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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4331/2020

ATAS/13/2022 du 18.01.2022 ( LAMAL ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4331/2020 ATAS/13/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 18 janvier 2022

15ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à BELLEVUE

 

 

recourant

 

contre

HELSANA ASSURANCES SA, Droit & Compliance, sise avenue de Provence 15, LAUSANNE

 

 

intimée

 


EN FAIT

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré ou le recourant), né le ______, est affilié auprès de Helsana assurances SA (ci-après : la caisse ou l’intimée) depuis 2015 pour l’assurance obligatoire des soins.

b. À partir du mois de novembre 2015, il ne s’est plus acquitté de ses primes d’assurance. Après lui avoir adressé plusieurs rappels portant sur les primes de novembre 2015 à avril 2016, la caisse a conclu avec l’assuré, le 15 juillet 2016, un arrangement de paiement échelonné. Ce dernier n’ayant pas été respecté par l’assuré, la caisse l’a annulé et a adressé, le 16 décembre 2016, une réquisition de poursuite à l’office des poursuites du canton de Genève (ci-après : l’OP) contre l’assuré, portant sur les primes en souffrance de novembre 2015 à avril 2016 (CHF 1'832.70), auxquelles s’ajoutaient les intérêts moratoires à 5 %, ainsi que des frais de rappel (CHF 120.-) et de contentieux (CHF 60.-). En l’absence d’opposition au commandement de payer, la caisse a requis de l’OP, le 8 mai 2017, la continuation de la poursuite n° 1______, qui s’est conclue par la notification d’une commination de faillite à l’assuré et a entraîné, pour la caisse, des frais de poursuite de CHF 224.85.

c. L’assuré n’ayant pas payé la prime d’assurance du mois d’octobre 2016, d’un montant de CHF 345.50, la caisse lui a adressé trois rappels successifs, dont le deuxième était assorti de frais de rappel (CHF 40.-) et le troisième de frais de contentieux (CHF 60.-), portant ainsi le total des frais administratifs à CHF 100.-. Le troisième rappel étant resté sans effet, la caisse a fait parvenir, le 11 avril 2017, une réquisition de poursuite à l’OP pour une créance de CHF 345.50 avec intérêts moratoires à 5 %, à laquelle s’ajoutaient CHF 100.- pour les frais administratifs précités. L’assuré n’ayant pas formé opposition au commandement de payer, la caisse a requis, le 31 juillet 2017, la continuation de la poursuite n° 2______, qui s’est conclue par une commination de faillite, ce qui a coûté CHF 136.20 à la caisse en frais de poursuite.

d. Accusant également un retard dans le paiement de ses primes d’assurance de novembre 2016 à mars 2017, qui représentaient la somme de CHF 2'080.15, l’assuré a reçu des deuxièmes rappels à CHF 40.- (cinq) et des troisièmes rappels à CHF 20.- chacun (cinq). Après la notification d’un commandement de payer, en date du 6 septembre 2017, portant sur la créance de CHF 2'080.15 avec intérêts à 5 % et les frais de rappel (CHF 300.-), la caisse n’a pas pu requérir la continuation de la poursuite n° 3______, faute de l’avoir fait dans les limites du délai de péremption échéant au 6 septembre 2018. Les frais de cette poursuite se sont élevés à CHF 107.60.

e. L’assuré ne s’étant pas acquitté non plus de ses primes d’assurance de juillet à septembre 2016, malgré l’envoi d’un deuxième rappel, facturé CHF 40.-, et d’un troisième et dernier rappel, facturé CHF 80.- à titre de « frais de contentieux », la caisse a adressé le 5 décembre 2016 une réquisition de poursuite à l’OP, suivie de la notification d’un commandement de payer portant sur le montant des primes précitées (CHF 979.20) avec intérêts, additionné de frais de rappel (CHF 40.-) et de « frais d’intervention » (CHF 80.-). L’assuré ne s’étant pas opposé à ce commandement de payer, la caisse a adressé à l’OP, le 8 mai 2017, une réquisition de continuer la poursuite n° 4______. À la suite de la notification, le 6 septembre 2019, d’une commination de faillite, non frappée d’opposition dans ladite poursuite, la caisse a déposé, le 6 décembre 2017, une requête en faillite ordinaire à l’encontre de l’assuré, à laquelle ce dernier a acquiescé en audience devant le Tribunal de première instance (ci-après : TPI).

Par jugement n° JTPI/2317/2018 du 8 février 2018, ce même Tribunal a déclaré l’assuré en faillite et mis les frais judiciaires, arrêtés à CHF 120.- à sa charge, en le condamnant à les verser à la caisse qui en avait fait l’avance.

Par courrier du 12 octobre 2018, l’office des faillites (ci-après : l’OF) a informé la caisse qu’en statuant par jugement du 11 octobre 2018, le TPI avait clôturé, par défaut d’actifs, la liquidation de la faillite de l’assuré.

Enfin, le 18 octobre 2018, l’OF a facturé à la caisse un montant de CHF 1'536.95 correspondant aux frais de faillite. Quant aux frais de poursuite, ils représentaient CHF 224.85.

f. L’assuré n’ayant pas non plus payé les primes d’avril à juillet 2017, d’octobre à novembre 2017 et de janvier 2018, malgré sept seconds rappels à CHF 40.- et sept troisièmes rappels, dont six à CHF 20.- et un à CHF 40.- (soit CHF 440.- au total à titre de frais de rappel), la caisse a adressé, le 8 février 2018, une réquisition de poursuite pour les primes d’avril à juillet 2017 (CHF 1'199.90 avec intérêts à 5 % ; poursuite n° 5______). Elle en a fait de même, le 19 mars 2018, pour les primes d’avril à août 2017 et d’octobre à novembre 2017 (CHF 2'602.10 avec intérêts à 5 % ; poursuite n° 6______) et, le 11 mai 2018, pour les primes d’avril à août 2017, d’octobre à novembre 2017 et de janvier 2018 (CHF 3'084.40 avec intérêts à 5 % ; poursuite n° 7______). Comme ces trois réquisitions de poursuite ont été rejetées en raison de la faillite de l’assuré, les frais de poursuite se sont finalement élevés à CHF 24.- (soit CHF 8.- par décision de rejet total de la réquisition de poursuite).

B. a. Suite à la clôture de la faillite de l’assuré faute d’actifs, la caisse a adressé des rappels de paiement à ce dernier pour :

-          les primes d’assurance de novembre 2015 à avril 2016 (ancienne poursuite n° 1______) ;

-          la prime d’assurance de juin 2016 ;

-          les primes d’assurance de juillet à septembre 2016 (ancienne poursuite n° 4______) ;

-          la prime d’assurance d’octobre 2016 (ancienne poursuite n° 2______) ;

-          les primes d’assurance de novembre 2016 à février 2017 (ancienne poursuite n°3______) ;

-          la prime d’assurance de mars 2017 ;

-          les primes d’assurance d’avril à novembre 2017 et janvier 2018 (anciennes poursuites n°s 6______ et 7______) ;

-          la prime d’assurance de décembre 2017 ;

-          et les primes d’assurance de février à décembre 2018.

En vue du recouvrement des primes listées ci-dessus, qui représentaient la somme de CHF 14'000.30 avec intérêts à 5 %, la caisse a adressé douze seconds rappels à CHF 40.- et douze troisièmes rappels à CHF 20.- (soit CHF 720.- de frais de rappel au total). En y ajoutant encore les frais relatifs aux contentieux antérieurs à l’annonce de la clôture de la faillite, à hauteur de CHF 940.-, les frais de rappel se montaient, au total à CHF 1'660.- (soit CHF 720.- + CHF 940.-). S’y ajoutaient les frais de contentieux (au sens large), à hauteur de CHF 2'574.45, comprenant les « frais de contentieux » (i.e. les frais de certains troisièmes rappels, lesquels représentaient un total de CHF 200.-), les frais judiciaires (CHF 120.-), les frais des anciennes poursuites (CHF 717.50) et les frais de faillite (CHF 1'536.95).

b. Le 27 mai 2019, la caisse a adressé à l’assuré une sommation par laquelle elle l’invitait à régler, sous sept jours, la somme de CHF 19'672.70 s’il entendait éviter une poursuite. Ce montant se composait des primes d’assurance dues pour la période de novembre 2015 à décembre 2018 (CHF 14'000.30), des intérêts moratoires au taux de 5 % dus sur CHF 14'000.30 (CHF 1'437.95), des frais de rappel (CHF 1'660.-) et des frais de contentieux (CHF 2'574.45).

c. Par pli du 25 juin 2019, l’assuré a accusé réception de ladite sommation et informé la caisse qu’elle avait la possibilité d’engager une poursuite ou de « négocier le rachat de [la] dette » moyennant une bonne réduction du montant qu’il lui devait.

d. Le 22 novembre 2019, la caisse a adressé à l’OP une réquisition de poursuite, suite à laquelle un commandement de payer, poursuite n° 8______, a été notifié le 16 décembre 2019 à l’assuré, portant sur les primes en souffrance de novembre et décembre 2015, janvier à avril 2016, juin et juillet 2016, septembre à décembre 2016, janvier à août 2017, octobre à décembre 2017, janvier à décembre 2018, lesquelles représentaient un total de CHF 14'000.30 avec intérêts à 5 % à compter du 23 novembre 2019 (CHF 1'781.25). S’y ajoutaient les frais de contentieux (CHF 200.-), les frais judiciaires (CHF 120.-) ainsi que les frais de poursuite et de rappel (CHF 3'914.45).

e. Le 20 décembre 2019, l’assuré a formé opposition à ce commandement de payer.

f. Le 4 mars 2020, l’assuré a effectué un versement de CHF 483.25 à l’OP, réduisant ainsi ses arriérés de primes de CHF 14'000.30 à CHF 13'517.05.

g. Par décision du 21 avril 2020, la caisse a prononcé la mainlevée de l’opposition au commandement de payer, poursuite n° 8______, et mis à la charge de l’assuré un montant de CHF 19'860.75 se composant des primes en souffrance (CHF 13'517.05), des frais de contentieux à hauteur de CHF 2'705.- (sic), des frais de rappel (CHF 1'660.-) et des intérêts moratoires à 5 % (CHF 1'978.70).

h. Par pli du 24 mars 2020, l’assuré a formé opposition à cette décision en soutenant qu’elle comportait de nombreuses erreurs à son détriment, ainsi qu’une disproportion entre la créance principale de CHF 13'517.05 d’une part, et les frais annexes et intérêts d’autre part, lesquels représentaient ensemble une « plus-value de 47 % ».

i. Par pli du 8 mai 2020, la caisse a réfuté les critiques émises et refusé de donner suite à une proposition de l’assuré, consistant à verser un montant de CHF 9'930.- pour solde de tout compte.

j. Le 4 novembre 2020, l’assuré a effectué un versement de CHF 213.25 à l’OP.

k. Par décision sur opposition du 20 novembre 2020, la caisse a rejeté l’opposition de l’assuré et mis à la charge de ce dernier les montants suivants :

 

CHF

13'517.05

Créance principale, intérêts de 5 % dès le 23 novembre 2019

-

CHF

213.25

Déduction du versement du 4 novembre 2020

+

CHF

1'660.-

Frais de rappel

+

CHF

200.-

Frais administratifs

+

CHF

837.50

Anciens frais de poursuites

+

CHF

1'536.95

Frais de faillite

+

CHF

120.-

Frais judiciaires

+

CHF

1'781.25

Intérêts de 5 % jusqu’au 22 novembre 2019

=

CHF

19'439.50

TOTAL

C. a. Le 21 décembre 2020, l’assuré a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : CJCAS) d’un recours contre cette décision sur opposition, concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation.

À l’appui de ses conclusions, il a repris en substance les arguments développés dans son opposition en ajoutant qu’il avait le sentiment que certaines dettes étaient comptabilisées deux fois, ce qui était notamment le cas, selon lui, pour la prime du mois d’août 2017. Pour étayer ces allégations, il a produit un acte de défaut de biens du 27 novembre 2019 – d’un montant total de CHF 609.-, mentionnant comme cause de l’obligation la « participation aux coûts LAMal 08/2017 » –, ainsi que le commandement de payer, poursuite n° 19 365587 Y, notifié le 16 décembre 2019, lequel faisait mention notamment de la prime du mois d’août 2017.

b. Par réponse du 4 février 2021, l’intimée a concédé que la décision litigieuse comportait une erreur en tant qu’elle mettait à la charge du recourant les anciens frais de poursuite à hauteur de CHF 837.50. Étant donné que ceux-ci se montaient en réalité à CHF 717.50, la décision attaquée devait être modifiée en conséquence et le montant mis à la charge du recourant réduit de la différence (CHF 120.-). En outre, une deuxième erreur concernait la prime d’août 2016 : la décision litigieuse mentionnait à tort cette prime en lieu et place de celle de juin 2016, indiquée dans le commandement de payer, notifié le 16 décembre 2019 dans la poursuite n° 8______. Même si cela ne modifiait pas le montant total de la créance due, le dispositif de la décision devait être modifié et réduit de CHF 345.50, montant qui correspondait à la prime indiquée pour le mois d’août 2016, laquelle ne faisait pas partie de la poursuite n° 8______. En conséquence, l’intimée a proposé de réduire la créance principale à due concurrence, soit de CHF 13'517.05 à CHF 13'171.55. L’intimée a précisé, à toutes fins utiles, que cette prime d’août 2016 ferait l’objet d’une nouvelle poursuite, à moins que le recourant ne s’en acquitte avant. Pour le reste, les montants retenus dans la décision attaquée étaient corrects. S’il était vrai que certaines primes avaient fait l’objet de plusieurs poursuites, elles n’avaient pas pour autant été réclamées à double puisque les anciennes poursuites, antérieures à la poursuite n° 8______ étaient toutes closes.

c. Le 9 février 2021, la chambre de céans a adressé une copie de cette écriture au recourant et lui a imparti un délai au 5 mars 2021 pour faire parvenir sa réplique.

d. Le 16 mars 2021, la chambre de céans a informé les parties qu’en l’absence de réplique dans le délai imparti, la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 4 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ – E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA – RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-maladie, du 18 mars 1994 (LAMal – RS 832.10).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             2.1 À teneur de l’art. 1 al. 1 LAMal, les dispositions de la LPGA s’appliquent à l’assurance-maladie, à moins que la loi n’y déroge expressément.

2.2 Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Toutefois, dans la mesure où le recours était, au 1er janvier 2021, pendant devant la chambre de céans, il reste soumis à l’ancien droit (cf. art. 82a LPGA ; RO 2020 5137 ; FF 2018 1597 ; erratum de la Commission de rédaction de l’Assemblée fédérale du 19 mai 2021, publié le 18 juin 2021 in RO 2021 358).

2.3 La procédure devant la chambre de céans est régie par les dispositions de la LPGA et de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985 (LPA-E 5 10).

Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la LPA).

Interjeté à temps et satisfaisant aux exigences de forme et de contenu prévues par l’art. 61 let. b LPGA (cf. aussi l’art. 89B LPA), le recours est recevable.

3.             Le litige porte sur le bien-fondé de la décision de mainlevée d’opposition prononcée par l’intimée le 20 novembre 2020 portant sur une créance principale de CHF 13'303.80 (soit CHF 13'517.05 moins un paiement de CHF 213.25), des frais de rappels de CHF 1'660.-, des frais administratifs de CHF 200.-, d’anciens frais de poursuites de CHF 837.50, des frais de faillite de CHF 1'536.95, des frais judiciaires de CHF 120.- et des intérêts moratoires de CHF 1'718.25 (5 % jusqu’au 22 novembre 2019).

L’intimée a conclu à ce que la chambre de céans confirme la mainlevée en réduisant cependant la créance principale à CHF 13'171.55 (réduction de la prime impayée d’août 2016 d’un montant de CHF 345.50, qui ne faisait pas l’objet de la poursuite n° 8______) et les frais des anciennes poursuites à CHF 717.50, ainsi que, pour le surplus, au rejet du recours.

Le recourant soutient que certaines primes auraient été comptabilisées deux fois en raison de plusieurs poursuites ayant le même objet et qu’il existerait une disproportion entre le montant de la créance principale et celui des intérêts et des frais réclamés, ces frais attestant même d’une gestion « très mauvaise ».

4.             4.1 S’agissant du premier moyen invoqué par le recourant, il est rappelé que la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite du 11 avril 1889 (LP – RS 281.1) dispose à son art. 230 al. 4 que les poursuites engagées avant l’ouverture de la faillite renaissent après la suspension de celle-ci, cette disposition devant être mise en relation avec l’art. 206 al. 1 LP, dont elle constitue une exception (ATF 124 III 123, consid. 2). En vertu de l'art. 206 al. 1 LP, toutes les poursuites dirigées contre le failli, à l’exception des poursuites en réalisation de gages appartenant à un tiers, s’éteignent avec l’ouverture de la faillite. Le mode d’exécution forcée générale que constitue la faillite ne saurait en effet comporter l’existence « simultanée » de procédures d’exécution spéciales, hormis l’exception précitée (cf. ATF 93 III 55, consid. 3). L’exception prévue à l’art. 230 al. 4 LP ne s’appliquant qu’aux poursuites encore susceptibles d’être continuées au moment de la faillite, la poursuite qui a été menée à son terme par la réquisition de continuer la poursuite et le prononcé de la faillite ne peut donc pas renaître après la suspension de celle-ci (ATF 124 III 123). De même, le créancier qui entend poursuivre l’ex-failli par voie de saisie (art. 230 al. 3 LP) n’a pas d’autre choix que d’introduire une nouvelle poursuite lorsqu’un autre mode de poursuite a déjà été arrêté par la notification d’une commination de faillite (arrêt du Tribunal fédéral 5A_784/2015 du 15 janvier 2016, consid. 3.3.2).

4.2.1 En l’espèce, après la suspension de la faillite faute d’actifs prononcée par le TPI le 11 octobre 2018, la poursuite n° 4______ (continuée jusqu’au prononcé de la faillite) n’a pas pu renaître et les autres poursuites qui avaient abouti à la notification d’une commination de faillite (poursuites n° 1______ et 2______) se sont également éteintes avec l’ouverture de la faillite. L’intimée a dès lors été contrainte d’introduire une nouvelle poursuite. Cette dernière voie s’imposait également au vu du sort réservé à la poursuite n° 3______ (péremption du droit d’en requérir la continuation ; cf. art. 88 al. 2 LP) et aux réquisitions de poursuites n°s 5______, 6______ et 7______, rejetées en raison de la faillite du recourant (cf. pièces 10r à 10t intimée). En conséquence, s’il est vrai, comme le relève le recourant, qu’il ressort de l’extrait du registre des poursuites le concernant que « diverses poursuites [de l’intimée] étaient en doublons », on ne saurait en conclure que les créances qu’elles concernaient lui auraient été réclamées plus d’une fois puisque les poursuites antérieures à la poursuite n° 8______ étaient déjà éteintes lorsque cette dernière a été requise. Du reste, il n’est pas allégué par le recourant et il ne ressort pas des pièces du dossier que la poursuite n° 8______ porterait sur des dettes dont il se serait déjà acquitté.

4.2.2 Le recourant soutient encore que la prime du mois d’août 2017 aurait fait l’objet d’une tentative de recouvrement distincte de la poursuite n° 8______, un acte de défaut de biens ayant été délivré le 27 novembre 2019 concernant une « participation aux coûts LAMal 08/2017 ».

La chambre de céans constate sur ce point que, contrairement à ce qu’indique le recourant, il ressort du libellé de cet acte qu’il concerne un arriéré de participation aux coûts d’août 2017 et non la prime du mois d’août 2017. Le grief s’avère par conséquent infondé.

5.             Bien que le recourant ne conteste ni le montant des primes ni leur non-paiement dans la mesure réclamée dans la décision litigieuse, il convient néanmoins de constater que dans sa réponse au recours, l’intimée a conclu à ce que le dispositif de la décision litigieuse soit modifié et la créance principale réduite de CHF 345.50 en raison de paiements faits par le recourant.

Ce dernier montant correspond à la prime du mois d’août 2016, qui n’était pas incluse dans la poursuite n° 8______ (cf. pièces 62 et 63 intimée), de sorte que la chambre de céans admettra le recours et statuera dans le sens de la proposition de l’intimée. Elle réduira par conséquent la créance principale à CHF 13'171.55 (soit CHF 13'517.05 - CHF 345.50).

6.             Le recourant fait valoir que le montant des frais et intérêts réclamés serait excessif. Aussi convient-il de rappeler ci-après les principes qui en régissent la fixation.

6.1 Le financement de l’assurance-maladie sociale repose sur les assurés et les pouvoirs publics. Il dépend donc étroitement de l'exécution par les assurés de leurs obligations pécuniaires. Ces derniers sont ainsi légalement tenus de s'acquitter du paiement des primes (cf. art. 61 LAMal) et des participations aux coûts (cf. art. 64 LAMal). Les assureurs ne sont, quant à eux, pas libres de recouvrir ou non les arriérés de primes et de participations aux coûts. Au contraire, et au regard des principes de mutualité et d’égalité de traitement prévalant dans le domaine de l'assurance-maladie sociale (art. 13 al. 2 let. a LAMal), ils sont tenus de faire valoir leurs prétentions découlant des obligations financières des assurés par la voie de l’exécution forcée selon la LP (art. 105b de l’ordonnance du 27 juin 1995 sur l’assurance-maladie [OAMal – RS 832.102]). Par conséquent, si l’assureur est au bénéfice d’un jugement exécutoire au sens de l’art. 80 LP, auquel est assimilée une décision ou une décision sur opposition exécutoire portant condamnation à payer une somme d'argent ou à fournir des sûretés (art. 54 al. 2 LPGA), il peut requérir du juge la mainlevée définitive de l'opposition ; s’il ne dispose pas d’un tel titre de mainlevée, il doit faire valoir le bien-fondé de sa prétention par la voie de la procédure administrative, conformément à l’art. 79 LP (ATF 131 V 147 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_742/2011 du 17 novembre 2011 consid. 5.1).

À certaines conditions, les assureurs-maladies sont en droit de lever par une décision formelle l’opposition à un commandement de payer portant sur une créance découlant de la LAMal. Les assureurs peuvent donc introduire une poursuite pour leurs créances pécuniaires même sans titre de mainlevée entré en force, rendre après coup, en cas d’opposition, une décision formelle portant condamnation à payer les arriérés de primes ou de participations aux coûts et, après l’entrée en force de cette dernière, requérir la continuation de la poursuite. Si le dispositif de la décision administrative se réfère avec précision à la poursuite en cours et lève expressément l’opposition à celle-ci, ils pourront requérir la continuation de la poursuite sans passer par la procédure de mainlevée de l’art. 80 LP. Dans sa décision, l’autorité administrative prononcera non seulement une décision au fond selon le droit des assurances sociales sur l’obligation pécuniaire de l’assuré, mais elle statuera simultanément sur l’annulation de l’opposition comme autorité de mainlevée. Il en va de même des tribunaux en cas de recours (BGE 119 V 329 consid. 2b ; RKUV 2004 Nr. KV 274 S. 129 E. 4.2.1, K 107/02 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_903/2009 du 11 décembre 2009, consid. 2.1).

6.2 Aux termes de l’art. 64a LAMal, lorsque l’assuré n’a pas payé des primes ou des participations aux coûts échues, l’assureur lui envoie une sommation, précédée d’au moins un rappel écrit ; il lui impartit un délai de trente jours et l’informe des conséquences d’un retard de paiement (al. 1). Si, malgré la sommation, l’assuré ne paie pas dans le délai imparti les primes, les participations aux coûts et les intérêts moratoires dus, l’assureur doit engager des poursuites. Le canton peut exiger que l’assureur annonce à l’autorité cantonale compétente les débiteurs qui font l’objet de poursuites (al. 2).

6.2.1 Selon l’art. 90 OAMal, les primes doivent être payées à l’avance et en principe tous les mois.

Sous la note marginale « procédure de sommation », l’art. 105b OAMal dispose que l’assureur envoie la sommation en cas de non-paiement des primes et des participations aux coûts dans les trois mois qui suivent leur exigibilité. Il l’adresse séparément de toute sommation portant sur d’autres retards de paiements éventuels (al. 1). Lorsque l’assuré a causé par sa faute des dépenses qui auraient pu être évitées par un paiement effectué à temps, l’assureur peut percevoir des frais administratifs d’un montant approprié, si une telle mesure est prévue par les conditions générales sur les droits et les obligations de l’assuré (al. 2).

6.2.2 Les conditions d’assurance (ci-après : CA) de la caisse relatives à l’assurance obligatoire des soins (Basis), dans leur teneur en vigueur au 1er janvier 2014, prévoient à leur chiffre 5.5 que les frais résultant du retard dans l’acquittement des primes et des participations aux coûts, comme par exemple les frais de rappel et les frais d’encaissement, vont à la charge de la personne assurée.

Selon la jurisprudence, l’assureur peut émettre des règles autonomes quant aux frais de sommation perçus en cas de demeure de l’assuré, pour autant que ces coûts aient été causés par l’assuré et que le dédommagement soit approprié (ATF 125 V 276 consid. 2c/bb). En d’autres termes, l’assurance doit s’en tenir au principe d’équivalence, qui exige qu’un émolument ne soit pas en disproportion manifeste par rapport au paiement en souffrance et reste dans des limites raisonnables (arrêt du Tribunal fédéral 9C_874/2015 du 4 février 2016 consid. 4.1 et les références). Les frais administratifs ne doivent pas être une source de revenus supplémentaires pour l’assurance mais uniquement couvrir ses coûts (Gebhard EUGSTER, Krankenversicherung, in MEYER [éd.], Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, vol. XIV, 3ème éd. 2016, n. 1349).

Dans le cadre de l’appréciation du principe d’équivalence, le Tribunal fédéral a considéré que des frais de CHF 160.- prélevés pour des factures impayées d’un montant total de l’ordre de CHF 2'130.- environ restaient proportionnés, même s’il s’agissait d’un cas limite (arrêt du Tribunal fédéral des assurances K 112/05 du 2 février 2006 consid. 4.3). Il a retenu que des frais s’élevant à CHF 300.- pour des retards de paiements à hauteur de CHF 4'346.70 restaient également dans les limites acceptables au vu des circonstances (arrêt du Tribunal fédéral des assurances K 76/03 du 9 août 2005 consid. 3). Il n’a pas non plus remis en cause des frais de rappel de CHF 20.- pour une facture de CHF 62.50 (arrêt du Tribunal fédéral des assurances K 24/06 du 3 juillet 2005). S’agissant de frais de rappel de CHF 480.- pour des factures de CHF 1'025.25, de CHF 280.- pour des frais de CHF 735.60, de CHF 280.- pour des factures de CHF 549.95, notre Haute Cour a considéré que les frais de rappel n’étaient plus dans une proportion raisonnable par rapport aux paiements de primes en retard, puisqu’ils représentaient de 40 % à 50 % des primes impayées (arrêt du Tribunal fédéral 9C_873/2015 du 4 février 2016 consid. 4.2.1).

6.2.3 En vertu de l’art. 26 al. 1 LPGA, les créances de cotisations échues sont soumises à la perception d'intérêts moratoires. Le taux d'intérêt moratoire pour les primes échues est de 5 % par année (art. 105a OAMal).

Selon l’art. 5.2 CA, les primes doivent être payées d’avance et sont échues le premier jour de chaque mois ou, si d’autres périodes de paiement ont été convenues, le premier jour de la période correspondante.

6.3 En l’espèce, les frais de rappel, à hauteur de CHF 1'660.- (CHF 1'860.- en y incluant les « frais administratifs » [i.e. les frais de certains troisièmes rappels] à hauteur de CHF 200.- au total) doivent être mis en relation avec les arriérés de primes qui représentent CHF 13'171.55, respectivement CHF 12'958.30 après un versement de CHF 213.25 effectué le 4 novembre 2020. Même s’ils apparaissent plutôt élevés, ces frais n’atteignent pas pour autant un seuil à partir duquel une réduction judiciaire s’imposerait (cf. l’arrêt ATAS/375/2021 du 26 avril 2021 dans lequel des frais de rappel se montant à 36 % du montant réclamé ont été réduits à 24.75 % de celui-ci ; voir aussi consid. 6.2.2 ci-dessus).

S’agissant enfin des intérêts moratoires, le recourant ne saurait être suivi en tant qu’il tente de tirer argument des taux négatifs appliqués depuis plusieurs années par la Banque Nationale Suisse. Au vu des dispositions précitées (cf. ci-dessus : consid. 6.2.3), c’est à juste titre que l’intimée a réclamé le versement d’intérêts à 5 % sur les primes échues. Force est néanmoins de constater que si la prime du mois d’août 2016, d’un montant de CHF 345.50, n’était pas comprise dans la poursuite n° 8______ (cf. consid. 5 ci-dessus), il n’y a pas lieu non plus de mettre à la charge du recourant les intérêts moratoires y relatifs, que l’intimée a fait courir à partir du 9 août 2016 dans la poursuite n° 4______ (cf. pièces 7e à 7g intimée). Ainsi, en tant que la décision litigieuse met à la charge du recourant le montant de CHF 1'781.25 à titre d’intérêts moratoires à 5 % ayant couru jusqu’à la réquisition de poursuite du 22 novembre 2019, il convient d’en retrancher les intérêts moratoires ayant couru jusqu’à cette date depuis le 9 août 2016 pour la prime du mois d’août 2016. Ceux-ci représentent CHF 1'726.50 par an, ce qui correspond à CHF 56.80 sur les 1201 jours compris entre le 9 août 2016 et le 22 novembre 2019. Les intérêts moratoires doivent donc être réduits d’autant, de sorte qu’ils se montent à CHF 1'724.45.

6.4 Dans un dernier moyen, le recourant fait grief à l’intimée de l’avoir mis en faillite sans pour autant faire l’avance complète des frais de faillite, ce qui aurait généré des « frais inutiles de faillite ».

En argumentant de la sorte, le recourant omet de prendre en compte le fait que le mode de poursuite (saisie, respectivement faillite) est déterminé non pas par le créancier mais par le préposé à l’OP (cf. art. 38 al. 3 LP). Par ailleurs, il ne saurait être reproché à l’intimée de n’avoir pas demandé la continuation de la liquidation, ni effectué, à cet effet, une avance de frais de CHF 4'000.-, sachant que le TPI avait constaté, le 23 août 2018, en ordonnant la suspension de la faillite, que les actifs n’étaient précisément pas suffisants pour couvrir les frais de liquidation (cf. pièce 7k intimée). Ainsi, en tant qu’elle met à la charge du recourant les frais de faillite que l’OF a facturés à l’intimée (CHF 1'536.95), la décision litigieuse ne prête pas le flanc à la critique. En effet, il peut être déduit du principe prévu par l’art. 68 al. 1 LP – aux termes duquel les frais de poursuite sont à la charge du débiteur – que le failli répond personnellement aussi envers le(s) créancier(s) ayant requis sa faillite des frais entraînés par la faillite suspendue faute d’actifs (cf. Urs LUSTENBERGER / Sergej SCHENKER, in Basler Kommentar, SchKG, 2021, n. 14d ad art. 230 LP).

S’agissant des frais de poursuite au sens étroit, ils incombent également au recourant en vertu de l’art. 68 al. 1 LP (arrêt du Tribunal fédéral K 21/04 du 5 juillet 2004 consid. 3), étant souligné qu’un paiement des primes en temps utile aurait permis de les éviter. L’intimée relève toutefois à juste titre dans sa réponse au recours que la décision litigieuse mentionne par erreur CHF 837.50 (au lieu de CHF 717.50) au titre des anciens frais de poursuite. Aussi convient-il d’en tenir compte et de modifier la décision litigieuse en conséquence.

7.             Compte tenu de ce qui précède, le recours sera très partiellement admis et la mainlevée de l’opposition au commandement de payer, poursuite n° 8______, prononcée à hauteur de CHF 18'917.20 (soit CHF 13'171.55 avec intérêts à 5 % dès le 23 novembre 2019, montant auquel s’ajoutent CHF 1'660.- de frais de rappel, CHF 200.- de frais administratifs, CHF 717.50 de frais d’anciennes poursuites, CHF 1'536.95 de frais de faillite, CHF 120.- de frais judiciaires [JTPI/2317/2018 du 8 février 2018] et CHF 1'724.45 à titre d’intérêts à 5 % dus jusqu’au 22 novembre 2019, montants dont il faut déduire CHF 213.25 pour le versement effectué le 4 novembre 2020 par le recourant).

8.             Le recourant n’étant pas représenté, il n’y a pas lieu de lui octroyer de dépens (art. 61 let. g LPGA a contrario).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA).

*****


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet très partiellement.

3.        Annule la décision sur opposition du 20 novembre 2020.

4.        Prononce la mainlevée de l’opposition au commandement de payer, poursuite n° 8______, à hauteur de CHF 18'917.20.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Marie NIERMARÉCHAL

 

La présidente

 

 

 

 

Marine WYSSENBACH

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le