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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/793/2023

ATA/689/2024 du 10.06.2024 sur JTAPI/978/2023 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/793/2023-PE ATA/689/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 10 juin 2024

1ère section

 

dans la cause

 

A______ et B______ recourants
représentés par Me Yama SANGIN, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 8  septembre 2023 (JTAPI/978/2023)


EN FAIT

A. a. A______, née le ______1973, et son fils, B______, né le ______2003, sont ressortissants du Kosovo.

b. Ils sont, respectivement, épouse et fils de C______, ressortissant du Kosovo, né le ______ 1975 et arrivé à Genève en mars 2018, qui a sollicité le 4 octobre 2019 auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) l’octroi d'une autorisation de séjour en raison de sa situation médicale et, subsidiairement, son admission provisoire. Le 5 novembre 2019, il a subi une transplantation cardiaque pour une cardiopathie dilatée idiopathique au sein des Hôpitaux universitaires de Genève (ci- après : HUG).

c. Par formulaire M daté du 4 mars 2021, B______ a déposé une demande de regroupement familial auprès de son père, C______.

d. Dans sa lettre d’accompagnement du 11 mars 2021, B______ a indiqué avoir « récemment » rejoint son père sur le territoire genevois car ce dernier, qui avait subi une greffe cardiaque, avait régulièrement besoin d’assistance.

e. Par formulaire M daté du 31 août 2021, A______ a déposé une demande d'autorisation de séjour dans le cadre du regroupement familial avec son époux, C______, indiquant être arrivée à Genève au mois de juillet 2021.

f. Par décision du 2 septembre 2022, l’OCPM a refusé l’octroi d'une autorisation de séjour à C______. Son renvoi n'étant toutefois pas exigible en raison de son état de santé, il a soumis son dossier au secrétariat d'État aux migrations (ci‑après : SEM), proposant son admission provisoire pour motifs médicaux.

g. Selon deux attestations de l'Hospice général (ci-après : l’hospice) du 10 novembre 2022, B______ et A______ étaient au bénéfice de prestations financières dans le dossier de C______, le premier depuis le 1er mai 2021, en qualité d'enfant à charge, et la seconde, conjointement, depuis le 3 février 2022.

h. Par courrier du 28 novembre 2022, l'OCPM a informé B______ et A______ de son intention de refuser l'octroi d’autorisations de séjour et de prononcer leur renvoi de Suisse. Un délai de 30 jours leur était imparti pour faire valoir leur droit d’être entendu.

i. Le 16 janvier 2023, B______ et A______ ont fait part de leurs observations.

Ils étaient entrés en Suisse afin de rejoindre, soutenir et assister C______ qui avait fait l’objet d’une transplantation cardiaque et avait constamment besoin d'une assistance. Même s'il fallait admettre que le précité pouvait compter sur les structures et les institutions spécialisées du canton de Genève pour le suivi de son traitement, cet accompagnement n'était clairement pas suffisant, puisque celui-ci ne pouvait plus vivre de manière indépendante au vu de son grave état de santé. Une assistance constante dans ses tâches quotidiennes était donc indispensable. Dès lors, leur présence était absolument nécessaire. S'il fallait encore retenir un délai de carence de trois ans après l'admission provisoire de C______, ils ne pourraient bénéficier d'un regroupement familial que sept ans après la demande de celui-ci, au plus tôt. Une telle durée de séparation de la famille serait disproportionnée et absolument contraire à l'intérêt supérieur de l'enfant. Leur intégration était en outre très bonne. B______ était actuellement en formation et A______ attendait la régularisation de sa situation pour travailler et subvenir aux besoins de sa famille. La condition du ménage commun était en outre remplie, la famille vivant dans un appartement de 2.5 pièces, approprié pour trois personnes. Si certes la famille A______ et B______ était actuellement dépendante de l'aide sociale, cette dépendance était la conséquence de sa situation irrégulière en Suisse et du grave état de santé de C______. L’octroi d'une admission provisoire permettrait à A______ de trouver un emploi à court terme, ce qui aurait pour conséquence de réduire, voire supprimer, ladite dépendance. En outre, B______ pourrait commencer une activité lucrative à l'issue de sa formation et ainsi s'émanciper de l'aide sociale très prochainement. Ils étaient aptes à communiquer en français et A______ pourrait, au besoin, transmettre une attestation de son niveau de communication en français ou de son inscription à une offre d'encouragement linguistique. Il en découlait que les conditions des art. 85 al. 7 et, par extension, 30 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) cum 31 de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201) étaient toutes remplies. Au vu de la situation extraordinaire de leur famille, un refus de leur admission provisoire serait en outre disproportionné et violerait le droit au respect de leur vie familiale.

j. Par décision du 31 janvier 2023, l’OCPM a refusé l'octroi de l'autorisation de séjour en faveur de B______ et A______ et, par conséquent, de transmettre leur dossier avec préavis positif au SEM. Il a également prononcé leur renvoi en application de l’art. 64 al. 1 let. c LEI, avec un délai au 31 mars 2023 pour quitter la Suisse et l'ensemble des territoires des États membres de l'Union européenne ainsi que des États associés à Schengen.

Les intéressés ne pouvaient pas invoquer les art. 44, 85 al. 7 LEI et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) car C______ n'était pas titulaire d'une autorisation de séjour, respectivement, car aucune admission provisoire n'avait été prononcée en sa faveur. Par conséquent, leurs conditions de séjour devaient être examinées sous l'angle des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA.

Or, à cet égard, la durée de leur séjour sur le territoire suisse ne saurait constituer un élément déterminant susceptible de justifier une suite favorable à leurs demandes. Elle devait en effet être relativisée en lien avec le nombre d'années qu'ils avaient passé dans leur pays d'origine, étant rappelé que B______ était arrivé en Suisse quelques jours avant de fêter ses 18 ans. Par ailleurs, ils ne pouvaient pas se prévaloir d’une intégration sociale ou professionnelle particulièrement marquée, percevant tous deux l'aide de l'hospice. Ils n’avaient pas non plus acquis des connaissances professionnelles ou des qualifications spécifiques telles qu'ils ne pourraient plus les mettre en pratique au Kosovo et leur situation ne se distinguait guère de celle de bon nombre de leurs concitoyens connaissant les mêmes réalités au Kosovo. C______ pouvait enfin compter sur les structures et les institutions spécialisées du canton de Genève pour l'accompagner.

B. a. Par acte du 3 mars 2023, B______ et A______ ont formé recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision, concluant principalement à son annulation et à la délivrance des autorisations requises.

Reprenant les éléments et arguments exposés dans leurs observations du 16 janvier 2023, ils ont encore précisé que B______ était actuellement étudiant en classe d’Accueil de l'enseignement secondaire II (ci-après : ACCESS II). Dans la mesure où l'OCPM avait proposé l’admission provisoire de C______, celui-ci devait être considéré comme une personne admise à titre provisoire et eux-mêmes comme la conjointe, respectivement l'enfant célibataire de moins de 18 ans, d'une personne admise à ce titre. Cela étant, leur appliquer le délai de carence de trois ans de l’art. 85 al. 7 ab initio LEI serait en l’espèce disproportionné vu la séparation déjà subie, l’état de santé de C______, son besoin d’assistance et le fait qu’ils remplissaient les autres conditions posées par cette disposition.

b. Le 27 mars 2023, A______ et son fils ont transmis au TAPI une attestation du directeur du service de l’ACESS II du 14 mars 2023, faisant état de la bonne intégration de B______.

c. Par décision du 6 juin 2023, le SEM a admis provisoirement C______. À teneur de cette dernière, l’admission provisoire comportait une durée initiale de douze mois dès son entrée en force.

d. Par jugement du 8 septembre 2023, le TAPI a rejeté le recours.

C______ n’étant pas titulaire d’une autorisation de séjour, c’était à juste titre que l’OCPM avait estimé que son fils et son épouse ne remplissaient pas les conditions de l’art. 44 LEI. Son admission provisoire ayant depuis lors été admise par le SEM, il appartenait au TAPI d’examiner si une autorisation sur la base de l’art. 85 al. 7 LEI pourrait leur être octroyée, l'état de fait existant au moment où il statuerait devant être pris en compte. Cela étant, les conditions de cette disposition n'étaient en l'espèce pas remplies, B______ étant âgé de plus de 18 ans lorsque l’admission provisoire de son père avait été prononcée par le SEM, le 6 juin 2023, et le délai légal de trois ans n'étant en outre pas respecté. La famille dépendait par ailleurs de l’aide sociale.

Sous l'angle du cas de rigueur, B______ était arrivé en Suisse quelques jours avant sa majorité et la durée de son séjour, de même que celle de sa mère, ne saurait ainsi être qualifiée de longue. Ils ne pouvaient en outre pas se prévaloir d'une intégration socio-professionnelle marquée, étant sans emploi, au bénéfice de l’aide sociale, ne démontrant pas avoir le niveau requis en français et n’indiquant pas avoir créé des liens si étroits avec la Suisse qu'ils justifieraient à eux seuls une exception aux mesures de limitation. Aucun élément du dossier n'attestait au demeurant que les difficultés auxquelles ils devraient faire face en cas de retour seraient plus lourdes que celles que rencontraient d'autres compatriotes contraints de retourner dans leur pays d'origine au terme d'un séjour régulier en Suisse.

Il ne ressortait nullement des documents médicaux versés à la procédure que C______ ne pourrait plus vivre de manière indépendante et nécessiterait une assistance constante dans ses tâches quotidiennes que seuls B______ et A______ seraient en mesure de lui prodiguer. Dès lors que C______ aurait la possibilité de se faire aider en Suisse par des personnes habilitées pour lui porter l’assistance actuellement fournie par B______ et A______, le fait que ces derniers s’en chargent ne saurait justifier la délivrance d’une autorisation de séjour en leur faveur. Enfin, les déclarations de B______ et A______ qui expliquaient être en formation, respectivement attendre la régularisation de sa situation pour travailler et subvenir aux besoins de la famille, étaient en contradiction avec la nécessité d’une assistance constante de C______ alléguée. C'était ainsi à bon droit que l’autorité intimée avait retenu que les intéressés ne pouvaient pas valablement se prévaloir de la dépendance de C______ à leur égard pour en déduire un quelconque droit au regroupement familial.

C. a. Par acte posté le 11 octobre 2023, B______ et A______ ont recouru contre ce jugement auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), concluant principalement à son annulation.

Le TAPI avait complètement fait fi de l'état de santé de C______ alors même que c'était notamment pour cette raison que les recourants avaient rejoint la Suisse. L'état de santé de C______ était très fragile et sa situation était telle qu'une issue fatale pourrait se produire à tout moment. Depuis sa transplantation cardiaque, son état de santé peinait à se stabiliser et son traitement était extrêmement complexe, auquel s'ajoutait encore un régime nutritionnel spécial et strict. Il devait en outre bénéficier d'un suivi médical régulier et devait toujours être accompagné puisqu'il lui arrivait fréquemment de subir des incidents qui nécessitaient une réaction urgente permettant de lui sauver la vie. L'accompagnement des institutions spécialisées du canton n'était ainsi clairement pas suffisant et une assistance constante dans ses tâches quotidiennes était indispensable. Aussi la présence en Suisse des recourants auprès de C______ était absolument nécessaire. Par ailleurs, ils étaient intégrés dans la société suisse, ils respectaient les valeurs de la Constitution, la sécurité et l'ordre publics.

L'emploi de B______ – à l'issue de sa formation – et celui de A______ – disposée à travailler dès la régularisation de sa situation – permettrait de réduire, voire supprimer, l'aide sociale perçue par la famille et il était nécessaire pour les recourants d'être auprès de leur mari et père dans ses potentiels derniers mois, voire années, de vie. S'il fallait renvoyer les recourants au Kosovo, cela aurait pour conséquence de déchirer une famille nucléaire. Enfin, les possibilités de réintégration au Kosovo étaient en réalité illusoires compte tenu de la situation familiale et des circonstances susmentionnées.

Compte tenu de l'extrême lenteur des autorités administratives à ordonner l'admission provisoire de C______, son fils avait été contraint de déposer une demande de regroupement familial afin de sauvegarder ses droits et s'il fallait suivre le raisonnement de l'OCPM et du TAPI, seuls les enfants mineurs de moins de 11 ans de personnes admises à titre provisoire pourraient de facto bénéficier de du regroupement familial [18 ans – (44 mois d'attente + délai de carence de trois ans)].

C______ ayant été admis provisoirement plus de 44 mois après sa demande et la Cour européenne des droits de l'Homme (ci-après : CourEDH) ayant établi le dies a quo du délai de carence à l'arrivée de l'étranger dans le pays d'accueil, ledit délai de carence courait à ce jour en réalité depuis plus de quatre ans. En tout état, compte tenu de la longue durée du suivi de la maladie de C______ et du défaut à moyen terme, voire à long terme, d'infrastructures médicales au Kosovo lui permettant d'y être soigné, tout prêtait à croire que la durée de son séjour en Suisse serait relativement longue, de sorte qu'un retour au Kosovo n'était pas envisageable. Dans la mesure où il avait effectué une demande d'autorisation de séjour et, subsidiairement, d'admission provisoire depuis plus de quatre ans, imposer un délai de carence supplémentaire de trois ans après son admission provisoire serait contraire aux art. 13 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst - RS 101), 8 CEDH et 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, conclu à New York le 16 décembre 1966 (Pacte ONU II - RS 0.103.2) et serait dénué de sens puisque la famille devrait de toute manière être réunie en Suisse à terme. Imposer par ailleurs à B______ de vivre au Kosovo, loin de son père, serait contraire à l'intérêt supérieur de l'enfant dont la présence du père dans la vie était extrêmement importante pour son bon développement. Enfin, l'éventuelle future activité lucrative de A______ n'entrait pas en contradiction avec la nécessité d'une assistance constante de son mari dans la mesure où les recourants ne seraient pas à une distance démesurée de C______ et auraient l'occasion d'organiser leur emploi du temps afin que ce dernier soit constamment assisté à tout le moins par l'un d'eux. Aussi, la famille A______ et B______ avait un intérêt majeur à ce que les recourants puissent bénéficier du regroupement familial. Les conditions énoncées à l'art. 85 al. 7 let. a et b LEI étaient par ailleurs remplies et si la famille A______ et B______ était effectivement dépendante de l'aide social, elle était la conséquence du grave état de santé de C______ et de la situation irrégulière de la famille en Suisse. Ce dernier faisait toutefois tout ce qui était raisonnablement exigible pour devenir financièrement indépendant, dans la mesure où il suivait régulièrement un programme de réadaptation cardiaque qui pourrait à terme possiblement permettre sa réinsertion dans le monde du travail.

b. L'OCPM a conclu au rejet du recours les arguments invoqués, semblables à ceux présentés en première instance, n’étant pas de nature à modifier sa position.

c. Dans leur réplique du 8 février 2024, les recourants ont produit un contrat de stage auprès d'D______ SNC du 8 janvier au 30 juin 2024 en qualité de gestionnaire du commerce de détail, et une attestation du doyen d'ACCES II datée du 29 novembre 2023 concernant B______, relevant que ces pièces démontraient sa bonne intégration en Suisse.

d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

e. Il ressort des pièces médicales concernant C______ les éléments suivants :

-       selon un rapport de consultation du 27 février 2022 du service de cardiologie des HUG, son « évolution est tout à fait stable » et son traitement à domicile consistait dans la prise de médicaments ;

-       selon un courrier du service de cardiologie des HUG du 25 avril 2022, le « patient est actuellement au bénéfice d'un traitement complexe incluant des immunosuppresseurs, des médicaments anti-hypertenseur, hypolipémiant ainsi que des antidiabétiques oraux ». Une mauvaise adhésion thérapeutique concernant le traitement médicamenteux aurait des « conséquences catastrophiques, sous forme d'un rejet de greffe cardiaque et un décès rapide du patient » ;

-       selon l'attestation « à qui de droit » du Docteur E______ du 26 avril 2022, C______ avait « besoin d'un régime spécial qui lui donne des dépenses particulières, donc je vous demande de lui accorder un soutien financier particulier pendant 1 an » ;

-       selon la pièce la plus récente au dossier, soit un avis de sortie des soins aigus du 4 janvier 2023, il avait été admis au service des urgences du 29 au 30 décembre 2022 pour une péricardite avec épanchement péricardique de 9 mm.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Les recourants contestent le refus d’octroi de titres de séjour pour cas individuel d'extrême gravité, subsidiairement le rejet de leur demande le regroupement familial et d'inclusion dans l'admission provisoire de C______.

2.1 La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l’OASA, règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants du Kosovo.

2.2 Les étrangers au bénéfice d'une admission provisoire en Suisse (art. 83 al. 1 LEI) possèdent un statut précaire qui assure leur présence en Suisse aussi longtemps que l'exécution du renvoi n'est pas possible, n'est pas licite ou ne peut être raisonnablement exigée (ATF 141 I 49 consid. 3.5 ; 138 I 246 consid. 2.3).

2.3 En vertu de l'art. 24 de l'ordonnance du 11 août 1999 sur l'exécution du renvoi et de l'expulsion d'étrangers (OERE, RS 142.281), la procédure à suivre pour regrouper les membres d'une famille de personnes admises à titre provisoire en Suisse est régie par l'art. 74 OASA. Conformément à l'art. 74 al. 1 OASA, les demandes visant à inclure des membres de la famille dans l'admission provisoire doivent être déposées auprès de l'autorité migratoire cantonale (art. 88 al. 1 OASA). Cette autorité transmet la demande accompagnée de son avis au SEM, qui précise si les conditions légales de regroupement familial sont remplies (art. 74 al. 2 OASA). Les admissions provisoires, de même que l'inclusion prévue par l'art. 85 al. 7 LEI, entrent dans la compétence du SEM (art. 83 al. 1 LEI ; art. 74 al. 2 OASA ; ATF 141 I 49 consid. 3.5.2), les cantons ne pouvant que les proposer pour approbation (art. 83 al. 6 LEI).

2.4 En vertu de l'art. 85 al. 7 LEI, le conjoint et les enfants célibataires de moins de 18 ans des personnes admises à titre provisoire, y compris les réfugiés admis à titre provisoire, peuvent bénéficier du regroupement familial et du même statut, au plus tôt trois ans après le prononcé de l'admission provisoire, pour autant qu'ils vivent en ménage commun (let. a), qu'ils disposent d'un logement approprié (let. b), que la famille ne dépende pas de l'aide sociale (let. c), qu'ils soient aptes à communiquer dans la langue nationale parlée au lieu de domicile (let. d) et que la personne à l'origine de la demande de regroupement familial ne perçoive pas de prestations complémentaires annuelles au sens de la loi fédérale du 6 octobre 2006 sur les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI (LPC - RS 831.30) ni ne puisse en percevoir grâce au regroupement familial (let. e). Pour l'octroi de l'admission provisoire, une inscription à une offre d'encouragement linguistique suffit en lieu et place de la condition prévue à l'al. 7 let. d (art. 85 al. 7bis LEI).

2.5 Les critères déterminants pour permettre le regroupement familial au sens de l'art. 85 al. 7 LEI sont identiques à ceux de l'art. 44 régissant le regroupement familial en faveur de personnes au bénéfice d'une autorisation de séjour en Suisse (à l'exception du délai d'attente prévu à l'art. 87 al. 5 LEI). Dans ces conditions, il se justifie, en principe, de reprendre la jurisprudence du Tribunal fédéral et du Tribunal administratif fédéral (ci-après : TAF) rendue en rapport avec l'art. 44 LEI par analogie pour interpréter l'art. 85 al. 7 LEI (ATAF 2017 VII/4 consid. 4 et les réf. cit.).

La dépendance à l'aide sociale constitue une circonstance conduisant au rejet de la demande de regroupement familial. L'appréciation de cette condition doit se faire sur la base d'un pronostic. Le TF a eu l’occasion de rappeler que la condition relative à l’autonomie financière posée à l’art. 44 let. c LEI avait pour but de décharger l’aide sociale et de protéger les finances de la collectivité. Le motif de refus prévu à l’art. 44 let. c LEI est ainsi réalisé lorsqu’il existe un risque concret d’une dépendance continue vis-à-vis des prestations de l’aide sociale. Pour évaluer ce risque, les possibilités financières à long terme de tous les membres de la famille doivent être prises en considération (arrêts du Tribunal fédéral 2C_574/2018 du 15 septembre 2020 consid. 4.1 et 2C_35/2019 du 15 septembre 2020 consid. 4.1).

2.6 Dans un arrêt de la Grande chambre de la CourEDH du 9 juillet 2021 rendu en l’affaire M. A. c. Danemark (req. n° 6697/18), était en cause une requête relative au refus temporaire par les autorités danoises d’accorder à l’épouse du requérant une autorisation de séjour au titre du regroupement familial. Le requérant s’était plaint de ce que les personnes qui, comme lui, bénéficiaient d’une « protection temporaire » au Danemark devaient attendre l’échéance d’un délai légal de trois ans avant de pouvoir obtenir le regroupement familial, sauf circonstances exceptionnelles, tandis que les autres bénéficiaires d’une protection internationale au Danemark n’étaient pas soumis à une telle restriction.

Dans son arrêt, la CourEDH a tout d’abord reconnu que les États avaient le droit, sans préjudice des engagements découlant pour eux des traités, de contrôler l’entrée et le séjour des non-nationaux sur leur territoire et que la CEDH ne garantissait pas le droit pour un étranger d’entrer ou de résider dans un pays particulier (ACEDH M.A. c. Danemark précité, § 131). Elle a aussi rappelé que l’art. 8 CEDH ne garantissait pas un droit absolu au regroupement familial sur le territoire d’un État déterminé (ACEDH M.A. c. Danemark précité, §132). Elle a toutefois précisé : « […] dans une affaire qui concerne la vie familiale aussi bien que l’immigration, l’étendue de l’obligation pour l’État d’admettre sur son territoire des proches de personnes qui y résident varie en fonction de la situation particulière des personnes concernées et de l’intérêt général et appelle la recherche d’un juste équilibre entre les intérêts concurrents en jeu. Les facteurs à prendre en considération dans ce contexte sont la mesure dans laquelle il y a effectivement entrave à la vie familiale, l’étendue des attaches que les personnes concernées ont dans l’État contractant en cause, la question de savoir s’il existe ou non des obstacles insurmontables à ce que la famille vive dans le pays d’origine de l’étranger concerné et celle de savoir s’il existe des éléments touchant au contrôle de l’immigration » (ACEDH M.A. c. Danemark précité, § 132). Bien que l’intérêt supérieur de l’enfant ne soit pas déterminant à lui seul, il fallait également lui accorder un poids important (ACEDH M.A. c. Danemark précité, § 133). Quant à la question spécifique des délais d’attente, la CourEDH a estimé que les États membres devaient se voir reconnaître « une ample marge d’appréciation » lorsqu’il s’agissait de décider s’il y avait lieu d’assortir d’un tel délai le regroupement familial des personnes qui n’avaient pas obtenu le statut de réfugiés mais qui bénéficiaient d’une protection subsidiaire ou temporaire (ACEDH M.A. c. Danemark précité, § 161). Cette latitude n’était toutefois pas absolue et appelait un examen sous l’angle de la proportionnalité. Au‑delà d’un délai d’attente de deux ans, la Cour a estimé que les éventuels obstacles insurmontables à l’exercice d’une vie familiale dans le pays d’origine prenaient un poids de plus en plus important. Il fallait que les dispositions de la CEDH soient comprises et appliquées par les États membres d’une manière rendant les droits garantis par cette convention (dont le droit au respect de la vie familiale) concrets et effectifs et non pas théoriques et illusoires (ACEDH M.A. c. Danemark précité, §162 et 193 in fine). Le processus décisionnel devait également présenter les garanties de souplesse, de célérité et d’effectivité suffisantes pour faire observer le respect du droit découlant de l’art. 8 CEDH (ACEDH M.A. c. Danemark précité, §163). En définitive, l’arrêt de la CourEDH a intimé au Danemark de procéder à une appréciation individualisée de chaque cas afin de vérifier si le respect d’un délai plus bref que celui de trois ans ne se justifiait pas par des considérations tenant à l’unité de la famille (ACEDH M.A. c. Danemark précité, § 193 ; ANNE‑LAURENCE GRAF, Affaire M.A. c. Danemark : délai légal de trois ans pour le regroupement familial jugé disproportionné, in Asyl 4/2021 p. 23 s.). Il découle de cet arrêt de principe que la CourEDH accepte qu’un État partie à la CEDH introduise dans sa législation un délai d’attente strict et a priori indifférencié de deux ans au maximum (ACEDH M.A. c. Danemark précité, § 162 : « Si elle ne voit aucune raison de douter des motifs justifiant un délai d’attente de deux ans […] »). Jusqu’à deux ans, ce délai est ainsi réputé conforme au respect de la vie familiale, dans le sens d’une présomption réfragable. En revanche, tout délai de carence supérieur à deux ans doit être soumis à une pleine « appréciation individuelle de l’impératif d’unité familiale à la lumière de la situation concrète des personnes concernées » (ACEDH M.A. c. Danemark précité, § 162 et 192). Ce, afin d’accorder aux requérants « une possibilité réelle de bénéficier d’une appréciation individualisée de la question de savoir si un délai plus bref que celui de trois ans se justifiait par des considérations tenant à l’unité familiale » (ACEDH M.A. c. Danemark précité, §193).

Sur la base de cet arrêt, le TAF a considéré qu'il appartiendrait au SEM et aux tribunaux de modifier leur pratique relative à l’application du délai d’attente de trois ans prévu à l’art. 85 al. 7 LEI, dans le sens de sa mise en conformité avec l’exégèse de l’art. 8 CEDH récemment opérée par la Haute Cour de Strasbourg. Aussi longtemps que la loi n’aura pas été révisée, cela signifie concrètement qu’à l’approche d’un délai d’attente effectif de deux ans – délai qu’il y a lieu de fixer au plus tôt à six mois avant l’atteinte des deux ans de délai de carence –, les autorités suisses compétentes seront dorénavant tenues de procéder, à la demande de la partie requérante, à un examen individuel et détaillé de son cas. Ce faisant, elles tiendront compte de l’ensemble des facteurs cités par la CourEDH, dont notamment le niveau d’intégration en Suisse, l’existence d’obstacles insurmontables à la poursuite de la vie familiale dans le pays d’origine ou dans un État tiers et l’intérêt supérieur de l’enfant, afin de déterminer si l’application d’un délai plus bref que les trois ans légaux s’imposait pour des considérations liées à la protection de la vie familiale garantie par l’art. 8 CEDH (ATAF F-2739/2022 du 24 novembre 2022 consid. 6.5).

2.7 L’art. 8 CEDH, tout comme les art. 13 Cst. et 17 Pacte ONU II , garantit le droit de toute personne à la protection de sa vie familiale. Selon la jurisprudence, ces dispositions ne confèrent, en principe, pas un droit d’entrer et de séjourner en Suisse ou, plus généralement, sur le territoire d’un État déterminé, ni un droit absolu au regroupement familial (ATF 144 I 91 consid. 4.2 ; 143 I 21 consid. 5.1 ; 137 I 284 consid. 2.1). Le fait de refuser un droit de séjour à un étranger dont la famille se trouve en Suisse peut toutefois entraver sa vie familiale et porter atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale garanti par cette disposition (ATF 144 I 91 consid. 4.2 ; 140 I 145 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_950/2017 du 16 mai 2018 consid. 3.1). Il n'y a cependant pas atteinte à la vie familiale si l'on peut attendre des membres de la famille qu'ils réalisent leur vie de famille à l'étranger (ATF 144 I 91 consid. 4.2 ; 140 I 145 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_950/2017 consid. 3.1).

Lorsqu'un mineur est devenu majeur au cours de la procédure (ATF 145 I 227 consid. 3.1 : 136 II 497 consid. 3.2.; arrêts du Tribunal fédéral 2C_88/2024 du 1er mai 2024 ; 2C_903/2022 du 6 janvier 2023 consid. 4.3), ce n'est qu'en présence de liens de dépendance particulier entre lui et un parent au bénéfice d'un droit de présence assuré en Suisse qu'il pourrait obtenir le droit de séjourner en Suisse (par exemple en raison d'une maladie grave ou d'un handicap les empêchant de gagner leur vie et de vivre de manière autonome) (ATF 144 II 1 consid. 6.1 ; 137 I 154 consid. 3.4.2 ; 129 II 11 consid. 2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_293/2018 du 5 octobre 2018 consid. 1.4 ; 2D_10/2018 du 16 mai 2018 consid. 4.1 ; 2C_969/2017 du 2 juillet 2018 consid. 1.1.2). On peut en effet présumer qu'à partir de 18 ans, un jeune adulte est en mesure de vivre de manière indépendante, sauf circonstances particulières telles qu'un handicap ou une maladie grave (ATF 127 Ib 257). Ainsi le fait pour une jeune adulte d'avoir vécu aux côtés de sa mère, qui l'a élevée seule, est certes de nature à accroître son sentiment d'attachement à son égard et à rendre la séparation plus difficile mais ne saurait créer vis-à-vis d'elle une relation de dépendance au sens de la jurisprudence (arrêt du Tribunal fédéral 2D_139/2008 consid 2.3). Un tel lien de dépendance a par exemple été reconnu entre un enfant majeur, souffrant d'une schizophrénie paranoïde continue et d'un trouble dépressif récurrent, et sa mère, qui bénéficiait d'une autorisation de séjour en Suisse, dans la mesure où il était établi, notamment par certificat médical, que le soutien que nécessitait l'état de santé de l'intéressé ne pouvait être fourni que par cette dernière, à défaut d'autres personne proches disponibles (arrêt du Tribunal fédéral 2C_546/2013 du 5 décembre 2013 consid. 4.4.2).

Le Tribunal fédéral a de même confirmé deux arrêts de la chambre administrative qui a reconnu les intérêts privés de deux enfants majeurs de nationalité kosovare à pouvoir demeurer en Suisse auprès de leur père, souffrant d’une cécité presque complète et de troubles mentaux. Ses angoisses étaient exacerbées en cas de séparation d’avec ses enfants, lesquels avaient organisé leur emploi du temps afin qu’au moins l’un deux se trouve toujours avec lui, et ce à toute heure du jour et de la nuit, ce relais apparaissant effectivement nécessaire pour une prise en charge cohérente et efficace de l'intéressé. Par ailleurs, seules les personnes du cadre intrafamilial étaient considérées comme aptes à supporter à long terme ses demandes du quotidien. En outre, il n'existait pas de raisons permettant de s'opposer à la délivrance d'une autorisation de séjour en faveur des deux enfants majeurs. Ceux-ci n'avaient en effet jamais fait l'objet d'une condamnation pénale ou de poursuites et étaient financièrement indépendants (arrêts du Tribunal fédéral 2C_471/2019 et 2C_474/2019 du 25 septembre 2019).

Dans un arrêt du 3 juin 2015, le TAF a rappelé qu'en cas d'effet miroir, le lien de dépendance devait atteindre un degré d'intensité qualifié que seules justifiaient des circonstances tout à fait particulières, non réalisées en l'espèce, malgré un rapport médical qui indiquait que la mère était très dépendante de son fils sur le plan affectif et qu'une aggravation de son état de santé était à prévoir en cas de renvoi de celui‑ci hors de Suisse. Le recourant n'avait au surplus pas démontré que sa mère requérait une assistance et des soins quotidiens que lui seul serait susceptible de lui prodiguer (arrêt du Tribunal fédéral D-1613/2015 du 3 juin 2015, consid. 5.2.3).

2.8 Lorsque l’enfant est devenu majeur au cours de la procédure de regroupement familial, la Convention relative aux droits de l’enfant, conclue à New York le 20 novembre 1989, approuvée par l’Assemblée fédérale le 13 décembre 1996, instrument de ratification déposé par la Suisse le 24 février 1997 (CDE - RS 0.107), ne lui est plus applicable (art. 1 CDE ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_767/2013 du 6 mars 2014 consid. 3.5).

2.9 En l’espèce, il est établi que le délai de trois ans prévu par l'art. 85 al.7 LEI précité n’est pas respecté. Si, certes, les demandes formulées émanent du conjoint et de l’enfant célibataire de C______, en tenant compte des facteurs cités par la CourEDH, les circonstances ne justifient en aucun cas ici qu'un délai plus bref que les trois ans légaux soit appliqué dans le cas d'espèce, de sorte qu'ils ne peuvent pas obtenir le regroupement familial et l'inclusion dans l'admission provisoire de Florim.

Il n'est en effet pas contesté que le recourant, âgé aujourd'hui de 21 ans, est arrivé en Suisse quelques jours seulement avant sa majorité. Par ailleurs, il était âgé de plus de 18 ans lorsque l’admission provisoire de son père a été prononcée par le SEM, le 6 juin 2023. Le recourant n'étant pas mineur, il n'y a pas lieu d'appliquer les critères imposés par les art. 3 et 9 CDE et de toute manière, son allégation selon laquelle la présence de son père dans sa vie serait extrêmement importante pour son bon développement est contredite par le fait que ce n'est que début 2021 qu'il a rejoint son père en Suisse. Pour les mêmes raisons, les recourants ne sauraient être suivis lorsqu'ils soutiennent qu'un renvoi Kosovo aurait pour conséquence de déchirer une famille nucléaire.

Même en admettant la possibilité d'un regroupement familial inversé, on ne saurait reconnaître l'existence d'un rapport de dépendance au sens de l'art. 8 CEDH entre les recourants et C______. C'est le lieu de relever qu'aucune pièce médicale nouvelle n'a été déposée depuis le jugement du TAPI. Or comme il l'a relevé, au vu des rapports médicaux versés à la procédure, si l’état de santé de C______, qui avait subi une greffe cardiaque en 2019, était fragile et nécessitait un traitement au long cours, son traitement consistait toutefois uniquement en la prise de médicaments et en un suivi régulier dans un centre expérimenté dans le suivi des patients transplantés cardiaques. Il ne ressort en revanche nullement des documents médicaux versés à la procédure que l’intéressé ne pourrait plus vivre de manière indépendante et nécessiterait une assistance constante dans ses tâches quotidiennes que seuls les recourants seraient en mesure de lui prodiguer. Tout au plus la nécessité de suivre un régime alimentaire spécial est évoquée.

Partant, s’il n'est pas contesté que les recourants assistent certainement C______ à domicile et l'aident dans la gestion et le traitement de ses tâches quotidiennes, ils n’ont toutefois pas démontré que ce dernier se trouverait dans un état de dépendance à leur égard, tel que défini par la jurisprudence, ni qu’eux seuls seraient en mesure de s'en occuper. A toutes fins utiles, il sera rappelé que comme les recourants le reconnaissent, C______ peut compter sur les structures et les institutions spécialisées du canton de Genève. Preuve par ailleurs qu'il n'a pas besoin d'une assistance constante des recourants est d'ailleurs le fait qu'ils ne sont arrivés à Genève qu'en 2021 alors que la transplantation cardiaque de C______ date déjà du 5 novembre 2019. Les recourants ne peuvent ainsi pas valablement se prévaloir de la dépendance de C______ à leur égard pour en déduire un quelconque droit au regroupement familial.

Dans l'hypothèse - non démontrée non plus - où C______ devrait rester en Suisse à défaut à moyen terme, voire à long terme, d'infrastructures médicales au Kosovo lui permettant d'y être soigné, les recourants pourront venir le visiter en Suisse « dans ses potentiels derniers mois, voire années, de vie » par la délivrance de visas.

Par ailleurs, la famille dépend de l’aide sociale et l'absence de recherche d'un travail par la recourante ne saurait s’expliquer, contrairement à ses allégations, par le défaut de régularisation de sa situation dès lors qu'elle peut obtenir de l'OCPM une autorisation provisoire de travail jusqu’à droit connu sur sa demande d’autorisation de séjour. De même, l'allégation selon laquelle C______ ferait tout ce qui était raisonnablement exigible pour devenir financièrement indépendant, dans la mesure où il suivait régulièrement un programme de réadaptation cardiaque qui pourrait à terme possiblement lui permettre sa réinsertion dans le monde du travail, est en contradiction avec la nécessité d’une assistance constante et à long terme alléguée par les recourants. Il ressort de ce qui précède que rien ne permet de considérer que la famille s'affranchira de l'aide sociale dans un futur proche.

Enfin, malgré le jugement du TAPI qui a retenu que les recourants ne démontraient pas avoir le niveau requis en français, la recourante n'a toujours pas produit de preuve de son niveau de communication en français et comme cela sera développé ci-après sous consid. 3.5, les recourants ne peuvent se prévaloir d'une intégration socio-professionnelle marquée en Suisse.

Il s’ensuit que l’autorité intimée a, à juste titre, refusé l'inclusion des recourants dans l'admission provisoire de C______.

3.             Reste encore à examiner si la situation des recourants remplit les critères relatifs à un cas de rigueur.

3.1 Aux termes de l'art. 30 al. 1 let. b LEI, il est possible de déroger aux conditions d'admission (art. 18 à 29 LEI) notamment dans le but de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

Pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration de la personne requérante sur la base des critères d'intégration définis à l'art. 58a al. 1 LEI (let. a), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f), ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g ; art. 31 al. 1 OASA).

Pour évaluer l'intégration, l'autorité compétente tient compte des critères suivants : le respect de la sécurité et de l'ordre publics (let. a), le respect des valeurs de la Constitution (let. b), les compétences linguistiques (let. c), la participation à la vie économique ou l'acquisition d'une formation (let. d ; art. 58a al. 1 LEI).

3.2 Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2).

Ainsi, les critères énumérés par l'art. 31 al. 1 OASA, qui doivent impérativement être respectés, ne sont pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené une personne étrangère à séjourner illégalement en Suisse (SEM, Directives et commentaires, Domaine des étrangers, 2013, état au 1er septembre 2023, n. 5.6.10 ; ATA/179/2024 du 6 février 2024 consid. 3.3).

3.3 La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que la personne étrangère concernée se trouve dans une situation de détresse personnelle. Ses conditions de vie et d'existence doivent ainsi être mises en cause de manière accrue en comparaison avec celles applicables à la moyenne des personnes étrangères. En d'autres termes, le refus de la soustraire à la réglementation ordinaire en matière d'admission doit comporter à son endroit de graves conséquences. Le fait que la personne étrangère ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu'elle y soit bien intégrée, tant socialement que professionnellement, et que son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas d'extrême gravité. Encore faut-il que sa relation avec la Suisse soit si étroite qu'on ne puisse exiger qu'elle vive dans un autre pays, notamment celui dont elle est originaire. À cet égard, les relations de travail, d'amitié ou de voisinage que la personne concernée a pu nouer pendant son séjour ne constituent normalement pas des liens si étroits avec la Suisse qu'ils justifieraient une exception (ATF 130 II 39 consid. 3 ; 124 II 110 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_754/2018 du 28 janvier 2019 consid. 7.2).

Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d'études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n'arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l'aide sociale ou des liens conservés avec le pays d'origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêts du TAF C-5414/2013 du 30 juin 2015 consid. 5.1.4 ; C- 6379/2012 et C-6377/2012 du 17 novembre 2014 consid. 4.3).

La jurisprudence requiert, de manière générale, une très longue durée de séjour en Suisse (Minh SON NGUYEN/Cesla AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, LEtr, vol. 2, 2017, p. 269 et les références citées). Par durée assez longue, la jurisprudence entend une période de sept à huit ans (arrêt du TAF 7330/2010 du 19 mars 2012 consid. 5.3 ; Minh SON NGUYEN/Cesla AMARELLE, op. cit., p. 269). Le caractère continu ou non du séjour peut avoir une influence (arrêt du TAF C-5048/2010 du 7 mai 2012 ; Minh SON NGUYEN/Cesla AMARELLE, op. cit., p. 269). Après un séjour régulier et légal de dix ans, il faut en principe présumer que les relations sociales entretenues en Suisse par la personne concernée sont devenues si étroites que des raisons particulières sont nécessaires pour mettre fin à son séjour dans ce pays (ATF 144 I 266 consid. 3.8).

Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit néanmoins être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances du cas particulier et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2).

3.4 L'art. 30 al. 1 let. b LEI n'a pas pour but de soustraire la personne requérante aux conditions de vie de son pays d'origine, mais implique que la personne concernée se trouve personnellement dans une situation si grave qu'on ne peut exiger de sa part qu'elle tente de se réadapter à son existence passée. Des circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place, en lien avec la situation économique, sociale, sanitaire ou scolaire du pays en question et auxquelles la personne requérante serait également exposée à son retour, ne sauraient être prises en considération, tout comme des données à caractère structurel et général, telles que les difficultés d'une femme seule dans une société donnée (ATF 123 II 125 consid. 5b/dd ; arrêts du Tribunal fédéral 2A.245/2004 du 13 juillet 2004 consid. 4.2.1 ; 2A.255/1994 du 9 décembre 1994 consid. 3). Au contraire, dans la procédure d'exemption des mesures de limitation, seules des raisons exclusivement humanitaires sont déterminantes, ce qui n'exclut toutefois pas de prendre en compte les difficultés rencontrées par la personne requérante à son retour dans son pays d'un point de vue personnel, familial et économique (ATF 123 II 125 consid. 3 ; ATA/878/2022 du 30 août 2022 consid. 5b).

La question n'est donc pas de savoir s'il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d'examiner si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

3.5 En l'espèce, arrivés en 2021 en Suisse, la durée de séjour des recourants ne saurait être qualifiée de longue. Cette durée doit en outre être fortement relativisée dès lors que les intéressés y ont séjourné sans autorisation puis au bénéfice d'une simple tolérance à compter du dépôt de leurs demandes d’autorisation.

Les recourants ne peuvent en outre pas se prévaloir d'une intégration socio-professionnelle marquée. La recourante est sans emploi, au bénéfice de l’aide sociale et ne démontre pas avoir le niveau requis en français. S’agissant plus particulièrement de B______, bien qu’il soit désormais intégré au système scolaire et professionnel genevois, le début de sa prise en charge à Genève est très récent et il a vécu la majeure partie de sa vie dans son pays d'origine de sorte que son intégration en Suisse ne paraît pas si profonde. Arrivé en Suisse quelques jours avant ses 18 ans, il a vécu dans son pays d'origine non seulement son enfance, mais surtout son adolescence, période cruciale pour la formation de la personnalité, de sorte qu’il y reste encore attaché dans une large mesure. Il en maîtrise ainsi la langue et les codes culturels.

Les recourants n’indiquent par ailleurs pas avoir créé des liens si étroits avec la Suisse qu'ils justifieraient à eux seuls une exception aux mesures de limitation. Quoi qu'il en soit, aucun élément du dossier n'atteste que les difficultés auxquelles ils devraient faire face en cas de retour seraient plus lourdes que celles que rencontrent d'autres compatriotes contraints de retourner dans leur pays d'origine au terme d'un séjour régulier en Suisse.

Par conséquent, les relations des recourants avec la Suisse n'apparaissent pas si étroites qu'il ne peut être exigé de leur part qu'ils retournent vivre au Kosovo.

Enfin, contrairement à ce que les recourants soutiennent et comme déjà constaté, l'état de santé de C______ n'impose pas leur présence en Suisse et, partant, ils ne peuvent pas faire valoir des charges d'assistance familiale au sens des art. 58a al. 2 LEI cum 77f let. c ch. 1 OASA.

Dès lors, compte tenu de ce qui précède, les conditions permettant de reconnaître un cas individuel d'une extrême gravité au sens de l'art. 30 al. 1 let. b LEI ne sont manifestement pas remplies.

4.             Reste à examiner le renvoi et son exécution.

4.1 Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, toute personne étrangère dont l'autorisation est refusée, révoquée ou qui n'est pas prolongée après un séjour autorisé est renvoyée. La décision de renvoi est assortie d'un délai de départ raisonnable (art. 64d al. 1 LEI).

4.2 Le renvoi d'une personne étrangère ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI). L'exécution n'est pas possible lorsque la personne concernée ne peut quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers ni être renvoyée dans un de ces États (art. 83 al. 2 LEI). Elle n'est pas licite lorsqu'elle serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEI). Elle n'est pas raisonnablement exigible si elle met concrètement en danger la personne étrangère, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEI).

4.3 En l'espèce, dès lors que la délivrance d'une autorisation de séjour et l'inclusion dans l'admission provisoire de C______ ont été refusées aux recourants, c'est à bon droit que l'autorité intimée a prononcé leur renvoi de Suisse et que l'instance précédente a confirmé ledit renvoi. Par ailleurs, il ne ressort pas du dossier que l'exécution du renvoi serait impossible, illicite ou inexigible.

Dans ces circonstances, le recours, mal fondé, sera rejeté.

5.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 11 octobre 2023 par A______ et B______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 8 septembre 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge, conjointement et solidairement, de A______ et B______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Yama SANGIN, avocat des recourants, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Patrick CHENAUX, président, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Michèle PERNET, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

J. BALZLI

 

 

le président siégeant :

 

 

P. CHENAUX

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.