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Décisions | Chambre civile

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C/17677/2021

ACJC/958/2022 du 12.07.2022 sur JTPI/15159/2021 ( SDF ) , MODIFIE

Normes : CPC.276.al1; CC.176
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/17677/2021 ACJC/958/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du MARDI 12 JUILLET 2022

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______, appelante d'un jugement rendu par la 2ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 2 décembre 2021, comparant par Me Raphaëlle NICOLET, avocate, Fair Law, rue du Conseil-Général 8, 1205 Genève, en l'Étude de laquelle elle fait élection de domicile,

et

Monsieur B______, domicilié Fondation C______, ______, intimé, comparant par son curateur Me D______, avocat, ______, en l'Étude duquel il fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/15159/2021 du 2 décembre 2021, notifié aux parties le lendemain, le Tribunal, statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, a autorisé en tant que de besoin les époux A______/B______ à vivre séparés (chiffre 1 du dispositif), dispensé B______ de contribuer à l'entretien de A______, vu sa situation financière (ch. 2), prononcé ces mesures pour une durée indéterminée (ch. 3), condamné B______ à verser à son épouse un montant de 4'000 fr. au titre de provisio ad litem (ch. 4), arrêté les frais judiciaires à 200 fr., répartis par moitié entre les parties, condamné en conséquence chacun des époux à verser 100 fr. aux Services financiers du Pouvoir judiciaire (ch. 5), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 6) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 7).

B. a. Par acte expédié à la Cour de justice le 13 décembre 2021, A______ forme appel contre le jugement précité, dont elle sollicite l'annulation des chiffres 2, 3 et 5 du dispositif. Cela fait, elle conclut préalablement à ce que son époux soit condamné à lui verser une provisio ad litem de 3'500 fr. pour la procédure d'appel. Au fond, elle demande que celui-ci soit condamné à lui verser une pension alimentaire mensuelle de 2'559 fr. 50 dès le dépôt de la requête de mesures protectrices de l'union conjugale, ainsi qu'un montant unique de 4'500 fr. avec effet immédiat, sous suite de frais et dépens.

b. B______ a conclu au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement entrepris, avec suite de frais et dépens.

c. Chacune des parties a produit des pièces nouvelles.

d. L'appelante n'ayant pas fait usage de son droit de réplique, les parties ont été avisées de ce que la cause était gardée à juger, par avis du greffe de la Cour du 2 février 2022.

e. Par ordonnance du 14 mars 2022, la Cour, ayant constaté qu'une procédure de divorce était pendante entre les parties depuis le 26 janvier 2018, mais suspendue depuis le 26 juin 2018, a invité les parties à se déterminer sur la suite qu'elles entendaient donner à la procédure de divorce et sur ses conséquences sur la procédure de mesures protectrices objet de la présente cause.

f. Les parties se sont ainsi déterminées sur ces questions par plusieurs courriers successifs. Leur position peut être résumée de la manière suivante :

A______ a considéré que, comme elle s'opposait au divorce sur requête commune et que la séparation entre les parties n'avait pas duré assez longtemps, la procédure de divorce deviendrait sans objet et laissait donc la place aux mesures protectrices. Il serait prématuré de déclarer la requête de mesures protectrices et l'appel irrecevables, avant de connaître le sort donné au divorce.

B______, par la voix de son curateur, a déclaré souhaiter poursuivre la procédure de divorce, dont l'instruction venait de reprendre. Le juge des mesures protectrices était donc incompétent : la requête et l'appel de A______ devaient dès lors être déclarés irrecevables. Le curateur a affirmé qu'il ignorait auparavant l'existence de cette procédure de divorce.

C. Les éléments suivants résultent du dossier:

a. B______, né en ______ 1934, de nationalité togolaise, et A______ [née A______] en ______ 1966, de nationalité française, se sont mariés le ______ 2013 à E______ (GE).

Aucun enfant n'est issu de cette union.

b. Par acte du 26 janvier 2018, B______, alors représenté par une avocate qui n'est pas son curateur actuel, a introduit une demande unilatérale de divorce assortie de mesures provisionnelles auprès du Tribunal. Il a, notamment, conclu à ce qu'aucune contribution d'entretien ne soit due entre les parties.

Cette cause, référencée sous le numéro C/1______/2018, a été suspendue par ordonnance du Tribunal du 26 juin 2018, "jusqu'à droit jugé sur la procédure pendante au TPAE".

La procédure de divorce est attribuée à un autre juge du Tribunal que celui ayant statué sur mesures protectrices.

c. Par ordonnance n° DTAE/1505/2019 du 8 mars 2019, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (TPAE), statuant sur mesures provisionnelles, a institué une curatelle de représentation et de gestion en faveur de B______ et désigné Me D______ aux fonctions de curateur, avec pour tâches de représenter son pupille dans ses rapports avec les tiers, gérer ses revenus et biens et administrer ses affaires courantes. L'exercice des droits civils de B______ a été limité en matière contractuelle. Pour le surplus, le curateur a été autorisé à défendre les intérêts de l'intéressé dans le cadre de son divorce.

d. Par acte du 15 septembre 2021, A______ a saisi le Tribunal de première instance d'une requête de mesures protectrices de l'union conjugale, aux termes de laquelle elle a réclamé de son époux une contribution d'entretien de 3'890 fr. par mois dès le dépôt de sa requête, le versement immédiat d'un montant unique de 4'500 fr., ainsi qu'une provisio ad litem de 4'000 fr.

B______ a conclu au déboutement de son épouse.

e. La cause a été gardée à juger à l'issue d'un délai de 10 jours après transmission par le greffe des dernières déterminations des parties les 18 et 19 novembre 2021 (étant précisé que l'époux a reçu celle de son épouse le 22 du même mois).

f. La procédure de divorce a repris en mars 2022, par une audience appointée par le Tribunal le 10 mai 2022.

g. La situation personnelle et financière des parties se présente comme suit:

g.a Retraité de [l'organisation internationale] F______, B______ perçoit à ce titre une rente de l'ordre de 8'430 fr. par mois, à laquelle s'ajoute une rente AVS mensuelle d'environ 240 fr.

B______ était propriétaire d'un appartement d'une surface de 113.5 m2 au 3ème étage de l'immeuble sis no. ______ chemin 3______ à E______, qu'il avait acquis en 2007, soit plusieurs années avant le mariage.

Par acte de vente notarié du 31 janvier 2020, instrumenté par Me G______, notaire à Genève, B______, représenté par son curateur, a vendu l'appartement précité à H______, pour un montant de 900'000 fr., dont à déduire les dettes hypothécaires. Selon l'acte de vente, les parties au contrat avaient convenu que B______ pouvait rester dans l'appartement pour une durée indéterminée, au bénéfice d'un contrat de bail inscrit au Registre foncier, moyennant le versement d'un loyer de 3'000 fr. par mois, charges en sus. Il y était précisé que l'épouse, A______, avait quitté la Suisse pour se rendre en Afrique (alors qu'elle se trouvait hospitalisée en France; cf. let. g.b. ci-dessous, 4ème §) et que l'appartement précité ne constituait pas un logement familial, ce à quoi l'épouse avait acquiescé.

L'acquéreur s'engageait à ne pas résilier le bail à loyer tant que B______ serait en vie, sous réserve du non-paiement du loyer ou du placement du locataire en EMS. Si celui-ci devait s'établir dans une maison de retraite, le délai pour la résiliation du bail était de 3 mois. En cas de décès de B______, le bail devait automatiquement s'éteindre.

A la suite de la vente de l'appartement de E______ – intervenue, selon les dires de B______, aux fins de rembourser des dettes importantes des époux –le précité disposait sur son compte personnel [auprès de la banque] I______, IBAN 2______, d'un solde de 218'769 fr. 41 à fin août 2021 (alors qu'il était de 229'957 fr. au début du mois), ce qui constitue sa seule fortune.

En raison d'une péjoration de son état de santé, B______ est devenu résident de l'EMS J______ (Fondation C______), depuis le 23 juillet 2021. Le coût total de cette prise en charge en EMS revient à 8'162 fr. par mois.

Le Tribunal a retenu que les charges mensuelles de l'époux totalisaient 8'787 fr. 50, ce qui comprenait le coût de sa prise en charge en EMS, sa participation aux frais médicaux/prime d'assurance-maladie (125 fr. 50) et les frais de curatelle (500 fr.). La charge fiscale a été exclue du budget de l'époux, vu la situation financière des parties.

Depuis son entrée en EMS, la majeure partie des revenus de B______ sont consacrés au paiement de la pension de cet établissement, sa fortune étant par ailleurs entamée chaque mois pour couvrir ses autres frais.

g.b A______ a indiqué bénéficier d'une rente d'invalidité française, ce que l'époux a admis. Devant le Tribunal, elle a expliqué que cette rente était perçue en raison de problèmes de pieds (épines kalcanéennes). A teneur des pièces produites, une rente de 775.31 EUR est versée depuis 2009 en faveur de "A______" pour une invalidité à 50%, selon décision de la Caisse primaire d'assurance-maladie de K______ (CPAM K______). Selon les relevés de compte bancaire versés à la procédure, A______ a reçu de la CPAM L______ des versements de 852.85 EUR en juillet et août 2021, puis de 857.14 EUR en septembre 2021.

L'épouse a par ailleurs exposé qu'avant le mariage, elle avait débuté une formation d'aide-soignante en milieu hospitalier en France et travaillait comme assistante médicale. Elle n'avait pas achevé cette formation et avait interrompu l'activité précitée, d'une part en raison de ses problèmes physiques, d'autre part pour s'occuper de son époux, qui était âgé de 79 ans au moment du mariage et souffrait de problèmes de santé. A______ n'a ainsi pas travaillé de manière rémunérée durant la vie commune. B______ a cependant fait valoir que son épouse serait en mesure d'obtenir un emploi au moins à 50%, ce qui lui permettrait de percevoir un revenu de l'ordre de 2'000 fr. nets par mois.

A______ a contesté que son état de santé lui permette de travailler, notamment du fait que la position debout n'était pas possible de manière prolongée. Elle a par ailleurs allégué qu'elle souffrait de graves problèmes de dépression depuis fin 2019, sans que cela ne soit justifié par pièce.

Elle a séjourné du 5 décembre 2019 au 5 mars 2020 au Centre Hospitalier de M______ (France), mais les causes de son hospitalisation ne résultent pas des documents fournis. Selon un certificat médical établi le 3 septembre 2021, le médecin traitant de A______ a confirmé que depuis quelques mois, l'intéressée lui avait fait part d'un état d'anxiété croissant lié à des difficultés personnelles dans le contexte d'un conflit de couple; cela avait une répercussion sur le plan somatique, avec une tension artérielle qui était devenue labile. Un médecin des HUG a par ailleurs attesté que A______ était suivie auprès du programme de jour du centre ambulatoire de psychiatrie et psychothérapie intégrées (CAPPI) de O______, à raison de 3-4 fois par semaine. Aucune pièce du dossier ne mentionne une incapacité de travail.

Depuis le mois de novembre 2020, B______ a versé mensuellement un montant de 1'000 fr. à son épouse. Jusqu'à son entrée en EMS, il a par ailleurs pris en charge d'autres frais, tels que sa prime d'assurance-maladie.

Au moment du dépôt de la requête de mesures protectrices, A______ vivait encore (comme cela semble être toujours le cas à ce jour) dans l'appartement situé au no. ______ chemin 3______ à E______. Le contrat de bail liant B______ à H______ a toutefois été résilié pour le 30 septembre 2021, en raison de l'entrée de B______ en EMS. Le 21 octobre 2021, la propriétaire des locaux a saisi le Tribunal de première instance d'une action en revendication et en paiement dirigée à l'encontre de l'épouse, puisque le logement était occupé sans droit et que le paiement de l'indemnité pour occupation illicite, d'un montant mensuel de 3'250 fr., n'avait pas été honoré pour le mois en cours. A______ a indiqué ne pas s'opposer à quitter cet appartement, pour autant qu'elle trouve une solution de relogement, si possible moins chère.

Le Tribunal a arrêté les charges mensuelles incompressibles de l'épouse à 2'719 fr. 50, comprenant 1'000 fr. de loyer (estimation pour un logement de deux pièces dans le canton, sur la base des statistiques genevoises, vu la résiliation du bail relatif à l'appartement qu'elle occupait), 449 fr. 45 de prime d'assurance-maladie, 70 fr. d'abonnement TPG et 1'200 fr. d'entretien de base OP.

Dans sa requête, A______ avait chiffré sa charge de loyer à 1'500 fr.

EN DROIT

1. 1.1 Interjeté dans le délai utile de dix jours (art. 271 let. a et 314 al. 1 CPC) et suivant la forme prescrite par la loi (art. 130, 131, 311 al. 1 CPC) à l'encontre d'une décision rendue sur mesures protectrices de l'union conjugale - laquelle doit être considérée comme une décision provisionnelle au sens de l'art. 308 al. 1 let. b CPC (ATF 137 III 475 consid. 4.1) - qui statue sur des conclusions pécuniaires dont la valeur litigieuse est, compte tenu du montant de la contribution d'entretien en cause, supérieure à 10'000 fr. (art. 91 ss et 308 al. 2 CPC), l'appel est recevable.

1.2 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC). Toutefois, les mesures protectrices de l'union conjugale étant soumises à la procédure sommaire, la cognition de la Cour est limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit, l'exigence de célérité étant privilégiée par rapport à celle de sécurité (ATF 127 III 474 consid. 2b/bb = JdT 2002 I 352; arrêt du Tribunal fédéral 5A_392/2014 du 20 août 2014 consid. 1.5).

1.3 La présente procédure est soumise aux maximes inquisitoire sociale (art. 272 CPC) et de disposition (art. 58 al. 1 CPC) en ce qui concerne la contribution due à l'entretien de l'épouse.

Le tribunal examine d'office si les conditions de recevabilité sont remplies (art. 60 CPC). Cette obligation imposée au tribunal ne signifie pas qu'il doive rechercher lui-même les faits justifiant la recevabilité de la demande. L'examen d'office ne dispense pas les parties de collaborer à l'établissement des faits, en alléguant ceux qui sont pertinents et en indiquant les moyens de preuve propres à les établir (ATF 141 III 294 consid. 6.1; 139 III 278 consid. 4.3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_165/2021 du 18 janvier 2022 consid. 3.2.2).

2. 2.1
2.1.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b).

L'allégation globale d'un ensemble de faits par simple référence aux pièces produites n'est pas suffisante; à plus forte raison, un ensemble de faits passés entièrement sous silence dans les mémoires, même s'il peut être reconstitué par l'étude de pièces, n'est pas valablement introduit dans le procès et il est donc nouveau si une partie s'avise de s'en prévaloir en appel seulement (arrêt du Tribunal fédéral 4A_309/2013 du 16 décembre 2013 consid. 3.2 et les références citées).

Si les moyens de preuve nouvellement offerts se rapportent à des faits survenus avant la clôture de la procédure probatoire de première instance, il ne suffit pas, pour considérer que la condition de l'art. 317 al. 1 CPC est remplie, que la partie intéressée les ait obtenus ensuite, ni qu'elle affirme, sans le démontrer, qu'elle n'y a pas eu accès auparavant, ou qu'elle ne pouvait pas se rendre compte de la nécessité de les produire antérieurement (arrêt du Tribunal fédéral 5A_86/2016 du 5 septembre 2016 consid. 2.2).

La Cour examine d'office la recevabilité des faits et moyens de preuve nouveaux produits en appel (Reetz/Hilber, Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 3ème éd. 2017, n. 26 ad art. 317 CPC).

2.1.2 Même lorsque le procès au fond est régi par la maxime des débats (art. 55 al. 1 CPC), l'établissement des faits nécessaires pour juger des conditions de recevabilité est soumis à la maxime inquisitoire simple (ATF 139 III 278 consid. 4.3; arrêts du Tribunal fédéral 4A_165/2021 du 18 janvier 2022 consid. 3.2.2 ; 4A_100/2016 du 13 juillet 2016 consid. 2.1). Ainsi, en appel, étant donné que l'instance d'appel doit vérifier les conditions de recevabilité devant l'instance précédente d'office même sans grief correspondant, elle peut établir d'office les faits pertinents, pour peu qu'ils puissent conduire à déclarer la demande irrecevable. Il n'y a donc pas lieu d'appliquer sur ce point l'art. 317 al. 1 CPC (arrêt du Tribunal fédéral 4A_229/2017 du 7 décembre 2017 consid. 3.4.3).

2.2 En l'espèce, l'appelante a nouvellement versé à la procédure un acte de mariage daté du ______ 2004, un relevé d'identité bancaire au nom de A______ [nom du précédent mariage], un courrier du 15 octobre 2010, des relevés de prestations relatifs à des indemnités journalières perçues durant les années 2008 à 2010, la copie d'une pièce d'identité française délivrée en octobre 2010 au nom de A______ épouse [de] P______, sa police d'assurance-maladie pour l'année 2022 (document établi le 12 octobre 2021), des informations tirées d'Internet au sujet de son assurance-maladie, du syndrome de Cotard et du financement d'un séjour en EMS, ainsi qu'une feuille d'informations du Centre d'action sociale de E______ de novembre 2020. L'ensemble de ces documents, ainsi que les allégués qui s'y rapportent (par exemple, les alléguées n° 16, 24 et 25 de l'appel concernant des frais médicaux non couverts par l'assurance-maladie ou ceux relatifs à son premier patronyme de femme mariée) sont irrecevables au stade de l'appel, puisqu'ils auraient pu être produits, respectivement invoqués devant le Tribunal en faisant preuve de diligence. Il en va de même de l'allégué selon lequel sa capacité de travail résiduelle n'aurait jamais été examinée dans le cadre de son suivi.

Par ailleurs, en ce qui concerne les problèmes de santé de l'appelante, le rapport psychiatrique établi par un médecin des HUG le 9 décembre 2021 est certes postérieur au jugement entrepris, mais l'appelante n'explique pas les raisons pour lesquelles elle aurait été empêchée de l'obtenir au cours de la procédure de première instance, alors que le trouble dépressif allégué date de 2019. Ce document, ainsi que les faits qui s'y rapportent (cf. allégués n° 5, 7, 9, 11 à 15 de l'acte d'appel), sont donc également irrecevables en seconde instance.

Se référant à une pièce produite en première instance, l'appelante fait nouvellement valoir que le relevé de compte de son époux indique un versement de 11'100 fr. en faveur d'un spécialiste en chirurgie cardiaque. Conformément aux règles rappelées supra, cet allégué nouveau, bien que fondé sur une pièce valablement versée au procès, est aussi irrecevable.

Pour sa part, l'intimé a produit un relevé de son compte bancaire au 30 novembre 2021. Or, ce document aurait également pu être versé à la procédure en première instance, puisque le Tribunal a gardé la cause à juger à l'échéance d'un délai de dix jours après que l'intéressé eut reçu, le 22 novembre 2021, les déterminations de son épouse du 17 novembre 2021. Ce document et les faits qui en résultent ne seront dès lors pas pris en considération.

Pour le surplus, les documents relatifs aux recherches effectuées par les parties sur Internet concernant le prix d'un logement de deux pièces à Genève ainsi que les démarches effectuées par l'appelante auprès de l'Hospice général sont recevables puisqu'ils datent de décembre 2021, étant cependant relevé qu'ils sont dépourvus de pertinence pour l'issue du litige.

2.3 S'agissant des faits nouveaux ayant trait à l'existence d'une procédure de divorce introduite en 2018, ils sont recevables, car concernant l'examen de la recevabilité de la demande et pouvant donc être constatés d'office par la Cour.

3. La première question à examiner est celle de l'influence de la procédure de divorce préexistante sur la présente procédure.

3.1
3.1.1
De jurisprudence constante, dès qu'une action en divorce d'un des conjoints est pendante devant un tribunal compétent, que ce soit devant un tribunal suisse ou étranger, des mesures protectrices de l'union conjugale ne peuvent plus être prises pour la période postérieure à la litispendance, seules des mesures provisoires (selon l'art. 276 al. 1 CPC qui renvoie aux dispositions régissant la protection de l'union conjugale, applicables par analogie) pouvant encore être ordonnées durant la procédure de divorce (ATF 134 III 326 consid. 3.2 = JdT 2009 I 215). Une procédure de protection de l'union conjugale ne devient toutefois pas sans objet du seul fait de l'ouverture d'un procès en divorce. C'est le début de la litispendance qui détermine la compétence du tribunal des mesures protectrices de l'union conjugale : pour le laps de temps qui précède ce moment, c'est le tribunal des mesures protectrices de l'union conjugale qui prend toutes les mesures aux fins de régler la vie séparée (celui-ci reste donc compétent jusqu'à ce moment pour prendre des mesures même si sa décision intervient postérieurement à ce moment), et pour le temps qui le suit, c'est le tribunal du divorce qui est compétent. La décision du tribunal des mesures protectrices de l'union conjugale prise en vertu de sa compétence déploie des effets jusqu'à ce que le juge du divorce ait pris d'autres mesures (ATF 129 III 60 consid. 3 = JdT 2003 I p. 45). Lorsque le magistrat de première instance a statué en qualité de juge des mesures protectrices - alors qu'une procédure en divorce était pendante à l'étranger et que seules des mesures provisoires auraient pu être ordonnées en Suisse -, cette seule informalité ne suffit pas à justifier l'annulation de la décision, lorsque personne ne soutient que les dispositions prises par le premier juge n'auraient pas pu être ordonnées comme mesures provisoires (ATF 134 III 326 précité).

3.1.2 Selon l'art. 59 CPC, le tribunal n'entre en matière que sur les demandes et les requêtes qui satisfont aux conditions de recevabilité de l'action (al. 1), qui sont, notamment, les suivantes : le tribunal est compétent à raison de la matière et du lieu (al. 2 let. b) et le litige ne fait pas l'objet d'une litispendance préexistante (al. 2 let. d).

La litispendance est créée par le dépôt de la requête de conciliation, de la demande ou de la requête en justice (art. 62 al. 1 CPC; ATF 141 III 101 consid. 5.6, arrêt du Tribunal fédéral 5A_184/2015 du 22 janvier 2016 consid. 4.3). Elle a principalement pour effet que la même cause, opposant les mêmes parties, ne peut être portée en justice devant une autre autorité (art. 64 al. 1 let. a CPC). Le juge saisi en deuxième peut, par exemple, décider de suspendre la procédure en attendant l'issue de la procédure antérieure (ATF 141 III 549 consid. 6.5).

Le tribunal saisi examine d'office si les conditions de recevabilité sont remplies (art. 60 CPC).

Si le tribunal se prononce malgré le défaut d'une condition de recevabilité, ce au lieu de refuser d'entrer en matière, le jugement peut souffrir d'une grave lacune et, selon les circonstances, être entaché de nullité (ATF 140 III 227 consid. 3.3; 137 III 217 consid. 2.4.3). Il faut ainsi différencier quelle condition de recevabilité est en cause, puisque, par exemple, l'absence de compétence ratione loci peut être guérie par le consentement d'une partie. Il doit être dans l'intérêt public d'éviter la survenance du vice de procédure en question. Selon la jurisprudence et la doctrine, l'absence d'une condition de recevabilité doit être examinée à tous les stades de la procédure et d'office, même si le vice n'est apparu qu'au stade de la procédure de recours et qu'un jugement a été rendu en première instance en dépit de ce vice (ATF 130 III 430 consid. 3.1). La nullité doit de toute manière être constatée de tout temps et par toutes les autorités saisies, même au stade du recours (ATF 137 III 217 consid. 2.4.3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_229/2017 du 7 décembre 2017 consid. 3.2).

Selon la jurisprudence, la nullité absolue d'une décision, qui peut être invoquée en tout temps devant toute autorité et doit être constatée d'office, ne frappe que les décisions affectées d'un vice qui doit non seulement être particulièrement grave, mais doit aussi être manifeste ou dans tous les cas clairement reconnaissable, et pour autant que la constatation de la nullité ne mette pas sérieusement en danger la sécurité du droit. Hormis dans les cas expressément prévus par la loi, il n'y a lieu d'admettre la nullité qu'à titre exceptionnel, lorsque les circonstances sont telles que le système d'annulabilité n'offre manifestement pas la protection nécessaire. Entrent principalement en ligne de compte comme motifs de nullité la violation grossière de règles de procédure ainsi que l'incompétence qualifiée (fonctionnelle ou matérielle) de l'autorité qui a rendu la décision; en revanche, des vices de fond n'entraînent qu'à de rares exceptions la nullité d'une décision (cf. ATF 145 III 436 consid. 4 et les arrêts cités; 137 I 273 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 2C_573/2020 du 22 avril 2021 consid. 5).

3.1.3 L'art. 52 CPC impose à quiconque participe à la procédure de se conformer aux règles de la bonne foi, principe qui contraint le plaideur à se prévaloir de ses moyens au moment prévu par la loi et sans tarder. Il est ainsi contraire au principe de la bonne foi d'invoquer après coup des moyens que l'on avait renoncé à faire valoir en temps utile en cours de procédure, parce que la décision intervenue a finalement été défavorable (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2; arrêt du Tribunal fédéral 5D_136/2014 du 3 février 2015 consid. 4.2.2). La bonne foi impose également de soulever l'exception d'incompétence préalablement à toute défense au fond (ATF 128 III 50 consid. 2c/aa), règle qui est d'ailleurs expressément inscrite à l'art. 18 CPC (acceptation tacite de compétence locale; arrêt du Tribunal fédéral 5D_136/2014 précité, consid. 4.2.2).

Dans l'arrêt du 3 février 2015 précité, le Tribunal fédéral a ainsi jugé que sauf à violer le principe de la bonne foi, une partie ne pouvait pas attendre la seconde instance pour prétendre que la valeur litigieuse avancée par l'autre était manifestement erronée afin de contester la compétence du Tribunal cantonal et, par voie de conséquence, celle de l'autorité de première instance.

Dans un arrêt rendu le 20 février 2015, le Tribunal fédéral a cependant relevé que la compétence matérielle était une condition de recevabilité s'examinant d'office (art. 60 CPC) et dès lors pas seulement sur exception d'une partie. Si un tribunal incompétent à raison de la matière prononçait une décision, celle-ci souffrait en effet d'un vice important qui selon les circonstances, pouvait avoir pour conséquence sa nullité. L'instance cantonale supérieure devait dès lors examiner d'office la compétence matérielle de l'instance précédente, même sans grief des parties à cet égard. Le fait de soulever une exception d'incompétence ne pouvait par conséquent tomber sous le coup de l'abus de droit (arrêt du Tribunal fédéral 4A_488/2014 du 20 février 2015 consid. 3.2 n.p. in ATF 141 III 137).

Dans un arrêt rendu le 26 octobre 2018, le Tribunal fédéral, se fondant sur un arrêt publié (ATF 105 II 149 consid. 3a i.f., JdT 1980 I 177), a néanmoins rappelé que l'application des règles de la bonne foi n'était pas limitée aux conditions de recevabilité concernant la compétence ou la composition du tribunal, ou aux conditions que le juge ne serait pas en mesure de détecter d'office. Cette règle pouvait au contraire être opposée en cas d'invocation tardive des exceptions d'irrecevabilité, qu'elles doivent être examinées d'office ou non (arrêt du Tribunal fédéral 5A_347/2018 du 26 octobre 2018 consid. 3.2.4 commenté in RSPC 1/2019 n. 2183).

3.1.4 Selon l'art. 86 al. 1 LOJ, le Tribunal de première instance - qui siège dans la composition d'un juge unique (art. 85 LOJ) - est compétent pour tous les actes de la juridiction civile contentieuse ou non contentieuse que la loi n'attribue pas à une autre autorité judiciaire ou administrative.

Il s'ensuit que le Tribunal est compétent pour connaître des requêtes de mesures protectrices et des requêtes de mesures provisoires de divorce dans une composition identique.

3.1.4 Il y a formalisme excessif, constitutif d'un déni de justice formel prohibé par l'art. 29 al. 1 Cst., lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi et complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l'accès aux tribunaux (ATF 145 I 201 consid. 4.2.1 et les arrêts cités; arrêt du Tribunal fédéral 4A_578/2021 du 26 novembre 2021 consid. 3.1).

3.2
3.2.1
Il est en l'occurrence constant qu'au moment où l'appelante a saisi le Tribunal de la requête de mesures protectrices de l'union conjugale litigieuse une autre Chambre du même Tribunal était déjà saisie d'une demande unilatérale en divorce formée par l'intimé. Il en résulte que, à tout le moins aussi longtemps que cette demande en divorce n'avait pas été déclarée irrecevable ou rejetée, des mesures protectrices de l'union conjugale ne pouvaient être prononcées. La requête de l'appelante du 15 septembre 2021 aurait donc dû être déclarée irrecevable ou, à tout le moins, transmise au juge du divorce ou suspendue jusqu'à droit jugé sur la demande de divorce.

Les conséquences de ce vice sur la situation juridique des parties sont cependant, dans le cas d'espèce, d'une importance restreinte, ne justifiant pas que la décision contestée soit considérée comme nulle.

S'il est vrai en premier lieu que le magistrat ayant statué sur les mesures protectrices n'était pas, à raison de la personne, le juge du divorce, il n'en était pas moins matériellement compétent, selon les règles d'organisation judiciaire applicables, pour statuer sur mesures provisoires de divorce. Il l'a par ailleurs fait dans la même composition que celle prévue pour des mesures provisionnelles de divorce. De fait, il aurait tout à fait pu - en cas d'empêchement du magistrat traitant de la procédure en divorce - connaître en qualité de suppléant (art. 33 al. 1 LOJ) d'une requête de mesures provisionnelles formée dans le cadre de ladite procédure de divorce. Son incompétence fonctionnelle ou matérielle ne saurait ainsi être considérée comme qualifiée au sens de la jurisprudence.

En second lieu, les règles procédurales et matérielles régissant les mesures protectrices de l'union conjugale d'une part et les mesures provisoires de divorce d'autre part sont très largement les mêmes, l'art. 276 al. 1 CPC prévoyant du reste que les dispositions applicables aux premières le sont également, par analogie, aux secondes. En d'autres termes, le juge du divorce appelé à statuer sur une requête de mesures provisionnelles aurait appliqué les mêmes règles procédurales et matérielles pour statuer que celles sur lesquelles le juge des mesures protectrices a fondé sa décision. La voie de recours ouverte contre l'une et l'autre de ces décisions est la même et la Cour, appelée à statuer sur un appel formé contre un jugement de mesures provisoires ou de mesures protectrices de l'union conjugale, l'examinera (sous réserve de la durée de validité de ces mesures, qui n'est pas en cause en l'espèce) elle aussi sur la base des mêmes règles de droit.

En d'autres termes, la décision contestée, qui porte sur la règlementation provisoire des relations entre les parties, a été rendue par un Tribunal matériellement compétent pour connaître d'une telle problématique et ayant appliqué les dispositions pertinentes. La nullité de ladite décision ne répondrait ainsi à aucun motif impérieux. Il n'y aurait en particulier aucun sens à contraindre l'appelant à réintroduire devant le juge du divorce une procédure tendant à l'instauration d'une telle réglementation provisoire.

3.2.2 La nullité ne pouvant être retenue, il n'y a pas non plus lieu de déclarer irrecevable la requête de mesures protectrices de l'union conjugale du 15 septembre 2021.

La conclusion en ce sens formée par l'intimé, présentée en appel seulement alors qu'il ne pouvait ignorer l'existence de la procédure de divorce puisqu'il l'avait lui-même engagée, n'est à cet égard pas compatible avec les exigences de la bonne foi.

Le juge des mesures protectrices de l'union conjugale sera donc considéré comme compétent pour statuer sur les prétentions de l'appelant, sa décision étant ainsi opposable au juge du divorce qui ne pourra la modifier, sur mesures provisionnelles, qu'en application des règles prévues à l'art. 276 al. 1 et 2 CPC et 179 al. 1 CC applicable par renvoi.

4. L'appelante reproche au Tribunal d'avoir considéré que son époux n'était pas en mesure de contribuer à son entretien.

4.1.1 A la requête d'un des conjoints et si la suspension de la vie commune est fondée, le juge fixe la contribution pécuniaire à verser par l'une des parties à l'autre (art. 176 al. 1 ch. 1 CC).

Même lorsqu'on ne peut plus sérieusement compter sur la reprise de la vie commune, l'art. 163 CC demeure la cause de l'obligation d'entretien réciproque des époux en mesures protectrices de l'union conjugale. Aux termes de cette disposition, mari et femme contribuent, chacun selon ses facultés, à l'entretien convenable de la famille (al. 1); ils conviennent de la façon dont chacun apporte sa contribution (al. 2). Ce faisant, ils tiennent compte des besoins de l'union conjugale et de leur situation personnelle (al. 3).

Pour fixer la contribution d'entretien selon l'art. 176 al. 1 ch. 1 CC, le juge doit partir de la convention, expresse ou tacite, que les époux ont conclue au sujet de la répartition des tâches et des ressources entre eux. La contribution dépend ainsi des choix faits par les conjoints quant à leur niveau de vie et à la répartition de la prise en charge de l'entretien de la famille durant la vie commune. La protection de la confiance mise par chacun des conjoints dans l'organisation et la répartition choisie justifie, dans la mesure du possible, le maintien du niveau de vie existant pendant la vie commune, qui constitue la limite supérieure du droit à l'entretien. Le juge doit ensuite prendre en considération qu'en cas de suspension de la vie commune, le but de l'art. 163 CC, soit l'entretien convenable de la famille, impose à chacun des époux le devoir de participer, selon ses facultés, aux frais supplémentaires qu'engendre la vie séparée. Il se peut donc que, suite à cet examen, le juge doive modifier la convention conclue pour la vie commune, pour l'adapter à ces faits nouveaux. C'est dans ce sens qu'il y a lieu de comprendre la jurisprudence consacrée dans l'ATF 128 III 65, qui admet que le juge doit prendre en considération, dans le cadre de l'art. 163 CC, les critères applicables à l'entretien après le divorce (art. 125 CC) pour statuer sur la contribution d'entretien et, en particulier, sur la question de la reprise ou de l'augmentation de l'activité lucrative d'un époux. En revanche, le juge des mesures protectrices de l'union conjugale ne doit pas trancher, même sous l'angle de la vraisemblance, les questions de fond, objet du procès en divorce, en particulier celle de savoir si le mariage a influencé concrètement la situation financière du conjoint (ATF 137 III 385 consid. 3.1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_954/2017 du 29 janvier 2018 consid. 6; 5A_593/2017 du 24 novembre 2017 consid. 3.2; 2; 5A_651/2011 du 26 avril 2012 consid. 6.1.3.2 non publié in ATF 138 III 374).

4.1.2 Selon la méthode de calcul uniforme des contributions d'entretien du droit de la famille fixée par le Tribunal fédéral (ATF 147 III 265 in SJ 2021 I 316; ATF 147 III 293 et ATF 147 III 301), soit la méthode du minimum vital avec répartition de l'excédent (dite en deux étapes), il convient, d'une part, de déterminer les moyens financiers à disposition, à savoir les revenus effectifs ou hypothétiques et, d'autre part, de déterminer les besoins de la personne dont l'entretien est examiné (entretien convenable). Enfin, les ressources à disposition sont réparties entre les différents membres de la famille, selon un certain ordre de priorité, de manière à couvrir le minimum vital du droit des poursuites, respectivement en cas de moyens suffisants, le minimum vital du droit de la famille (ATF 147 III 265 précité consid. 7, traduit par Burgat, in Entretien de l'enfant, des précisions bienvenues: une méthode (presque) complète et obligatoire pour toute la Suisse; analyse de l'arrêt du Tribunal fédéral 5A_311/2019, Newsletter DroitMatrimonial.ch janvier 2021).

La fixation de la contribution d'entretien relève de l'appréciation du juge, qui jouit d'un large pouvoir d'appréciation et applique les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC; ATF 140 III 337 consid. 4.2.2; 134 III 577 consid. 4; 128 III 411 consid. 3.2.2).

4.1.3 Les besoins des parties sont calculés en partant du minimum vital au sens du droit des poursuites (LP). Celui-ci comprend le montant de base fixé par les normes d'insaisissabilité (OP), les frais de logement effectifs ou raisonnables, les coûts de santé, tels que les cotisations d'assurance-maladie obligatoire, les frais de transports publics et les frais professionnels, tels que les frais de repas à l'extérieur (art. 93 LP; ATF 147 III 265 précité consid. 7.2; 5A_329/2016 du 6 décembre 2016 consid. 4.1; Bastons Bulletti, L'entretien après le divorce: Méthodes de calcul, montant, durée et limites, in SJ 2007 II 77, p. 84 s. et 101 s.).

4.1.4 Pour fixer la contribution d'entretien, le juge doit en principe tenir compte du revenu effectif des parties, tant le débiteur d'entretien que le créancier pouvant néanmoins se voir imputer un revenu hypothétique supérieur. Il s'agit d'inciter la personne à réaliser le revenu qu'elle est en mesure de se procurer et qu'on peut raisonnablement exiger d'elle afin de remplir ses obligations (ATF 137 III 102 consid. 4.2.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_461/2019 du 6 mars 2020 consid. 3.1). Cette incombance s'applique en particulier lorsque la reprise de la vie commune, et donc le maintien de la répartition antérieure des tâches, ne sont ni recherchés, ni vraisemblables; le but de l'indépendance financière des époux, notamment de celui qui jusqu'ici n'exerçait pas d'activité lucrative, ou seulement à temps partiel, gagne alors en importance. Cela est également valable en matière de mesures protectrices de l'union conjugale (ATF 137 III 385 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_584/2018 du 10 octobre 2018 consid. 5.1.1).

Lorsqu'il entend tenir compte d'un revenu hypothétique, le juge doit examiner successivement deux conditions. Il doit d'abord déterminer si l'on peut raisonnablement exiger d'une personne qu'elle exerce une activité lucrative ou augmente celle-ci, eu égard, notamment, à sa formation, à son âge et à son état de santé. Le juge doit ensuite établir si la personne a la possibilité effective d'exercer l'activité ainsi déterminée et quel revenu elle peut en obtenir, compte tenu des circonstances subjectives susmentionnées, ainsi que du marché du travail (ATF 143 III 233 consid. 3.2; 137 III 102 consid. 4.2.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_461/2019 précité consid. 3.1).

Pour fixer le revenu à prendre en considération, le juge peut éventuellement se baser sur l'enquête suisse sur la structure des salaires, réalisée par l'Office fédéral de la statistique ou à d'autres sources comme les conventions collectives de travail (de Weck-Immelé, Droit matrimonial, Fond et procédure, 2016, n. 76 ad art. 176 CC).

Si le juge entend exiger d'un conjoint ou parent la prise ou la reprise d'une activité lucrative, ou encore l'extension de celle-ci, lui imposant ainsi un changement de ses conditions de vie, il doit généralement lui accorder un délai approprié pour s'adapter à sa nouvelle situation; ce délai doit être fixé en fonction des circonstances du cas particulier (ATF 129 III 417 consid. 2.2; 114 II 13 consid. 5; arrêts du Tribunal fédéral 5A_554/2017 du 20 septembre 2017 consid. 3.2 et la jurisprudence citée; 5A_235/2016 du 15 août 2016 consid. 4.1; 5A_1008/2015 du 21 avril 2016 consid. 3.3.2).

4.1.5 Si les revenus (du travail et de la fortune) suffisent à l'entretien des conjoints, la substance de la fortune n'est normalement pas prise en considération. Mais, dans le cas contraire, rien ne s'oppose, en principe, à ce que l'entretien soit assuré par la fortune, le cas échéant même par les biens propres (ATF 138 III 289 consid. 11.1.2; 134 III 581 consid. 3.3; 129 III 7 consid. 3.2.1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_823/2014 du 3 février 2015 consid. 5.4; 5A_396/2013 du 26 février 2014 consid. 5.4.2; 5A_937/2012 du 3 juillet 2013 consid. 4.2.2).

Suivant la fonction et la composition de la fortune des époux, on peut ainsi attendre du débiteur d'aliments - comme du créancier - qu'il en entame la substance. En particulier, si elle a été accumulée dans un but de prévoyance pour les vieux jours, il est justifié de l'utiliser pour assurer l'entretien des époux après leur retraite, alors que tel ne serait en principe pas le cas lorsque les biens patrimoniaux ne sont pas aisément réalisables, qu'ils ont été acquis par succession ou investis dans la maison d'habitation (ATF 129 III 7 consid. 3.1.2; arrêts du Tribunal fédéral 5A_279/2013 du 10 juillet 2013 consid. 2.1 résumé in FramPra.ch 2013 p. 1022; 5A_14/2008 du 28 mai 2008 consid. 5; 5A_827/2010 du 13 octobre 2011 consid. 5.2; 5A_664/2007 du 23 avril 2008 consid. 4.1). 

Savoir si et dans quelle mesure il peut être exigé du débirentier qu'il entame sa fortune pour assurer l'entretien courant doit être apprécié au regard des circonstances concrètes. Sont notamment d'une importance significative le standard de vie antérieur, lequel peut éventuellement devoir être diminué, l'importance de la fortune et la durée pendant laquelle il est nécessaire de recourir à celle-ci (arrêts du Tribunal fédéral 5A_25/2015 du 5 mai 2015 consid. 3.2; 5A_706/2007 du 14 mars 2008 consid. 4.4; 5P_472/2006 du 15 janvier 2007 consid. 3.2). Ainsi, la jurisprudence a déjà admis qu'on peut exiger du débirentier qui n'a pas d'activité lucrative et dont le revenu de la fortune ne permet pas de couvrir l'entretien du couple, d'entamer la substance de ses avoirs pour assurer au crédirentier la couverture du minimum vital élargi (ATF 138 III 289 consid. 11.1.2 précité) ou du train de vie antérieur (arrêt du Tribunal fédéral 5A_651/2011 du 26 avril 2012 consid. 6.1.3.2 in fine non publié aux ATF 138 III 374; cf. aussi arrêt 5A_55/2007 du 14 août 2007 consid. 4.3). 

4.2 En l'occurrence, il convient d'examiner la situation financière des époux selon le minimum vital du droit des poursuites, à l'aune des griefs formulés, afin de déterminer si la décision du premier juge est appropriée aux circonstances.

4.2.1 Les revenus mensuels de l'intimé totalisent 8'670 fr. environ pour des charges incompressibles mensuelles de l'ordre de 8'790 fr., de sorte que son budget présente un déficit de 120 fr. par mois.

A fin août 2021, sa fortune mobilière s'élevait à 218'770 fr. environ, ce montant étant uniquement constitué de biens propres.

4.2.2 Pour sa part, l'appelante, née en 1966, n'a achevé aucune formation et n'a jamais travaillé depuis son arrivée Suisse. La rente invalidité française, d'un montant mensuel moyen de 855 EUR (soit 860 fr. environ), constitue sa seule source de revenus.

Sur ce point, il y a lieu de relever que quand bien même le nom figurant sur le document relatif à la rente versée par les institutions françaises compétentes ne correspond pas à celui de l'appelante, l'intimé a admis que son épouse bénéficiait d'une rente d'invalidité à 50%. La perception de ladite rente est par ailleurs confirmée par les extraits du compte bancaire dont l'appelante est titulaire. Il n'y a ainsi pas lieu de douter qu'elle est la bénéficiaire effective de la rente dont il est question et que sa capacité de travail est réduite de 50%.

Le Tribunal a retenu que l'épouse avait échoué à rendre vraisemblable une incapacité totale de travail. Selon le premier juge, même si les documents relatifs à la rente d'invalidité française concernaient l'appelante, il n'en demeurait pas moins qu'il subsistait une capacité de travail d'au moins 50%, puisqu'aucun certificat médical versé à la procédure ne mentionnait une quelconque incapacité de travail. Il a dès lors été considéré que vu l'âge de l'appelante et la situation du couple, il pouvait être attendu d'elle qu'elle fasse les efforts nécessaires pour retrouver un travail à temps partiel.

Le jugement contesté ne précise cependant pas dans quel domaine l'appelante serait en mesure de trouver un emploi, ni quels revenus elle serait censée en retirer ou dans quel délai elle devrait intégrer le marché de l'emploi. L'appelante ayant contesté pouvoir travailler, du moins à brève échéance, il convient d'examiner toutes ces questions, afin de déterminer si un revenu hypothétique peut lui être imputé.

A cet égard, il convient de relever que rien n'indique que les problèmes d'anxiété dont souffre l'appelante auraient un impact sur sa capacité de travail et sur ses chances de réinsertion professionnelle. Elle est au demeurant suivie à raison de trois à quatre fois par semaine au sein du CAPPI, de sorte que son état d'anxiété, essentiellement lié au conflit qui l'oppose à son époux, va vraisemblablement s'améliorer avec le temps.

Ainsi, malgré les problèmes de santé allégués, l'appelante serait en mesure, en fournissant les efforts qui peuvent raisonnablement être attendus d'elle, de travailler dans le domaine du nettoyage qui ne requiert pas de formation particulière et qui offre notoirement des possibilités d'emploi. En effet, une activité de femme de ménage exercée à raison de 4 heures par jour permettrait d'alterner les positions debout et assise, ce qui serait compatible avec les problèmes de pied dont elle se prévaut (qui ne sont toutefois pas corroborés par les documents versés à la procédure).

Sur la base de la Convention collective de travail du secteur nettoyage en Suisse romande, le revenu mensuel brut que l'intimée serait en mesure de réaliser pour une activité à 50% dans le secteur du nettoyage s'élève à 2'035 fr. environ (y compris le 13ème salaire et la part correspondant au droit aux vacances), ce qui revient à environ 1'730 fr. après déduction des cotisations sociales usuelles.

Contrairement à ce que fait valoir l'intimé, il ne peut être retenu que l'appelante serait en mesure de trouver un travail dans le domaine des soins, puisqu'elle ne dispose d'aucune formation achevée dans ce domaine et que son expérience professionnelle concrète en la matière n'est pas établie. Les salaires mensuels correspondant aux activités d'aide de ménage ou de personnel soignant avec apprentissage ne peuvent pas non plus être pris en considération, dès lors que l'appelante n'a pas les qualifications requises pour prétendre à de tels revenus.

Dans la mesure où l'appelante devra vraisemblablement cumuler divers emplois (au sein de ménages privés ou en effectuant des missions pour des agences de nettoyage) pour parvenir à obtenir un taux d'activité de 50% tel que retenu ci-dessus, le revenu hypothétique susmentionné lui sera imputé à compter du mois de janvier 2023, une période de six mois depuis le prononcé du présent arrêt paraissant adéquat pour lui permettre d'adapter sa situation.

4.2.3 En ce qui concerne les charges de l'appelante, le Tribunal a retenu que quand bien même l'intéressée vivait encore dans le logement sis chemin 3______ no. ______ à E______, le bail de ce logement avait été résilié, de sorte que seul un montant de 1'000 fr. serait pris en compte à titre de loyer hypothétique, sur la base des statistiques cantonales.

La critique de l'appelante relative au montant retenu à ce titre est fondée. Le loyer moyen des logements de deux pièces (cuisine comprise) loués à de nouveaux locataires à Genève est de 1'121 fr. par mois selon les statistiques cantonales relatives aux loyers (T 05.04.2.02, disponible sur le site internet (www.ge.ch/statistique/domaines/05/05_04/tableaux.asp#5), montant auquel il convient d'ajouter les charges, qui peuvent être estimées à 150 fr. par mois. Un montant de 1'270 fr. sera dès lors retenu à titre de loyer mensuel hypothétique.

Il convient de déterminer à partir de quelle date ce montant sera pris en compte, puisque, lorsque la cause a été gardée à juger en appel, l'intéressée n'avait toujours pas quitté l'appartement susmentionné, dont le loyer s'élevait à 3'250 fr. par mois avant la résiliation du bail.

L'appelante a chiffré son loyer à 1'500 fr. dans la demande formée le 16 septembre 2021 devant le Tribunal (car elle prévoyait de déménager) et n'a pas amplifié ce poste en cours de procédure, malgré le fait qu'une action en paiement relative aux indemnités pour occupation illicite (3'250 fr. par mois) des locaux susvisés a été déposée contre elle en octobre 2021. En appel, elle a persisté à demander que son loyer soit fixé à 1'500 fr. par mois. La Cour revoyant la cause dans la limite des griefs invoqués (cf. ATF 142 III 413 consid. 2.2.4), seul le montant de 1'500 fr. sera en conséquence retenu à titre de loyer pour la période d'octobre 2021 à fin octobre 2022. A noter qu'en limitant la charge de loyer invoquée à 1'500 fr., l'appelante admet implicitement que des frais de logement de 3'250 fr. par mois ne sont pas raisonnables pour une personne seule; elle n'a cependant pas démontré avoir entrepris de quelconques démarches pour trouver une solution de relogement adaptée à sa situation. Le loyer hypothétique sera ensuite pris en compte dès le mois de novembre 2022, un délai de trois mois paraissant suffisant pour permettre à l'appelante de trouver un nouvel appartement. Aucune charge de loyer ne sera retenue pour le mois de septembre 2021, puisque celui-ci a vraisemblablement été payé par l'intimé.

Les frais médicaux non couverts par l'assurance-maladie, invoqués tardivement au stade de l'appel (cf. consid. 2.2 ci-dessus), ne peuvent être ajoutés au budget de l'appelante.

Les charges admissibles de l'appelante totalisent ainsi les montants arrondis de 1'720 fr. au mois de septembre 2021 (moment du dépôt de la requête de mesures protectrices), 3'220 fr. d'octobre 2021 à octobre 2022, puis 2'990 fr. dès novembre 2022, ce qui comprend 1'200 fr. d'entretien de base, 1'500 fr. de loyer d'octobre 2021 à octobre 2022 (puis 1'270 fr. dès novembre 2022), 449 fr. 45 de prime d'assurance-maladie et 70 fr. d'abonnement TPG.

Le budget mensuel de l'intéressée a donc présenté (respectivement présentera) un déficit de 860 fr. (860 fr. de pension d'invalidité – 1'720 fr. de charges) en septembre 2021, de 2'360 fr. (860 fr. – 3'220 fr.) d'octobre 2021 à octobre 2022, de 2'130 fr. (860 fr. – 2'990 fr.) dès novembre 2022, puis de 400 fr. (860 fr. + 1'730 fr. de revenu hypothétique – 2'990 fr.) dès janvier 2023.

3.3 Reste à examiner si la décision du Tribunal de dispenser l'époux de verser une quelconque pension alimentaire à son épouse malgré la situation financière précaire de celle-ci est adaptée aux circonstances.

Le premier juge a considéré que dans la mesure où le budget de l'intimé était déficitaire, celui-ci ne pouvait compter que sur sa fortune, laquelle était entamée à raison de plusieurs milliers de francs par mois depuis son entrée en EMS, pour faire face aux frais induits par son état de santé et son âge. En se référant à une autre cause genevoise (arrêt du Tribunal fédéral 5A_787/2016 du 12 janvier 2017 confirmant l'ACJC/121272016 du 9 septembre 2017 confirmant lui-même le jugement JTPI/3941/2016, dont il résulte que le crédirentier ne disposait d'aucune fortune et qu'il avait déposé une demande de prestations complémentaires peu avant son entrée en EMS), le Tribunal a considéré qu'il n'était pas justifié d'allouer une contribution à l'entretien de l'épouse dans le cas d'espèce, car cela diminuerait d'autant les revenus propres de l'époux et conduirait à un alourdissement de la prise en charge de son hébergement en EMS par le Service des prestations complémentaires.

Or, la comparaison avec l'affaire genevoise mentionnée ci-dessus paraît irrelevante, dans la mesure où l'intimé possède une fortune de plus de 200'000 fr., ce qui semble déjà en soi incompatible avec l'octroi de prestations complémentaires (cf. art. 9a al. 1 let. a de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI, qui dispose que les personnes seules ont droit à des prestations complémentaires si leur fortune nette est inférieure à 100'000 fr.), étant pour le surplus relevé que l'intéressé n'a déposé aucune demande en ce sens et que ses revenus mensuels suffisent pour couvrir le coût de sa prise en charge en EMS.

C'est également à tort que le premier juge a retenu que l'intimé devait entamer chaque mois sa fortune à raison de plusieurs milliers de francs, puisque son déficit mensuel s'élève à quelques 120 fr. seulement et que le retrait unique d'un montant de près de 11'200 fr. en août 2021 (le solde du compte étant passé de 229'957 fr. à 218'769 fr. 41 durant le mois en cause, sans qu'aucune explication n'ait été fournie sur ce point) ne signifie pas que des montants importants seront prélevés de manière régulière du compte bancaire de l'intéressé. L'intimé n'a d'ailleurs aucunement allégué qu'il encourrait des frais récurrents aussi considérables, étant rappelé que les frais non couverts par l'assurance-maladie, qu'il a lui-même invoqués à hauteur de 125 fr. par mois, ont dûment été pris en compte dans son budget.

Dans son raisonnement, le Tribunal a pour le surplus omis d'examiner concrètement s'il pouvait être exigé de l'intimé qu'il puise dans la substance de sa fortune pour subvenir aux besoins de son épouse. Pour répondre à cette question, il y a lieu d'établir le montant nécessaire pour couvrir les besoins de l'appelante pendant la durée des mesures protectrices de l'union conjugale, qui sont en principe appelées à durer jusqu'au prononcé du divorce. Compte tenu de la reprise de la procédure de divorce introduite précédemment, le prononcé du divorce devrait intervenir au maximum avant l'été 2023, puisque leur situation, étant donné qu'elles n'ont pas eu d'enfants, ne paraît pas particulièrement complexe. Cela étant, si l'affirmation de l'appelante selon laquelle la procédure de divorce introduite en 2018 serait vouée à l'échec (car la condition des deux ans de vie séparée (art. 114 CC) ne serait pas réalisée) s'avérait exacte, il est à prévoir que le juge de première instance statuerait avant la fin de l'année 2022 pour rendre la décision d'irrecevabilité. Il faudrait encore compter avec la durée d'une année supplémentaire pour mener à bien une nouvelle procédure de divorce, soit fin 2023. En supposant que le divorce des parties sera prononcé à cette époque, les besoins de l'appelante pour la durée des mesures protectrices peuvent être estimés à un montant total de 40'600 fr. (860 fr. + 2'360 fr. x 13 mois + 2'130 fr. x 2 mois + 400 fr. x 12).

En puisant dans sa fortune de 218'770 fr., l'intimé disposerait encore, à fin 2023, de quelque 175'000 fr. après couverture des besoins susvisés de l'appelante et de son propre déficit (120 fr. par mois x 28 mois = 3'360 fr.). Ce montant paraît ainsi suffisant pour permettre à l'intimé, actuellement âgé de 87 ans, de couvrir les éventuels frais extraordinaires qu'il pourrait être amené à supporter. Quoi qu'il en soit, même en supposant que la procédure de divorce se prolonge par rapport à l'estimation ci-dessus, la somme relativement modique de 400 fr. par mois, soit 4'800 fr. par an, que l'intimé doit verser à l'appelante laisserait encore à celui-ci une fortune suffisante pendant plusieurs années, même après déduction de cette contribution.

Le simple fait que la fortune de l'époux soit uniquement constituée de biens propres ne fait pas obstacle à ce que celle-ci soit mise à contribution pour subvenir aux besoins de son épouse. Du reste, l'intimé a lui-même expliqué que son appartement avait été vendu en vue d'éponger des dettes des époux, de sorte que les dépenses du couple ont en partie été financées au moyen de prélèvements dans la fortune issue des biens propres de l'intimé. Il peut dès lors raisonnablement être exigé de l'époux qu'il puise dans sa fortune mobilière pour continuer de pourvoir à l'entretien de son épouse, ce d'autant plus que cela concerne a priori une période limitée.

Le chiffre 2 du dispositif du jugement attaqué sera par conséquent annulé et l'intimé sera condamné à contribuer à l'entretien de son épouse à hauteur de 2'360 fr. de juillet à octobre 2022, de 2'130 fr. dès novembre 2022, puis de 400 fr. dès janvier 2023.

Il sera par ailleurs condamné à lui verser le montant de 22'100 fr. (860 fr. + 2'360 fr. x 9) à titre d'arriérés pour la période de septembre 2021 à juin 2022.

5. L'appelante a conclu à ce que son époux soit condamné à lui verser un montant de 4'500 fr. avec effet immédiat.

Faute de développements sur ce point, il ne sera pas entré en matière sur ce chef de conclusion.

6. Lorsque l'instance d'appel statue à nouveau, elle se prononce sur les frais de la première instance (art. 318 al. 3 CPC).

Le premier juge a mis les frais judiciaires, arrêtés à 200 fr., à la charge des parties pour moitié chacune et n'a pas alloué de dépens.

Les parties ne critiquent ni la quotité ni la répartition des frais de première instance, laquelle apparaît au demeurant conforme aux règles applicables. Une modification de la décision entreprise sur ces points ne s'impose dès lors pas.

7. L'appelante réclame une provisio ad litem de 3'500 fr. pour la procédure de seconde instance.

7.1.1 Une provisio ad litem est due à l'époux qui ne dispose pas lui-même des moyens suffisants pour assumer les frais du procès (ATF 146 III 203 consid. 6.3).

Le fondement de cette prestation - devoir d'assistance (art. 159 al. 3 CC) ou obligation d'entretien (art. 163 CC) - est controversé (ATF 142 III 36 consid. 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_62/2011 du 26 juillet 2011 consid. 2.2), mais cet aspect n'a pas d'incidence sur les conditions qui président à son octroi.

La conclusion en paiement d'une provisio ad litem ne peut être déclarée sans objet, respectivement rejetée, du seul fait que la procédure est arrivée à son terme. En effet, lorsque des frais de procédure ont été mis à la charge de la partie qui a sollicité la provisio ad litem et que les dépens ont été compensés, savoir si celle-ci dispose des moyens suffisants pour assumer lesdits frais est une question qui – comme lorsqu'il a été renoncé provisoirement à exiger une avance de frais et qu'il a été sursis à statuer sur l'octroi de l'assistance judiciaire – continue de se poser au moment où la décision finale est rendue (arrêts du Tribunal fédéral 5D_66/2020 du 14 août 2020 consid. 3.2; 5A_590/2019 du 13 février 2020 consid. 3.5).

7.1.2 Les frais judiciaires et les dépens sont répartis entre les parties en application des art. 106 s. CPC, la règle étant qu'ils sont en principe mis à la charge de la partie qui succombe (art. 106 al. 1 CPC).

Le tribunal est toutefois libre de s'écarter de cette règle et de les répartir selon sa libre appréciation dans les hypothèses prévues par l'art. 107 CPC, notamment lorsque le litige relève du droit de la famille (art. 107 al. 1 let. c CPC); il n'est ainsi pas exclu, dans ce type de procédure, que la partie qui obtient gain de cause soit condamnée à supporter des frais (arrêt du Tribunal fédéral 5A_835/2015 du 21 mars 2016 consid. 9.1 et les références). Rien n'empêche cependant le Tribunal d'en rester à une répartition selon l'art. 106 al. 1 ou 2 CPC, notamment en cas de litige entre époux portant essentiellement sur les conséquences pécuniaires d'un divorce (Tappy, Commentaire romand, CPC, 2ème éd. 2019, n. 17 ad art. 107 CPC).

7.2 En l'occurrence, les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 1'000 fr. Vu l'issue du litige, lesdits frais seront mis à la charge de l'intimé. Celui-ci sera dès lors condamné à verser 1'000 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Il sera par ailleurs condamné à verser 2'000 fr. à l'appelante à titre de dépens d'appel, débours et TVA inclus (art. 25 et 26 al. 1 LaCC; art. 84 et ss RTFMC).

Au regard de la solution adoptée au sujet des frais de seconde instance, la demande de provisio ad litem est sans objet.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :


A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 13 décembre 2021 par A______ contre le jugement JTPI/15159/2021 rendu le 2 décembre 2021 par le Tribunal de première instance dans la cause C/17677/2021.

Au fond :

Annule le chiffre 2 du dispositif de ce jugement et statuant à nouveau:

Condamne B______ à contribuer à l'entretien de A______, par mois et d'avance, à hauteur de 2'360 fr. de juillet 2022 à octobre 2022, de 2'130 fr. dès novembre 2022, puis de 400 fr. dès janvier 2023.

Condamne B______ à verser à A______ le montant de 22'100 fr. à titre de contribution d'entretien pour la période de septembre 2021 à juin 2022.

Confirme le jugement entrepris pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'000 fr. et les met à la charge de B______.

Condamne B______ à verser 1'000 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui aux Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Condamne B______ à verser 2'000 fr. à A______ à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Monsieur Patrick CHENAUX, Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Madame Gladys REICHENBACH, greffière.

 

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Gladys REICHENBACH


 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure à 30'000 fr.