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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3083/2021

ATA/285/2023 du 21.03.2023 sur JTAPI/340/2022 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3083/2021-PE ATA/285/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 21 mars 2023

2ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______ recourant

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 5 avril 2022 (JTAPI/340/2022)


EN FAIT

A. a. Monsieur A______, né le ______ 1995, est ressortissant du Kosovo.

b. Selon ses dires initiaux, il aurait commencé à vivre en Suisse en 2008. Il a toutefois admis par la suite être arrivé dans le pays en mars 2018.

Les 17 décembre 2018, 26 juin 2019 et 29 novembre 2019, M. A______ a sollicité la délivrance d’un visa de retour valable un mois en vue de se rendre au Kosovo pour raisons familiales. Le 5 juin 2021, M. A______ a sollicité et obtenu un visa de retour valable deux mois en vue de se rendre au Kosovo pour des raisons familiales.

B. a. Le 4 décembre 2018, M. A______ a déposé une demande d’autorisation de séjour auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) pour cas de rigueur.

Il vivait en Suisse de manière ininterrompue depuis plusieurs années. Depuis son arrivée en Suisse, il avait toujours travaillé. Il exerçait une activité lucrative à Genève dans le domaine du bâtiment, était indépendant financièrement et bien intégré. Il avait construit toute sa vie à Genève où se trouvait désormais le centre de ses intérêts. Il n’avait jamais fait l’objet d’une condamnation pénale, s’exprimait parfaitement en français, n’avait jamais émargé à l’aide sociale et n’avait pas de dettes. Un retour au Kosovo soulèverait pour lui des obstacles insurmontables et l’exposerait à une grande détresse sur les plans personnels et professionnels. Il n’avait conservé aucun lien avec son pays d’origine.

Il a notamment joint à l’appui de sa requête un extrait vierge de son casier judiciaire suisse, des attestations de l’Hospice général et de l’office des poursuites, un formulaire M complété par l’entreprise B______Sàrl accompagné d’un contrat de travail signé le 15 octobre 2018, une attestation de l’école-club Migros datée du 27 octobre 2017 mentionnant un niveau de français A2, des fiches de salaires de l’entreprise C______Sàrl pour certains mois des années 2013 à 2016, ainsi que trois lettres de recommandation.

b. Par courrier du 12 août 2019, l’OCPM a requis de l’intéressé des pièces et information complémentaires, soit notamment un formulaire « Papyrus » rempli et des preuves de sa présence en Suisse pour les années 2009 à 2013.

c. Par courriel du 9 septembre 2019, M. A______ a transmis divers documents à l’OCPM, notamment le formulaire « Papyrus » mentionnant une date d’arrivée à Genève en 2008 et un extrait de compte individuel AVS couvrant la période de septembre à décembre 2018.

d. Par courrier A+ du 17 septembre 2019, l’OCPM a fait part à M. A______ de son intention de refuser sa demande d’autorisation de séjour. Ce dernier n’avait pas répondu à sa demande de renseignements du 12 août 2019, de sorte qu’il n’avait pas été en mesure de valider la durée de son séjour telle que requise par l’« opération Papyrus ».

e. Par courriel à l’OCPM du 19 septembre 2019, M. A______ relevait que son envoi du 9 septembre 2019 ne semblait pas avoir été pris en considération.

f. Le 13 novembre 2019, l’OCPM a dénoncé M. A______ au Ministère public du canton de Genève, car il avait joint à sa demande d’autorisation de séjour des documents dont l’authenticité était douteuse. En particulier, les taux de cotisation AVS indiqués sur les fiches de salaires relatives aux années 2013 à 2015 établies par C______Sàrl étaient erronés, cette société avait été dissoute par suite de faillite en date du 12 mars 2014 et les charges sociales prélevées n’avaient pas été reversées à l’AVS.

g. Le 3 décembre 2020, M. A______ a été interpellé par les services de police genevois et prévenu de séjour illégal, activité lucrative sans autorisation, faux dans les titres et comportement frauduleux à l’égard des autorités.

M. A______, qui était assisté d’une interprète de langue albanaise, a partiellement reconnu les faits qui lui était reprochés. Il a expliqué être né au Kosovo où il avait effectué et terminé l’école obligatoire ainsi que le lycée. Il vivait au domicile familial avec ses parents ainsi que ses deux frères, dont l’un vivait maintenant en Suisse. Après l’école, il avait travaillé dans la société de son père en tant que conducteur. Ce dernier possédait une société de transport de matériel de construction. Il avait travaillé pour lui de manière régulière pendant environ trois ans. Il était arrivé en Suisse, à Genève, le 28 mars 2018, alors qu’il était muni d’un visa. Dès le mois de septembre 2018, il avait travaillé pour B______Sàrl à 100 % jusqu’au mois de mars 2019, puis de manière temporaire jusqu’en février ou mars 2020. Il avait subi un accident qui avait provoqué un arrêt de travail de trois mois. Il avait ensuite été employé par une autre entreprise de chauffage où il travaillait encore.

Il avait déposé sa demande d’autorisation de séjour via une personne qui s’était chargée d’établir un dossier « Papyrus ». Il n’avait pas vu la demande qui avait été déposée auprès de l’OCPM. Il a reconnu que les fiches de salaire établies par C______Sàrl étaient des faux. Elles avaient été produites à son insu. Il a également reconnu que l’attestation de l’école-club Migros présente dans son dossier était un faux. S’agissant des trois lettres de recommandation qu’il avait produites, il en ignorait le contenu.

h. Le 4 mars 2021, par ordonnance pénale du Ministère public du canton de Genève, M. A______ a été reconnu coupable de faux dans les titres et les certificats, infraction et tentative d’infraction à la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20).

i. Par courrier A+ du 11 mai 2021, l'OCPM a informé M. A______ de son intention de refuser de donner une suite favorable à sa demande d’autorisation de séjour, de prononcer son renvoi de Suisse et de transmettre ses actes ultérieurement au SEM afin que cette autorité juge de l’opportunité de prononcer une interdiction d’entrée en Suisse à son encontre. Un délai de trente jours lui était imparti pour faire valoir – par écrit – son droit d’être entendu.

j. Aucune suite n’a été donnée à ce courrier.

k. Par décision du 12 août 2021, l’OCPM a refusé de faire droit à la demande de régularisation des conditions de séjour de M. A______ et, par conséquent, de soumettre son dossier avec un préavis positif auprès du secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM), et prononcé son renvoi de Suisse, lui impartissant un délai au 12 octobre 2021 pour quitter le territoire. Il était également tenu de quitter le territoire des États membres de l'Union européenne et des États associés à Schengen.

M. A______ était arrivé en Suisse le 28 mars 2018, soit tout juste trois ans auparavant. Son séjour en Suisse était donc de courte durée. Selon l’ordonnance pénale du 4 mars 2021, il avait produit des documents falsifiés, à savoir notamment des fiches de salaires pour les années 2013 à 2016 sur lesquelles figuraient de fausses indications ainsi qu’une fausse attestation de connaissances de la langue française de l’école-club Migros datée du 26 octobre 2017, dans le but d’induire en erreur l’OCPM afin d’obtenir frauduleusement une autorisation de séjour. Dans ces circonstances, sa situation ne répondait pas aux critères de l’opération Papyrus, tant au niveau de la durée du séjour que du comportement adopté.

Par ailleurs, il ne remplissait pas les critères relatifs à un cas individuel d’extrême gravité. Enfin, il n’avait ni invoqué, ni démontré l’existence d’obstacles au retour et le dossier ne faisait pas non plus apparaître que l’exécution de son renvoi ne serait pas possible, pas licite ou ne pourrait pas être raisonnablement exigée.

C. a. Par acte posté le 8 septembre 2021, M. A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision, concluant à son annulation et à ce qu’il soit ordonné à l’OCPM de préaviser favorablement sa demande.

Dès 2018, en provenance du Kosovo, il s’était installé dans la région genevoise aux fins d’y travailler. Après plus de trois années passées en Suisse, il ne pouvait imaginer retourner au Kosovo. Il n’avait pas commis d’infractions autres que celles liées à son statut en Suisse, n’avait pas de poursuites et n’avait jamais obtenu l’aide de l’Hospice général. Depuis son arrivée, il avait vécu en Suisse sans quitter le territoire. Il avait tenté de cotiser aux différentes caisses de compensation obligatoires et possédait des revenus corrects lui permettant de vivre en Suisse. Il ne lui était plus possible d’imaginer mener sa vie dans son pays d’origine, dans lequel il n’avait jamais travaillé, et il lui serait impossible de s’y réintégrer, tous ses amis ainsi que des membres de sa famille vivant aujourd’hui en Suisse.

b. Le 16 novembre 2021, l’OCPM a conclu au rejet du recours, aucun élément au dossier ne justifiant de déroger aux conditions d’admission en Suisse.

À teneur du dossier, M. A______ était arrivé sur le territoire suisse en 2018, soit seulement trois ans auparavant. Faute de pièces probantes, la condition du séjour continu d’une durée de dix ans n’était pas réalisée au moment du dépôt de sa demande de régularisation en décembre 2018. Le fait qu’il se soit inséré sur le marché de l’emploi, soit financièrement autonome, n’ait pas de poursuites et exerce une activité auprès de la société B______Sàrl n’étaient pas encore des éléments constitutifs d’une ascension professionnelle remarquable, et il n’avait pas non plus acquis des connaissances métier qu’il ne saurait mettre à profit dans son pays d’origine. En outre, il avait fait l'objet d’une condamnation pénale pour notamment faux dans les titres et les certificats et tentative d’infraction à la LEI. S’agissant de sa réintégration dans son pays d’origine, il avait vécu l’essentiel de sa vie au Kosovo et y conservait de fortes attaches au vu de ses demandes de visas. Pour le surplus, il était jeune et en bonne santé.

c. M. A______ a répliqué le 10 décembre 2021. Il était parfaitement conscient de ne pas avoir agi correctement en déposant sa demande via une personne qui avait adressé de nombreux faux documents à l’OCPM. Il le regrettait sincèrement. Au vu de la vie qui l’attendait au Kosovo, il souhaitait à tout prix continuer à séjourner en Suisse, où il avait tous ses amis et un travail. En cas de retour au Kosovo, il lui serait très difficile de se réinsérer tant socialement que professionnellement. La situation du marché de l’emploi y était catastrophique.

d. Par jugement du 5 avril 2022, le TAPI a rejeté le recours.

L’OCPM avait à juste titre retenu que M. A______ ne remplissait pas les critères de l’« opération Papyrus » quant à la durée de séjour continu de dix ans minimum à Genève pour une personne célibataire et sans enfant.

S'agissant des conditions pour obtenir une autorisation de séjour pour cas de rigueur, sa durée de séjour en Suisse, de quatre ans, n’était pas particulièrement longue. Son intégration socioprofessionnelle ne pouvait être considérée comme exceptionnelle au sens de la jurisprudence. Il ne démontrait ni même n’alléguait parler français, étant relevé que lors de son audition à la police, il était assisté d’une interprète de langue albanaise et que l'attestation produite dans sa demande était un faux. Il ne pouvait pas non plus se prévaloir d’un comportement irréprochable, ayant produit des faux documents dans le cadre de sa demande d’autorisation de séjour et été condamné pénalement en raison de ces faits. Âgé de 26 ans, il avait vécu toute son enfance et son adolescence ainsi que le début de sa vie d’adulte dans son pays d’origine. Il avait conservé des attaches familiales avec son pays d’origine, dès lors que ses parents et l’un de ses frères y résidaient, et qu'il avait demandé à plusieurs reprises un visa de retour pour raisons familiales.

Rien ne permettait enfin de retenir que l'exécution du renvoi de M. A______ ne serait pas possible, licite ou raisonnement exigible.

D. a. Par acte posté le 21 mai 2022, M. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité, concluant à son annulation et à l'octroi d'une autorisation de séjour, en reprenant l'argumentation de son recours au TAPI.

b. Le 29 juin 2022, l'OCPM a conclu au rejet du recours. En l'absence d'éléments nouveaux et probants, les arguments soulevés dans le recours n'étaient pas de nature à modifier sa position.

c. Le 7 juillet 2022, le juge délégué a fixé aux parties un délai au 5 août 2022 pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, après quoi la cause serait gardée à juger.

d. Le 3 août 2022, l'OCPM a indiqué ne pas avoir de requêtes ni d'observations complémentaires, tandis que M. A______ ne s'est pas manifesté.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Est litigieux le refus de l’OCPM de préaviser favorablement auprès du SEM l’autorisation de séjour du recourant et son renvoi.

2.1 Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201).

2.2 Conformément à l'art. 126 al. 1 LEI, les demandes déposées, comme en l'espèce, avant le 1er janvier 2019 sont régies par l’ancien droit.

3.             L'art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d'admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

3.1 L'art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur au moment des faits, prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant (let. a), du respect de l'ordre juridique suisse (let. b), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière ainsi que de sa volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (secrétariat d'État aux migrations, Domaine des étrangers [ci-après : directives LEI], état au 1er janvier 2021, ch. 5.6.12).

3.2 Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c).

La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine ou une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2).

La question est ainsi de savoir si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l'intéressé, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

3.3 L'« opération Papyrus » développée par le canton de Genève a visé à régulariser la situation des personnes non ressortissantes UE/AELE bien intégrées et répondant à différents critères, à savoir, selon le livret intitulé « Régulariser mon statut de séjour dans le cadre de Papyrus » disponible sous https://www.ge.ch/regulariser-mon-statut-sejour-cadre-papyrus/criteres-respecter), avoir un emploi ; être indépendant financièrement ; ne pas avoir de dettes ; avoir séjourné à Genève de manière continue sans papiers pendant cinq ans minimum (pour les familles avec enfants scolarisés) ou dix ans minimum pour les autres catégories, à savoir les couples sans enfants et les célibataires ; faire preuve d'une intégration réussie ; absence de condamnation pénale (autre que séjour illégal).

L'« opération Papyrus » n'emporte aucune dérogation aux dispositions légales applicables à la reconnaissance de raisons personnelles majeures justifiant la poursuite du séjour en Suisse (art. 30 al. 1 let. b LEI), pas plus qu'à celles relatives à la reconnaissance d'un cas individuel d'extrême gravité (art. 31 al. 1 OASA), dont les critères peuvent entrer en ligne de compte pour l'examen desdites raisons personnelles majeures (ATA/254/2023 du 14 mars 2023 consid. 2.1.4).

3.4 Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit néanmoins être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances du cas particulier et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2).

3.5 Aux termes de l'art. 96 al. 1 LEI, les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d'appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger ainsi que de son intégration.

3.6 Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel l'autorisation de séjour est refusée ou dont l'autorisation n'est pas prolongée. Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence du rejet d'une demande d'autorisation. Le renvoi d'une personne étrangère ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI).

4.             En l’espèce, le recourant a rectifié en cours de procédure la date de son arrivée en Suisse, et il est désormais constant qu'il s'est installé dans le pays en mars 2018, soit quelques mois seulement avant de déposer une demande de régularisation de ses conditions de séjour. Au moment du dépôt de celle-ci, le 4 décembre 2018, il ne séjournait donc pas depuis dix ans en Suisse, tant s'en faut. Par ailleurs, sa condamnation pour faux dans les titres ne relève pas d’une infraction à la LEI. Le recourant ne peut ainsi se prévaloir de l’application de l’« opération Papyrus ».

Le recourant ne remplit pas non plus les critères d’un cas d’extrême gravité, dont d’ailleurs l’« opération Papyrus » n’était qu’une illustration. En effet, la durée de son séjour en Suisse, de cinq ans aujourd’hui, doit être fortement relativisée du fait qu’elle s’est intégralement déroulée dans l’illégalité, ou au bénéfice d'une tolérance des autorités depuis le dépôt de la demande.

Par ailleurs, la condamnation du recourant du 4 mars 2021 n’est pas anodine, puisqu’elle a directement trait à l’un des critères permettant de retenir une intégration sociale réussie, à savoir le respect de l’ordre public. Or, le recourant, en produisant plusieurs faux relevés de salaire et une fausse attestation de niveau de langue, a cherché à induire en erreur les autorités en vue d’obtenir un titre de séjour. Ce comportement dénote un mépris certain pour les institutions du pays.

Si le recourant est, certes, indépendant financièrement, n’a pas recouru à l’aide sociale et n’a pas de dettes, de tels éléments ne suffisent pas pour retenir l’existence d’une intégration socio-professionnelle particulièrement réussie. Le recourant n’établit pas ses compétences linguistiques, la seule attestation produite étant un faux. Il ne prouve ni ne soutient qu’il aurait tissé des liens amicaux ou affectifs particulièrement forts à Genève, qu’il ne pourrait continuer à poursuivre depuis le Kosovo par le biais de moyens de télécommunication moderne. De même, il ne rend pas vraisemblable qu’il se serait investi dans la vie associative, culturelle ou sportive à Genève. Enfin, bien qu’indépendant économiquement, il travaille dans le secteur de la construction et ne peut se prévaloir d’une ascension professionnelle remarquable au sens de la jurisprudence, ce qu’il ne conteste d’ailleurs pas. En outre, les connaissances professionnelles acquises en Suisse ne sont pas spécifiques au pays, au point qu’il ne pourrait les utiliser au Kosovo.

Le recourant est né au Kosovo et y a passé toute son enfance, son adolescence et le début de sa vie d’adulte jusqu’à l’âge de 23 ans. Il connaît les us et coutumes de son pays, la mentalité et en parle la langue. Il ne soutient pas ne plus y avoir de famille. Ainsi, malgré la durée de son séjour en Suisse, son pays ne peut lui être devenu étranger. Âgé de 28 ans et en bonne santé, il pourra faire valoir en cas de retour l’expérience et les compétences acquises en Suisse pour sa réintégration, notamment professionnelle et sociale, et ne devrait ainsi pas rencontrer d’importants problèmes de réintégration professionnelle, du moins qui soient indépendants des difficultés connues par l'ensemble de la population au Kosovo. Sa situation ne permet en tout cas pas de retenir que sa réintégration serait gravement compromise au sens de la jurisprudence.

Au vu de ce qui précède, l’OCPM n’a pas violé la loi ni commis un abus de son pouvoir d’appréciation en refusant de préaviser favorablement auprès du SEM la demande d’autorisation de séjour présentée par le recourant.

Dès lors que l’OCPM a, à juste titre, refusé l’octroi d’une autorisation de séjour au recourant, il devait prononcer son renvoi. En l’espèce, aucun motif ne permet de retenir que l’exécution du renvoi ne serait pas possible, licite ou ne pourrait raisonnablement être exigée. Le recourant ne le soutient pas.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

5.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 21 mai 2022 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 5 avril 2022 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 400.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mme Krauskopf, M. Verniory, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.