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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3672/2022

ATA/99/2024 du 30.01.2024 sur JTAPI/647/2023 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3672/2022-PE ATA/99/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 30 janvier 2024

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Aleksandra PETROVSKA, avocate

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 13 juin 2023 (JTAPI/647/2023)


EN FAIT

A. a. A______, née le ______1971, est ressortissante de Macédoine du Nord.

b. En mai 2019, elle est arrivée en Suisse pour rejoindre son compagnon, B______, né le ______ 1962 et originaire du Kosovo.

c. Le 7 juillet 2020, à la suite d’une dispute lors de laquelle B______ avait fait preuve de violences physique et verbale et s’était montré menaçant, A______ a quitté le domicile de son compagnon et a été prise en charge par le Centre LAVI, lequel l’a placée dans un foyer.

d. Le 9 juillet 2020, A______ s’est présentée à la consultation interdisciplinaire de médecine et de prévention de la violence (ci-après : UIMPV) des Hôpitaux universitaires de Genève, où elle est suivie depuis lors et bénéficie d’un traitement médicamenteux sous la forme d’antidépresseurs, de somnifères et d’anxiolytiques.

e. Le 20 juillet 2020, A______ a déposé plainte pénale à l’encontre de B______ pour les violences subies, lequel a été, par ordonnance pénale du 30 juin 2022, reconnu coupable de menaces et d’infractions à la législation sur les étrangers et à la législation sur les armes et condamné à une peine pécuniaire de 150 jours‑amende à CHF 30.- le jour avec sursis, délai d’épreuve de trois ans, ainsi qu’à une amende de CHF 900.-. Il a également été reconnu coupable de voies de fait et condamné à une amende de CHF 800.-. Ladite ordonnance pénale n’a pas été contestée.

f. Le 1er novembre 2020, A______ a été mise au bénéfice d’une aide financière totale de l’Hospice général (ci-après : hospice).

B. a. Le 17 août 2020, A______ a déposé auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) une demande d’autorisation de séjour.

Elle avait été victime de violences conjugales de la part de son ex-compagnon, contre lequel elle avait déposé une plainte pénale. Elle était suivie par le Centre LAVI et était logée dans une pension.

b. Par courrier du 13 octobre 2021, l’OCPM a informé A______ de son intention de refuser sa demande et de prononcer son renvoi de Suisse. Un délai lui était imparti pour se déterminer.

c. Le 15 décembre 2021, A______ a précisé que sa présence en Suisse était indispensable pour participer à la procédure pénale ouverte contre son ex‑compagnon.

d. Par décision du 3 octobre 2022, l’OCPM a refusé d’octroyer à A______ une autorisation de séjour et a prononcé son renvoi de Suisse.

La durée de son séjour en Suisse ne constituait pas un élément susceptible de faire droit à sa demande et devait être relativisée en rapport avec les années passées dans son pays d’origine, où elle avait vécu toute sa vie. Elle ne pouvait en outre se prévaloir d’aucune intégration sociale et professionnelle et n’avait ainsi pas créé avec la Suisse des attaches profondes et durables l’empêchant de retourner en Macédoine du Nord, où résidait toute sa famille et ses proches. Le fait d’avoir subi des violences conjugales n’était pas non plus un motif suffisant pour constater l’existence d’un cas de rigueur.

L’exécution du renvoi était en outre possible, licite et raisonnablement exigible.

C. a. Par acte du 4 novembre 2022, A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision, concluant à son annulation et à l’octroi d’une autorisation de séjour en sa faveur.

Elle remplissait toutes les conditions pour la reconnaissance d’un cas de rigueur en raison d’une situation de grave détresse personnelle et d’un état de santé précaire. Après avoir dû partir de chez elle en raison des violences que lui infligeait son ex‑compagnon, elle s’était retrouvée sans logement. Elle était en outre suivie depuis lors par l’UIMPV et bénéficiait d’un traitement médicamenteux en raison de son état d’anxiété.

Son renvoi n’était pas exigible, dans la mesure où elle devait continuer à rester en Suisse pour poursuivre son traitement médical.

Elle a produit une attestation selon laquelle elle était suivie à l’UIMPV à raison d’une fois toutes les trois semaines. Elle bénéficiait d’un traitement médicamenteux majoré le 18 janvier 2022 puis le 3 février 2022 suite à une recrudescence de son état d’anxiété et à une péjoration de sa thymie en lien avec des facteurs de stress liés à la procédure pénale en cours contre son ex-compagnon.

b. L’OCPM a conclu au rejet du recours.

Les violences subies par A______ ne suffisaient pas à lui permettre, sans autres considérations, d’être mise au bénéfice d’un titre de séjour. Elle résidait ainsi en Suisse depuis peu de temps, n’était pas intégrée professionnellement et socialement et émargeait à l’aide sociale. D’un point de vue médical, si son traitement devait se poursuivre, les recherches effectuées indiquaient qu’il pouvait être effectué à Skopje, où une clinique privée et l’hôpital public offraient des consultations ambulatoires telles que celles qu’elle suivait. Des médicaments similaires à ceux qu’elle prenait, qui traitaient au demeurant des troubles courants, étaient également disponibles dans son pays. Elle avait vécu en Macédoine jusqu’à l’âge de 48 ans et aucun élément ne n’établissait que sa réintégration dans son pays d’origine serait compromise.

c. Par jugement du 13 juin 2023, le TAPI a rejeté le recours.

La durée du séjour en Suisse d’A______, de quatre ans, était insuffisante pour justifier à elle seule l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur, étant précisé qu’elle vivait illégalement en Suisse puis au bénéfice d’une simple tolérance depuis 2020. Son intégration apparaissait en outre inexistante. En effet, elle n’avait jamais exercé d’activité lucrative et bénéficiait de l’aide financière de l’hospice. Sa maîtrise du français n’état attestée par aucune pièce et il ne ressortait pas du dossier qu’elle soit investie dans la vie associative ou culturelle genevoise. Elle avait vécu dans son pays d’origine toute sa vie. Il n’était pas démontré qu’un suivi médical était encore nécessaire à ce jour ni qu’il devait être effectué à Genève. Par ailleurs, les violences dont elle avait été victime ne pouvaient à elles seules constituer un motif suffisant de délivrance d’une autorisation de séjour, dans la mesure où elles l’affectaient de la même manière en Suisse qu’en cas de son retour dans son pays d’origine. Au vu de l’ensemble des circonstances, la décision litigieuse devait être confirmée.

Il n’existait aucun obstacle à l’exécution du renvoi. En particulier, aucun élément du dossier ne permettait de retenir que le suivi et le traitement dont elle avait besoin ne seraient pas disponibles dans son pays d’origine.

D. a. Par acte du 16 août 2023, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation et à ce qu’une autorisation de séjour lui soit accordée.

Elle souffrait toujours de troubles anxio-dépressifs en lien avec les violences subies et poursuivait son suivi médical à raison d’une fois par mois. Le suivi psychologique était ainsi toujours d’actualité, raison pour laquelle elle devait être autorisée à rester en Suisse. Son intégration n’était pas non plus inexistante et elle avait trouvé un emploi en avril 2023, qui lui procurait un salaire mensuel de CHF 900.-. Elle se trouvait en Suisse depuis plus de quatre ans et y avait construit sa vie.

Elle avait établi l’existence d’obstacles au renvoi. Elle faisait toujours l’objet d’un suivi médical en lien avec les violences subies et un retour dans son pays aurait pour conséquence un arrêt de son traitement. Elle n’avait plus d’attache dans son pays d’origine, dès lors qu’elle avait tout quitté pour rejoindre son compagnon en Suisse.

Elle a versé au dossier :

- un contrat de travail conclu avec une entreprise de nettoyage à compter du 12 avril 2023 en qualité d’agente d’entretien pour un salaire horaire brut de CHF 22.15 et une durée hebdomadaire de travail de 11,25 heures, ainsi que les fiches de salaires pour mai et juin 2023 indiquant un salaire net de respectivement CHF 989.75 et CHF 899.70 ;

- une attestation de l’UIMPV du 16 août 2023 selon laquelle elle était suivie depuis le 9 juillet 2020 de manière régulière, à raison d’une fois toutes les trois à quatre semaines et bénéficiait toujours d’un traitement médicamenteux en lien avec les violences conjugales subies. Les entretiens se faisaient désormais sans interprète, dès lors qu’elle maîtrisait suffisamment la langue française.

b. Le 15 septembre 2023, l’OCPM a conclu au rejet du recours, se référant au jugement entrepris ainsi qu’aux observations produites devant le TAPI.

c. A______ n’ayant pas exercé son droit à la réplique, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2. 2.1 Le litige porte sur le bien-fondé de la décision de l’autorité intimée, confirmée par le TAPI, refusant d’accorder à la recourante une autorisation de séjour.

2.2 Le recours peut être formé pour violation du droit y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (art. 61 al. 1 let. a LPA), ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 let. b LPA). Les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

3. 3.1 La loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et ses ordonnances d’exécution, en particulier l’ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l’entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants de Macédoine du Nord.

3.2 L’art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d’admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d’une extrême gravité ou d’intérêts publics majeurs.

L’art. 31 al. 1 OASA prévoit que pour apprécier l’existence d’un cas individuel d’extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l’intégration du requérant sur la base des critères d’intégration définis à l’art. 58a al. 1 LEI (let. a), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l’État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d’autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (directives LEI, état au 1er septembre 2023, ch. 5.6.10).

Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, et les conditions pour la reconnaissance d’une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4). Elles ne confèrent pas de droit à l’obtention d’une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L’autorité doit néanmoins procéder à l’examen de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce pour déterminer l’existence d’un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/16/2024 du 9 janvier 2024 consid. 3.2 ; directives LEI, op. cit., ch. 5.6).

3.3 L’art. 30 al. 1 let. b LEI n’a pas pour but de soustraire la personne requérante aux conditions de vie de son pays d’origine, mais implique que la personne concernée se trouve personnellement dans une situation si grave qu’on ne peut exiger de sa part qu’elle tente de se réadapter à son existence passée. Des circonstances générales affectant l’ensemble de la population restée sur place, en lien avec la situation économique, sociale, sanitaire ou scolaire du pays en question et auxquelles la personne requérante serait également exposée à son retour, ne sauraient davantage être prises en considération, tout comme des données à caractère structurel et général, telles que les difficultés d’une femme seule dans une société donnée (ATF 123 II 125 consid. 5b/dd). Au contraire, dans la procédure d’exemption des mesures de limitation, seules des raisons exclusivement humanitaires sont déterminantes, ce qui n’exclut toutefois pas de prendre en compte les difficultés rencontrées par la personne requérante à son retour dans son pays d’un point de vue personnel, familial et économique (ATF 123 II 125 consid. 3 ; ATA/16/2024 précité consid. 3.3).

La question n’est donc pas de savoir s’il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d’examiner si, en cas de retour dans le pays d’origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (ATF 139 II 393 consid. 6 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_250/2022 du 11 juillet 2023 consid. 6.2).

3.4 Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d’un cas d’extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu’elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d’origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu’en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d’études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n’arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l’aide sociale ou des liens conservés avec le pays d’origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral ATAF 2020 VII/2 consid. 8.5).

Le fait que la personne étrangère ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu’elle y soit bien intégrée, tant socialement que professionnellement, et que son comportement n’ait pas fait l’objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas d’extrême gravité. Encore faut-il que sa relation avec la Suisse soit si étroite qu’on ne puisse exiger qu’elle vive dans un autre pays, notamment celui dont elle est originaire. À cet égard, les relations de travail, d’amitié ou de voisinage que la personne concernée a pu nouer pendant son séjour ne constituent normalement pas des liens si étroits avec la Suisse qu’ils justifieraient une exception (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_754/2018 du 28 janvier 2019 consid. 7.2 ; ATA/1287/2023 du 29 novembre 2023 consid. 3.5.7).

Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l’examen d’un cas d’extrême gravité, elle doit néanmoins être examinée à la lumière de l’ensemble des circonstances du cas particulier et être relativisée lorsque l’étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l’obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2).

3.5 Selon la jurisprudence, des motifs médicaux peuvent, selon les circonstances, conduire à la reconnaissance d’un cas de rigueur lorsque la personne concernée démontre souffrir d’une sérieuse atteinte à la santé qui nécessite, pendant une longue période, des soins permanents ou des mesures médicales ponctuelles d’urgence, indisponibles dans le pays d’origine, de sorte qu’un départ de Suisse serait susceptible d’entraîner de graves conséquences pour sa santé. En revanche, le seul fait d’obtenir en Suisse des prestations médicales supérieures à celles offertes dans le pays d’origine ne suffit pas à justifier une exception aux mesures de limitation. De même, la personne étrangère qui entre pour la première fois en Suisse en souffrant déjà d’une sérieuse atteinte à la santé ne saurait se fonder uniquement sur ce motif médical pour réclamer une telle exemption (ATF 128 II 200 consid. 5.3 ; ATA/1337/2023 du 12 décembre 2023 consid. 4.7.9).

En l’absence de liens d’une certaine intensité avec la Suisse, l’aspect médical et les éventuelles difficultés de réintégration de la personne concernée dans le pays d’origine ne sauraient justifier, à eux seuls, l’octroi d’un permis humanitaire pour cas de rigueur. Le cas échéant, ces critères ne peuvent en effet être pris en considération que dans le cadre de l’examen de la licéité et de l’exigibilité de l’exécution du renvoi (arrêts du Tribunal administratif fédéral F-4125/2016 du 26 juillet 2017 consid. 5.4.1 ; ATA/1337/2023 précité consid. 4.7.9).

3.6 En l’espèce, la recourante est arrivée à Genève en mai 2019 et y réside ainsi depuis un peu moins de cinq ans, ce qui ne constitue pas une longue présence en Suisse. La durée du séjour en Suisse de la recourant doit en outre de toute manière être fortement relativisée, puisque l’intégralité de celle-ci s’est déroulée dans l’illégalité ou au bénéfice d’une simple tolérance des autorités compétentes.

Sur le plan professionnel et financier, la recourante exerce certes depuis quelques mois une activité à temps partiel dans le domaine du nettoyage, pour laquelle elle perçoit un salaire mensuel d’environ CHF 900.- Il n’en demeure pas moins qu’elle émarge toujours à l’aide sociale, et ce depuis novembre 2020, puisqu’elle bénéficie de l’aide financière de l’hospice depuis lors. Son activité professionnelle actuelle n’est au demeurant pas constitutive d’une ascension professionnelle remarquable et ne l’a pas conduit à acquérir des connaissances professionnelles spécifiques à la Suisse qu’elle ne pourrait pas mettre à profit dans son pays d’origine.

La recourante ne démontre pas s’être intégrée socialement en Suisse et ne fait pas état de liens affectifs ou amicaux particulièrement forts. Elle n’allègue pas que des membres de sa famille se trouveraient en Suisse, étant rappelé qu’elle s’est séparé de son compagnon qu’elle avait rejoint à Genève. Elle n’apparait pas non plus s’investir dans la vie sportive, culturelle ou associative genevoise. Le fait que les consultations à l’UIMPV se déroulent en langue française selon l’attestation produite n’apparaît au demeurant pas exceptionnel si l’on prend en compte sa présence en Suisse depuis plusieurs années.

Âgée de 53 ans et arrivée en Suisse à l’âge de 48 ans, la recourante a passé son enfance, son adolescence et la plus grande partie de sa vie d’adulte en Macédoine du Nord, pays dont elle connaît les us et coutumes et parle la langue. Il n’est ainsi pas concevable que son pays d’origine lui soit devenu à ce point étranger qu’elle ne serait plus en mesure, après une période de réadaptation, d’y retrouver ses repères.

La recourante ne peut pas non plus être suivie lorsqu’elle indique devoir rester en Suisse pour continuer à bénéficier des soins médicaux en lien avec les troubles anxio-dépressifs dont elle souffre et qui ont été causées par les violences subies de la part de son ex-compagnon. Outre le fait que la procédure pénale ouverte à l’encontre de ce dernier est terminée, rien n’indique que le suivi thérapeutique dont elle bénéficie à Genève ne pourrait pas l’être en Macédoine du Nord, comme l’a examiné l’autorité intimée, laquelle a également indiqué que le traitement médicamenteux dont elle bénéficiait était disponible dans son pays d’origine.

C’est par conséquent à juste titre que tant l’autorité intimée, qui a correctement appliqué le droit et n’a pas abusé de son pouvoir d’appréciation, que le TAPI ont retenu que les conditions d’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur n’étaient pas remplies.

4. Il reste à examiner la conformité au droit du renvoi qui a été prononcé, que la recourante conteste.

4.1 Selon l’art. 64 al. 1 let. c LEI, toute personne étrangère dont l’autorisation est refusée, révoquée ou qui n’est pas prolongée après un séjour autorisé est renvoyée. La décision de renvoi est assortie d’un délai de départ raisonnable (art. 64 let. d al. 1 LEI).

Le renvoi d’une personne étrangère ne peut être ordonné que si l’exécution de celui‑ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI). L’exécution n’est pas possible lorsque la personne concernée ne peut quitter la Suisse pour son État d’origine, son État de provenance ou un État tiers ni être renvoyée dans un de ces États (art. 83 al. 2 LEI). Elle n’est pas licite lorsqu’elle serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEI). Elle n’est pas raisonnablement exigible si elle met concrètement en danger la personne étrangère, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEI).

S’agissant plus spécifiquement des personnes en traitement médical en Suisse, l’exécution du renvoi ne devient inexigible, en cas de retour dans leur pays d’origine, que dans la mesure où elles pourraient ne plus recevoir les soins essentiels garantissant des conditions minimales d’existence. Par soins essentiels, il faut entendre les soins de médecine générale et d’urgence absolument nécessaires à la garantie de la dignité humaine (arrêts du Tribunal administratif fédéral E‑3320/2016 du 6 juin 2016 et les références citées ; E 689/2019 du 30 novembre 2020 ; ATA/1365/2023 du 19 décembre 2023 consid. 7.2).

4.2 En l’espèce, dès lors qu’elle a, à juste titre, refusé la demande d’autorisation de séjour de la recourante, l’autorité intimée devait prononcer son renvoi.

La recourante soutient que le suivi thérapeutique et le traitement médicamenteux dont elle bénéficie serait un obstacle à son renvoi en Macédoine du Nord. Rien n’indique toutefois que ce suivi et ce traitement ne seraient pas disponibles dans son pays d’origine. Il ressort en particulier du dossier que les troubles psychiques y sont pris en charge et que les médicaments qu’elle prend y sont disponibles, comme l’a à juste titre relevé le TAPI. Le renvoi de la recourante apparait ainsi possible, licite et raisonnablement exigible, de sorte qu’il appartenait à l’OCPM de le prononcer.

Entièrement mal fondé, le recours sera par conséquent rejeté.

5. Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 16 août 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 13 juin 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge d’A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Aleksandra PETROVSKA, avocate de la recourante, à l’office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu’au secrétariat d’État aux migrations.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Gaëlle VAN HOVE, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

M. MAZZA

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.