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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/934/2019

ATA/1424/2019 du 24.09.2019 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/934/2019-FORMA ATA/1424/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 24 septembre 2019

2ème section

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Cyrielle Friedrich, avocate

contre

UNIVERSITÉ DE GENÈVE



EN FAIT

1) Madame A______ s'est immatriculée à l'Université de Genève (ci-après : l'université) pour y suivre, dès l'année universitaire 2015-2016, une formation au sein de la faculté d'économie et de management (ci-après : FEM), en vue d'obtenir un baccalauréat universitaire en économie et management.

2) Selon le relevé de notes final de la session d'examens de mai-juin 2018, Mme A______ a obtenu les 60 crédits ECTS requis pour réussir la première partie de son baccalauréat universitaire en économie et management.

Lors de cette session, Mme A______ s'était présentée à tous les examens auxquels elle était inscrite. Après avoir obtenu les résultats de cette session, elle a demandé à conserver trois notes insuffisantes (comprises entre 3 et 3.75) ce qui lui a permis d'enregistrer les crédits correspondants.

3) a. Le 6 août 2018, elle a fait parvenir au service des étudiants un certificat médical de la Doctoresse B______, du 2 août 2018. Ce certificat attestait que Mme A______ avait « présenté des crises d'angoisse lors de la période d'examen des mois de mai et juin 2018 ». Elle était sous traitement et allait se représenter aux examens du mois d'août 2018 ; enfin, le risque de récidive et de crise d'angoisse pendant ses examens « rest[ai]ent possibles malgré le traitement ».

b. Par courriel du même jour, le service des étudiants lui a rappelé que, n'ayant été absente à aucun des examens lors de la session de mai-juin 2018, son certificat médical n'avait aucune incidence sur ses résultats de cette session. En revanche, si elle devait être absente pour cause de maladie lors de la session de rattrapage d'août 2018, un certificat médical original devrait être réévalué et lui être envoyé dans un délai maximum de trois jours après la première absence.

4) Selon le relevé de notes de la session d'examen d'août/septembre 2018, Mme A______ a obtenu la note de 3 à l'examen du cours Statistics I. Elle a été éliminée définitivement du cursus de baccalauréat de la FEM. Elle s'était présentée à tous les examens de ladite session auxquels elle était inscrite, sans fournir de nouveau certificat médical.

5) Par courrier du 22 septembre 2018, Mme A______ s'est opposée à cette décision, expliquant que la structure de ce cours avait changé et qu'elle s'était sentie désavantagée par rapport à la précédente et à la prochaine volée d'étudiants, en raison des changements intervenus au sein de la FEM. Elle estimait que son échec était dû en grande partie au contenu de l'examen, qui était extrêmement différent de celui qui avait été abordé en classe ; cela avait déclenché chez elle une crise de panique et d'anxiété durant l'examen, malgré la prescription de médicaments, à la suite d'une crise du même type subie pendant la précédente session.

6) Par courrier du 8 octobre 2018, la commission en charge de l'instruction des oppositions de la faculté (ci-après : RIO) lui a indiqué qu'il lui appartenait de prouver les problèmes de santé invoqués, leur gravité et leur effet causal sur l'échec ; il lui a été octroyé un délai pour produire les documents requis. Cas échéant, elle pouvait s'adresser au médecin-conseil de la faculté.

7) Le 19 octobre 2018, Mme A______ a produit deux certificats médicaux :

- un certificat de la Doctresse C______, psychiatre, du 8 octobre 2018, attestant du fait qu'elle était suivie régulièrement en psychothérapie et faisait l'objet d'un traitement médicamenteux ;

- un certificat du Docteur D______, psychiatre, du 17 octobre 2018, indiquant qu'elle avait présenté, pendant ses sessions d'examens en juin et août 2018, « un trouble panique sévère avec des tremblements, des palpitations, des transpirations, un sentiment de perte de contrôle avec une impossibilité de penser » ; ces épisodes avaient duré pendant de longs moments et compromis sa capacité à se concentrer pendant les examens « ce qui a certainement amené à son échec ».

8) Par décision sur opposition du 18 décembre 2018, déclarée immédiatement exécutoire, le doyen de la FEM, suivant le préavis de la commission RIO, a rejeté l'opposition et confirmé l'élimination de Mme A______.Les conditions à l'application de l'art. 58 al. 4 du statut n'étaient pas réalisées : le premier certificat médical ne mentionnait pas le début du traitement et le second précisait que les symptômes auraient commencé au mois de juin 2018 ; la commission en inférait qu'elle s'était présentée aux examens dans de mauvaises conditions et avait accepté ce risque. Les certificats ne démontraient ni la gravité de la maladie ni le rapport de causalité entre les problèmes de santé et l'échec à l'examen ; si elle s'était sentie mal durant ce dernier, elle aurait dû le quitter et produire un certificat médical au plus tard dans les trois jours suivants.

9) Le 11 janvier 2019, Mme A______ s'est adressée à la conseillère aux études afin de solliciter un rendez-vous pour discuter de la décision d'élimination, indiquant être en possession de deux nouveaux certificats médicaux.

10) Le 17 janvier 2019, ladite commission a informé Mme A______ des conditions dans lesquelles une demande de reconsidération pouvait être présentée, l'invitant à transmettre les nouveaux certificats dont elle se prévalait.

11) Par courriel du 18 janvier 2019, la conseillère aux études lui a indiqué que la commission avait reçu ses documents complémentaires, précisant que cette dernière allait rendre une nouvelle décision qui ferait courir un nouveau délai.

12) Par courrier du même jour, Mme A______ a formé une demande de reconsidération. Elle alléguait tout d'abord avoir été victime d'une erreur informatique qui aurait permis aux étudiants ayant passé l'examen « Consumer Behavior I » d'être promus malgré leur échec, ce qui était constitutif d'une inégalité de traitement.

Elle a joint deux nouveaux certificats médicaux :

- un certificat du Dr D______, du 24 décembre 2018, attestant avoir vu Mme A______ pour la première fois le 8 octobre 2018 pour des crises de panique en situation d'examen et lui avoir prescrit un traitement ;

- un certificat de la Dresse C______, du 10 janvier 2019, attestant du fait qu'elle était suivie régulièrement et faisait l'objet d'un traitement médicamenteux.

13) Le 22 janvier 2019, la commission RIO a examiné cette demande et les deux certificats médicaux produits. Elle a conclu au fait que ces certificats ne mettaient pas en évidence de faits nouveaux et pertinents qui lui permettraient de modifier son premier préavis. En l'absence d'une preuve de la gravité des symptômes, de leur caractère exceptionnel et de leur causalité sur l'échec de Mme A______, la commission était d'avis de rejeter la demande de reconsidération et de confirmer le rejet de son opposition.

14) Par décision du 4 février 2019, notifiée le 6 février 2019, le doyen de la FEM a rejeté la demande de reconsidération de Mme A______ et confirmé son élimination. Les deux certificats médicaux produits ne mettaient pas en évidence des faits nouveaux et pertinents qui permettraient à la commission de modifier son premier préavis. Il apparaissait tout d'abord que la Dresse C______ n'avait vu l'intéressée que le 8 octobre 2018, soit plus d'un mois après la session de rattrapage, à une époque qui n'était pas pertinente pour l'appréciation de la réalité, de la gravité et de la causalité des problèmes allégués. En outre, il n'était pas démontré par le certificat du Dr D______ que les problèmes allégués étaient graves, notamment plus graves que le stress ou l'angoisse éprouvés normalement par tout étudiant en période d'examen et plus particulièrement en période de rattrapage. La preuve d'une telle gravité de la pathologie alléguée, associée à la démonstration d'un lien de causalité entre elles et l'échec auraient été d'autant plus nécessaires que l'intéressée avait par ailleurs réussi quatre examens sur cinq à la session de rattrapage, ce qui tendait à indiquer que son stress ou son angoisse n'était ni extraordinaire ni particulièrement handicapant. Pour des motifs identiques à ceux de la commission RIO, la décision d'élimination était confirmée et la demande de reconsidération rejetée.

15) Le 8 mars 2019, Mme A______ a saisi la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) d'un recours dirigé contre la décision de l'université du 18 décembre 2018 et celle sur réclamation du 4 février 2019. Elle a conclu, préalablement, à la suspension immédiate de la décision d'élimination et, principalement, à son annulation et à la réintégration à la faculté.

16) Le 20 mars 2019, la FEM a conclu au rejet de la requête en restitution sur l'effet suspensif ; l'intérêt public de l'université à n'accueillir que des étudiants remplissant les critères académiques de sélection primait sur l'intérêt privé de la recourante à continuer un cursus d'études duquel elle avait été éliminée de façon définitive en septembre 2018.

17) Le 1er avril 2019, le conseil de Mme A______ a complété son recours et confirmé sa requête en restitution d'effet suspensif. Le recours était recevable à la fois contre la décision du 4 février 2019 et contre celle du 18 décembre 2018 ; concernant cette dernière, la commission avait laissé penser que le délai de recours était « suspendu » en écrivant qu'une nouvelle décision faisant courir un nouveau délai allait être rendue et le recours était donc recevable, conformément au principe de la bonne foi. L'effet suspensif devait être octroyé afin de lui permettre de poursuivre son cursus universitaire au sein de la FEM, et de démontrer que l'échec était dû à sa maladie.

18) Par arrêt du 23 avril 2019, la présidence de la chambre administrative a refusé de restituer l'effet suspensif au recours.

19) Dans sa réponse du 5 avril 2019, l'université a conclu au rejet du recours et à la confirmation de la décision sur opposition de la faculté du 18 décembre 2018 et de la décision du doyen du 4 février 2019. L'art. 58 al. 4 du statut prévoyait la prise en compte de situations exceptionnelles lors du prononcé d'une décision d'élimination. En l'espèce, Mme A______ avait déjà souffert de crises d'angoisse à la session d'examen de mai/juin 2018 et avait produit un certificat médical en août 2018. Sachant que ses facultés pourraient être altérées, elle s'était tout de même présentée, le 21 août 2018, à l'examen de Statistics I. Elle ne respectait donc pas la condition jurisprudentielle d'une maladie apparaissant au moment de l'examen, sans qu'il n'ait pu être constaté de symptômes auparavant. Elle ne pouvait ensuite demander l'annulation de la note éliminatoire. Les certificats médicaux produits ne pouvaient remettre en question le résultat éliminatoire qu'elle avait obtenu lors de la session d'août 2018, dans la mesure où lesdits certificats avaient été transmis après la passation de l'examen et alors que la pathologie dont elle souhaitait se prévaloir pour annuler le résultat s'était déjà manifestée. Concernant l'argument d'inégalité de traitement en raison d'une prétendue erreur informatique, il avait été soulevé pour la première fois le 18 janvier 2019 et la commission RIO et le doyen n'étaient donc pas entrés en matière ; en tout état, il n'y avait aucun lien entre cet événement et la situation de la recourante qui avait passé cet examen au mois de juin 2018 et l'avait fait valider par le système réglementaire de conservation de notes.

20) Exerçant son droit à la réplique, Mme A______ a maintenu sa position. Elle ne contestait pas que son échec à l'examen Statistics I de la session d'août 2018 était éliminatoire, en application du règlement d'études.

Elle devait toutefois être mise au bénéfice de l'art. 58 al. 2 du statut, dont elle respectait les conditions. Contrairement à ce qu'avait retenu l'autorité intimée, elle n'avait pas annoncé tardivement sa pathologie puisqu'elle avait remis à la FEM en août 2018 un certificat médical de son médecin qui précisait qu'une possibilité de récidive n'était pas exclue. Son cas était exceptionnel car elle souffrait d'un trouble anxieux de type trouble de panique, dont seul 1.5 à 3.5 % de la population souffrait et qui créait toute une série de réactions physiques et psychologiques ; cette pathologie présentait la caractéristique d'être asymptomatique jusqu'au déclenchement d'une crise qui ne pouvait donc être anticipée par le patient. Seule une psychothérapie et la prise d'éventuels traitements adéquats pouvaient permettre de maîtriser ce trouble et éviter les récidives. Cette pathologie, diagnostiquée par trois médecins différents, entrait dans la catégorie des maladies graves de type psychologique qui pouvait justifier un cas exceptionnel. L'université s'était substituée à trois avis médicaux de professionnels et ne les avait pas suivis de manière arbitraire, sans fondement et sans justification. Quant au lien de causalité entre la pathologie et l'échec à l'examen, il était avéré et attesté par ces avis médicaux. Enfin, on ne pouvait lui reprocher de s'être rendue à son examen et d'y être restée, dans la mesure où, avant l'examen et même avant que la crise ne débute, elle se trouvait entièrement apte à le passer ; de plus, le règlement n'autorisait pas les étudiants à quitter la salle d'examen pendant son déroulement, sauf à ce que l'examen soit considéré comme rendu avec les conséquences d'un échec. Ainsi, la recourante se trouvait dans une circonstance exceptionnelle connue de la FEM, imprévisible et spontanée, qui avait eu un effet perturbateur et « dévastateur » puisqu'elle avait été dans l'incapacité de se concentrer et de réussir son examen. La critique relative à l'inégalité de traitement pouvait rester ouverte.

21) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 43 al. 1 et 2 de la loi sur l'université du 13 juin 2008 - LU - C 1 30 ; art. 36 al. 1 et 37 du règlement relatif à la procédure d'opposition au sein de l'université du 16 mars 2009 - RIO-UNIGE ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige s'examine à l'aune des règlements d'études du baccalauréat universitaire en économie et management, entrés en vigueur les 14 septembre 2015, 19 septembre 2016 et 18 septembre 2017 (ci-après : RE) ainsi que du statut de l'université (ci-après : le statut), ce qui n'est au demeurant pas contesté.

En l'espèce, le contentieux porte sur la décision d'élimination définitive de la recourante du cursus de baccalauréat de la FEM.

3) La recourante ne conteste pas que son échec à l'examen de Statistic I d'août 2018 soit éliminatoire, en application du RE. Elle soutient toutefois qu'elle doit être mise au bénéfice de circonstances exceptionnelles au sens de l'art. 58 al. 4 du statut.

a. L'art. 58 al. 4 du statut prévoit la prise en compte des situations exceptionnelles lors d'une décision d'élimination.

b. Selon la jurisprudence, l'admission d'une situation exceptionnelle doit se faire avec restriction. Il en va de l'égalité de traitement entre tous les étudiants s'agissant du nombre de tentatives qu'ils sont autorisés à effectuer pour réussir leurs examens. N'est ainsi exceptionnelle que la situation particulièrement grave et difficile pour l'étudiant, ce tant d'un point de vue subjectif qu'objectif. Les effets perturbateurs doivent avoir été dûment prouvés par l'étudiant et être en lien de causalité avec l'événement. Les autorités facultaires disposent dans ce cadre d'un large pouvoir d'appréciation, dont l'autorité de recours ne censure que l'abus. La chambre de céans n'annule donc le prononcé attaqué que si l'autorité intimée s'est laissée guider par des motifs sans rapport avec l'examen ou d'une autre manière manifestement insoutenable (ATF 136 I 229 consid. 6.2 ; 131 I 467 consid. 3.1 ; ATA/121/2018 du 6 février 2018 ; ATA/994/2016 du 22 novembre 2016 ; ATA/906/2016 du 25 octobre 2016).

Ont été considérées comme des situations exceptionnelles le décès d'un proche s'il est établi qu'il a causé un effet perturbateur en lien de causalité avec l'échec de l'étudiant, de graves problèmes de santé ou encore l'éclatement d'une guerre civile avec de très graves répercussions sur la famille de l'étudiant (ATA/906/2016 précité ; ATA/155/2012 du 20 mars 2012).

En revanche, et toujours selon la jurisprudence constante en la matière, des difficultés financières, économiques ou familiales ainsi que l'obligation d'exercer une activité lucrative en sus des études ne constituent pas des circonstances exceptionnelles, même si elles représentent une contrainte (ATA/357/2009 du 28 juillet 2009). Ces difficultés sont certes regrettables, mais font partie d'une réalité commune à de très nombreux étudiants (ATA/161/2009 du 31 mars 2009).

c. Les candidats qui ne se sentent pas aptes, pour des raisons de santé, à se présenter à un examen doivent l'annoncer avant le début de celui-ci. À défaut, l'étudiant accepte le risque de se présenter dans un état déficient qui ne peut justifier par la suite l'annulation des résultats obtenus (ATA/906/2016 précité ; ATA/712/2016 précité ; ATA/424/2011 du 28 juin 2011).

Un motif d'empêchement ne peut, en principe, être invoqué par le candidat qu'avant ou pendant l'examen (arrêt du Tribunal administratif fédéral B-6593/2013 du 7 août 2014 consid. 4.2 ; ATA/906/2016 précité ; ATA/712/2016 précité ; ATA/721/2014 du 9 septembre 2014 consid. 17 et la référence citée).

Des exceptions au principe évoqué ci-dessus permettant de prendre en compte un certificat médical présenté après que l'examen a été passé ne peuvent être admises que si cinq conditions sont cumulativement remplies : la maladie n'apparaît qu'au moment de l'examen, sans qu'il ait été constaté de symptômes auparavant, le candidat à l'examen acceptant, dans le cas contraire, un risque de se présenter dans un état déficient, ce qui ne saurait justifier après coup l'annulation des résultats d'examens ; aucun symptôme n'est visible durant l'examen ; le candidat consulte un médecin immédiatement après l'examen ; le médecin constate immédiatement une maladie grave et soudaine qui, malgré l'absence de symptômes visibles, permet à l'évidence de conclure à l'existence d'un rapport de causalité avec l'échec à l'examen ; l'échec doit avoir une influence sur la réussite ou non de la session d'examens dans son ensemble (arrêt du Tribunal administratif fédéral B-6593/2013 précité ; ATA/121/2018 précité ; ATA/1242/2017 du 29 août 2017 ; ATA/906/2016 précité).

d. Dans l'exercice de ses compétences, toute autorité administrative doit respecter le principe de la proportionnalité, que ce respect soit imposé par l'art. 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
(Cst. - RS 101) ou, de manière plus générale, par l'art. 5 al. 2 Cst., dans ses trois composantes, à savoir l'aptitude, la nécessité et la proportionnalité au sens étroit. Ainsi, une mesure étatique doit être apte à atteindre le but d'intérêt public visé, être nécessaire pour que ce but puisse être réalisé, et enfin être dans un rapport raisonnable avec l'atteinte aux droits des particuliers qu'elle entraîne (ATF 136 I 87 consid. 3.2 ; 135 I 176 consid. 8.1 ; ATA/832/2013 du 17 décembre 2013 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., 2018, p. 197 ss n. 550 ss).

4) En l'espèce, la recourante s'est présentée à tous les examens de la session de mai/juin 2018. Pendant cette session, elle a présenté des crises d'angoisse. Elle a donc consulté son médecin en août 2018, lequel a attesté de l'existence de ces crises et mentionné que sa patiente était sous traitement et allait se représenter aux examens du mois d'août 2018 ; il précisait que le risque de récidive et de crise d'angoisse pendant ses examens restaient « possibles » malgré le traitement.

La recourante invoque le fait que, lors de la session d'août 2018, elle n'aurait pas pu savoir « à l'avance » qu'elle allait perdre ses moyens au cours de l'examen, au vu de sa pathologie et qu'il ne lui était pas possible de détecter si une crise d'angoisse allait survenir. Cette argumentation ne saurait être suivie. La recourante, qui avait pleinement connaissance de ses troubles préexistants, a décidé, malgré cet état de fait, de se présenter à la session suivante de rattrapage en août 2018 ; elle s'est présentée à tous les examens de ladite session, en particulier à l'examen Statistics I, qui s'est déroulé le 21 août 2018. Or, conformément à la jurisprudence citée, un motif préexistant d'empêchement à participer à un examen doit être invoqué avant l'examen, voire pendant, et ne peut être invoqué après sa tenue. La recourante s'est présentée à son examen alors qu'elle savait son état de santé potentiellement déficient et connaissait la possibilité d'une récidive des crises déjà apparues en juin 2018 ; elle ne peut donc pas se prévaloir, plus d'un mois après l'examen, d'un éventuel empêchement médical dont elle avait connaissance depuis des semaines et ne peut obtenir l'annulation des résultats d'examen après coup ; le risque qu'elle a ainsi pris lui est opposable. En conséquence, la recourante ne remplit déjà pas la première des cinq conditions nécessaires et cumulatives posées par la jurisprudence pour pouvoir prendre en compte un certificat médical présenté après l'examen.

Il sera encore relevé, à titre superfétatoire, que certaines autres conditions ne sont pas non plus réalisées. En effet, la recourante n'a pas été consulter un médecin immédiatement après l'examen, puisque les certificats médicaux fournis sont datés des 8 et 17 octobre 2018 et lesdits certificats ne constatent pas de maladie grave et soudaine, étant précisé que ces crises ne peuvent pas être considérées comme telles (ATA/121/2018 du 6 février 2018). Enfin, la condition de la causalité apparaît également douteuse, dans la mesure où la recourante a réussi quatre examens sur cinq à la session de rattrapage, ce qui tend à démontrer qu'elle était capable de passer des examens avec succès malgré l'existence de stress ou d'angoisse.

Au vu de ce qui précède, il ne peut être retenu que le doyen de la faculté d'économie et de management se serait laissé guider par des considérations sans rapport avec les examens ou que son appréciation serait partiale ou arbitraire. En retenant que les circonstances exceptionnelles au sens de l'art. 58 al. 4 du statut faisaient défaut et en prononçant l'élimination de la recourante, le doyen n'a donc pas abusé de son pouvoir d'appréciation.

Le recours sera ainsi rejeté.

5) La recourante plaidant au bénéfice de l'assistance juridique, aucun émolument ne sera mis à sa charge (art. 87 al. 1 LPA ; art. 13 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée, pas plus qu'à l'université, qui dispose d'un service juridique compétent pour traiter ce type de procédure (art. 87 al. 2 LPA).


* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 8 mars 2019 par Madame A______ contre la décision de l'Université de Genève du 4 février 2019 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du
17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral :

-          par la voie du recours en matière de droit public ;

-          par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, s'il porte sur le résultat d'examens ou d'autres évaluations des capacités, en matière de scolarité obligatoire, de formation ultérieure ou d'exercice d'une profession (art. 83 let. t LTF) ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Cyrielle Friedrich, avocate de la recourante, ainsi qu'à l'Université de Genève.

Siégeant : Mme Krauskopf, présidente, M. Verniory, Mme Cuendet, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Krauskopf

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :