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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1919/2015

ATA/802/2016 du 27.09.2016 ( AIDSO ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1919/2015-AIDSO ATA/802/2016

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 27 septembre 2016

1ère section

 

dans la cause

 

Mme A______

contre

HOSPICE GÉNÉRAL



EN FAIT

1. En date du 30 janvier 2014, Mme A______, née en 1968 et de nationalités suisse et marocaine, séparée de fait depuis le 20 août 2013 de M. A______, a déposé auprès de l’Hospice général (ci-après : l’hospice) une demande de prestations d’aide sociale financière.

Vivaient sous le même toit sa mère et, au titre de colocataire, M. B______. Sa fille, née en 1995, ne vivait plus sous son toit.

Avec M. B______, elle était débitrice du loyer de son appartement de cinq pièces, qui se montait à CHF 1'866.- mensuels, provision pour chauffage et eau chaude de CHF 175.- en sus, et d’une place de parc de CHF 150.-. Ses charges personnelles consistaient en des cotisations AVS pour personnes sans activité lucrative, des poursuites pour CHF 7'000.-, les primes d’assurance-maladie, ainsi que les dettes hypothécaires.

Elle avait un bien immobilier au Maroc.

2. Le même jour, Mme A______ a signé le document intitulé « Mon engagement en demandant une aide financière à l’Hospice général », à teneur duquel, notamment, elle prenait acte que les prestations d’aide financière étaient subsidiaires à toutes autres ressources provenant du travail, de la famille, de la fortune ou d’une prestation sociale.

3. Il n’est pas contesté par Mme A______ que lors de l’entretien au centre d’action sociale (ci-après : CAS) du 5 février 2014, l’assistante sociale chargée de son dossier lui a expliqué qu’en tant que propriétaire d’un bien immobilier à l’étranger, elle n’avait pas droit à une aide financière. Cependant, pour tenir compte de sa situation sociale et personnelle, elle lui a indiqué que l’hospice acceptait de lui accorder une aide financière remboursable d’une durée maximale de trois mois destinée à lui laisser le temps de prendre des dispositions voulues pour réaliser son bien ou trouver une autre solution lui permettant de ne pas devoir recourir à l’aide de l’hospice. L’assistante sociale lui a demandé de lui remettre les documents suivants : l’acte de propriété, l’estimation de la valeur du bien immobilier, ainsi qu’un extrait du registre foncier portant sur ledit bien. Mme A______ a exposé que tous les documents relatifs à son immeuble se trouvaient au Maroc et qu’elle n’avait pas les moyens de s’y rendre pour les réunir. Par ailleurs, elle ne connaissait personne sur place susceptible de rassembler ces documents.

4. Mme A______ a été mise au bénéfice de prestations d’aide financière remboursables avec effet au 1er mars 2014, moyennant la signature chaque mois d’une reconnaissance de dette.

5. Le 28 février 2014, l’hospice a reçu de Mme A______ une copie de l’ordonnance de mesures provisionnelles du Tribunal de première instance (ci-après : TPI) du 27 février 2014, lequel, dans le cadre de la procédure introduite par la requête unilatérale en divorce de l’époux M. A______, déboutait l’intéressée de toutes ses conclusions sur mesures provisionnelles, en particulier de sa demande de versement d’une provision ad litem de CHF 5'000.-. Le TPI se fondait sur les allégations de Mme A______, ainsi que sur les pièces produites par celle-ci, dont il ressortait notamment ce qui suit. Elle avait travaillé en qualité de secrétaire auprès de l’État de Genève de 2001 à fin décembre 2008, après quoi, elle avait selon ses indications été incapable de travailler pour cause de maladie. Elle ne percevait pas de contribution d’entretien de ses deux précédents époux et indiquait vivre grâce à l’aide de sa mère, de sa sœur et de deux amis masculins, dont M. B______, avec lequel elle partageait son appartement du Grand-Saconnex, en colocation depuis 2004. Elle était copropriétaire avec sa mère d’un appartement sis au Maroc acquis au moyen d’un crédit initial de Euros 70'000.- en 2006. Les mensualités s’élevaient à Euros 1'000.- à payer entre l’intéressée et sa mère pendant encore un an. Ses charges incompressibles comprenaient la moitié de ce montant au titre de loyer, soit Euros 500.- correspondant à CHF 610.80. Aucun montant ne pouvait être retenu au titre de primes d’assurance-maladie suisse, lesquelles étaient impayées depuis janvier 2010. Mme A______ ne payait pas de loyer en Suisse. Elle n’avait plus d’enfants à charge, puisque sa fille était majeure et étudiait en France.

