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Décisions | Chambre civile

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C/15977/2022

ACJC/1592/2024 du 10.12.2024 sur JTPI/15052/2023 ( OO ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/15977/2022 ACJC/1592/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 10 DECEMBRE 2024

Entre

A______ SA, sise ______ [GE], appelante d'un jugement rendu par la 18ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 19 décembre 2023, représentée par
Me Marc JOORY, avocat, Valfor Avocats Sàrl, rue Jacques-Balmat 5, case
postale 1203, 1211 Genève 1,

et

Monsieur B______, domicilié ______, France, intimé, représenté par
Me Christian GIROD, avocat, Schellenberg Wittmer SA, rue des Alpes 15bis, case postale 2088, 1211 Genève 1.

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/15052/2023 du 19 décembre 2023, reçu par A______ SA le 21 décembre 2023, le Tribunal de première instance a débouté celle-ci de toutes ses conclusions (ch. 1 du dispositif), mis les frais judiciaires, arrêtés à 15'000 fr. et compensés à due concurrence avec l'avance fournie, à la charge de la précitée et ordonné aux Services financiers du Pouvoir judiciaire de lui restituer le solde de son avance de frais (ch. 2), condamné A______ SA à payer à B______ la somme de 15'000 fr. à titre de dépens (ch. 3) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4).

B. a. Par acte expédié le 1er février 2024 au greffe de la Cour de justice, A______ SA interjette appel contre ce jugement, dont elle sollicite l'annulation. Sous suite de frais, elle conclut à ce que la Cour condamne B______ à lui payer 413'127 euros avec intérêt à 5% l'an dès le 26 avril 2022.

b. B______ conclut à ce que la Cour confirme le jugement querellé, sous suite de frais.

c. Les parties ont répliqué, respectivement dupliqué, et persisté dans leurs conclusions respectives.

B______ a allégué des faits nouveaux et produit un extrait du Code civil luxembourgeois.

d. Dans ses déterminations, A______ SA a conclu à ce que les faits nouveaux précités soient déclarés irrecevables et persisté dans ses conclusions pour le surplus.

e. Dans ses déterminations, B______ a persisté dans ses conclusions.

f. Les parties ont été informées par plis du greffe de la Cour du 10 octobre 2024 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier :

Protagonistes

a. C______ SAS, dont le siège se situe à D______ (France), a été créée en 2013 par B______, lequel en est devenu président. L'activité principale de la société consistait à concevoir et gérer une plateforme de pilotage des achats de prestations de services.

Initialement, B______ détenait 60% de la société et son associé 40%.

Au stade des écritures des parties de première instance, B______ et E______ SA (cf. infra, let. d) étaient associés de C______ SAS.

b. Avant septembre 2015, B______ était actionnaire unique de la société F______ CONSULTING, dont le siège se situait à cette date à D______.

c. A______ SA, anciennement G______/H______ SA (jusqu'à ______ 2019), est une société inscrite au Registre du commerce de Genève en 2015. Elle a pour but notamment la prise de participations dans des sociétés suisses ou étrangères.

Les administrateurs en sont J______, président, K______ et L______, tous trois avec signature individuelle.

d. E______ SA, devenue C______ SA en ______ 2023, est une société sise à M______ [GE], inscrite au Registre du commerce de Genève en 2017.

Au stade des écritures des parties de première instance, A______ SA et B______ en étaient coactionnaires.

Cessions d'actions, pacte d'actionnaires et contrats de prêt allégués

e. Par contrat du 22 septembre 2015 et avenant à celui-ci du 30 novembre 2016, G______/H______ SA (A______ SA) a acquis de façon échelonnée des actions de F______ CONSULTING et de C______ SAS auprès de B______ et a ensuite cédé ces dernières à sa filiale E______ SA.

Aux termes de l'avenant précité, il était stipulé notamment que le prix de 504'000 euros pour l'acquisition des actions de F______ CONSULTING était payable par G______/H______ SA (A______ SA) à B______ en mensualités de 6'000 euros.

f. Il est admis qu'en février 2018, aux termes d'un échange de courriels entre J______, représentant G______/H______ SA (A______ SA), et B______, un contrat portant sur le versement de 500'000 euros par celle-ci à ce dernier a été conclu entre ces deux parties.

Selon les allégations contestées de B______, ce contrat aurait été conclu au moment où il aurait été décidé de transférer l'activité internationale de C______ SAS à E______ SA. En conséquence de ce transfert, la participation de B______ dans la société opérant à l'international serait passée de 49% (C______ SAS) à 7% (E______ SA). Conformément à ce contrat, G______/H______ SA (A______ SA) aurait accepté de prêter à B______ 500'000 euros que ce dernier se serait engagé à rembourser, sans intérêts, au moment de la cession de ses titres C______ SAS, conformément aux termes du pacte d'actionnaires de C______ SAS de novembre 2018, soit dès le 19 mars 2023 au plus tôt, selon la clause 3.4 de celui-ci (cf. infra, let. g).

Il ressort des échanges de courriels de février 2018 susmentionnés ce qui suit :

J______ : "passer à 7% sur l'international en contrepartie de cash out de 500'000 euros pour toi : il vient en déduction du prix final payé avec actualisation* taux prêt standard (2,5%, 2% ?? je ne me souviens plus de ce qu'on a dit sorry)."

B______ : "on avait dit sans actualisation* ou 300'000 euros de cash out pur sans déduction. Partons sur les 500'000 euros. "

J______ : "exact. OK."

* Le taux d'actualisation se définit comme le chiffrage de la valeur sociale du temps (pour la société); il s'agit d'un concept financier qui permet d'évaluer la valeur actuelle d'un flux de trésorerie futur. Il reflète l'idée selon laquelle une somme d'argent aujourd'hui vaut plus que la même somme reçue à un moment futur, du fait de son potentiel de rendement à travers le temps; en revanche, un taux d'intérêt chiffre la valeur privée du temps (ce que le prêteur exige pour se séparer de la somme prêtée et assumer le risque).

g. Le 22 novembre 2018, B______ et E______ SA, à ce stade détenue intégralement par G______/H______ SA (devenue A______ SA), ont conclu un pacte d'actionnaires de C______ SAS, dont les termes étaient notamment et en substance les suivants :

"Le capital de C______ SAS et les droits de vote y relatifs sont répartis à hauteur de 45.16% en faveur de B______ et de 54.84% en faveur de E______ SA (clause 1).

B______ est président de C______ SAS (clause 2.5.1.).

Les statuts de C______ SAS sont modifiés afin que le président puisse être désigné ou révoqué par décision collective des actionnaires prise à la majorité ordinaire des voix des actionnaires composant le capital social (clause 2.1).

Une avance de 500'000 euros sur le futur prix de cession sera consentie en faveur de B______ et payée au jour de signature du pacte soit par E______ SA, soit par G______/H______ SA dans le cadre du rachat des actions détenues par B______; cette avance sera déduite du prix de cession des actions détenues par B______ dans les sociétés C______ SAS / E______ SA; si le prix de cession est inférieur à la somme de 500'000 euros, B______ sera tenu de rembourser la différence entre l'avance consentie et le prix de cession (clause 3.1.2 in fine).

Les actions détenues par B______ au capital de la société [C______ SAS] seront toutefois incessibles pendant une durée de 5 ans à compter du 19 mars 2018, sauf pour les cas de cession à E______ SA; B______ dispose ainsi d'une option de vente de ses titres dans C______ SAS, exerçable à compter de mars 2023 (clauses 3.1.3 et 3.4).

Toute somme due par B______ en faveur de E______ SA ou G______ SA sera porteuse d'intérêts à 0.5% par mois dès réception du courrier recommandé faisant mention des sommes dues et de la volonté de recouvrer lesdites sommes par B______ (clause 3.2 8).

Tout différend entre les parties relatif au pacte sera réglé par le Tribunal de Commerce du siège de C______ SAS et soumis au droit français (clause 5.9)."

Le Tribunal a constaté que ce pacte d'actionnaires prévoyait également une clause de durée de dix ans renouvelable et de dénonciation de six mois avant son terme (clause 5.2).

h. Le 14 janvier 2019, la somme de 500'000 euros a été créditée par G______/H______ SA (A______ SA) sur le compte de B______.

i. Par courriel du 21 avril 2020 ayant pour objet "avance sur prix de cession", N______, "senior corporate legal officer" auprès de A______ SA, se référant à "l'avance de 500'000 euros faite sur le prix de cession future à la signature des nouveaux protocoles", a informé B______ du fait que les auditeurs de la société souhaitaient "une documentation tangible pour justifier le cash-flow" et qu'il y avait dès lors lieu "de leur fournir un contrat de prêt pour que ça tienne la route". Le projet du contrat en question était annexé au courriel.

Par réponse du jour même, B______ s'est dit "très surpris" du projet de contrat proposé, rappelant qu'il avait été convenu "une avance qui serait remboursée sur la cession, et non pas sous 2 ans, et qui ne donne[rait] pas lieu à intérêt".

N______ a répondu le 22 avril 2020 que "(…) c'est juste vraiment pour justifier auprès des auditeurs pour qui une avance de prix de cession en [sic] suffira pas. De plus, le risque est que ça soit requalifié en donation avec les conséquences fiscales qui s'en suivent. Du coup, le contrat c'est juste pour la documentation, tu n'auras pas à rembourser sous deux ans (on refera un avenant dans les semaines à venir pour reprolonger de la même durée) et tu n'auras pas payer [sic] les intérêts, on les neutralisera au moment venu). (…)".

j. Dans sa réponse à la demande et lors de sa comparution devant le Tribunal, B______ a allégué qu'à la suite des échanges de courriels précités, soit en 2020, il avait signé ce contrat qui avait été antidaté au 4 janvier 2019.

k. La teneur de ce contrat, intitulé "contrat de prêt numéraire", daté du 4 janvier 2019 et signé par B______ ainsi que G______/H______ SA (A______ SA), est en substance la suivante :

"L'emprunteur, soit B______, et le prêteur, soit G______/H______ SA, sont les actionnaires principaux de E______ SA, B______ en étant également l'administrateur en raison de son savoir-faire et son expérience; il a pour rôle de développer l'activité [de] C______ SA en Suisse et à l'international.

B______ a sollicité un emprunt en vue de couvrir un besoin financier personnel ponctuel; en raison des liens particuliers entre l'emprunteur et le prêteur, ce dernier a accepté.

Le prêt pourra être considéré comme une avance sur le prix de cession futur de la vente des actions détenues par l'emprunteur dans le capital de la société [E______ SA], en cas de réalisation des promesses de vente ou d'achat prévues dans le pacte d'actionnaires conclu par acte sous seing privé par les parties en date du 23 [sic] novembre 2018.

Le prêt porte sur un montant de 500'000 euros, avec un intérêt de 0,5 % par an (clause 2).

Le prêt est consenti moyennant son remboursement intégral dans un délai de deux ans calendaires suivant la date de réception des fonds (clauses 3.2 et 4.1); tout montant non réglé dans ce délai, sera lui-même porteur d'intérêts, de plein droit, à un taux de 5% par année (clause 4.2); le montant du prêt pourra également être remboursé par compensation sur le prix de cession dû par le prêteur à l'emprunteur en cas de transfert de propriété des actions détenues par le prêteur à l'emprunteur [sic] en cas d'activation des promesses de vente ou d'achat prévues par le pacte [d'actionnaires du 22 novembre 2018] (clause 4.3).

Il est rappelé que le prêt a été consenti à l'emprunteur en raison de sa qualité d'actionnaire et d'administrateur de la société [E______ SA]. Le prêteur pourra ainsi exiger le remboursement intégral et immédiat du prêt en cas de rupture des relations contractuelles entre l'emprunteur et la société, à savoir dans la situation où aucun contrat en vigueur n'existerait plus entre B______ et la société, soit lorsque l'emprunteur n'assumerait plus aucune fonction opérationnelle au profit de la société directement ou indirectement. Si cette hypothèse venait à se réaliser, les montants dus deviendront immédiatement exigibles, sans qu'aucune notification ou formalité ne soit nécessaire de la part du prêteur (clause 5).

La signature du contrat de prêt vaut reconnaissance de dette.

Tout litige relatif au présent contrat de prêt numéraire sera soumis à la compétence exclusive des Tribunaux genevois, le droit suisse étant applicable (clause 10)."

l. Le 20 décembre 2021, le mandat d'administrateur de B______ dans la société E______ SA a été révoqué et il en a été de même le 8 mars 2022 de son mandat de président dans la société C______ SAS.

Mises en demeure

m. Par courrier du 31 mars 2022, A______ SA a rappelé à B______ que les conditions de remboursement du prêt octroyé le 4 janvier 2019 étaient "soit la déduction de son montant du prix de cession en cas de réalisation des promesses de vente ou d'achat prévues dans le pacte d'actionnaires, soit sa restitution en numéraire au plus tard deux ans après réception des fonds." Elle l'a mis en demeure de rembourser sous sept jours le montant de 534'726 euros (capital et intérêts), au motif que la première hypothèse n'était "pas avérée" et que le délai de deux ans après réception des fonds était arrivé à terme. Il n'a pas été question d'un remboursement exigible du fait d'une rupture des relations contractuelles entre B______ et E______ SA.

Par courrier du 5 avril 2022, B______ a contesté devoir rembourser la somme. Il a fait valoir que le prêt avait été convenu lors du "passage de 49% à 7% à l'international" et sans intérêt comme stipulé dans le courriel de février 2018 - qu'il a cité - relatif au "détail du deal" et inscrit au pacte d'actionnaires de novembre 2018. Il a soutenu que le contrat de prêt numéraire du 4 janvier 2019 n'avait été signé que pour les besoins et à la demande de A______ SA, joignant en annexe les échanges de courriels d'avril 2020. Il a exposé qu'il n'avait jamais été question qu'il rembourse la somme tant qu'il n'aurait pas cédé ses actions de C______ SAS, soulignant que les seuls accords en vigueur étaient ceux stipulés dans le pacte d'actionnaires de novembre 2018.

Par courrier du 12 avril 2022, A______ SA a réservé son droit de compenser le montant de 534'726 euros réclamé avec les sommes dues à B______ de 152'124 euros au titre du rachat des actions qu'il détenait dans la société G______/I______ SAS "à la suite de la levée de l'option d'achat prévue par le pacte correspondant" et 126'000 euros correspondant au total des virements mensuels de 6'000 euros restants encore à effectuer conformément à l'avenant au contrat de cession des actions de F______ CONSULTING du 22 septembre 2015.

Aucun paiement n'étant intervenu, A______ SA a informé B______ le 20 avril 2022 que la compensation précitée en lien avec le rachat des actions détenues par celui-ci dans G______/I______ SAS avait été exécutée à hauteur de 121'599 euros, réduisant la mise en demeure à 413'127 euros.

"Convention extrastatutaire"

n. A______ SA expose tirer son droit à la compensation de la clause 2.7 vii. d'une convention non datée, intitulée "convention extrastatutaire", et conclue entre, d'une part, les associés O______ Sàrl (représentée par J______), P______ Sàrl (représentée par Q______) et R______ Sàrl (représentée par K______) et, d'autre part, B______.

La teneur de cette clause est la suivante :

"L'Associé A [les associés] aura la libre faculté de compenser en numéraire de manière conventionnelle, totalement ou partiellement, les montants dus à l'Associé B [B______], ou à ses héritiers, de toutes les sommes que ceux-ci ou l'Associé B pourrai(en)t lui devoir à quelque titre que ce soit y compris en vertu de toutes les relations contractuelles ou autres, directement ou indirectement, liant l'Associé B ou sa société et l'Associé A et/ou le G______/H______ SA, ce que l'associé B déclare expressément accepter. "

Cette convention prévoit également, pour tout litige la concernant, la compétence exclusive des tribunaux du Grand-Duché de Luxembourg et l'application du droit luxembourgeois (clause 6.7).

Présente procédure

o.a. Par demande expédiée le 16 août 2022 au Tribunal, A______ SA a agi en paiement à l'encontre de B______, lequel ne s'était pas acquitté du montant réclamé. Elle a conclu à ce que le Tribunal condamne celui-ci à lui payer 413'127 euros avec intérêt à 5% l'an dès le 26 avril 2022.

Elle s'est fondée sur le contrat de prêt du 4 janvier 2019.

Elle s'est référée à la clause 4.3 prévoyant un remboursement par compensation avec le prix de cession dû par ses soins à B______ en cas de transfert de propriété en sa faveur des actions de celui-ci à la suite de l'activation des promesses de vente ou d'achat prévues par le pacte de novembre 2018. Selon elle, la condition prévue par cette clause n'était pas "avérée", de sorte que le prêt devait être remboursé.

Elle a fait valoir les clauses du contrat du 4 janvier 2019 stipulant le délai de remboursement de deux ans, le taux d'intérêts de 0,5% l'an et les intérêts de retard de 5% l'an. Elle a invoqué également la clause prévoyant le remboursement immédiat en cas de rupture des relations contractuelles entre B______ et E______ SA. Elle a exposé que le délai précité était échu le 14 janvier 2021 et qu'en outre une rupture des relations contractuelles était intervenue, le précité n'ayant plus de rôle opérationnel au sein de E______ SA dès la révocation de son pouvoir d'administrateur dans celle-ci le 20 décembre 2021 et de président dans C______ SAS le 8 mars 2022.

A cet égard, A______ SA a allégué qu'à teneur de l'art. 5 du contrat du 4 janvier 2019, il avait "été rappelé entre les parties que le prêt litigieux a[vait] été consenti au Défendeur en raison de sa qualité d'actionnaire et d'administrateur de la société E______ SA" (allégué 16 de la demande) et "A______ SA pouvait exiger du Défendeur le remboursement intégral et immédiat du prêt (…) à tout moment en cas, notamment de rupture des relations contractuelles entre Monsieur B______ et E______ SA" (allégué 17 de la demande).

o.b Dans sa réponse du 30 janvier 2023, B______ a conclu au déboutement de A______ SA.

Il a contesté l'allégué général de A______ SA selon lequel les parties avaient conclu le 4 janvier 2019 un contrat de prêt numéraire portant sur la somme de 500'000 euros (allégué 6), en exposant que le contrat avait été "simulé sur demande et pour les besoins" de A______ SA. Il en a fait de même en lien avec quatre autres allégués de A______ SA portant sur le détail des obligations réciproques dont auraient convenu les parties le 4 janvier 2019, à savoir sur le taux d'intérêt (allégué 9), le calcul des intérêts (allégué 10), l'obligation de restituer sous deux ans (allégué 11) et les intérêts de retard (allégué 14).

En lien avec ces quatre derniers allégués, il a en outre exposé que "la volonté réelle des parties était de lier le remboursement du prêt à la cession par ses soins de ses actions C______ SAS" ou que "la volonté réelle des parties était de ne pas soumettre ce remboursement à de quelconques intérêts".

Il a par ailleurs utilisé les termes "rapport soit à la pièce, contesté pour le surplus" dans ses déterminations sur les sept allégués de la demande de A______ SA relatifs à la teneur des clauses du contrat du 4 janvier 2019, à savoir les allégués 7 (obligation de A______ SA de transférer 500'000 euros), 8 (son obligation de restituer ce montant avec intérêts à l'"issue du prêt"), 12 (son obligation de restituer ledit montant au plus tard après deux ans), 16, 17, 18 (ces trois allégués : son obligation de restituer le montant de façon anticipée en cas de rupture des relations contractuelles) et 19 (for à Genève et application du droit suisse).

S'agissant des allégués 7, 8 et 12, il a ajouté que ce contrat avait été "simulé sur demande et pour les besoins" de A______ SA. En lien avec l'allégué 12, il a également exposé que "la volonté réelle des parties était de lier le remboursement du prêt à la cession par ses soins de ses actions C______ SAS".

Dans ses allégués propres, il a fait valoir que le 22 novembre 2018 un pacte d'actionnaires - qu'il a produit dans son intégralité - avait été signé, prévoyant en sa faveur une option de vente de ses titres de C______ SAS, exerçable à compter du 19 mars 2023. Il a exposé par ailleurs qu'aux termes du contrat de prêt découlant de l'échange de courriels intervenu en février 2018 - qu'il a produit également – G______/H______ SA (A______ SA) aurait accepté de lui prêter 500'000 euros qu'il se serait engagé à rembourser, sans intérêts, au moment de la cession de ses titres de C______ SAS, conformément aux termes du pacte d'actionnaires de novembre 2018, soit dès le 19 mars 2023 au plus tôt, faisant référence sur ce point à la clause 3.4 du pacte d'actionnaires. Il a allégué et produit les échanges intervenus en avril 2020 avec N______. A cet égard, il a exposé ce qui suit : "C'est donc dans ce contexte, et après avoir obtenu la confirmation que les termes du contrat de 2018 étaient maintenus, que B______ a signé, en 2020, le contrat de prêt numéraire, antidaté au 4 janvier 2019".

o.c Le Tribunal a tenu une audience de débats d'instruction, de débats principaux et de premières plaidoiries le 25 avril 2023 et une audience de débats principaux et de comparution personnelle des parties le 6 juin 2023.

Lors de la première, A______ SA s'est déterminée sur les allégués de la réponse. Les parties ont sollicité leur comparution personnelle et déclaré ne pas solliciter l'audition de témoins.

Lors de la seconde, le représentant de A______ SA, S______, directeur des acquisitions, a exposé que B______ avait sollicité une avance remboursable, ayant besoin d'argent pour des raisons personnelles. L'avance avait été accordée, sans être formalisée. Ensuite, à la demande des réviseurs aux comptes, lors de la révision des comptes 2019 effectuée en 2020, le prêt avait été formalisé, avec la précision qu'il s'agissait d'une avance remboursable. La durée initiale était de deux ans, courant du 14 janvier 2019 au 14 janvier 2021. Compte tenu de la crise sanitaire du COVID-19, N______ avait proposé la prolongation de la durée de deux ans. Il avait été stipulé également une clause de remboursement anticipé du prêt en cas de rupture des relations contractuelles entre les parties. Le pouvoir de B______ avait été révoqué lors de l'assemblée générale du 8 mars 2022. Le but de A______ SA était de "ne pas faire perdurer des relations alors que les relations contractuelles [étaient] rompues". Cela n'avait aucun sens pour A______ SA d'octroyer un prêt qui par hypothèse ne serait jamais remboursé.

B______ a déclaré qu'en 2015, il avait été approché par J______, le "chief executive officer" de G______/H______ SA (A______ SA), qui s'intéressait à C______ SAS. G______/H______ SA avait acquis les parts de son associé (40%). Il avait vendu à celle-ci une partie de ses parts, perdant sa majorité dans la société, et perçu "une somme en euros ainsi que le prêt de 500'000 euros en 2019". Le pacte d'actionnaires de C______ SAS du 22 novembre 2018 avait été signé. Il comportait la valorisation de la société et la possibilité de rachat par G______/H______ SA du restant de ses parts, s'il le souhaitait. Ce pacte évoquait également l'existence du contrat de prêt et prévoyait une option de vente de ses parts à son initiative à compter de mars 2023. En 2018, la question du prêt faisait déjà partie des échanges, car il s'agissait de l'une des conditions "du deal", ce qui ressortait de ses échanges de courriels avec J______ en février 2018, tout comme le fait que ce prêt était convenu sans intérêts et remboursable au moment de la cession de ses actions. Au jour de l'audience précitée, il n'avait pas exercé l'option dont il disposait de vendre ses titres, option possible à compter de mars 2023. Il avait signé le contrat daté du 4 janvier 2019, car il lui avait été indiqué qu'il s'agissait d'une demande des auditeurs et confirmé que les termes - différents - du contrat de 2018 restaient toutefois d'actualité. Il avait accepté de le faire et ceci rapidement comme il lui avait été demandé, dans l'espoir que les relations tendues entre les parties s'améliorent. Selon lui, A______ SA l'avait assigné en justice dans le but qu'il vende ses parts.

o.d Les plaidoiries finales orales des parties ont eu lieu lors de l'audience du 3 octobre 2023.

Aux termes du jugement entrepris, A______ SA a plaidé que la volonté des parties était d'effectuer une avance qui serait remboursée par compensation en cas de vente des actions. Le contrat de prêt n'était pas un acte simulé et le fait qu'il soit antidaté ne remettait pas en cause sa validité. La date d'échéance du remboursement prévue dans le pacte d'actionnaires de novembre 2018 (clause 3.1.2) ne reposait que sur la volonté de B______, lequel pouvait décider du moment où il était disposé à céder ses actions à partir de mars 2023 et de ne pas le faire. Une telle clause de remboursement, qui consistait dans un prêt éternel, était interdite au sens de l'art. 27 CC et donc nulle en droit suisse.

Toujours selon le Tribunal, B______ a fait valoir que les parties s'étaient accordées pour une avance remboursable sans intérêts et que le contrat daté du 4 janvier 2019 était un contrat simulé pour répondre à la demande des auditeurs. Le seul contrat qui devait être pris en compte était celui du 22 novembre 2018. Dans la mesure où l'option de vente n'avait pas été exercée, la créance n'était pas exigible.

Le Tribunal a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience.

D. Dans le jugement attaqué, le Tribunal a retenu que selon le texte clair du pacte d'actionnaires de C______ SAS de novembre 2018 liant B______ à E______ SA (détenue intégralement par G______/H______ SA devenue A______ SA), l'avance octroyée au premier ne générait pas d'intérêts et devait être déduite du prix de cession des actions. Selon les échanges de courriels intervenus entre N______ et B______, les parties n'entendaient pas appliquer le contrat daté 4 janvier 2019, lequel liait B______ à G______/H______ SA (A______ SA). Ce contrat était simulé et donc nul, de sorte que A______ SA ne pouvait se fonder sur sa clause 5 pour soutenir que la créance était exigible en raison de la rupture des relations contractuelles entre les parties.

Le droit français stipulait, à l'instar de la législation suisse, que tout contrat devait être "borné" dans le temps et que les engagements perpétuels étaient prohibés. S'il était exact que A______ SA, aux termes du pacte d'actionnaires de novembre 2018, n'avait pas la capacité de demander le remboursement immédiat du montant versé, lequel avait été versé à titre d'avance à déduire du montant de la vente des actions de B______ (clause 3.1.2), ce contrat contenait toutefois une clause de durée de dix ans renouvelable et de dénonciation de six mois avant son terme (clause 5.2). Il ne s'agissait dès lors pas d'un engagement perpétuel prohibé, lequel aboutirait à une nullité partielle du contrat, comme le soutenait A______ SA.

Le contrat de prêt numéraire étant un acte simulé, la créance n'était pas exigible, de sorte que la question d'une éventuelle compensation ne se posait pas. En tout état, A______ SA se prévalait de la compensation sur la base de la convention conclue entre les associés O______ Sàrl, P______ Sàrl, R______ et B______, alors que le prêt de 500'000 euros accordé à ce dernier était fondé sur un pacte d'actionnaires conclu entre celui-ci et E______ SA. Il ne s'agissait dès lors pas des mêmes parties qui étaient débitrices l'une envers l'autre, ce qui excluait toute compensation au sens de l'art. 120 al. 1 CO.

EN DROIT

1. 1.1 Interjeté dans le délai utile et suivant la forme prescrite par la loi (art. 130, 131, 142, 143, 145 al. 1 let. c et 311 al. 1 CPC) à l'encontre d'une décision finale de première instance, rendue dans un litige dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est supérieure à 10'000 fr. (art. 91 ss et 308 al. 2 CPC), l'appel est recevable.

1.2 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC). Elle applique la maxime des débats et le principe de disposition (art. 55 al. 1 et 58 al. 1 CPC).

1.3.1 Selon l'art. 23 al. 1 de la Convention de Lugano du 30 octobre 2007 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (CL; RS 0.275.12), si les parties, dont l'une au moins a son domicile sur le territoire d'un Etat lié par la présente Convention, sont convenues d'un tribunal ou de tribunaux d'un Etat lié par la présente Convention pour connaître des différends nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou les tribunaux de cet Etat sont compétents. Cette compétence est exclusive, sauf convention contraire des parties.

A teneur de l'art. 24 CL, outre les cas où sa compétence résulte d'autres dispositions de la présente Convention, le juge d'un Etat lié par la présente Convention devant lequel le défendeur comparaît est compétent.

Aux termes de l'art. 116 de la loi fédérale sur le droit international privé (LDIP), le contrat est régi par le droit choisi par les parties (al. 1). L'élection de droit doit être expresse ou ressortir de façon certaine des dispositions du contrat ou des circonstances; en outre, elle est régie par le droit choisi (al. 2). L'élection de droit peut être faite ou modifiée en tout temps. Si elle est postérieure à la conclusion du contrat, elle rétroagit au moment de la conclusion du contrat. Les droits des tiers sont réservés (al. 3).

L'argument d'une partie selon lequel le contrat serait nul n'entraîne pas, en soi, la nullité de la clause de prorogation de for insérée dans le contrat. La convention attributive de juridiction est autonome par rapport au contrat principal (ATF 131 III 400; Bucher, CR LDIP/CL, 2011, n. 36 ad art. 23 CL).

Suivant un principe généralement reconnu, l'art. 24 CL accepte que le juge en soi incompétent, selon les autres dispositions de la Convention, devienne compétent si le défendeur comparaît devant lui sans contester sa compétence. Le for ainsi accepté est déterminant même si un autre for existe par ailleurs en Suisse ou dans un autre Etat partie (Bucher, op. cit., n. 1 ad art. 24 CL).

Comme la convention d'arbitrage et, en principe, la prorogation de for, l'élection de droit doit être considérée comme un accord indépendant du contrat auquel elle se réfère (principe d'autonomie), et ce, même si elle se présente comme une clause contractuelle. Dès lors, l'invalidité du contrat n'entraîne pas celle de l'élection de droit, et vice-versa […]. L'art. 116 LDIP n'exige pas que l'élection de droit revête la forme écrite.[…]. Les parties peuvent s'accorder sur le droit applicable même en cours de procédure, jusqu'au moment où elles doivent se déterminer de manière définitive selon les règles de procédure civile applicables au lieu du procès (Bonomi, CR LDIP/CL, 2011, n. 34, 36 et 45 ad art. 116 LDIP).

1.3.2 En l'espèce, hormis pour ce qui est de la question de la compensation que fait valoir l'appelante sur la base de la "convention extrastatutaire", les parties ne remettent à juste titre pas en cause la compétence du Tribunal à raison du lieu (art. 23 al. 1 ou 24 CL) et de la matière (art. 86 al. 1 LOJ) ainsi que l'application du droit suisse (art. 116 al. 1 ou 3 LDIP) pour statuer sur le présent litige.

En effet, les autorités judiciaires suisses sont compétentes et le droit suisse est applicable du fait de la clause de prorogation de for et d'élection de droit contenue dans le contrat du 4 janvier 2019 (clause 10), laquelle est valable, malgré la constatation de la nullité de ce contrat (art. 23 al. 1 CL et 116 al. 1 LDIP). En tout état, le Tribunal est compétent du fait que l'intimé a comparu devant lui sans contester sa compétence (art. 24 CL) et le droit suisse est applicable en raison de l'élection de droit intervenue tacitement entre les parties en cours de procédure. Cette élection de droit se déduit du défaut de remise en cause par l'intimé de l'application du droit suisse au litige plaidée par l'appelante dans sa demande déposée en première instance (art. 116 al. 3 LDIP).

Quant à la compensation, au vu de l'issue du litige, point n'est besoin de statuer sur la question de la compétence des autorités judiciaires suisses et de l'application du droit suisse, que le Tribunal a retenues à cet égard également, ce que l'appelante remet en cause.

2. Dans le cadre de sa duplique devant la Cour, l'intimé a allégué des faits nouveaux et produit des articles de loi de droit étranger.

2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et moyens de preuve nouveaux ne sont pris en compte que s'ils sont invoqués ou produits sans retard et s'ils ne pouvaient être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise.

2.2 En l'espèce, les faits nouveaux ont trait aux prétendues démarches en cours de l'intimé liées à une potentielle décision de sa part de vendre ses actions de C______ SAS. Quant au droit étranger, il porte sur les conditions de la compensation en droit luxembourgeois.

Point n'est besoin de statuer sur la recevabilité de ces éléments nouveaux, faute d'incidence de ceux-ci sur l'issue du litige s'ils devaient être pris en considération.

3. L'appelante reproche au Tribunal de l'avoir déboutée de sa demande en paiement.

3.1.1 A teneur de l'art. 20 CO, le contrat est nul s'il a pour objet une chose impossible, illicite ou contraire aux mœurs (al. 1). Si le contrat n'est vicié que dans certaines de ses clauses, ces clauses sont seules frappées de nullité, à moins qu'il n'y ait lieu d'admettre que le contrat n'aurait pas été conclu sans elles (al. 2).

L'art. 20 al. 2 CO (nullité partielle) est une expression du principe de la favor negotii qui vise à maintenir le contrat en restreignant la nullité à ce qui est strictement nécessaire pour supprimer le désaccord avec la loi ou les bonnes moeurs (ATF 122 II 35 consid. 3a).

La nullité d'un contrat peut être invoquée en tout temps et le juge l'examine d'office (ATF 129 III 209 consid. 2.2; 123 III 60 consid. 3.b). En particulier, la question de la contrariété aux mœurs est une question juridique qui doit être examinée d'office (ATF 80 II 45 consid. 2b). La partie qui se prévaut du caractère contraire aux mœurs d'un contrat doit cependant présenter les faits pertinents (arrêt du Tribunal fédéral 4A_3/2014 du 9 avril 2014 consid. 3.1).

3.1.2 L'art. 27 al. 2 CC prévoit que nul ne peut aliéner sa liberté, ni s'en interdire l'usage dans une mesure contraire aux lois ou aux mœurs (al. 2).

Un contrat conclu pour l'éternité ou pour une durée excessive est contraire à l'art. 27 al. 2 CC. Le caractère excessif de la durée s'examine au regard de l'obligation assumée. En effet, le Tribunal fédéral considère que l'art. 27 CC ne protège pas contre la longue durée des contrats, mais contre un engagement excessif. Seule la mise en relation de l'obligation assumée et de la durée consentie permet de juger du caractère excessif de l'atteinte (Marchand, CR CC I, 2023, n. 54 ad art. 27 CC et les références citées).

A titre d'exemple, en matière de contrats de rente viagère, entretien viager, prêt, assurance ou bail, une durée équivalente à celle de la vie du bénéficiaire est admissible (Marchand, op. cit., n. 55 et 56 ad art. 27 CC). Un contrat d'une durée de 15 ans portant sur la livraison de boissons ne constitue pas un engagement excessif (Marchand, op. cit., n. 58 ad art. 27 CC et les références citées). En matière de contrat de service, le législateur a lui-même fixé certaines limites, par exemple de 10 ans dans le contrat de travail (art. 334 al. 3 CO; Marchand, op. cit., n. 56 ad art. 27 CC).

3.1.3.1 Le prêt de consommation est un contrat par lequel le prêteur s'oblige à transférer la propriété d'une somme d'argent ou d'autres choses fongibles à l'emprunteur, à charge pour celui-ci de lui en rendre autant de même espèce et qualité (art. 312 CO).

La conclusion d'un tel contrat de prêt peut intervenir de manière expresse ou tacite, aucune forme spéciale n'étant exigée (Tercier/Bieri/Carron, Les contrats spéciaux, 2016, n. 2515, p. 338). Elle présuppose néanmoins l'existence de manifestations de volonté réciproques et concordantes entre les parties sur tous les points essentiels (art. 1 al. 1 CO; ATF 127 III 248 consid. 3d; arrêts du Tribunal fédéral 4A_69/2019 du 27 septembre 2019 consid. 3.1; 4A_152/2013 du 20 septembre 2013 consid. 2.3 et les références citées).

La conclusion d'un contrat est un fait qu'il incombe à celui qui s'en prévaut de prouver (art. 8 CC).

Celui qui agit en restitution d'un prêt doit apporter la preuve qu'un contrat de prêt de consommation a été conclu, ce qui suppose un accord sur une obligation de restitution à la charge de l'emprunteur. Dire si une telle obligation a été prévue suppose une appréciation des preuves. Celui qui se dit prêteur n'est au bénéfice d'aucune présomption légale; il doit donc apporter la preuve que l'obligation de remboursement a été convenue (ATF 83 II 209 consid. 2; arrêts du Tribunal fédéral 5A_626/2017 du 29 juin 2018 consid. 3.3.1; 4A_639/2015 du 28 juillet 2016 consid. 5.1; 4A_313/2015 du 13 novembre 2015 consid. 2; 4A_12/2013 du 27 juin 2013 consid. 2.1).

La restitution du prêt est soumise à deux conditions : premièrement, la remise des fonds à l'emprunteur et, deuxièmement, l'obligation de restitution stipulée à charge de celui-ci. L'obligation de restitution de l'emprunteur est un élément essentiel du contrat. Elle résulte non pas du paiement fait par le prêteur mais de la promesse de restitution qu'implique le contrat de prêt. La remise de l'argent par le prêteur n'est qu'une condition de l'obligation de restituer. Le juge doit déterminer, en appliquant les règles d'interprétation des contrats, si les parties sont convenues d'une obligation de restitution; pour ce faire, il se base sur toutes les circonstances concrètes du cas d'espèce, qu'il incombe au prêteur d'établir (ATF 144 III 93 consid. 5.1.1 et les références citées).

Le principe de la restitution permet de délimiter le prêt de consommation par rapport à la donation (Bovet/Richa, CR CO I, 2021, n. 4 ad art. 312 CO).

3.1.3.2 Si le contrat ne fixe ni terme de restitution ni délai d'avertissement, et n'oblige pas l'emprunteur à rendre la chose à première réquisition, l'emprunteur a, pour la restituer, six semaines qui commencent à courir dès la première réclamation du prêteur (art. 318 CO).

Une clause excluant toute résiliation est nulle, le droit suisse n'admettant pas la conclusion de contrats éternels. Un prêt d'une durée de vingt ans ne constitue généralement pas un engagement excessif. Une durée supérieure peut être justifiée selon les circonstances, par exemple lorsque la créance du prêteur est garantie par gage immobilier. Une durée excessive ne conduit pas à la nullité du contrat, mais est réduite à un niveau approprié (art. 20 al. 2 CO) (Bovet/Richa, CR CO I, 2021, n. 2a ad art. 318 CO).

L'art. 318 CO n'a aucun caractère impératif. Cette disposition met l'accent sur la liberté des parties, y compris celle de ne rien prévoir dans leur contrat. Lorsqu'elles traitent néanmoins cet aspect dans leur convention – ce qui est généralement le cas –, les parties peuvent opter pour les solutions les plus diverses, telles que la résiliation et le remboursement du prêt en tout temps moyennant le respect d'un délai de préavis ou le droit du prêteur de résilier le contrat de prêt de manière anticipée lorsque l'emprunteur ne respecte pas certaines de ses obligations, y compris les obligations résultant d'une autre convention (Bovet/Richa, CR CO I, 2021, n. 3 ad art. 318 CO).

3.1.4 Il faut distinguer le contrat de prêt d'autres rapports économiques ou juridiques impliquant un élément de crédit. En particulier, une avance – par exemple sur salaire – ne constitue pas un prêt, mais l'exécution anticipée d'une créance pas encore exigible et portant sur une (contre)prestation exécutée ou en passe de l'être. De même, le créancier qui autorise son débiteur à surseoir temporairement à l'exécution d'une prestation en argent fait crédit au second; on n'est cependant pas en présence d'une relation de prêt, mais d'une modalité d'exécution d'une prestation (Bovet/Richa, CR CO I, 2021, n. 7a ad art. 312 CO).

3.1.5 Il arrive que le défendeur à un procès portant sur un contrat de prêt de consommation soutienne qu'en réalité la convention passée doit être qualifiée de société simple (art. 530 et ss CO). Il s'agira pour le juge d'identifier la volonté des parties selon les principes ordinaires d'interprétation: y a-t-il ou non animus societatis? Une participation active de la partie ayant mis les avoirs à disposition à la gestion de la partie ayant reçu les avoirs, notamment à la prise de décisions importantes, est un premier indice sérieux. Cependant, il ne suffit pas pour les associés d'avoir une influence sur la prise de décisions et de participer aux risques et profits, ils doivent "surtout [partager] la substance même de l'entreprise". Il convient de prendre en compte l'ensemble des circonstances (Bovet/Richa, CR CO I, 2021, n. 5 ad art. 312 CO).

3.1.6 En droit de la société anonyme, les actionnaires peuvent chercher – au-delà des aménagements offerts par la loi – à assurer une certaine prévisibilité quant au comportement des actionnaires, à la composition de l'actionnariat et aux choix sociaux, tout cela en conservant de la flexibilité. La convention d'actionnaires vise à réaliser ces besoins, pour partie contradictoires. Ces conventions concernent notamment le droit de vote et d'élection ainsi que des règles sur le transfert des actions de la société […]. La convention d'actionnaires est une société simple, régie par les art. 530 et ss du CO (Chaix, CR CO II, 2024, n. 22 ad art. 530 CO; Héritier Lachat, Les conventions d'actionnaires: quelques exemples pratiques in Les successions dans les entreprises, 2006, p. 89-90).

3.1.7 Selon l'art. 8 CC, chaque partie doit, si la loi ne prescrit le contraire, prouver les faits qu'elle allègue pour en déduire son droit.

En l'absence d'une disposition spéciale instituant une présomption, l'art. 8 CC répartit le fardeau de la preuve pour toutes les prétentions fondées sur le droit fédéral et détermine, sur cette base, laquelle des parties doit assumer les conséquences de l'échec de la preuve (ATF 129 III 18 consid. 2.6; 127 III 519 consid. 2a). Il en découle en principe que le rapport existant entre les normes matérielles applicables est déterminant pour la répartition du fardeau de la preuve. Ce rapport détermine de cas en cas si le fait à prouver fait naître un rapport de droit (fait générateur), s'il éteint ou modifie un droit (fait destructeur) ou s'il tient en échec cette naissance ou cette extinction (fait dirimant). Celui qui fait valoir une prétention doit établir les faits (générateurs) dont dépend la naissance du droit. En revanche, celui qui invoque la perte d'un droit ou qui conteste sa naissance ou son applicabilité a le fardeau de la preuve des faits destructeurs ou dirimants (ATF 139 III 13 consid. 3.1.3.1; 130 III 321 consid. 3.1; 128 III 271 consid. 2.a/aa; arrêt du Tribunal fédéral 5A_29/2015 du 5 juin 2015 consid. 3.3.3).

3.1.8 Lorsque la maxime des débats est applicable (art. 55 al. 1 CPC), il incombe aux parties, et non au juge, de rassembler les faits du procès. Les parties doivent alléguer les faits sur lesquels elles fondent leurs prétentions (fardeau de l'allégation subjectif), produire les moyens de preuve qui s'y rapportent et contester les faits allégués par la partie adverse (ATF 123 III 60 consid. 3a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_11/2018 du 8 octobre 2018 consid. 5.1). En vertu des art. 221 al. 1 let. d et 222 al. 2 CPC, les faits pertinents allégués doivent être suffisamment motivés (charge de la motivation) pour que la partie adverse puisse se déterminer sur eux et que le juge puisse savoir quels sont les faits admis, respectivement les faits contestés sur lesquels des moyens de preuve devront être administrés (art. 150 al. 1 CPC). La personne de l'alléguant importe peu : il suffit que les faits fassent partie du cadre du procès pour que le juge puisse en tenir compte (arrêt du Tribunal fédéral 4A_164/2021 du 21 décembre 2021 consid. 3.1). En règle générale, seuls les faits ainsi allégués, ensuite admis entre les parties ou, s'ils sont contestés, dûment prouvés, peuvent fonder le jugement (arrêt du Tribunal fédéral 4A_582/2016 du 6 juillet 2017 consid. 4.4).

3.1.9 En première instance, les parties ont chacune deux chances d'introduire des allégués, des offres de preuves, des moyens d'attaque ou de défense sans limites (ATF 140 III 312 consid. 6.3.2.3, JdT 2016 II 257; arrêt du Tribunal fédéral 4A_70/2019 du 6 août 2019 consid. 2.4.1-2.4.2 publiés aux ATF 146 III 55; Bastons Bulletti, in CPC Online, newsletter du 11 septembre 2019) : une première fois dans le cadre du premier échange d'écritures; une seconde fois soit dans le cadre d'un second échange d'écritures, soit - s'il n'en est pas ordonné - à une audience d'instruction (art. 226 al. 2 CPC) ou "à l'ouverture des débats principaux" avant les premières plaidoiries (art. 229 al. 2 CPC) (ATF 144 III 67 consid. 2.1; Heinzmann, in CPC Online, newsletter du 7 février 2018).

Après la clôture de la phase d'allégation, la présentation de faits nouveaux n'est plus possible qu'aux conditions restrictives de l'art. 229 al. 1 CPC (arrêt du Tribunal fédéral 4A_70/2019 précité consid. 2.5.2 publié aux ATF 146 III 55). Selon cette dernière disposition, les faits et moyens de preuve nouveaux ne sont admis aux débats principaux que s'ils sont invoqués sans retard et qu'ils remplissent l'une des conditions suivantes: ils sont postérieurs à l'échange d'écritures ou à la dernière audience d'instruction ou ont été découverts postérieurement (let. a); ils existaient avant la clôture de l'échange d'écritures ou la dernière audience d'instruction mais ne pouvaient pas être invoqués antérieurement bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b).

3.1.10 Le juge applique le droit d'office, mais à la condition que les éléments de fait constitutifs de la disposition en cause aient été suffisamment allégués. S'il estime que l'allégation est suffisante, le juge peut prendre en considération d'autres faits, révélés par l'administration des preuves, s'ils concrétisent l'allégation déjà formulée, de sorte qu'ils sont "couverts" par celle-ci (arrêt du Tribunal fédéral 4A_195/2014 du 27 novembre 2014 consid. 7.1 à 7.3). Si, en revanche, les faits révélés par l'administration des preuves n'ont nullement été allégués auparavant - et s'ils ne peuvent pas non plus l'être par la suite, en tant que nova admissibles au sens de l'art. 229 al. 1 CPC -, le juge ne peut pas les prendre en considération pour appliquer d'office le droit (ATF 142 III 462 consid. 4.3-4.4).

3.1.11 A teneur de l'art. 18 al. 1 CO, pour apprécier les clauses d'un contrat, il y a lieu de rechercher la réelle et commune intention des parties, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention.

Le juge doit rechercher, dans un premier temps, la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective), le cas échéant empiriquement, sur la base d'indices. Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté - écrites ou orales -, mais encore le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté réelle des parties, qu'il s'agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat ou de faits postérieurs à celle-ci, en particulier le comportement ultérieur des parties établissant quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes. L'appréciation de ces indices concrets par le juge, selon son expérience générale de la vie, relève du fait. Si sa recherche aboutit à un résultat positif, le juge parvient à la conclusion que les parties se sont comprises (ATF 144 III 93 consid. 5.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_230/2019 du 20 septembre 2019 consid. 4.1).

3.1.12 On parle d'acte simulé au sens de l'art. 18 CO lorsque les parties sont d'accord que les effets juridiques correspondant au sens objectif de leur déclaration ne doivent pas se produire et qu'elles n'ont voulu créer que l'apparence d'un acte juridique à l'égard des tiers. Juridiquement inefficace d'après la volonté véritable et commune des parties, le contrat simulé est nul. Savoir si les parties avaient la volonté (réelle) de feindre une convention revient à constater leur volonté interne au moment de la conclusion du contrat (arrêt du Tribunal fédéral 5A_677/2017 du 12 septembre 2017 consid. 3.3 et les références citées).

Il incombe à celui qui se prévaut de la simulation d'en apporter la preuve (art. 8 CC).

3.2.1 En l'espèce, dans un premier moyen, l'appelante fait grief au Tribunal d'avoir violé la maxime des débats en retenant que le pacte d'actionnaires de novembre 2018 stipulait un remboursement dans un délai de dix ans avec un préavis de six mois (clause 5.2), alors que ce fait n'aurait pas été allégué par l'intimé.

L'appelante a fondé sa prétention sur le contrat de prêt daté du 4 janvier 2019 dont elle a allégué et démontré la signature par les parties dans le cadre de sa demande en paiement déposée devant le Tribunal. Il incombait en effet à celle-ci d'alléguer et démontrer en temps utile la conclusion d'un contrat de prêt et une obligation de restitution à la charge de l'intimé.

Dans sa réponse à la demande, l'intimé a allégué et démontré que ce contrat invoqué par l'appelante était simulé et partant nul. Il a toutefois admis le versement de 500'000 euros intervenu en sa faveur et une obligation de restitution de sa part au stade de la vente volontaire de ses titres, conformément au contrat signé en février 2018 et au pacte d'actionnaires conclu en novembre 2018, deux contrats dont il a allégué l'existence et qu'il a produits dans leur intégralité.

L'appelante a à son tour soutenu, pour la première fois au stade de ses plaidoiries finales, que ce pacte d'actionnaires invoqué par l'intimé serait nul, au motif qu'il s'agirait d'un contrat éternel. Selon elle, il ne stipulerait en effet pas de délai de remboursement, la compensation prévue avec le prix d'achat de ses actions à payer à l'intimé ne pouvant être considérée comme constitutif d'un tel délai, étant soumise à la seule volonté de ce dernier.

Dans la mesure où l'appelante s'est prévalue de la nullité de ce pacte d'actionnaires invoqué par l'intimé dans sa réponse à la demande, il lui incombait à elle d'alléguer et de démontrer en temps utile le fait pertinent fondant son argumentation, à savoir le prétendu défaut de durée du prêt prévue dans ledit pacte. Il n'appartenait pas à l'intimé d'alléguer et d'établir que ce contrat dont il se prévalait pour faire échec à la prétention de l'appelante n'était pas nul, ni pourquoi il ne l'était pas.

Or, l'appelante a allégué ce fait tardivement, au stade des plaidoiries finales, en outre uniquement en lien avec le remboursement par compensation sur le prix de cession. Elle n'a en effet pas allégué, même à ce stade tardif, qu'aucun (autre) terme ne serait stipulé d'une façon générale dans le pacte en question.

Pour ce seul motif, le premier juge aurait pu écarter la nullité invoquée, de sorte que le grief de l'appelante relatif à la violation de la maxime des débats est, à tout le moins, dénué de portée.

En tout état, le Tribunal a toutefois jugé utile de constater, à juste titre, que, contrairement à ce qu'alléguait tardivement et partiellement l'appelante, le contrat en cause stipulait une durée de dix ans avec avis de résiliation, de sorte que la nullité invoquée n'était pas fondée.

Ce fait et cette conclusion ont été retenus dans le cadre du devoir du premier juge d'examiner d'office la question de la nullité du contrat, de sorte qu'aucune violation de la maxime des débats ne saurait être reprochée à celui-ci. Partant, le grief de l'appelante est infondé.

3.2.2 Dans un deuxième moyen, l'appelante fait grief au premier juge d'avoir retenu que le contrat de prêt du 4 janvier 2019 était totalement nul. Selon elle, seules deux clauses pouvaient "par impossible" être considérées comme simulées, à savoir la clause 2 ("taux d'intérêts et paiement des intérêts" : 0,5% par an payable annuellement) et la clause 3.2 ("durée du prêt" : remboursement sous deux ans) en lien avec la clause 4 ("échéance de remboursement": remboursement au plus tard sous deux ans; 5% par an d'intérêts en cas de défaut de remboursement; remboursement par compensation sur le prix de cession en cas de transfert d'actions du prêteur à l'emprunteur). L'intimé n'aurait en effet fait valoir que la nullité desdites clauses et non celle des autres clauses du contrat, en particulier de la clause 5 ("cas de remboursement anticipé" : remboursement en cas de rupture des relations contractuelles) et de la clause 10 ("législation applicable et juridiction" : tribunaux genevois et droit suisse).

Ce grief n'est pas fondé.

L'intimé a contesté l'allégué général de l'appelante selon lequel les parties auraient conclu le 4 janvier 2019 un contrat de prêt numéraire portant sur la somme de 500'000 euros, en exposant que ce contrat avait été "simulé sur demande et pour les besoins" de la précitée. Il a donc contesté le fait que le contrat, dans son ensemble, et non uniquement certaines de ses clauses, reflète l'accord des parties. Il en a fait de même en lien avec l'allégué de l'appelante portant sur sa prétendue obligation de restituer sous deux ans le montant de 500'000 euros, en ajoutant encore que "la volonté réelle des parties était de lier le remboursement du prêt à la cession par ses soins de ses actions C______ SAS", ce qui équivaut à contester le fait que la clause du contrat stipulant un remboursement en cas de rupture de ses relations contractuelles avec E______ SA puisse refléter la volonté des parties.

Il ressort par ailleurs des courriels de N______ échangés en avril 2020 avec l'intimé et de leur objet mentionné par le premier que l'entier du contrat du 4 janvier 2019 était simulé et non seulement certaines de ses clauses ("c'est juste vraiment pour justifier auprès des auditeurs pour qui une avance de prix de cession ne suffira pas"; "le contrat c'est juste pour la documentation"). Il en découle également que le versement de 500'000 euros était considéré par les parties comme une "avance faite sur le prix de cession future à la signature des nouveaux protocoles" et non un prêt à proprement parler. D'ailleurs, N______ a exposé dans ces échanges que l'accord réellement conclu pourrait être qualifié de donation, ce qu'il fallait éviter de faire apparaître, faute de quoi il pouvait en résulter des conséquences fiscales.

Il est vrai que l'intimé, dans ses déterminations sur les allégués 16 à 19 de la demande, lesquels portaient sur la teneur des clauses 5 et 10 du contrat du 4 janvier 2019, a renvoyé à la pièce produite, à savoir au contrat, sans contester cette teneur, seul le "surplus" étant contesté, contrairement à ses déterminations sur d'autres allégués relatifs au contrat, dans le cadre desquelles il a fait valoir que celui-ci avait été simulé.

Cela étant, dans la mesure où les allégués 16 à 19 portaient exclusivement sur la teneur des clauses du contrat, cette détermination signifiait uniquement que cette teneur était admise. Il ne saurait en être déduit qu'il était admis que celle-ci reflétait l'accord des parties. Point n'était donc besoin pour l'intimé, en lien avec de tels allégués, d'exposer au surplus que le contrat était simulé, même s'il l'a néanmoins fait en lien avec certains autres allégués de ce type. Par ailleurs, peu importe que l'intimé se soit déterminé de cette dernière façon en lien avec des allégués d'un autre type, soit des allégués qui ne portaient pas exclusivement sur la teneur du contrat, mais sur les obligations dont auraient convenu les parties en le signant. Ainsi, l'appelante soutient à tort qu'en se rapportant à la pièce visée, l'intimé aurait admis que les clauses 5 et 10 du contrat du 4 janvier 2019 étaient "valables et donc pleinement applicables".

Il est vrai encore que dans son courriel du 21 avril 2020 adressé à N______, l'intimé n'a "abordé" que "deux sujets", à savoir "une avance qui serait remboursée sur la cession et pas sous deux ans et qui ne donnerait pas lieu à intérêt".

Cela ne saurait toutefois signifier qu'à ses yeux, seuls le remboursement sous deux ans et les intérêts étaient des obligations simulées du contrat du 4 janvier 2019. Le fait de relever que l'avance devait être remboursée par compensation avec le prix de cession de ses actions C______ SAS exclut de façon implicite une obligation de rembourser en d'autres circonstances et selon d'autres modalités. L'intimé a manifesté la même position dans sa réponse du 5 avril 2022 à la mise en demeure de A______ SA. Il a exposé qu'il n'avait jamais été question qu'il rembourse la somme tant qu'il n'aurait pas cédé ses actions C______ SAS, soulignant que les seuls accords en vigueur étaient ceux stipulés dans le pacte d'actionnaires de novembre 2018. Si la prétendue obligation de rembourser dans l'hypothèse d'une rupture de ses relations contractuelles avec E______ SA (clause 5), au contraire de celle de l'écoulement du délai de deux ans, n'a pas été contestée spécifiquement par l'intimé, c'est qu'elle apparaissait moins probable et immédiate. D'ailleurs, dans son courrier de mise en demeure du 31 mars 2022, se fondant sur le contrat du 4 janvier 2019, A______ SA a invoqué, outre la compensation avec le prix de cession des actions C______ SAS, l'échéance du délai de deux ans, mais non la rupture des relations contractuelles. Cela même alors que cette dernière hypothèse, selon ses allégations en procédure, se serait réalisée peu de temps auparavant, le 8 mars 2022 (résiliation du mandat de l'intimé de président dans la société C______ SAS).

Il est vrai enfin que l'intimé n'a pas contesté la compétence des tribunaux suisses et l'application du droit suisse stipulées par la clause 10 du contrat du 4 janvier 2019.

Cela étant, rien ne saurait en être déduit non plus. D'une part, cette clause est autonome et reste valable même si le contrat dans son ensemble est simulé et donc nul. D'autre part, même si l'ensemble des clauses du contrat a été simulé, cela n'empêche pas que l'intimé ait accepté par la suite d'être attrait devant les tribunaux suisses et de voir le droit suisse appliqué, conformément à la clause de prorogation de for et d'élection de droit de ce contrat simulé et contrairement à celle du pacte d'actionnaires de novembre 2018 dont il plaide qu'il s'agit du seul accord valable liant les parties.

Si besoin est, il est encore relevé que la nullité partielle prévue par l'art. 20 al. 2 CO a pour but, conformément au principe de la favor negotii, de maintenir le contrat. Or, en l'occurrence, ce principe n'a pas d'objet, dans la mesure où si l'intégralité du contrat du 4 janvier 2019 est nul, un accord entre les parties subsiste, à savoir celui, préexistant et réel, conclu en février et novembre 2018.

Au vu de l'ensemble de ce qui précède, c'est à juste titre que le Tribunal a retenu la nullité totale du contrat du 4 janvier 2019 et donc le défaut de démonstration par l'appelante d'une obligation de restitution de l'intimé fondée sur la clause 5 dudit contrat, à savoir en cas de rupture des relations contractuelles entre celui-ci et E______ SA. Point n'est donc besoin de répondre à la question de savoir si cette hypothèse était réalisée, comme le soutient l'appelante.

3.2.3 Dans un troisième moyen, développé à titre subsidiaire, l'appelante soutient que si par impossible la Cour devait ne pas retenir la validité d'une résiliation extraordinaire fondée sur la clause 5 du contrat du 4 janvier 2019, elle devrait admettre celle d'une résiliation ordinaire du prêt basée sur l'art. 318 CO.

Selon elle, à teneur du contrat tel qu'invoqué par l'intimé et retenu par le Tribunal, le remboursement du prêt serait lié au seul bon vouloir, par essence indéfini, de l'intimé de procéder à l'activation de la clause lui permettant de céder ses actions C______ SAS. La seule échéance prévue du prêt se rapporterait donc à un acte dépendant de la volonté de l'emprunteur, aucun terme maximum n'étant par ailleurs prévu et le prêteur ne disposant au surplus pas de la possibilité de résilier le contrat. Dans la mesure où il ne stipulerait aucun terme, le contrat invoqué devrait être qualifié de prêt perpétuel et donc déclaré partiellement nul de ce fait. Ainsi, le terme de l'art. 318 CO devait être appliqué, soit un délai de six semaines dès la mise en demeure du 31 mars 2022.

Ce grief est développé en vain.

Comme il a été exposé ci-dessus en lien avec le grief portant sur la violation de la maxime des débats (cf. supra, consid. 3.2.1), il appartenait à l'appelante, qui soutenait que le pacte d'actionnaires de novembre 2018 était partiellement nul du fait que la clause de restitution aurait été soumise au bon vouloir de l'intimé, d'alléguer et prouver en temps utile que ce pacte ne comportait aucun (autre) terme, ce à quoi elle n'a pas procédé, y compris de façon tardive au stade des plaidoiries finales. Pour ce seul motif, il se justifie d'écarter le grief de l'appelante et de ne pas faire application de l'art. 318 CO.

Quoi qu'il en soit, dans le cadre de son examen, effectué d'office, de l'éventuelle nullité de l'accord résultant du contrat de février 2018 et du pacte d'actionnaires de novembre 2018, le Tribunal a constaté avec raison qu'à teneur de ce dernier, un terme de dix ans avec préavis de six mois avait été convenu entre les parties. Or, cette durée n'est pas excessive dans le cadre d'un contrat de prêt. Ainsi, le contrat en question ne saurait être qualifié de perpétuel et l'art. 318 CO, qui n'est pas de droit impératif, ne saurait être appliqué.

En tout état, dans le mesure où elle se prévalait d'un contrat de prêt et plaidait l'application de l'art. 318 CO, il incombait à l'appelante de démontrer l'existence de la conclusion d'un tel contrat en apportant la preuve d'une obligation de restitution à la charge de l'intimé, ce dans quoi elle a échoué. Rien ne permet en effet d'exclure que le contrat litigieux ayant fondé l'avance de 500'000 euros relèverait de la société simple, de la donation et/ou d'un rapport économique ou juridique impliquant un élément de crédit. La teneur des courriels de N______ d'avril 2020 sont d'ailleurs significatifs à cet égard ("c'est juste vraiment pour justifier auprès des auditeurs pour qui une avance de prix de cession ne suffira pas. De plus, le risque est que ça soit requalifié en donation avec les conséquences fiscales qui s'en suivent").

3.2.4 Dans un dernier moyen, l'appelante reproche au Tribunal une violation de l'art. 116 al. 1 LDIP dans le cadre de son examen de la compensation qu'elle a invoquée. Selon elle, le premier juge aurait en effet appliqué à tort sur ce point le droit suisse en lieu et place du droit luxembourgeois, ce dernier faisant l'objet de la clause d'élection de droit prévue par le pacte sur lequel se fondait la compensation invoquée.

Au vu de l'issue du litige, l'appelante étant déboutée de sa conclusion en paiement, point n'est besoin d'entrer en matière sur la question de la compensation de la créance invoquée, ni donc sur le droit applicable à dite compensation.

Partant, ce dernier grief de l'appelante est développé en vain, de sorte que l'appel sera rejeté et le jugement attaqué confirmé.

4. Les frais judiciaires d'appel, arrêtés à 15'000 fr. (art. 17 et 35 RTFMC), seront mis à la charge de l'appelante, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC). Ils seront compensés avec l'avance de frais du même montant versée par celle-ci, qui demeure acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

L'appelante sera, en outre, condamnée à verser 15'000 fr. à l'intimé à titre de dépens d'appel (art. 105 al. 2 CPC; art. 84, 85 al. 1 et 90 RTFMC; art. 20 al. 1 et 25 LaCC), débours compris et hors TVA, vu le domicile de l'intimé à l'étranger (ATF 141 IV 344 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_623/2015 du 3 mars 2016).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 1er février 2024 par A______ SA contre le jugement JTPI/15052/2023 rendu le 19 décembre 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/15977/2022.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 15'000 fr., les met à la charge de A______ SA et dit qu'ils sont compensés avec l'avance de frais versée, qui demeure acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ SA à verser 15'000 fr. à B______ à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, présidente; Madame
Verena PEDRAZZINI RIZZI, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Emilie FRANÇOIS, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.