d’une hernie discale ou d’un canal cervical étroit) ;
- un rapport d’IRM de l’épaule gauche du 16 janvier 2023 (persistance de remaniements fissuraires et d’une déchirure par endroits transfixiante du supra épineux, bursopathie sous-acromio-deltoïdienne réactionnelle et arthrose acromio-claviculaire en poussée évolutive) ;
- un rapport d’IRM cérébrale du 13 avril 2023 (exclusion de toute lésion hémorragique intra ou extra-axiale, malformation vasculaire, thrombose veineuse, hypertension intracrânienne ou processus expansif ; discrets signes de leuco-encéphalopathie vasculaire d’évolution stable par rapport à l’examen du 25 mai 2021) ;
- un rapport d’angioscanner du 14 novembre 2023 (absence d’anomalie pulmonaire) ;
- un rapport d’IRM et radiographie de l’épaule gauche du 7 décembre 2023 (persistance d’une tendinopathie calcifiante du supra épineux, discrète bursopathie arthrose acromio-claviculaire, paraissant moins évolutive que précédemment, et synovite au niveau du modelé mécanique gléno-huméral) ;
- divers certificats du Dr D______ concernant l’année 2023.
d. Par écriture du 7 mars 2024, l’intimé a persisté dans ses conclusions.
À l’appui de celles-ci, il produit un nouvel avis du SMR, auquel il a soumis les pièces produites par l’assuré.
Le SMR note que le radiologue signale l’existence d’une tendinopathie calcifiante du supra épineux (atteinte connue, puisque retenue par le SMR comme atteinte principale), compliquée d’une déchirure infra centimétrique de la partie centrale de l’insertion dudit muscle et un foyer de déchirure de la face bursale de ce tendon, avec persistance d’une déchirure localisée au bord supérieur du sous-scapulaire, interstitielle avec une subluxation du long biceps, siège d’une tendinopathie en regard. Le SMR a relevé que les pièces produites par le recourant consistaient simplement en rapports d’imageries réalisées postérieurement à la décision litigieuse, mais qu’aucune pièce médicale ne faisait état d’élément clinique objectif supplémentaire.
e. Les autres faits seront repris – en tant que de besoin – dans la partie "en droit" du présent arrêt.
1.
1.1 Conformément à l’art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l’organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ – E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA – RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI – RS 831.20).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 À teneur de l’art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s’appliquent à l’assurance-invalidité, à moins que la loi n’y déroge expressément.
1.3 La procédure devant la Cour de céans est régie par les dispositions de la LPGA et de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985 (LPA – E 5 10).
1.4 Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).
Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.
2. Se pose préalablement la question de l’éventuel appel en cause de l’Hospice général, sollicité par le recourant au motif que c’est l’Hospice qui l’a incité à déposer une demande de prestations, d’une part, et que l’Hospice serait susceptible d’être touché par la décision de l’OAI, d’autre part.
2.1 À teneur de l’art. 71 LPA, l’autorité peut, d’office ou sur requête, ordonner l’appel en cause de tiers dont la situation juridique est susceptible d’être affectée par l’issue de la procédure. Dans ce cas, la décision leur devient opposable.
D’une manière générale, dans les cantons qui comme celui de Genève connaissent cette institution de procédure, l’appel en cause permet de contraindre des tiers qui ne possèdent pas la qualité de partie faute d’en satisfaire les conditions à participer à la procédure afin de leur rendre opposable la décision, respectivement le jugement qui doit être rendu à son issue (cf. ATF 125 V 94 consid. 8b). L’appel en cause n’est pas destiné à faire intervenir ou à étendre la procédure à des personnes qui bénéficient déjà de la qualité de partie et qui ne participent pas pour une raison quelconque à la procédure. Il vise bien plutôt à préjuger un rapport de droit entre l’appelé en cause et une partie principale dans une procédure pendante entre les parties principales. Dans la mesure où il a pour fonction d’éviter le déroulement d’une autre procédure sur les mêmes questions litigieuses, l’appel en cause est dicté par un souci d’économie de procédure. Il permet également de prévenir le prononcé de décisions ou jugements contradictoires. Le tiers appelé en cause doit naturellement posséder la capacité d’être partie et la capacité d’ester (cf. arrêt du Tribunal fédéral des assurances B 47/02 du 25 août 2003 consid. 3.2.1).
2.2 En l’occurrence, il n’apparaît pas utile d’appeler l’Hospice général en cause.
En premier lieu, le fait qu’il ait incité l’assuré à déposer une demande de prestations auprès de l’OAI n’est pas pertinent. Le recourant ne saurait en effet en tirer le moindre argument quant à sa capacité de travail, sa capacité de gain, le degré de son invalidité, voire même son droit aux prestations, l’instruction de ces questions revenant à l’assurance-invalidité et à elle seule.
En second lieu, le fait que l’Hospice général, puisse, cas échéant, demander le remboursement des avances versées au recourant, ne suffit pas à justifier son appel en cause, dès lors que, quoi qu’il en soit, en vertu de la loi, la décision en matière d’assurance-invalidité lui sera opposable. Il n’existe par ailleurs aucun risque qu’une autre procédure sur les mêmes questions litigieuses soit menée par l’Hospice général, celui-ci n’ayant aucune compétence en la matière.
La requête préalable du recourant est donc écartée.
3. L’objet du litige porte sur le droit du recourant à une rente d’invalidité, étant relevé que l’intéressé ne conclut pas à l’octroi d’une mesure professionnelle.
4.
4.1 Le 1er janvier 2022, les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) et celles du 3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI – RS 831.201 ;
RO 2021 706) sont entrées en vigueur.
En l’absence de disposition transitoire spéciale, ce sont les principes généraux de droit intertemporel qui prévalent, à savoir l’application du droit en vigueur lorsque les faits déterminants se sont produits (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et la référence). Lors de l’examen d’une demande d’octroi de rente d’invalidité, est déterminant le moment de la naissance du droit éventuel à la rente. Si cette date est antérieure au 1er janvier 2022, la situation demeure régie par les anciennes dispositions légales et réglementaires en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021. Si elle est postérieure au 31 décembre 2021, le nouveau droit s’applique (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_60/2023 du 20 juillet 2023 consid. 2.2. et les références).
4.2 En l’occurrence, la décision querellée concerne un premier octroi de rente dont le droit – s’il était reconnu – naîtrait avant le 31 décembre 2021. En conséquence, les dispositions légales applicables seront citées, ci-après, dans leur ancienne teneur.
5.
5.1 Est réputée invalidité, l’incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d’une infirmité congénitale, d’une maladie ou d’un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l’ensemble ou d’une partie des possibilités de gain de l’assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d’une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu’elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2).
5.2 Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l’art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l’art. 8 LPGA. On ne considère pas comme des conséquences d’un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l’assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l’assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté ; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 127 V 294 consid. 4c ; 102 V 165
consid. 3.1 ; VSI 2001 p. 223 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral I 786/04 du
19 janvier 2006 consid. 3.1).
5.2.1 La reconnaissance de l’existence d’une atteinte à la santé psychique suppose la présence d’un diagnostic émanant d’un expert (psychiatre) et s’appuyant selon les règles de l’art sur les critères d’un système de classification reconnu, telle la classification internationale des maladies (ci-après : CIM) ou le DSM-IV (Diagnostic and Statiscal Manual ; ATF 143 V 409 consid. 4.5.2 ; 141 V 281 consid. 2.1 et 2.1.1 ; 130 V 396 consid. 5.3 et 6).
5.2.2 Dans l’ATF 141 V 281, le Tribunal fédéral a revu et modifié en profondeur le schéma d’évaluation de la capacité de travail, respectivement de l’incapacité
de travail, en cas de syndrome douloureux somatoforme et d’affections psychosomatiques comparables. Il a notamment abandonné la présomption selon laquelle les troubles somatoformes douloureux ou leurs effets pouvaient être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible (ATF 141 V 281 consid. 3.4 et 3.5) et introduit un nouveau schéma d’évaluation au moyen d’un catalogue d’indicateurs (ATF 141 V 281 consid. 4). Le Tribunal fédéral a ensuite étendu ce nouveau schéma d’évaluation aux autres affections psychiques
(ATF 143 V 418 consid. 6 et 7 et les références). Aussi, le caractère invalidant d’atteintes à la santé psychique doit être établi dans le cadre d’un examen global, en tenant compte de différents indicateurs, au nombre desquels figurent notamment les limitations fonctionnelles et les ressources de la personne assurée, de même que le critère de la résistance du trouble psychique à un traitement conduit dans les règles de l’art (ATF 143 V 409 consid. 4.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2019 du 17 mars 2020 consid. 3 et les références).
Le Tribunal fédéral a en revanche maintenu, voire renforcé, la portée des motifs d’exclusion définis dans l’ATF 131 V 49, aux termes desquels il y a lieu de conclure à l’absence d’une atteinte à la santé ouvrant le droit aux prestations d’assurance, si les limitations liées à l’exercice d’une activité résultent d’une exagération des symptômes ou d’une constellation semblable, et ce même si les caractéristiques d’un trouble au sens de la classification sont réalisées. Des indices d’une telle exagération apparaissent notamment en cas de discordance entre les douleurs décrites et le comportement observé, d’allégation d’intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, d’absence de demande de soins, de grandes divergences entre les informations fournies par le patient et celles ressortant de l’anamnèse, de plaintes très démonstratives laissant insensible l’expert, ainsi qu’en cas d’allégation de lourds handicaps malgré un environnement psycho-social intact (ATF 141 V 281 consid. 2.2.1 et 2.2.2 ;
132 V 65 consid. 4.2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_16/2016 du 14 juin 2016 consid. 3.2).
5.2.3 L’organe chargé de l’application du droit doit, avant de procéder à l’examen des indicateurs, analyser si les troubles psychiques dûment diagnostiqués conduisent à la constatation d’une atteinte à la santé importante et pertinente en droit de l’assurance-invalidité, c’est-à-dire qui résiste aux motifs dits d’exclusion tels qu’une exagération ou d’autres manifestations d’un profit secondaire tiré de la maladie (cf. ATF 141 V 281 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2018 du 17 avril 2019 5.2.2 et la référence).
5.2.4 Selon la jurisprudence, en cas de troubles psychiques, la capacité de travail réellement exigible doit être évaluée dans le cadre d’une procédure d’établissement des faits structurée et sans résultat prédéfini, permettant d’évaluer globalement, sur une base individuelle, les capacités fonctionnelles effectives de la personne concernée, en tenant compte, d’une part, des facteurs contraignants extérieurs incapacitants et, d’autre part, des potentiels de compensation (ressources) (ATF 141 V 281 consid. 3.6 et 4). L’accent doit ainsi être mis sur les ressources qui peuvent compenser le poids de la douleur et favoriser la capacité d’exécuter une tâche ou une action (arrêt du Tribunal fédéral 9C_111/2016 du 19 juillet 2016 consid. 7 et la référence).
Il y a lieu de se fonder sur une grille d’analyse comportant divers indicateurs qui rassemblent les éléments essentiels propres aux troubles de nature psychosomatique (ATF 141 V 281 consid. 4).
- Catégorie « Degré de gravité fonctionnel » (ATF 141 V 281 consid. 4.3),
A. Complexe « Atteinte à la santé » (consid. 4.3.1)
Expression des éléments pertinents pour le diagnostic (consid. 4.3.1.1), succès du traitement et de la réadaptation ou résistance à cet égard (consid. 4.3.1.2), comorbidités (consid. 4.3.1.3)
B. Complexe « Personnalité » (diagnostic de la personnalité, ressources personnelles ; consid. 4.3.2)
C. Complexe « Contexte social » (consid. 4.3.3)
- Catégorie « Cohérence » (aspects du comportement ; consid. 4.4)
Limitation uniforme du niveau d’activité dans tous les domaines comparables de la vie (consid. 4.4.1), poids des souffrances révélé par l’anamnèse établie en vue du traitement et de la réadaptation (consid. 4.4.2).
Les indicateurs appartenant à la catégorie « degré de gravité fonctionnel » forment le socle de base pour l’évaluation des troubles psychiques (ATF 141 V 281 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 8.2).
5.2.5 Pour des motifs de proportionnalité, on peut renoncer à une appréciation selon la grille d’évaluation normative et structurée si elle n’est pas nécessaire ou si elle est inappropriée. Il en va ainsi notamment lorsqu’il n’existe aucun indice en faveur d’une incapacité de travail durable ou lorsque l’incapacité de travail est niée sous l’angle psychique sur la base d’un rapport probant établi par un médecin spécialisé et que d’éventuelles appréciations contraires n’ont pas de valeur probante du fait qu’elles proviennent de médecins n’ayant pas une qualification spécialisée ou pour d’autres raisons (arrêts du Tribunal fédéral 9C_101/2019 du 12 juillet 2019 consid. 4.3 et la référence ; 9C_724/2018 du 11 juillet 2019 consid. 7). En l’absence d’un diagnostic psychiatrique, une telle appréciation n’a pas non plus à être effectuée (arrêt du Tribunal fédéral 9C_176/2018 du 16 août 2018 consid. 3.2.2).
6.
6.1 En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.
La quotité de la rente est déterminée en fonction de l’incapacité de gain au moment où le droit à la rente prend naissance (cf. art. 28 al. 1 let. c LAI). Le droit à la rente naît au plus tôt à l’échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré à fait valoir son droit aux prestations conformément à
l’art. 29 al. 1 LPGA, mais pas avant le mois qui suit le 18ème anniversaire de l’assuré (art. 29 al. 1 LAI).
6.2
6.2.1 Pour évaluer le taux d’invalidité d’un assuré exerçant une activité lucrative, le revenu qu’il aurait pu obtenir s’il n’était pas invalide est comparé avec celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré. Le Conseil fédéral fixe les revenus déterminants pour l’évaluation du taux d’invalidité ainsi que les facteurs de correction applicables (art. 16 LPGA et 28a al. 1 LAI).
La comparaison des revenus s’effectue, en règle ordinaire, en chiffrant aussi exactement que possible les montants des revenus sans et avec invalidité et en
les confrontant l’un avec l’autre, la différence permettant de calculer le taux d’invalidité (méthode générale de comparaison des revenus ; ATF 137 V 334 consid. 3.1.1 ; 128 V 29 consid. 1 ; 104 V 135 consid. 2a et 2b).
6.2.2 Pour déterminer le revenu sans invalidité, il convient d'établir ce que l'assuré aurait, au degré de la vraisemblance prépondérante, réellement pu obtenir au moment déterminant s'il n'était pas devenu invalide. Le revenu sans invalidité doit être évalué de la manière la plus concrète possible. Partant de la présomption que l'assuré aurait continué d'exercer son activité sans la survenance de son invalidité, ce revenu se déduit en principe du salaire réalisé en dernier lieu par l'assuré avant l'atteinte à la santé, en prenant en compte également l'évolution des salaires jusqu'au moment de la naissance du droit à la rente ; des exceptions ne peuvent être admises que si elles sont établies au degré de la vraisemblance prépondérante (ATF 144 I 103 consid. 5.3 ; 139 V 28 consid. 3.3.2 et les références ; 135 V 297 consid. 5.1 et les références ; 134 V 322 consid. 4.1 et les références). Toutefois, lorsque la perte de l'emploi est due à des motifs étrangers à l'invalidité, le salaire doit être établi sur la base de valeurs moyennes. Autrement dit, dans un tel cas, n'est pas déterminant pour la fixation du revenu hypothétique de la personne valide le salaire que la personne assurée réaliserait actuellement auprès de son ancien employeur, mais bien plutôt celui qu'elle réaliserait si elle n'était pas devenue invalide. Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, un tel cas d'exception se présente par exemple lorsque le poste de travail que l'assuré occupait avant la survenance de l'atteinte à la santé n'existe plus au moment de l'évaluation de l'invalidité, lorsqu'il n'aurait pas pu conserver son poste en raison des difficultés économiques, en cas de faillite ou de restructuration de l'entreprise (arrêt du Tribunal fédéral 8C_746/2023 du 7 juin 2024 consid. 4.3 et les références).
6.2.3 Quant au revenu d'invalide, il doit être évalué avant tout en fonction de la situation professionnelle concrète de l'intéressé (ATF 135 V 297 consid. 5.2). Lorsque l'assuré n'a pas repris d'activité, ou aucune activité adaptée lui permettant de mettre pleinement en valeur sa capacité de travail résiduelle, contrairement à ce qui serait raisonnablement exigible de sa part, le revenu d'invalide peut être évalué sur la base de données statistiques, telles qu'elles résultent de l’ESS (ATF 143 V 295 consid. 2.2 et la référence ; 135 V 297 consid. 5.2 et les références). Dans ce cas, il convient de se fonder, en règle générale, sur les salaires mensuels indiqués dans la table TA1 de l’ESS, à la ligne « total secteur privé » (ATF 124 V 321 consid. 3b/aa), étant précisé que, depuis l'ESS 2012, il y a lieu d'appliquer le tableau TA1_skill_ level (ATF 142 V 178). On se réfère alors à la statistique des salaires bruts standardisés, en se fondant toujours sur la médiane ou valeur centrale (ATF 126 V 75 consid. 3b/bb ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_58/2021 du 30 juin 2021 consid. 4.1.1). La valeur statistique - médiane - s'applique alors, en principe, à tous les assurés qui ne peuvent plus accomplir leur ancienne activité parce qu'elle est physiquement trop astreignante pour leur état de santé, mais qui conservent néanmoins une capacité de travail importante dans des travaux légers. Pour ces assurés, ce salaire statistique est suffisamment représentatif de ce qu'ils seraient en mesure de réaliser en tant qu'invalides dès lors qu'il recouvre un large éventail d'activités variées et non qualifiées (branche d'activités), n'impliquant pas de formation particulière, et compatibles avec des limitations fonctionnelles peu contraignantes (cf. arrêts du Tribunal fédéral 9C_603/2015 du 25 avril 2016 consid. 8.1 et 9C_242/2012 du 13 août 2012 consid. 3). Il convient de se référer à la version de l'ESS publiée au moment déterminant de la décision querellée (ATF 143 V 295 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_655/2016 du 4 août 2017 consid. 6.3).
6.2.4 La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits dépend de l'ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d'autorisation de séjour et taux d'occupation) et résulte d'une évaluation dans les limites du pouvoir d'appréciation. Une déduction globale maximum de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d'une activité lucrative (ATF 148 V 174 consid. 6.3 et les références ; 135 V 297 consid. 5.2 ; 134 V 322 consid. 5.2 et les références). Il n'y a pas lieu de procéder à des déductions distinctes pour chacun des facteurs entrant en considération ; il faut bien plutôt procéder à une évaluation globale, dans les limites du pouvoir d'appréciation, des effets de ces facteurs sur le revenu d'invalide, compte tenu de l'ensemble des circonstances du cas concret (ATF 148 V 174 consid. 6.3 et les références). D'éventuelles limitations liées à la santé, déjà comprises dans l'évaluation médicale de la capacité de travail, ne doivent pas être prises en compte une seconde fois dans l’appréciation de l’abattement, conduisant sinon à une double prise en compte du même facteur (cf. ATF 148 V 174 consid. 6.3 et les références ; 146 V 16 consid. 4.1 et ss. et les références). L'étendue de l'abattement justifié dans un cas concret relève du pouvoir d'appréciation (ATF 132 V 393 consid. 3.3).
Cette évaluation ressortit en premier lieu à l'administration, qui dispose pour cela d'un large pouvoir d'appréciation. Le juge doit faire preuve de retenue lorsqu'il est amené à vérifier le bien-fondé d'une telle appréciation. L'examen porte alors sur le point de savoir si une autre solution que celle que l'autorité, dans le cas concret, a adoptée dans le cadre de son pouvoir d'appréciation et en respectant les principes généraux du droit, n'aurait pas été plus judicieuse quant à son résultat. Pour autant, le juge ne peut, sans motif pertinent, substituer son appréciation à celle de l'administration ; il doit s'appuyer sur des circonstances de nature à faire apparaître sa propre appréciation comme la mieux appropriée (ATF 126 V 75 consid. 6 ; 123 V 150 consid. 2 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_337/2009 du 18 février 2010 consid. 7.5).
Bien que l'âge soit inclus dans le cercle des critères déductibles depuis la jurisprudence de l'ATF 126 V 75 – laquelle continue de s'appliquer (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_470/2017 du 29 juin 2018 consid. 4.2) – il ne suffit pas de constater qu'un assuré a dépassé la cinquantaine au moment déterminant du droit à la rente pour que cette circonstance justifie de procéder à un abattement. Selon la jurisprudence, l'effet de l'âge combiné avec un handicap doit faire l'objet d'un examen dans le cas concret, les possibles effets pénalisants au niveau salarial induits par cette constellation aux yeux d'un potentiel employeur pouvant être compensés par d'autres éléments personnels ou professionnels tels que la formation et l'expérience professionnelle de l'assuré concerné (arrêt du Tribunal fédéral 8C_227/2017 précité consid. 5).
6.2.5 Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d’invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale ; ce sont les conséquences économiques objectives de l’incapacité fonctionnelle qu’il importe d’évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).
6.2.6 On précisera également que le « marché du travail équilibré », auquel se réfèrent les art. 7 et 16 LPGA, est une notion théorique et abstraite, qui sert de critère de distinction entre les cas tombant sous le coup de l’assurance-chômage et ceux qui relèvent de l’assurance-invalidité. Elle implique, d’une part, un certain équilibre entre l’offre et la demande de main-d’œuvre et, d’autre part, un marché du travail structuré de telle sorte qu’il offre un éventail d’emplois diversifiés
(ATF 110 V 273 consid. 4b). Il s’ensuit que pour l’évaluation de l’invalidité, il n’y a pas lieu d’examiner si un invalide peut être placé eu égard aux conditions concrètes du marché du travail, mais uniquement de se demander s’il pourrait encore exploiter économiquement sa capacité de travail résiduelle lorsque les places de travail disponibles correspondent à l’offre de main-d’œuvre (VSI 1998 p. 293 consid. 3b ; Michel VALTERIO, Droit de l’assurance-vieillesse et survivants [AVS] et de l’assurance-invalidité [AI], Commentaire thématique, p. 563-564 n. 2112).
7.
7.1 Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler (ATF 140 V 193 consid. 3.2 et les références ; 125 V 256 consid. 4 et les références). En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).
7.2 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n’est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu’en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l’affaire sans apprécier l’ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L’élément déterminant pour la valeur probante d’un rapport médical n’est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l’objet d’une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu’il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu’il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l’expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; 133 V 450 consid. 11.1.3 ; 125 V 351 consid. 3). Il faut en outre que le médecin dispose de la formation spécialisée nécessaire et de compétences professionnelles dans le domaine d’investigation (arrêt du Tribunal fédéral 9C_555/2017 du 22 novembre 2017 consid. 3.1 et les références).
7.3 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d’apprécier certains types d’expertises ou de rapports médicaux.
7.3.1 Ainsi, en principe, le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d'un assureur social, aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation, ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Étant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).
7.3.2 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l’expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l’unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S’il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l’objectivité ou l’impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a ; 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l’éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l’existence d’éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).
7.3.3 On ajoutera qu’en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n’est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s’apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu’au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d’expertise (ATF 124 I 170 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l’administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu’un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion distincte. Il n’en va différemment que si ces médecins traitants font état d’éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l’expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l’expert (arrêt du Tribunal fédéral 8C_458/2023 du 18 décembre 2023 consid. 3.2 et la référence).
8. Selon la jurisprudence, tant dans les cas de tableaux cliniques objectivables que non objectivables, le droit aux prestations de l’assurance-invalidité présuppose de la même manière une appréciation médicale compréhensible des effets de l’atteinte à la santé sur la capacité de travail et de gain. Des difficultés à clarifier des faits ou à fournir des preuves peuvent nécessiter la prise en compte – au besoin en se procurant des informations étrangères à l’anamnèse – d’autres domaines de la vie comme des comportements durant les loisirs ou des engagements familiaux. Si les effets d’une symptomatologie douloureuse objectivable ou non objectivable (par imagerie médicale) sur la capacité de travail restent vagues et indéterminés malgré des investigations consciencieuses et complètes et si les limitations ne peuvent pas être justifiées autrement que par les données subjectives fournies par la personne assurée, la preuve du fondement de la prétention n’est pas apportée et n’est pas rapportable. L’absence de preuve correspondante doit être supportée par la personne assurée (arrêt du Tribunal fédéral 9C_27/2015 du 26 août 2015 consid. 6.1).
9.
9.1 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible ; la vraisemblance prépondérante suppose que, d’un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l’exactitude d’une allégation, sans que d’autres possibilités revêtent une importance significative ou entrent raisonnablement en considération (ATF 144 V 427 consid. 3.2 ; 139 V 176 consid. 5.3 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).
9.2 Si l’administration ou le juge, se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves fournies par les investigations auxquelles ils doivent procéder d’office, sont convaincus que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d’autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu d’administrer d’autres preuves (appréciation anticipée des preuves ; ATF 145 I 167 consid. 4.1 et les références ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les références). Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu selon l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (RS 101 – Cst ; SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 90 consid. 4b ; 122 V 157 consid. 1d).
9.3 En l’espèce, il convient de rappeler que le droit à une rente éventuelle a été examiné au 1er décembre 2021, la demande de prestations n’ayant été déposée qu’en juin 2021. La décision litigieuse, fondée sur l’examen des médecins du SMR, retient qu’à compter du 22 février 2021, l’assuré était apte à exercer à 60% une activité adaptée.
Le recourant conteste en premier lieu les conclusions des experts.
9.4 Il convient dès lors d’examiner la valeur probante du rapport des médecins du SMR, contestée par le recourant.
La Cour de céans constate en premier lieu que ce rapport a été rendu en pleine connaissance du dossier, qu’il comporte une anamnèse et un status rhumatologique et psychiatrique fouillés, qu’il se fait l’écho des plaintes de l’assuré, que les diagnostics et les conclusions sont bien motivés et que le volet psychiatrique est articulé autour de la grille d’analyse structurée prévue par la jurisprudence. Aussi convient-il en principe d’en reconnaître la valeur probante.
Il ressort en synthèse de ce rapport qu’en l’absence de limitation fonctionnelle d’ordre psychique, seuls les diagnostics relatifs aux atteintes somatiques ont été reconnus comme ayant des répercussions sur la capacité de travail.
Sur le plan psychique, le médecin psychiatre n’a retenu aucun diagnostic invalidant, ce dont le recourant lui fait grief.
Cela étant, force est de constater que le médecin psychiatre s’est livré à une anamnèse détaillée, familiale, scolaire et professionnelle, à une description du contexte psychosocial, psychiatrique, ainsi que de sa vie quotidienne. À l’examen de cette dernière, il a constaté que l’assuré conservait des ressources physiques pour des tâches légères. Il a été relevé que l’assuré se plaignait principalement de ses douleurs, fluctuantes en fonction des circonstances, et d’une fatigue variant de la même manière, ainsi que d’une humeur triste, fluctuante elle aussi, et de troubles du sommeil.
Le diagnostic retenu a été celui d’une simple dysthymie. À cet égard, le médecin a expliqué que l’assuré présente une dépression chronique de l’humeur dont la sévérité est insuffisante pour pouvoir poser un autre diagnostic de la catégorie des troubles dépressifs. Si l’anamnèse et le rapport du Dr E______ mettaient en évidence une humeur triste chronique depuis le retour de l’assuré en Suisse, en 2014, il n’avait pas été objectivé, lors de l’anamnèse, de périodes prolongées où l’assuré aurait présenté une diminution des intérêts et du plaisir et une réduction de l’énergie supérieure à deux semaines. L’humeur triste était fluctuante en fonction des circonstances, mais durable. La perte d’espoir, les ruminations sur le passé, la diminution de la confiance en soi, elles aussi variables, ainsi que le discours plaintif complétaient de façon cohérente le diagnostic de dysthymie. Le médecin psychiatre, au vu de l’anamnèse, du rapport médical du Dr E______ et de l’absence d’un nombre suffisant de critères majeurs permettant de poser un diagnostic d’épisode dépressif, a considéré que l’assuré avait présenté, à la suite d’événements stressants (échec du projet d’installation aux Philippines, conflit avec perspective de séparation avec son épouse du moment, séparation avec ses quatre derniers enfants restés aux Philippines, difficultés significatives de retrouver une activité professionnelle en Suisse), un trouble de l’adaptation avec réaction dépressive prolongée durant les deux ans ayant suivi son retour en Suisse. Cet état s’était poursuivi par une dysthymie, le diagnostic de trouble de l’adaptation avec réaction dépressive prolongée ne pouvant être posé selon la CIM-10 après deux ans d’évolution. Depuis 2014, il n’avait pas été objectivé d’altération significative des centres d’intérêts.
Quant au diagnostic de troubles mentaux et troubles du comportement liés à l’utilisation d’alcool, il a été précisé que la consommation abusive d’alcool quotidienne avait pris fin trois ans avant l’examen.
Le diagnostic de trouble dépressif récurrent épisode moyen retenu par le Dr E______ a été écarté au motif que l’anamnèse et le status n’avaient pas permis de mettre en évidence une diminution des intérêts et du plaisir ainsi qu’une réduction de l’énergie prolongée supérieure à deux semaines au moins.
Le diagnostic de trouble somatoforme a également été écarté, au motif que l’assuré présentait effectivement des atteintes somatiques, dont le vécu subjectif était probablement majoré par le discours plaintif en lien avec la dysthymie.
Les éléments recueillis dans le contexte psychosocial et la vie quotidienne permettaient de constater que les ressources disponibles ou mobilisables de l’assuré, ainsi que son autonomie dans la vie quotidienne étaient globalement conservées. En effet, l’assuré, en Suisse depuis l’âge de 14 ans, est bien intégré dans son quartier et sa communauté. Il est polyglotte et a de bonnes aptitudes de communication. Il est en capacité de conduire une voiture et d’utiliser les transports publics. Il a une relation de qualité avec son épouse, ses enfants, ses frères et sœurs, qui sont « soutenants » moralement et financièrement. Il est apprécié par les gens qu’il côtoie, en particulier dans son quartier. Il se rend régulièrement à la messe. Son logement est satisfaisant. Il se rend au moins une fois par an aux Philippines. Il a été capable de créer et maintenir une relation à distance pendant plusieurs années, qui a abouti à un mariage en juillet 2022. Il peut réaliser certaines activités ménagères, la cuisine et les courses en partenariat avec son épouse. Il prend plaisir à partager des moments de discussion ou des balades avec ses frères et sœurs, enfants et épouse, à cuisiner, à s’informer, à regarder des films et à suivre la Coupe du monde.
En définitive, sur le plan psychiatrique, il a été constaté que la capacité de travail avait été durablement conservée. Il n’y avait pas d’élément significatif objectivable montrant une mauvaise coopération de l’assuré dans son traitement. Sur le plan psychiatrique, le pronostic était bon.
Ainsi, le médecin psychiatre a discuté de manière détaillée et convaincante ses conclusions. On relèvera que le recourant n’amène aucun élément objectif permettant d’en douter. D’ailleurs, son médecin-traitant, en septembre 2021, soulignait que l’assuré n’était selon lui plus en arrêt de travail, l’asthénie ayant été améliorée sous traitement et grâce à la régulation de la glycémie. Il a même émis l’avis que l’exercice d’une activité lucrative pourrait être bénéfique à son patient. Quant au Dr E______, il a également fait état d’une amélioration partielle de son patient sous traitement et retenu une capacité de travail de 50%, qui, si elle diffère de celle de 100% retenue par le médecin du SMR, est similaire à celle de 60% finalement admise globalement. On notera à cet égard que le psychiatre-traitant semble justifier cette capacité davantage par l’épuisement consécutif aux douleurs que par un trouble psychique à proprement parler.
Sur le plan somatique, les médecins du SMR ont relevé que l’examen neurologique était normal, sans signe de compression radiculaire ni de polyneuropathie. Au niveau des épaules, la mobilité était complète, douloureuse en fin d’amplitude. Au niveau du rachis, de légers troubles statiques avec une légère augmentation de la cyphose dorsale ont été relevés. La recherche de fibromyalgie s’est révélée négative.
Là encore, les médecins ont livré une description détaillée du statut général, neurologique et ostéoarticulaire. Ils se sont basés sur le dossier radiologique, en particulier une IRM cervico-dorso-lombaires du 8 mars 2018, des radiographie et échographie du coude gauche du 14 mai 2020, des radiographies de l’épaule droite du 14 mai 2020, des radiographies des pieds du 8 juillet 2020, un examen du coude droit du 18 août 2020, une IRM de l’épaule gauche du 22 février 2021, des radiographies de la main gauche du 15 septembre 2021, un examen des épaules du 26 janvier 2022 et une IRM de la colonne lombaire du 15 février 2022.
Ont été finalement retenus à titre de diagnostics invalidants : des omalgies gauches chroniques dans un contexte de rupture transfixiante du supra épineux et vraisemblable conflit sous-acromial, des cervicalgies chroniques, non déficitaires, dans un contexte de protrusion C5-C6, des omalgies droites dans un contexte de pré-arthrose gléno-humérale, enthésopathie ossifiante du supra et de l’infra épineux, arthrose acromio-claviculaire, une arthrose radio-humérale gauche débutante, un valgus marqué des genoux, des pieds plats bilatéraux, des lombalgies basses chroniques dans un contexte de protrusion circonférentielle L5-S1 avec troubles dégénératifs postérieurs L5-S1 et troubles dégénératifs des articulations sacro-iliaques. Ont également été mentionnés, en précisant qu’ils étaient sans répercussions sur la capacité de travail : une minime enthésopathie calcifiante sur les muscles radiaux et une obésité.
Les experts ont constaté de concert l’absence de déficit sensitivomoteur. Ils ont par ailleurs constaté des divergences significatives entre les plaintes de l’assuré et son comportement durant l’examen. Par exemple, il a montré peu d’attitudes antalgiques objectivables, ce qui était en décalage avec l’intensité et la fréquence importante des douleurs rapportées. Il n’a pas non plus été retrouvé de manque d’énergie au cours de l’examen, ce qui était en décalage avec le vécu subjectif de fatigue intense et permanente décrite par l’assuré. Des divergences ont été notées entre les plaintes de l’assuré, d’une part, et la préservation des intérêts et les tâches quotidiennes, d’autre part.
Contrairement à ce qu’allègue le recourant, les médecins ont tenu compte des différentes atteintes ostéoarticulaires, qui les ont conduits à retenir de nombreuses limitations en lien avec la nécessité d’épargner les épaules, le rachis cervical, le rachis lombaire et les membres inférieurs.
Là encore, on relèvera que le recourant n’amène aucun élément médical objectif (atteinte ou limitation) qui aurait été ignoré par le SMR.
En réalité, il se contente de souligner le temps qui s’est écoulé entre le rapport du SMR et la décision litigieuse et de faire une extrapolation théorique de la péjoration de son état de santé, arguant que, puisque sa capacité de travail est passée de 100% en septembre 2018 à 60% en février 2021, soit une chute de 40% en 27 mois, il faudrait admettre une diminution de 2% par mois en moyenne. Or, à aucun moment, le recourant n’apporte la démonstration concrète que son état aurait continué à se péjorer de telle manière postérieurement au rapport du SMR. Au contraire, il ressort de certains des documents d’imagerie qu’il a produits que la situation n’a guère évolué par rapport aux examens précédents (on parle même de situation « moins évolutive que précédemment » ou encore d’évolution stable).
En définitive, que ce soit sur le plan psychique ou physique, le recourant n’apporte aucun élément objectivement vérifiable de nature clinique ou diagnostique qui aurait été ignoré dans le cadre de l’examen du SMR et qui serait suffisamment pertinent pour remettre en cause le bien-fondé des conclusions des médecins ou établir le caractère incomplet de leur rapport.
Dans ces conditions, il n’y a pas lieu de s’écarter des conclusions des médecins du SMR.
Partant, il convient de retenir qu’il est établi, au degré de la vraisemblance prépondérante requise, que les atteintes présentées par l’intéressé ont réduit sa capacité de travail à 60% à compter de février 2021.
10. Reste à examiner le calcul du degré d’invalidité.
Le recourant ne conteste pas le montant retenu à titre de revenu avant invalidité. Qui plus est, la Cour de céans constate qu’il est favorable au recourant, dans la mesure où le revenu réalisé dans le domaine des transports est inférieur à celui qui ressort des statistiques si l’on se basait sur le revenu réalisable tous secteurs confondus.
Quant au revenu d’invalide, le recourant se contente d’alléguer que si une activité adaptée est admise, elle ne saurait l’être de façon « purement abstraite et sans aucune précision ».
C’est le lieu de rappeler que, selon la jurisprudence citée supra, la valeur statistique - médiane - s'applique, en principe, à tous les assurés qui ne peuvent plus accomplir leur ancienne activité parce qu'elle est physiquement trop astreignante pour leur état de santé, mais qui conservent néanmoins une capacité de travail importante dans des travaux légers. Pour ces assurés, ce salaire statistique est suffisamment représentatif de ce qu'ils seraient en mesure de réaliser en tant qu'invalides dès lors qu'il recouvre un large éventail d'activités variées et non qualifiées (branche d'activités), n'impliquant pas de formation particulière, et compatibles avec des limitations fonctionnelles peu contraignantes. En l’espèce, le recourant n’établit pas en quoi des activités simples ne seraient pas exigibles de sa part au vu des limitations retenues. Il n’y a dès lors pas lieu, dans ce contexte, d’examiner dans quelle mesure la situation concrète du marché du travail lui permettrait de retrouver un emploi.
C’est à tort que le recourant fait grief à l’intimé de ne pas avoir procédé au calcul du degré d’invalidité en tenant compte d’une capacité de travail de 60%. En effet, même s’il est vrai que la décision litigieuse se montre trompeuse et lacunaire à cet égard - dans la mesure où elle ne précise pas le taux d’occupation -, il ressort des plans de calcul détaillés établis par la division de réadaptation de l’intimé figurant au dossier que c’est bien un taux d’activité de 60% qui a été pris en compte (cf. partie en fait supra : B.d).
Enfin, le recourant souligne son âge (57 ans), demandant ainsi, implicitement, que soit appliquée une réduction supplémentaire au revenu d’invalide. Or, comme rappelé supra, il ne suffit pas qu’un assuré ait dépassé la cinquantaine pour justifier une telle réduction.
Le Tribunal fédéral a ainsi considéré qu'un assuré ayant accompli plusieurs missions temporaires, alors qu'il était inscrit au chômage consécutivement à la cessation d'activité de son ancien employeur, disposait d'une certaine capacité d'adaptation sur le plan professionnel susceptible de compenser les désavantages compétitifs liés à son âge (59 ans au moment déterminant), surtout dans le domaine des emplois non qualifiés qui sont, en règle générale, disponibles indépendamment de l'âge de l'intéressé sur le marché équilibré du travail (arrêt du Tribunal fédéral 8C_227/2017 du 17 mai 2018 consid. 5 ; voir aussi arrêts du Tribunal fédéral 8C_403/2017 du 25 août 2017 consid. 4.4.1 et 8C_805/2016 du 22 mars 2017 consid. 3.4.3).
Tout comme cet assuré, le recourant a, au cours de sa vie professionnelle, multiplié les activités diverses, démontrant ainsi une capacité d’adaptation certaine. Pour les raisons exposées par le Tribunal fédéral, il n’y a donc pas lieu de considérer que l’intimé aurait violé son pouvoir d’appréciation en n’appliquant pas une réduction supplémentaire au revenu après invalidité.
11. Eu égard aux considérations qui précèdent, la décision de négation de prestations de l’intimé apparaît bien fondée, la comparaison des revenus conduisant à un degré d’invalidité insuffisant pour ouvrir droit à une rente. Dès lors, le recours est rejeté.
12. Bien que la procédure ne soit pas gratuite en matière d’assurance-invalidité (cf. art. 69 al. 1bis LAI), il y a lieu en l’espèce de renoncer à la perception d’un émolument, le recourant étant au bénéfice de l’assistance juridique (art. 12 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 – RFPA – E 5 10.03).
***
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. Le rejette.
3. Renonce à la perception d’un émolument.
4. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Diana ZIERI |
| La présidente
Karine STECK
|
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le