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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2635/2024

ATA/1180/2024 du 08.10.2024 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2635/2024-FORMA ATA/1180/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 8 octobre 2024

2ème section

 

dans la cause

 

A______, enfant mineure agissant par ses parents, B______ et C______ recourante
représentée par Me Romain JORDAN, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA FORMATION ET DE LA JEUNESSE intimé

 



EN FAIT

A. a. A______, née le ______ 2008, a accompli en 2022-2023 la 10e année de sa scolarité en section littéraire scientifique au cycle d’orientation de la Florence.

Au terme de cette 10e année, elle a été promue par dérogation en raison d’une moyenne annuelle d’allemand de 3.8 et de mathématiques de 2.8, et avec une moyenne annuelle générale de 4.6 et une moyenne annuelle des disciplines principales de 3.9.

b. Elle a accompli en 2023-2024 la 11e année de sa scolarité en section littéraire et scientifique dans le même cycle d’orientation.

Il ressort du bulletin scolaire de ses résultats pour l’année 2023-2024 établi le 20 juin 2024 qu’elle a obtenu une moyenne annuelle générale de 4.9 et une moyenne annuelle des disciplines principales de 4.3, mais une moyenne annuelle de 3.3 en mathématiques, alors que la note minimum de 3.5 était exigée pour cette discipline, de sorte qu’elle n’était pas promue.

c. Le 28 juin 2024, les parents de A______ ont adressé à la direction générale de l’enseignement secondaire II (ci-après : DGES II) du département de l’instruction publique, de la formation et de la jeunesse (ci-après : DIP) un « recours à l’orientation de A______ ».

Leur fille avait traversé une période de grande vulnérabilité en 2022 et 2023. Ses difficultés psychologiques avaient affecté sa capacité à s’investir dans ses apprentissages et elle avait été suivie régulièrement par une psychothérapeute dès avril 2022. Une progressive amélioration de son état de santé au cours de l’année 2023 lui avait permis un nouvel investissement de sa scolarité et de ses projets d’études. Au cours de l’année scolaire 2023-2024, elle avait pu progressivement réinvestir les différents domaines de sa vie et formuler un choix déterminé d’aller au collège et de faire des études littéraires, en français ou en philosophie, avec l’ambition éventuellement d’enseigner ces matières. Sa moyenne de mathématiques du premier trimestre avait été la plus impactée par ses difficultés. Son enseignante était rigoureuse et exigeante et elle n’avait pas obtenu d’aménagements ni de possibilités de rattrapage. Elle avait redoublé d’efforts avec le répétiteur qui la suivait depuis l’été dans le but de combler ses lacunes.

La plupart des enseignants soutenaient son projet d’aller au collège. Une chance devait lui être donnée d’y accéder et de réaliser le parcours correspondant à ses intérêts et à ses capacités d’apprentissage. Étaient jointes des attestations de son psychiatre et de son psychothérapeute.

d. Par décision du 18 juillet 2024, la DGES II a rejeté la demande d’admission par dérogation en 1re année gymnasiale formée par A______.

Elle avait conclu sa dernière année de section littéraire-scientifique au cycle d’orientation sans être promue et aucune dérogation n’était possible.

B. a. Par acte remis à la poste le 15 août 2024, A______, agissant par ses parents B______ et C______, a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant à son annulation et à sa réformation (sic) en ce qu’elle devait être admise au sein de l’enseignement secondaire II en première année gymnasiale dès la rentrée 2024‑2025. À titre préalable, son maître de classe et la psychologue de l’école devaient être entendus. Sur mesures provisionnelles, son admission en première année gymnasiale devait être autorisée jusqu’à droit connu au fond.

Elle avait subi un harcèlement de la part de camarades et souffert depuis la 7e année de sa scolarité. Elle s’était retrouvée en 9e année dans la même école que ses harceleurs. Elle avait souffert d’une grande détresse en 2022 et 2023, tant au niveau psychologique qu’à celui de ses capacités d’apprentissage. Elle n’avait repris possession de ses moyens qu’au deuxième trimestre 2023. Elle n’avait été capable de réinvestir ses études qu’au cours de l’année 2023-2024. Sa mère avait demandé le 18 juin 2024 s’il était possible de calculer sa moyenne annuelle sur les deux derniers trimestres, ce que le cycle d’orientation avait refusé.

Son droit d’être entendue avait été violé, son dossier complet n’ayant été ni transmis ni mis à disposition de ses parents malgré leurs demande réitérées.

La décision violait le principe de proportionnalité et consacrait un excès négatif du pouvoir d’appréciation, dès lors qu’elle avait certes obtenu une moyenne en mathématiques de 3.3 mais qu’elle « surrempli[ssai]t » les tolérances en obtenant à la fois une moyenne générale de 4.9, une moyenne des disciplines principales de 4.3 et une seule moyenne annuelle « en-dessous de 3.3 » (recte : entre 3.0 et 3.4). Le refus de prendre en compte ses résultats des deux derniers trimestres en mathématiques alors qu’elle avait par ailleurs obtenu d’excellents résultats n’était ni apte, ni nécessaire, ni adéquat à favoriser sa progression dans le respect de sa personnalité.

b. Le 21 août 2024, le DIP a conclu au rejet de la demande de mesures provisionnelles.

c. Le 26 août 2024, la recourante a persisté dans ses conclusions sur mesures provisionnelles.

d. Par décision du 30 août 2024, la vice-présidente de la chambre administrative a rejeté la demande de mesures provisionnelles.

e. Le 6 septembre 2024, le DIP a conclu au rejet du recours.

Un dossier complet avait été adressé à la recourante, dont le droit d’être entendue n’avait pas été violé.

Le DIP ne disposait d’aucun pouvoir d’appréciation, une admission par dérogation en 1re année gymnasiale n’étant réglementairement pas possible, et le principe de proportionnalité n’avait pas été violé.

f. Le 23 septembre 2024, la recourante a persisté dans ses conclusions au fond.

Le DIP avait affirmé avoir remis les pièces nécessaires et suffisantes à la prise de décision, ce qui laissait entendre qu’elle n’avait pas examiné son dossier complet. Les pièces produites montraient que le DIP n’avait demandé son dossier que le 13 août 2024 et ne le possédait donc pas au moment de prendre la décision du 18 juillet 2024, de sorte que l’analyse détaillée dont celle-ci se prévalait n’avait en réalité jamais eu lieu. Son droit d’être entendue avait bien été violé.

Le DIP ne fournissait aucune explication à son « interprétation obtuse » de l’art. 53 al. 3 du règlement du cycle d'orientation du 9 juin 2010 (RCO - C 1 10.26), lequel lui octroyait pourtant la possibilité de constituer des moyennes annuelles sur deux périodes pour déterminer la promotion, voire ne tenir compte que d’une période dans des situations exceptionnelles. En combinaison avec l’art. 20 let. a du règlement relatif à l'admission dans l'enseignement secondaire II du 14 avril 2021 (RAES II ‑ C 1 10.33), cette disposition permettait d’admettre dans la filière gymnasiale les élèves promus de 11e année par dérogation en section littéraire et scientifique. Il ne s’agissait donc pas de lui accorder une admission par dérogation à l’entrée dans l’enseignement secondaire II mais le bénéfice d’une promotion par dérogation à l’issue de son parcours au degré secondaire I, valant comme condition d’admission en 12e année du degré secondaire II.

L’art. 16 RAES-II prévoyait un système de dérogation permettant aux élèves n’ayant pu valider qu’un ou deux trimestres en 11e année en raison de justes motifs, tels la maladie ou l’accident, d’accéder à la 12e année, pour autant qu’une évaluation significative ait pu être faite dans toutes les matières et après analyse du dossier par la DGES-II. L’autorité possédait donc un pouvoir d’appréciation.

Elle bénéficiait d’un juste motif étayé par certificats médicaux et sa demande de ne prendre en compte que deux trimestres avait été rejetée. Or, les résultats des 2e et 3e trimestres de sa 11e année remplissaient les conditions de promotion, et elle avait été évaluée de manière significative dans toutes les disciplines.

Le DIP n’avait jamais examiné les singularités de sa situation psychologique. Son état de détresse psychologique avait très fortement obéré ses résultats lors du premier trimestre de l’année 2023-2024. Il commandait d’opérer une distinction au vu des circonstances, à peine de violer le principe de l’égalité de traitement d’un point de vue matériel.

g. Le 30 septembre 2024, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

h. Le 3 octobre 2024, la recourante a produit trois évaluations récentes de français et d’allemand comportant chacune la note de 6.0.

i. Il sera revenu en tant que de besoin dans la partie en droit sur les arguments et les pièces produits par les parties.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             La recourante conclut préalablement à l’audition de deux témoins.

2.1 Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes et de participer à l’administration des preuves essentielles lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1 ; 142 III 48 consid. 4.1.1). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas la juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier si elle acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1). Le droit d'être entendu ne contient pas non plus d’obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant ; il suffit que la juge discute ceux qui sont pertinents pour l'issue du litige (ATF 142 III 433 consid. 4.3.2 ; 141 III 28 consid. 3.2.4). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

2.2 En l’espèce, la recourante a pu faire valoir devant la chambre de céans tous ses arguments et produire toute pièce utile. Elle n’explique pas quels éléments supplémentaires qu’elle n’aurait pu apporter par écrit l’audition de la psychologue du cycle d’orientation D______ et de son maître de classe en 11e année E______ serait susceptible d’apporter. La chambre de céans dispose d’un dossier complet et la cause est en état d’être jugée.

Il ne sera pas donné suite à sa demande d’actes d’instruction.

3.             Le recours est dirigé contre la décision du 18 juillet 2024 rejetant la demande d’admission par dérogation en 1re année gymnasiale, dont il demande l’annulation et la réformation – soit l’admission de la recourante en 1re année gymnasiale.

Le recours mentionne, dans son argumentation, la décision du 20 juin 2024, pour se plaindre d’une approche schématique et d’un refus général de prendre en compte les difficultés psychologiques de la recourante. Il ne vise toutefois pas la décision de non-promotion ni ne prend de conclusions à son endroit, de sorte que le grief formulé par la recourante dans sa réplique au fond du 23 septembre 2024 – selon lequel ce n’est pas tant une admission par dérogation à l’entrée dans l’enseignement secondaire II qu’il s’agit de lui accorder, mais le bénéfice d’une promotion par dérogation à l’issue de son parcours scolaire du secondaire I, « ladite promotion valant comme condition d’admission régulière » – apparaît irrecevable en tant qu’il excède le cadre du litige.

4.             Dans un premier grief, de nature formelle, la recourante se plaint de la violation de son droit d’être entendue.

4.1 Le droit d’être entendu comprend également le droit pour la personne concernée de s’expliquer avant qu’une décision ne soit prise à son détriment et celui d’avoir accès au dossier. En tant que droit de participation, le droit d’être entendu englobe donc tous les droits qui doivent être attribués à une partie pour qu’elle puisse faire valoir efficacement son point de vue dans une procédure (ATF 148 II 73 consid. 7.3.1 ; 132 II 485 consid. 3.2 ; 129 II 497 consid. 2.2).

En tant que garantie générale de procédure, le droit d’être entendu permet au justiciable de consulter le dossier avant le prononcé d’une décision. En effet, la possibilité de faire valoir ses arguments dans une procédure suppose la connaissance préalable des éléments dont l’autorité dispose (ATF 126 I 7 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_66/2013 du 7 mai 2013 consid. 3.2.2). Le droit de consulter le dossier, déduit de l'art. 29 al. 2 Cst., s'étend à toutes les pièces décisives figurant au dossier et garantit que les parties puissent prendre connaissance des éléments fondant la décision et s'exprimer à leur sujet (ATF 142 I 86 consid. 2.2 ; 132 II 485 consid. 3.2 ; 129 I 85 consid. 4.1). L'accès au dossier peut être supprimé ou limité dans la mesure où l'intérêt public ou l'intérêt prépondérant de tiers, voire du requérant lui-même, exigent que tout ou partie des documents soient tenus secrets (ATF 126 I 7 consid. 2b ; 122 I 153 consid. 6a).

Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d’être entendu comprend également le droit d’obtenir une décision motivée (ATF 142 II 154 consid. 4.2 ; ATF 141 V 557 consid 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_954/2020 du 26 juillet 2021 consid. 4.1 et les références). L’autorité n’est toutefois pas tenue de prendre position sur tous les moyens des parties ; elle peut se limiter aux questions décisives (ATF 146 II 335 consid. 5.1 ; 142 II 154 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2e éd., 2018, p. 531 n. 1573). Il suffit, de ce point de vue, que les parties puissent se rendre compte de la portée de la décision prise à leur égard et, le cas échéant, recourir contre elle en connaissance de cause (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1 ; 138 I 232 consid. 5.1 ; ATA/250/2023 du 14 mars 2023 consid. 3.1 ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3e éd., 2011, p. 348 ss, n. 2.2.8.3).

4.2 En l’espèce, la recourante reproche au DIP de persister à ne pas mettre à sa disposition son dossier administratif et scolaire.

Dans sa réponse au fond du 6 septembre 2024, le DIP expose avoir transmis toutes les pièces « susceptibles de servir de base de décision » de manière complète et détaillée, les 24 juillet, 6, 13 et 14 août 2024. Il énumère les pièces reçues du cycle d’orientation de la Florence le 13 août 2024.

Dans sa réplique au fond, la recourante ne conteste pas la production des pièces mais maintient le grief de violation du droit d’être entendue, au motif cette fois que le DIP n’avait pas connaissance du dossier du cycle d’orientation au moment de prononcer la décision querellée.

Cet argument tombe à faux. Il a été vu que le litige ne porte que sur le refus d’admission du 18 juillet 2024 et non sur la décision de non-promotion du 20 juin 2024. Le DIP a motivé la décision querellée en affirmant – avec constance – que la réglementation ne permettait aucune dérogation si les conditions d’admission en 1re année gymnasiale n’étaient pas réunies, de sorte qu’il n’aurait en toute hypothèse pas eu à prendre en compte les échanges antérieurs avec le cycle d’orientation, quoi qu’il ait par ailleurs pu dire des pièces « susceptibles de servir de base de décision ».

Le grief sera écarté.

5.             La recourante reproche à l’intimé la violation du principe de proportionnalité et un excès négatif de son pouvoir d’appréciation.

5.1 La formation est obligatoire jusqu’à l’âge de la majorité au moins (art. 194 al. 1 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 - Cst‑GE - A 2 00).

5.2 Le degré secondaire II est composé notamment des établissements scolaires du collège de Genève, du collège pour adultes, de l’école de culture générale et de l’école de culture générale pour adultes (art. 84 al. 1 let. a de la loi sur l’instruction publique du 17 septembre 2015 - LIP - C 1 10).

5.3 Selon l’art. 81 LIP, tout élève promu de la dernière année du cycle d’orientation a un accès direct à une filière du degré secondaire II (al. 1). Les élèves promus de la section latine scientifique ont accès directement aux filières du degré secondaire II conduisant à la maturité gymnasiale (al. 5 let. a).

Selon l’art. 82 al. 3 LIP, aux conditions fixées par le règlement du degré secondaire II et s’ils ne redoublent pas, les élèves non promus de la dernière année du cycle d’orientation de la section latine scientifique ont accès : (a) aux filières du degré secondaire II conduisant au certificat de culture générale ou du centre de formation professionnelle commerciale plein temps ; (b) au dispositif de transition du degré secondaire II conduisant au certificat de culture générale.

Les conditions d’admission, de promotion et d’obtention des titres sont fixées par voie réglementaire (art. 85 al. 1 LIP).

5.4 Sous la note marginale « conditions de promotion », l’art. 53 RCO prévoit qu’une moyenne annuelle de 4,0 est requise pour chaque discipline (al. 1 ; « norme de base »). Les tolérances suivantes sont admises : (a) l’élève qui ne remplit pas la norme de base est néanmoins promu selon l'une des trois tolérances suivantes : l'élève n'a pas plus de 3 moyennes annuelles entre 3.5 et 3.9, ou pas plus d'une moyenne annuelle entre 3.0 et 3.4 et une autre entre 3.5 et 3.9, ou enfin une seule moyenne annuelle entre 2.5 et 2.9 ; (b) en outre, la moyenne générale ainsi que la moyenne des disciplines principales doivent être au moins égales à 4.0 ; (c) dans tous les cas la moyenne annuelle minimale de 3.5 est exigée en français et mathématiques (al. 2). Sauf dans des situations exceptionnelles, il faut un minimum de deux périodes pour constituer des moyennes annuelles déterminant la promotion (al. 3).

Au chapitre XI intitulé « transition entre le cycle d’orientation et l’enseignement secondaire II » et sous la note marginale « élèves promus de 11e année », l’art. 59 RCO prévoit que tout élève qui remplit les conditions de promotion de sa section à la fin de sa dernière année au cycle d’orientation a le droit d’accéder directement à une filière certifiante de l’enseignement secondaire II correspondant à sa section (al. 1).

Sous la note marginale « élèves non promus de 11e année », l’art. 60 RCO prévoit que les élèves non promus du cycle d’orientation et qui ne redoublent pas ont le droit d’accéder aux conditions déterminées par la loi sur l'instruction publique à des filières de formation du degré secondaire II moins exigeantes que celles ouvertes normalement aux élèves promus de leur section (al. 1).

5.5 Au chapitre des dispositions communes et sous la note marginale « admission des élèves n'ayant pas validé la 11e année du cycle d'orientation », l’art. 16 RAES II prévoit que les élèves n'ayant pu valider que deux trimestres de 11e année en raison de justes motifs, tels que la maladie ou un accident, peuvent être admis en 12e année d'une filière pour laquelle ils remplissent les conditions d'admission. Par valider, il faut comprendre que les élèves ont été évalués de manière significative dans toutes les disciplines (al. 1). Peuvent être admis à titre exceptionnel dans l'enseignement secondaire II après analyse du dossier par la direction générale de l'enseignement secondaire II et pour autant qu'ils ne puissent pas redoubler : (a) les élèves n'ayant pas validé deux trimestres de 11e année ou (b) les élèves n'ayant pas de justes motifs tels que visés à l'al. 1 pour n'avoir pas validé un des 3 trimestres.

Sous la section 3 « collège de Genève » et la note marginale « admission en 12e année », l’art. 20 RAES-II prévoit que sont admis en 12e année les élèves issus de 11e année du cycle d'orientation : (a) promus de section littéraire et scientifique ; (b) promus de la section langues vivantes et communication avec une moyenne générale de 5.0, une moyenne des disciplines principales de 4.5 et une seule moyenne, hormis les mathématiques et le français, inférieure à 4.0.

5.6 Constitue un excès négatif du pouvoir d'appréciation le fait que l'autorité se considère comme liée, alors que la loi l’autorise à statuer selon son appréciation, ou qu'elle renonce d'emblée en tout ou partie à exercer son pouvoir d'appréciation (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_144/2021 du 30 août 2022 consid. 2.1), ou qu’elle applique des solutions trop schématiques, ne tenant pas compte des particularités du cas d’espèce (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; ATA/1276/2023 du 28 novembre 2023 consid. 4.6).

L’excès du pouvoir d’appréciation revient à une violation pure et simple de la loi alors que son abus constitue une violation des principes constitutionnels (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 514).

5.7 En l’espèce, le DIP a indiqué qu’aucune dérogation n’était prévue en matière d’admission en première année gymnasiale.

5.7.1 Ce raisonnement trouve appui dans la loi et ne prête pas le flanc à la critique. Si des tolérances sont prévues en matière de promotions, tant au cycle d’orientation qu’au collège, aucune dérogation n’est prévue en matière d’admission au collège.

La loi ne laissant aucune marge d’interprétation ou d’appréciation à l’autorité, celle-ci ne peut se voir reprocher un excès négatif de son pouvoir d’appréciation ni, partant, une violation du principe de proportionnalité. Ainsi, par exemple, la moyenne générale et les résultats dans d’autres disciplines, voire dans une nouvelle filière, tels ceux produits en dernier lieu par la recourante, ne peuvent être pris en compte. Les griefs de la recourante tombent à faux.

La recourante invoque l’art. 16 RAES II, qui permet l’admission en 12e année gymnasiale sur la base de deux voire un trimestre seulement. Celui-ci ne concerne toutefois que le cas des élèves n’ayant pu valider que deux ou un trimestre en raison d’une maladie ou d’un accident. Or, la recourante n’a été ni malade ni accidentée en 2023-2024 et elle a suivi les trois trimestres de sa 11e année et obtenu pour chacun d’eux des moyennes dans chaque discipline, de sorte que cette disposition ne s’applique pas à son cas.

5.7.2 La recourante s’en prend encore à sa non-promotion. Il a été vu que celle-ci n’est pas l’objet du litige. Il peut toutefois être observé ce qui suit.

La recourante invoque l’art. 53 RCO. Celui-ci régit la promotion par tolérance et force est de constater que la recourante ne remplissait pas la condition d’avoir une moyenne en mathématiques au moins égale à 3.5 (al. 1 let. c).

La recourante se prévaut de l’art. 53 al. 3 RCO, selon lequel, sauf dans des situations exceptionnelles, il faut un minimum de deux périodes pour constituer des moyennes annuelles déterminant la promotion. Cette disposition ne s’applique toutefois pas à son cas puisqu’elle a été évaluée durant chacun des trois trimestres (ou périodes) de sa 11e année scolaire et a obtenu à chaque fois des résultats pour chacune des disciplines.

La recourante demande cependant que les résultats obtenus au premier trimestre de sa 11e année ne soient pas pris en compte. Elle fait valoir qu’elle n’aurait pu, en raison de ses problèmes psychologiques, se consacrer pleinement et efficacement à sa dernière année du cycle d’orientation que durant les deuxième et troisième trimestres, ce qui justifierait qu’on ne compte pas les résultats du premier semestre. Outre que cette éventualité n’est pas prévue par la loi et ne se laisse pas déduire de l’art. 53 al. 3 RCO, les résultats obtenus par la recourante durant les trois trimestres de sa 11e année ne corroborent pas ses allégations :

I II III

Français 4.4 4.2 4.4

Allemand 5.1 51 4.5

Anglais 4.7 4.9 5.0

Mathématiques 2.8 3.5 3.5

Physique 5.3 4.9 4.7

Géographie 4.1 4.3 4.8

Histoire 4.7 5.3 5.3

Arts visuels 6.0 5.8 5.8

Allemand LV 4.5 4.0 4.5

Anglais LV 5.5 5.1 5.3

Certes, les résultats en mathématique de la recourante au premier trimestre sont nettement insuffisants (2.8). Tel n’est toutefois pas le cas des autres disciplines, y compris si on les compare aux 2e et 3e trimestres. En outre, les résultats en mathématiques de la recourante ne se sont que peu améliorés aux deuxième (3.5) et troisième (3.5) trimestres, et ils étaient déjà insuffisants en 10e année (2.8) au point de nécessiter une promotion par dérogation.

Ainsi, même si ses griefs contre la non-promotion étaient recevables, la recourante échouerait à rendre vraisemblable que les troubles dont elle a souffert et à l’appui desquels elle a produit des certificats médicaux seraient la cause de ses mauvais résultats en mathématiques, de sa non promotion et de sa non admission en 1re année gymnasiale.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

6.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge conjointe des parents de la recourante (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne leur sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 15 août 2024 par A______, enfant mineure agissant par ses parents B______ et C______ contre la décision du département de l’instruction publique, de la formation et de la jeunesse du 18 juillet 2024 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge conjointe de B______ et C______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Romain JORDAN, avocat de la recourante, ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Eleanor McGREGOR, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :