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Décisions | Chambre civile

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C/23522/2020

ACJC/576/2024 du 08.05.2024 sur JTPI/7783/2023 ( OS ) , CONFIRME

Normes : co.394
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/23522/2020 ACJC/576/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MERCREDI 8 MAI 2024

 

Entre

A______ SA, sise ______ [GE], appelante d'un jugement rendu par la 11ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 30 juin 2023, représentée par Me Stéphane PENET, avocat, WAEBER PENET, quai Gustave-Ador 2, case postale 3021, 1211 Genève 3,

et

Monsieur B______, domicilié ______ [GE], intimé, représenté par Me Philippe DE BOCCARD, avocat, De Boccard Associés SA, rue du Mont-Blanc 3, 1201 Genève.

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/7783/2023 du 30 juin 2023, reçu par les parties dans sa version motivée le 17 octobre 2023, le Tribunal de première instance a débouté A______ SA de toutes ses conclusions prises à l'encontre de B______ (ch. 1 du dispositif), mis les frais judiciaires en 3'000 fr. à la charge de A______ SA (ch. 2), condamné cette dernière à verser 900 fr. à ce titre à l'Etat de Genève (ch. 3) ainsi que 3'000 fr. de dépens à B______ (ch. 5) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 6).

B. a. Le 16 novembre 2023, A______ SA a formé appel de ce jugement, concluant à ce que la Cour de justice l'annule, condamne B______ à lui verser 12'000 fr. et 5'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2016 et prononce la mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer, poursuite n° 1______, avec suite de frais et dépens.

b. Le 22 janvier 2024, B______ a conclu à la confirmation du jugement querellé, avec suite de frais et dépens.

c. Les parties ont répliqué et dupliqué, persistant dans leurs conclusions.

d. Elles ont été informées le 23 avril 2024 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier.

a. A______ SA a notamment pour but social l'exploitation d'un bureau d'architecture et des activités de courtage et promotion immobilière. C______ en est l'administrateur avec signature individuelle, et son fils, D______, le directeur avec signature individuelle.

B______ est domicilié au no. 2______ chemin 3______, à E______ [GE]. Il connaît de longue date D______, propriétaire d'une maison située au no. 4______, chemin 3______ (parcelle n° 5______).

b. De 2014 à 2017, B______ a mandaté A______ SA pour qu'elle s'occupe du permis de construire et de la surveillance du chantier d'une propriété sise à F______ [GE]. Un contrat d'architecte écrit a été signé par les parties à cette occasion. Ce projet est terminé et tous les montants dus ont été versés par B______.

c. Au cours de l'exécution de ce mandat, D______ et B______ ont évoqué la question de l'achat de la maison mitoyenne à celle du premier, située au no. 6______, chemin 3______ à E______ et appartenant à G______.

D______ a notamment indiqué à B______ qu'il serait intéressé par l'acquisition d'une partie de ladite maison. Il n'avait cependant pas le financement nécessaire pour l'acquérir seul. Il envisageait d'acheter le grenier de la maison en question pour agrandir son propre logement.

d. Par courrier du 8 décembre 2015, A______ SA a confirmé à B______ que la maison de village du no. 6______, chemin 3______ était saine au niveau structure et fondation. Son état actuel nécessitait des travaux importants pour la mettre aux normes. Elle conseillait à B______ de faire des recherches auprès du département compétent pour envisager un agrandissement possible, ce qui valoriserait l'objet. Elle précisait qu'elle restait à sa disposition et lui souhaitait "bonne suite pour cette démarche".

e. Toujours en décembre 2015, C______ a établi, sur papier à en-tête au nom de A______ SA, une estimation des coûts de rénovation concernant la "propriété de (…) B______ [au chemin] 3______". Le total des coûts était de 695'000 fr., y compris des honoraires d'architectes en faveur de A______ SA en 40'000 fr.

Ce document a été établi sur requête de B______, dans le cadre de la demande de celui-ci tendant à obtenir un crédit en vue de l'acquisition et de la rénovation de la maison [du chemin] 3______.

B______ allègue que ce document a été établi en quelques minutes par C______, dans les locaux de A______ SA, sur la base d'une estimation manuscrite effectuée par ses soins. C______ l'avait rédigé à l'ordinateur, l'avait imprimé et le lui avait remis sur le champ. Il n'avait pas été convenu que cette activité serait payante. C______ ne lui avait d'ailleurs pas adressé de facture en lien avec cette estimation.

f. En janvier 2016, D______ a soumis à B______ deux plans en 3D relatifs à la maison précitée, intitulés respectivement "transformation d'un bâtiment villageois" et "projet de répartition en faveur de la parcelle n° 5______". Deux variantes étaient présentées, l'une consistant en une "cession pour D______", et l'autre en une "cession et vente complémentaire" (pièce 7bis appelante).

A______ SA allègue que ces documents ont été établis par ses soins sur demande de B______.

B______ le conteste, faisant valoir que ces plans ont été confectionnés spontanément par D______ sur la base de documents publics du cadastre. Ce dernier connaissait bien la maison et souhaitait en acquérir une partie, en particulier une pièce dans les combles. Il espérait le convaincre de lui confier le mandat de rénovation de celle-ci s'il l'achetait et de lui vendre une partie de celle-ci. B______ n'avait pas réagi ni répondu à la proposition de D______, car il n'était pas propriétaire de la maison en question. De plus, il n'était pas satisfait des prestations de A______ SA dans le cadre du chantier en cours et n'entendait pas lui confier un autre mandat.

g. Le 11 mars 2016, B______ a acquis de G______ la maison du no. 6______, chemin 3______.

h. Dans le courant de l'été 2016, B______ a pris contact avec H______, architecte, pour lui confier le mandat de rénover la maison [du chemin] 3______ et pour procéder au dépôt de la demande d'autorisation de construire.

Entendue comme témoin par le Tribunal, la précitée a indiqué qu'elle avait demandé à B______ pourquoi il n'avait pas mandaté l'architecte qui s'était occupé des travaux sur sa maison de F______; l'intéressé avait répondu qu'il avait eu un différend avec lui dans le cadre des travaux en question. Elle a ajouté qu'elle avait effectué ses propres relevés et plans et n'avait utilisé aucun des documents versés à la procédure par A______ SA.

i. En septembre 2018, les travaux de rénovation ont été autorisés par le Département sur la base des plans produits par H______.

D______ s'est opposé à la délivrance de l'autorisation de construire jusque par-devant la Chambre administrative de la Cour de justice, en vain.

L'autorisation de construire est entrée en force le 6 juillet 2020.

j. Il n'est plus contesté en appel qu'aucune facture n'a été adressée à B______ par A______ SA au titre d'une éventuelle activité effectuée par ses soins en lien avec la rénovation de la maison du no. 6______, chemin 3______.

k. Par courrier du 3 septembre 2020, A______ SA a réclamé à B______ 12'000 fr. pour "l'établissement des mesures et des plans" et 5'000 fr. pour "l'établissement du devis de rénovation".

l. Le 18 septembre 2020, elle lui a fait notifier un commandement de payer, poursuite n° 1______ portant sur 12'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2016 au titre d'"établissement des mesures et plans du bâtiment sis no. 6______, chemin 3______" et 5'000 fr. au titre de "l'établissement du devis de rénovation" du bâtiment précité. Opposition a été formée à ce commandement de payer.

m. Par demande déposée en conciliation le 17 novembre 2020 et introduite en temps utile devant le Tribunal, A______ SA a conclu à ce que celui-ci condamne B______ à lui payer 12'000 fr. plus intérêts à 5% dès le 1er janvier 2016 ainsi que 5'000 fr. plus intérêts à 5% dès le 1er janvier 2016 et prononce la mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer précité.

Elle a fait valoir que B______ lui avait demandé d'effectuer une étude de son bâtiment, laquelle nécessitait la prise de cotes pour l'établissement de plans et la rédaction d'un devis de rénovation. Cette activité, effectuée avant l'achat de la maison, avait permis à l'intéressé de "se décider à acquérir le bien". Il était prévu qu'elle se charge de la rénovation globale du bâtiment et qu'elle perçoive une rémunération englobant les prestations précitées. Or, B______ avait décidé sans raison de mettre un terme à la relation contractuelle, de sorte que sa créance était devenue exigible.

Elle a notamment produit, outre les plans 3D précités (pièce 7bis), 2 "esquisses des plans cotés", manuscrites et non datées (pièce 7).

n. Par réponse du 21 juin 2020, B______ a conclu au déboutement de A______ SA de toutes ses conclusions.

Il n'avait conclu aucun contrat avec celle-ci concernant la maison [du chemin] 3______. Il n'avait en particulier jamais reçu les esquisses produites sous pièce 7 par sa partie adverse et il ignorait comment et pour quel motif celles-ci avaient été établies.

o. Par réplique du 30 septembre 2021, A______ SA a persisté dans ses conclusions.

p. Lors de son interrogatoire par le Tribunal, B______ a déclaré qu'il n'avait jamais sollicité l'établissement de plans en 3D.

D______ a expliqué que ces plans constituaient la base pour un projet d'agrandissement de son propre logement et qu'ils avaient été remis à B______ en tant que potentiel partenaire de ce projet. Les précités en avaient discuté. Après avoir pris contact avec sa banque et un géomètre, B______ avait renoncé à ce projet, celui-ci étant trop compliqué.

B______ a confirmé avoir discuté avec D______ de son projet, sur la base des plans précités. Cette proposition n'était pas réalisable techniquement et la vente à D______ d'une partie de la maison aurait eu pour résultat de la dévaluer excessivement, ce qu'avait confirmé la banque, de sorte qu'il l'avait déclinée.

C______ a pour sa part indiqué ce qui suit : "Nous aurions signé un contrat avec B______ si nous avions obtenu le mandat pour la maison [au chemin] 3______". Il avait fait plusieurs courriers pour la banque, une expertise et un estimatif des coûts de rénovation.

q. Dans leurs dernières écritures les parties ont persisté dans leurs conclusions.

La cause a été gardée à juger par le Tribunal le 23 janvier 2023.

EN DROIT

1. 1.1 L’appel est recevable contre les décisions finales de première instance, dans les causes dont la valeur litigieuse, au dernier état des conclusions devant l’autorité inférieure, est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 1 let. a et al. 2 CPC), ce qui est le cas en l’espèce.

L’appel a en outre été interjeté dans le délai de trente jours et selon la forme prescrite par la loi (art. 130, 131 et 311 al. 1 CPC), de sorte qu’il est recevable.

1.2 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d’examen (art. 310 CPC). En particulier, elle contrôle librement l’appréciation des preuves effectuées par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l’art. 310 let. b CPC). Elle applique en outre la maxime des débats et le principe de disposition (art. 55 al. 1 et 58 al. 1 CPC).

2. L'appelante a formé un certain nombre de griefs contre l'état de fait établi par le Tribunal. Celui-ci a été complété pour y intégrer tous les faits pertinents pour l'issue du litige.

3. Le Tribunal a retenu que C______ avait admis qu'aucun mandat pour la rénovation de la maison sise [au chemin] 3______ n'avait été confié à l'appelante, puisqu'il avait expressément déclaré que, si tel avait été le cas, ils auraient signé un contrat. De plus, aucun élément du dossier ne permettait de retenir que les parties avaient la réelle et commune intention de conclure un tel mandat. Il n'était pas établi que l'intimé ait demandé à D______ de préparer les plans en 3D. Il apparaissait au contraire que ces plans avaient été faits spontanément par ce dernier qui avait un intérêt personnel à l'acquisition d'une pièce de la maison et souhaitait convaincre l'intimé de réaliser ce projet. Il n'était pas démontré que les parties avaient convenu que l'estimation effectuée par C______ le serait à titre onéreux. Les déclarations de ce dernier, ainsi que le fait qu'aucune facture n'avait été adressée à l'intimé à l'époque confirmaient au contraire que cette activité ne devait pas être rémunérée. Les parties n'avaient dès lors conclu aucun contrat et l'appelante devait être déboutée des fins de sa demande.

Au fil d'une argumentation confuse et prolixe, l'appelante fait valoir que les déclarations de C______ mentionnées par le Tribunal ne sont pas déterminantes. Ce dernier faisait référence à un "contrat de direction des travaux de construction" qui ne lui avait "pas été confié", tout simplement car l'intimé avait "résilié le contrat de rénovation." En raison des relations d'amitié entre les parties, "l'appelante n'avait pas jugé utile de rédiger un contrat relatif à l'élaboration des premiers plans et devis globaux". L'absence de facture était due au fait que le comportement de l'intimé "laissait entendre qu'il ne comptait pas [la] rémunérer pour le travail exécuté". L'intimé avait accepté de la rémunérer pour le chantier de F______, ce qui impliquait qu'il devait faire de même pour le projet litigieux. L'estimation rédigée par C______ comprenait d'ailleurs un montant de 40'000 fr. au titre des honoraires d'architecte. Le contrat devait être considéré comme conclu en application du principe de la confiance. Les parties avaient manifesté par actes concluants la volonté de conclure un contrat d'entreprise. Elle avait en outre droit à des "droits d'auteur sur les documents remis à l'intimé".

3.1.1 Le contrat est parfait lorsque les parties ont, réciproquement et d’une manière concordante, manifesté leur volonté (art. 1 al. 1 CO). Le contrat suppose donc un échange de manifestations de volonté réciproques (art. 3 ss CO); le contrat est conclu si l’offre et l’acceptation sont concordantes. Les manifestations de volonté peuvent être tacites (art. 1 al. 2 CO; arrêt du Tribunal fédéral 4A_431/2019 du 27 février 2020 consid. 5.1 et les références).

Tant pour déterminer si un contrat a été conclu que pour l’interpréter, le juge doit tout d’abord s’efforcer de déterminer la commune et réelle intention des parties, sans s’arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la véritable nature de leur convention (interprétation subjective; art. 18 al. 1 CO; ATF 144 III 93 consid. 5.2.2; ATF 132 III 626 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_431/2019 consid. 5.1 précité et les références). Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté – écrites ou orales –, mais aussi le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté des parties, qu’il s’agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat, des projets de contrat, de la correspondance échangée ou encore de l’attitude des parties après la conclusion du contrat, établissant quelles étaient à l’époque les conceptions des contractants eux-mêmes (ATF 140 III 86 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_152/2017 du 2 novembre 2017 consid. 4.1).

Ce n’est que si le juge ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties – parce que les preuves font défaut ou ne sont pas concluantes – ou s’il constate qu’une partie n’a pas compris la volonté exprimée par l’autre à l’époque de la conclusion du contrat – ce qui ne ressort pas déjà du simple fait qu’elle l’affirme en procédure, mais doit résulter de l’administration des preuves –, qu’il doit recourir à l’interprétation normative (ou objective), à savoir rechercher leur volonté objective, en déterminant le sens que, d’après les règles de la bonne foi, chacune d’elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l’autre. Il s’agit d’une interprétation selon le principe de la confiance. Ce principe permet d’imputer à une partie le sens objectif de sa déclaration ou de son comportement, même si celui-ci ne correspond pas à sa volonté intime (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3; arrêts du Tribunal fédéral 4A_431/2019 précité et les références et 4A_463/2017 du 4 mai 2018 consid. 4.1). L’interprétation objective s’effectue non seulement d’après le texte et le contexte des déclarations, mais également sur le vu des circonstances qui les ont précédées et accompagnées, à l’exclusion des évènements postérieurs (ATF 142 III 239 consid. 5.2.1).

3.1.2 La rémunération due à l'architecte est réglée par l'art. 394 al. 3 CO qui prévoit qu'une rémunération est due au mandataire si la convention ou l'usage lui en assure une. Il se justifie en effet d'appliquer l'art. 394 al. 3 CO relatif au mandat à l'ensemble des prestations, même si le contrat d'architecte comporte également des prestations relevant du contrat d'entreprise, car une distinction entre les deux catégories n'engendrerait pratiquement aucune différence dans le résultat (arrêt du Tribunal fédéral 4A_230/2013 du 17 septembre 2013 consid. 2 et les références citées).

Lorsque les parties n'ont pas explicitement convenu d'une rémunération pour les prestations fournies par l'architecte, ce dernier est autorisé à réclamer la rémunération usuelle selon l'art. 394 al. 3 CO, à déterminer d'après la valeur du travail fourni et les dépenses encourues, selon l'art. 374 CO. Si nécessaire, le juge arrête donc une rémunération objectivement proportionnée aux services rendus, en tenant compte notamment du genre et de la durée de la mission accomplie, de son importance et de ses difficultés, ainsi que de la responsabilité assumée par l'architecte. Les règlements et tarifs SIA ne sont déterminants que dans la mesure où les parties ont expressément ou tacitement convenu de s'y référer; à défaut, ils n'ont pas valeur d'usage au regard de l'art. 394 al. 3 CO (arrêt du Tribunal fédéral 4A_230/2013 du 17 septembre 2013 consid. 2 et les références citées).

Dans le contrat d'entreprise, sauf accord contraire, les frais de pourparlers doivent être supportés, en principe, par l'entrepreneur, même si les travaux subséquents ne lui sont pas adjugés. Toutefois, celui qui, dans le cadre de pourparlers visant à la conclusion d'un contrat d'entreprise totale, demande à un entrepreneur d'effectuer une étude préliminaire allant bien au-delà des travaux nécessaires à l'établissement d'une simple offre, afin d'évaluer le coût de la construction projetée, ne peut pas se soustraire à son obligation de rémunérer l'entrepreneur en faisant valoir qu'il n'a finalement pas accepté l'offre globale faite par ce dernier (ATF 119 II 40 consid. 2).

En vertu de l'art. 8 CC, lorsque le litige porte sur le caractère onéreux d’un contrat, il incombe à celui qui se prétend créancier de prouver les faits dont il entend déduire des droits, soit de démontrer qu’une rémunération a été convenue (ATF 127 III 159 consid. 2a et les références citées). Il incombe par ailleurs à l'architecte d'alléguer et de prouver, dans le procès, les faits pertinents pour son évaluation. Par conséquent, le juge doit refuser toute rémunération si aucune preuve concluante ne lui est présentée (arrêt du Tribunal fédéral 4A_230/2013 précité). 

3.2 En l'espèce, le Tribunal a considéré à juste titre que l'appelante n'avait pas établi la véracité des allégations figurant dans sa demande selon lesquelles elle avait conclu avec l'intimé un contrat portant sur la rénovation de la maison [du chemin] 3______. C______ a en effet expressément reconnu lors de son interrogatoire par le Tribunal qu'il n'avait pas obtenu le mandat pour ladite maison. Les explications confuses de l'appelante, qui tente de démontrer que le Tribunal aurait mal apprécié cette affirmation, n'emportent pas la conviction.

A cela s'ajoute qu'il ressort de plusieurs autres éléments du dossier que les parties n'avaient pas convenu que les prestations dont se prévaut l'appelante, fournies par D______ et C______, seraient rémunérées.

Le seul document attestant d'une activité de la part de C______ est l'estimation des coûts de rénovation établie en décembre 2015 et produite sous pièce 8 de l'appelante. Le courrier adressé par cette dernière à l'intimé le 8 décembre 2015, concernant l'état de la maison litigieuse, atteste du fait qu'à cette époque aucun mandat ne lui avait été confié, puisque l'appelante souhaite à l'intimé "bonne suite" pour ses démarches, ce qui implique qu'elle n'avait pas été chargée desdites démarches.

Ni C______, ni D______ n'ont confirmé lors de leur interrogatoire par le Tribunal que l'intimé avait accepté de rémunérer l'appelante pour l'établissement du document estimatif des coûts de rénovation de la maison daté de décembre 2015. Le fait qu'aucune facture n'ait été adressée à l'intimé à ce titre le confirme. Les explications de l'appelante sur les raisons de l'absence de facture, à savoir qu'elle savait d'avance que celle-ci ne serait pas acquittée, tendent plutôt à confirmer la thèse de l'intimé, en ce sens que si l'appelante savait que sa facture ne serait pas acquittée, c'est bien qu'elle était au courant qu'aucune rémunération n'avait été prévue.

Le seul fait que l'estimation précitée prévoie un montant de 40'000 fr. au titre des honoraires d'architecte n'implique pas que l'intimé ait accepté de confier le mandat de rénovation à l'appelante et de lui verser ce montant. Cette estimation n'est en particulier pas contresignée pour accord par l'intimé.

Contrairement à ce que fait valoir l'appelante, le fait que l'intimé ait versé une rémunération à l'appelante pour le chantier de F______ n'est d'aucune pertinence pour trancher la question de savoir si une rémunération est due dans la présente cause. La situation de ces deux maisons n'est pas la même puisque les travaux de la maison de F______ ont été effectués sur la base d'un contrat d'architecte écrit, signé entre les parties. Ce précédent tendrait au demeurant plutôt à confirmer que les animateurs de l'appelante avaient l'habitude, conformément à l'usage, de formaliser par écrit les accords conclus dans le cadre de leur activité professionnelle. C______ l'a d'ailleurs confirmé lors de son audition par le Tribunal, puisqu'il a expliqué qu'il aurait signé un contrat avec l'intimé s'il avait obtenu le mandat.

A supposer que l'estimation précitée doive être considérée comme une offre, comme le soutient l'appelante dans sa réplique, il n'y a, compte tenu de ce qui précède, pas lieu de déroger à la règle selon laquelle en principe les frais liés à l'établissement d'une offre doivent être supportés par celui-ci qui la soumet.

Il n'est pas non plus établi que l'intimé aurait demandé à l'appelante d'établir les plans en 3D confectionnés par D______ et produits sous pièce 7bis de l'appelante.

D______ n'a pas confirmé lors de son interrogatoire que ces plans avaient été établis sur demande de l'intimé. Il ressort au contraire des déclarations concordantes des précités que ces plans ont été établis par D______ en lien avec son souhait d'acheter personnellement et de transformer pour son propre usage le grenier de la maison du no. 6______, chemin 3______. D______ a ainsi soumis ces plans à l'intimé en qualité de partenaire potentiel de son propre projet, mais non en tant que mandataire dans le cadre d'un projet de l'intimé.

Le fait que les plans en question le concernaient personnellement est attesté par la mention "projet n° 1 cession pour D______" figurant au bas de l'un des plans. De plus, l'un des plans mentionne qu'il s'agit d'un "projet de répartition en faveur de la parcelle n° 5______", laquelle appartient au précité. Il n'est par ailleurs pas contesté que ce projet n'a pas abouti.

Il résulte de ce qui précède que les plans en 3D ont été établis par D______ dans le cadre d'un projet qui ne concernait pas l'appelante, mais qui le concernait personnellement. L'appelante ne peut dès lors en déduire aucun droit.

A cela s'ajoute que l'intimé n'a jamais accepté de rémunérer l'appelante pour ce projet.

L'appelante allègue pour la première fois dans sa réplique devant la Cour qu'elle aurait droit à des droits d'auteur sur les documents remis à l'intimé. Ces allégations, qui ne reposent sur rien et sont motivés de manière lapidaire, sont à la fois manifestement irrecevables (art. 317 et 311 CPC) et infondées.

Il résulte de ce qui précède qu'il est établi que l'appelante et l'intimé n'ont conclu aucun contrat prévoyant que la première toucherait une rémunération pour l'activité dont elle se prévaut.

Même s'il fallait considérer, ce qui n'est pas le cas, que l'appelante avait établi que l'intimé s'était engagé à la rémunérer pour ladite activité, elle devrait néanmoins être déboutée de ses conclusions en paiement. L'appelante n'a en effet pas allégué, ni a fortiori établi les éléments pertinents nécessaires pour calculer le montant de sa rémunération, comme par exemple le temps consacré aux tâches effectuées et le tarif applicable.

Le Tribunal a ainsi considéré à juste titre que la volonté réelle des parties était établie et que celles-ci avaient n'avaient pas conclu de contrat ni convenu qu'une rémunération serait versée à l'appelante pour les prestations dont elle se prévaut dans la présente procédure.

Il n'y a dès lors pas de place pour une interprétation des déclarations de volonté des parties selon le principe de la confiance.

Le jugement querellé sera par conséquent confirmé.

4. L'appelante qui succombe, sera condamnée aux frais de son appel (art. 106 CPC).

Les frais judiciaires seront fixés à 1'800 fr. (art. 17 et 35 RTFMC) et compensés avec l'avance du même montant versée par l'appelante, acquise à l'Etat de Genève (art. 111 CPC).

Les dépens dus à l'intimé seront fixés à 2'500 fr., débours et TVA inclus (art. 84, 85 et 90 RTFMC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté par A______ SA contre le jugement JTPI/7783/2023 rendu le 30 juin 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/23522/2020.

Au fond :

Confirme le jugement querellé.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Met à la charge de A______ SA les frais judiciaires d'appel, fixés à 1'800 fr. et compensés avec l'avance versée, acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ SA à verser 2'500 fr. de dépens d'appel à B______.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, juges; Madame Jessica ATHMOUNI, greffière.

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.