6. Lors de l’entretien du 12 mars 2014, Mme A______ a indiqué à l’assistante sociale que son immeuble sis au Maroc était loué et que le loyer servait à payer les charges.

Elle a produit la traduction certifiée conforme d’un contrat de bail signé le 26 février 2014, par lequel elle louait à un ressortissant marocain un appartement à usage d’habitation dans la résidence C______ no ______, route de D______, 2e étage, Casablanca, équipé d’eau et d’électricité, pour le loyer mensuel de 2'500.- Dirhams, à compter du 1er mars 2014 et pour une durée indéterminée.

7. Lors d’un entretien du 21 mai 2014, Mme A______ a déclaré à l’hospice qu’elle n’était pas en mesure de vendre son bien immobilier.

8. À titre exceptionnel, l’aide financière remboursable a été prolongée par l’hospice au-delà de la période initiale de trois mois.

9. Lors d’un entretien que Mme A______ a eu le 28 juillet 2014 avec sa nouvelle assistante sociale de l’hospice, elle a expliqué avoir acquis son appartement à Casablanca à l’époque où elle travaillait pour l’État de Genève, au moyen d’une aide financière de sa mère qui avait vendu un bien lui appartenant à cette effet et d’un emprunt dont les intérêts et l’amortissement avaient été payés par sa sœur au cours de l’année écoulée. Elle a précisé que son appartement était loué au ressortissant marocain susmentionné pour un loyer mensuel de CHF 271.- environ, loyer qui couvrait les charges.

L’assistante sociale l’a priée d’envoyer une procuration à sa sœur qui se trouvait au Maroc, afin qu’elle obtienne le document attestant que le prêt hypothécaire avait été entièrement remboursé ainsi que les relevés de son compte bancaire depuis le 1er mars 2014.

10. En date du 25 août 2014, Mme A______ a remis à l’hospice une attestation signée le 22 août 2014 par sa sœur, Mme E______, domiciliée à Casablanca, ayant pour objet « attestation de prêt », et attestant avoir avancé à sa sœur, Mme A______, la redevance mensuelle de 10'294 Dirhams concernant son prêt à F______ et cela suite à sa situation difficile depuis janvier 2010.

Mme A______ a également produit quatre relevés de son compte bancaire auprès de la G______ bank. Selon le relevé au 31 mars 2014 et pour un solde de départ de 134.74 Dirhams, il n’y avait eu aucun mouvement. Selon le décompte au 30 avril 2014, un « arrêté du compte 1er trim. 2014 » avait été débité à hauteur de CHF 104.50 Dirhams. Les relevés au 31 mai 2014 et au
30 juin 2014 faisaient apparaitre chacun un versement opéré sur son compte en espèce de 2'500.- Dirhams, ainsi qu’un débit de 2'000.- Dirhams en faveur de « H______ ». À teneur du relevé au 30 juin 2014, le compte bancaire de l’intéressée avait été en outre débité de 370 Dirhams au titre d’un prélèvement en « I______ », de 1 Dirham au titre de frais de timbre, ainsi que de 500.- Dirhams au titre du « PAIEMENT CARTE : J______ ». Le solde final au 30 juin 2014 s’élevait à 159.24 Dirhams de crédit.

Selon l’hospice, Mme A______ a ajouté que l’appartement sis à Casablanca appartenait à hauteur des trois quarts à sa sœur, qui allait racheter sa part, ce qui lui permettrait de régler ses dettes. L’assistante sociale lui a alors demandé de fournir, pour le rendez-vous du 25 septembre suivant, un acte de propriété à son nom, une attestation de sa sœur déclarant qu’elle était d’accord de racheter sa part et l’indication du montant de celle-ci, une estimation du bien, ainsi qu’un récapitulatif documenté de ses dettes.

11. Le 24 septembre 2014, Mme A______ a appelé le CAS pour annuler le rendez-vous du lendemain au motif qu’elle était malade.

12. Par courrier recommandé du 20 octobre 2014, le CAS a imparti à l’intéressée un ultime délai au 20 novembre 2014 pour fournir les pièces manquantes, soit un acte de propriété à son nom, une attestation de reprise du bien immobilier par sa sœur, la valeur de rachat de sa part dans le cas où sa sœur serait prête à racheter ledit bien, ainsi qu’une estimation de celui-ci. Étaient rappelés le document « Mon engagement en demandant une aide financière à l’Hospice général » et son devoir de fournir tous les renseignements nécessaires pour établir son droit et fixer le montant des prestations d’aide financière. Elle était tenue de faire valoir sans délai les droits auxquels l’aide financière était subsidiaire. En effet, cette aide était subsidiaire à ses ressources financières aux limites de fortune de CHF 4'000.- et au caractère exceptionnel de l’intervention en faveur d’une personne propriétaire d’un bien immobilier. Le délai au 20 novembre 2014 lui était donné pour « dépassement du délai de trois mois reconduit à trois mois d’aide exceptionnelle, en raison de [son] certificat médical ».

Étaient joints les articles de loi cités dans la lettre.

13. Il n’est pas contesté qu’en date du 30 octobre 2014, reçue au CAS pour l’entretien périodique, Mme A______ a déclaré ne pas parvenir à accomplir les démarches nécessaires pour obtenir les documents requis au sujet de son bien immobilier.

Elle a néanmoins produit une attestation en langue arabe établie le 22 juin 2007 par l’Agence nationale de la conservation foncière du cadastre et de la cartographie du Maroc, dont l’assistante sociale lui a demandé une traduction certifiée par un traducteur juré.

Mme A______ a ajouté que la banque exigeait la somme de CHF 5'000.- pour lui délivrer une attestation selon laquelle l’hypothèque avait été remboursée.

14. Après avoir contacté le CAS par téléphone afin de l’informer qu’elle n’était pas en possession de tous les documents réclamés par celui-ci, Mme A______ ne s’est pas présentée à un rendez-vous prévu audit centre le 13 novembre 2014.

15. Le 1er décembre 2014, Mme A______ a déposé au CAS la traduction de son « certificat de copropriété » établie par un traducteur assermenté le 25 novembre 2014. À teneur de ce document, établi le 22 juin 2007, était au nom de Mme A______ (« K______ ») la propriété dite « C______ ______ » sise à Casablanca, consistant en un appartement duplex au rez-de-chaussée et 1er étage, box et parking au sous-sol, d’une surface de 295 m2, ainsi qu’une part de 175.49 / 10'000 du terrain de l’immeuble et 42.09 / 10'000 des parties communes de la propriété consistant en un immeuble sis à Casablanca. Cette propriété était grevée dans sa totalité par une hypothèque de premier rang inscrite également le 22 juin 2007 pour garantir un prêt de 700'000 Dirhams, dette contractée par Mme A______ au profit de la société G______ bank, avec pour conditions une interdiction d’aliéner et une interdiction d’hypothéquer.

16. Il n’est pas contesté que lors d’un entretien du 15 décembre 2014, Mme A______ a déclaré, sans produire de justificatif, que la valeur de son immeuble s’élevait à CHF 76'064.10.

17. Par décision du 16 janvier 2015, le CAS, donnant suite à l’entretien du 15 décembre 2014, et après avoir rappelé que l’aide financière exceptionnelle avait été accordée à titre dérogatoire à Mme A______ depuis le 1er mars 2014 et renouvelée à plusieurs reprises afin de lui permettre de vendre son bien immobilier, mais n’ayant reçu aucune nouvelle de sa part quant à la vente de ce bien, s’est déclaré dans l’obligation de mettre fin au 31 mars 2015 à ladite aide financière exceptionnelle. Ce délai devait permettre à l’intéressée de vendre son bien immobilier et de subvenir à ses besoins.

18. Le 31 janvier 2015, Mme A______ a signé à nouveau le document « Mon engagement en demandant une aide financière à l’Hospice général ».

19. Par acte du 14 février 2015, Mme A______ a formé opposition contre la décision susmentionnée du 16 janvier 2015, laquelle la privait d’une assistance indispensable car elle se trouvait dans une situation de profonde détresse matérielle et morale. Actuellement en procédure de divorce et sans aucun soutien financier de son conjoint, ni même liquidation de son régime matrimonial, elle ne disposait que d’un très faible revenu, d’environ CHF 250.- par mois, provenant d’un bien immobilier qu’elle possédait au Maroc. Des tentatives de vente de ce bien étaient restées infructueuses à ce jour. L’agence immobilière qu’elle avait mandatée et les annonces qu’elle avait publiées sur divers sites internet ne lui avaient pas encore permis de trouver un acquéreur pour cet appartement qui était loué. En outre, elle était sans emploi, car son état de santé déficient l’empêchait de travailler. Vu sa situation actuelle très précaire, elle demandait une suspension de la décision du CAS jusqu’au prononcé de son divorce et la vente de son bien.

20. Par lettre du 20 février 2015, la direction générale de l’hospice a invité l’intéressée à produire toute preuve utile montrant qu’elle mettait tout en œuvre pour réaliser sans délai son bien immobilier sis au Maroc (mandat confié à l’agence immobilière, annonce de mise en vente, éventuelles tractations en cours, etc.), de même que toute information utile et documentée sur la procédure en liquidation de son régime matrimonial.

21. Par courrier du 20 mars 2015, Mme A______ a fait part à l’hospice de ce qu’espérant accélérer la vente de son bien immobilier au Maroc, elle en avait parlé autour d’elle. De plus, depuis l’arrêt de son travail en raison de la responsabilité de son ex-conjoint, elle avait accumulé beaucoup de dettes. Toutes ses difficultés avaient conditionné son état de souffrance physique et psychologique, nécessitant une prise en charge médicale. Elle sollicitait donc la reconsidération de la décision et la continuation du soutien financier.

Elle a produit, sous forme de télécopie, une attestation établie le 19 mars 2015 à Casablanca par l’agence immobilière L______ attestant avoir été mandatée par l’intéressée pour la vente de « l’appartement ______ Route D______ » depuis le 7 mars 2013.

Elle a également déposé une copie au 20 mars 2015 d’une annonce publiée le 2 février sur le site internet « Maroc Annonces.com » proposant un appartement à vendre pour 10'000.- Dirhams, consistant en un « joli appartement situé dans un quartier très calme tour (sic) près de la mer de 175 m2 + cave + parking avec une jolie terrasse » avec trois chambres et deux salles de bain.

22. Par décision sur opposition du 5 mai 2015 signée par son directeur général, l’hospice a rejeté l’opposition de Mme A______ du 14 février 2015 et entièrement confirmé la décision du CAS du 16 janvier 2015.

L’instruction de la cause avait mis en évidence ce qui suit : l’adresse et les numéros de téléphones indiqués comme étant ceux de l’agence immobilière
L______ sur l’attestation du 19 mars 2015 ne correspondaient pas à ceux de l’agence immobilière L______ en activité à Casablanca ; au numéro de téléphone indiqué sur l’attestation de l’agence immobilière susmentionnée, la personne qui avait répondu le 31 mars 2015 ne semblait pas travailler pour une agence immobilière ; l’annonce parue sur le site internet « Maroc Annonces.com » ne pouvait pas être identifiée comme correspondant à son appartement ; d’ailleurs, la description de l’appartement ne correspondait pas entièrement aux indications figurant dans la copie du certificat de propriété du 22 juin 2007, en particulier la surface.

Pour le seul motif qui n’était pas contesté que l’intéressée était seule propriétaire d’un immeuble sis à Casablanca au Maroc, libre de toute hypothèque, celle-ci ne remplissait pas les conditions donnant droit à une aide financière selon la loi.

Par surabondance, Mme A______ ne répondait pas aux conditions de fortune fixées par la loi et son règlement d’exécution. Elle n’avait jamais fourni, malgré les demandes réitérée du CAS, une estimation de la valeur de son bien. Elle avait déclaré à son assistante sociale que celui-ci valait CHF 76'064.10, alors que, dans la procédure en divorce, elle avait indiqué l’avoir acquis au moyen d’une hypothèque d’Euros 70'000.- en 2006, ce qui tendait à prouver que ce bien valait plus que cette dernière somme. À cet égard, il était relevé que selon le certificat de propriété du 22 juin 2007, le crédit s’élevait à 700'000.- Dirhams et non Euros 70'000.-. Quant au prix figurant dans l’annonce sur « Maroc Annonces.com », il était de 1'750'000.- Dirhams (175 m2 x
10'000.- Dirhams), soit environ CHF 168'000.-, ce qui correspondait davantage aux prix pratiqués dans le quartier où se situait cet appartement. La question de la valeur de ce bien pouvait cependant rester ouverte, dès lors qu’il n’était pas contesté qu’elle était largement supérieure au montant de fortune admis pour une personne seule, soit CHF 4'000.-. L’intéressée n’avait pas apporté la preuve qu’elle n’arrivait pas à réaliser son appartement, les documents produits le
20 mars 2015 étant douteux. Elle n’avait pas non plus apporté le moindre indice probant que ledit appartement ne pouvait pas être vendu.

23. Par acte expédié le 5 juin 2015 au greffe de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), Mme A______ a formé recours contre ladite décision sur opposition, concluant à une comparution personnelle des parties, ainsi qu’au fond, à l’annulation de ladite décision et à ce qu’il soit dit qu’elle serait mise au bénéfice de l’aide sociale dès le mois de juin 2015, l’hospice général devant être débouté de toutes autres conclusions.

Elle avait été hospitalisée et avait subi une opération (hernie discale) le 18 mai 2015, de sorte qu’elle n’avait pas été en mesure de s’occuper du recours de manière approfondie, raison pour laquelle elle demandait un délai pour le compléter. Le bien immobilier au Maroc, qui était sa propriété, était un appartement occupé par sa famille, qui lui versait CHF 250.- par mois, « déclaré également à l’hospice ». Elle était par ailleurs en incapacité de travail depuis cinq ans, gravement atteinte dans sa santé, ce à quoi s’ajoutait la difficulté de supporter une séparation et un divorce.

La recourante a produit un certificat du service de neurochirurgie des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) du 21 mai 2015, attestant un début de traitement le 18 mai 2015, un début d’arrêt de travail le même jour et une date de fin dudit arrêt le 28 juin 2015. Elle a également présenté un relevé des mouvements sur son compte bancaire du 1er janvier au 5 juin 2015.

Par ailleurs, Mme A______ a produit un jugement du TPI du 26 mai 2015, dissolvant par le divorce le mariage contracté en 2008 par celle-ci avec M. A______, ratifiant les conclusions d’accord des parties du 24 avril 2015, leur donnant acte de ce qu’elles renonçaient à toute contribution à leur entretien, donnant acte à l’ex-conjoint de ce qu’il s’engageait à verser à son ex-épouse la somme de CHF 20'000.- pour solde de tout compte au titre de la liquidation du régime matrimonial, à concurrence de CHF 10'000.- dans le délai de trente jours dès que le jugement serait définitif et exécutoire, le reste dans un délai soixante jours dès la même date. Ledit jugement donnait en outre acte aux parties de ce qu’elles se partageaient par moitié des prestations de sortie de leurs institutions de prévoyance et ordonnait en conséquence à celle du mari de transférer le montant de CHF 14'869.35 sur le compte de libre-passage de l’épouse.

24. Mme A______ ne s’est pas manifestée dans le délai au
24 juin 2015 qui lui avait été accordé par le juge délégué pour compléter son recours, conformément à sa demande.

25. Dans sa réponse du 7 août 2015, l’hospice a conclu au rejet du recours de Mme A______ et à la confirmation de la décision attaquée.

26. Par lettre du 18 août 2015, le juge délégué a imparti un délai à la recourante pour formuler d’éventuelles observations et indiquer à la chambre administrative si elle persistait ou non dans sa demande de comparution personnelle et, dans l’affirmative, pour quels motifs (but et objet visé par cette demande).

27. Dans son écriture du 18 septembre 2015, Mme A______ a informé la chambre administrative de ce qu’elle ne persistait pas dans sa demande de comparution personnelle vu son état de santé. Elle regrettait que certains de ses dires cités dans les observations de l’hospice aient été mal interprétés par l’assistante sociale. Le bien au Maroc qui lui portait préjudice était inscrit à son nom parce que la banque avait exigé que le contrat de prêt soit au nom de la personne qui fournissait les documents requis. Or, à l’époque, ni sa mère, ni sa sœur ne pouvaient remplir les conditions demandées par la banque, de sorte que la recourante, en accord avec sa famille, avait présenté ses papiers, étant fonctionnaire et recevant un salaire raisonnable. Elle n’avait jamais dit à son assistante sociale que l’appartement valait CHF 76'304.10, mais elle avait bien parlé de la valeur du prêt qui était de 700'000.- Dirhams, soit la somme précitée selon le change du jour. Or, elle avait bien expliqué que pour acquérir ce bien, il fallait compléter par un crédit la somme de CHF 76'304.10 « à peu près ». Néanmoins, ses dettes qu’elle devait rembourser à ce jour à sa famille et à ses amis dépassaient largement sa part. En outre, elle n’avait pas dit que la banque exigeait la somme de CHF 5'000.- pour délivrer une attestation selon laquelle l’hypothèque avait été remboursée, mais que les frais de notaire s’élevaient à environ CHF 5'000.- pour enregistrer sa part officiellement. Elle avait tout mis en œuvre pour que cet appartement puisse être vendu et elle ne voyait pas pourquoi il fallait fournir une attestation d’une agence immobilière que l’hospice jugeait douteuse. Au demeurant, au Maroc, on ne pouvait pas obtenir un tampon de la société si on n’était pas enregistré auprès du Tribunal commercial, et l’attestation avait été délivrée par une agence immobilière agréée.

La recourante concluait ainsi son écriture : « du fait que j’abandonne mon recours, mes commentaires sont inutiles, mais il fallait que j’extériorise ma frustration devant cette injustice ».

28. Par courrier du 21 septembre 2015, le juge délégué a imparti un délai au 7 octobre 2015, prolongé ensuite jusqu’au 4 novembre 2015 à Mme A______ pour indiquer si elle retirait bien son recours.

29. Par lettre du 2 novembre 2015, elle a exposé que ce qu’elle avait écrit dans sa lettre du 18 septembre 2015 était dû au désespoir. Elle confirmait encore qu’elle respectait la « loi sur la résidence secondaire », mais le bien immobilier au Maroc ne la faisait pas vivre ; il n’était pas encore vendu malgré ses efforts dans ce sens. De plus, elle n’en était pas la seule bénéficiaire. Elle n’avait aucun revenu qui pouvait permettre de l’aider dans ses difficultés quotidiennes et était énormément endettée.

30. Par lettre du 10 novembre 2015, la chambre administrative a informé les parties de ce que la cause était gardée à juger.

31. Pour le reste, les arguments des parties seront repris, en tant que de besoin, dans la partie en droit ci-après.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 52 de la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle du 22 mars 2007 - LIASI - J 4 04 ; art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du
26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Le litige porte sur le refus de l’intimé de verser des prestations d’aide financière à la recourante en raison de la propriété d’un bien immobilier au Maroc.

3. a. Quiconque est dans une situation de détresse et n'est pas en mesure de subvenir à son entretien a le droit d'être aidé et assisté et de recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine (art. 12 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 -
Cst. - RS 101). Le droit constitutionnel fédéral ne garantit toutefois que le principe du droit à des conditions minimales d’existence ; il appartient ainsi au législateur fédéral, cantonal et communal d’adopter des règles en matière de sécurité sociale qui ne descendent pas en dessous du seuil minimum découlant de l’art. 12 Cst. mais qui peuvent aller au-delà (arrêts du Tribunal fédéral
2P.318/2004 du 18 mars 2005 consid. 3 ; 2P.115/2001 du 11 septembre 2001 consid. 2a ; ATA/724/2013 du 29 octobre 2013). L'art. 39 al. 1 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst-GE - A 2 00) reprend ce principe : « toute personne a droit à la couverture de ses besoins vitaux afin de favoriser son intégration sociale et professionnelle ».

b. En droit genevois, la LIASI et le règlement d'exécution de la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle du 25 juillet 2007 (RIASI - J 4 04.01) mettent en œuvre ce principe constitutionnel.

c. La LIASI a pour but de prévenir l’exclusion sociale et d'aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel
(art. 1 al. 1 LIASI).

Les prestations d’aide financière sont subsidiaires à toute autre source de revenu (art. 9 al. 1 LIASI). Le bénéficiaire doit faire valoir sans délai ses droits auxquels l’aide financière est subsidiaire et doit mettre tout en œuvre pour améliorer sa situation sociale et financière (art. 9 al. 2 LIASI). La personne dans le besoin doit avoir épuisé les possibilités d’auto-prise en charge, les engagements de tiers et les prestations volontaires de tiers (ATA/227/2014 du 8 avril 2014 ; Félix WOLFFERS, Fondement du droit de l’aide sociale, 1995, p. 77). Le Tribunal fédéral a rappelé dans un arrêt 8C_56/2012 du 11 décembre 2012 que l'art. 9 al. 1 LIASI correspond aux principes dégagés par la Conférence suisse des institutions d'action sociale (ci-après : CSIAS).

d. Sont prises en compte la fortune et les déductions sur la fortune prévues aux art. 6 et 7 de la loi sur le revenu déterminant unifié du 19 mai 2005 (LRDU - J 4 06), sous réserve des exceptions figurant aux al. 3 et 4 (art. 23 al. 1 LIASI).

Le socle du revenu déterminant unifié comprend les éléments de fortune immobilière et mobilière suivants (art. 47 de la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 - LIPP - D 3 08) : a) tous les immeubles situés dans et hors du canton (art. 6 LRDU).

Au contraire de ce que prescrit l’art. 7 LRDU, ne sont pas prises en compte les déductions suivantes : a) les dettes chirographaires et hypothécaires ; b) les passifs et découverts commerciaux (art. 23 al. 4 LIASI).

Les limites de fortune permettant de bénéficier des prestations d’aide financière sont de CHF 4'000.- pour une personne seule majeure (art. 1
al. 1 RIASI, par renvoi de l’art. 23 al. 5 LIASI).

4. a. L’art. 32 al. 1 LIASI prescrit que le demandeur ou son représentant légal doit fournir gratuitement tous les renseignements nécessaires pour établir son droit et fixer le montant des prestations d'aide financière.

La LIASI impose un devoir de collaboration et de renseignement (ATA/1024/2014 du 16 décembre 2014 ; ATA/864/2014 du 4 novembre 2014). Conformément à l’art. 33 al. 1 LIASI, le bénéficiaire ou son représentant légal doit immédiatement déclarer à l’hospice tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations d’aide financière qui lui sont allouées ou leur suppression.

Le document intitulé « Mon engagement en demandant une aide financière à l'Hospice général » concrétise cette obligation de collaborer en exigeant du demandeur qu'il donne immédiatement et spontanément à l'hospice tout renseignement et toute pièce nécessaire à l'établissement de sa situation personnelle, familiale et économique tant en Suisse qu'à l'étranger (ATA/239/2015 du 3 mars 2015 ; ATA/368/2010 du 1er juin 2010).

b. D’une manière générale, la procédure administrative est régie par la maxime inquisitoire, selon laquelle l’autorité établit les faits d’office (art. 19 LPA). Ce principe n’est pas absolu, sa portée étant restreinte par le devoir des parties de collaborer à la constatation des faits (art. 22 LPA). Celui-ci comprend en particulier l’obligation des parties d’apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d’elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l’absence de preuves (arrêts du Tribunal fédéral 8C_1034/2009 du 28 juillet 2010 consid. 4.2 ; 9C_926/2009 du 27 avril 2010 consid. 3.3.2 ; ATA/573/2015 du 2 juin 2015 ; ATA/99/2014 du 18 février 2014).

5. L’art. 12 LIASI est consacré aux cas exceptionnels. L’al. 2 de cette disposition légale vise les propriétaires de biens immobiliers et est libellé comme suit : « Exceptionnellement, une aide financière peut être accordée à une personne propriétaire d'un bien immobilier, si ce bien lui sert de demeure permanente. Dans ce cas, l'aide financière accordée est remboursable. L'immeuble peut être grevé d'une hypothèque au profit de l'Hospice général».

Les prestations d’aide financière accordées à un propriétaire d’un bien immobilier en vertu de l’art. 12 al. 2 LIASI sont remboursables (art. 39
al. 1 LIASI).

De l’exposé des motifs relatifs à la LIASI, et en particulier des débats ayant porté sur l’art. 12 al. 2 LIASI, il résulte que le législateur estimait nécessaire que l’hospice puisse aider une personne propriétaire de son logement pour éviter que celle-ci soit obligée de réaliser son bien et se retrouve sans toit. Il a été proposé qu’un amendement prévoie que les prestations ainsi accordées soient remboursables, l’hospice pouvant par ailleurs obtenir une hypothèque légale à titre de garantie sur l’immeuble, en contrepartie des prestations financières
(MGC 2006-2007/V A - Séance 25 du 23 février 2007 ; ATA/644/2014 du 19 août 2014 consid. 4).

La ratio legis de la loi est donc bien que l’hospice puisse venir en aide à une personne propriétaire de son logement dans lequel elle demeure pour éviter que celle-ci ne se retrouve à la rue en cas de vente de l’immeuble. Ainsi, l’exception prévue à l’art. 12 al. 2 LIASI est bien celle du cas où le bien immobilier est la demeure permanente de la personne qui demande de l’aide à l’hospice (ATA/644/2014 précité consid. 4 ; ATA/171/2011 du 15 mars 2011 ; ATA/755/2010 du 2 novembre 2010).

6. a. En l’espèce, la recourante est seule propriétaire d’un bien immobilier à l’étranger qui ne lui sert pas de demeure permanente.

Ainsi, à teneur claire de la loi, il n’existe pour elle aucun droit à une assistance financière.

b. L’intimé a fait une application à titre exceptionnel de la loi pour octroyer des prestations à la recourante dès le 1er mars 2014, vu la situation sociale, personnelle et médicale difficile de celle-ci. En outre, cette dernière ne conteste pas avoir déclaré à l’hospice que l’emprunt hypothécaire avait été remboursé à la banque, à tout le moins en 2014.

L’intéressée n’a pas fourni à l’intimé tous les renseignements et documents que celui-ci lui a demandés depuis le 28 juillet 2014. En particulier, elle n’a pas remis à l’hospice tous les documents que celui-ci lui avait requis par lettre du 20 octobre 2014, à savoir notamment une estimation de son bien immobilier, ni toute preuve utile montrant qu’elle mettait tout en œuvre pour réaliser sans délai ledit bien (mandat confié à l’agence immobilière, annonce de mise en vente, éventuelles tractations en cours, etc.) selon la demande du 20 février 2015.

L’attestation de l’agence immobilière L______ du 19 mars 2015, dont l’authenticité est remise en doute par l’intimé, ne démontre en tout état de cause pas que de réels efforts seraient entrepris en vue de la vente de l’appartement de Casablanca. Quant à l’annonce parue le 2 février 2015 sur le site internet « Maroc Annonces.com », rien ne prouve qu’elle concerne l’appartement dont la recourante est propriétaire, d’autant moins que les m2 qui y sont mentionnés ne semblent pas correspondre à ceux de son appartement. En procédure de recours, l’intéressée n’a présenté aucune explication, ni aucun moyen de preuve probants tendant à démontrer la réalité d’éventuelles démarches en vue d’une vente de son bien immobilier.

Malgré les demandes réitérées de l’hospice, la recourante n’a pas fourni des renseignements ou des pièces probants relatifs à la valeur de son appartement sis à Casablanca. Elle n’a pas non plus prétendu que cette valeur serait inférieure à CHF 4'000.-. Quoi qu’il en soit, il est certain que cette valeur est supérieure à CHF 40'000.-, étant donné qu’il est invraisemblable qu’elle puisse être inférieure au montant du prêt hypothécaire de 700’0000.- Dirhams, montant légèrement inférieur à CHF 70'000.-.

c. En définitive, le refus de l’intimé de continuer à verser à l’intéressée une aide financière à titre exceptionnel au-delà du 31 mars 2015 apparaît en tout état de cause conforme au droit. La décision sur opposition de l’hospice ne peut donc qu’être confirmée.

7. Vu ce qui précède, le recours sera rejeté.

En matière d’assistance sociale, la procédure est gratuite pour la recourante (art. 87 al. 1 LPA et 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne pourra être allouée à la recourante, qui ne l’a au surplus pas sollicitée (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 5 juin 2015 par Mme A______ contre la décision sur opposition du directeur général de l’Hospice général du 5 mai 2015 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Mme A______, ainsi qu'à l'Hospice général.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :