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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1064/2023

ATA/679/2023 du 26.06.2023 ( PRISON ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1064/2023-PRISON ATA/679/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 26 juin 2023

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Anna SERGUEEVA, avocate

contre

PRISON DE CHAMP-DOLLON intimée



EN FAIT

A. a. A______ est incarcéré à la prison de Champ-Dollon depuis le 22 janvier 2023.

b. Selon le rapport d’incident établi le 20 février 2023, le sous-chef en charge de la surveillance a constaté que le précité se trouvait dans un couloir et était en train de tenir la porte à la psychiatre. Il s’était rendu auprès de celle-ci pour lui rappeler les règles de sécurité. Le détenu l’avait alors interrompu en lui disant : « Pourquoi je ne peux pas ? Je fais ce que je veux. T’es qui toi ? Tu verras quand je sortirais d’ici, tu vas voir rouge ». Le sous-chef lui ayant demandé s’il s’agissait de menaces, il lui avait répondu : « Zobi, tu vas voir quand je sors ». Vu l’état d’agitation du détenu, le sous-chef avait décidé de le menotter et demandé à son collègue d’avertir le gardien-chef adjoint. Arrivé sur place, ce dernier avait décidé du transfert du détenu en cellule forte. Le transfert et la fouille s’étaient faits sans contrainte.

Le rapport d’incident indique que A______ a pu s’exprimer sur les faits à 14h35 et qu’il les a reconnus. Une sanction de deux jours de cellule forte lui a été infligée pour menaces et injures envers le personnel. La sanction lui a été signifiée le même jour à 14h40 et remise en mains propres à 18h30, la signature du détenu figurant sur celle-ci.

B. a. Par acte expédié le 22 février 2023 à la chambre administrative de la Cour de justice, A______ a recouru contre cette décision, dont il a demandé l’annulation. Il a conclu au constat du caractère illicite de son placement en cellule forte. Préalablement, l’audition de la psychiatre présente lors de l’incident devait être ordonnée et la situation sanitaire de la cellule forte évaluée. « En tout état », la procédure devait être suspendue jusqu’à droit jugé dans la cause P/1______/2023 (recte : P/2______/2023) relative à la plainte pénale déposée par l’agent de détention et une indemnité pour tort moral de CHF 1'000.- devait lui être allouée.

Le 20 février 2023, il avait consulté la psychiatre. À l’issue du rendez-vous, elle avait quitté le bureau pour aller chercher un document, le laissant quelques instants dans le couloir. Constatant qu’il était seul, l’agent de détention l’avait interpelé de manière agressive, lui demandant ce qu’il faisait seul dans le couloir. Alors qu’il tentait de lui expliquer – son français n’était pas bon – qu’il attendait son médecin, il avait été insulté par l’agent de détention, qui l’avait traité de « fils de pute » et tenu des propos en lien avec « sa race ». Excédé par l’attitude de l’agent, il avait jeté son pull au sol. Il n’avait ni insulté ni menacé l’agent. Il avait ensuite été placé en cellule forte.

Les conditions d’hygiène y étaient déplorables. Les murs et le sol étaient couverts d’excréments. Hormis un matelas usé, il n’y avait pas de mobilier et l’accès à la lumière naturelle était « quasi inexistant ». Les repas, distribués deux fois par jour, étaient de quantité inférieure à celle servie en exécution ordinaire. Pour s’abreuver, il avait dû remplir un bol en utilisant le pommeau de douche, en devant monter sur la cuvette des toilettes. Depuis sa détention en cellule forte, il ressentait des montées d’angoisse.

Il avait été stupéfait d’apprendre que l’agent de détention avait déposé plainte contre lui. Il avait été entendu, dans le cadre de cette procédure. Il avait renoncé à déposer plainte par crainte de représailles. Il souhaitait néanmoins interpeller le département de la sécurité afin de faire constater le caractère illicite de ses conditions de détention. Il contestait les faits reprochés. Il s’agissait de la première sanction prononcée à son encontre. Le principe de la proportionnalité avait été violé. Il sollicitait un audit des conditions d’hygiène de la cellule forte ainsi qu’un descriptif de celle-ci.

b. La direction de la prison a conclu au rejet du recours.

c. La chambre administrative a imparti un délai de réplique au recourant, indiquant que son conseil pouvait venir consulter les images de vidéosurveillance dans ses locaux.

d. Dans sa réplique, le recourant s’est plaint de ce qu’il n’avait pas reçu les images produites par la prison. Il sollicitait ainsi l’apport de celles-ci.

Il a critiqué le fait que le rapport d’incident soit caviardé des noms des agents auteur ou témoins de celui-ci. Dans le cadre de la procédure pénale P/2______/2023, il avait été acquitté du chef d’accusation de violences et menaces contre les fonctionnaires pour les faits dénoncés par l’agent de détention qui avait établi le rapport d’incident. Il produisait le jugement du Tribunal de police du 3 mai 2023. Il avait annoncé faire appel du jugement en tant qu’il retenait que l’interjection « Zobi » était constitutive d’une injure.

Même si ce mot était grossier, il n’avait pas d’incidence sur la sécurité de la prison. Aucune faute ne pouvait lui être reprochée du fait de s’être trouvé dans le couloir ; il l’avait fait à la demande de la psychiatre. Compte tenu du caractère insalubre de la cellule forte, la sanction était disproportionnée.

Il a produit la plainte pénale de la prison, le procès-verbal de son audition par la police et le jugement précité (P/2______/2023).

e. Ce dernier a retenu que les paroles prononcées n’avaient pas été de nature à effrayer l’agent de détention, de sorte que les éléments constitutifs de l'infraction de menace n’étaient pas réalisés. Le prévenu ayant reconnu avoir utilisé, en s'adressant à l'agent de détention, le terme « zobi » – qui signifiait « mon cul » en arabe –, il s’était rendu coupable d’injures.

f. La chambre administrative a rappelé au recourant la teneur de sa précédente communication, à savoir qu’il pouvait venir visionner les images de vidéosurveillance au greffe, et lui a imparti un ultime délai pour d’éventuelles observations complémentaires.

g. Le 13 juin 2023, l’avocate du recourant est venue visionner les images en question.

h. Dans le délai imparti, elle a fait parvenir des déterminations, relevant qu’il ressortait desdites images qu’une discussion « légèrement animée » s’était engagée entre le recourant et l’agent. Après un premier échange, ce dernier avait dirigé sa main vers celui-là, qui n’avait fait aucun geste en direction de celui-ci. La discussion semblait s’être ensuite envenimée, sans qu’un homme ne semblât avoir « le dessus sur l’autre ». Le recourant s’était éloigné spontanément en enlevant son tee-shirt, le jetant par terre. Lorsqu’il s’était éloigné, un agent avait plaqué son visage contre le mur pendant un certain temps.

On constatait sur les images de la cellule forte que le mur était couvert de moisissures et de traces noires, qui pouvaient être des excréments. Le bol destiné à la boisson était de couleur verdâtre.

i. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

j. Il ressort du visionnement des images, sans son, enregistrées par les caméras de surveillance du couloir de la prison que le détenu et son médecin sortent d’une pièce dans le couloir et se dirigent vers une autre pièce, la médecin invitant d’un geste le détenu à tenir la porte ouverte. Survient un agent de détention, qui passe la tête dans la pièce dans laquelle se trouve la psychiatre, échange des paroles avec elle, et se retourne ensuite vers A______. Une discussion s’engage entre eux, d’abord d’apparence paisible, puis plus animée. La séquence se termine par le fait que le précité enlève son pullover, d’un geste énervé. Sur les images, avec son, de la « bodycam », prises lors de la mise en cellule forte du recourant, celui-ci est calme et coopérant. Un des agents de détention présent lui indique, après la fouille corporelle, qu’un membre de la direction allait passer le voir au sujet du comportement qu’il venait d’avoir. L’état général d’entretien de la cellule paraît bon.

EN DROIT

1.             Le recours a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Bien que la sanction ait été exécutée, le recourant conserve un intérêt actuel à l'examen de la légalité de celles-ci, dès lors qu'il pourrait être tenu compte de la sanction contestée en cas de nouveau problème disciplinaire ou de demande de libération conditionnelle (ATF 139 I 206 consid. 1.1 ; ATA/498/2022 du 11 mai 2022 consid. 2 ; ATA/50/2022 du 18 janvier 2022 consid. 2).

Le recours est donc recevable, sous réserve de ce qui suit.

En effet, il ne peut être entré en matière sur les conclusions en indemnisation des conditions de détention illicites, celles-ci relevant des normes ordinaires en matière de responsabilité de l'État (ATF 141 IV 349 consid. 4.3 ; ATA/498/2021 du 11 mai 2021 consid. 2c ; ATA/735/2022 du 14 juillet 2022 consid. 6c ; ATA/667/2022 du 24 juin 2022). La chambre de céans n'est ainsi pas compétente pour connaître de ces prétentions, qui relèvent de la compétence du Tribunal civil de première instance, conformément à l'art. 7 de la loi sur la responsabilité de l'État et des communes du 24 février 1989 (LREC - A 2 40 ; ATA/800/2018 du 7 août 2018).

Le recourant a d’ailleurs indiqué vouloir interpeller le département de la sécurité afin de faire constater le caractère illicite de ses conditions de détention.

3.             Il n’y a pas lieu de suspendre la présente procédure jusqu’à droit connu dans la procédure pénale, dès lors que le recourant reconnaît, dans son écriture du 22 mai 2023, avoir utilisé le terme « zobi » et que le présent litige pourra être tranché, sans que la qualification pénale d’injure de ce terme doive être déterminée.

4.             Le recourant sollicite l’audition de la psychiatre présente lors de l’incident l’apport du rapport d’incident non caviardé et l’évaluation sanitaire de la cellule forte dans laquelle il a purgé sa sanction.

4.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1 ; 132 II 485 consid. 3.2). Ce droit n'empêche pas la juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, si elle acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3).

4.2 En l’espèce, il n’apparaît pas que l’audition de la psychiatre présente lors de l’incident puisse apporter des éléments utiles à la solution du litige. En effet, le reproche d’avoir menacé l’agent de détention, ne peut être retenu, les propos ne constituant pas une menace. S’agissant des autres propos reprochés, les éléments figurant d’ores et déjà au dossier permettent à la chambre de céans de trancher le litige en connaissance de cause. Le recourant étant en possession du rapport d’incident non caviardé qu’il a produit, il n’y a plus lieu d’en ordonner la production. L’évaluation des conditions sanitaires de la cellule forte ne faisant pas l’objet du litige, il n’y a pas non plus lieu d’ordonner d’actes d’instruction à cet égard. Pour le surplus, le recourant a pu se déterminer à plusieurs reprises devant la chambre de céans et visionner les images de vidéosurveillance et des « bodycams ».

Il ne sera donc pas procédé à d’autres actes d’instruction.

5.             Le recourant conteste les faits reprochés ainsi que le respect du principe de la proportionnalité.

5.1 Le droit disciplinaire est un ensemble de sanctions dont l'autorité dispose à l'égard d'une collectivité déterminée de personnes, soumises à un statut spécial ou qui, tenues par un régime particulier d'obligations, font l'objet d'une surveillance spéciale. Il s'applique aux divers régimes de rapports de puissance publique et notamment aux détenus. Le droit disciplinaire se caractérise d'abord par la nature des obligations qu'il sanctionne, la justification en réside dans la nature réglementaire des relations entre l'administration et les intéressés. L'administration dispose d'un éventail de sanctions dont le choix doit respecter le principe de la proportionnalité (Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, p. 142 à 145 et la jurisprudence citée).

Les sanctions disciplinaires sont régies par les principes généraux du droit pénal, de sorte qu'elles ne sauraient être prononcées en l'absence d'une faute (ATA/412/2022 du 13 avril 2022 consid. 4a ; ATA/43/2019 du 15 janvier 2019 ; ATA/1108/2018 du 17 octobre 2018 et les références citées).

5.2 Les détenus doivent observer les dispositions du RRIP, les instructions du directeur général de l'office cantonal de la détention ainsi que les ordres du directeur et du personnel pénitentiaire (art. 42 RRIP). En toute circonstance, ils doivent observer une attitude correcte à l'égard du personnel pénitentiaire, des autres personnes incarcérées et des tiers (art. 44 RRIP). Il est interdit aux détenus, d’une façon générale, de troubler l’ordre et la tranquillité de l’établissement (art. 45 let. h RRIP). En tout temps, la direction peut ordonner des fouilles corporelles et une inspection des locaux (art. 46 RRIP).

5.3 Si un détenu enfreint le RRIP, une sanction proportionnée à sa faute, ainsi qu'à la nature et à la gravité de l'infraction, lui est infligée (art. 47 al. 1 RRIP). Avant le prononcé de la sanction, le détenu doit être informé des faits qui lui sont reprochés et être entendu (art. 47 al. 2 RRIP).

À teneur de l'art. 47 al. 3 RRIP, le directeur ou, en son absence, son suppléant sont compétents pour prononcer a) la suppression de visite pour 15 jours au plus, b) la suppression des promenades collectives, c) la suppression des activités sportives, d) la suppression d’achat pour 15 jours au plus, e) suppression de l’usage des moyens audiovisuels pour 15 jours au plus f) la privation de travail ou encore g) le placement en cellule forte pour dix jours au plus. Le directeur peut déléguer ces compétences à un membre du personnel gradé (art. 47 al. 7 RRIP).

5.4 Le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 5 al. 2 Cst., se compose des règles d'aptitude – qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé –, de nécessité – qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés – et de proportionnalité au sens étroit – qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATA/219/2020 du 25 février 2020 consid. 6d et la référence citée).

5.5 En matière de sanctions disciplinaires, l'autorité dispose d'un large pouvoir d'appréciation, le pouvoir d'examen de la chambre administrative se limitant à l'excès ou l'abus de ce pouvoir d'appréciation (art. 61 al. 2 LPA ; ATA/97/2020 précité consid. 4f et les références citées).

5.6 De jurisprudence constante, la chambre de céans accorde généralement une pleine valeur probante aux constatations figurant dans un rapport de police, établi par des agents assermentés, sauf si des éléments permettent de s'en écarter. Dès lors que les agents de détention sont également des fonctionnaires assermentés (art. 19 de la loi sur l'organisation des établissements et le statut du personnel pénitentiaire du 3 novembre 2016 - LOPP - F 1 50), le même raisonnement peut être appliqué aux rapports établis par ces derniers (ATA/284/2020 précité consid. 4f et les références citées).

5.7 Dans sa jurisprudence, la chambre de céans a confirmé une sanction de deux jours de cellule forte infligée à un détenu qui avait traité un agent de détention de « sale fils de pute » (ATA/502/2018 du 22 mai 2018). Elle a également confirmé une sanction d'un jour de cellule forte prononcée en raison des propos de « sale fils de chiottes » désignant un infirmier de l'établissement pénitentiaire (ATA/1066/2015 du 6 octobre 2015) ainsi qu’une sanction de deux jours de cellule forte à un détenu ayant traité les agents de détention de « fils de pute » ATA/383/2021 du 30 mars 2021).

5.8 En l’espèce, le recourant conteste avoir tenu les propos reprochés, reconnaissant uniquement avoir utilisé le terme « zobi ». Il se prévaut également du fait d’avoir été acquitté du chef d’accusation de menaces pour nier l’existence des propos incriminés. Or, le Tribunal de police n’a pas acquitté le recourant de chef du fait que les propos en question n’auraient pas été tenus, mais en raison de l’absence de leur qualification juridique de menace au sens pénal. Par ailleurs, il ressort du visionnement des images de vidéosurveillance que le recourant apparaît de plus en plus agité lors de l’échange de propos avec l’agent de détention, puis jette son pull par terre. Dans ces conditions, il n’y a pas lieu de s’écarter du rapport d’incident, établi par un agent de détention assermenté.

Les propos « Pourquoi je ne peux pas ? Je fais ce que je veux. T’es qui toi ? Tu verras quand je sortirais d’ici, tu vas voir rouge » et « Zobi, tu vas voir quand je sors » ne constituent pas des menaces, selon le jugement du Tribunal de police. Seul doit ainsi être apprécié le caractère du terme « Zobi », utilisé par le recourant en s’adressant à un agent de détention.

Selon le Tribunal de police, ce terme signifie « mon cul ». Le recourant le conteste, faisant valoir qu’il s’agit d’une interjection. Il produit l’extrait du « dictionnaire de la zone », selon lequel, cette interjection signifie « mon cul », « putain » ou encore « Zebi ». À l’évidence, quelle que soit la signification retenue, elles apparaissent toutes grossières et injurieuses. Aucune de ces significations ni d’ailleurs le fait de tutoyer un agent de détention n’est compatible avec le devoir du recourant d’observer avec le personnel pénitentiaire une attitude correcte.

Un tel manque de respect était susceptible de porter atteinte à la personnalité de l’agent de détention et de troubler l'ordre et la tranquillité de l'établissement, violant ses obligations de détenu, telles que figurant aux art. 42 ss RRIP, en particulier aux art. 44 et 45 let. h RRIP. Il s'ensuit que l'autorité intimée était fondée à sanctionner le recourant en relation avec ces faits.

6.             Se pose encore la question de savoir si la sanction respecte le principe de la proportionnalité.

Comme le relève le recourant, la sanction de cellule forte est la forme de sanction la plus sévère prévue par le RRIP. Contrairement à ce qu’il fait valoir, le fait que la psychiatre lui ait demandé de tenir la porte du bureau, ne justifie aucunement ni le tutoiement de l’agent de détention ni le vocabulaire grossier utilisé. Son comportement est inadmissible et ne saurait être toléré. L’autorité intimée était ainsi fondée à faire preuve de sévérité. Toutefois, bien que sa détention soit récente, il faut porter à son crédit qu’il n’a pas d’antécédents disciplinaires. Il y a également lieu de tenir compte que les propos tenus ne sont pas constitutifs d’une menace.

Ainsi, au vu de l’ensemble de ces circonstances et bien que l’autorité intimée jouisse d’un large pouvoir d’appréciation en la matière, la sanction de deux jours de cellule forte ne respecte plus le principe de la proportionnalité. Une sanction d’un jour de cellule forte paraît plus appropriée, permettant à la fois au recourant de prendre conscience de l’importance d’observer une attitude correcte envers le personnel pénitentiaire et de tenir compte de l’absence d’antécédents disciplinaires.

Le recours sera ainsi admis dans cette mesure et l'illicéité de la sanction constatée.

7.             La procédure étant gratuite, il ne sera pas perçu d’émolument. Le recourant obtenant partiellement gain de cause, une indemnité de procédure, réduite, de CHF 1'000.- lui sera allouée, à la charge de l’État de Genève (art. 87 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

Admet partiellement, dans la mesure de sa recevabilité, le recours interjeté le 22 mars 2023 par A______ contre la décision de la prison de Champ-Dollon du 20 février 2023 ;

constate le caractère illicite de la sanction de deux jours de cellule forte du 20 février 2022, au sens des considérants ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'000.- à A______, à la charge de l’État de Genève ;

dit que conformément aux art. 78 et ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière pénale ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Anna SERGUEEVA, avocate du recourant, ainsi qu'à la prison de Champ-Dollon.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

N. DESCHAMPS

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le 

 

 

la greffière :