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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3068/2023

ATAS/464/2024 du 11.06.2024 ( LAA ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3068/2023 ATAS/464/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 11 juin 2024

Chambre 2

 

En la cause

A______

 

 

recourante

 

contre

BÂLOISE ASSURANCE SA
représentée par Me Michel D'ALESSANDRI, avocat

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Le 10 septembre 2021, Madame A______ (ci-après : l'assurée, l'intéressée ou la recourante), née en 1966, domiciliée en Haute-Savoie (France), infirmière depuis 2011 au service de l’Institution genevoise de maintien à domicile (IMAD ; ci-après : l’employeur), a fait l'objet d'une « déclaration d’accident LAA » de la part de l’employeur.

La date du sinistre indiquée était le 6 septembre 2021 à 17h30, et, l’accident, qui s’était déroulé dans le canton de Genève, était décrit ainsi : « ANP –La collaboratrice roulait à vélo traversait un bosquet et en évitant une branche d’arbre a perdu l’équilibre et est tombée sur le côté droit ». Le travail avait été interrompu à la suite de cet accident. La blessure consistait en : « Partie du corps atteinte (gauche/droite) : fracture condyle + 3ème côte côté [droit] – Nature de la lésion : cassée + traumatisme cheville droite ».

b. L’assurée a fait l’objet, le 16 septembre 2021, d’un « scanner du massif facial » par le docteur B______, médecin auprès d’un hôpital privé haut-savoyard (ci-après : l’hôpital privé), qui a établi un rapport le même jour retenant essentiellement une « fracture de l’arcade zygomatique » à droite. Pour cette imagerie et cette consultation, ledit hôpital a adressé le 12 octobre 2021 à la patiente une facture pour EUR 141.94.

c. Dans le cadre de l'assurance-accidents obligatoire, l'assureur-accidents compétent, à savoir BALOISE ASSURANCE SA (ci-après : la caisse ou l’intimée), a pris en charge le cas en versant des indemnités journalières dès le 9 septembre 2021 et jusqu’au 27 septembre 2021, sur la base de certificats d’incapacité totale de travail, et, dans le cadre de l’instruction, elle a reçu des rapports médicaux à fin 2021 et début 2022.

En particulier, le docteur C______, de l’hôpital privé, a, dans un « certificat médical LAA » rempli le 20 septembre 2021 et sous « constatations objectives », mentionné entre autres des contusions mandibulaires à droite.

Selon des « factures de prothèse », le docteur D______, chirurgien-dentiste en France (au E______), a procédé, le 14 ou 19 octobre 2021, à une « dépose de bridge vissé au maxillaire supérieur (NPC) », une « réparation (NPC) » et une « repose de bridge vissé au maxillaire supérieur (NPC) », et, le 22 mars 2022, à une « dépose et repose du bridge du maxillaire supérieur (NPC) » ainsi qu’à une « réparation (NPC) », pour des honoraires de EUR 200.-, respectivement EUR 350.-. Ces montants ont été pris en charge par la caisse.

Selon les explications de l’intéressée formulées le 24 mars 2022, sa chute du 6 septembre 2021 avait entraîné notamment des « fractures du zygomatique et de [sa] prothèse dentaire supérieure droite ». La réparation le 19 octobre 2021 de cette prothèse par le Dr D______ n’avait pas tenu, de sorte qu’une nouvelle intervention avait été nécessaire le 22 mars 2022 afin qu’elle puisse s’alimenter correctement.

d. Le 2 décembre 2022, le Dr D______ a établi à l’intention de l’intéressée un « devis thérapeutique chirurgicale implantaire (valable 6 mois) », proposant la « pose de 9 piliers prothétiques (NPC) » pour EUR 2'200.-, de même que la « réalisation de la prothèse 3 à 4 mois après la pose de l’implant », à savoir « la réalisation et pose d’un bridge de 14 dents résine de 17 à 27, armature résine fibrée, transvissé sur les 9 piliers prothétiques au maxillaire supérieur (NPC) », pour des honoraires de EUR 4'000.- et une fourniture de EUR 2'500.-, au total EUR 10'550.-.

Par « facture de soins » du 11 mai 2023, ce chirurgien-dentiste, avec le docteur F______ (également chirurgien-dentiste), a facturé une intervention en bloc opératoire et sous anesthésie locale le 26 janvier 2023, ayant consisté en une « dépose et repose du bridge au maxillaire supérieur (NPC) » pour EUR 100.-, « pose d’un implant sur 26 » pour EUR 1'350.-, « soulevé crestal de sinus avec pose de membranes de régénération en plasma sanguin autogène » pour EUR 300.- et « biostimulation par soft laser x 2 séances (NPC) » pour EUR 100.-, soit au total EUR 1'850.-, et, par « facture de prothèse » du même jour relativement à une intervention le « 12/05/2023 », il a fixé les honoraires pour une « pose de 9 piliers prothétiques » à EUR 2'200.- et pour une « pose d’un bridge 14 dents résine de 27 à 17, armature résine fibrée, transvissé sur les piliers prothétiques » à EUR 6'500.-, soit au total EUR 8'700.-. Ces montants de EUR 1'850.- et EUR 8'700.- étaient notés comme « acquittés ».

Le 30 mai 2023, le Dr D______ a complété le questionnaire adressé par la caisse relativement aux soins dentaires à la suite de l’événement du 6 septembre 2021. Sous « propositions pour le traitement définitif » de même que sous « devis » étaient indiqués nouveau « bridge complet » « maxillaire supérieur » « transvissé sur 9 implants, armature résine renforcée en fibres de kévlar », et « 14 dents résine », pour EUR 4'000.-, plus apparemment EUR 2'500.- en lien avec le « total laboratoire ».

e. Le dossier dentaire complet a été soumis par la caisse à son médecin-dentiste conseil, le docteur G______ (SVMD-SSO), qui a demandé le 12 juin 2023 des renseignements complémentaires au Dr D______.

Après réception desdits renseignements, et dans son rapport du 15 juin 2023, le Dr G______ a retracé l’historique des soins dentaires et mentionné, comme « traitement d’urgence », le 7 mars 2023 des « réparations provisoires du bridge par résine autopolymérisable » et, comme « traitement proposé », le 30 mai 2023 un « nouveau bridge complet sur 9 implants, armature résine renforcée en fibres de kevlar, 14 dents résine (estimation frais cliniques EUR 4'000.- + frais de laboratoire EUR 2'500.-) ». Dans son « appréciation », il a considéré qu’au vu de l’importance du choc subi et des dates de réparations provisoires de la prothèse supérieure, la fracture de cette prothèse était selon toute vraisemblance en relation de causalité avec l’accident (causalité probable). À relever, selon le médecin‑dentiste conseil, que « lors de l’accident subi, la patiente présentait une prothèse de 8 implants, dont 2 implants solidarisés du côté gauche » (OPG du 22.11.2022) (NDR : un orthopantomogramme (OPG) est « une radiographie panoramique qui visualise la position exacte [des] dents, notamment par rapport aux nerfs » [cf. site internet https://www.hug.ch/chirurgie-maxillo-faciale-buccale/chirurgie-orale-implantologie]), et que « la demande porte actuellement sur une prothèse de 9 implants, suite à la pose d’un implant supplémentaire du côté gauche (région Q2), comme le montre l’OPG réalisée le 12.05.2023 ». « Le remplacement de la prothèse fracturée est ainsi justifié à la fois par la fracture résultant de l’accident subi, et par l’adjonction d’un nouvel implant, non nécessité par l’accident. Le traitement proposé répond aux critères de prise en charge LAA ». Sous « proposition » : « Le traitement proposé est accepté pour le montant devisé. L’implant posé en Q2 après l’accident subi, n’est pas à la charge de l’assurance, car ne découlant pas de celui-ci. – La facture finale sera détaillée au niveau des prestations, le montant de EUR 4'000.- nous paraissant anormalement élevé pour la seule réalisation de la prothèse. – S’agissant d’un dégât matériel, il n’y a pas de responsabilité pour l’assurance après réparation des dommages ».

Cette prise de position du médecin-dentiste conseil de la caisse a été transmise le 21 juin 2023 par celle-ci à l’assurée, comme « garantie de prise en charge des coûts ». Dans cette garantie était précisé : « Le traitement proposé est accepté pour le montant devisé. – L’implant posé en Q2 après l’accident subi, n’est pas à la charge de l’assurance, car ne découlant pas de celui-ci. – La facture finale sera détaillée au niveau des prestations, le montant de EUR 4'000.- nous paraissant anormalement élevé pour la seule réalisation de la prothèse. Nous vous laissons le soin de nous transmettre cette note. – S’agissant d’un dégât matériel, il n’y a pas de responsabilité pour l’assurance après réparation des dommages ».

Par courriel du 21 juin 2023, l’intéressée a fait parvenir à la caisse « le devis complet du chirurgien-dentiste ». Elle précisait : « Pour "me réparer" et me permettre de retrouver une mastication normale/nouvelles contraintes de ma mâchoire (suite à ma fracture du zygomatique droit), le chirurgien m’a proposé implant et nouvelle prothèse (l’autre ne tenant plus). J’ai accepté cette proposition, et il n’est pas dans mon état d’esprit de faire supporter cette facture à votre assurance. C’est la raison pour laquelle le dentiste a tenté de calculer une évaluation au plus près des conséquences considérées se rapportant à mon accident ».

À nouveau questionné le 22 juin 2023 par la caisse, dont la collaboratrice, « après l’envoi de la garantie, [découvrait] que le traitement [avait] déjà eu lieu et l’assurée [lui] transmettait les factures », le Dr G______ a, le 6 juillet 2023 et concernant « 21.06.2023, soumission par mail de [l’intéressée] à [la collaboratrice de la caisse en charge du dossier] d’une facture de EUR 1'850.-, datée du 11.05.2023, et qui lui a été adressée par le Dr D______ », complété son rapport du 15 juin 2021 de la manière qui suit, sous « appréciation » : « Le traitement facturé consiste en la pose d’un implant 26 avec élévation du sinus et pose d’une membrane de régénération. – Une fracture de l’os zygomatique est sans effet sur l’état dentaire, et seule la fracture de la prothèse en bouche au moment de l’accident peut être considérée comme découlant de l’accident subi.
– La pose de cet implant n’étant pas justifiée ou en lien avec l’accident subi, ce traitement n’est pas à charge de l’assurance comme déjà relevé dans notre évaluation du 15 juin 2023 ». Sous « proposition » : « Les dégâts occasionnés par la chute de la patiente le 06.09.2021 ont consisté, au niveau maxillo-facial et dentaire, en une fracture de l’os zygomatique, et une fracture de la prothèse, sans atteinte, ni au niveau de l’os maxillaire, ni au niveau des implants présents au moment de l’accident. – Une fracture de l’os zygomatique est sans effet sur l’état dentaire, et seule la fracture de la prothèse en bouche au moment de l’accident peut être considérée comme découlant de l’accident subi. – La pose d’un implant supplémentaire n’est pas justifiée ou en lien avec l’accident subi. – Ce traitement n’est pas à charge de l’assurance. – On relève également que ce traitement a été réalisé sans soumission, ni accord préalable de la part de l’assurance ».

f. Le même 6 juillet 2023, l’assurée a adressé un courriel à la caisse : « Pour la suite du traitement de mon dossier accident, je joins à ce message les factures acquittées de mes soins dentaires ».

g. Par décision du 12 juillet 2023, la caisse a rappelé ce qui suit : à cause de l’accident du 6 septembre 2021, l’assurée avait souffert d’une fracture de côte à droite et d’une fracture du zygomatique ainsi que de sa prothèse dentaire ; sur le plan dentaire, elle avait consulté le 19 octobre 2021 le Dr D______, et la réparation de la prothèse avait eu lieu en octobre 2021, suivie d’une seconde réparation en mars 2022 ; lors de l’entretien avec le collaborateur de la caisse du 6 mars 2023, l’intéressée avait indiqué qu’un nouveau traitement dentaire devrait avoir lieu. La décision de la caisse consistait en ceci : « 1. Le remplacement de la prothèse qui a été endommagée lors de l’accident du 06.09.2021 a été pris en charge car il s’agit d’un dégât matériel. Par contre, il faut relever qu’il s’agit d’un dégât matériel sans suite ultérieure pour l’assurance-accidents obligatoire. – 2. Le traitement prévu consistant en la pose d’un implant supplémentaire n’est pas justifié et n’est pas en lien de causalité avec l’événement du 06.09.2021. – 3. Il n’y a pas de droit aux prestations de l’assurance-accidents et la prise en charge des prestations d’assurance doit être refusée ».

h. Le 25 juillet 2023, l’assurée a formé opposition contre cette décision initiale.

Dans son rappel du déroulement des faits au printemps et été 2023 concernant les soins dentaires, elle relevait avoir reçu le 21 juin 2023 une acceptation du devis de son médecin-dentiste par la caisse mais, après l’envoi de « la facture détaillée finale, acquittée », une décision de refus d’intervenir par lettre recommandée du 12 juillet 2023. Elle admettait ensuite que « la facture de prothèse du 12/05/2023 » « [détaillant] différentes sommes/soins, dont celle du bridge : EUR 4'000.- », lui paraissait « anormalement élevée », « je trouve que les tarifs pratiqués sont exorbitants ». Elle précisait – en conclusion – que l’ajout d’un implant n’était jamais entré dans ses discussions avec les collaborateurs de la caisse « puisque n’ayant aucun rapport avec [son] accident », et que « seule la prothèse était en discussion, pour une participation de [la caisse], au prorata (côté droit) des dégâts en lien avec [son] accident ».

i. Par décision sur opposition rendue le 25 août 2023, la caisse a rejeté ladite opposition « au sens des considérants » et a confirmé sa décision du 12 juillet 2023. « [Était] ici litigieux le refus de prise en charge de l’implant posé en Q2. » Vu en particulier la position du Dr G______, la décision initiale devait être « confirmée en l’absence d’un lien de causalité donnée avec la vraisemblance prépondérante entre l’événement annoncé et l’implant supplémentaire ».

B. a. Par acte daté du 20 septembre 2023 et déposé le lendemain, l’assurée a, auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre des assurances sociales ou la chambre de céans), interjeté recours contre cette décision sur opposition, qui refusait toute prise en charge de sa prothèse. Elle ne comprenait pas le revirement de l’intimée quant à sa participation aux frais de prothèse. Dans le questionnaire rempli le 30 mai 2023 par le Dr D______ – qu’elle produisait parmi d’autres pièces –, elle surlignait certaines réponses de ce médecin-dentiste.

b. Par réponse du 17 octobre 2023 signée par son avocat, l’intimée a conclu au rejet du recours.

c. Sans réponse de la recourante à son pli simple du 19 octobre 2023 qui lui octroyait un délai pour consulter le dossier et présenter ses remarques et pièces, la chambre de céans lui a adressé une lettre recommandée du 27 novembre 2023 lui accordant un ultime délai à cette fin au 12 décembre 2023, mais, selon la Poste française, l’intéressée, bien qu’avisée de ce pli, ne l’a pas réclamé.

 

EN DROIT

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 À teneur de l'art. 1 al. 1 LAA, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-accidents, à moins que la loi n'y déroge expressément.

1.3 Interjeté dans la forme et le délai – de trente jours – prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA et et 62 ss de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

2.              

2.1 Aux termes de l'art. 6 LAA, si la présente loi n'en dispose pas autrement, les prestations d'assurance sont allouées en cas d'accident professionnel, d'accident non professionnel et de maladie professionnelle.

Est réputé accident toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort (art. 4 LPGA).

2.2 La responsabilité de l’assureur-accidents s’étend, en principe, à toutes les conséquences dommageables qui se trouvent dans un rapport de causalité naturelle (ATF 119 V 335 consid. 1 ; 118 V 286 consid. 1b et les références) et adéquate avec l’événement assuré (ATF 125 V 456 consid. 5a et les références), y compris en matière d'atteinte dentaire (cf. par exemple arrêts du Tribunal fédéral 9C_242/2010 du 29 novembre 2010 consid. 3.2 et 8C_399/2008 du 19 novembre 2008 consid. 1.2 avec références).

2.2.1 Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré suppose d'abord, entre l'événement dommageable de caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle. Cette condition est réalisée lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout ou qu'il ne serait pas survenu de la même manière (ATF 148 V 356 consid. 3 ; 148 V 138 consid. 5.1.1). Il n'est pas nécessaire que l'accident soit la cause unique ou immédiate de l'atteinte à la santé : il suffit qu'associé éventuellement à d'autres facteurs, il ait provoqué l'atteinte à la santé, c'est-à-dire qu'il apparaisse comme la condition sine qua non de cette atteinte (ATF 142 V 435 consid. 1).

Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la santé sont liés par un rapport de causalité naturelle est une question de fait, que l'administration ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des renseignements d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à l'appréciation des preuves dans l'assurance sociale. Ainsi, lorsque l'existence d'un rapport de cause à effet entre l'accident et le dommage paraît possible, mais qu'elle ne peut pas être qualifiée de probable dans le cas particulier, le droit à des prestations fondées sur l'accident assuré doit être nié (ATF 129 V 177 consid. 3.1 ; 119 V 335 consid. 1 et 118 V 286 consid. 1b et les références).

2.2.2 Le droit à des prestations de l'assurance-accidents suppose en outre l'existence d'un lien de causalité adéquate entre l'accident et l'atteinte à la santé. La causalité est adéquate si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s'est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 148 V 356 consid. 3 ; 143 II 661 consid. 5.1.2 ; 139 V 156 consid. 8.4.2). En présence d'une atteinte à la santé physique, le problème de la causalité adéquate ne se pose toutefois guère, car l'assureur‑accidents répond aussi des complications les plus singulières et les plus graves qui ne se produisent habituellement pas selon l'expérience médicale (ATF 118 V 286 consid. 3a et A117 V 359 consid. 5d/bb ; arrêt du Tribunal fédéral U 351/04 du 14 février 2006 consid. 3.2).

2.2.3 Une fois que le lien de causalité naturelle a été établi au degré de la vraisemblance prépondérante, l’obligation de prester de l’assureur cesse lorsque l'accident ne constitue pas (plus) la cause naturelle et adéquate du dommage, soit lorsque ce dernier résulte exclusivement de causes étrangères à l'accident. Tel est le cas lorsque l'état de santé de l'intéressé est similaire à celui qui existait immédiatement avant l'accident (statu quo ante) ou à celui qui serait survenu tôt ou tard même sans l'accident par suite d'un développement ordinaire (statu quo sine) (RAMA 1994 n° U 206 p. 328 consid. 3b ; RAMA 1992 n° U 142 p. 75 consid. 4b). En principe, on examinera si l’atteinte à la santé est encore imputable à l’accident ou ne l’est plus (statu quo ante ou statu quo sine) selon le critère de la vraisemblance prépondérante, usuel en matière de preuve dans le domaine des assurances sociales (ATF 126 V 360 consid. 5b ; 125 V 195 consid. 2 ; RAMA 2000 n° U 363 p. 46).

2.3 En procédure juridictionnelle administrative, ne peuvent être examinés et jugés, en principe, que les rapports juridiques à propos desquels l'autorité administrative compétente s'est prononcée préalablement, d'une manière qui la lie sous la forme d'une décision. Dans cette mesure, la décision détermine l'objet de la contestation qui peut être déféré en justice par voie de recours. En revanche, dans la mesure où aucune décision n'a été rendue, la contestation n'a pas d'objet, et un jugement sur le fond ne peut pas être prononcé. Le juge n'entre donc pas en matière, en règle générale, sur des conclusions qui vont au-delà de l'objet de la contestation (ATF 134 V 418 consid. 5.2.1, et les références citées).

3.              

3.1 En l’espèce, dans sa réponse au recours, l’intimée note notamment : « Le recours de [l’intéressée] à ce propos n’est pas clair car elle semble considérer que la décision et la décision sur opposition de [la caisse] valent refus de prise en charge de la prothèse endommagée lors de l’accident. Or, il n’en est rien ; le refus de prise en charge porte sur la pose d’un implant supplémentaire conformément aux appréciations du Dr G______. Il conviendrait ainsi que [la recourante], après avoir pris connaissance de la présente réponse, se détermine clairement sur la portée de son recours ».

En réalité, c’est la position de l’intimée qui est difficilement compréhensible. En effet, sa décision sur opposition querellée indique comme seul objet du litige « le refus de prise en charge de l’implant posé en Q2 », alors que ce point n’est pas contesté par la recourante, ce déjà dans son opposition et qu’elle semble refuser toutes prestations d’assurance dans sa décision – initiale – du 12 juillet 2023.

Par cette limitation à un objet du litige qui est sans objet réel puisque sans contestation, la caisse n’a ni instruit ni tranché la seule demande de l’assurée, qui consiste simplement en le remboursement de la « facture de prothèse » du 11 mai 2023 des Drs D______ et F______ relativement à l’intervention le « 12/05/2023 », pour la « pose de 9 piliers prothétiques » à hauteur de EUR 2'200.- et pour la « pose d’un bridge 14 dents résine de 27 à 17, armature résine fibrée, transvissé sur les piliers prothétiques » à concurrence de EUR 6'500.-, soit au total EUR 8'700.-, voire éventuellement également en le remboursement de la « facture de soins » du même 11 mai 2023 de CHF 1'850.- portant pour l’essentiel sur la « pose d’un implant sur 26 » pour EUR 1'350.-.

Or le Dr G______, médecin-conseil de la caisse, dans son rapport complémentaire du 6 juillet 2023, paraît se prononcer uniquement sur la « facture de soins » du 11 mai 2023 de CHF 1'850.- portant pour l’essentiel sur la « pose d’un implant sur 26 » pour EUR 1'350.- et ne pas avoir examiné la « facture de prothèse » du 11 mai 2023 relativement à l’intervention le « 12/05/2023 », soit parce qu’il ne l’a pas vue soit parce qu’il a estimé qu’elle se confondait avec les indications figurant dans le questionnaire rempli le 30 mai 2023 par le Dr D______. Dans le même sens, l’intimée, dans sa réponse au recours (allégué 16), allègue que l’intéressée lui a, le 21 juin 2023, adressé la « facture de soins » du 11 mai 2023 pour CHF 1'850.-, et donc pas la « facture de prothèse » du même jour pour CHF 8'700.-, alors que cette dernière figure dans son chargé de pièces. Pourtant, dans son courriel du 21 juin 2023 à l’intimée, l’assurée évoque « le devis complet du chirurgien-dentiste » et, dans son courriel de demande de complément au médecin-conseil du 22 juin 2023, la collaboratrice de la caisse ne mentionne pas une seule facture mais « les factures ».

Le refus par la caisse de toutes prestations d’assurance, alors que le principe de la prise en charge en LAA d’une partie de la « facture de prothèse » précitée était admis par son médecin-conseil et elle-même, ou l’absence d’instruction puis de décision concernant le montant à verser à l’assurée comme prise en charge desdites factures semble se rapprocher d’un refus de statuer constitutif de déni de justice, qui existe lorsqu’une autorité ne rend pas de décision formelle pouvant faire l’objet d’un recours – ne serait-ce (éventuellement) qu’une décision constatant l’irrecevabilité de la demande – alors qu’elle serait tenue de le faire selon la législation (cf. à ce sujet, notamment, Jean MÉTRAL, in Commentaire romand, LPGA, 2018, n. 48 ad art. 56 LPGA). À cet égard, en vertu de l’art. 56 al. 2 LPGA, le recours peut aussi être formé lorsque l’assureur, malgré la demande de l’intéressé, ne rend pas de décision ou de décision sur opposition.

3.2 Quoi qu’il en soit, il convient de retenir au fond ce qui suit.

3.2.1 Dans son rapport complémentaire du 6 juillet 2023, le Dr G______ a exclu que la « facture de soins » du 11 mai 2023 de CHF 1'850.- puisse relever de l’assurance-accidents, car son objet principal, le nouvel implant (26) qui constitue le 9ème implant de la prothèse qui en comptait 8 auparavant, n’existait pas au moment de l’accident et est donc sans lien de causalité avec ce dernier. Cette prise de position du médecin-conseil n’est pas contestée par la recourante, et est du reste incontestable.

3.2.2 En revanche, le Dr G______, suivi par la caisse, a admis dans son principe la prise en charge par l’assurance-accidents (au sens de la LAA) de la « facture de prothèse » du 11 mai 2023 des Drs D______ et F______ relativement à l’intervention le « 12/05/2023 », pour la « pose de 9 piliers prothétiques » de EUR 2'200.- et pour la « pose d’un bridge 14 dents résine de 27 à 17, armature résine fibrée, transvissé sur les piliers prothétiques » de EUR 6'500.- (au total EUR 8'700.-), étant précisé que les EUR 6'500.- précités sont constitués d’honoraires de EUR 4'000.- ainsi que d’une fourniture ou de frais de laboratoire de EUR 2'500.-, selon le devis du 2 décembre 2022 et le questionnaire complété le 30 mai 2023.

Le médecin-conseil de l’intimée a toutefois précisé que le 9ème implant (ou pilier) de la prothèse, en Q2, devrait être exclu de la prise en charge selon la LAA (comme exposé au consid. 3.2.1) et a considéré que le montant de EUR 4'000.- susmentionné paraît anormalement élevé.

La caisse n’a pourtant, après réception de ses rapports des 15 juin et 6 juillet 2023, pas cherché à déterminer le montant dû sur ladite facture de EUR 8'700.-, en violation de son obligation d’instruire le cas.

Certes, dans son document « garantie de prise en charge des coûts » reprenant la prise de position du médecin-conseil du 15 juin 2023 et adressé à la recourante, l’intimée lui a écrit que, le montant de EUR 4'000.- lui paraissant anormalement élevé pour la seule réalisation de la prothèse, elle lui laissait le soin de transmettre à la caisse « la facture finale » qui « sera détaillée au niveau des prestations », mais, après avoir reçu de l’intéressée le 21 juin 2023 les deux factures du 11 mai 2023, elle ne lui a pas fait part de ce que celles-ci seraient insuffisantes ni n’a demandé une facture détaillée ou posé des questions complémentaires directement au Dr D______, laissant ainsi la question de la détermination du montant dû par l’assurance-accidents sur la facture de EUR 8'700.- sans instruction finale ni réponse.

3.3 Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a ; RAMA 1985 p. 240 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l'administration reste possible, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu'ici, lorsqu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4 ; SVR 2010 IV n. 49 p. 151, consid. 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).

Dans le cas présent, étant donné que le montant de prise en charge de la « facture de prothèse » du 11 mai 2023 des Drs D______ et F______ de EUR 8'700.- est demeuré sans aucune investigation complémentaire par l’intimée, le cas échéant après questions complémentaires aux Drs G______ et/ou D______, la cause doit être renvoyée à la caisse pour instruction et décision sur ce point.

4.             Vu ce qui précède, le recours sera partiellement admis (la recourante n’ayant, notamment, pas clairement exclu une demande de remboursement de la « facture de soins » du 11 mai 2023 de CHF 1'850.-), la décision sur opposition querellée sera confirmée en tant qu’elle refuse la prise en charge de cette facture, mais annulée concernant la question du montant à prendre en charge de la « facture de prothèse » du 11 mai 2023 d’une somme totale de EUR 8'700.-, et la cause sera renvoyée à l’intimée pour instruction et décision sur ce point, au sens des considérants.

5.             La recourante, qui n’est pas représentée en justice et qui n’a pas allégué avoir déployé des efforts dépassant la mesure de ce que tout un chacun consacre à la gestion courante de ses affaires, n’a pas droit à des dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

La procédure est gratuite (art. 89H al. 1 LPA et vu l'art. 61 let. fbis LPGA).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Confirme la décision sur opposition rendue le 25 août 2023 par l’intimée en tant qu’elle refuse la prise en charge de la « facture de soins » des chirurgiens-dentistes du 11 mai 2023 de EUR 1'850.-.

4.        Annule cette décision sur opposition concernant la question du montant à prendre en charge de la « facture de prothèse » des chirurgiens-dentistes du 11 mai 2023 d’une somme totale de EUR 8'700.-.

5.        Renvoie la cause à l’intimée pour instruction et décision sur ce dernier point, au sens des considérants.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Christine RAVIER

 

Le président

 

 

 

 

Blaise PAGAN

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le