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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/533/2006

ACOM/27/2007 du 29.03.2007 ( CRUNI ) , REJETE

Résumé : élimination ; circonstances exceptionnelles
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

A/533/2006-CRUNI ACOM/27/2007

DÉCISION

DE

LA COMMISSION DE RECOURS DE L’UNIVERSITÉ

du 29 mars 2007

 

dans la cause

 

Monsieur F______

contre

UNIVERSITÉ DE GENÈVE

et

FACULTÉ DES SCIENCES ÉCONOMIQUES ET SOCIALES

 

 

 

(élimination ; circonstances exceptionnelles)


1. Monsieur F______, né le ______1981, a présenté une demande d'immatriculation à l’Université de Genève (ci-après : l’université) le 7 mai 2001, en vue de suivre les études de licence auprès de la faculté des sciences économiques et sociales (ci-après: la faculté).

2. Après avoir réussi l'examen dit de Fribourg, il a été admis à suivre les études de premier cycle en automne 2003.

3. M. F______ a réussi le premier cycle d'études en juillet 2004, avec une moyenne générale de 4.29 et un nombre total de crédits de 69.

4. Par décision du 21 octobre 2005, l'intéressé a été éliminé de la faculté, au motif qu'il n'avait pas obtenu le nombre de crédits exigés. Il avait totalisé 27 crédits ECTS de deuxième cycle à l'issue de la session d'automne 2005, ce qui était insuffisant.

5. M. F______ a formé opposition à cette décision en date du 25 novembre 2005. Il expliquait avoir été absent pendant trois mois durant l'été 2005 pour rester avec sa famille à Bangkok, et n'avoir donc pas reçu les formulaires d'inscription aux examens de rattrapage. Par conséquent, il avait omis de solliciter la validation de l'examen de Marketing auquel il avait obtenu la note de 3.75 en février et il s'était retrouvé inscrit par défaut à ce même examen, auquel il ne s'était pas présenté, en obtenant ainsi la note de 0. Il produisait notamment une confirmation de réservation électronique d'un ticket d'avion, selon laquelle il avait quitté Genève pour Bangkok le 22 juin 2005 et il était retourné en Suisse le 26 septembre 2005.

6. Par décision du 6 janvier 2006, le doyen de la faculté a rejeté l'opposition. L'intéressé avait été absent à neuf examens pendant l'année académique 2004 - 2005 sans justification. Il avait totalisé par ailleurs 27 crédits, sur les 30 crédits requis. Pendant son séjour de trois mois à Bangkok, il aurait dû prendre les dispositions nécessaires pour recevoir son courrier. En omettant de le faire, il avait fait preuve de légèreté. Partant, la décision d'élimination était fondée.

7. Par lettre signature du 3 février 2006, M. F______ a interjeté recours auprès de la commission de recours de l'université (ci-après : CRUNI). Il a sollicité préalablement l'octroi de l'effet suspensif. Sur le fond, il a demandé l'annulation de la décision du 6 janvier 2006 et la validation rétroactive de ses crédits du cours Marketing I. Subsidiairement, il a sollicité l'autorisation de redoubler en entier la deuxième année. Contrairement à ce qu'il avait exposé dans un premier temps, au stade de l'opposition, il s'était rendu à Bangkok pendant trois semaines pour ensuite rentrer chez lui au Japon du 14 juillet au 8 août 2005, et ce afin de rester aux côtés de son grand-père qui souffrait d'un cancer à l'estomac. Il avait par ailleurs omis de bien lire les règlements et oublié d'opérer un retrait à l'examen de Marketing. Il joignait à son recours une copie de son passeport, attestant de ses déplacements, et d'un certificat médical confirmant que le grand-père avait été opéré d'un cancer à l'estomac en juillet 2004. Il produisait également un courrier daté du 31 janvier 2006 de Monsieur K______, chargé d'enseignement à la faculté des lettres de l'université, duquel il ressortait que le recourant avait par erreur appliqué le système japonais, qui consistait à ne pas se présenter aux examens pour lesquels le candidat n'était pas prêt, sans formalité aucune, l'absence à l'examen équivalant à un retrait opéré en bonne et due forme, ainsi qu'une traduction d'un courrier de sa mère, qui expliquait qu'elle avait demandé à son fils de rester au Japon pendant un mois, de mi-juillet à mi-août 2005, afin de rester aux côtés de son grand-père qui avait fait une rechute.

8. En date du 27 février 2006, l'université a présenté sa réponse. Elle a conclu au rejet du recours. La demande de validation de crédits, formulée au stade de l'opposition, était manifestement tardive, car elle était intervenue après que le recourant eut été éliminée. Or, une telle demande devait être présentée avant une nouvelle inscription à l'examen concerné. Par ailleurs, la justification de l'absence aux examens, en relation avec le séjour au Japon de mi-juillet à mi-août 2005, n'était pas suffisante et ne permettait pas de retenir l'existence de circonstances exceptionnelles.

9. Par décision présidentielle du 7 mars 2006, la requête de mesures provisionnelles a été rejetée.

10. La réponse de l’université a été communiquée au recourant en date du 8 mars 2006. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

1. Dirigé contre la décision sur opposition du 6 janvier 2006 et interjeté dans le délai légal et la forme prescrite auprès de l’autorité compétente, le recours est recevable (art. 62 de la loi sur l’université du 26 mai 1973 - LU – C 1 30; art. 87 du règlement de l’université du 7 septembre 1988 - RU – C 1 30.06; art. 26 et 27 du règlement interne relatif aux procédures d’opposition et de recours du 25 février 1977 - RIOR).

2. a. Les conditions d'élimination des étudiants sont fixées par le règlement de l'université (art. 63D al. 3 LU). L’art. 22 alinéa 2 RU dispose que l'étudiant qui échoue à un examen ou à une session d’examens auxquels il ne peut plus se présenter en vertu du règlement d’études (let. a) ou qui ne subit pas ses examens et ne termine pas ses études dans les délais fixés par le règlement d'études (let. b), est éliminé.

b. En l’espèce, le recourant a débuté les études de licence en octobre 2003. Il était donc soumis au règlement d’études de la faculté 2003 - 2004 (ci-après: RE).

c. Aux termes de l'article 15 chiffre 1 lettre a RE, subit un échec définitif au deuxième cycle et est éliminé de la faculté l'étudiant qui n'obtient pas au moins 30 crédits par année d'études.

3. En l'espèce, le recourant a totalisé 27 crédits ECTS au terme de la première année des études du deuxième cycle, ainsi que cela ressort du procès-verbal d'examens du 21 octobre 2005.

4. a. Le recourant fait toutefois valoir que la faculté aurait pu l'autoriser à valider, rétroactivement, la note de 3.75 obtenue à l'examen de Marketing, ce qui lui aurait permis d'atteindre le nombre de crédits suffisants.

b. L'article 14 chiffre 3 RE permet aux étudiants de conserver des notes entre 3 et 4 et d'acquérir les crédits correspondants, dans la mesure où le nombre de crédits totalisé de cette manière ne dépasse pas 24. La note et les crédits sont alors définitivement acquis et l'examen ne peut pas être présenté à nouveau. Il ressort de cette disposition, a contrario, que si l'étudiant se représente à un examen auquel il a obtenu une note entre 3 et 4, il ne pourra plus, après coup, décider de conserver la note précédemment obtenue. En d'autres termes, la décision de valider une note insuffisante mais supérieure à 3 doit être prise avant de repasser l'examen, et ce afin d'éviter que les étudiants puissent décider de conserver la meilleure note. Par ailleurs, l'étudiant qui ne se présente pas à un examen, obtient la note de 0 (art. 10 RE).

c. En l'espèce, le recourant n'a pas demandé à pouvoir valider la note de 3.75 obtenue en février 2005 à l'examen de Marketing. Il a ainsi été automatiquement inscrit à la session de rattrapage d'octobre 2005 en vue de repasser cet examen. Ne s'étant pas présenté aux examens sans fournir de justification, il n'a pas obtenu les crédits correspondants.

d. Dans ces circonstances, il n'était plus autorisé, selon le règlement, à demander de valider la note obtenue à la session précédente. N'ayant donc pas totalisé les 30 crédits ECTS minimum requis au terme d'une année d'études de deuxième titre, il s'est exposé à une décision d'élimination.

5. a. Il reste à examiner si M. F______ peut bénéficier de circonstances exceptionnelles.

b. Selon l’article 22 alinéa 3 RU, il doit être tenu compte des situations exceptionnelles lors d’une décision d’élimination. Selon une jurisprudence constante, une situation peut être qualifiée d’exceptionnelle lorsqu’elle est particulièrement grave et difficile pour l’étudiant. Lorsque de telles circonstances sont retenues, la situation ne revêt un caractère exceptionnel que si les effets perturbateurs ont été dûment prouvés par le recourant. Cette jurisprudence est conforme au principe de l’instruction d’office (ACOM/41/2005 du 9 juin 2004 consid. 7c ; ACOM/13/2005 du 7 mars 2005, consid. 5). Les autorités facultaires disposent dans ce cadre d’un large pouvoir d’appréciation, dont la CRUNI ne censure que l’abus (ACOM/1/2005 du 11 janvier 2005; ACOM/102/2004 du 12 octobre 2004 et les références citées).

c. Ont été, par le passé, jugés exceptionnels notamment : le décès d’un proche (ACOM/69/2006 du 31 juillet 2006 ; ACOM/51/2002 du 22 mai 2002) ou des problèmes graves de santé affectant l’étudiant (ACOM/49/2005 du 11 août 2005 ; ACOM/46/2004 du 24 mai 2004). En revanche, il a été jugé à réitérées reprises que des difficultés financières ou économiques, comme le fait d'exercer une activité lucrative en sus de ses études, n'étaient pas exceptionnelles, même si elles constituaient à n'en pas douter une contrainte (ACOM/71/2005 du 22 novembre 2005 ; ACOM/20/2005 du 7 mars 2005). Il en allait de même des problèmes de logement à Genève, qui sont le lot de bon nombre d’étudiants (ACOM/9/2005 du 4 février 2005).

6. En l'espèce, le recourant explique avoir dû se rendre auprès de son grand-père, souffrant d'un cancer à l'estomac, pendant l'été 2005, ce qui l'aurait empêché de se présenter aux examens de la session de rattrapage. Il ressort à cet égard des pièces produites, que le recourant s'est rendu à Bangkok en juin 2005. Il a séjourné au Japon du 14 juillet au 8 août 2005 pour ensuite retourner en Thaïlande et y rester jusqu'au 25 septembre 2005, d'après la confirmation du ticket d'avion électronique fournie par lui. Par ailleurs, un certificat médical atteste que le grand-père du recourant a été opéré d'un cancer à l'estomac en juillet 2004, soit une année auparavant.

7. Dans ces circonstances, la CRUNI ne peut que constater que les arguments avancés par le recourant ne constituent pas de circonstances exceptionnelles et qu’aucune causalité n’a pu être établie entre la situation d’échec et les faits évoqués par le recourant. D'une part en effet, l'opération du grand-père du recourant est intervenue en 2004 et non pas en 2005. D'autre part, le recourant n'a séjourné qu'un mois au Japon durant l'été 2005, ayant passé le reste du temps à Bangkok, pour des raisons personnelles. Le séjour au Japon et l'état de santé de son grand-père ne sauraient être considérés comme la cause de l'absence aux examens d'octobre ni de la décision de ne pas valider l'examen de Marketing. Il apparaît ainsi que c'est bien plutôt la méconnaissance des dispositions réglementaires, comme l'atteste le courrier de Monsieur K______, et l'absence du recourant de Genève pendant trois mois pour des raisons en grande partie personnelles qui sont à l'origine de la situation d’échec de celui-ci. Or, il appartient à tout étudiant inscrit à l’université, quel que soit le système scolaire ou académique auquel il est habitué, de prendre connaissance des règles gouvernant ses études et d’organiser son temps et ses activités ou de prendre les dispositions qui s’imposent aux fins de se conformer auxdites règles.

8. Au vu de ce qui précède, il faut admettre que la faculté n’a pas franchi les limites du large pouvoir d’appréciation qui est le sien en matière de circonstances exceptionnelles, ce qui conduit au rejet du recours.

9. Vu la nature du litige aucun émolument ne sera perçu (art. 33 RIOR).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COMMISSION DE RECOURS DE L’UNIVERSITÉ

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 3 février 2006 par Monsieur F______ contre la décision sur opposition de la faculté des sciences économiques et sociales du 6 janvier 2006 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d’indemnité ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF-RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'article 42 LTF. la présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique la présente décision à Monsieur F______, au service juridique de l’université, à la faculté des sciences économiques et sociales ainsi qu’au département de l’instruction publique.

Siégeants : Madame Bovy, présidente ;
Madame Pedrazzini Rizzi et Monsieur Bernard, membres

Au nom de la commission de recours de l’université :

la greffière :

 

 

 

C. Ravier

 

la présidente :

 

 

 

L. Bovy

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :