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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1721/2015

ATA/43/2016 du 19.01.2016 ( FPUBL ) , REJETE

Recours TF déposé le 29.02.2016, rendu le 02.02.2017, REJETE, 8C_158/2016
Descripteurs : INDEMNITÉ(EN GÉNÉRAL) ; ÉGALITÉ DE TRAITEMENT ; ÉGALITÉ DE RÉMUNÉRATION ; DROIT ACQUIS ; CONSTITUTIONNALITÉ ; PRINCIPE DE LA BONNE FOI ; PROPORTIONNALITÉ ; INTERDICTION DE L'ARBITRAIRE
Normes : Cst.8; LTrait.23A; LTrait.23B; RTrait.16
Résumé : Rejet du recours contre la suppression de l'indemnité de 8.3 % suite à l'abrogation de l'ancien art. 23A LTrait par la loi 11328. Pas de violation du principe de l'égalité de traitement par l'art. 23B LTrait. Pas de droits acquis résultant de l'ancien art. 23A LTrait. Pas de violation résultant de l'absence de régime transitoire.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1721/2015-FPUBL ATA/43/2016

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 19 janvier 2016

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Romain Jordan, avocat

contre

CONSEIL D'ÉTAT



EN FAIT

1) Monsieur A______ est [ fonction]. Sa fonction, située en classe 28, est mentionnée, depuis le 1er janvier 2009, dans la liste des fonctions de cadres supérieurs, classe 27 et plus, avec responsabilités hiérarchiques, figurant dans l’annexe au règlement d’application de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l’Etat et des établissements hospitaliers du 17 octobre 1979 (RTrait - B 5 15.01).

Cette fonction entre dans le champ d’application de l’ancien art. 23A de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l’État et des établissements hospitaliers du 21 décembre 1973 (LTrait - B 5 15). La teneur de cette disposition est la suivante : « Dès le 1er janvier 2009 et jusqu’à l’entrée en vigueur d’une nouvelle évaluation des fonctions, les cadres dès la classe 27 exerçant des responsabilités hiérarchiques peuvent percevoir une indemnité, égale à 8.3 % de leur salaire annuel, versée en 13 mensualités. Le traitement, indemnité incluse, ne peut dépasser le montant correspondant à la classe 33, position 21, de l’échelle des traitements. Le Conseil d’État fixe par règlement la liste des bénéficiaires ».

2) Adopté dans le cadre du projet de loi (ci-après : PL) 10’250 modifiant la LTrait, qui visait principalement au remplacement de la prime de fidélité octroyée aux collaborateurs de l’État par un treizième salaire et à l’instauration d’un nouveau système d’annuités, l’ancien art. 23A LTrait résulte d’un amendement de députés.

Ce dernier proposait l’adoption de cette disposition afin d’octroyer, aux cadres supérieurs en classe 27 à 32 selon l’échelle des traitements, le versement mensuel d’une indemnité correspondant à un pourcentage de leur salaire annuel. Selon le rapport du 23 septembre 2008 de la commission des finances du Grand Conseil chargée d’étudier le PL 10’250, il s’agissait de faire « un geste » en faveur des hauts fonctionnaires en attendant la réévaluation des fonctions, dans la mesure où le PL 10’250 instituait un système offrant une sur-rémunération des emplois requérant de moindres qualifications et une sous-rémunération de ceux en exigeant le plus. L’amendement avait été refusé par les membres de la commission. Le Conseil d’État s’y était montré opposé, considérant qu’il se situait en contradiction avec le système de réévaluation des fonctions, qui visait les « managers » et certains experts, et non pas tous les fonctionnaires dès la classe 27, de sorte qu’il était plus pertinent de proposer une telle indemnité seulement si cette réforme n’avait pas abouti au 1er janvier 2010 (MCG 2008/2009/I A 196 et 199).

Lors de la séance du Grand Conseil du 13 novembre 2008, les partisans de l’amendement ont avancé divers arguments, notamment en lien avec la motivation des hauts cadres, qui n’était pas suffisante au sein de l’administration, faute d’une rémunération adéquate, alors même qu’ils apportaient des compétences dont l’État avait besoin. L’amendement tendait à rendre les hauts postes plus attractifs par rapport à ceux d’un niveau équivalent dans le secteur privé, où les salaires étaient plus élevés, et à fidéliser les personnes concernées, de manière à améliorer l’efficience et l’efficacité de l’administration. À cette fin, une certaine marge de manœuvre était octroyée au Conseil d’État, qui pouvait cibler les bénéficiaires de cette rémunération. De plus, une proposition de nouvelle évaluation des fonctions devait intervenir à la fin de la législature (MGC 2008-2009/I D/2 122, 157 et 160 ss).

3) En vigueur depuis le 1er janvier 2009, l’ancien art. 23A LTrait a été abrogé par la loi 11’328. Parallèlement à cette abrogation, la loi 11’328 prévoit l’adoption du nouvel art. 23B LTrait, dont la teneur est la suivante : « Dès l’entrée en vigueur de la loi 11’328, du 29 janvier 2015, et jusqu’à l’entrée en vigueur d’une nouvelle évaluation des fonctions mais au plus tard jusqu’au 31 décembre 2017, les médecins des HUG [Hôpitaux universitaires de Genève, ci-après : HUG] dès la classe 27 exerçant des responsabilités hiérarchiques peuvent percevoir une indemnité, égale à 8.3 % de leur salaire annuel, versée en 13 mensualités. Le traitement, indemnité incluse, ne peut dépasser le montant correspondant à la classe 33, position 14, de l’échelle des traitements. Le Conseil d’État fixe par règlement la liste des bénéficiaires. ».

La loi 11’328 résulte du PL 11’328 intitulé « suppression du 14ème salaire des cadres supérieurs, dans un esprit de partage et de solidarité », déposé en décembre 2013 par des députés. Selon l’exposé des motifs y relatif, lors de l’adoption de la loi 10’250, les conséquences financières de l’art. 23A LTrait n’avaient pas été correctement évaluées, ce d’autant qu’une baisse d’impôts avait été votée dans la foulée. La diminution des recettes fiscales qui s’en était suivie, associée au ralentissement économique et à la hausse de la dette cantonale, avait entraîné une dégradation des finances du canton et un équilibre budgétaire difficilement atteignable. Des coupes budgétaires avaient été effectuées au détriment d’associations et de diverses prestations publiques à caractère social, ce qui avait entraîné la précarisation des bénéficiaires de certains emplois dits de solidarité. Le maintien d’un « 14ème salaire » au mérite pour des cadres supérieurs de la fonction publique ne se justifiait ainsi plus, ce d’autant que les autres employés de l’État se trouvaient également dans une situation difficile et ne bénéficiaient d’aucun privilège de ce type.

Le 2 décembre 2014, la commission ad hoc du Grand Conseil chargée d’étudier le PL 11’328 a rendu son rapport et adopté un PL 11’328 amendé. Ce dernier prévoyait le maintien de l’indemnité de 8.3 % pour les cadres en fonction, sauf en cas de changement d’affectation si les conditions à son octroi n’étaient plus réunies, situation dans laquelle le versement cessait le deuxième mois après ce changement ou l’entrée en vigueur de la loi. Il précisait que les cadres nouvellement engagés ne devaient plus bénéficier de cette indemnité. Il ressortait des différentes interventions devant ladite commission les éléments suivants. L’État avait besoin de hauts cadres compétents et motivés pour améliorer le fonctionnement de l’administration, mais avait de la peine à les attirer en raison des salaires plus élevés dans le privé. Si la rémunération n’était pas un outil de motivation, sa baisse constituait clairement un facteur de démotivation. Alors que les comptes positifs de l’État, au moment de l’adoption de l’ancien art. 23A LTrait, avaient permis d’introduire l’indemnité litigieuse, la situation financière s’était détériorée, ce qui entraînait des difficultés budgétaires et posait la question de la suppression de cette indemnité. Le versement de celle-ci concernait principalement les cadres des HUG et, parmi ceux-ci, majoritairement les médecins qui travaillaient soixante heures ou plus par semaine et n’étaient ainsi pas dans une position comparable aux personnes travaillant quarante heures par semaine. Face à la concurrence qu’exerçaient le secteur privé et d’autres cantons sur les salaires des médecins occupant de hauts postes à responsabilité, et à la nécessité reconnue de disposer de compétences pointues aux HUG, les parlementaires reconnaissaient que le maintien de l’indemnité litigieuse en faveur des médecins était un moyen de garder les cadres médecins ayant de telles compétences aux HUG et de continuer ainsi à y offrir des soins de qualité.

Lors de la séance du 29 janvier 2015, le Grand Conseil a examiné le PL 11’328 et adopté la loi 11’328. L’indemnité de 8.3 %, qui devait initialement être octroyée de manière circonstanciée et n’était pas, à proprement parler, conçue comme un « 14ème salaire » mais accordée sur la base du constat selon lequel la progression des salaires entre les basses classes et celles plus élevées était trop faible, avait été distribuée de manière trop généreuse, même en faveur de personnes n’en remplissant pas toujours les conditions. Bien qu’une part non négligeable de cette indemnité eût été attribuée aux HUG, non pour des cadres supérieurs exerçant des fonctions hiérarchiques, mais pour compenser les différences de salaire des médecins par rapport à la pratique des autres hôpitaux et du secteur privé, il convenait néanmoins d’éviter que ceux-ci ne quittent le canton, raison pour laquelle l’indemnité en cause devait être conservée en leur faveur jusqu’à l’élaboration d’une nouvelle grille salariale, plus adéquate.

4) La loi 11’328 a été publiée dans la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du 6 février 2015. Aucun référendum n’a été déposé contre cette loi, ce qui a été constaté dans l’arrêté du Conseil d’État du 25 mars 2015 promulguant cette dernière. Cet arrêté a été publié dans la FAO du 27 mars 2015. La loi 11’328 est entrée en vigueur le 28 mars 2015.

5) Par décision du 20 avril 2015, le Conseil d’État a supprimé, à partir du mois d’avril 2015, l’indemnité de 8.3 % de M. A______, en raison de l’entrée en vigueur de la loi 11’328. Cette décision était déclarée exécutoire nonobstant recours.

6) Le 22 avril 2015, M. A______, par le biais de son conseil, a demandé au Conseil d’État de renoncer à lui supprimer l’indemnité de 8.3 % prévue dans l’ancien art. 23A LTrait, malgré l’entrée en vigueur de la loi 11’328, et à la lui verser à tout le moins jusqu’à l’entrée en vigueur du projet SCORE [système de réévaluation des compétences, de rémunération et d’évaluation]. Dans la négative, il l’invitait à transmettre sa contestation à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), à titre de recours concluant à l’annulation de la suppression de ladite indemnité en tant qu’il était visé à titre individuel.

L’indemnité de 8.3 % devait lui être versée sur la base des dispositions du RTrait relatives à l’ancien art. 23A LTrait, non abrogées, ainsi que sur la base du régime transitoire fixé à l’art. 16 RTrait prévoyant un mécanisme de compensation. Il bénéficiait de droits acquis fondés sur des assurances précises contenues, d’une part, à l’art. 16 RTrait et, d’autre part, à l’ancien art. 23A LTrait jusqu’à l’entrée en vigueur de la nouvelle évaluation des fonctions (dit projet SCORE). L’art. 23B LTrait contrevenait au principe d’égalité de traitement en matière d’évaluation de fonction, dans la mesure où cette disposition accordait le versement de l’indemnité de 8.3 % aux seuls médecins des HUG, alors qu’il était notoirement exposé dans l’une des fonctions les plus exigeantes de la fonction publique genevoise. Cette différence de traitement n’était pas motivée de manière objective, et était dès lors arbitraire, injustifiée et insoutenable. Il bénéficiait par ailleurs de formations complémentaires utiles au poste telles que [ formation].

7) Le 20 mai 2015, l’office du personnel de l’État (ci-après : OPE) a transmis à la chambre administrative, avec copie à l’intéressé, en application de l’art. 11 al. 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), le courrier de M. A______ du 22 avril 2015, à titre de recours, la demande de ce dernier ayant été refusée.

8) Le même jour, l’OPE a informé M. A______, avec copie à la chambre administrative, du refus de maintenir en sa faveur l’indemnité de 8.3 % et de la transmission de son recours à la chambre administrative. Il lui avait versé, suite à la suppression de ladite indemnité, une somme de CHF 604.55 en application des art. 46 LTrait et 16 RTrait afin de compenser l’écart de traitement entre l’ancienne échelle salariale et le nouveau système de rémunération entré en vigueur le 1er janvier 2009.

9) Par acte mis à la poste le 22 mai 2015, M. A______, par le biais de son conseil, a saisi la chambre administrative d’un recours contre la décision du Conseil d’État du 20 avril 2015, qu’il avait reçue le 22 avril 2015, en concluant à l’annulation de celle-ci ainsi qu’à la restitution de l’effet suspensif.

Il reprenait ses arguments exposés dans le courrier du 22 avril 2015. La décision litigieuse violait en outre plusieurs dispositions de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), en particulier le principe de la proportionnalité, le principe de l’interdiction de l’arbitraire et la garantie de la propriété, en raison du caractère abrupt de l’application de la loi et de son impact sur son traitement consistant en une réduction conséquente de celui-ci avec effet immédiat et sans aucun préavis. Prenant acte du choix du pouvoir législatif, sans examen de sa constitutionnalité lors de son application aux cas des fonctionnaires concernés, elle était également insuffisamment motivée, en violation de l’art. 29 al. 2 Cst. Le caractère immédiatement exécutoire de la décision litigieuse n’était aucunement motivé et ne se justifiait pas, son propre intérêt à obtenir la restitution de l’effet suspensif primant celui de l’État, mineur, vu la poursuite des rapports de travail et le nouveau projet de loi du Conseil d’État visant à offrir une indemnité analogue.

10) Le 15 juillet 2015, l’OPE, au nom et pour le compte du Conseil d’État, a conclu au rejet tant du recours que de la demande de restitution de l’effet suspensif, dans la mesure où ils étaient recevables.

Le versement de l’indemnité litigieuse ne pouvait se fonder sur les dispositions du RTrait, étant donné que la loi 11’328 ne laissait plus d’autre choix au Conseil d’État que de la supprimer avec effet immédiat, et ce indépendamment de la non-abrogation de la liste figurant dans l’annexe du RTrait. Le recourant n’avait pas reçu d’assurances précises de la part du Conseil d’État et ne saurait de ce fait se prévaloir de droits acquis. L’art. 23A LTrait ne pouvait pas non plus être le fondement d’un droit acquis, vu que cette disposition n’avait pas pour effet de soustraire la situation de l’intéressé à une modification de la LTrait. La lettre de cette disposition, qui employait le terme « peuvent », ne liait pas le législateur pour l’avenir. Il n’en ressortait pas que le législateur aurait renoncé à supprimer l’indemnité avant l’échéance de l’entrée en vigueur d’une nouvelle évaluation des fonctions. La durée limitée du versement de l’indemnité était prévue par cette disposition, mais de manière indéterminée et en relation avec un événement futur dont la survenance n’était ni définie ni garantie. Ni les travaux parlementaires ayant conduit à l’adoption de l’art. 23A LTrait, ni l’interprétation téléologique de cette norme ne permettaient de déduire que le législateur voulait introduire un droit acquis, ni qu’il avait l’intention d’introduire une indemnité qu’il ne supprimerait pas avant l’entrée en vigueur de la nouvelle évaluation des fonctions. Le but de l’art. 23A LTrait était de donner la possibilité de motiver, de fidéliser et de gratifier les hauts cadres afin d’améliorer l’efficience et l’efficacité de l’administration cantonale, et non de leur garantir une indemnité supplémentaire jusqu’à l’adoption d’une nouvelle évaluation des fonctions par le Conseil d’État, celui-ci ne sachant pas si et quand cette dernière aboutirait. Il ne serait par ailleurs pas compréhensible que le législateur ait voulu créer un droit acquis, indépendamment de la situation financière de l’État, pour l’indemnité de 8.3 % prévue dans l’art. 23A LTrait, qui employait le terme « peuvent » et visait à offrir une possibilité, alors qu’il suspendait régulièrement l’annuité ancrée à l’art. 12 al. 1 LTrait qui créait un droit à l’obtenir.

Vu la durée des travaux préparatoires de la loi 11’328 écoulée depuis le dépôt du projet de celle-ci en décembre 2013 jusqu’à son adoption par le Grand Conseil fin janvier 2015, respectivement jusqu’à son entrée en vigueur fin mars 2015, ainsi que les articles de la presse évoquant la suppression de l’indemnité des cadres supérieurs parus en 2014 et début 2015, le recourant ne pouvait pas prétendre ne pas avoir eu le temps de prendre ses dispositions au regard de l’abrogation de l’art. 23A LTrait. De plus, la jurisprudence fédérale admettait l’absence d’un délai transitoire en cas de réduction « minime » ou « négligeable » du traitement, ce qui était le cas de la suppression de l’indemnité litigieuse de 8.3 %, celle-là ne portant pas sur le traitement de base de l’intéressé qui était important dans le cadre de l’administration cantonale. Ce dernier n’avait au surplus pas fourni d’éléments concrets permettant de retenir que la suppression immédiate de l’indemnité perçue jusqu’au 31 mars 2015 entraînerait des conséquences particulièrement dommageables. L’absence de délai transitoire ne violait ainsi pas les principes constitutionnels de la bonne foi et de la proportionnalité.

Quant au grief de l’inégalité de traitement découlant du nouvel art. 23B LTrait, il devait être rejeté. La situation des médecins des HUG ayant un traitement situé dès la classe 27 et celle des autres cadres supérieurs étaient différentes et pouvaient être traitées différemment, même si tel n’avait pas été le cas jusque-là. La question de savoir si une distinction juridique reposait sur un motif raisonnable, pouvait recevoir une réponse différente selon les époques et suivant les conceptions, idéologies et situations du moment. Le législateur cantonal disposait en outre de motifs raisonnables pour introduire une distinction entre le personnel médical et les autres cadres supérieurs. Il avait décidé de maintenir l’indemnité litigieuse pour les médecins, au moins à titre temporaire, afin d’éviter que les médecins compétents partent ou que les postes aux HUG ne soient moins attractifs en comparaison avec d’autres hôpitaux, ce qui entraînerait une dégradation subséquente de la qualité des prestations fournies. De plus, conformément à la jurisprudence fédérale, une différence de rémunération de 8.3 % entre deux catégories différentes, voire entre des professions différentes, ne violait pas l’art. 8 Cst.

11) Par arrêt du 30 juillet 2015 (ACST/13/2015), la chambre constitutionnelle de la Cour de justice (ci-après : la chambre constitutionnelle) a rejeté le recours interjeté par des tiers contre la loi 11’328, dans la limite de leurs conclusions visant l’annulation de l’abrogation de l’art. 23A LTrait, à l’exclusion de l’art. 23B LTrait. Elle a écarté les griefs exposés de manière détaillée, tirés de la violation de droits acquis et de l’absence d’un régime transitoire.

12) Le 21 août 2015, le recourant a persisté dans ses conclusions, tout en relevant de nouveaux griefs portant sur la violation de son droit d’être entendu avant la prise de la décision litigieuse, l’absence d’examen préjudiciel de la constitutionnalité de la loi 11’328 par le Conseil d’État avant de rendre la décision querellée et l’absence d’application, par ce dernier, de l’art. 3 LTrait pour lui verser l’indemnité litigieuse budgétée.

Il complétait son exposé des faits concernant sa rémunération lors de l’entrée en vigueur de l’indemnité litigieuse. En raison de celle-ci, il avait alors renoncé à certaines prétentions salariales prenant en compte ses conditions de travail à [ B______] et son certificat de [ formation]. Il sollicitait sur ce point une audience de comparution personnelle. La différence de traitement favorisant les cadres médicaux par rapport aux autres cadres de l’administration reposait sur des motifs uniquement politiques et contrevenait à la Cst. dans la mesure où l’échelle des traitements genevoise s’appliquait à tous, sans distinction et qu’il n’existait pas d’élément objectif et sérieux justifiant une telle différence de traitement.

13) Sur demande du juge délégué suite à l’arrêt précité de la chambre constitutionnelle, le recourant a, le 15 septembre 2015, maintenu son recours.

14) Le 22 septembre 2015, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

15) Le 9 octobre 2015, le recourant a demandé à ce que le Conseil d’État soit interpellé sur les échos parus dans la presse du même jour concernant le maintien de l’indemnité litigieuse en faveur de certains cadres de l’administration fiscale cantonale, ainsi que sur les conditions de l’octroi de ladite indemnité.

16) Le 8 décembre 2015, a été adressée au recourant copie des explications du Conseil d’État du 20 novembre 2015. Ce dernier avait décidé, en mars 2015, d’accorder, sur la base de l’art. 3 LTrait, un traitement spécifique à sept membres du personnel du département des finances actifs dans le domaine fiscal, disposant de connaissances tout à fait spéciales et ayant des responsabilités particulièrement importantes.

 

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile d’abord devant une autorité administrative incompétente, puis devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 11 al. 3 et 62 al. 1 let. a LPA).

2) La demande de comparution personnelle sollicitée par le recourant dans son écriture du 21 août 2015 sera rejetée, dans la mesure où elle porte sur des éléments sortant du cadre du présent litige. En effet, ce dernier est délimité principalement par l’objet du recours (Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2015, p. 554 s), à savoir en l’espèce la décision litigieuse qui vise uniquement la suppression de l’indemnité prévue dans l’ancien art. 23A LTrait, à l’exclusion de toute autre éventuelle prétention de l’intéressé. Or, la mesure d’instruction précitée vise à démontrer que le recourant a renoncé à certaines prétentions salariales tenant compte de ses conditions de travail et de son certificat de [ formation]. Comme ces éléments sont irrelevants pour l’issue du présent litige circonscrit à l’octroi ou non de l’indemnité litigieuse, la chambre de céans renoncera à procéder à une audience de comparution personnelle.

3) Quant aux griefs relatifs au droit d’être entendu invoqués par le recourant, ils ne peuvent qu’être rejetés pour les raisons suivantes.

En ce qui concerne l’insuffisance de la motivation de la décision litigieuse, le droit d’être entendu du recourant n’a pas été violé. En effet, conformément à la jurisprudence (ATF 136 I 184 consid. 2.2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_594/2014 du 15 janvier 2015 consid. 5.1 ; 1C_665/2013 du 24 mars 2014 consid. 2.1 ; ATA/679/2015 du 23 juin 2015 consid. 7), la motivation de la décision litigieuse est suffisante ; elle permet à l’intéressé de comprendre la portée de celle-ci à son égard et de recourir à son encontre en connaissance de cause. En justifiant la suppression de l’indemnité litigieuse par l’entrée en vigueur de la loi 11’328 qui abrogeait l’art. 23A LTrait, le Conseil d’État a suffisamment et dûment motivé la décision litigieuse.

Quant à l’argument invoquant une violation du droit d’être entendu avant la prise de décision querellée, il est tardif et donc irrecevable car il s’agit d’un grief soulevé hors du délai de recours, dans l’écriture du 21 août 2015. Au surplus, il n’est pas contesté que le recourant connaissait l’existence de travaux législatifs portant sur le PL 11’328 visant la suppression de l’indemnité litigieuse. Il pouvait donc s’attendre à voir son indemnité fondée sur l’ancien art. 23A LTrait supprimée dès la publication de l’arrêté de promulgation du Conseil d’État dans la FAO du 27 mars 2015. A cela s’ajoute le fait que même si une violation du droit d’être entendu devait en l’espèce être constatée, elle pourrait être réparée devant la chambre de céans au regard de la jurisprudence constante (ATF 138 I 97 consid. 4.16.1 ; 137 I 195 consid. 2.3.2 ; 133 I 201 consid. 2.2 ; ATA/666/2015 du 23 juin 2015 consid. 2b). En effet, vu l’adoption de la loi 11’328 le 29 janvier 2015 et l’absence de marge de manœuvre qu’elle laisse au Conseil d’État, le texte de la loi excluant toute appréciation en opportunité pour la suppression, la chambre administrative, habilitée à revoir les faits et le droit (art. 61 al. 1 LPA), dispose du même pouvoir d’examen que le Conseil d’État sur la question de la suppression de l’indemnité litigieuse. Ce grief doit en conséquence être écarté.

4) Le recourant considère que l’art. 23B LTrait viole le principe de l’égalité de traitement au motif qu’il accorde l’indemnité de 8.3 % aux seuls médecins des HUG, que cette différence de traitement ne repose sur aucun motif objectif et qu’elle est arbitraire et insoutenable. Il se plaint également de recevoir une rémunération insuffisante au regard de certaines circonstances concrètes concernant sa situation particulière.

a. De jurisprudence constante, la chambre administrative est habilitée à revoir, à titre préjudiciel et à l’occasion de l’examen d’un cas concret, la conformité des normes de droit cantonal au droit fédéral (ATA/582/2015 du 9 juin 2015 consid. 5a et les arrêts cités ; Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, Droit administratif, vol. 1, 3ème éd., 2012, p. 345 ss n. 2.7.3). Cette compétence découle du principe de la primauté du droit fédéral sur le droit des cantons, ancré à l’art. 49 al.1 Cst. (ATF 138 I 410 consid. 3.1 p. 414 ; ATA/582/2015 précité). D’une manière générale, les lois cantonales ne doivent rien contenir de contraire à la Cst., aux lois et ordonnances du droit fédéral (ATF 127 I 185 consid. 2 p. 187 ; ATA/121/2013 du 26 février 2013 consid. 4 et les arrêts cités ; Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, vol. 1, 3ème éd., 2013, p. 786 n. 2337 ss). Le contrôle préjudiciel permet de déceler et de sanctionner la violation par une loi ou une ordonnance cantonales des droits garantis aux citoyens par le droit supérieur. Toutefois, dans le cadre d'un contrôle concret, seule la décision d'application de la norme viciée peut être annulée (ATA/582/2015 précité ; Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, op. cit., p. 352 ss n. 2.7.4.2).

b. Selon l’art. 8 al. 1 Cst., tous les êtres humains sont égaux devant la loi. Nul ne doit subir de discrimination du fait notamment de son origine, de sa race, de son sexe, de son âge, de sa langue, de sa situation sociale, de son mode de vie, de ses convictions religieuses, philosophiques ou politiques ni du fait d'une déficience corporelle, mentale ou psychique (art. 8 al. 2 Cst.).

c. Une norme viole le principe de l’égalité de traitement consacré à l’art. 8 Cst. lorsqu’elle établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer, ou lorsqu’elle omet de faire des distinctions qui s’imposent au vu des circonstances, c’est-à-dire lorsque ce qui est semblable n’est pas traité de manière identique et ce qui est dissemblable ne l’est pas de manière différente. Cela suppose que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante (ATF 138 I 225 consid. 3.6.1 ; ATF 138 I 265 consid. 4.1 ; ATF 131 I 1 consid. 4.2 ; ATF 131 I 394 consid. 4.2 ; ATF 127 I 185 consid. 5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_582/2013 du 2 mai 2014 consid. 6.2.1). La question de savoir s’il existe un motif raisonnable pour une distinction peut recevoir des réponses différentes suivant les époques et les idées dominantes. Le législateur dispose toutefois d’un large pouvoir d’appréciation dans le cadre de ces principes et de l’interdiction de l’arbitraire (ATF 133 I 249 consid. 3.3 ; ATF 131 I 1 consid. 4.2). Le Tribunal fédéral n’intervient que si, sur des points importants, les assimilations ou distinctions effectuées s’avèrent clairement injustifiées et insoutenables (ATF 136 I 297 consid. 6.1 ; ATF 135 I 130 consid. 6.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_706/2012 du 16 avril 2013 consid. 5.1 ; 2C_491/2012 du 26 juillet 2012 consid. 5.1).

Le principe de l’égalité (art. 8 Cst.) et celui de l’interdiction de l’arbitraire (art. 9 Cst.) sont étroitement liés. Une norme ou une décision est arbitraire lorsqu’elle ne repose pas sur des motifs objectifs sérieux ou si elle est dépourvue de sens et de but (ATF 136 I 241 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_753/2011 du 11 octobre 2012 consid. 3.2.2). L’inégalité de traitement apparaît ainsi comme une forme particulière d’arbitraire, consistant à traiter de manière inégale ce qui devrait l’être de manière semblable ou inversement (ATF 132 I 157 consid. 4.1 ; ATF 129 I 1 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2P.181/2006 du 28 novembre 2006 consid. 2.2).

Au principe d’égalité de traitement, l’art. 8 al. 2 Cst. ajoute une interdiction de discriminations. Le principe de non-discrimination n’interdit toutefois pas toute distinction basée sur l’un des critères énumérés dans cette disposition, mais fonde plutôt le soupçon d’une différenciation inadmissible. Les inégalités résultant d’une telle distinction doivent faire l’objet d’une justification particulière (ATF 137 V 334 consid. 6.2.1 ; ATF 135 I 49 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_753/2011 du 11 octobre 2012 consid. 3.2.2).

d. De la garantie générale de l’égalité de traitement de l’art. 8 al. 1 Cst. découle l’obligation de l’employeur public de rémunérer un même travail avec un même salaire. Dans les limites de l’interdiction de l’arbitraire, les autorités disposent d’une grande marge d’appréciation, particulièrement en ce qui concerne les questions d’organisation et de rémunération. La juridiction saisie doit observer une retenue particulière lorsqu’il s’agit non seulement de comparer deux catégories d’ayants droit mais de juger tout un système de rémunération ; elle risque en effet de créer de nouvelles inégalités. La question de savoir si des activités doivent être considérées comme identiques dépend d’appréciations qui peuvent se révéler différentes. Dans les limites de l’interdiction de l’arbitraire et du principe de l’égalité de traitement, les autorités sont habilitées à choisir, parmi les multiples éléments pouvant entrer en considération, les critères qui doivent être considérés comme déterminants pour la rémunération des fonctionnaires. Le droit constitutionnel n’exige pas que la rémunération soit fixée uniquement selon la qualité du travail fourni, voire selon des exigences effectivement posées. Les inégalités de traitement doivent cependant être raisonnablement motivées, et donc apparaître objectivement défendables. Ainsi le Tribunal fédéral a-t-il reconnu que l’art. 8 Cst. n’était pas violé lorsque les différences de rémunération reposaient sur les motifs objectifs tels que l’âge, l’ancienneté, l’expérience, les charges familiales, les qualifications, le genre et la durée de la formation requise pour le poste, le temps de travail, les horaires, le cahier des charges, l’étendue des responsabilités ou les prestations (ATF 139 I 161 consid. 5.3.1 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_582/2013 du 2 mai 2014 consid. 6.2.2). D’autres circonstances, qui n’ont pas trait à la personne ou à l’activité du travailleur, peuvent également justifier, à tout le moins temporairement, des différences de salaire, telles une situation conjoncturelle rendant plus difficile le recrutement du personnel ou des contraintes budgétaires de la collectivité publique (arrêt du Tribunal fédéral 8C_969/2012 du 2 avril 2013 consid. 2.2 et les références citées).

 L’appréciation dépend, d’une part, de questions de fait, comme par exemple des activités qui sont exercées dans le cadre d’une certaine fonction, des exigences posées à la formation, des circonstances dans lesquelles l’activité est exercée, etc. Elle dépend, d’autre part, de la pondération relative qui est attribuée à ces différents éléments. Cette pondération n’est en principe pas réglée par le droit fédéral. Les autorités cantonales compétentes disposent ainsi, et pour autant que le droit cantonal applicable ne contienne pas certaines règles, d’une grande liberté d’appréciation. Le droit fédéral impose cependant des limites à cette liberté : l’appréciation ne doit pas se faire de façon arbitraire ou inégale (ATF 125 II 385 consid. 5b ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_991/2010 du 28 juin 2011 consid. 5.4 ; 8C_199/2010 du 23 mars 2011 consid. 6.3). En d’autres termes, sont permis tous les critères de distinction objectivement soutenables (arrêts du Tribunal fédéral 8C_582/2013 du 2 mai 2014 consid. 6.2.3 ; 8C_766/2013 du 17 octobre 2014 consid. 4.2).

e. En matière d’évaluation de fonctions, le Tribunal fédéral a précisé qu’en relation avec d’autres fonctions ou sur la base d’exigences précises, l’évaluation ne peut jamais être réalisée de manière objective et neutre, mais contient, par la force des choses, une grande part d’appréciation, dont la concrétisation dépend de la façon dont une certaine tâche est perçue par la société, respectivement par l’employeur. L’évaluation et la classification d’une activité ou fonction déterminée n’est ni une question de fait, ni une question de droit, ni une question d’appréciation, mais comporte des éléments relevant de ces trois catégories. L’application du principe d’égalité ne conduit pas à considérer une appréciation déterminée comme étant la seule juridiquement valable ; elle peut seulement qualifier des appréciations spécifiques d’inadmissibles car discriminatoires. Dans ce cadre, les autorités politiques compétentes disposent d’une marge d’appréciation importante (ATF 125 II 385 consid. 5b).

  f. L’ancien Tribunal administratif, dont la jurisprudence est reprise par la chambre administrative, a confirmé la décision du Conseil d’État de ne pas inclure les commissaires de police situés en classe 27 dans la liste des bénéficiaires de l’indemnité prévue à l’ancien art. 23A LTrait, faute d’exercer des responsabilités hiérarchiques. D’une part, la définition de cette notion-ci figurant dans une note du chef du département concerné se fondait sur des critères objectifs et aisément applicables. D’autre part, le Conseil d’État disposait, sur cette question, d’un large pouvoir d’appréciation (ATA/664/2010 du 28 septembre 2010 consid. 6 et les références citées).

g. Dans une affaire zurichoise de 2012, le Tribunal fédéral a admis une différence de rémunération de 13 % par année entre les membres de juridictions différentes (ATF 138 I 321 consid. 6). Il a rappelé dans cet arrêt que l’admissibilité des différences de salaire dépendait de l’ampleur de la différence et renvoyé à la jurisprudence fédérale relative à la rémunération des enseignants (ATF 138 I 321 consid. 6 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_991/2010 du 28 juin 2011 consid. 5.5). Des différences de salaire, à l’intérieur de différentes catégories du corps enseignant suivantes, ont été reconnues comme soutenables par la jurisprudence fédérale : environ 31,6 % entre des remplaçants et des enseignants titularisés (ATF 129 I 161) ; une différence de l’ordre de 22 % entre les maîtres de l’école primaire et du cycle d’orientation (ATF 121 I 49) ; environ 6,6 %, respectivement 12 %, entre les enseignants principaux et les chargés de cours, même si dans le cas concret il n’y avait pas de différence de formation professionnelle, de responsabilité et de domaine d’activité (ATF 121 I 102 ; arrêt du Tribunal fédéral 2P.325/1992 du 10 décembre 1993 consid. 5a/bb) ; une différence de rémunération d’environ 20-26 % entre deux catégories d’enseignants, dont la formation était différente, mais qui enseignaient en partie dans la même école (arrêt du Tribunal fédéral 2P.77/1996 du 27 septembre 1996 consid. 2) ; un écart de presque 10 % entre des logopédistes avec une maturité comme formation de base et des logopédistes avec un diplôme d’instituteur (ATF 123 I 1) ; 6,73 % de différence de salaire et en plus 7,41 % de différence dans le nombre d’heures obligatoires, entre des enseignants de branches commerciales et des enseignants de branches pratiques (arrêt du Tribunal fédéral 2P.249/1997 du 10 août 1998) ; environ 18 % entre des enseignants de l’école secondaire et des enseignants d’une école professionnelle, malgré une formation identique (arrêt du Tribunal fédéral 1P.413/1999 du 6 octobre 1999).

h. Dans le canton de Genève, la rémunération des membres du personnel de l’État de Genève, y compris [ ], (ci-après : les membres du personnel) est régie par la LTrait (art. 1 al. 1 let. b et e LTrait). Cette loi distingue le traitement, réglé à son titre II, et les « diverses prestations » prévues à son titre III. Par diverses prestations, il faut entendre les prestations allouées aux membres du personnel en sus du traitement fixé conformément au titre II (art. 15 LTrait). Ces diverses prestations sont exhaustivement énumérées aux art. 16 ss LTrait. Elles comprenaient, jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi 11’328 le 28 mars 2015, l’indemnité litigieuse fixée dans l’ancien art. 23A LTrait et, depuis cette date, l’indemnité prévue à l’art. 23B LTrait.

Quant au traitement, il est, en règle générale, déterminé suivant l’échelle prévue à l’art. 2 LTrait, déclinée en classe et position (ou annuité). Le Conseil d’État établit et tient à jour le règlement et le tableau de classement des fonctions permettant de fixer la rémunération de chaque membre du personnel en conformité de l’échelle des traitements (art. 4 al. 1 LTrait). Dans ce classement, il doit être tenu compte du rang hiérarchique et des caractéristiques de chaque fonction en prenant en considération notamment l’étendue qualitative et quantitative des attributions dévolues et des obligations à assumer, les connaissances professionnelles et aptitudes requises, l’autonomie et les responsabilités, les exigences, inconvénients, difficultés et dangers que comporte l’exercice de la fonction (art. 4 al. 2 LTrait). L’autorité de nomination fixe la rémunération des membres du personnel dans un acte d’engagement ou de nomination, en application de l’échelle des traitements, du tableau de classement des fonctions et des principes posés à l’art. 11 (art. 5 LTrait). Toutefois, l’art. 3 LTrait donne la possibilité au Conseil d’État de prévoir des traitements « hors classes ». Selon l’art. 3 al. 1 LTrait, le Conseil d’État peut, pour tenir compte de circonstances exceptionnelles, attribuer aux titulaires de certaines fonctions exigeant des connaissances tout à fait spéciales ou comportant des responsabilités particulièrement importantes un traitement annuel « hors classes » qu’il fixe lui-même sans être tenu de se conformer aux minimums ou aux maximums prévus à l’art. 2. L’art. 3 al. 2 LTrait précise qu’il ne peut prendre une telle décision que sous réserve de l’art. 96 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst-GE - A 2 00). L’art. 96 Cst-GE dispose : « Le Grand Conseil adopte le budget annuel, autorise les dépenses et approuve les comptes annuels. Il fixe les impôts. ».

i. En l’espèce, la loi 11’328 traite différemment les cadres dès la classe 27 exerçant des responsabilités hiérarchiques, dans la mesure où elle restreint le cercle des bénéficiaires de l’indemnité mensuelle de 8.3 % du salaire annuel, aux seuls médecins des HUG. Le versement de ladite indemnité est ainsi soumis à une nouvelle condition, qui est celle d’être médecin aux HUG. Ce critère, inexistant dans l’ancien art. 23A LTrait, établit une distinction entre les cadres dès la classe 27 exerçant des responsabilités hiérarchiques. Cette distinction est cependant basée sur la qualification professionnelle desdits cadres fondée sur leur formation nécessaire à l’exercice de leur fonction. Il s’agit ainsi d’un critère objectif admis par la jurisprudence fédérale.

Quant au caractère raisonnable de la distinction précitée entre les cadres susmentionnés de la fonction publique, il est certes discutable dans la mesure où l’État a le devoir d’assurer le niveau de toutes les prestations lui incombant de par la loi, quel que soit le secteur public visé. Toutefois, la différence de rémunération litigieuse ne résulte pas de l’échelle des traitements, mais du versement d’une indemnité spéciale à caractère facultatif visant à compléter le salaire de base, et ce pendant une durée limitée dans le temps au 31 décembre 2017. Limitée à 8.3 % du salaire, l’indemnité litigieuse entraîne une différence salariale, dont l’ampleur est considérée admissible par la jurisprudence fédérale. Elle ne repose en outre sur aucun élément considéré discriminatoire au sens de l’art. 8 al. 2 Cst. Au surplus, il n’est, à juste titre, pas soutenu que le travail d’un cadre médecin est similaire à celui d’un cadre d’un autre secteur.

En ce qui concerne la comparaison salariale avec le secteur privé, ayant à l’origine motivé l’adoption de l’ancien art. 23A LTrait, elle ne constitue pas un élément permettant de qualifier d’insoutenable ou d’arbitraire le critère de distinction retenu par l’art. 23B LTrait en faveur des seuls médecins cadres des HUG. En effet, premièrement, il n’est pas contesté que les exigences liées à l’exercice de responsabilités hiérarchiques sont déjà prises en compte, à travers des critères figurant à l’art. 4 al. 2 LTrait, par la classe attribuée aux postes des cadres concernés par la suppression de l’ancien art. 23A LTrait. Deuxièmement, l’art. 3 LTrait permet au Conseil d’État de fixer un traitement « hors classe » pour des fonctions exigeant des connaissances tout à fait spéciales ou comportant des responsabilités particulièrement importantes. Par ce biais, l’État dispose du moyen d’attirer et de rémunérer les compétences tout à fait particulières et absolument nécessaires à son bon fonctionnement, et ce sans devoir modifier sa grille salariale ni adopter d’indemnité spéciale. Troisièmement, le niveau des salaires des cadres dans le secteur privé est variable suivant la branche d’activité concernée, ce qui rend la comparaison difficile voire vaine, ce d’autant plus que certains métiers exercés à l’État n’existent pas dans le privé comme les gardiens de prison ou les taxateurs fiscaux. À cela s’ajoute la nature diamétralement opposée entre les prestations assignées par les lois à l’État et celles que les entreprises du secteur privé choisissent librement d’offrir en échange d’une rémunération fixée par les lois du marché et par la politique de l’entreprise concernée. La motivation du secteur privé, bien qu’elle puisse aussi poursuivre un but idéal, est en général essentiellement de nature lucrative. Or, l’État n’a pas pour mission de retirer un quelconque bénéfice financier de l’accomplissement de ses tâches, mais a le devoir d’accorder les prestations publiques suivant les conditions fixées dans les lois. La situation des cadres de l’État doit ainsi être relativisée et replacée dans le contexte de la mission de service public incombant par essence à l’État, contrairement au secteur privé.

À l’ensemble de ces circonstances s’ajoutent deux autres éléments. D’une part, il s’agit de la perception majoritairement partagée par les parlementaires, et ce dès le début des travaux préparatoires, sur l’importance de maintenir des cadres médecins disposant de compétences pointues aux HUG afin d’y offrir des soins de qualité, ainsi que de la volonté subséquente de prévoir un traitement spécifique à cette catégorie de cadres parmi ceux visés par l’ancien art. 23A LTrait. D’autre part, la situation budgétaire s’est péjorée depuis le moment de l’adoption de l’art. 23A LTrait, notamment au détriment des personnes se trouvant dans la précarité. Ces circonstances permettent de reconnaître l’existence d’un motif sérieux expliquant objectivement le resserrement des conditions d’octroi de l’indemnité litigieuse en faveur d’une seule catégorie de cadres visés par l’ancien art. 23A LTrait.

Au vu de ce qui précède, il ne peut être reproché au Grand Conseil, qui dispose en la matière d’un large pouvoir d’appréciation, de s’être fondé sur un critère insoutenable ni arbitraire. En supprimant l’indemnité litigieuse des cadres dès la classe 27 exerçant des responsabilités hiérarchiques, à l’exclusion des cadres médecins des HUG, il n’a pas commis un excès ou un abus de son pouvoir d’appréciation. La fixation d’un nouveau critère de distinction, ancré à l’art. 23B LTrait et affinant les conditions d’octroi d’une indemnité, supplémentaire au traitement et facultative, en faveur d’une catégorie de cadres de l’État, ne viole ainsi ni le principe de l’interdiction de l’arbitraire, ni celui de l’égalité de traitement. Dès lors, les griefs tirés tant de l’inégalité de traitement contenus dans la loi que de la violation du principe de l’interdiction de l’arbitraire doivent être écartés. Le recours sera donc rejeté sur ces points.

j. Le recourant soutient également que la fonction de cadre au sein de son domaine d’activité est particulièrement difficile, qu’elle exige pour ce motif le maintien de l’indemnité litigieuse, qu’il est au surplus au bénéfice d’une formation utile au poste non prise en compte dans sa rémunération depuis la suppression de l’indemnité litigieuse. Or, en l’état actuel du droit, ces circonstances ne donnent pas droit à cette dernière. Elles peuvent tout au plus servir à caractériser la fonction occupée par le recourant et sont ainsi susceptibles d’être prises en compte dans le cadre d’une éventuelle réévaluation de sa fonction, voire dans le cadre d’une modification à la hausse de ses annuités ou, si les conditions sont réalisées, d’un traitement « hors classe » au sens de l’art. 3 LTrait. Or, ces questions sortent du cadre du présent litige dont l’objet est limité au versement de l’indemnité litigieuse. A cela s’ajoute le fait que l’absence d’application de l’art. 3 LTrait a été soulevée par le recourant hors du délai de recours, dans son écriture du 21 août 2015. Quant à l’argument portant sur les échos parus dans la presse au sujet du maintien de l’indemnité litigieuse en faveur de certains cadres de l’administration fiscale cantonale, il n’est pas pertinent, faute de concerner la même réglementation juridique que celle applicable au recourant. En effet, ces derniers ont bénéficié d’un traitement « hors classe » prévu à l’art. 3 LTrait, et non d’une indemnité - au sens de l’ancien art. 23A LTrait ou de l’art. 23B LTrait - destinée à compléter le traitement découlant de l’échelle des traitements fixée à l’art. 2 LTrait. Par conséquent, ni le principe de l’égalité de traitement ni celui de l’interdiction de l’arbitraire n’ont été violés dans le présent cas. S’agissant de ces griefs, le recours doit donc être rejeté.

5) Le recourant estime bénéficier de droits acquis fondés sur des assurances précises jusqu’à l’entrée en vigueur du projet SCORE, qui seraient contenues, d’une part, à l’art. 16 RTrait et, d’autre part, à l’ancien art. 23A LTrait.

a. L’art. 16 RTrait précise le mécanisme de compensation prévu à l’art. 46 LTrait. Ce dernier comporte des dispositions transitoires réglant le traitement des collaborateurs qui sont déjà membres de la fonction publique au 31 décembre 2008. D’une part, ces dispositions n’affectent pas l’indemnité litigieuse, mais le traitement qui ne fait pas partie de l’objet du présent litige. D’autre part, l’OPE a versé à l’intéressé, suite à la suppression de l’indemnité litigieuse, une somme d’argent en application de ces dispositions, comme cela ressort de son courrier du 20 mai 2015. Ce grief doit donc être écarté.

b. Quant à l’argument relatif aux droits acquis qui seraient contenus à l’ancien art. 23A LTrait, il rejoint celui soulevé par des cadres visés par cette disposition, devant la chambre constitutionnelle dans le cadre du recours contre la loi 11’328. Le recourant ne fonde pas cet argument sur des circonstances particulières propres à sa situation personnelle, mais sur l’ancien art. 23A LTrait abrogé par ladite loi dont la conformité aux droits acquis découlant du principe de la bonne foi et de la garantie de la propriété, a été examinée par la chambre constitutionnelle dans son arrêt ACST/13/2015 susmentionné. Celle-ci n’a constaté aucune violation du droit supérieur sur cette question, vu l’absence de garantie spécifique accordée par la loi aux bénéficiaires de l’ancien art. 23A LTrait ou d’assurance donnée à l’occasion d’un engagement individuel en leur faveur. Elle a écarté l’argument, selon lequel le texte de l’ancien art. 23A LTrait consacrait une telle garantie avançant que cette disposition visait à leur assurer le paiement d’une indemnité jusqu’à l’entrée en vigueur d’une nouvelle évaluation des fonctions. En effet, cette norme s’apparentait davantage à une réglementation spécifique, intermédiaire, qu’à une garantie accordée à ses bénéficiaires, même si elle avait été adoptée dans le contexte de la loi 10’250, qui avait eu pour conséquence de réduire l’écart entre les classes les plus basses et les plus élevées de l’échelle des traitements. Elle ne pouvait être considérée comme une anticipation de la nouvelle grille salariale, qui prévoyait la refonte du système de rémunération des postes de cadre supérieur au moyen d’une augmentation salariale. Elle n’avait pas été conçue à cette fin mais pour valoriser les postes concernés de manière à les rendre compétitifs par rapport à ceux du secteur privé. Il s’agissait davantage d’un outil de motivation pour les hauts fonctionnaires de l’État, et non à proprement parler d’un « 14ème salaire » malgré la terminologie utilisée pour la qualifier. L’indemnité prévue à l’ancien art. 23A LTrait se présentait comme une gratification, octroyée en sus du traitement fixe, y compris le 13ème salaire, qui ne pouvait ainsi être considérée comme acquise (ACST/13/2015 consid. 6 à 8).

Conformément à la jurisprudence fédérale (ATF 119 IA 321 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_856/2014 du 10 juillet 2015 consid. 3.3 et 3.4), le rejet du grief d’inconstitutionnalité invoqué dans le cadre du contrôle direct (ou abstrait) d’une norme n’empêche pas le justiciable de soulever à nouveau ce grief contre la même disposition à l’occasion de son application à un cas d’espèce, comme le fait le recourant dans le cadre du présent recours. Selon le Tribunal fédéral, l’arrêt rendu au terme de la procédure de contrôle abstrait ne bénéficie ainsi, dans cette mesure, que d’une autorité relative de la chose jugée. Par ailleurs, le fait que le recourant n’ait lui-même pas interjeté recours contre la loi 11’328 auprès de la chambre constitutionnelle ne saurait l’empêcher de soulever le grief dans le cadre d’un contrôle concret. En effet, d’une part, le recours auprès de la chambre constitutionnelle est facultatif, comme cela ressort clairement de l’art. 124 Cst-GE. D’autre part, les tribunaux cantonaux sont tenus d’examiner, sur demande du recourant, la conformité du droit cantonal applicable au droit supérieur, en application des art. 5 al. 1 et art. 49 al. 1 Cst (ATF 127 I 185 consid. 2 ; ATF 119 IA 321 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_856/2014 précité consid. 3.3 et 3.4 ; Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, op. cit., p. 665 ss ; Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, op. cit., p. 318, 323s et 345 ss).

Toutefois, vu qu’en l’espèce, le recourant soutient bénéficier de droits acquis tirés du texte de l’ancien art. 23A LTrait et en l’absence d’éléments nouveaux déterminants, la chambre administrative fait sienne l’argumentation de la chambre constitutionnelle, exposée dans son arrêt ACST/13/2015. Quant au contrôle concret de cette disposition, le recourant ne soulève, dans le présent recours, aucun élément découlant de sa situation particulière qui tendrait à démontrer le fait qu’une assurance spécifique au sujet de l’octroi de l’indemnité litigieuse lui aurait été personnellement donnée. Rien dans le dossier ne permet non plus d’y conclure. Par conséquent, conformément au droit et à la jurisprudence développés au considérant 6 de l’arrêt ACST/13/2015, le versement de l’indemnité litigieuse ne lui a pas été garanti et ne saurait donc être considéré comme acquis. Le recours doit donc être rejeté sur ce point.

6) Le recourant se plaint du caractère abrupt de l’application de la loi entraînant une réduction conséquente, immédiate et sans préavis, de sa rémunération, en violation du principe de la proportionnalité, du principe de l’interdiction de l’arbitraire et de la garantie de la propriété.

a. Ce grief, qui vise dans la présente procédure la décision litigieuse, a été examiné par la chambre constitutionnelle dans son arrêt ACST/13/2015, en tant qu’il portait sur l’abrogation de l’ancien art. 23A LTrait par la loi 11’328. S’appuyant sur le droit et la jurisprudence pertinents, la chambre constitutionnelle a jugé qu’au vu notamment de la situation financière du canton et pour assurer le principe de la légalité, l’intérêt à la mise en vigueur rapide de la loi 11’328 l’emportait sur l’intérêt privé des cadres recourants à ce que l’indemnité litigieuse continue à leur être versée, ce d’autant en l’absence de réduction drastique de leur traitement par l’abrogation de l’art. 23A LTrait, puisque l’indemnité en cause était limitée à 8.3 % de leur salaire. L’entrée en vigueur de ladite loi le lendemain de sa promulgation ne pouvait être qualifiée de subite dès lors qu’elle avait été adoptée par le Grand Conseil le 29 janvier 2015, laissant aux cadres touchés un délai de deux mois pour prendre leurs dispositions et s’y préparer. De plus, ladite loi pouvait entrer en vigueur rapidement vu qu’elle visait la suppression d’une indemnité, et non du salaire en tant que tel, touchant seulement les plus hauts postes de l’administration, qui demeurait dans des proportions acceptables au regard de la jurisprudence. À cela s’ajoutait notamment le fait qu’au cours des travaux préparatoires tenus pendant l’année 2014, la commission parlementaire en charge d’étudier le PL 11’328 avait procédé à de nombreuses auditions, dont celle de deux membres du comité de l’Union des cadres de l’administration cantonale genevoise, de sorte que le risque de suppression de l’indemnité prévue dans l’ancien art. 23A LTrait était connu (ACST/13/2015 précité consid. 7 et 8c).

b. Certes, l’objet du recours devant la chambre constitutionnelle était la loi 11’328, et non la décision litigieuse. De plus, comme exposé ci-dessus, l’exercice du contrôle abstrait d’une norme n’empêche pas son contrôle concret lors d’un cas d’application et ce pour les mêmes griefs. La particularité du présent cas tient au fait que l’application de la loi 11’328 ne laisse aucune marge de manœuvre à l’autorité exécutive. S’il ne fait pas de doute que cette loi en tant qu’elle abrogeait l’ancien art. 23A LTrait, qui définissait la catégorie des personnes concernées par cette disposition et fixait les critères du versement de l’indemnité litigieuse, devait être concrétisée dans le cas du recourant par une décision afin de lui en opposer les effets juridiques, il n’en demeure pas moins qu’en rendant celle-ci, le Conseil d’État était lié par la loi 11’328. S’agissant du grief susmentionné, la chambre administrative fait sienne l’argumentation de la chambre constitutionnelle, exposée dans son arrêt ACST/13/2015, portant sur la conformité de la loi au droit supérieur. En supprimant l’indemnité litigieuse au recourant dès le mois d’avril 2015, le Conseil d’État a agi dans le respect de la loi 11’328, qui est entrée en vigueur certes rapidement mais sans violer le principe de la bonne foi ni celui de la proportionnalité. S’agissant du grief lié à la garantie de la propriété, il ne peut qu’être écarté vu que l’indemnité litigieuse ne constitue pas un droit acquis, comme exposé plus haut, de sorte que la garantie de la propriété n’est pas affectée par la décision litigieuse. Le grief relatif à l’interdiction de l’arbitraire doit également être écarté pour les raisons mentionnées plus haut et parce que, comme l’a relevé la chambre constitutionnelle, l’abrogation de l’art. 23A LTrait repose sur des motifs importants, à savoir les restrictions budgétaires (ACST/13/2015 consid. 8b). De la même manière que l’absence d’un régime transitoire de la loi 11’328 en tant qu’elle abrogeait l’art. 23A LTrait, ne saurait être reprochée au Grand Conseil, elle ne peut, par voie de conséquence et en raison du principe de la légalité et de celui de la séparation des pouvoirs, être reprochée au Conseil d’État lorsqu’il a rendu la décision litigieuse. Par conséquent, le recours est rejeté s’agissant de ces griefs.

7) Enfin, le recourant ne saurait être suivi lorsqu’il soutient pouvoir bénéficier du versement de l’indemnité litigieuse sur la base des dispositions du RTrait relatives à l’ancien art. 23A LTrait, qui n’ont pas été abrogées. Il perd de vue que toute prestation étatique doit respecter le droit (art. 5 al. 1 Cst.), en particulier le principe de la légalité, qui se compose de deux éléments : le principe de la suprématie de la loi et le principe de l’exigence de la base légale. En l’absence d’une loi formelle prévoyant le versement de l’indemnité telle que prévue à l’ancien art. 23A LTrait, le Conseil d’État ne saurait, sous peine de violer le principe de la séparation des pouvoirs, implicitement contenu dans la Constitution fédérale et consacré expressément à l’art. 2 Cst-GE, verser une telle indemnité sur la base de seules dispositions réglementaires (ATA/52/2015 du 13 janvier 2015 consid. 2).

Quant à l’absence d’examen préjudiciel de la constitutionnalité de la loi 11’328 par le Conseil d’État avant de rendre la décision litigieuse, elle ne saurait, faute de motif d’inconstitutionnalité desdites loi et décision, constituer en soi une violation du droit. Si certes toute autorité chargée d’appliquer des normes doit examiner leur conformité au droit supérieur en vertu du contrôle diffus de la constitutionnalité en Suisse (Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, op. cit., p. 665), elle ne doit toutefois refuser leur mise en œuvre qu’en cas de violation du droit supérieur (ATF 127 I 185 consid. 2), ce qui n’est pas ici le cas. Par ailleurs, il existe dans le canton de Genève, depuis juin 2014, une voie judiciaire spéciale, auprès de la chambre constitutionnelle, permettant d’examiner la constitutionnalité d’actes normatifs (art. 124 let. a Cst-GE et art. 130B al. 1 let. a LOJ). S’il est libre d’y recourir, le recourant est assez mal venu, après coup, de reprocher au Conseil d’État de pas avoir procédé à l’examen préjudiciel de ladite loi.

8) Vu ce qui précède, le recours sera rejeté. Un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge du recourant qui succombe. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 LPA).

9) La chambre de céans statuant ce jour au fond, la demande de restitution de l’effet suspensif n’a plus d’objet.

 

 

 

 

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PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 22 avril 2015 par Monsieur A______ contre la décision du Conseil d’État du 20 avril 2015 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Romain Jordan, avocat du recourant, au Conseil d'État et, pour information, à l’office du personnel de l’État.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, M. Pagan, Mmes Steck et Montani, juges.




Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :