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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3565/2022

ATA/1114/2024 du 24.09.2024 sur JTAPI/693/2023 ( PE ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : DROIT DES ÉTRANGERS;RESSORTISSANT ÉTRANGER;LOI FÉDÉRALE SUR LES ÉTRANGERS ET L'INTÉGRATION;SÉJOUR;AUTORISATION DE SÉJOUR;RENVOI(DROIT DES ÉTRANGERS);VIOLENCE DOMESTIQUE;CAS DE RIGUEUR
Normes : LEI.1; LEI.2; LEI.42.al1; LEI.50.al1.leta; LEI.50.al1.letb; LEI.50.al2; LEI.99.al1; OASA.77.al5; OASA.77.al6; OASA.77.al6BIS; OA-DFJP.4.letd
Résumé : Raisons personnelles majeures au sens de l'art. 50 al. 2 LEI, violence conjugale. Ressortissante brésilienne née en 1966, ayant épousé un Suisse (d'origine brésilienne) en juillet 2017. Séparation en octobre 2019, décès de l'époux en juin 2020. Pas de violences physiques attestées, mais violences psychologiques avérées (plainte pénale, témoignage, certificats médicaux) : insultes et menaces de mort sérieuses, causales dans la séparation et se poursuivant même au-delà. Caractère grave et systématique retenu. Conformément à la pratique du Tribunal fédéral, qui n'examine dans de tels cas pas les critères d'intégration ni les autres hypothèses de raisons personnelles majeures (not. celles de l'art. 31 OASA par analogie), recours admis et cause renvoyée à l'OCPM pour proposer au SEM la prolongation de l'autorisation de séjour.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3565/2022-PE ATA/1114/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 24 septembre 2024

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Raphaël GUISAN, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 21 juin 2023 (JTAPI/693/2023)


EN FAIT

A. a. A______, née le ______ 1966, est ressortissante du Brésil.

b. Le 11 juillet 2017, elle a épousé B______, ressortissant suisse né le ______ 1966. Le mariage a été célébré au Brésil.

c. B______ était divorcé de sa première épouse par jugement du Tribunal civil de première instance du 13 février 2012, entré en force.

d. Arrivée à Genève le 23 juillet 2017, A______ a été mise au bénéfice d’une autorisation de séjour afin de vivre auprès de son époux. Son titre de séjour a été renouvelé en dernier lieu jusqu’au 22 juillet 2021.

e. Depuis le 1er septembre 2018, elle travaille en qualité de nettoyeuse auprès de divers employeurs.

B. a. Par courrier du 7 mars 2020, B______ a informé l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) qu’il était séparé de son épouse depuis octobre 2019. Cela faisait trois ans que leur relation s’était dégradée. Il se battait contre un cancer depuis février 2018 et ne se sentait pas rassuré concernant ses directives anticipées et son testament en cas de décès. En octobre 2019, lorsqu’il avait été opéré et hospitalisé, elle s’était montrée très directive, voulant tout contrôler. Alors qu’il se trouvait aux soins intensifs, elle avait laissé ses proches sans nouvelles quant aux suites de l’intervention chirurgicale qu’il avait subie. Il avait bien réfléchi et comptait engager une procédure de divorce au Brésil.

b. Le 19 mars 2020, A______ a déposé plainte pénale auprès de la police contre son époux pour injures et menaces.

Lors de son audition, elle a notamment déclaré que son époux avait été gentil avec elle jusqu’en mars 2018. Il avait alors appris qu’il était atteint d’un cancer et son comportement avait changé. Il était devenu agressif et l’insultait souvent. Hospitalisé d’octobre à fin novembre 2019, il était devenu encore plus agressif. Le 6 octobre 2019, il lui avait reproché de lui avoir apporté le mauvais déodorant. Il l’avait menacée verbalement, lui disant qu’il voulait lui « trouer le corps » avec des ciseaux et trouver quelqu’un pour la tuer. Il lui avait également demandé de quitter le domicile conjugal, sous peine de la tuer. Elle avait eu peur et s’était installée chez une amie, C______, domiciliée au D______, à Genève. En mars 2020, cette dernière avait reçu des messages de B______ qui menaçait de tuer son épouse ou d’engager quelqu’un pour la « mettre dans le micro-ondes ». Cela signifiait couper les membres d’une personne, l’asperger d’huile, la mettre dans un container et y mettre le feu. Cela arrivait souvent dans les favelas. Il avait également fait part à C______ de son souhait de divorcer et de voir son épouse retourner au Brésil. Elle ignorait la raison pour laquelle son époux était devenu agressif. Elle pensait toutefois que c’était sa mère qui le poussait à divorcer. Il ne lui avait pas infligé de violences physiques. Elle n’avait plus de contact avec lui. Elle ne souhaitait pas que ses coordonnées soient transmises au centre LAVI mais s’y rendrait dans l’hypothèse où elle en ressentirait le besoin.

c. Le 4 mai 2020, C______, infirmière de profession, a été entendue par la police dans le cadre de la plainte précitée.

Elle a notamment déclaré avoir été témoin d'injures et de menaces de mort proférées par B______ à l’encontre de son épouse, mais pas de violences physiques. Elle avait pris ses distances avec eux, car il était également devenu injurieux envers elle. Après l’intervention chirurgicale qu’il avait subie en décembre 2019, elle s’était rendue à son chevet aux soins intensifs, à la demande de son épouse. Cette dernière s’y était rendue un peu plus tard. Elle l’avait ensuite appelée, en pleurs et paniquée, lui faisant part d’une dispute. Lorsqu’elle était retournée voir B______, il lui avait expliqué que son épouse lui avait apporté exprès le mauvais déodorant pour l’humilier et l’embêter. Il avait traité son épouse de « connasse » précisant que s’il l’avait pu, il l’aurait tuée. Il l’avait remerciée d’avoir hébergé cette dernière car il ne pouvait « plus la voir ». Il avait ajouté qu’elle paierait, que ce soit en Suisse ou au Brésil, pour ce qu’elle lui avait fait. Il avait ajouté qu’il était prêt à engager un tueur à gage au prix de BRL 5'000.‑. Elle était d’avis qu’il ne délirait pas, relevant tout de même qu’il venait de subir une intervention chirurgicale de dix heures. En mars 2020, il l’avait informée par messages de son intention de quitter son épouse car il avait « trop la haine », l’accusant d’avoir causé son cancer. Il voulait qu’elle paie le divorce et qu’elle retourne au Brésil.

Par la suite, il avait réitéré les menaces à l’encontre de son épouse par messages. Il avait aussi sollicité son aide pour contraindre sa femme à quitter la Suisse. Il lui avait demandé de voler les documents d’identité de son épouse et de les lui remettre. Il lui avait également dit qu’un de ses ex-collègues, un certain E______, lui avait rendu visite à l’hôpital, ce qu’il n’avait pas apprécié. Il comptait se venger de lui au moyen d’un couteau. Il l’avait croisé et l’avait agressé. Désormais, il ne restait plus que son épouse. Pour terminer, il lui avait envoyé par message la photo de deux flacons d’acide chlorhydrique, précisant qu’il souhaitait les jeter sur son épouse au moyen d’une seringue.

d. Le 18 mai 2020, B______ a adressé à l’OCPM un courrier identique à celui du 7 mars 2020.

e. Le 4 juin 2020, l’OCPM a reçu un formulaire annonçant le changement d’adresse de A______, qui était domiciliée chez C______ depuis le 8 octobre 2019.

f. Le 5 juin 2020, B______ est décédé.

g. Il ressort d'une fiche de renseignements de police du 15 juin 2020 que, suite à l’audition de C______, la police s’était rapidement rendue au domicile de feu B______ afin de l’auditionner et de saisir l’acide chlorhydrique. Elle avait constaté « l’état maladif de l’intéressé » qui n’était pas en mesure de se déplacer et ne pouvait en aucun cas faire l'objet d'une audition. L’intéressé avait indiqué qu’il détenait une petite dose d’acide chlorhydrique qu’il utilisait avec certains de ses médicaments. Il avait assuré qu’il n’en ferait pas un mauvais usage. Ils avaient convenu qu’il produirait un certificat médical, à la demande de la procureure en charge de la procédure, mais il avait toutefois mis fin à ses jours le 5 juin 2020.

h. Par courrier du 8 septembre 2020, la mère de feu B______, F______, a informé l’OCPM qu’elle comptait demander la nullité du mariage de son fils avec A______. Lors de ce mariage, son fils n’avait pas procédé à l’homologation de son divorce suisse au Brésil, de sorte qu’il était encore marié avec sa première épouse. En outre, son fils était homosexuel et le mariage avec A______ avait pour but d’éluder les dispositions de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20 ; anciennement dénommée loi fédérale sur les étrangers - LEtr).

C. a. Le 21 juin 2021, A______ a sollicité le renouvellement de son autorisation de séjour.

b. Par courrier du 23 juin 2022, l’OCPM a fait part à A______ de son intention de refuser de prolonger son autorisation de séjour et de prononcer son renvoi.

Dans la mesure où la vie commune des époux avait duré moins de trois ans, l’art. 50 al. 1 let. b LEI n’était pas applicable. En outre, à teneur du dossier, aucune raison personnelle majeure, au sens de l’art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEI, n’imposait la poursuite de son séjour en Suisse. Elle ne se trouvait pas non plus dans une situation relevant de l’art. 30 al. 1 let. b LEI et elle ne pouvait invoquer aucune autre disposition du droit fédéral ou international pour justifier la poursuite de son séjour en Suisse.

Par ailleurs, son renvoi semblait proportionné et raisonnable. Âgée de 56 ans, elle était a priori en bonne santé et en mesure de travailler. Elle séjournait certes depuis près de cinq ans en Suisse, avait acquis des connaissances en langue française, travaillait et était respectueuse de l’ordre juridique. Cependant, elle n'avait pas fondé de famille et n'avait pas créé de liens si profonds et durables avec la Suisse au point qu’elle ne puisse plus envisager un retour dans son pays d'origine. À cet égard, elle était née au Brésil où elle avait passé son enfance, son adolescence et une partie de sa vie d’adulte. Elle y avait ses racines socio-culturelles et très probablement des parents proches, ainsi qu’un réseau d'amis et de connaissances susceptibles de l'aider. Sa réintégration ne devrait ainsi pas poser de difficultés insurmontables et il ne ressortait pas du dossier que l’exécution de son renvoi serait impossible, illicite ou qu’elle ne pourrait être raisonnablement exigée.

Un délai lui était accordé pour exercer son droit d’être entendu par écrit.

c. Le 25 juillet 2022, A______ s'est déterminée.

Elle a rappelé sa situation personnelle, conjugale et socio-professionnelle et a repris en substance les déclarations qu’elle avait faites à la police, de même que celles de C______, en y apportant des précisions.

Elle avait été contrainte de quitter le domicile en raison de violences conjugales. Le 12 mars 2019, elle avait entamé un suivi médical pour traiter l’état d’anxiété généralisé causé par le comportement de son époux, ainsi qu’un traitement antidépresseur. Depuis l’automne 2018, elle travaillait dans le domaine du nettoyage et était très appréciée par ses deux employeurs. Son revenu mensuel brut moyen s’élevait à environ CHF 4'530.-. Elle ne faisait l’objet d’aucune poursuite pour dettes et n’émargeait pas à l’assistance publique. Elle s’exprimait clairement en français, le comprenait et l’écrivait avec aisance. Elle était extrêmement bien intégrée et avait de nombreux amis et connaissances, comme cela ressortait des lettres de recommandation produites. Son centre de vie se trouvait en Suisse et elle avait noué des liens très étroits à Genève. Au Brésil, elle avait uniquement ses deux sœurs qui étaient mariées et qui avaient des enfants. Elle n’avait aucune attache dans son pays d’origine lui permettant de retourner y vivre, sans que sa vie en soit fortement bouleversée. En outre, la situation socio-économique et politique au Brésil n’était pas comparable avec celle de la Suisse. Les indicateurs étaient nettement inférieurs s’agissant notamment de la stabilité politique, de la corruption et du respect des garanties de l’État de droit.

Elle a notamment produit les pièces suivantes :

-          Un certificat médical établi le 3 juillet 2022 par la docteure G______, spécialisée en médecine interne, dont la teneur est la suivante : « Je certifie que la patiente sus-nommée est suivie à ma consultation depuis le 12 mars 2019 et qu’elle a présenté de nombreuses symptomatologies compatibles avec une anxiété généralisée dans un contexte de violences domestiques infligées par son mari, notamment des sévices physiques et psychologiques. Selon les déclarations de la patiente : elle a été mariée pendant deux ans et trois mois jusqu'à la mort de son mari, décédé dans un contexte de maladie néoplasique. Elle a été forcée de quitter son domicile à cause des violences et des menaces psychologiques exercées par son mari. Elle a fui le domicile conjugal le 1er octobre 2019. Elle est restée mariée à B______ entre le 11 juillet 2017 et le jour du décès de celui-ci le 5 juin 2020. A______ présente un état post-traumatique en lien avec les violences physiques et psychologiques et les nombreuses menaces proférées par son mari. La patiente a bénéficié de traitements d'antidépresseur Fluctine, médicament psychotrope ».

-          une attestation de l’Hospice général du 13 août 2021 indiquant qu’elle n’était pas aidée financièrement ;

-          un extrait du registre des poursuites, vierge, daté du 13 août 2021 ;

-          une vingtaine de lettres de soutien et de recommandation ;

-          ses contrats de travail ;

-          ses fiches de salaire d’avril à juin 2022.

d. Par décision du 27 septembre 2022, l’OCPM a refusé, pour les motifs qui ressortaient de sa lettre d’intention du 23 juin 2022, de renouveler l’autorisation de séjour de A______ et a prononcé son renvoi, lui impartissant un délai au 27 octobre 2022 pour quitter la Suisse.

L’OCPM a notamment relevé qu’elle n’avait jamais subi de violences physiques. Concernant les deux épisodes de violences verbales qui avaient eu lieu en octobre 2019 et en mars 2020, feu son époux l’avait insultée et avait menacé de la tuer ou de la faire tuer. Ces épisodes, bien qu’alarmants, n’avaient pas été récurrents et n'atteignaient pas le degré d’intensité permettant d’invoquer des raisons majeures au sens de l'art. 50 al. 2 LEI. À cela s’ajoutait que l’intéressée avait quitté le domicile conjugal à la demande de son époux qui ne souhaitait pas poursuivre leur relation.

D. a. Par acte du 25 octobre 2022, A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision, concluant à son annulation et au renouvellement de son autorisation de séjour.

Elle a repris en substance les arguments développés dans sa détermination du 25 juillet 2022, précisant que, compte tenu de l’intensité des violences qu’elle avait subies de la part de son époux, elle était toujours suivie par la Dre G______ et prenait encore un traitement médicamenteux afin de gérer les séquelles psychologiques qui se traduisaient par une anxiété généralisée.

Elle a notamment produit :

-          Un certificat médical établi le 12 octobre 2022 par la Dre G______, dont la teneur est la suivante : « Je certifie que la patiente sus-nommée est suivie à ma consultation depuis le 12 mars 2019 et qu'elle présente de nombreuses symptomatologies compatibles avec une anxiété généralisée dans un contexte de violences domestiques infligées par son mari, notamment de nombreux sévices psychologiques et de répétées et intenses menaces physiques. Anamnèse personnelle : état de choc post-traumatique en lien avec une situation domestique violente et dramatique, avec pour conséquence un état dépressif chronique, cataracte yeux droit et gauche en 2022, nuqualgie chronique/lésion cutanée papuleuse érythémateuse sur partie haute du cou en 2022, tunnel carpien suspecté, notion de fibromyalgie, bruxisme traité, status post-chirurgie au niveau de l'épaule droite il y a 5 ans. Situation familiale : A______ a été mariée pendant deux ans et trois mois jusqu'à la mort de son mari, décédé dans un contexte de maladie néoplasique. A______ a été forcée de quitter son domicile à cause des nombreuses violences et des menaces psychologiques, notamment menaces de mort, exercées par son mari. La patiente a senti sa vie en danger et elle a été forcée de fuir le domicile conjugal le 1er octobre 2019. A______ est restée mariée à B______ entre le 11 juillet 2017 et le jour du décès de celui-ci le 5 juin 2020. Conséquences anamnestiques : A______ présente un état post-traumatique en lien avec les nombreuses et intenses violences psychiques infligées par son mari avec : sévères troubles du sommeil accompagnés de cauchemars, état d'angoisse récurrent, flash-backs des situations conjugales violentes, céphalées, troubles importants de la concentration, hypervigilance. La patiente bénéficie jusqu'à ce jour de traitements d'antidépresseur Fluctine, médicament psychotrope. »

-          diverses pièces en lien avec son activité professionnelle ;

-          un document signé par « E______», ex-collègue de feu son époux, relatant notamment une altercation au cours de laquelle ce dernier l’avait giflée, insultée puis menacée ;

-          des lettres de recommandation.

b. Le 16 décembre 2022, l’OCPM a conclu au rejet du recours.

A______ s’était mariée au Brésil le 11 juillet 2017. Elle avait ensuite rejoint feu son époux en Suisse le 23 juillet suivant, date à partir de laquelle elle avait bénéficié d’une autorisation de séjour pour regroupement familial. Elle avait quitté le domicile conjugal le 8 octobre 2019, alors que son époux était hospitalisé. L’union conjugale avait ainsi duré moins de trois ans.

S’agissant des violences conjugales qu’elle avait subies, leur intensité ne suffisait pas à considérer que la poursuite de son séjour en Suisse se justifiait pour des raisons personnelles majeures.

En outre, ni la durée de son séjour de cinq ans en Suisse, ni ses liens sociaux, ni sa situation financière ne justifiaient le renouvellement de son titre de séjour, ce d’autant que son immersion dans la société genevoise n'était pas remarquable et que les liens qu’elle avait développés avec la Suisse n’étaient pas d'une forte intensité.

Sa réintégration au Brésil n’apparaissait pas non plus compromise et ni son état de santé ni aucun autre élément du dossier ne faisaient obstacle à l’exécution de son renvoi.

c. Le 31 janvier 2023, A______ a répliqué.

Les violences conjugales qu’elle avait subies l’avaient parfois contrainte à s'enfermer dans une chambre afin d'assurer sa sécurité, étant précisé que lorsque son époux était sous l'influence de substances, il devenait encore plus virulent.

Conformément à la jurisprudence, la violence et les pressions psychologiques d'une intensité importante, constituaient une atteinte inadmissible et aboutissaient à la reconnaissance d'un cas de rigueur au sens de l'art. 50 LEI. Or, il était avéré que feu son époux voulait qu’elle rentre au Brésil, qu’il lui avait fait « un chantage » et que, ce faisant, il avait exercé sur elle une pression psychologique supplémentaire en relation directe avec son autorisation de séjour.

En outre, feu son époux était décédé en juin 2020, avec l'aide de l'association H______. Il était ainsi plus que vraisemblable qu’il serait de toute façon décédé avant l'échéance du délai de trois ans de vie commune. Or, selon la jurisprudence, le décès du conjoint suisse constituait une raison personnelle majeure au sens de l'art. 50 al. 1 let. b LEI. Il apparaissait ainsi que la vie commune avait certes été interrompue par la violence de son époux mais qu’elle l’aurait été, dans toutes les hypothèses, par son suicide assisté.

L'intensité, la gravité et la répétition des violences conjugales ne pouvaient être niées au vu des éléments allégués et prouvés et de sa mise en danger concrète. Elle se tenait à disposition pour être entendue à ce propos. Depuis qu’elle avait été victime de ces violences, sa santé était fragile. Son état de stress post‑traumatique nécessitait un suivi. Elle faisait fréquemment des éruptions cutanées et elle était encore sous traitement médicamenteux. La stabilité de son suivi médical par la Dre G______ lui était bénéfique.

Par ailleurs, elle avait fait preuve d’une intégration socio-professionnelle particulièrement réussie en Suisse et sa réintégration au Brésil était fortement compromise. Elle avait plus de 57 ans et approchait l’âge de la retraite au Brésil qui était fixé à 62 ans pour les femmes. Elle ne disposait d’aucun diplôme ni de formation, si bien qu’elle ne pourrait que très difficilement trouver un emploi. Issue d’une classe peu favorisée, elle serait vraisemblablement contrainte de loger dans des favelas et ne pourrait compter sur aucun appui.

Si par impossible le TAPI considérait que les raisons personnelles majeures n’étaient pas données, elle conclurait à l’octroi d’un titre de séjour en application de l’art. 30 al. 1 let. b LEI.

d. Par jugement du 21 juin 2023, le TAPI a rejeté le recours.

L'union conjugale avait duré moins de trois ans. A______ n’avait pas démontré avoir été victime d’une maltraitance à caractère systématique et de longue durée. Même si les injures et les menaces qu’elle avait subies étaient sans conteste répréhensibles et regrettables, elles ne pouvaient pas être considérées comme atteignant le degré de gravité et d’intensité requis par la jurisprudence et ne constituaient ainsi pas des raisons personnelles majeures.

A______ était arrivée en Suisse à l'âge de 51 ans. Elle était née au Brésil où elle avait passé son enfance, son adolescence et une grande partie de sa vie d’adulte. En toute hypothèse, la durée de son séjour en Suisse devait être relativisée, dès lors qu'elle n'était due, depuis l’échéance de son autorisation de séjour le 22 juillet 2021, qu'à une tolérance des autorités. Elle avait manifestement de fortes attaches au Brésil où vivaient, à tout le moins, ses deux sœurs avec leurs familles. Sa réintégration socioprofessionnelle au Brésil n'était pas fortement compromise, quand bien même son âge pouvait constituer une difficulté à cet égard.

E. a. Par acte posté le 24 août 2023, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité, concluant à son annulation et au renouvellement de son autorisation de séjour.

Elle avait bien été victime de violence conjugales systématiques et de longue durée – notamment des menaces de mort – atteignant la gravité et l'intensité requises par la jurisprudence fédérale, ce qu'attestait le certificat médical déposé en première instance. Le TAPI posait des exigences déraisonnablement élevées à cet égard et appliquait des critères irréalistes, et sa logique pénalisait les victimes de violences qui avaient su les déceler comme telles et avaient eu le courage de fuir pour sauver leur vie.

S'agissant de sa réintégration au Brésil, il était illusoire, vu notamment son sexe et son âge, de penser qu'elle pourrait y trouver du travail, alors qu'elle avait réussi, en Suisse, à exercer une activité économique dans un domaine délaissé par les nationaux. Elle remplissait par ailleurs tous les critères d'intégration.

Au surplus, elle se trouvait dans un cas d'extrême gravité au sens de l'art. 30 al. 1 let. b LEI. Son intégration était réussie, tandis qu'un renvoi dans son pays d'origine détériorerait son état de santé déjà rendu fragile du fait des violences subies pendant son mariage, et que ses possibilités de réintégration étaient compromises.

b. Le 2 octobre 2023, l'OCPM a conclu au rejet du recours, les arguments présentés, en substance similaires à ceux développés en première instance, n'étant pas de nature à modifier sa position.

c. Le juge délégué a fixé aux parties un délai au 19 janvier 2024 pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, après quoi la cause serait gardée à juger.

d. Le 15 novembre 2023, l'OCPM a indiqué ne pas avoir de requêtes ni d'observations complémentaires à formuler.

e. La recourante en a fait de même le 19 janvier 2024.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Le litige porte sur la décision de l'intimé de ne pas renouveler l'autorisation de séjour de la recourante et de prononcer son renvoi de Suisse.

2.1 Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la loi sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr), qui a alors été renommée LEI, et de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201). Le nouveau droit s'applique en l'espèce, la demande de renouvellement du permis de séjour datant du 21 juin 2021 et, surtout, l'OCPM ayant annoncé son intention de refuser de prolonger l'autorisation de la recourante le 23 juin 2022 (arrêt du Tribunal fédéral 2C_145/2022 du 6 avril 2022 consid. 5) – étant précisé cependant que la plupart des dispositions de la LEI sont demeurées identiques.

2.2 La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l’OASA, règlent l’entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants du Brésil.

2.3 Aux termes de l'art. 42 al. 1 LEI, le conjoint étranger d’un ressortissant suisse a droit à l’octroi d’une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité, à condition de vivre en ménage commun avec lui.

Toutefois et compte tenu de la séparation du couple (laquelle s'est produite avant le décès du conjoint), les dispositions relatives à la dissolution de la famille s'appliquent à la situation juridique actuelle de la recourante (art. 50 et ss LEI).

2.4 Aux termes de l'art. 50 al. 1 let. a LEI, après dissolution de la famille, le droit du conjoint à l'octroi d'une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité en vertu notamment de l'art. 42 LEI subsiste lorsque l'union conjugale a duré au moins trois ans et que l'intégration est réussie (art. 50 al. 1 let. a LEI).

La limite légale de trois ans se calcule en fonction de la durée pendant laquelle les époux ont fait ménage commun en Suisse (ATF 136 II 113 consid. 3.3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1111/2015 du 9 mai 2016 consid. 4.1), soit depuis la date du mariage, à condition que la cohabitation ait lieu en Suisse, jusqu'à ce que les époux cessent d'habiter sous le même toit (arrêts du Tribunal fédéral 2C_594/2010 du 24 novembre 2010 consid. 3.1 ; 2C_195/2010 du 23 juin 2010 consid. 5.1).

Il n'est pas nécessaire d'examiner la condition de la réussite de l'intégration lorsque l'union conjugale a duré moins de trois ans, les deux conditions étant cumulatives (arrêt du Tribunal fédéral 2C_352/2014 du 18 mars 2015 consid. 4 ; ATA/1046/2024 du 3 septembre 2024 consid. 3.7.1).

2.5 En l'espèce, les époux ont fait ménage commun en Suisse du 23 juillet 2017, date de l'arrivée en Suisse de la recourante à la suite de son mariage au Brésil, au 6 octobre 2019, date à laquelle la recourante a quitté le domicile conjugal et à partir de laquelle elle n'a plus jamais fait ménage commun avec son époux. La recourante ne peut en conséquence pas se prévaloir de l’art. 50 al. 1 let. a LEI, ce qu’elle ne conteste d'ailleurs pas.

2.6 Outre les hypothèses retenues à l'art. 50 al. 1 let. a LEI, le droit au renouvellement de l'autorisation de séjour existe également si la poursuite du séjour en Suisse s'impose pour des raisons personnelles majeures (art. 50 al. 1 let. b LEI). Les raisons personnelles majeures visées à l'al. 1 let. b sont notamment données lorsque le conjoint est victime de violence conjugale, que le mariage a été conclu en violation de la libre volonté d'un des époux ou que la réintégration sociale dans le pays de provenance semble fortement compromise (art. 50 al. 2 LEI).

Cette disposition a pour vocation d'éviter les cas de rigueur ou d'extrême gravité (ATF 137 II 1 consid. 3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_500/2014 du 18 juillet 2014 consid. 7.1 ; 2C_165/2014 du 18 juillet 2014 consid. 3.1).

L'art. 50 al. 1 let. b LEI vise à régler les situations qui échappent aux dispositions de l'art. 50 al. 1 let. a LEI, soit parce que le séjour en Suisse durant le mariage n'a pas duré trois ans ou parce que l'intégration n'est pas suffisamment accomplie ou encore parce que ces deux aspects font défaut mais que – eu égard à l'ensemble des circonstances – l'étranger se trouve dans un cas de rigueur après la dissolution de la famille (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1 ; 137 II 1 consid. 4.1). À cet égard, c'est la situation personnelle de l'intéressé qui est décisive et non l'intérêt public que revêt une politique migratoire restrictive. Il s'agit par conséquent uniquement de décider du contenu de la notion juridique indéterminée « raisons personnelles majeures » et de l'appliquer au cas d'espèce, en gardant à l'esprit que l'art. 50 al. 1 let. b LEI confère un droit à la poursuite du séjour en Suisse, contrairement à l'art. 30 al. 1 let. b LEI (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1 ; 137 II 1 consid. 3 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral
[ci-après : TAF] F-626/2019 du 22 mars 2021 consid. 8.1 ; ATA/215/2020 du 25 février 2020 consid. 6a).

2.7 L'octroi d'un droit de séjour en faveur de victimes de violences conjugales a pour but d'empêcher qu'une personne faisant l'objet de violences conjugales poursuive la communauté conjugale pour des motifs liés uniquement au droit des migrations, quand bien même le maintien de celle-ci n'est objectivement plus tolérable de sa part, dès lors que la vie commune met sérieusement en péril sa santé physique ou psychique (ATF 138 II 229 consid. 3.1 et 3.2 et arrêts du Tribunal fédéral 2C_956/2013 du 11 avril 2014 consid. 3.1 et 2C_784/2013 du 11 février 2014 consid. 4.1). Lorsqu'une séparation se produit dans une telle constellation, le droit de séjour qui était originairement dérivé de la relation conjugale se transforme en un droit de séjour propre.

Sur la base de la ratio legis susmentionnée, il y a lieu de conditionner la présence d'un cas de rigueur suite à la dissolution de la famille pour violence conjugale à l'existence d'un rapport étroit entre la violence conjugale et la séparation du couple. Ce rapport n'est toutefois pas exclu du simple fait que l'initiative de la séparation n'a pas été prise par la personne qui prétend avoir fait l'objet de violence conjugale mais par son conjoint (arrêt du Tribunal fédéral 2C_915/2019 du 13 mars 2020 consid. 3.2) et une analyse du cas concret doit avoir lieu dans chaque affaire.

Selon la jurisprudence, il convient de prendre au sérieux toute forme de violence conjugale, qu'elle soit physique ou psychique. La violence conjugale doit toutefois revêtir une certaine intensité. Elle constitue une maltraitance systématique ayant pour but d'exercer pouvoir et contrôle sur celui qui la subit (ATF 138 II 229 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1085/2017 du 22 mai 2018 consid. 3.1). À l'instar de violences physiques, seuls des actes de violence psychique d'une intensité particulière peuvent justifier l'application de l'art. 50 al. 1 let. b LEI
(ATF 138 II 229 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_201/2019 du 16 avril 2019 consid. 4.1 ; 2C_12/2018 du 28 novembre 2018 consid. 3.19). Lorsque des contraintes psychiques sont invoquées, il incombe à la personne d'illustrer de façon concrète et objective, ainsi que d'établir par preuves le caractère systématique de la maltraitance, sa durée, ainsi que les pressions subjectives qui en résultent (arrêts du Tribunal fédéral 2C_465/2023 du 6 mars 2024 consid. 4.1 ; 2C_693/2019 du 21 janvier 2020 consid. 4.4). Des affirmations d'ordre général ou des indices faisant état de tensions ponctuelles sont insuffisants (ATF 138 II 229 consid. 3.2.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_12/2018 précité consid. 3.2 ; 2C_401/2018 du 17 septembre 2018 consid. 4.2).

2.8 Des insultes proférées à l'occasion d'une dispute, une gifle assénée, le fait pour un époux étranger d'avoir été enfermé une fois dehors par son conjoint ne sont pas assimilés à la violence conjugale au sens de l'art. 50 al. 2 LEI (ATF 136 II 1 consid. 5). En effet, sans que cela légitime en rien la violence conjugale, n'importe quel conflit ou maltraitance ne saurait justifier la prolongation du séjour en Suisse, car telle n'était pas la volonté du législateur (arrêt du Tribunal fédéral 2C_654/2019 du 20 août 2019 consid. 2.1), ce dernier ayant voulu réserver l'octroi d'une autorisation de séjour aux cas de violences conjugales atteignant une certaine gravité ou intensité.

2.9 La personne étrangère qui soutient, en relation avec l'art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEI, avoir été victime de violences conjugales est soumise à un devoir de coopération accru. Il lui appartient de rendre vraisemblable, par des moyens appropriés, la violence conjugale ou l'oppression domestique alléguée. En particulier, il lui incombe d'illustrer de façon concrète et objective, ainsi que d'établir par preuves le caractère systématique de la maltraitance, sa durée ainsi que les pressions subjectives qui en résultent (art. 77 al. 6 et al. 6bis OASA et arrêt du Tribunal fédéral 2C_68/2017 du 29 novembre 2017 consid. 5.4.1). L'art. 50 al. 2 LEI n'exige toutefois pas la preuve stricte de la maltraitance, mais se contente d'un faisceau d'indices suffisants (arrêts du Tribunal fédéral 2C_593/2019 du 11 juillet 2019 consid. 5.2 ; 2C_196/2014 du 19 mai 2014 consid. 3.4) voire d'un certain degré de vraisemblance, sur la base d'une appréciation globale de tous les éléments en présence (ATF 142 I 152 consid. 6.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_671/2017 du 29 mars 2018 consid. 2.3 et 2C_831/2018 du 27 mai 2019 consid. 4.3.1). Ainsi, selon le degré de preuve de la vraisemblance, il suffit que l'autorité estime comme plus probable la réalisation des faits allégués que la thèse contraire (arrêt du Tribunal fédéral 2C_915/2019 précité consid. 3.5).

Si la violence conjugale au sens de l’al. 1 let. b et de l’art. 50 al. 2 LEI est invoquée, les autorités compétentes peuvent demander des preuves. Sont notamment considérés comme indices de violence conjugale : a) les certificats médicaux, b) les rapports de police, c) les plaintes pénales, d) les mesures au sens de l’art. 28b du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210) et e) les jugements pénaux prononcés à ce sujet (art. 77 al. 5 et 6 OASA).

2.10 Lors de l'examen des raisons personnelles majeures au sens de l'art. 50 al. 1 let. b LEI, les critères énumérés à l'art. 31 al. 1 OASA peuvent entrer en ligne de compte, même si, considérés individuellement, ils ne sauraient fonder un cas individuel d'une extrême gravité (ATF 137 II 345 consid. 3.2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_822/2013 du 25 janvier 2014 consid. 5.2 ; ATA/466/2023 du 2 mai 2023 consid. 4.7 et l'arrêt cité).

2.11 En l'espèce, comme déjà exposé, la vie commune a été d'assez courte durée, soit 26 mois environ. La recourante a fourni un certain nombre d'éléments pour étayer les violences qu'elle allègue, quand bien même les certificats médicaux fournis ont été rédigés après la séparation du couple.

Au surplus, bien que le certificat médical du 3 juillet 2022 fasse brièvement état de violences physiques et qu'une attestation rédigée par un ex-collègue de la recourante fasse mention d'une gifle, l'existence de telles violences, du moins graves ou systématiques, de la part de feu l'époux de la recourante peut être exclue. Le certificat médical plus récent et plus complet daté du 12 octobre 2022 ne les mentionne plus. Aussi et surtout, lors de son audition par la police le 19 mars 2020, la recourante a expressément déclaré que son époux n'avait pas commis de violences physiques à son égard, et du reste elle avait déposé une plainte pénale exclusivement pour injures et menaces, et non pour lésions corporelles ou voies de fait.

On peut considérer en revanche comme prouvée l'existence de violences psychologiques à l'égard de la recourante de la part de feu son mari, de nombreux éléments attestant de l'existence de menaces graves et réitérées proférées par ce dernier. De plus, on peut relever que la séparation a suivi de peu l'épisode de menaces du 6 octobre 2019, de sorte à confirmer l'allégation de la recourante selon laquelle elle avait été contrainte de quitter le domicile en raison de violences conjugales. Les menaces dont la recourante ont fait l'objet de la part de feu son époux ont un caractère grave – feu son époux avait menacé de la tuer avec de l'acide, substance qui a été retrouvée à son domicile – et récurrent, persistant même après la séparation du couple. Il en résulte que la recourante peut se prévaloir de raisons personnelles majeures au sens de l'art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEI.

Dans ces conditions, point n'est besoin d'examiner si d'autres raisons personnelles majeures sont données, en particulier en examinant les critères énumérés à l'art. 31 al. 1 OASA à propos des cas individuels d'extrême gravité, étant relevé que lorsqu'il admet l'existence de violence conjugale au sens de l'art. 50 al. 2 LEI, le Tribunal fédéral octroie ou prolonge l'autorisation de séjour ou approuve un tel octroi ou une telle prolongation (arrêts du Tribunal fédéral 2C_465/2023 précité consid. 4.4.5 ; 2C_1004/2020 du 23 mars 2021 consid. 4.3 et 4.4 ; 2C_423/2020 du 26 août 2020 consid. 2.4 et 5.1 ; 2C_776/2019 du 14 avril 2020 consid. 5.5 ; 2C_915/2019 du 13 mars 2020 consid. 5.9 ; 2C_922/2019 du 26 février 2020 consid. 5.5.3 ; 2C_693/2019 précité consid. 5).

Le recours sera ainsi admis, le jugement attaqué annulé et la cause renvoyée à l'intimé afin qu'il préavise favorablement la prolongation de l'autorisation de séjour de la recourante. En effet, l'OCPM ne peut en effet pas prolonger une autorisation de séjour après la dissolution de l’union conjugale ou le décès du conjoint sans approbation de l'autorité fédérale (art. 99 al. 1 LEI cum art. 4 let. d de l'ordonnance du département fédéral de justice et police relative aux autorisations et aux décisions préalables dans le domaine du droit des étrangers soumises à la procédure d’approbation, du 13 août 2015 - OA-DFJP - RS 142.2011).

3.             Vu l'issue du litige, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA) et une indemnité de CHF 1'000.- sera allouée à la recourante, qui y a conclu et s'est fait assister par un conseil (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 24 août 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 21 juin 2023 ;

au fond :

l'admet partiellement ;

renvoie la cause à l'office cantonal de la population et des migrations afin qu'il préavise favorablement la prolongation de l'autorisation de séjour de A______  ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;

alloue à A______ une indemnité de procédure de CHF 1'000.-, à la charge de l'État de Genève (OCPM) ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Raphaël GUISAN, avocat de la recourante, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFFINEN, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Patrick CHENAUX, Eleanor McGREGOR, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

J. PASTEUR

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.