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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2371/2024

ATAS/963/2024 du 03.12.2024 ( PC ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2371/2024 ATAS/963/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 3 décembre 2024

Chambre 2

 

En la cause

A______

 

 

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Le 6 janvier 2023, Madame A______ (ci-après : l'assurée, l'intéressée ou la recourante), née en 1981, a déposé une demande de prestations complémentaires familiales (ci-après : PCFam) auprès du service des prestations complémentaires (ci-après : le SPC, le service ou l’intimé).

Ressortissante d’un pays d’Amérique latine, en Suisse depuis fin 2009, titulaire d’une autorisation d’établissement (permis C), elle est mariée, avec ménage commun, avec Monsieur B______ (ci-après : le mari, l'époux ou le conjoint), né en 1978, de la même nationalité qu’elle, en Suisse depuis fin 2016 et titulaire d’une autorisation de séjour (permis B). Ils sont parents de trois enfants, nés en 2014, 2016 et 2018. L’assurée est également mère de C______ (ci-après : la fille aînée), née en 2007 d’une précédente union.

L’intéressée était, depuis l’été 2022, employée d’D______, société active dans la restauration de collectivités, en qualité de caissière polyvalente, au taux de 80% (33h36 par semaine). En parallèle, elle était salariée de E______, société active dans le placement de personnel fixe et temporaire en Suisse, comme cela ressort d’un décompte de salaire de cette dernière de décembre 2022.

b. Par décision du 16 février 2023, le SPC a, avec effet dès le 1er janvier 2023, octroyé à l’assurée des PCFam de CHF 1'016.- par mois, alors qu’une autre décision du service rendue le même jour n’a alloué ni prestations d’aide sociale ni subside de l’assurance-maladie.

Par décision du 6 avril 2023, le service a fixé les PCFam de janvier et février 2023 rétroactivement à CHF 1'080.- mensuellement, et a maintenu le montant mensuel de CHF 1'016.- à partir du 1er mars 2023.

Ce montant mensuel de PCFam de CHF 1'016.- a encore été confirmé par décisions du 22 août 2023, puis des 18 octobre et 1er novembre 2023, pour la période allant à tout le moins jusqu’au 30 novembre 2023.

c. En parallèle, le service, qui a demandé plusieurs fois des renseignements et pièces à l’assurée – entre autres concernant ses salaires et ceux de son conjoint –, a reçu, à différentes dates, des décomptes de salaire de E______ de février et mars 2023 concernant tant l’intéressée que son mari.

d. Le 4 décembre 2023, le SPC a annoncé à l’assurée un droit à des PCFam de CHF 1'048.- par mois à partir du 1er janvier 2024.

e. Le 6 février 2024, dans le cadre d’une révision périodique du dossier, le service a demandé à l’intéressée de nombreux renseignements et pièces, puis, les 8 et 11 mars 2024 (faute d’avoir reçu l’intégralité des renseignements et pièces demandés), des rappels.

f. Le 14 mars 2024, le SPC a reçu notamment les documents qui suivent.

Le 4 mars 2024, E______ avait certifié que l’époux avait effectué au cours de l’année 2023 168h24 de travail temporaire pour le compte de ladite société.

Par contrat de travail de courte durée (« short-term contract of employment ») signé le 19 octobre 2023 – rédigé en anglais –, l’F______ (ci-après : F______) avait engagé le conjoint en qualité de conducteur (« driver ») pour la période du 23 octobre au 21 décembre 2023 au taux de 100% (40 heures par semaine) pour un salaire net mensuel de CHF 5'698.10, une contribution à l’assurance santé (« contribution to the medical insurance [optional] ») de CHF 198.90 par mois étant en outre indiquée. Par avenant (« notice ») du 13 décembre 2023, ce contrat de travail avait été prolongé (cf. mot anglais « extend ») jusqu’au 31 janvier 2024, sous les mêmes conditions que celles prévues le 19 octobre 2023. La fiche de salaire (« payslip ») de l’F______ pour janvier 2024 montrait une rémunération totale de CHF 9'358.35 (effectivement versée), tenant compte des heures supplémentaires effectuées en décembre 2023 et janvier 2024, dont à déduire une contribution à l’assurance santé de CHF 217.-.

