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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4189/2022

ATAS/364/2023 du 04.05.2023 ( CHOMAG ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4189/2022 ATAS/364/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 4 mai 2023

Chambre 3

 

En la cause

Monsieur A______
représenté par le Syndicat SIT

recourant

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI

 

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré) a été licencié par son employeur, la société B______ SA (ci-après : l’employeur) par courrier du 20 mai 2022 pour le 31 août 2022, pour cause de restructurations.

b. Le 25 août 2022, l’assuré s’est annoncé auprès de l’Office cantonal de l’emploi (ci-après : OCE) en indiquant rechercher un poste à 100% en qualité d’employé de nettoyage et en sollicitant le versement de l’indemnité à compter du 1er septembre 2022.

B. a. Par décision du 13 octobre 2022, l’OCE a prononcé une suspension du droit à l’indemnité de l’assuré pour une durée de neuf jours, au motif que l’intéressé n’avait pas effectué suffisamment de recherches d’emploi durant son délai de congé. En effet, il n’avait apporté la preuve que de cinq démarches en juin, cinq en juillet et huit en août 2022.

b. Le 14 novembre 2022, l’assuré s’est opposé à cette décision en expliquant en substance qu’à la suite de l’annonce de son licenciement, il avait entrepris de nombreuses démarches pour faire valoir ses droits, qui avaient d’ailleurs abouti à un accord conclu le 1er juillet 2022 avec son employeur, dans lequel ce dernier s’était engagé à lui verser une indemnité pour licenciement injustifié. Il ajoutait qu’il n’avait pas été libéré de l’obligation de travailler durant son délai de congé et qu’il était parti en vacances durant trois semaines dans son pays d’origine en juillet. Il lui avait été impossible d’effectuer des recherches d’emploi durant cette période, d’autant moins que son état psychologique ne lui permettait pas de se projeter dans le futur. Ce n’est qu’une fois de retour, qu’il s’était repris et avait activement recherché un emploi.

À l’appui de sa position, l’assuré produisait, notamment, une copie de l’accord conclu le 1er juillet 2022 avec son employeur, ainsi qu’une copie de sa demande pour des vacances du 4 au 22 juillet 2022, faite le 9 mai 2022, c'est-à-dire antérieurement à l’annonce de son licenciement.

c. Par décision du 23 novembre 2022, l’OCE a rejeté l’opposition.

Il a constaté que, durant la période pendant laquelle l’assuré avait transigé avec son employeur, ce dernier ne lui avait fait aucune promesse quant à une éventuelle annulation de son congé et a rappelé que, dans ces conditions, l’intéressé était tenu de commencer ses démarches en vue de retrouver un emploi et de les intensifier au fur et à mesure de l’approche de la fin de son contrat. Cela valait également durant ses vacances au Portugal.

La sanction prononcée à son encontre était justifiée et conforme au barème du Secrétariat d’État à l’économie (ci-après : SECO).

C. a. Par écriture du 9 décembre 2022, l’assuré a interjeté recours contre cette décision en concluant à ce qu’il soit renoncé à toute sanction. En substance, il allègue qu’il pensait pouvoir obtenir de son employeur qu’il renonce à son licenciement, que son refus l’a « très atteint psychologiquement » et que ce n’est qu’à son retour de vacances qu’il s’est repris et a pu effectuer activement des démarches.

b. Invité à se déterminer, l’intimé, dans sa réponse du 3 janvier 2023, a conclu au rejet du recours.

c. Une audience s’est tenue en date du 16 février 2023.

L’intimé a constaté que le recourant avait certes annoncé ses vacances avant d’être informé de son licenciement, mais estimé que le fait de se trouver au Portugal ne le dispensait pas de procéder à des recherches à distance.

Le recourant a expliqué avoir effectué ses recherches de juillet à son retour, par Internet, indiquant qu’il recherche les offres d'emploi sur son téléphone portable, avec l’aide de son épouse, car lui n’est pas très à l'aise avec les outils informatiques. Une fois une offre trouvée sur Internet, il téléphone à l’employeur pour savoir s’il peut lui envoyer son curriculum vitae. En cas de réponse positive, il l’envoie par courriel.

d. Les autres faits seront repris – en tant que de besoin – dans la partie « en droit » du présent arrêt.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1er al. 1 LACI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-chômage obligatoire et à l’indemnité en cas d’insolvabilité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.             Interjeté dans les forme et délai prescrits par la loi, le recours est recevable (art. 56 et ss LPGA).

4.             Le litige porte sur le bien-fondé de la suspension de neuf jours du droit à l’indemnité prononcée à l’égard du recourant, au motif que ce dernier n’a pas fait suffisamment de recherches d'emploi durant les trois mois de son délai de congé.

4.1 Selon l'art. 17 al. 1 LACI, l'assuré est tenu d'entreprendre, avec l'assistance de l'office du travail, tout ce qu'on peut raisonnablement exiger de lui pour éviter le chômage ou l'abréger. En particulier, il lui incombe de chercher du travail, au besoin en dehors de la profession qu'il exerçait précédemment. L'office compétent contrôle chaque mois les recherches d'emploi de l'assuré qui doit pouvoir apporter la preuve des efforts qu'il a fournis (art. 26 al. 2 et 3 de l’ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983 [ordonnance sur l’assurance-chômage, OACI - RS 837.02]). S'il ne fait pas son possible pour trouver un travail convenable, l'assuré est suspendu dans l'exercice de son droit à l'indemnité (art. 30 al. 1 let. c LACI).

4.2 Selon la jurisprudence, il ressort de l’art. 26 al. 2 OACI, que l’obligation de chercher un emploi prend naissance déjà avant le début du chômage (cf. notamment ATF 8C_271/2008 du 25 septembre 2008, consid. 2.1). Il incombe, en particulier, à un assuré de s’efforcer déjà pendant le délai de congé de trouver un nouvel emploi (DTA 2005 N°4 p. 58 consid. 3.1 [arrêt C 208/03 du 26 mars 2004] et les références, DTA 1993/1994 N°9 p. 87 consid. 5b et la référence ; Thomas NUSSBAUMER, Arbeitlosenversicherung, in : Schwei-zerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, 2ème éd., nos 837 et 838 p. 2429ss ; Boris RUBIN, Assurance-chômage, Droit fédéral, Survol des mesures cantonales, Procédure, 2ème éd., Zurich 2006, p. 388).

Il s’agit là d’une règle élémentaire de comportement, de sorte qu’un assuré doit être sanctionné même s’il n’a pas été renseigné précisément sur les conséquences de son inaction. En effet, les obligations du chômeur découlant de la loi, elles n’impliquent ni une information préalable sur les recherches à effectuer durant le délai de congé, ni un avertissement (cf. ATF 124 V 225 consid. 5b p. 233 ; arrêts C 144/05 du 1er décembre 2005 consid. 5.2.1 ; C 199/05 du 29 septembre 2005 consid. 2.2).

On ajoutera que l’on est en droit d’attendre des assurés une intensification croissante des recherches à mesure que l’échéance du chômage se rapproche (arrêt C 141/02 du 16 septembre 2002 consid. 3.2).

4.3 Pour trancher le point de savoir si l’assuré a fait des efforts suffisants pour trouver un travail convenable, il faut tenir compte aussi bien de la quantité que de la qualité de ses recherches (ATF 124 V 225 consid. 4a et l’arrêt cité). Il n’existe pas de règle fixant le nombre minimum d’offres d’emploi qu’un chômeur doit effectuer. Cette question s’apprécie selon les circonstances concrètes au regard de l’obligation qui lui est faite de diminuer le dommage. Cependant, sur le plan quantitatif, la jurisprudence considère que dix à douze recherches d'emploi par mois sont en principe suffisantes (cf. ATF 124 V 225 précité, consid. 6 p. 234 ; arrêt C 258/06 du 6 février 2007 consid. 2.2).

On ne peut cependant s'en tenir de manière schématique à une limite purement quantitative et il faut examiner la qualité des démarches de l'assuré au regard des circonstances concrètes, des recherches ciblées et bien présentées valant parfois mieux que des recherches nombreuses (arrêts 8C_192/2016 du 22 septembre 2016 consid. 3.2 ; 8C_589/2009 du 28 juin 2010 consid. 3.2 ; C 176/05 du 28 août 2006 consid. 2.2 ; BORIS RUBIN, op. cit., n° 26 ad. art. 17 LACI).

4.4 La durée de la suspension dans l’exercice du droit à l’indemnité est de 1 à 15 jours en cas de faute légère, de 16 à 30 jours en cas de faute de gravité moyenne et de 31 à 60 jours en cas de faute grave (art. 45 al. 2 OACI).

Le SECO a établi une sorte de barème, intitulé « échelle des suspensions à l’intention de l’autorité cantonale et des ORP » (ch. D72 de la circulaire relative à l’indemnité de chômage [IC]). Selon ce document, lorsque l’assuré n’a pas effectué de recherches d’emploi pendant le délai de congé, la durée de la suspension est de quatre à six jours lorsque le délai de congé est d’un mois, de huit à douze jours lorsque le délai de congé est de deux mois et de douze à dix-huit jours lorsque le délai de congé est de trois mois et plus. Lorsque l’assuré a effectué des recherches, mais en quantité insuffisante, la durée de la suspension est de trois à quatre jours lorsque le délai de congé est d’un mois, de six à huit jours lorsque le délai de congé est de deux mois et de neuf à douze jours lorsque le délai de congé est de trois mois et plus.

4.5 En l’espèce, il est reproché au recourant de n’avoir pas effectué suffisamment de recherches d’emploi concrètes durant les trois mois de son délai de congé.

Ce point n’étant pas contesté en soi, il reste à examiner si la durée de la sanction appliquée est proportionnée, ce que le recourant conteste, alléguant en substance qu’il n’a pas été libéré de son obligation de travailler durant le délai de congé, qu’il était occupé à négocier avec son employeur pour qu’il revienne sur sa décision, ce qu’il pensait, de bonne foi, pouvoir obtenir, que, voyant qu’il n’y parvenait pas, il a été « très atteint psychologiquement » et qu’il lui a fallu un temps pour se reprendre et passer à l’action. Il ajoute que, durant ses vacances au Portugal, il n’a pu effectuer que quelques recherches d’emploi par téléphone. En effet, il ne dispose que de connaissances limitées en informatique et ne postule pas par le biais d’Internet.

La durée de la suspension apparaît proportionnée au vu des circonstances.

Le fait de travailler n’est pas incompatible avec l’accomplissement de recherches d’emploi. On rappellera qu’un grand nombre de personnes ne sont pas libérées de leur obligation de travailler pendant le délai de congé et sont dès lors obligées d’effectuer des recherches parallèlement à l’exercice de leur activité lucrative, même si celle-ci est exigeante. À cet égard, on relèvera que les exigences de l'assurance-chômage quant au nombre de recherches à effectuer durant le délai de congé sont les mêmes pour tous les actifs, quel que soit leur taux d'occupation.

Au demeurant, avec cinq recherches effectuées en juin, cinq en juillet et huit en août 2022, on est bien loin des chiffres repris dans la jurisprudence rappelée supra.

Pour le surplus, le recourant n’ayant jamais été en incapacité de travail, rien ne vient étayer l’argument selon lequel il était médicalement empêché parce que « psychologiquement très atteint », de remplir ses obligations envers l’assurance-chômage.

Enfin, comme le relève à juste titre l’intimé, jamais l’employeur n’a donné à l’assuré des raisons de penser qu’il pourrait revenir sur sa décision de mettre fin aux rapports de travail sous la forme d’une promesse d’emploi quelconque. N’ayant reçu aucune promesse, le recourant demeurait tenu de commencer à rechercher un nouvel emploi.

Les circonstances de l’arrêt ATAS/185/2011 du 17 février 2011 sont totalement différentes de celles du cas d’espèce (il s’agissait d’une assurée ayant retrouvé un emploi en gain intermédiaire et n’ayant effectué qu’une démarche en moins), de sorte que le recourant ne saurait en tirer le moindre argument en sa faveur.

Quant à la jurisprudence instaurée par l’arrêt ATAS/258/2015 du 26 mars 2015, notre Haute Cour l’a écartée (cf. notamment arrêt 8C_750/2021 du 20 mai 2022), de sorte que c’est également en vain que le recourant s’y réfère.

Enfin, s’agissant de l’argument selon lequel le recourant pourrait se prévaloir d’une atténuation, voire d’une suppression de l’obligation de rechercher un travail durant cette période, au motif que ses vacances ont été planifiées avant qu’il n’apprenne son licenciement, force est de constater que l’interprétation que fait l’intéressé de l’arrêt 8C_737/2017 du 8 janvier 2018 (consid. 4.2) apparaît erronée. En effet, dans l’arrêt en question, le Tribunal fédéral précise que les vacances prises pendant le délai de congé n'entraînent pas ipso facto la suppression de l'obligation de rechercher un emploi (cf. arrêts 8C_768/2014 du 23 février 2015 consid. 2.2.3 ; 8C_952/2010 du 23 novembre 2011 consid. 5.1 ; 8C_399/2009 du 10 novembre 2009 consid. 4.2). S’il évoque la possibilité d’une éventuelle atténuation de l'obligation de rechercher un emploi en raison du but de repos total des vacances (cf. Boris RUBIN, op. cit., n° 11 ad art. 17 LACI) lorsque ces dernières ont été planifiées avant la signification du congé, le Tribunal fédéral a aussi, dans cet arrêt, constaté qu’avec trois recherches l’assuré dont il était question était bien loin des chiffres repris dans la jurisprudence, tout comme dans le cas présent (cinq recherches seulement en juillet 2022 au lieu des dix à douze requises par la jurisprudence). Au vu de la manière de procéder du recourant telle que décrite par lui-même lors de son audition (recherche des postes sur Internet avec l’aide de son épouse, téléphone à l’employeur et envoi éventuel de son CV à celui-ci par voie électronique), on peine à comprendre ce qui s’opposait à ce qu’il effectuât ses recherches depuis le Portugal.

Quoi qu'il en soit, en l’occurrence, la sanction infligée correspond au minimum prévu s’agissant de recherches insuffisantes durant un délai de congé de trois mois et elle est comprise dans la moyenne prévue par la loi en cas de faute légère, de sorte qu'il est impossible à la Cour de réduire la quotité de la sanction, dès lors qu’elle respecte le principe de proportionnalité.

5.             Eu égard aux considérations qui précèdent, la sanction appliquée n’apparaît pas critiquable. Le recours est rejeté.

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Christine RAVIER

 

La présidente

 

 

 

 

Karine STECK

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le