À teneur d’un certificat de salaire établi le 8 février 2024, l’assurée avait reçu d’D______ un salaire net de CHF 56'082.50 en 2023 (du 1er janvier au 31 décembre). En outre, un « compte de salaire 2023 » la concernant avait été imprimé le 12 mars 2024 par E______.

Selon un certificat de salaire établi le 19 janvier 2024, la fille aînée, en tant qu’apprentie, avait reçu de l’État de Genève un salaire net de CHF 3'468.65 entre le 21 août et le 31 décembre 2023, et les décomptes de salaire de décembre 2023, respectivement janvier 2024 de cet employeur montraient pour lesdits mois un salaire mensuel net de CHF 790.50 et CHF 810.15.

g. Alors qu’il avait demandé le 8 avril 2024 (« 2ème rappel ») encore un grand nombre de renseignements et documents, le service a reçu uniquement ce qui suit : - les 9 et 10 avril 2024, des documents émanant du service des bourses et prêts d’études (ci-après : SBPE) et concernant la fille aînée, à savoir une décision du 3 avril 2024 d’octroi d’une bourse de CHF 813.-, soit CHF 545.- versés à la fin du mois d’avril 2024 sur le compte de l’intéressée ainsi que CHF 67.- « à la fin de chaque mois échu jusqu’à fin août 2024 », de même qu’un « procès-verbal de calcul » relatif au revenu déterminant (ci-après : RDU) socle ; - le 12 avril 2024, une attestation – non signée – de l’assurée datée du 10 avril précédent, déclarant en particulier que son époux n’avait pas travaillé pour E______ en janvier 2024.

h. Par décision du 30 avril 2024, le SPC a fixé les PCFam au montant de CHF 1'048.- en avril 2024, tandis qu’aucun montant d’aide sociale n’était octroyé.

Toutefois, par décision du 2 mai 2024, il a établi rétroactivement le droit de l’intéressée aux PCFam à CHF 8'128.- au total pour la période du 1er janvier 2023 au 31 mai 2024, composée de CHF 1'016.- par mois entre janvier et août 2023 puis aucun montant. Or, durant ladite période du 1er janvier 2023 au 31 mai 2024, des PCFam avaient été versées pour une somme totale de CHF 17'560.-, soit mensuellement CHF 1'080.- en janvier et février 2023, CHF 1'016.- entre mars et décembre 2023 puis CHF 1'048.- de janvier à mai 2024. Le solde à restituer au service s’élevait à CHF 9'432.- (différence entre CHF 8'128.- et CHF 17'560.-). Il n’y avait eu ni versements de prestations d’aide sociale ni droit rétroactif à celles‑ci durant ladite période du 1er janvier 2023 au 31 mai 2024. Pendant cette période, des subsides d’assurance-maladie avaient été versés indûment par le service de l’assurance-maladie (ci-après : SAM) à hauteur de CHF 9'304.-, soit CHF 128.- de moins que l’ensemble des PCFam versées indûment. Cette décision de restitution reposait sur des plans de calcul qui en faisaient « partie intégrante ».

En parallèle, également le 2 mai 2024, le SPC a adressé au SAM une attestation de fin de droit au subside d’assurance-maladie, requérant la suppression du droit au subside pour chacun des six membres de la famille au 31 août 2023.

i. Par écrit du 31 mai 2024, sous la signature d’une juriste (selon une procuration), l’assurée et son mari ont formé opposition contre la décision de restitution du 2 mai 2023, en tant que les plans de calcul de celle-ci avaient, pour les périodes du 1er novembre au 31 décembre 2023 et du 1er janvier au 31 mai 2024, imputé au conjoint un salaire (« gain activité lucrative ») à hauteur de CHF 65'990.40, alors que d’après eux, selon la déclaration fiscale 2023 des époux, le salaire brut du conjoint se montait à CHF 4'646.- et son salaire net à CHF 4'088.-.

j. Par décision sur opposition rendue le 12 juin 2024, le SPC a rejeté ladite opposition, confirmant que la somme de CHF 9'432.- lui restait due.

B. a. Par acte daté du 8 juillet 2024 et posté le 11 juillet suivant, toujours sous la signature de leur mandataire, l’assurée et son époux ont, auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre des assurances sociales ou la chambre de céans), interjeté recours contre ladite décision sur opposition, maintenant leur contestation de la prise en compte d’un salaire de CHF 65'990.40 concernant le mari.

Étaient produites les fiches de salaire (« payslip ») de l’F______ en faveur du mari pour la période du 23 au 31 octobre 2023 (rémunération totale de CHF 1'654.30), ainsi que pour novembre 2023 (rémunération totale de CHF 6'214.20) et décembre 2023 (rémunération totale de CHF 6'460.45). Ces montants étaient ceux effectivement versés à l’époux. Comme celle de janvier 2024, les fiches de salaire de novembre et décembre 2023 indiquaient un salaire net (« net salary ») de CHF 5'698.10 et le fait que le salaire effectivement perçu soit plus élevé résultait notamment d’heures supplémentaires (« overtime »).

b. Par réponse du 9 août 2024, l’intimé a conclu au rejet du recours, avec la précision que, désormais, la dette totale à ce jour en faveur du service en lien avec la décision sur opposition attaquée ne s’élevait plus qu’à CHF 1'528.- (en lieu et place de CHF 9'432.-).

En effet, par courrier du 21 juin 2024 concernant la demande de restitution litigieuse, l’intimé avait informé l’assurée que le montant correspondant au subside d’assurance-maladie, de CHF 9'304.- lui était partiellement réclamé pour un montant de CHF 1'400.-, selon le décompte suivant : pour la période du 1er septembre au 30 septembre (recte : décembre) 2023, les subsides recalculés par le SAM correspondaient à ceux versés par le SPC, soit CHF 4'064.- ; pour la période du 1er janvier au 31 mai 2024, les subsides recalculés par le SAM, de CHF 3'840.-, étaient inférieurs de CHF 1'400.- à ceux déjà versés par le service à concurrence de CHF 5'240.-. Selon l’intimé, le montant des prestations en espèce, soit CHF 128.-, restait dû, ce qui portait la somme totale en sa faveur à CHF 1'528.- (CHF 1'400.- + CHF 128.-).

c. La recourante et son mari ne se sont pas manifestés dans le délai au 9 septembre 2024 que la chambre de céans leur avait octroyé par lettre du 16 août 2024 pour consulter le dossier et présenter leurs observations et pièces.

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 3 let. a de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales connaît en instance unique des contestations en matière de PCFam prévues à l’art. 43 de la loi sur les prestations cantonales complémentaires du 25 octobre 1968 [LPCC ‑  J 4 25]).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Selon l’art. 1A al. 2 LPCC, les PCFam sont régies par les dispositions figurant aux titres IIA et III de la LPCC (let. a), les dispositions de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI du 6 octobre 2006 (loi sur les prestations complémentaires ; LPC - RS 831.30) auxquelles la LPCC renvoie expressément, ainsi que les dispositions d'exécution de la loi fédérale désignées par règlement du Conseil d'État (let. b), et la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830) et ses dispositions d'exécution (let. c).

1.3 Interjeté dans les forme et délai légaux, le recours est recevable (art. 89C de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10] et 43 LPCC).

2.             Il convient tout d’abord de préciser la nature des PCFam et leurs conditions d’octroi.

2.1 Le canton de Genève prévoit deux types de prestations sociales, en complément ou en marge des prestations complémentaires prévues par la LPC – les prestations complémentaires fédérales (ci-après : PCF) –, ciblant deux catégories distinctes de bénéficiaires, à savoir d'une part les personnes âgées, les conjoints ou partenaires enregistrés survivants, les orphelins et les invalides – bénéficiaires pouvant prétendre le cas échéant au versement de prestations complémentaires cantonales (ci-après : PCC ; art. 1 al. 1 et 2 à 36 LPCC) – et d'autre part, les familles avec enfant(s) – bénéficiaires pouvant le cas échéant prétendre au versement de PCFam – (art. 1 al. 2, 36A à 36I LPCC ; ATAS/1195/2020 du 3 décembre 2020 consid. 5b ; ATAS/802/2019 du 9 septembre 2019 consid. 5).

Les PCFam ont été introduites à Genève depuis le 1er novembre 2012 (PL 10’600 modifiant la LPCC du 11 février 2011). Elles visent une catégorie de bénéficiaires qui ne sont pas des rentiers AVS/AI, mais des familles pauvres dont les parents travaillent (Mémorial du Grand Conseil du 17 décembre 2009 et rapport de commission du 15 novembre 2010).

2.2 Selon l'art. 36A al. 1 LPCC, ont droit aux PCFam les personnes qui, cumulativement : ont leur domicile et leur résidence habituelle sur le territoire de la République et canton de Genève depuis 5 ans au moins au moment du dépôt de la demande de prestations (let. a) ; vivent en ménage commun avec des enfants de moins de 18 ans, respectivement 25 ans si l'enfant poursuit une formation donnant droit à une allocation de formation professionnelle (let. b) ; exercent une activité lucrative salariée (let. c) ; ne font pas l'objet d'une taxation d'office par l'administration fiscale cantonale, avec des exceptions possibles (let. d) ; et répondent aux autres conditions prévues par la loi (let. e).

Pour bénéficier des prestations, le taux de l'activité lucrative mentionnée à l'art. 36A al. 1 let. c LPCC, doit être, par année, au minimum de 90% lorsque le groupe familial comprend deux personnes adultes (art. 36A al. 4 let. b LPCC).

2.3 À teneur de l'art. 36D LPCC, le montant annuel des PCFam correspond à la part des dépenses reconnues au sens de l'art. 36F LPCC qui excède le revenu déterminant au sens de l'art. 36E LPCC, mais ne doit pas dépasser le montant prévu à l'art. 15 al. 2 LPCC (al. 1). Les dépenses reconnues et les revenus déterminants des membres du groupe familial sont additionnés (al. 2).

En vertu de l'art. 36E LPCC, le revenu déterminant est calculé conformément à l'art. 11 LPC, moyennant les adaptations suivantes : les ressources en espèces ou en nature provenant de l'exercice d'une activité lucrative sont intégralement prises en compte (let. a) ; le revenu déterminant est augmenté d'un cinquième de la fortune calculée en application de l'art. 7 de la présente loi (let. b) ; les bourses d'études et autres aides financières destinées à l'instruction sont prises en compte (let. c) ; les ressources de l'enfant ou de l'orphelin à charge provenant de l'exercice d'une activité lucrative régulière sont prises en compte à raison de 50% (let. d, al. 1). En cas d'activité lucrative exercée à temps partiel, il est tenu compte, pour chacun des adultes composant le groupe familial, d'un revenu hypothétique qui correspond à la moitié de la différence entre le revenu effectif et le montant qui pourrait être réalisé par la même activité exercée à plein temps (al. 2). Lorsque l'un des adultes composant le groupe familial n'exerce pas d'activité lucrative, il est tenu compte d'un gain hypothétique qui correspond à la moitié du montant destiné à la couverture des besoins vitaux de deux personnes selon l'art. 36B al. 2 LPCC (al. 3). En cas d’augmentation du revenu d’une activité lucrative sans modification du taux d’activité, la détermination du gain hypothétique est précisée par règlement du Conseil d’État, de manière à éviter une diminution du revenu disponible (al. 4). Il n'est pas tenu compte d'un gain hypothétique lorsque le groupe familial est constitué d'un seul adulte faisant ménage commun avec un enfant âgé de moins d'un an (al. 5).

Pour la détermination du revenu provenant de l’exercice d’une activité lucrative (art. 11 al. 1 let. a LPC par renvoi de l’art. 36E al. 1 LPCC), l’ordonnance d’exécution du Conseil fédéral précise que le revenu annuel provenant de l’exercice d’une activité lucrative est calculé en déduisant du revenu brut les frais d’obtention du revenu dûment établis ainsi que les cotisations dues aux assurances sociales obligatoires et prélevées sur le revenu (art. 11a de l’ordonnance sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 [OPC-AVS/AI - RS 831.301], par renvoi notamment de l’art. 2 al. 1 du règlement relatif aux prestations complémentaires familiales du 27 juin 2012 [RPCFam - J 4 25.04] ; cf. aussi office fédéral des assurances sociales [ci-après : OFAS], Directives concernant les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI, valables dès le 1er avril 2011 [ci-après : DPC], n. 3421.05, deux 1ères phr., ainsi que n. 3423.01 et 3423.03).

Conformément à l’art. 23 RPCFam, pour la fixation de la PCFam annuelle, sont déterminants : les revenus provenant de l'exercice d'une activité lucrative obtenus au cours de l'année civile précédente, ou les revenus probables convertis en revenu annuel (let. a) ; les prestations périodiques en cours, telles que les allocations de logement, les allocations familiales, les bourses d'études et autres aides financières destinées à l'instruction, les pensions alimentaires et contributions d'entretien (let. b) ; l'état de la fortune au 1er janvier de l'année pour laquelle la prestation est versée (let. c ; al. 1, qui présente des similitudes avec le n. 3413.01 DPC). Pour les ayants droit dont la fortune et les revenus à prendre en compte peuvent être déterminés à l'aide d'une taxation fiscale, la période de calcul correspond à celle sur laquelle se fonde la dernière taxation fiscale, si aucune modification sensible de la situation économique de l'ayant droit n'est intervenue entretemps (al. 2, qui présente des similitudes avec le n. 3413.02 DPC).

Aux termes de l’art. 24 al. 1 RPCFam (cf. art. 36I LPCC), la PCFam annuelle doit être augmentée, réduite ou supprimée notamment lorsque les dépenses reconnues, les revenus déterminants et la fortune subissent une diminution ou une augmentation pour une durée qui sera vraisemblablement longue ; sont déterminants les dépenses nouvelles et les revenus nouveaux et durables, convertis sur une année, ainsi que la fortune existant à la date à laquelle le changement intervient (let. c, qui présente certaines similitudes avec les n. 3414.01, 3414.02 et 3741.02 DPC) ; lors d'un contrôle périodique, si l'on constate un changement des dépenses reconnues, des revenus déterminants et de la fortune (let. d). Selon l’art. 24 al. 2 let. d RPCFam, la nouvelle décision doit porter effet, dans les cas prévus par l'al. 1 let. c, dès le début du mois au cours duquel le changement a été annoncé, mais au plus tôt à partir du mois dans lequel celui-ci est survenu et au plus tard dès le début du mois qui suit celui au cours duquel la nouvelle décision a été rendue ; la créance en restitution est réservée lorsque l'obligation de renseigner a été violée.

2.4 Le chapitre VI « Subsides en faveur de certains assurés » de la loi d’application de la loi fédérale sur l’assurance-maladie du 29 mai 1997 (LaLAMal - J 3 05 ; art. 19 à 34) traite des subsides de l’assurance-maladie.

3.              

3.1 Selon l'art. 25 al. 1 LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l'intéressé était de bonne foi et qu'elle le mettrait dans une situation difficile.

3.1.1 Conformément à l’art. 2 al. 1 let. a de l’ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales du 11 septembre 2002 (OPGA - RS 830.11), sont soumis à l’obligation de restituer le bénéficiaire des prestations allouées indûment ou ses héritiers.

En vertu de l'art. 3 OPGA, l’étendue de l’obligation de restituer est fixée par une décision (al. 1). L'assureur est tenu d'indiquer la possibilité d'une remise dans la décision de restitution (al. 2). L'assureur décide dans sa décision de renoncer à la restitution lorsqu'il est manifeste que les conditions d'une remise sont réunies (al. 3). L'art. 4 al. 1 OPGA rappelle que la restitution entière ou partielle des prestations allouées indûment, mais reçues de bonne foi, ne peut être exigée si l'intéressé se trouve dans une situation difficile.

3.1.2 L'obligation de restituer suppose que soient remplies les conditions d'une révision procédurale (art. 53 al. 1 LPGA) ou d'une reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA) de la décision – formelle ou non – par laquelle les prestations en cause ont été allouées (ATF 142 V 259 consid. 3.2 et les références ; 138 V 426 consid. 5.2.1 et les références ; 130 V 318 consid. 5.2 et les références).

À cet égard, la jurisprudence constante distingue la révision d'une décision entrée en force formelle (art. 53 al. 1 LPGA), à laquelle l'administration est tenue de procéder lorsque sont découverts des faits nouveaux ou de nouveaux moyens de preuve susceptibles de conduire à une appréciation juridique différente (ATF 129 V 200 consid. 1.1 ; 127 V 466 consid. 2c et les références), de la reconsidération d'une décision formellement passée en force de chose décidée sur laquelle une autorité judiciaire ne s'est pas prononcée quant au fond (art. 53 al. 2 LPGA), à laquelle l'administration peut procéder pour autant que la décision soit sans nul doute erronée et que sa rectification revête une importance notable. Ainsi, par le biais d'une reconsidération, on corrigera une application initiale erronée du droit (ATF 147 V 167 consid. 4.2 et la référence). L'obligation de restituer des prestations complémentaires indûment touchées et son étendue dans le temps n’est pas liée à une violation de l'obligation de renseigner (ATF 122 V 134 consid. 2e). Il s'agit simplement de rétablir l'ordre légal après la découverte du fait nouveau (arrêt du Tribunal fédéral 9C_398/2021 du 22 février 2022 consid. 5.1).

3.2 Le droit cantonal reprend les règles contenues dans les articles de loi et d’ordonnance fédérales susmentionnés afférents l'obligation de restituer (cf. art. 24 al. 1 LPCC et 14 du règlement relatif aux prestations cantonales complémentaires à l'assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance‑invalidité du 25 juin 1999 [RPCC-AVS/AI - J 4 25.03]).

3.3 Conformément à l’art. 33 LaLAMal, les subsides indûment touchés doivent être restitués en appliquant par analogie l'art. 25 LPGA (al. 1). Lorsque des subsides ont été indûment touchés par un bénéficiaire des prestations du SPC, ce service peut en demander la restitution au nom et pour le compte du SAM (al. 2).

4.              

4.1 Le présent litige porte sur la question de savoir si l’intimé est fondé à réclamer à la recourante la restitution des montants de PCFam (y compris des subsides d’assurance-maladie) versés selon lui en trop entre le 1er janvier 2023 et le 31 mai 2024. La somme initialement réclamée en restitution à concurrence de CHF 9'432.-, correspondant à la différence entre les montants dus à titre rétroactif (CHF 8'128.-) et les prestations qui ont été effectivement versées (CHF 17'560.-), est, selon la réponse au recours et le courrier du 21 juin 2024 à la recourante, ramenée à CHF 1'528.- à la suite d’un nouveau calcul (corrigé) par le SAM des subsides d’assurance-maladie dus durant ladite période.

La demande de restitution formulée par le service est fondée principalement sur la prise en considération, à titre rétroactif, de revenus recalculés des membres de la famille selon les pièces produites par ceux-ci en mars et avril 2024.

Les griefs du recours portent uniquement sur la prise en considération du salaire du conjoint. Partant, seul cet élément sera examiné ci-après, les autres points n’étant pas contestés par l’intéressée.

4.2 À teneur de la décision sur opposition querellée, la signature par l’époux d’un contrat de travail le 19 novembre 2023 avec l’F______ n’avait jamais été annoncée au SPC avant l’instruction de la révision périodique du dossier de l’assurée dès février 2024.

Il s’agit d’un fait nouveau susceptible de constituer, s’il était confirmé, un motif de révision au sens de l’art. 53 al. 1 LPGA, et donc de restitution, comme le sont les autres éléments qui ont conduit au prononcé de la décision de restitution du 2 mai 2024.

4.3 À la lecture de la décision de restitution du 2 mai 2024, y inclus les plans de calcul, confirmée par la décision sur opposition attaquée, il apparaît que le droit à des PCFam a été nié pour septembre 2023 en raison essentiellement d’une augmentation du « total du revenu déterminant » de CHF 102'728.- selon la décision – corrigée – d’octroi du 18 octobre 2023 à CHF 109'408.- selon la décision de restitution du 2 mai 2024. Cette augmentation résulte en partie de l’accroissement du « gain d’activité lucrative » de l’intéressée (CHF 53'735.75 au lieu de CHF 45'724.35), malgré un maintien du « gain d’apprentissage » de la fille aînée à CHF 10'276.50 ainsi qu’une légère diminution du « revenu hypothétique » concernant le mari (CHF 19'957.70 au lieu de CHF 21'289.-). Le « total des dépenses reconnues », de CHF 109’299.-, était inférieur de CHF 109.- au « total du revenu déterminant », de CHF 109'408.-. Aucun de ces montants n’est remis en cause.

Pour octobre 2023 et selon le plan de calcul joint à la décision de restitution du 2 mai 2024, le « gain d’activité lucrative » de l’assurée a, par rapport à septembre 2023, été augmenté à CHF 67'615.70 et le « revenu hypothétique » de son conjoint à CHF 23'418.60. Le « total des dépenses reconnues », de CHF 109'299.‑, était inférieur de CHF 17’450.- au « total du revenu déterminant », de CHF 126'749.-.

Pour les mois de novembre et décembre 2023, le plan de calcul joint à la décision de restitution du 2 mai 2024 a fixé le « gain d’activité lucrative » du couple à CHF 114'447.50, soit CHF 48'457.10 pour la recourante plus CHF 65'990.40 pour son époux (salaire de l’F______), le « gain d’apprentissage » de la fille aîné restante à CHF 10'276.50. Le « total des dépenses reconnues », de CHF 109’299.-, était inférieur de CHF 40'863.- au « total du revenu déterminant », de CHF 150'162.-.

Pour la période commençant le 1er janvier 2024, le plan de calcul joint à la décision de restitution du 2 mai 2024 a fixé le « gain d’activité lucrative » du couple à CHF 114'171.95, soit CHF 48’398.75 pour la recourante plus CHF 65'773.20 pour son époux (salaire de l’F______), le « gain d’apprentissage » de la fille aîné étant quant à lui très légèrement augmenté à CHF 10'531.95. Le « total des dépenses reconnues », de CHF 110’955.-, était inférieur de CHF 39’060.- au « total du revenu déterminant », de CHF 150'015.-.

Dans ces conditions, on s’interroge si les griefs de la recourante, afférents au salaire de son mari reçu de l’F______, ont une quelconque portée concrète concernant les mois d’octobre 2023 à janvier 2024, durant lesquels son mari a travaillé pour l’F______, puisque même sans la prise en considération de ce salaire et avec pour le reste des montants comparables à ceux pris en compte entre octobre 2023 et janvier 2024, l’intimé a nié rétroactivement son droit à des PCFam en septembre 2023, sans que les montants du plan de calcul concernant ce mois-ci soient contestés par l’assurée.

4.4 Comme exposé dans les plans de calcul pour les mois d’octobre 2023, respectivement novembre et décembre 2023 ainsi que dans la décision sur opposition querellée, l’intimé est arrivé au « gain d’activité lucrative » de CHF 65'990.40 de l’époux de la manière qui suit. Du salaire net mensuel de CHF 5'698.10 prévu contractuellement, il a déduit la contribution à l’assurance santé de CHF 198.90 par mois, ce qui donne CHF 5'499.20, qu’il a multiplié par 12 (annualisation) pour parvenir à CHF 65'990.40. Dans sa décision sur opposition, le service précise que, pour la période commençant le 1er janvier 2024, il a tenu compte de la contribution à l’assurance santé de CHF 217.- figurant dans la fiche de salaire de janvier 2024, pour parvenir au salaire net annualisé de CHF 65'773.20 ([CHF 5'698.10 – CHF 217.-] x 12).

Dans sa réponse au recours, l’intimé explique que le « revenu hypothétique » du conjoint de CHF 23'418.60 en octobre 2023 a été calculé sur la base d’un taux d’activité de 29,03% en lien avec son emploi auprès de l’F______ pour ledit mois exclusivement, dans la mesure où l’époux n’a pas travaillé durant l’entièreté de ce mois au service de cet employeur, mais, selon son recours, durant une semaine. Cela étant, les commentaires du plan de calcul joint à la décision de restitution du 2 mai 2024 pour octobre 2023 mentionnent un « gain d’activité lucrative » de CHF 19'158.60 et c’est ce montant qui correspond au 29,03% de CHF 65'990.40, sans être toutefois pris en compte dans la détermination du « revenu déterminant ». Or, si on annualise la rémunération versée pour octobre 2023, de CHF 1'654.30 (x 12), on arrive à CHF 19'851.60 (proche de celui de CHF 19'158.60). Quant au « revenu hypothétique » du conjoint de CHF 23'418.60, pris en compte dans le « revenu déterminant », il est fixé, comme cela ressort desdits commentaires, conformément à l’art. 36E al. 2 LPCC, en vertu duquel, en cas d'activité lucrative exercée à temps partiel, il est tenu compte, pour chacun des adultes composant le groupe familial, d'un revenu hypothétique qui correspond à la moitié de la différence entre le revenu effectif et le montant qui pourrait être réalisé par la même activité exercée à plein temps. Rien ne permet de penser que ce montant de CHF 23'418.60 serait en défaveur de la recourante.

Les calculs apparaissent avoir été effectués de manière exacte et en conformité avec l’art 24 al. 1 let. c RPCFam concernant les mois d’octobre 2023 à janvier 2024.

Il y a ici lieu de rappeler, comme le fait l’intimé dans sa décision sur opposition, que les dépenses d’une part et les ressources – revenus – d’autre part sont annualisées pour déterminer le montant mensuel des PCFam, comme cela découle notamment des art. 36D al. 1 LPCC ainsi que 23 al. 1 et 24 al. 1 let. c RPCFam, qui montrent bien que ces prestations sont d’abord calculées de manière annualisée avant que le droit aux PCFam en tant que tel soit mensualisé pour les mois auxquels les montants sont applicables. C’est ce qui a été fait par le service concernant la prise en considération du salaire du mari perçu de l’F______, le dernier paragraphe de la p. 1 et le premier de la p. 2 du recours du 8 juillet 2024 résultant d’une mécompréhension par l’intéressée du mode légal de calcul.

4.5 Vu ce qui précède, la décision sur opposition querellée est conforme au droit concernant la période du 1er janvier 2023 au 31 janvier 2024.

Cependant, de manière incompréhensible et sans fondement indiqué, l’intimé a maintenu son plan de calcul concernant janvier 2024 pour les mois suivants, jusqu’au 31 mai 2024.

En effet, il ne ressort pas des pièces remises par l’intéressée que son mari aurait travaillé au service de l’F______ au-delà du 31 janvier 2024, terme contractuel prolongé selon l’avenant du 13 décembre 2023.

Au regard notamment de cette circonstance, de même que de l’absence d’instruction quant à la plupart des points relatifs aux dépenses et revenus des membres de la famille après le 31 janvier 2024, soit pendant la période du 1er février au 31 mai 2024, la décision sur opposition doit être annulée concernant les mois de février à mai 2024 et la cause renvoyée pour instruction et nouvelle décision portant sur lesdits mois, au sens des considérants.

5.             En conséquence, le recours sera partiellement admis, conformément à ce qui précède et étant en outre donné acte à l’intimé de ce que la somme totale à restituer pour la période du 1er janvier 2023 au 31 mai 2024 ne peut pas dépasser CHF 1'528.-.

6.             La procédure est gratuite (art. 89H al. 1 LPA).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Confirme la décision sur opposition rendue le 12 juin 2024 par l’intimé en tant qu’elle concerne la période du 1er janvier 2023 au 31 janvier 2024.

4.        Annule cette décision sur opposition en tant qu’elle concerne la période du 1er février au 31 mai 2024 et renvoie la cause à l’intimé pour instruction et nouvelle décision relativement à cette période, au sens des considérants.

5.        Donne acte à l’intimé de ce que la somme totale à restituer pour la période du 1er janvier 2023 au 31 mai 2024 ne peut pas dépasser CHF 1'528.-.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Christine RAVIER

 

Le président

 

 

 

 

Blaise PAGAN

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties par le greffe le