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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/7551/2018

AARP/279/2021 du 07.09.2021 sur JTCO/62/2020 ( PENAL ) , REJETE

Recours TF déposé le 28.10.2021, rendu le 22.06.2022, ADMIS/PARTIEL, 6B_1270/2021
Descripteurs : FAUX INTELLECTUEL DANS LES TITRES;PREUVES COMPLÉMENTAIRES;ACCÈS DOSSIER COMPLET;REPENTIR SINCÈRE;AVIS DE NOTIFICATION DU LOYER INITIAL
Normes : CP.251; CPP.389.al3; CPP.100.al1; CP.48.letd
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/7551/2018 AARP/279/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 7 septembre 2021

 

Entre

A______, domicilié ______ [GE], comparant par Me Charles PONCET, avocat, PONCET SARL, rue Saint-Léger 6, 1205 Genève, et Me Philippe GRUMBACH, avocat, GRUMBACH Avocats, rue Saint-Léger 6, 1205 Genève,

appelant,

 

contre le jugement JTCO/62/2020 rendu le 20 mai 2020 par le Tribunal correctionnel,

 

et

 

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a.a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 20 mai 2020, par lequel le Tribunal correctionnel (TCO) l'a acquitté de tentative d'escroquerie (art. 22 cum 146 du Code pénal suisse [CP]), subsidiairement de faux dans les titres (art. 251 CP ; chiffre B.a.II.2. de l'acte d'accusation du 12 mars 2019), mais l'a reconnu coupable de faux dans les titres (art. 251 CP ; chiffre B.a.I.1. de l'acte d'accusation) et condamné à une peine privative de liberté de 24 mois, sous déduction de la détention avant jugement, avec sursis (délai d'épreuve de trois ans). Le TCO a également rejeté les conclusions en indemnisation de A______ et condamné ce dernier, conjointement et solidairement avec B______, aux frais de la procédure de première instance.

a.b. A______ entreprend ce jugement, concluant, sous suite de frais, à son acquittement du chef de faux dans les titres, à une indemnisation pour ses frais de défense dans la procédure d'appel, à une indemnisation pour la détention injustifiée avant jugement ainsi qu'à une indemnisation pour le gain manqué résultant de sa détention.

Il conclut également à titre préjudiciel, aux réquisitions de preuves suivantes : i) la mise en œuvre d'une expertise visant à déterminer si les montants des loyers des appartements de l'immeuble sis 1______, à C______ [VD], et 2______, à D______ [VD], sont conformes aux art. 269, 269a et 270 du Code des obligations (CO) et donc légitimes et licites, et la nomination d'un spécialiste en immobilier actif dans le canton de Vaud à titre d'expert à cet effet ; ii) l'audition de E______, F______, G______, H______, I______, J______, K______, L______, M______ et N______ et iii) le dépôt, en mains de O______ SA et des propriétaires de l'immeuble, des états locatifs et des baux de l'immeuble sis 3______, à C______, pour les années 2009 à 2017.

Enfin, il requiert, toujours à titre de question préjudicielle : i) à ce que soit constaté que le TCO est tombé dans l'arbitraire, en versant au dossier un certain nombre de pièces en lien avec la méthode du calcul de rendement des loyers de façon unilatérale et en violation de son droit d'être entendu et de l'art. 100 al. 1 et 2 du Code de procédure pénale (CPP) ; ii) à ce que soient écartées du dossier lesdites pièces ayant été versées de façon illicite et enfin iii) à ce que soit constaté que le TCO a intentionnellement entravé son droit à la défense en ne lui fournissant une copie du dossier que dix mois après qu'il en a fait la demande alors qu'une copie scannée existait au dossier.

a.c. Le Ministère public (MP) forme appel joint en temps utile, concluant à la réforme du jugement entrepris s'agissant de la peine et plus particulièrement à la condamnation de A______ à une peine privative de liberté de 30 mois, dont 12 fermes, avec un délai d'épreuve de trois ans pour la partie avec sursis, au rejet de l'appel principal ainsi qu'à la confirmation du jugement entrepris pour le surplus.

a.d. Le TCO a également reconnu B______ coupable de faux dans les titres (art. 251 CP) et l'a condamné à une peine privative de liberté de 15 mois, avec sursis (délai d'épreuve de trois ans). L'intéressé n'a pas fait appel.

b.a. Selon l'acte d'accusation du 12 mars 2019, il est encore reproché à A______ ce qui suit (chiffre B.a.I.1. de l'acte d'accusation): il a, à Genève, entre 2009 et 2017, alors qu'il s'occupait, en sa qualité d'avocat et avec la régie O______ SA (ci-après également : l'agence de C______ ou la régie), de la gestion et la location des immeubles sis 1______, à C______, appartenant à sa sœur, P______, et 2______, à D______, appartenant à Q______ SA, intentionnellement donné à la régie des noms fictifs comme anciens locataires ainsi que des montants fictifs à titre d'anciens loyers et d'anciennes charges lors de l'établissement de nouveaux contrats de bail et d'avis de notification de loyer initial portant sur la location d'appartements situés dans les immeubles précités, afin que ces informations figurent dans lesdits documents, lesquels étaient ensuite signés par B______, directeur de l'agence de C______, qui savait que ces informations étaient fausses, dans le but d'éviter les contestations initiales de loyers par les nouveaux locataires et de permettre une augmentation massive – et injustifiée – des loyers, étant précisé que, dans les contrats de bail, figurait encore la mention fausse de "loyer inchangé". Il a agi dans les cas particuliers suivants :

Locataires lésés

Date des documents (contrat de bail à loyer et avis de notificat-ion du loyer initial)

Signataire des documents

n° appar-tement

Ancien loyer mensuel

Nouveau loyer mensuel

Anciennes charges mensuelles

Nouvelles charges mensuelles

Vrais anciens locataires

Faux noms d'anciens locataires utilisés

Immeubles concernés

R______ et S______

30.09.2009

B______

44

CHF 1'250.-

CHF 2'100.-

CHF 100.-

CHF 200.-

T______

U______

P______, 1______, [code postal] C______

V______, W______ et X______

09.08.2010

B______

42

CHF 1'250.-

CHF 1'680.-

CHF 80.-

CHF 140.-

Y______ ou Z______

AA______

P______, 1______, [code postal] C______

AB______ et AC______

23.02.2011

B______

1

CHF 1'530.-

CHF 2'100.-

CHF 90.-

CHF 200.-

AD______ et AE______

N______

P______, 1______, [code postal] C______

AF______

26.03.2013

B______

33

CHF 1'060.-

CHF 1'880.-

CHF 60.-

CHF 200.-

AG______

AA______

P______, 1______, [code postal] C______

AH______ et AI______

14.06.2013

B______

12

CHF 1'030.-

CHF 1'880.-

CHF 70.-

CHF 200.-

AJ______

M______

P______, 1______, [code postal] C______

AK______ et AL______

22.07.2015

B______

34

CHF 1'400.-

CHF 1'880.-

CHF 120.-

CHF 200.-

AM______

M______

P______, 1______, [code postal] C______

AN______ et AO______

24.07.2015

B______

11

CHF 1'645.-

CHF 1'880.-

CHF 90.-

CHF 200.-

AP______ SA

AQ______

P______, 1______, [code postal] C______

AR______ et AS______

Fin juillet 2015

inconnu

24

CHF 1'020.-

CHF 1'600.-

Montant inconnu

CHF 170.-

AT______

AU______

Q______ SA, 2______, [code postal] D______

AV______ et AW______

13.07.2016

B______

43

CHF 1'100.-

CHF 1'680.-

CHF 80.-

CHF 200.-

AX______

AY______

P______, 1______, [code postal] C______

AZ______ et BA______

09.01.2017

B______

24

CHF 1'200.-

CHF 1'880.-

CHF 100.-

CHF 200.-

BB______

BC______

P______, 1______, [code postal] C______

Ces faits ont conduit au verdict de culpabilité de faux dans les titres, contesté en appel.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. L'immeuble de C______, appartenant à P______, était à l'époque des faits géré par la régie. A______ en était le représentant auprès de cette dernière.

L'agence de C______ gérait également l'immeuble de D______, dont A______ a indiqué être propriétaire au travers de la société Q______ SA.

b. Suite à une dénonciation à la Commission du Barreau de Genève de Me BD______ et Me BE______ datant du 16 avril 2018, alors avocats stagiaires en l'Etude de Me A______, le MP a été informé que l'Etude de ce dernier avait utilisé des faux baux à loyer établis au nom de locataires fictifs dans une procédure devant le Tribunal des baux du canton de Vaud. Le procédé des locataires fictifs ayant pour but, selon eux, de simuler un loyer antérieur supérieur à la réalité auprès du nouveau locataire.

c.a. Le 22 juin 2018,assisté de son conseil, A______ a été entendu par le MP. Après avoir été informé qu'il lui était reproché d'avoir "un nombre indéterminé de fois, à une date indéterminée, mais entre 2015 et 2018, indiqué ou fait indiquer des noms fictifs sur des baux et avis de fixation de loyer relatifs à l'immeuble sis 1______ à C______", il a admis l'essentiel les faits. Sous "déclaration libre" il a précisé avoir complété les avis de fixation du loyer initial avec des noms de locataires fictifs et indiqué un montant de loyer qui n'était pas celui du locataire sortant, cela dans le but de rentabiliser l'immeuble de sa sœur. Il avait agi ainsi à chaque fois qu'il y avait eu des travaux de rénovation dans un appartement vacant. Il se pouvait qu'il y ait eu un problème similaire dans l'immeuble sis 2______ à D______. BF______ était son assistante pour les questions immobilières. Elle n'avait aucun pouvoir décisionnel. Il n'était pas sûr que les employés de la régie, y compris B______, savaient qu'il s'agissait de baux "aux contenus spéciaux". Il avait rencontré BG______ [de la régie O______ SA] au ski il y avait 18 ans et avait dû le rencontrer quatre fois socialement par la suite. Cela devait faire cinq ou dix ans qu'il ne l'avait pas revu. Il l'avait eu quelques fois au téléphone.

c.b. A______ a été arrêté provisoirement à l'issue de son audition, le 22 juin 2018 et détenu à la prison de BH______ du 24 au 29 juin 2018. Au Tribunal des mesures de contraintes (TMC), également assisté d'un avocat, A______ a une nouvelle fois admis les faits reprochés et ajouté qu'il n'aurait pas dû faire ce qu'il avait fait. Il avait agi "par simplification".

c.c. Il a été mis en liberté le 29 juin 2018, avec mesures de substitution, soit en substance diverses interdictions de contact et de gérer l'immeuble de C______, lesquelles ont été levées le 9 novembre 2018.

c.d. Comparant librement à l'audience du 26 juillet 2018 devant le MP et toujours assisté de son avocat, A______ a confirmé ses précédentes déclarations, précisant avoir eu beaucoup de problèmes et de procédures avec ses anciens associés, ce qui avait représenté une immense charge de travail. Il avait faussement considéré qu'en ne mettant pas le nom de la personne antérieure sur les contrats de bail, cela simplifierait, évitant ainsi des recherches. S'agissant du montant des loyers, il envoyait des informations aux employés de la régie dans un souci de rentabilité de l'immeuble, en se référant aux analyses de [la société] BI______. Il ne pensait pas en avoir discuté avec B______. A la question de savoir s'il reconnaissait l'infraction de faux dans les titres, il a répondu qu'il n'avait plus les conditions objectives et subjectives en tête.

Examen des pièces séquestrées

d.a. Selon le rapport de police du 23 juillet 2018, neufs baux et avis de fixation du loyer initial en lien avec l'immeuble de C______ ont été identifiés parmi les pièces saisies dans les locaux de l'Etude de A______ et ceux de la régie comme comportant sciemment des informations erronées au sujet du nom de l'ancien locataire et de l'ancien loyer. Un bail à loyer et un avis de fixation du loyer initial pour l'immeuble de D______ comportaient – conformément aux déclarations spontanées de A______ – ces mêmes fausses informations, bien que les documents en question n'aient pas été retrouvés.

Il ressortait très clairement des différents courriels saisis que les noms des locataires fictifs étaient fournis par A______, parfois par l'intermédiaire de ses secrétaires, de même que les montants des loyers à imposer aux nouveaux locataires et à faire figurer dans la rubrique "ancien loyer" des avis de notification du loyer, malgré le fait que B______ les qualifiait presque systématiquement de trop élevés, voire même d'abusifs.

d.b. Les éléments suivants ressortent plus particulièrement de l'enquête de police :

Appartement no 44 de l'immeuble sis 1______ à C______

-       Par courriel du 18 août 2009 de B______ à A______, le premier a détaillé les travaux prévus et proposé de fixer le nouveau loyer à CHF 1'650.- ;

-       Par courriel du même jour, A______ a répondu, avec copie à son assistante BF______, que le nouveau loyer devait être fixé à CHF 1'850.- et a demandé que le projet de bail lui soit transmis pour révision finale ; sur le courriel imprimé il est inscrit à la main : "1850.-, ancien locataire N______" ;

-       Par courriel du 18 septembre 2009, B______ a envoyé un modèle de contrat de bail et indiqué à BJ______, assistante de location au sein de la régie : "voir pièce jointe. Pour la feuille verte, il faut mentionner nom ancien loc: U______, ancien loyer CHF 1'850.- + charges dû depuis le 01.08.09 nouveau loyer idem et sous motifs: loyer inchangé". Le montant inscrit à la main sur le document imprimé est tracé et remplacé par CHF 2'100.- ;

-       Le 28 septembre 2009, B______ a répondu que selon lui le loyer ne devrait pas dépasser CHF 1'680.-, que les loyers de C______ n'étaient pas ceux de Genève et que le loyer des immeubles neufs à C______ n'excédait pas CHF 240.- /m2 ;

-       Le bail conclu par les locataires R______/S______ est entré en vigueur le 15 octobre 2009 au loyer de CHF 2'100.-. L'avis de fixation indique que le loyer dû par le précédent locataire, U______ selon le bail, était aussi de CHF 2'100.- depuis le 1er août 2009, alors que le dernier loyer payé par l'ancienne locataire, T______, était de CHF 1'250.- selon l'état locatif, le bail de cette dernière ayant été résilié pour le 30 juin 2009 et l'appartement étant resté vacant jusqu'au 15 octobre 2009. L'avis de fixation du loyer initial comportait faussement la mention "loyer inchangé" ;

-       Les locataires R______/S______ ont résilié leur bail et leurs successeurs, entrés le 1er juin 2011, ont payé un loyer de 2'100.- par mois, de même que les locataires suivants, entrés en septembre 2014. En 2018, le loyer était toujours de CHF 2'100.- par mois.

 

Appartement no 42 de l'immeuble sis 1______ à C______

-   Par courriel du 7 avril 2010 à A______ et BF______, B______ a proposé, après examen des travaux à effectuer, de relouer l'appartement à CHF 1'580.- + charges au lieu des CHF 1'112 + charges d'alors ;

-   Le bail conclu par les locataires V______/W______ est entré en vigueur le 15 août 2010 au loyer de CHF 1'680.-. L'avis de fixation indique que le loyer dû par le précédent locataire, AA______ selon le bail, était aussi de CHF 1'680.- depuis le 1er août 2010, alors que le dernier loyer payé par les anciens locataires Y______/Z______ était de CHF 1'112.-, leur bail ayant été résilié pour le 30 juin 2010 et l'appartement étant resté vacant jusqu'au 15 août 2010. L'avis de fixation du loyer initial comportait faussement la mention "loyer inchangé" ;

-   Après avoir résilié leur bail, les locataires V______/W______ ont finalement souhaité rester et A______ a indiqué à la régie vouloir augmenter le loyer. Le 18 novembre 2010, B______ a répondu à celui-ci, avec en copie BF______, notamment ce qui suit : "effectivement nous ne sommes nullement tenus d'accepter de retirer la résiliation ; une hausse de loyer pourrait en effet être effectuée, mais les locataires ont de nouveau aussi le droit de contester le loyer ( ) nous vous rappelons que le loyer de l'ancien locataire ne se montait qu'à fr. 1'250.- (recte 1'112.-) net + charges ( ) nous considérons que le prix au m2/an pratiqué actuellement ( ) est considéré au sens de la loi plus qu'abusif ( ) nous serions d'avis de refaire un nouveau contrat mais sans modifier le loyer net mais par contre augmenter l'acompte de charges de fr. 140 à fr. 200.- ( )" ;

-   A______ a répondu, avec en copie BF______, "merci pour ce long commentaire que j'avais déjà en tête. L'idéal serait + 100 pour le loyer et + charge à 200 CHF avec la clause de frais de régie dans les charges. Et bail à terme soit 3 ou 5 ans. Maintenant à vous le grand art" ;

-   Un nouveau bail a été conclu au prix voulu par A______ de CHF 1'780.- par mois dès le 1er décembre 2010 ;

-   Ces locataires ont alors contesté cette hausse de loyer ou ce nouveau loyer et par courriel du 5 janvier 2011, B______ a conseillé à A______, de revenir au loyer de CHF 1'680.- en précisant que "si l'Asloca exige la production de l'ancien bail qui indiquerait déjà la hausse de CHF 1'250.- (recte 1'112.-) à CHF 1'680.- cela risque de devenir très dangereux", ce à quoi A______ a répondu dans la journée, avec en copie BF______, "je ne vois pas de raison de leur donner un avantage, nous devrions même résilier leur bail pour culpa in contrahendo" ;

-   Ces locataires ayant entre-temps payé le loyer sans la nouvelle hausse, la régie les a mis en demeure estimant que c'était "le seul moyen pour résilier le contrat" selon un courriel de B______ à A______ du 6 janvier 2011, auquel A______ a répondu le même jour "je les déteste" ;

-   Apprenant de la régie le 12 janvier 2011 que les locataires proposaient de quitter les lieux tout en étant libérés du bail au 31 janvier 2011, A______ a accepté en précisant : "ne plus jamais les revoir".

Appartement no 1 de l'immeuble sis 1______ à C______

-   Le 1er octobre 2010, BJ______ a informé A______ que les locataires actuels avaient résilié leur bail au 31 décembre 2010, que le loyer s'élevait à CHF 1'530.- et proposé de tenter de relouer l'appartement à CHF 1'900.- après travaux ;

-   BJ______ a écrit à A______ le 11 janvier 2011 pour l'informer que des candidats étaient intéressés à louer l'appartement vacant et en travaux depuis le 31 décembre 2010 mais au prix de CHF 1'900.- au lieu de CHF 2'100.- proposé par BF______, ce à quoi l'intéressé a répondu vingt minutes plus tard, avec en copie BF______ : "depuis quand les locataires décident du loyer ( ) si jamais, l'appartement est loué à ce prix depuis le départ de l'ancien locataire" ;

-   Ne comprenant pas la réponse de A______, BJ______ s'est adressée à B______ qui lui a répondu ceci par courriel du 12 janvier 2011 : "( ) Il [A______] veut dire que pour la notification de loyer qui devra être établie lors de la conclusion du nouveau bail, il faut mettra [sic] ancien loyer identique que le nouveau, et comme s'il était dû par le précédent locataire depuis par exemple le 1er janvier 2011, mais il faut voir avec lui quel nom il faut mettre pour l'ancien locataire ( ) Et qu'il faut donc qu'il nous donne comme d'habitude le nom d'un locataire fictif qui aurait signé un bail et qui ne serait finalement pas rentré dedans ( )" ;

-   Le 17 février 2011, BJ______ informe A______, avec BF______ en copie, d'une nouvelle demande de location pour l'appartement, suite à quoi BF______ ajoute à l'attention de A______ : "ancien loyer 1'530+90 de charges Nouveau loyer : 2100+200 de charges Il s'agit de l'appartement totalement rénové au rez", ce à quoi A______ a répondu, avec en copie B______, "Yes et merci au tarif BF______ TFA" ;

-   Par courriel du 24 février 2011, BJ______ a demandé à A______ afin d'établir le bail "merci de me communiquer un nom, comme déjà fait précédemment" et ce dernier lui a répondu, après un rappel, le 1er mars 2011 : "M N______, 4______ [adresse]" ;

-   Le bail conclu par les locataires AB______/AC______ est entré en vigueur le 15 mars 2011 au loyer de CHF 2'100.-. L'avis de fixation indique que le loyer dû par le précédent locataire, N______ selon le bail, était aussi de CHF 2'100.- depuis le 1er janvier 2011, alors que le dernier loyer payé par les précédents locataires AD______/AE______ était de CHF 1'530.- selon l'état locatif, leur bail ayant été résilié pour le 15 décembre 2010 et l'appartement étant resté vacant jusqu'au 15 mars 2011. L'avis de fixation du loyer initial comportait faussement la mention "loyer inchangé".

Appartement n° 33 de l'immeuble sis 1______ à C______

-   Le contrat de AF______ du 15 avril 2013 mentionne comme précédent locataire un certain AA______ et l'avis de fixation du loyer initial indique dans la rubrique "ancien loyer" le montant de CHF 1'880.- depuis le 1er décembre 2012. Selon l'état locatif, le loyer payé par les derniers locataires AG______ était de CHF 1'060.-, leur bail ayant été résilié pour le 31 janvier 2012 et l'appartement étant resté vacant jusqu'au 15 avril 2013. L'avis de fixation du loyer initial comportait la mention "loyer inchangé" ;

-   Au départ de AF______, l'appartement a été reloué à BK______ au prix de CHF 1'780.- dès le 15 novembre 2015 ;

-   Dans le courant de l'année 2016, le locataire BK______ a intenté une action en requalification du contrat en contrat de durée indéterminée. Dans ce cadre, le Tribunal des baux du canton de Vaud a requis à la régie la production des anciens contrats de bail depuis 2009. Les e-mails suivants ont été retrouvés à ce propos :

o   E-mail de B______ à deux de ses collaborateurs, BL______ et BM______ du 24 novembre 2016 : "Il faut faire attention, car sauf erreur, à un moment donné on a mis un faux locataire sur un bail pour justifier hausse loyer. Il faut donc voir avec Me A______ ou son avocate stagiaire pour demander délai au TB et comment faire pour faire signer ce faux bail par la personne dont le nom nous avait été communiqué par Me A______" ;

o   E-mail de B______ à BD______ et A______ du 24 novembre 2016 : "( ) comme vous le savez, lors de changements de locataires où nous avons profité d'augmenter le loyer, nous avons toujours indiqué des noms fictifs d'anciens locataires, fournis par vos soins, pour ne pas indiquer la hausse du loyer ( ) Dès lors, évidemment, nous ne sommes pas en possession des baux des personnes fictives ( ) Vous vous imaginez sans doute les conséquences si le Tribunal des Baux vient à constater une telle pratique ( )" ;

o   E-mail de BN______, collaborateur de A______, à B______, avec en copie notamment BL______, du 28 avril 2017 : "( ) Etant entendu que vous connaissez la situation entourant les pièces requises ( ) il ne sera pas revenu sur le sujet. Ainsi, pour réponse au Tribunal des Baux, nous vous suggérons la formule suivante : Monsieur le Président, nous vous informons ne pas détenir les pièces requises, qui dans le cadre de la gestion de l'immeuble sis 1______, se trouvent directement en mains de Madame P______, selon les volontés de cette dernière" ;

o   E-mail de BL______ à B______ du même jour : "En fait il (ndlr : BN______) nous demande de mentir au Tribunal qui ne croira pas une seconde que la régie n'est pas en possession des baux à loyer des immeubles qu'elle gère et en plus il nous demande de renvoyer le TB chez la proprio mais d'un autre côté, on ne peut pas non plus produire une copie des faux " ;

-   Le 24 mai 2017, A______ a finalement déposé les contrats de bail visés. Les noms des anciens et actuels locataires, ainsi que les loyers actuels avaient été caviardés. Ces contrats n'étaient pas accompagnés des avis de fixation du loyer initial. Par jugement du Tribunal des baux du 29 juin 2017, confirmé en deuxième instance, le bail de BK______ a été requalifié en contrat de bail à durée indéterminée, les juges estimant que le système mis en place, visant à assortir les contrats de bail d'une clause prévoyant une durée limitée, ne s'expliquait que par la volonté de la bailleresse d'éluder les règles impératives, telles celles permettant la contestation du loyer initial ou la protection contre les congés. Il était relevé que "( ) Ni la défenderesse ni sa gérance n'[avaient] produit de pièce permettant de connaître [le] sort [des baux] – reconduction ou changement de locataire –, bien qu'elles aient été requises de le faire ( ). Le fait que les noms des locataires des baux produits aient été caviardés a tué dans l'œuf toute tentative d'instruire cette question ( )" ;

-   Le loyer de BK______ a par la suite été réduit à CHF 1'000.- par le Tribunal des baux du canton de Vaud suite à une procédure en contestation du loyer initial intentée par ce dernier.

Appartement no 12 de l'immeuble sis 1______ à C______

-  Par courriel du 25 octobre 2012, B______ a informé BF______ de la résiliation du bail, en mettant A______ en copie, et lui a proposé de relouer l'appartement au prix de CHF 1'680.- après rénovation, rappelant qu'un autre appartement proposé au prix de CHF 1'880.- était toujours vacant, que les gens estimaient ce montant abusif au vu de l'aspect extérieur de l'immeuble et qu'il convenait de descendre aussi le loyer de celui-ci à CHF 1'680.- ;

-  Le jour-même, A______ a demandé à B______ de lui faire un rapport avec des photos et des propositions raisonnables de travaux et de préparer un contrat de bail "et de partir du principe que M AA______ a repris temporairement la location de l'appart" ;

-  Le bail conclu par les locataires AH______/AI______ est entré en vigueur le 1er juillet 2013 au loyer de CHF 1'880.-. L'avis de fixation indique que le loyer dû par le précédent locataire, M______ selon le bail, était aussi de CHF 1'880.- depuis le 1er décembre 2012, alors que le dernier loyer payé par le précédent locataire AJ______ était de CHF 1'030.- depuis la conclusion de son propre bail en 2004, son bail ayant été résilié pour le 30 novembre 2012 et l'appartement étant resté vacant jusqu'au 30 juin 2013. L'avis de fixation du loyer initial comportait faussement la mention "loyer inchangé" ;

-  Les locataires AH______/AI______ ont résilié leur bail pour le 31 octobre 2016 et le logement a été reloué au prix de CHF 1'550.- le 15 avril 2018, restant vacant dans l'intervalle.

Appartement no 34 de l'immeuble sis 1______ à C______

-  Le bail conclu par les locataires AK______/AL______ est entré en vigueur le 1er août 2015 au loyer de CHF 1'880.-. L'avis de fixation indique que le loyer dû par le précédent locataire, M______ selon le bail, était aussi de CHF 1'880.- depuis le 1er novembre 2014, alors que le dernier loyer payé par le précédent locataire AM______ était de CHF 1'400.- depuis la conclusion de son propre bail en 2007, son bail ayant été résilié pour le 31 mars 2015 et l'appartement étant resté vacant jusqu'au 1er août 2015. L'avis de fixation du loyer initial comportait faussement la mention "loyer inchangé" ;

-  Les locataires AK______/AL______ ont résilié leur bail pour le 31 juillet 2016 et leurs successeurs, entrés le 1er décembre 2016, payent depuis lors un loyer de 1'880.- par mois.

Appartement no 11 de l'immeuble sis 1______ à C______

-  Par courriel du 22 juillet 2015, BO______ a écrit à BF______, en mettant A______ en copie : "voici encore un projet de bail (..). En ce qui concerne le nom de l'ancien locataire, je vous informe que dans l'immeuble nous avons déjà utilisé 2x M______ et 1xAA______. Merci de me dire ce que vous aimeriez noter sur le bail". Était joint un projet de bail avec le nom de AA______ comme ancien locataire, ce nom étant tracé à la main sur la version papier et remplacé par AU______, qui peut aussi se lire comme AQ______ [autre prénom], alors que la clause de renouvellement du bail a aussi été tracée à la main ;

-  Le bail conclu par les locataires AN______/AO______ est entré en vigueur le 15 août 2015 au loyer de CHF 1'880.-. L'avis de fixation indique que le loyer dû par le précédent locataire, AQ______ selon le bail, était aussi de CHF 1'880.- depuis le 15 décembre 2014, alors que le dernier loyer payé par l'ancienne locataire AP______ SA était de CHF 1'645.-, ce bail ayant été résilié pour le 15 décembre 2014 et l'appartement étant resté vacant jusqu'au 15 août 2015. L'avis de fixation du loyer initial comportait faussement la mention "loyer inchangé" ;

-  Les locataires AN______/AO______ ont résilié leur bail pour le 31 octobre 2015 et leurs successeurs, entrés le 15 mai 2016, payent depuis lors un loyer de CHF 1'880.- par mois.

Appartement no 24 de l'immeuble sis 2______ à D______

-  Par courriel du 2 juin 2015, BO______ a informé BF______, en mettant A______ en copie, que l'appartement en question dont l'ancien loyer était de CHF 1'020.- restait vacant car le nouveau loyer demandé de CHF 1'780.- était beaucoup trop élevé, tout comme les loyers de trois logements vacants dans l'immeuble de C______, au vu de l'état de l'immeuble. Sur le courriel imprimé le montant de CHF 1'780.- est tracé à la main et remplacé par CHF 1'600.- et le montant de CHF 170.- est indiqué à titre de charges ;

-  Par courriel du 16 juillet 2015, BO______ a écrit à BF______, avec A______ en copie, pour lui indiquer "nous avons enfin un dossier pour l'appartement ( )". Sur le courriel imprimé, figure l'annotation manuscrite :"Ok (..) projet de bail SVP" ;

-  Par courriel du 23 juillet 2015, BF______ a adressé à la régie un projet de bail "confirmé" pour les nouvelles locataires AR______ et AS______ avec un début de contrat au 1er août 2015. Sur celui-ci est mentionné à la main sous ancien locataire "AU______", qui peut aussi se lire AQ______. La clause de renouvellement du bail est tracée à la main de même que la mise à disposition d'une cave ;

-  La liste des locataires de l'immeuble perquisitionnée auprès de la régie confirme qu'aucun AU______ ou AQ______ n'a habité dans cet appartement et que les locataires AR______ et AS______ sont bien arrivées le 1er août 2015 et y sont restées jusqu'au 15 juillet 2016.

Appartement no 43 de l'immeuble sis 1______ à C______

-  Le courriel du 2 juin 2015 susmentionné visait également l'appartement en question dont l'ancien loyer était de CHF 1'100.- et dont le nouveau loyer demandé de CHF 1'880.- était, selon la régie, beaucoup trop élevé au vu de la vétusté de l'immeuble ;

-  Le 12 juillet 2016, BM______ de la régie a écrit à A______ : "Je vais établir le bail pour Monsieur AV______ [sic] et Mme AW______ avec effet au 15.08.16. Au vu de la hausse conséquente, pourriez-vous svp m'indiquer quel nom dois-je indiquer sur le précédent locataire", ce à quoi A______ répond le même jour : "on me confirme, M AY______" ;

-  Le bail conclu par les locataires AV______/AW______ est entré en vigueur le 15 août 2016 au loyer de CHF 1'680.-. L'avis de fixation indique que le loyer dû par le précédent locataire, AY______ (sic) selon le bail, était de CHF 1'880.- depuis le 1er janvier 2016, alors que le dernier loyer payé par le précédent locataire AX______ était de CHF 1'100.-, son bail ayant été résilié pour le 31 mars 2016 et l'appartement étant resté vacant jusqu'au 15 août 2016.

Appartement no 24 de l'immeuble sis 1______ à C______

-  Par courriel du 5 janvier 2017 adressé à BM______, A______ a accepté la candidature des locataires intéressés à reprendre l'appartement vacant depuis un certain temps et a indiqué "merci de nous passer un projet de bail" ;

-  Par courriel du 6 janvier 2017, BM______ a demandé à A______ "pourriez-vous svp me donner le nom que je dois indiquer dans la rubrique ancien locataire" et il est indiqué à la main sur la version papier courriel "AU______", ainsi que la date : "15.9.2015" ;

-  Le bail conclu par les locataires AZ______/BA______, est entré en vigueur le 15 janvier 2017 au loyer de CHF 1'880.-. L'avis de fixation indique que le dernier loyer dû par le précédent locataire, BC______ selon le bail, était aussi de CHF 1'880.- depuis le 15 septembre 2015, alors que le loyer payé par les derniers locataires BB______ était de CHF 1'200.-, ce bail ayant été résilié pour le 15 septembre 2015 et l'appartement étant resté vacant jusqu'au 15 janvier 2017 ;

-  Les locataires AZ______/BA______, l'un serveur, l'autre maçon, étaient encore en place en 2018, voire au-delà.

d.c. Le rapport policier relevait encore quele 16 novembre 2016, B______ avait transmis à A______ les coordonnées de BG______. Ce même-jour, A______ avait écrit à BG______ afin de lui exprimer sa satisfaction au sujet de "l'équipe de C______" et en particulier de B______ qui savait trouver des arrangements avec "des locataires difficiles qui se pren[aient] pour des propriétaires".

d.d. Était encore souligné que A______ et B______ avaient tous deux été sollicités par courrier des inspecteurs en charge de l'enquête du 4 juillet 2018 pour se déterminer sur la liste des anciens locataires des immeubles [sis] 1______ à C______ et du 2______ à D______, tirée du logiciel informatique de la régie, et indiquer lesquels d'entre eux avaient fait l'objet d'un bail contenant le nom d'un ancien locataire fictif et/ou avis de notification de loyer initial contenant un ancien loyer incorrect, ce qui eut nettement facilité le tri. Aucun des deux n'avait répondu.

d.e. De nombreuses mentions manuscrites de noms, de montants de loyer et de dates – d'aspect similaire à l'écriture de A______ telle qu'elle figure sur sa fiche de situation personnelle et sur la pièce C-602 dont il a reconnu qu'il s'agissait de son écriture – apportées sur les courriels ou les projets de contrat cités ci-dessus, sont ensuite reprises sur les contrats de bail et avis de notification du loyer signés, dans les rubriques "ancien locataire", "ancien loyer" et "loyer dû par le précédent locataire depuis le".

d.f. Les documents pertinents sur lesquels se sont basés les enquêteurs pour l'établissement du rapport du 23 juillet 2018 ont été joints en original audit rapport. Les autres pièces séquestrées et figurant à l'inventaire du dossier sous "pièces de forme" ont été conservées – et toujours été consultables sur rendez-vous – au greffe des pièces à conviction, ce que le MP a par ailleurs expressément indiqué dans différents courriers figurant à la procédure, adressés au conseil de A______ en destinataire principal ou en copie.

e. Dans le délai imparti par le MP au 30 août 2018, A______ a indiqué, sous la plume de son conseil, n'avoir aucune observation à formuler au rapport de police du 23 juillet 2018.

f. L'ensemble des locataires lésés mentionnés dans l'acte d'accusation ont été indemnisés par A______, pour un montant total de CHF 218'118.-. L'indemnisation convenue correspondait généralement à la différence entre le loyer fixé et payé par les locataires lésés et le véritable loyer effectivement payé par le réel précédent locataire, pour la durée du bail, excepté pour les locataires en demeure. Les locataires AH______/AI______, les plus fortement lésés, ayant payé durant la durée de leur bail de 39 mois, un loyer de CHF 1'880.- alors que le véritable loyer précédent était de CHF 1'030.-, ont été indemnisés à hauteur de CHF 33'150.-.

Les loyers des locataires encore en place ont été ramenés au montant du loyer du précédent locataire, impliquant le remboursement des loyers trop perçus par la bailleresse, puis des échelons ont été prévus pour l'avenir.

Les accords s'agissant des locataires de l'immeuble de P______ ont été passés par le biais du conseil de cette dernière.

Un accord portant sur le remboursement de CHF 6'670.- a été trouvé directement entre A______ et les locataires AR______/AS______, seuls locataires lésés de l'immeuble sis 2______ à D______.

A______ a également versé à BK______ un montant de CHF 28'470.- à titre de remboursement des loyers indument perçus conformément au jugement rendu dans la procédure en contestation du loyer initial intentée par ce dernier.

Les locataires BK______, AF______, AV______/AW______, R______/S______, AN______/AO______ et AK______/AL______ qui avaient déclaré vouloir participer à la procédure, ont retiré leur plainte.

Audition des employés de la régie de C______ et de BG______

g. Plusieurs employés de la régie ont été entendus en qualité de personnes appelées à donner des renseignements. Ils ont tous indiqué avoir su que la régie avait indiqué des noms de locataires fictifs ainsi que des anciens loyers erronés sur les contrats de bail et avis de notification du loyer initial en lien avec l'immeuble de C______. Pour la majorité des témoins entendus, les instructions provenaient de A______, directement ou via ses collaborateurs. Ils n'avaient jamais eu de contact avec P______ et n'ont pas mentionné l'immeuble de D______.

g.a. BO______, assistante technique au sein de la régie, a été entendue par la police. Elle devait toujours obtenir le "feu vert" de A______ ou de sa secrétaire ou bras droit BF______, laquelle transmettait les ordres de ce dernier, pour toutes questions en lien avec l'immeuble de C______. Elle n'avait pas conscience que lorsque A______ leur demandait de modifier les baux ou les avis de notification de loyer, cela pouvait constituer des faux dans les titres. Elle exécutait uniquement les ordres donnés par A______ via BF______. Quant à B______, il devait faire ce que le propriétaire lui ordonnait de faire, sous peine de perdre le mandat de gestion de l'immeuble en question.

g.b. BL______, gérant technique au sein de la régie, a déclaré devant la police que, selon les cas, A______ donnait l'instruction de mentionner le nom d'une de ses connaissances dans la rubrique "ancien locataire". Dans celle de l'"ancien loyer", A______ voulait que la régie indique le même loyer. Ainsi le nouveau locataire n'était pas informé de la hausse de loyer. Il ignorait à combien de reprises la régie avait effectué une telle demande mais après chaque résiliation, les loyers étaient revus à la hausse. Personnellement, il avait toujours été en contact avec A______ ou ses associés, soit BP______ ou BF______. C'était toutefois toujours A______ qui décidait. B______ n'avait selon lui pas eu le choix que d'accepter les demandes de A______ qui était une connaissance de BG______. Le cas de l'immeuble en question était toutefois unique et il ne s'agissait nullement d'une pratique de la régie.

Au MP, BL______ a nuancé ses précédentes déclarations, affirmant qu'il ne savait pas qui avait transmis les noms fictifs. Il s'agissait d'une pratique "banale" qui se faisait dans d'autres régies. B______ était une personne très consciencieuse qui contrôlait tout. Il avait simplement supposé que ce dernier avait subi des pressions en raison de sa position de directeur d'agence mais il ne pouvait pas confirmer que tel avait été le cas s'agissant précisément de l'immeuble de C______.

g.c. BM______, alors secrétaire gérante au sein de la régie, a confirmé devant la police et le MP, avoir été au courant de la problématique liée à l'immeuble de C______, au sujet des locataires fictifs figurant sur certains baux ainsi que des anciens loyers fictifs figurant sur les avis de notification. Elle avait elle-même rédigé des baux avec de faux noms. Elle établissait également les avis de notification avec le montant des anciens loyers qu'on lui donnait. B______ lui donnait le "feu vert" pour qu'elle transmette les baux à A______ par le biais de BQ______, la secrétaire de ce dernier. A______ contrôlait tout avant de lui retourner le bail validé ou comportant d'éventuelles modifications à apporter. Il lui semblait que B______ avait tenté de s'opposer à la pratique des loyers et des noms fictifs et qu'il avait exprimé son désaccord. Elle avait toujours agi selon les instructions de A______.

g.d. BJ______, alors assistante de location au sein de la régie, a été entendue par la police sur délégation du MP. Elle a confirmé qu'il y avait eu des "petites magouilles" en lien avec des locataires et des loyers fictifs relatifs à l'immeuble de C______. Elle a confirmé avoir envoyé un email à A______ le 24 février 2011 lui demandant de lui fournir un nom d'ancien locataire et qu'il était inhabituel que des noms de locataires n'apparaissent pas sur l'état locatif. Elle ne se souvenait pas avoir fait ces "bêtises-là". Elle agissait toujours sur instruction de B______, à qui elle rendait des comptes dès lors qu'il était son supérieur hiérarchique. A la lecture des e-mails soumis, elle comprenait que B______ ne semblait pas d'accord mais qu'il fallait suivre les instructions de A______. Selon elle, le seul intérêt de B______ dans ce procédé était de ne pas perdre la gestion de l'immeuble. Il subissait beaucoup de pression pour ne pas perdre de propriétaires.

g.e. K______, alors gérante technique au sein de la succursale de C______, a été entendue par la police, sur délégation du MP. La pratique en lien avec cet immeuble consistant à faire figurer des noms de locataires et des anciens loyers fictifs avait, selon elle, été l'initiative de B______, lequel avait déployé ce procédé pour d'autres immeubles, notamment un situé à 3______. Elle était en conflit avec la régie dans le cadre d'une procédure prud'homale. B______ avait refusé d'engager du personnel supplémentaire alors qu'ils étaient tous à la limite du burn out. Il l'avait insultée en public et avait exigé sa démission.

g.f. BR______, assistante de direction au sein de la régie depuis dix ans, a également été entendue. Elle n'était pas en charge de la gestion de l'immeuble de C______ visé par l'enquête et n'avait pas eu, à l'époque, connaissance de la pratique mise en place en lien avec des noms de locataires et des montants d'anciens loyers fictifs. Elle savait uniquement que la régie devait se conformer aux instructions de A______ pour cet immeuble, notamment sur le choix des locataires et sur les baux qu'il validait.Elle partageait l'avis de BL______ s'agissant du fait que B______ ne faisait que répondre aux demandes du propriétaire et de BG______.

h. Entendu au MP, BG______ a expliqué avoir connu A______ 40 ans auparavant, pour être allé skier avec lui, et l'avoir croisé à deux ou trois reprises à Genève par la suite. Un jour, A______ l'avait appelé pour lui dire qu'il avait donné des immeubles à gérer à l'agence de C______. Lui-même n'avait jamais donné d'instructions à B______ quant à la gestion des immeubles de A______, en particulier quant aux noms qui devaient figurer sur les baux ; il faisait entièrement confiance à ses gérants. Il voyait B______ en principe une fois par année et avait des contacts avec lui par téléphone ou par courriel. B______ était l'unique responsable de toute la gestion de l'agence de C______ et connaissait très bien son métier. Il n'avait jamais entendu parler de la pratique consistant à inscrire sur les baux des noms et loyers fictifs.

Audition des collaborateurs de A______

i. Plusieurs collaborateurs de A______ ont été entendus par le MP en qualité de personnes appelées à donner des renseignements. Ils ont tous indiqué n'avoir eu aucun pouvoir décisionnel par rapport aux questions immobilières et avoir toujours agi sur instruction de A______.

i.a. BP______, secrétaire de A______ depuisplus de dix ans, a précisé qu'elle n'avait pas connaissance de la problématique des locataires et anciens loyers fictifs. BF______ s'occupait davantage des questions liées à l'immobilier. Celle-ci n'avait toutefois pas beaucoup de pouvoir décisionnel. Il était exact que A______ avait à un certain moment délégué des choses liées à certaines procédures à l'extérieur sans qu'elle ne se souvienne de la date.

i.b. BF______, assistante de A______ pour les questions immobilières de 2007 à 2016 ou 2017, a expliqué qu'elle suivait des lignes de conduite fixées par A______ et que ce dernier contrôlait régulièrement son travail. Elle n'avait aucun pouvoir décisionnel. Elle avait eu des contacts avec la régie s'agissant de l'immeuble de C______. Elle avait plus particulièrement transmis à la régie des noms de locataires que A______ lui avait indiqués mais elle ignorait si ceux-ci avaient existé ou non. Ce dernier lui mentionnait également les montants des loyers à transmettre à la régie. Elle ne savait pas s'il s'agissait des anciens loyers ou des nouveaux loyers, c'était confus.

i.c. BN______, collaborateur de A______, a indiqué s'être occupé, avec BD______ et sous la supervision de A______, de la procédure judiciaire concernant l'immeuble de C______ et les "baux problématiques". BD______ et lui-même avaient été informés par B______ que ceux-ci pouvaient contenir des noms fictifs. Il en avait parlé à A______, sans connaître le détail de ce qui était fictif. A______ ne lui avait pas dit qui était l'auteur de ces documents. Les baux avaient été caviardés avant d'être produits car A______ ne souhaitait pas que l'ASLOCA utilise les informations caviardées pour faire ouvrir d'autres procédures. Il a refusé de répondre à la question de savoir si l'existence de baux au contenu discutable dérangeait quelqu'un au sein de l'Etude, invoquant que son rôle était de conseiller l'agence de C______ et pas de "décider si une chose est bien ou non".

Auditions de B______

j. B______, entendu en qualité de prévenu, a d'abord contesté les faits expliquant n'avoir eu connaissance de la pratique consistant à faire figurer des locataires et des loyers fictifs sur les baux et avis de notification que tardivement, soit en 2011. A______ n'avait jamais rien exigé de lui et ne lui faisait pas peur. Il était un client charmant et courtois et n'avait eu que peu de contacts directs avec lui.

Il a ensuite concédé, sans se souvenir de l'ensemble des cas mentionnés dans l'acte d'accusation, avoir effectivement su qu'il signait des documents avec de fausses informations. Il avait simplement répondu aux attentes de A______ et demandé à ses collaborateurs de faire de même. Il n'avait pas conscience de la portée de ses actes, soit que cela pouvait constituer des faux dans les titres. Vu que les ordres provenaient de A______, qui était avocat, il pensait que ce dernier savait ce qu'il faisait, et qu'en tout état, la responsabilité incombait à la société qui l'employait ou au propriétaire de l'immeuble. A______ était d'ailleurs plus interventionniste qu'un autre propriétaire. Il avait ses propres modèles de contrat de bail que la régie devait utiliser pour les immeubles concernés et contrôlait tout. Il ne se souvenait pas comment la pratique des locataires et loyers fictifs avait débuté. Lors de sa première réunion avec A______ en 2008, ils avaient longuement parlé des directives à appliquer dans la gestion des immeubles de C______ et de D______. Après avoir vérifié ses notes de réunion, il avait constaté qu'il n'était pas fait mention de locataires ou de loyers fictifs, alors qu'il consignait en général tout par écrit. Cependant, il ne s'agissait pas d'une pratique habituelle au sein de la régie O______. Ce procédé avait pour but d'obtenir un rendement supérieur, éviter que les nouveaux locataires contestent le loyer initial et éviter que ce loyer soit réduit au montant payé par le locataire précédent. Il n'avait personnellement tiré aucun avantage de cette pratique, n'ayant en particulier perçu aucune prime ou pourcentage sur les loyers encaissés par la régie. Il avait accepté de le faire car il subissait une pression constante de son employeur pour garder ses mandats. La régie n'avait pas encaissé de loyers s'agissant des anciens locataires fictifs qui auraient réellement habité dans les appartements concernés.

Audition de A______ à l'audience de jugement

k. A l'audience de jugement, A______ est revenu sur ses déclarations et a alors pour la première fois contesté les faits de même que leur qualification juridique de faux dans les titres. Il n'était pas très présent à l'Etude et des e-mails pouvaient avoir été envoyés à son insu en son nom. Il n'avait jamais demandé aux employés de la régie de mettre sur les baux des noms de personnes qui n'avaient jamais habité dans les immeubles visés par la procédure. Il avait uniquement donné le nom de personnes qui se trouvaient dans les appartements, qu'elles soient formellement locataires ou pas. Il avait en effet aidé des gens en difficulté en leur disant de téléphoner à l'Etude pour voir s'il y avait un appartement vacant pour eux. Le nom de AA______ ne lui disait rien mais les locataires N______, M______, AU______ ([prénommé] AU______ ; les mentions BC______ et AQ______ [même nom, autres prénoms] étant des erreurs) et L______ avaient effectivement habité dans les logements concernés, soit avant, pendant ou après les travaux. Ces personnes étaient censées payer quelque chose car il "fallait faire entrer de l'argent" en raison des travaux, mais les appartements restaient vides. Il n'avait toutefois personnellement pas perçu de loyer de leur part. Il n'avait jamais non plus donné l'instruction de mentionner que le loyer était inchangé et de faire figurer le nouveau loyer comme ancien loyer. Il n'avait auparavant pas expliqué que ces personnes avaient réellement habité dans les appartements visés car on ne lui avait pas posé la question. Les "déclarations libres" qu'il avait faites en début de procédure ne l'étaient pas. Il avait été mis sous pression de la mise en détention et avait dit ce que le procureur voulait entendre. Confronté au fait que lors de l'audience du 26 juillet 2019 devant le MP, il n'avait pas non plus mentionné ces éléments, alors qu'il était libre depuis le 29 juin 2018, il a expliqué qu'il n'avait certes pas donné une information complète mais ce n'était pas à lui de faire l'instruction. BF______ avait peut-être donné des faux noms de locataires à la régie ; elle avait des problèmes de drogue. Les loyers n'étant pas abusifs, les locataires n'auraient pas forcément contesté leur loyer initial même s'ils avaient connu la réalité du montant de la hausse. Il avait servilement payé les montants demandés par les locataires lésés en tenant compte des dysfonctionnements de son Etude. Il n'estimait pas que sa sœur ou lui se fussent enrichis car les impôts étaient très élevés. Le fait que les frais de régie étaient inclus dans les charges des locataires ne posait pas de problème et correspondait à la méthode zurichoise, puisque c'étaient eux qui donnaient du travail à la régie. Le fait que les successeurs de certains locataires lésés continuaient de payer le loyer élevé sortait au demeurant du champ de l'acte d'accusation.

Audition de témoins à l'audience de jugement

l.a. P______ a indiqué que son frère était un homme bon et de parole. Il avait notamment fait des efforts pour garder des locataires âgés dans des appartements à loyer très bas. Elle gardait toute confiance en lui. Il n'avait jamais été question qu'elle le rembourse des montants des indemnités qu'il avait lui-même versés.

l.b. BS______, ami de longue date de A______, BT______, courtière en immobilier, et BU______, dont A______ avait défendu le compagnon, ont décrit l'intéressé comme quelqu'un d'honnête, droit, gentil, généreux et professionnellement très consciencieux. Il avait mis à disposition de BS______ des locaux pour lui permettre de passer ses examens avec quiétude. BT______ n'avait jamais constaté, dans le cadre de son activité de courtière pour la location d'appartements, que de fausses indications figuraient dans les baux. A______ était venu en aide à plusieurs personnes se trouvant dans des situations très délicates. Il suivait de près la gestion de ses immeubles.

Pièces produites par A______ à l'audience de jugement

m.a. A______ a produit plusieurs témoignages écrits, dont il ressort notamment ce qui suit :

-  D'après E______, F______ et G______, responsables dans des régies ou agences immobilières qui géraient des biens immobiliers appartenant à A______, ce dernier suivait de près la gestion de ses biens ; il était un client précis et exigeant. Les baux lui étaient soumis et il fixait les nouveaux loyers lui-même. A______ ne leur avait jamais demander d'inscrire des noms de locataires précédents fictifs ou des loyers fictifs dans des baux.

-  H______ a expliqué avoir travaillé sur différents projets de rénovation et d'entretien sur les immeubles sis 1______, à C______, et 2______, à D______. Pendant ces travaux, il avait remis à plusieurs reprises des clés d'appartements à des personnes, quand les appartements étaient vides, en attente de rénovation ou en cours de rénovation. On lui avait dit que ces personnes étaient aidées par A______.

-  AU______ a écrit ce qui suit : "( ) A______ m'a mis à disposition et/ou loué pour moi ou de mes amis ou connaissances [sic] à de multiples occasions des surfaces commerciales à Genève et aussi des appartements soit en état soit en travaux notamment dans les années 2010 à C______ au 1______ (entre la gare et le lac) et à D______ au 2______ ( )".

m.b. A______ a également produit un avis de droit de BV______, ancien président du Tribunal fédéral, mandaté par ses soins, et selon lequel les formules officielles de notification du loyer initial ne constituent pas des titres. Afin de délimiter le faux intellectuel du simple mensonge écrit, il convenait de se poser la question de savoir si le déclarant revêtait une position assimilable à un garant, laquelle ne devait être admise, dans la relation entre deux sujets de droit privé, que lorsque l'une des parties assumait une obligation particulière, à l'instar de l'architecte qui avait une obligation de vérification du décompte final. Or le bailleur n'assumait pas d'obligation comparable à l'égard du locataire. Il ressortait par ailleurs de la jurisprudence que la qualification de faux intellectuel avait été


niée s'agissant d'un affidavit produit en justice civile et qui contenait des indications inexactes, parce que celles-ci étaient sujettes à vérification par l'autorité. Selon ce raisonnement, le formulaire d'avis de notification du loyer initial contenant des indications inexactes mais vérifiables lors d'un procès civil, ne constituait pas non plus un faux intellectuel. Enfin, l'art. 269 al. 2 CO applicable par renvoi de l'art. 270 al. 2 CO se référait à un formulaire au moyen duquel une augmentation de loyer devait être communiquée et motivée. La loi ne prévoyait que la nullité au cas où la communication n'avait pas eu lieu au moyen du formulaire prescrit. L'on ne voyait dès lors pas comment un faux intellectuel pouvait être commis au moyen d'un tel formulaire. Le législateur ne s'était nullement prononcé sur la punissabilité de déclarations inexactes faites sur ledit formulaire. Une condamnation pour faux dans les titres en l'espèce s'opposait ainsi au principe nulle crimen sine lege.

Accès au dossier

n.a. Le 27 mars 2019, le TCO a offert de remettre une copie de la procédure à A______ si la demande en était faite rapidement, dès lors que le dossier devait être acheminé au Tribunal fédéral en raison d'un recours interjeté par le précité.

A______ a répondu le lendemain souhaiter recevoir dans les meilleurs délais une copie numérotée de la procédure.

Malgré une note au dossier intitulée "Demande de photocopie" datée du 27 mars 2019 signée du greffe du Tribunal pénal : "Svp besoin d'une copie urgente car le dossier doit partir au Tribunal fédéral. Gardez 1 copie scannée car il faudra refaire des copies pour les juges et les parties. [...]", la demande de A______ est restée sans réponse.

n.b. Après le retour de la procédure du Tribunal fédéral, et suite à une nouvelle demande de A______, la présidente a informé ce dernier par courrier du 22 janvier 2020 qu'une copie de la procédure était à sa disposition au greffe du Tribunal. Le dossier a une nouvelle fois été mis à disposition pour consultation, le 13 mars 2020.

n.c. Par lettre du 5 mai 2020, la présidente du TCO a fait parvenir aux parties copie des derniers éléments versés à la procédure, précisant qu'il leur était loisible de venir consulter le dossier, sur demande préalable et selon un créneau horaire précis en raison des mesures sanitaires liées à la COVID, afin de vérifier qu'ils avaient reçu tous les documents, voire demander copie de certaines pièces.

n.d. Les 6 et 12 mai 2020, le TCO a envoyé aux conseils de A______ un lot de "copies de certaines pièces portées à l'inventaire" puis "une sélection de pièces" tirées des documents figurant à l'inventaire de la procédure.

n.e. Suite à la demande de A______ de recevoir une copie scannée de la procédure, la présidente du TCO a répondu, le 7 mai 2020, que le dossier n'était pas scanné et que les deux classeurs du Tribunal seraient mis à la disposition des conseils de A______ durant une heure, le lendemain, dans leur état au jour de la consultation. Les conseils de A______ ont pu consulter le dossier le 8 mai 2020. Le dossier a, à nouveau, été mis à la disposition de A______, pour consultation, le 15 mai 2020.

n.f. Il ressort de la motivation du TCO s'agissant des questions préjudicielles formulées devant lui, que suite à l'envoi du dossier au Tribunal fédéral le 29 mars 2019, la greffière avait omis de délivrer à A______ une copie "papier" du dossier du MP, lequel avait été scanné (quatre classeurs gris). Le précité détenait toutefois les copies de l'essentiel du dossier, levées au MP durant l'instruction. Au retour du dossier du Tribunal fédéral, une copie complète avait été délivrée à A______, le 22 janvier 2020, puis les nouvelles pièces avaient été adressées, au fur et à mesure, à toutes les parties. Le dossier du Tribunal (classeurs bleus) n'avait jamais été scanné, raison pour laquelle il avait été proposé à A______ de le consulter, ce que ses conseils avaient fait le 8 mai 2020.

Actes du TCO

o.a. Par ordres de dépôt adressés à P______ et à la régie, le TCO a requis la production de documents visant à lui permettre d'effectuer un calcul de rendement de l'immeuble sis 1______, à C______, (notamment l'acte d'acquisition dudit immeuble, le détail des amortissements des dettes hypothécaires/chirographaires et les comptes de gestion et de charges). Cependant, tant la bailleresse que la régie ont répondu ne pas être en possession des pièces en question. Le conseil de P______ a toutefois précisé que l'immeuble, construit en ______, avait été hérité par sa cliente en 1963. Il a produit les quelques pièces en sa possession.

o.b. Poursuivant le même objectif, le TCO a extrait un certain nombre de pièces du greffe des pièces à conviction qu'il a listées et transmises aux conseils de A______ par courriers susmentionnés des 6 et 12 mai 2020.

C. a.a. Aux débats d'appel, et par la voix de ses conseils, A______ persiste dans ses conclusions à titre de question préjudicielle.

a.b. Ouï les parties présentes, la Cour rejette la question préjudicielle au bénéfice d'une brève motivation orale renvoyant pour le surplus aux développements du présent arrêt (cf. infra consid. 1.2.1 ss).

b.a. Sur le fond, A______ conteste avoir joué un quelconque rôle dans l'élaboration de contrats de bail et d'avis de notification de loyer initial en lien avec les immeubles visés par la procédure. Il n'avait pris connaissance des baux litigieux en lien avec l'affaire BK______ que devant la Commission du Barreau et, s'agissant des baux et avis de loyer initial comportant des indications "farfelues" en lien avec des loyers inchangés, uniquement devant le MP. Les stagiaires qui l'avaient dénoncé à la Commission du Barreau avaient agi par vengeance.

Il avait uniquement indiqué à la régie les montants des loyers futurs après travaux, sans se préoccuper du montant du loyer antérieur dont il n'avait personnellement même pas connaissance. Il était parfaitement ridicule que B______ ait mentionné "loyer inchangé" sur les avis de notification du loyer initial, car c'était faux. Il aurait dû écrire "adaptation aux loyers de la région et travaux". Les gens comprenaient une telle mention. Il recevait par ailleurs un nombre très élevé d'e-mails comme cela ressortait de l'analyse de la société BW______ versée à la procédure (cf. p. 25 in fine). Il ne pouvait à l'évidence pas tout traiter lui-même. L'organisation de son Etude voulait que n'importe lequel de ses associés ou employés puisse utiliser ses codes et envoyer un e-mail depuis son adresse et avec sa signature, l'idée étant que le courriel en question avait plus de poids que s'il provenait d'un stagiaire ou d'une assistante. BF______ était la personne engagée précisément pour traiter des questions immobilières. Celle-ci avait une certaine liberté d'action et une marge de décision malgré les déclarations de l'intéressée en sens contraire, étant précisé qu'elle avait des problèmes de consommation de substances et avait eu un comportement étrange durant son audition. C'était toutefois lui qui déterminait les montants des nouveaux loyers car il connaissait bien les villes de l'arc lémanique. BF______ gagnait entre CHF 4'600.- et 5'000.-, 13 fois l'an. Lui-même n'avait eu que "très très peu" de contact avec la régie, y compris B______, avec lequel il avait eu une relation quasi inexistante à l'exception d'un litige en matière de bail. Il n'avait nullement comploté avec ce dernier. B______ avait en revanche tout intérêt à éviter des procédures de contestation de loyer initial car cela lui prenait beaucoup de temps. La régie tirait également avantage du fait que les loyers fussent plus élevés dans la mesure où elle était rémunérée en proportion. B______ percevait peut-être une gratification supérieure s'il parvenait à entrer des loyers plus élevés et donc à augmenter le chiffre d'affaires de la régie.

Il reconnaissait son écriture manuscrite sur la pièce C-602 là où il était écrit "BC______". Son assistante lui avait, selon lui, soumis cet e-mail pour savoir si quelqu'un y habitait et, dans la précipitation, il avait indiqué le nom de M. AU______ ainsi qu'une date car il savait qu'il revenait de temps à autre en Suisse.

S'il avait admis en cours d'instruction et devant le TMC avoir communiqué de faux noms, il voulait dire par-là qu'il avait conscience de la problématique mais pas qu'il l'avait personnellement pratiquée. Il avait adopté ce choix catastrophique car il avait été placé en état de nécessité. Il avait faussement admis certaines choses pour éviter d'être mis en détention pour trois mois, ce qui l'aurait empêché de finaliser les affaires avec ses anciens associés. Il aurait alors tout perdu et peut-être même divorcé. Devant le TMC, il avait également dû se faire violence et admettre des faits qu'il n'avait pas commis car il était primordial qu'il sorte le plus rapidement possible. A la question de savoir pourquoi il avait persisté à déclarer des éléments qui l'incriminaient alors qu'il n'était plus détenu, il a expliqué que les mesures de substitution étaient très strictes. Il avait alors considéré que s'il modifiait sa version, il retournerait en détention. Il avait essayé de prouver son innocence mais le MP l'en avait toujours empêché.

Il regrettait sincèrement ce qui s'était produit à l'égard des locataires concernés par la procédure, sans pour autant savoir comment on en était arrivé là. Il les avait indemnisés pour cette raison et cela l'avait d'ailleurs mis dans une situation financière très difficile.

b.b. Par la voix de ses conseils, A______ persiste dans ses conclusions. Il avait été victime d'un délit de faciès pour avoir été bien né. Il avait été terrorisé lors de son arrestation, menotté, amené aux Violons, dénudé, puis mis en détention sans raison. Il n'était pas un "Rambo" de l'immobilier et avait été traité différemment que d'autres personnes poursuivies pour des faits similaires. Il avait ensuite été muselé par les mesures de substitution. La version du MP était sélective. Il ressortait du dossier que le procédé des locataires et loyers fictifs était une pratique de la régie O______ et d'autres agences immobilières et non de A______. B______ avait par ailleurs déclaré qu'il n'avait pas peur de A______, qu'il qualifiait d'ailleurs de "client charmant", et que celui-ci n'avait jamais exigé quoique ce soit de sa part. La première réunion en 2008 ne faisait au demeurant nullement mention de faux loyers ou locataires. Les déclarations des employés de la régie permettaient au contraire de constater que tout le monde craignait BG______. K______ avait ajouté que c'était B______ qui avait mis en œuvre le procédé litigieux pour l'immeuble de C______ et qu'il l'avait également fait pour d'autres immeubles. Il ressortait encore du dossier que tous les baux étaient signés par B______ et que A______, dont le trafic d'e-mails était très important, n'était jamais intervenu sur les avis de loyer, en particulier s'agissant de la mention "loyer inchangé". Le TCO errait au demeurant en affirmant que les locataires étaient fictifs. A______ prêtait ses appartements à des personnes qui existaient réellement, ce qui ressortait des témoignages écrits versés au dossier. Ceux-ci permettaient également de confirmer qu'il n'avait jamais demandé à ses autres connaissances professionnelles de mettre des faux noms de locataires sur des baux. En définitive, A______ n'avait jamais eu l'intention de tromper qui que ce soit ni n'avait signé aucun document permettant de lui imputer l'infraction reprochée.

Les documents en question ne pouvaient en tout état pas être qualifiés de faux intellectuels. Une crédibilité accrue aurait dû pouvoir leur être attachée. Il fallait ainsi que leur émetteur ait une position semblable à celle d'un garant. Compte tenu des rapports entre bailleur et locataire, on ne pouvait pas dire qu'il y avait une confiance accrue du locataire envers le bailleur. La jurisprudence développée en lien avec la formule A, citée par les premiers juges, qui mettait l'accent sur la position de garant et qui avait essuyé de féroces critiques doctrinales, n'était que peu pertinente in casu. Il en allait de même de celle en lien avec les contrats de vente de véhicules de police. Il fallait analyser la question à la lumière des textes applicables, ce que n'avaient pas fait les premiers juges. Le contenu de l'avis de notification du loyer initial était certes prévu par la loi mais cela n'en faisait pas un titre pour autant. Le Tribunal fédéral n'avait jamais considéré que le critère décisif pour retenir le faux dans les titres était que le contenu et la forme du document, fussent imposés par la loi. Au contraire, il ressortait de la jurisprudence que le billet à ordre – papier valeur par excellence dont le contenu était défini par la loi – n'était pas un titre, à défaut de force probante accrue. La loi sur les denrées alimentaires prescrivait également que le consommateur devait savoir ce qu'il achetait sur une boîte de conserve par exemple. Cela n'était pas constitutif d'un titre pour autant. Il fallait non seulement que le texte légal définisse le contenu du document en cause mais également qu'il résulte une crédibilité accrue de ce dernier. Or le législateur ne l'avait nullement prévu s'agissant de l'avis de loyer initial. Louer avec des indications erronées n'était certes pas digne d'éloges et portait d'ailleurs à conséquence d'un point de vue civil. En revanche, cela n'était pas constitutif de l'infraction pénale de faux dans les titres.

A______ devait du reste être acquitté dans le cas AR______/AS______ car seul figurait au dossier un document non signé. Dans les cas AV______/AW______ et AZ______/BA______, la mention "loyer inchangé" ne figurait pas sur les avis de notification de loyer initial. Il fallait à tout le moins en tenir compte dans la fixation de la peine dès lors que l'"aggravante" mentionnée dans l'acte d'accusation ne pouvait pas être retenue.

Les conditions du repentir sincère étaient au surplus réunies. Il ressortait du dossier que l'appelant avait collaboré à l'enquête et pris ses responsabilités sur le plan financier. Il avait perdu de nombreux mandats en raison de la procédure qui avait signé son arrêt de mort social. Il était erroné de considérer qu'il n'avait pas fait de sacrifice en indemnisant les lésés. Les conclusions du MP en lien avec la peine étaient ahurissantes ; il était déjà détruit. Il fallait lui laisser une chance. Il était désormais chef d'une Etude qui employait 15 personnes, avait un enfant de cinq ans, avait vécu un enfer avec ses associés, avait fait l'objet de nombreuses procédures et avait été très affecté. Les témoignages versés à la procédure permettaient de conclure qu'il était une bonne personne, dotée d'un fort sens de la morale. Les conditions du sursis complet étaient remplies : il n'avait jamais été condamné et le pronostic quant à son comportement futur était favorable.

Malgré son obligation de motiver, le TCO ne s'était nullement exprimé sur l'ensemble de ces éléments, pourtant plaidés devant lui.

b.c. A______ a produit un rapport de la société BW______ sur le trafic d'e-mails de son Etude mettant en avant son volume important et un avis de droit complémentaire reprenant en substance les arguments développés dans le précédent avis et citant une opinion doctrinale critiquant la jurisprudence développée en lien avec les formulaires A.

c. Le MP persiste dans ses conclusions. La seule question que posait l'appel principal était de savoir si l'avis de fixation du loyer initial constituait un titre puisque A______ avait initialement tout admis – à deux reprises devant le MP et une fois devant le TMC – et que les faits ressortaient clairement du dossier. L'avis de droit versé à la procédure qui préconisait de renverser une jurisprudence bien établie depuis 20 ans sur la qualité de titre du formulaire A, n'était nullement convaincant, pas plus que les différents arrêts du Tribunal fédéral relevés par la défense. Il ressortait de la jurisprudence que la crédibilité accrue d'un document dépendait des circonstances concrètes. La particularité du cas d'espèce résidait dans le fait que l'avis de fixation de loyer découlait de l'art. 270 CO et que son contenu était défini par l'art. 19 de l'Ordonnance sur le bail à loyer et le bail à ferme d’habitations et de locaux commerciaux(OBLF), et non pas du fait que le bailleur fût dans une position de garant ou non. Le but de l'avis de fixation était d'informer le locataire de ses droits de saisir l'autorité de conciliation en lui fournissant toutes les informations utiles lui permettant de se déterminer. La justice se fondait par ailleurs sur ces avis-là lorsqu'elle était saisie car elle partait du présupposé que ce document était vrai. L'autre critère pour retenir la crédibilité accrue de l'avis de notification du loyer initial était que le locataire n'avait pas la possibilité de vérifier les informations au sujet de l'ancien locataire et du montant de l'ancien loyer. A cet égard le Tribunal fédéral avait d'ailleurs considéré qu'un faux justificatif de travaux d'entretien établi par un propriétaire et produit en justice dans le cadre d'un litige avec un locataire constituait bien un titre. Enfin, A______ avait recherché un double avantage illicite : augmenter les loyers – peu importait qu'ils fussent abusifs ou non, le problème résidant dans la manière de faire – et éviter des contestations du loyer initial.

Le changement de version de A______ et "l'état de nécessité" plaidé devant le TCO et en appel n'emportaient nullement conviction. D'abord, le MP n'avait aucunement requis sa détention pour une durée de trois mois comme allégué mais seulement d'un mois. Un changement de version n'était par ailleurs pas un motif de détention. Ensuite, les explications nouvelles étaient confuses dans la mesure où il admettait d'une part que des noms fictifs avaient été donnés à la régie mais sans que ceux-ci n'émanent de sa personne, et d'autre part il affirmait que les personnes en question avaient réellement logé dans les appartements. En tout état, même si certaines d'entre elles avaient dormi dans les logements en cause, ils n'étaient pas des locataires dans la mesure où aucun loyer n'avait été versé.

S'agissant de son appel joint, le MP relève que le mécanisme utilisé par A______ pour faire croire aux locataires qu'ils faisaient une bonne affaire alors que l'on explosait le montant de leur loyer, évitant ainsi qu'ils puissent utiliser leurs droits, était vicieux et scandaleux. A______ était arrogant, courbait les règles qui l'embêtaient, qu'il connaissait parfaitement étant avocat et spécialiste de l'immobilier, et trompait des petites gens, même si cela plombait leur budget. Sa collaboration devait être qualifiée de désastreuse et sa prise de conscience de nulle puisqu'il niait les faits en contradiction manifeste avec le dossier. Il manipulait la justice avec ses explications changeantes. Une attitude plus adéquate aurait pu être de continuer à admettre les faits tout en contestant la qualification de faux dans les titres. La période pénale était extrêmement longue. Le repentir sincère ne pouvait pas être retenu puisque A______ n'avait rien fait pour diminuer le dommage de l'infraction. Il avait certes remboursé les locataires lésés mais le dommage perdurait. On ne savait en effet pas sur quelle base étaient fixés les montants des loyers actuels. Il y avait un blanchiment de l'information. La seule solution pour réparer entièrement le dommage de l'infraction était de refixer l'ensemble des loyers actuels par rapport à ceux payés par les véritables précédents locataires.

D. A______, né le ______ 1954, de nationalité suisse, est marié et père de trois enfants, dont l'un est mineur. Il a prêté serment en qualité d'avocat en 1981. Selon ses explications, il dirige une Etude d'avocats dont le chiffre d'affaires est réalisé à 50% par des activités à l'étranger avec des revenus reportés et à 50% par des activités en Suisse. Actuellement, il ne rédige plus d'écritures lui-même, mais contrôle les conclusions de ses collaborateurs et discute avec eux des stratégies à adopter. Depuis le début de la procédure, il sous-traite une partie de ses dossiers à l'interne ou à l'externe, notamment dans le domaine du bail. En raison de la publicité liée à sa condamnation en première instance, dont il souffre énormément, il a toutefois perdu plusieurs mandats dont celui d'un client important qui se trouve à l'étranger. Il déclare dès lors réaliser désormais un revenu annuel de l'ordre de CHF 65'000.-. Sa fortune a chuté à CHF 2.9 millions en raison de la situation sanitaire. Il a été en litige avec ses anciens associés de 2007 à 2019 et a notamment fait l'objet de quatre plaintes pénales, toutes classées. Sans l'aide de ses avocats, il se serait retrouvé "à terre". Il gère plusieurs immeubles locatifs. Il ne s'occupe plus de gestion courante d'immeubles pour le compte de clients, mais il lui arrive de répondre à des questions spécifiques, notamment sur le loyer à appliquer. Il dit avoir énormément souffert de la procédure, ses droits essentiels ayant selon lui été bafoués.

EN DROIT :

1. 1.1. L'appel et l'appel joint sont recevables pour avoir été interjetés et motivés selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 CPP).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

1.2.1. L'art. 389 al. 3 CPP règle les preuves complémentaires. La juridiction de recours peut administrer, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours.

Conformément à l'art. 139 al. 2 CPP, il n'y a pas lieu d'administrer des preuves sur des faits non pertinents, notoires, connus de l'autorité ou déjà suffisamment prouvés. Cette disposition codifie, pour la procédure pénale, la règle jurisprudentielle déduite de l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.) en matière d'appréciation anticipée des preuves (arrêts du Tribunal fédéral 6B_896/2018 du 7 février 2019 consid. 2.1 ; 6B_463/2018 du 11 janvier 2019 consid. 1.1).

Le législateur a ainsi consacré le droit des autorités pénales de procéder à une appréciation anticipée des preuves. Le magistrat peut renoncer à l'administration de certaines preuves, notamment lorsque les faits dont les parties veulent rapporter l'authenticité ne sont pas importants pour la solution du litige. Ce refus d'instruire ne viole le droit d'être entendu que si l'appréciation de la pertinence du moyen de preuve offert, à laquelle le juge a ainsi procédé, est entachée d'arbitraire (ATF 141 I 60 consid. 3.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_891/2018 du 31 octobre 2018 consid. 2.1).

1.2.2. En l'espèce, l'appelant a réitéré, devant la CPAR, à titre préjudiciel, les réquisitions de preuves suivantes : l'audition de E______, F______, G______, H______, I______ et J______ ; la mise en œuvre d'une expertise visant à établir que les montants des loyers des deux immeubles visés par la procédure sont légitimes et licites ainsi que le dépôt des états locatifs des baux de l'immeuble sis 3______, à C______ pour les années 2009 à 2017, lesquels se trouvent en mains de la régie et des propriétaires de l'immeuble.

Or la juridiction d'appel se rallie à cet égard aux arguments développés par les premiers juges. La CPAR ne voit en effet pas quels éléments pertinents supplémentaires ces mesures seraient susceptibles d’apporter au dossier, qui est en l’état d’être jugé. Il sera précisé ce qui suit :

-          E______, F______, G______ :

Ces personnes, toutes responsables de régies ou d'agences immobilières et qui ont été amenées à collaborer professionnellement avec l'appelant, n'ont pas été témoins des faits visés par la présente procédure, n'ayant aucunement été amenées à travailler en lien avec les immeubles sis 1______ à C______ et 2______ à D______. Des déclarations écrites dont ces personnes sont les auteurs ont par ailleurs été versées à la procédure sur les bonnes relations professionnelles qu'ils entretenaient avec l'appelant et l'audition de ces personnes sur ces mêmes faits n'apparaît pas utile.

-          H______ :

 

L'audition de H______, destinée à alléguer la remise de clé à certaines personnes à qui l'appelant serait venu en aide, n'est pas plus pertinente. La "mise à disposition" de locaux à des personnes dans le besoin n'est pas un contrat de bail, si bien que ces personnes ne peuvent être considérées comme des "anciens locataires". Il ressort par ailleurs du dossier que ces personnes n'ont pas versé de loyer durant leur supposée occupation des lieux. Ainsi, il importe peu de savoir si certaines personnes ont logé gratuitement dans les logements en question. Seuls les faits permettant de savoir si l'appelant a fourni à la régie de fausses indications s'agissant des noms des anciens locataires et des montants des anciens loyers à faire figurer sur les baux et avis de notification du loyer litigieux et dans quel but, sont pertinents. Or H______ n'a en a aucunement été témoin. Son audition n'est dès lors pas utile.

 

-          I______ et J______ :

 

L'audition de ces personnes est requise en lien avec l'activité du département immobilier et l'organisation informatique de l'Etude de l'appelant ainsi que sur son trafic d'e-mails. Toutefois, ces questions ne permettront pas d'apporter des éléments décisifs à la question de savoir s'il a fourni de fausses indications à la régie s'agissant des noms des locataires et des montants des anciens loyers à faire figurer sur les baux et avis de notification du loyer litigieux et pourquoi, étant précisé qu'un rapport de la société BW______ a au demeurant été versé au dossier en lien avec le trafic d'e-mails de l'Etude.

 

-          Expertise :

 

Le moyen de défense requis vise à contester le fait que l'appelant cherchait à obtenir un avantage illicite en fixant des loyers abusifs, soit des loyers hors du prix effectif que les locataires auraient dû payer selon une méthode de calcul adéquate, et donc de contester la réalisation de l'élément subjectif de l'infraction de faux dans les titres.

 

Comme expliqué infra, il importe peu, pour analyser le dessein spécial de l'infraction de faux dans les titres, lequel peut prendre diverses formes, de déterminer si les loyers étaient ou non abusifs – et donc d'ordonner l'expertise visée ou encore de déterminer la méthode de calcul appropriée pour ce faire.

 

-          Ordre de dépôt :

 

Il est également sans pertinence de savoir si la régie ou B______ ont commis des agissements similaires pour des immeubles non visés par l'acte d'accusation. Il s'agit de faits étrangers à la présente procédure pénale et ceux-ci n'ont aucune incidence sur la survenance ou non de ceux reprochés à l'appelant in casu. S'agissant des immeubles en cause, seul complexe de faits qui intéresse la CPAR, les pratiques de la régie et en particulier de B______ ont déjà été examinées et ce dernier a fait l'objet d'une condamnation.

 

Partant, la CPAR fait sienne la décision du TCO de refus des réquisitions de preuves susmentionnées.

1.3. L'appelant requiert encore, à titre de question préjudicielle, l'audition de L______, M______, N______ et la ré-audition de K______.

1.3.1. Pour les mêmes raisons qu'indiquées supra, l'audition de L______, M______ et N______, destinée à prouver que l'appelant leur a accordé des facilités de logements ou leur en a mis à disposition, n'est pas utile pour trancher les questions qui se posent au dossier.

1.3.2. K______ a quant à elle déjà été entendue contradictoirement durant la procédure, audience au cours de laquelle l'appelant avait renoncé à poser des questions. La CPAR ne voit pas en quoi sa ré-audition apporterait des réponses supplémentaires décisives au dossier qui est en état d'être jugé. Les preuves disponibles ne se limitent par ailleurs pas in casu à une confrontation de "parole contre parole", si bien que la ré-audition requise ne s'impose pas d'avantage.

Partant, les nouvelles auditions sollicitées par l’appelant doivent également être rejetées.

1.4.1. Toutes les pièces d'une cause, à savoir celles réunies par les autorités, celles versées par les parties ainsi que les procès-verbaux de procédure et des auditions, doivent être réunies au dossier (art. 100 al. 1 CPP). Celui-ci doit être complet et unique. L'autorité n'a pas le droit de choisir certains documents à communiquer et d'en soustraire d'autres à la consultation. De plus, il ne doit pas exister de dossier officiel parallèle, par hypothèse épuré d'un certain nombre de pièces gênantes pour les autorités (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE [éds], Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 11 ad art. 107).

1.4.2. En l'espèce, dans la mesure où les pièces communiquées par le TCO à l'appelant les 6 et 12 mai 2020 en lien avec le calcul de rendement de l'immeuble de C______ ont toujours figuré, été listées à l'inventaire de la procédure sous "pièces de forme" et toujours été consultables, sur demande, au greffe des pièces à conviction, ce dont les conseils de l'appelant ont été expressément informés, il ne peut être considéré qu'un dossier parallèle secret soustrayant certaines pièces de la consultation a été constitué. L'appelant, qui avait parfaitement connaissance de la mesure de perquisition effectuée auprès de la régie, et de laquelle ont résulté ces pièces, avait tout loisir d'en requérir la consultation, ce qu'il n'a jamais fait. Il ne peut dès lors de bonne foi se plaindre de n'avoir jamais eu connaissance de l'existence de ces éléments.

Le TCO a ensuite communiqué à l'appelant les pièces qu'il a décidé d'extraire physiquement du greffe des pièces à conviction, afin que l'intéressé puisse en prendre connaissance avant les débats et se déterminer, si bien que là encore aucune violation de son droit d'être entendu ne peut être retenue, l'appelant ayant sur cette base pu valablement exercer sa défense.

La CPAR a en outre offert la possibilité à l'appelant de consulter l'ensemble des pièces jusque-là situées physiquement au greffe des pièces à conviction, en son siège, ce que l'intéressé a fait. Il n'a alors nullement invoqué avoir découvert des pièces à décharge qui y auraient été laissées à dessein, soit par le MP, soit par le TCO, dans le cadre de l'infraction de faux dans les titres visée en l'espèce par l'acte d'accusation.

Les droits de la défense ont ainsi toujours été respectés.

1.4.3. Il était par ailleurs loisible au TCO, pour établir les faits qu'il estimait nécessaires et cela en application de l'art. 343 CPP, d'ordonner à la bailleresse la production de pièces, de sorte qu'il ne peut lui être fait le reproche d'avoir versé à la procédure le courrier du 12 mai 2020 de Me BX______, conseil de P______, ainsi que ses annexes, dont l'appelant reconnait au demeurant qu'il a eu connaissance avant la tenue des débats, si bien qu'il a là aussi pu valablement exercer sa défense.

1.4.4. Par voie de corollaire, le grief de l'appelant visant à écarter du dossier les pièces susmentionnées est sans objet, celles-ci ayant pour partie été intégrées au dossier immédiatement après la perquisition de la régie, et pour partie suite à un ordre de dépôt prononcé par le TCO en bonne et due forme. Elles n'ont, partant, nullement été versées au dossier de façon illicite.

1.5. La démarche du TCO qui avait considéré inutile, pour l'examen de la condition subjective de punissabilité du faux dans les titres, la question de savoir si les loyers litigieux étaient ou non abusifs, tout en considérant cette question pertinente sous l'angle de l'éventuelle faute, et qui avait donc rassemblé les documents utiles en vue d'un calcul selon la méthode du rendement, n'apparaît nullement arbitraire. En tout état, la Cour statuera sur une éventuelle peine selon sa propre appréciation des faits et leur qualification juridique. Ce grief sera rejeté.

1.6. Il ressort enfin de la procédure que le TCO a demandé, dès sa saisine, si l'appelant souhaitait une copie du dossier tel que transmis par le MP. Il résulte également de la note interne que le greffe du TCO avait précisément demandé au service compétent de scanner le dossier du MP pour en envoyer une copie aux juges et aux parties. Il apparaît évident que l'absence de transmission de la copie "papier" du dossier constitué par le MP était une omission involontaire et non une intention du TCO d'entraver l'accès au dossier à l'appelant. Celui-ci a, dès le retour de la procédure par le Tribunal fédéral, eu un accès complet au dossier (comprenant celui constitué par le MP et celui du Tribunal pénal, non scanné), soit quatre mois avant l'audience de jugement, puis à chaque fois qu'il a en a fait la demande. Des pièces lui ont par ailleurs été dûment communiquées spontanément par le TCO. La Cour ne décèle dès lors aucune entrave aux droits de la défense. L'appelant ayant en définitive eu un accès complet au dossier en temps utile, ce grief sera également rejeté.

2. 2.1. La garantie du droit d'être entendu impose également à l'autorité de motiver ses décisions, afin que les parties puissent les comprendre et apprécier l'opportunité de les attaquer, et que les autorités de recours soient en mesure d'exercer leur contrôle (ATF 141 III 28 consid. 3.2.4 p. 41 ; 136 I 229 consid. 5.2 p. 236 ; 135 I 265 consid. 4.3 p. 276). Il suffit que l'autorité mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 143 IV 40 consid. 3.4.3 p. 47 et les références ;
142 I 135 consid. 2.1 p. 145 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_246/2017 du 28 décembre 2017 consid. 4.1 ; 6B_726/2017 du 20 octobre 2017 consid. 4.1.1).

L'autorité ne doit pas se prononcer sur tous les moyens des parties, mais peut au contraire se limiter aux questions décisives (ATF 142 II 154 consid. 4.2 p. 157). Ainsi, l'autorité peut se limiter à ne discuter que les moyens pertinents, sans être tenue de répondre à tous les arguments qui lui sont présentés (ATF 139 IV 179 consid. 2.2 p. 183 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_146/2016 du 22 août 2016 consid. 1.1).

Une autorité se rend coupable d'un déni de justice formel prohibé par la garantie d'être entendu si elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à prendre (ATF 138 V 125 consid. 2.1 p. 127 ; ATF 135 I 6 consid. 2.1 p. 9 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_868/2016 du 9 juin 2017 consid. 3.1).

2.2. L'appelant se plaint que les juges de première instance auraient omis de motiver leur décision sur un certain nombre de points soulevés et plaidés par la défense.

Il se plaint en réalité de l'appréciation des faits opérée par cette instance, que la CPAR revoit avec un plein pouvoir d'examen, étant relevé que pour le surplus le jugement attaqué contient une motivation complète permettant à l'appelant de comprendre sur quelles bases la décision du TCO est fondée et de valablement faire valoir ses arguments en appel.

Ce grief sera partant rejeté.

3. 3.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 Cst. et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 ; ATF 127 I 28 consid. 2a).

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3).

Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3).

3.2. Il est établi que les avis de notification du loyer initial litigieux contiennent sous la rubrique "ancien loyer" des montants ne correspondant pas au montant du loyer payé par le précédent locataire et que les contrats de bail comprennent sous la rubrique "ancien locataire" des noms de locataires ne coïncidant pas avec le locataire sortant.

La CPAR tient pour démontré que la régie a établi ces documents selon les instructions et informations erronées fournies sciemment par l'appelant et cela dans les 10 cas mentionnés par l'accusation.

3.2.1. Les faits reposent d'abord sur les aveux initiaux de A______, à deux reprises, devant le MP, puis devant le TMC. Lors de la première audience devant le MP, A______ a, sous "déclaration libre", admis avoir complété les documents litigieux avec des noms de locataires fictifs et indiqué un montant de loyer qui n'était pas celui du locataire sortant. Il a précisé de lui-même avoir agi ainsi à chaque fois que des travaux avaient été réalisés dans l'immeuble de sa sœur, étant relevé que sa mise en prévention initiale se limitait aux années 2015 à 2018. Il a expliqué qu'il y avait eu un problème similaire dans l'immeuble sis 2______ à D______, élément que n'avait nullement évoqué le MP.

L'appelant n'est donc pas crédible en revenant sur ses déclarations et en prétendant avoir uniquement dit des choses que le procureur souhaitait entendre, puisqu'il a spontanément fourni des informations que le MP ne connaissait pas encore et que ces éléments ont ensuite été corroborés par l'enquête. L'appelant ne saurait non plus être suivi lorsqu'il indique en appel avoir, lors de ses premières auditions, uniquement voulu dire qu'il était conscient de ces problèmes puisqu'il explique parallèlement, et en contradiction, n'en avoir pris connaissance que devant le MP.

Ses explications complémentaires selon lesquelles il avait admis des faits qu'il n'avait pas commis pour éviter la détention ne convainquent pas d'avantage, étant précisé que lors de sa deuxième audition par le MP le 26 juillet 2018, il a confirmé ses précédentes déclarations qui l'incriminaient alors qu'il n'était plus détenu. L'appelant a par ailleurs été sollicité à plusieurs reprises, soit par la police, soit par le MP directement, pour se déterminer sur un certain nombre de pièces au dossier, y compris après sa remise en liberté. Or il a fourni des réponses inconsistantes prétendant ne pas pouvoir apporter plus de détails, ses dossiers ayant été saisis – alors que ceux-ci étaient consultables en tout temps sur demande – ou s'est contenté d'indiquer qu'il n'avait aucun commentaire à faire. Il ne peut dès lors raisonnablement soutenir avoir été empêché de se défendre par-devant le MP. Les mesures de substitution ne l'empêchaient nullement de faire valoir ses droits et un changement de version n'a jamais constitué un motif de détention, ce que l'appelant ne pouvait ignorer, étant lui-même avocat et ayant été assisté de conseils expérimentés durant toute la procédure. Celles-ci ont du reste été levées le 9 novembre 2018. A suivre sa version, il aurait pu livrer son nouveau récit des faits, à tout le moins dès ce moment-là. Ce n'est que lors de l'audience de jugement, soit plus d'un an plus tard, qu'il aurait alors décidé de faire valoir ses droits, ce qui ne résiste pas à l'examen du dossier.

3.2.2. A cela s'ajoutent les échanges d'e-mails figurant au dossier ainsi que les déclarations de la majorité des employés de la régie entendus qui confirment que les instructions en lien avec des noms d'anciens locataires et d'anciens loyers fictifs venaient de A______ personnellement, parfois par le biais de ses secrétaires ou collaborateurs, lesquels n'avaient aucun pouvoir décisionnel, ce que l'appelant a lui-même initialement et spontanément expliqué.

Les explications de l'appelant selon lesquelles des faux noms avaient peut-être été fournis à la régie par ses employés à son insu, lui-même recevant un nombre considérable d'e-mails et ne pouvant pas prendre connaissance de tout, n'emportent nullement conviction. La Cour ne discerne en effet pas quels intérêts auraient pu avoir ces personnes à agir de la sorte. BF______, que l'appelant désigne comme ayant été en charge des questions immobilières, n'avait aucune formation en droit immobilier, était assistante et percevait un salaire de CHF 4'500.- par mois environ, ce qui ne plaide pas en faveur de la grande marge de manœuvre que lui décrit désormais l'appelant. Les échanges d'e-mails au dossier entre les divers collaborateurs de la régie, l'appelant et BF______, permettent par ailleurs de constater que le rôle de celle-ci était uniquement de lui rappeler les informations nécessaires au sujet des appartements concernés alors que c'était toujours lui qui prenait les décisions. Le fait que dans une même chaîne d'e-mails, certains étaient émis par BF______ et d'autres par A______, permet de rejeter l'argument que celle-ci utilisait l'adresse et la signature de l'appelant pour communiquer avec la régie. Il est en effet peu vraisemblable qu'elle ait échafaudé un tel procédé trompeur, écrivant sous son propre nom certains e-mails tout en se faisant passer pour l'appelant pour d'autres dans une même conversation, cela d'autant plus que la pratique des faux locataires et faux loyers a perduré après son départ de l'Etude, notamment pour les cas n° 24 et 43 de l'immeuble sis 1______ à C______. L'appelant est par ailleurs décrit par l'ensemble des personnes ayant collaboré professionnellement avec lui comme étant une personne méticuleuse qui suivait de près la gestion de ses immeubles, ce qui dément encore sa thèse selon laquelle il ne s'impliquait pas dans les questions immobilières.

3.2.3. En outre, de nombreuses indications manuscrites de noms de locataires, de montants de loyer et de dates, figurent sur les courriels et projets de contrats de bail versés à la procédure et sont ensuite reproduites telles quelles dans les avis de notification du loyer et contrats de bail litigieux. Or ces mentions manuscrites sont d'aspect similaire à l'écriture de l'appelant, telle qu'elle figure sur sa fiche de situation personnelle ainsi que sur la pièce C-602, sur laquelle l'appelant a expressément reconnu son écriture. Ce dernier ne prétend d'ailleurs nullement que ces mentions ne sont pas de sa plume. Il explique toutefois que s'il a effectivement fourni les noms des locataires N______, M______, AU______ et L______, il s'agissait de personnes ayant réellement habité dans les logements concernés. Outre le fait qu'elles divergent de ses précédentes déclarations selon lesquelles ce n'était pas lui qui communiquait le nom de locataires à la régie mais des membres de son Etude, ces explications sont dénuées de toute crédibilité. Il ressort en effet du dossier qu'après chaque résiliation, les appartements concernés étaient en travaux, si bien qu'il est peu probable que ces personnes aient alors pu y habiter. En tout état, celles-ci ne peuvent nullement être considérées comme des locataires, l'appelant ne plaidant aucunement qu'elles auraient payé un quelconque loyer et l'état des charges confirmant que tel n'a pas été le cas. Celui-ci ne pouvait du reste que savoir que les informations qui lui étaient requises par la régie pour compléter la rubrique "ancien locataire" et "loyer par le précédent locataire depuis le" des nouveaux contrats de bail et formules officielles de notification du loyer, n'étaient pas des noms des connaissances ayant peut-être logé gratuitement dans les appartements en question ni des dates prises au hasard, ainsi que l'indique l'appelant s'agissant de la pièce C-602 par exemple. Ces explications ne revêtent strictement aucune crédibilité.

La Cour a ainsi acquis la conviction que l'appelant tente, par tous les moyens et avec des versions contradictoires, de se disculper des faits, attitude très contrastante avec celle qui avait été la sienne au début de l'instruction.

Il est ainsi manifeste que l'appelant a bien fourni à la régie des informations fictives s'agissant du nom de l'ancien locataire et du montant du nouveau loyer à faire figurer comme "ancien loyer", la question de savoir si ces personnes ont véritablement logé à titre gracieux dans les appartements concernés n'étant pas pertinente.

3.2.4. Il sera retenu que le cas AR______/AS______ en lien avec l'immeuble sis 2______ à D______, ne diffère pas des autres, même si les documents signés ne figurent pas au dossier. C'est en effet l'appelant lui-même qui a initialement informé la justice de ce qu'il avait également agi de la sorte à une reprise en lien avec cet immeuble. Un accord portant sur le remboursement de CHF 6'670.- a au demeurant été trouvé entre A______ et lesdites locataires, l'indemnisation convenue correspondant à la différence entre le loyer fixé et payé par les locataires lésées et le véritable loyer effectivement payé par le véritable précédent locataire, pour la durée du bail.

3.3. Enfin, la Cour retient que le but de la manœuvre était de rentabiliser les immeubles en cause en masquant les hausses conséquentes de loyers d'une part, et d'éviter des contestations de loyer initial, d'autre part, comme cela ressort des témoignages concordants des employés de la régie et, dans une certaine mesure, des déclarations initiales de l'appelant. Celui-ci a en effet expliqué, avant de varier dans sa position, que les hausses de loyer se justifiaient par le fait qu'il "fallait faire entrer de l'argent" et rentabiliser les immeubles après travaux. L'appelant, qui a indiqué être propriétaire de l'immeuble sis 2______ à D______ à travers la société Q______ SA, et représentant sa sœur s'agissant de l'immeuble sis 1______ à C______, avait donc bien un intérêt dans le procédé mis en œuvre.

Les échanges d'e-mails au dossier démontrent en outre que c'était l'appelant qui insistait pour imposer des loyers qualifiés parfois d'"abusifs" par la régie, ce dont il n'avait cure, répondant notamment "depuis quand les locataires décident du loyer", "je ne vois pas pourquoi on leur accorderait un avantage" ou encore "à vous le grand art". Les différents employés de la régie ont par ailleurs tous expliqué que la pratique litigieuse avait été exigée par l'appelant et que B______ n'avait eu d'autres choix que d'accepter les demandes de ce dernier en raison de la pression qu'il subissait au sein de la régie pour conserver ses mandats. Ils ont tous décrit l'appelant comme un propriétaire particulièrement interventionniste, qui avait notamment fourni ses propres modèles de contrat de bail et qui apportait très régulièrement des modifications aux projets qui lui étaient soumis. Seule K______ a déclaré que, selon elle, c'était B______ qui avait été à l'origine de la pratique litigieuse, étant précisé qu'elle était à l'époque en conflit avec la régie et en particulier avec B______, ce qui rend son témoignage sujet à caution. Le fait que ce modus operandi ait éventuellement été mis en œuvre pour d'autres immeubles de la régie ne change rien aux constatations qui précèdent et est sans pertinence par rapport aux faits retenus dans l'acte d'accusation.

4. 4.1. L'art. 251 CP punit celui qui, dans le dessein de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou aux droits d'autrui, ou de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite, aura créé un titre faux, falsifié un titre, abusé de la signature ou de la marque à la main réelles d'autrui pour fabriquer un titre supposé, ou constaté ou fait constater faussement, dans un titre, un fait ayant une portée juridique, ou aura, pour tromper autrui, fait usage d'un tel titre (al. 1).

Sont des titres tous les écrits destinés et propres à prouver un fait ayant une portée juridique (art. 110 al. 4 CP).

L'art. 251 CP vise tant le faux matériel, qui consiste dans la fabrication d'un titre faux ou la falsification d'un titre, que le faux intellectuel, qui consiste dans la constatation d'un fait inexact, en ce sens que la déclaration contenue dans le titre ne correspond pas à la réalité (arrêt du Tribunal fédéral 6B_589/2009 du 14 septembre 2009 consid. 2.1).

Le faux intellectuel vise l'établissement d'un titre qui émane de son auteur apparent, mais qui est mensonger dans la mesure où son contenu ne correspond pas à la réalité (ATF 126 IV 65 consid. 2a). Il est admis qu'un simple mensonge écrit ne constitue pas un faux intellectuel punissable. La confiance que l'on peut avoir à ne pas être trompé sur la personne de l'auteur est plus grande que celle que l'on peut avoir à ce que l'auteur ne mente pas par écrit.

Pour cette raison, même si l'on se trouve en présence d'un titre, il est nécessaire, pour que le mensonge soit punissable comme faux intellectuel, que le document ait une valeur probante plus grande que dans l'hypothèse d'un faux matériel. Sa crédibilité doit être accrue et son destinataire doit pouvoir s'y fier raisonnablement. Une simple allégation, par nature sujette à vérification ou discussion, ne suffit pas. Il doit résulter des circonstances concrètes ou de la loi que le document est digne de confiance, de telle sorte qu'une vérification par le destinataire n'est pas nécessaire et ne saurait être exigée. Tel est le cas lorsque certaines assurances objectives garantissent aux tiers la véracité de la déclaration. Il peut s'agir, par exemple, d'un devoir de vérification qui incombe à l'auteur du document ou encore de l'existence de dispositions légales comme les art. 662a ss CO ou 958ss CO, qui définissent le contenu du document en question (ATF 132 IV 12 consid. 8.1 ; 129 IV 130 consid. 2.1).

4.1.1. Il a ainsi été déduit du fait que les art. 957 et 963 CO définissent le contenu des documents de comptabilité commerciale que ceux-ci étaient aptes à prouver l'exactitude de la situation et des opérations qu'ils présentent (ATF 132 IV 15 consid. 8.1 ; 129 IV 138 consid. 2.2). Les tiers qui entrent en rapport avec une entreprise ne sont pas en mesure d'en établir eux-mêmes la situation réelle ; la comptabilité commerciale a précisément pour but de leur fournir des informations auxquelles ils doivent logiquement pouvoir se fier (SJ 1997 p. 584 ; ATF 125 IV 22 consid. 2). La loi fédérale sur le blanchiment d'argent contraint également le cocontractant d'un intermédiaire financier à une déclaration écrite, qui doit permettre à ce dernier de se faire une juste idée sur l'ayant droit économique. Une déclaration de ce type instaurée par la loi doit être qualifiée de titre, à l'instar d'une comptabilité commerciale régie par la loi et dont la fonction est aussi de procurer une information à laquelle on doit pouvoir se fier (arrêts du Tribunal fédéral 6S_293/2005 du 24 février 2006, publié in SJ 2006 I p. 309 ; 6S_346/1999 du 30 novembre 1999, in SJ 2000 I p. 234). Le grossiste qui importe de la viande d'antilope africaine qu'il désigne comme viande de chasse commet un faux intellectuel, la loi imposant au grossiste de donner des indications exactes, notamment pour empêcher la tromperie dans la commercialisation des denrées alimentaires (art. 54 de la loi fédérale sur les denrées alimentaires). Une référence expresse aux dispositions pénales, comme celle que l'on trouve à l'art. 964 CO, n'est pas nécessaire pour retenir le faux dans les titres. L'obligation même du grossiste de donner des informations correctes lui confère une position de garant pour protéger le consommateur (ATF 119 IV 296 consid. 4). Le faux intellectuel a également été admis dans le cas du gérant de fortune qui indique faussement la position du compte au client se trouvant alors dans une position analogue à celle d'un garant, dès lors que le client n'a pas connaissance des opérations de gestion et n'est pas à même de vérifier l'état de son compte (ATF
120 IV 364 consid. c).

4.1.2. Le caractère de faux intellectuel dans les titres d'un écrit est relatif. Par certains aspects, il peut avoir ce caractère, par d'autres non (ATF 138 IV 130 consid. 2.2.1 ; 132 IV 57 consid. 5.1).

Ainsi, de fausses factures ne constituent des faux intellectuels que dans des circonstances spéciales, attendu qu'elles ne contiennent en règle générale que de simples allégations de l'auteur concernant la prestation due par le destinataire. Elles seront en revanche considérées comme tels si elles sont destinées à la comptabilité commerciale ou encore si elles sont défavorables au déclarant, ce qui leur confère un pouvoir de persuasion accru (ATF 96 IV 153 consid. 2a ; ATF 138 IV 130 consid. 2.2.1 et 2.4.2 ; 115 IV 225 consid. 2c). Tel est également le cas de factures d'entrepreneurs mensongères visées par un architecte pour approbation après les avoir contrôlées (ATF 119 IV 58 consid. 2d). Sans discuter, le Tribunal fédéral a également retenu la qualité de faux intellectuel à un décompte de travaux mensonger qu'un propriétaire avait établi, fait signer par un peintre puis utilisé dans le cadre du litige qui l'opposait à un ancien locataire, comme preuve du montant des coûts de rénovation dont il exigeait le paiement alors que les travaux n'avaient en réalité jamais eu lieu (ATF 106 IV 375 consid. 1). Une telle qualification n'a en revanche pas été reconnue pour une fausse facture qu'un assuré avait fait établir par son garagiste à l'attention de son assurance (ATF 117 IV 39 consid. 2).

Un simple affidavit produit en justice, dont il ne ressort pas du document que son contenu a été vérifié et dont il résulte uniquement de la loi que sa crédibilité est à apprécier par l'autorité (ATF 144 IV 13 consid 2.2.2-2.2.4), ou un bulletin d'hôtel, pourtant destiné à être produit au contrôle des étrangers, ne prouvent pas la véracité de leur contenu ; cependant, une falsification d'un tel bulletin est concevable s'il est modifié pour faire croire à la présence d'une personne à une date déterminée (ATF
73 IV 50 consid. 2).

Certains formulaires (lettre de voiture, déclaration en douane, certificat phytosanitaire, déclaration sur le nombre d'abattages par un boucher), bien qu'exigés de par la législation topique et destinés aux autorités, ne comprennent, par nature, que des affirmations de partie et ne sont pas destinés ou aptes à convaincre l'administration de la véracité des faits allégués. Même si lesdits formulaires précisent que les informations données doivent être exactes, il ne résulte rien d'autre de la loi que l'auteur est responsable de l'exactitude et de l'exhaustivité de ses déclarations (ATF 96 IV 150 consid 2b à d ; 103 IV 28 consid. 2). En revanche, les formules officielles de résiliation de bail doivent être considérées comme revêtant une crédibilité accrue dès lors qu'elles sont agréées par l'autorité. De plus, le locataire peut partir du principe que le contenu de la formule officielle de résiliation de bail est véridique. Elles sont ainsi propres à prouver un fait ayant une portée juridique, soit en l'occurrence la résiliation du bail pour une certaine date (arrêt de la Cour pénale d'appel du canton de Fribourg 501 2017 94 consid. 5.2).

Les mentions que doit contenir le billet à ordre, même prévues par la loi (art. 1096 CO), n'ont aucune portée sur l'intention de l'émetteur de s'acquitter de la dette indiquée à la date donnée. Une condamnation pour faux dans les titres est dès lors exclue à cet égard. Cette situation est à distinguer du cas où la fausseté porte sur l'engagement lui-même (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1229/2014 du 7 avril 2016 consid. 2.6). Elle diffère également du cas de l'émission et du dépôt d'un chèque sans provision, qui est interdit par l'art. 1103 CO. Si l'émetteur sait qu'il n'y a pas de couverture, le destinataire du chèque est trompé s'il accepte le chèque en se fiant à l'exigence de couverture selon cette disposition (arrêt du Tribunal fédéral 6B_291/2012 du 16 juillet 2013 consid. 4.4).

Même si les contrats n'offrent en principe pas des garanties spéciales de véracité (à l'instar d'un contrat de vente d'un snack-bar [ATF 146 IV 258 consid. 1.2.3]), ceux qui mentionnent que l'acquéreur du véhicule est la police cantonale et portent la signature du commandant de cette dernière, sont de nature à fonder une confiance particulière dans la véracité de leur contenu, notamment quant au fait que les véhicules étaient effectivement achetés par la police, et propre à convaincre qu'une vérification n'est pas nécessaire. Ils ont ainsi une capacité accrue de convaincre sur un fait ayant une portée juridique, résultant de la personne des cocontractants (arrêt du Tribunal fédéral 6B_502/2009 du 7 septembre 2009, consid. 2.3).

Ainsi, ce n'est que s'il existe des garanties spéciales de ce que les déclarations concordantes des parties correspondent à leur volonté réelle, qu'un contrat en la forme écrite simple peut être qualifié de faux intellectuel dans les titres (ATF
123 IV 61 consid. 5c/cc ; 120 IV 25 consid. 3f ; cf. aussi arrêts du Tribunal fédéral 6S_114/2004 du 15 juillet 2004 consid. 3.2 ; 6S_375/2000 du 1er novembre 2000 consid. 2b et 2c ; 6S_244/1995 consid. 3b et les arrêts cités).

4.1.3. Sur le plan subjectif, le faux dans les titres est une infraction intentionnelle. L'intention doit porter sur tous les éléments constitutifs ; le dol éventuel suffit. L'art. 251 CP exige de surcroît un dessein spécial, qui peut se présenter sous deux formes alternatives, soit le dessein de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou aux droits d'autrui ou le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite. L'avantage est une notion très large ; il suffit que l'auteur veuille améliorer sa situation. Son illicéité peut résulter de la loi, du but poursuivi ou du moyen utilisé ; elle peut donc être déduite du seul fait que l'auteur recourt à un faux (ATF
133 IV 303 consid. 4.4 non publié et les références citées).

L'atteinte aux intérêts et droits d'autrui vise un projet de lésion du patrimoine, à savoir une augmentation du passif, une diminution de l'actif, une non-augmentation de l'actif ou une non-diminution du passif (ATF 119 IV 22 consid. c) ou des droits d'autrui, notamment des droits de la personnalité dans un contexte économique (ATF 83 IV 79 consid. 3b), mais aussi tous les autres droits subjectifs, voire toute volonté de nuire touchant même des chances de succès ou des valeurs immatérielles comme l'amour ou l'amitié (B. CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol. II, 3ème éd., Berne 2010, n. 177-178 ad art. 251 CP et les références citées).

En ce qui concerne le dessein d'obtenir un avantage illicite (pour soi-même ou un tiers), l'avantage en question peut être patrimonial ou d'une autre nature, il suffit que l'auteur veuille améliorer sa situation personnelle ou celle d'un tiers, qu'il veuille qu'un tiers obtienne un avantage illicite (ATF 81 IV 238 consid. 1c).

Lorsque l'auteur agit pour favoriser un tiers, il n'est pas nécessaire qu'il sache en quoi consiste exactement l'avantage que ce dernier compte en retirer (CORBOZ, op. cit., n. 180 ad art. 251 CP et les références citées ; A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ [éds], Commentaire romand, Code pénal II, vol. II, Partie spéciale : art. 111-392 CP, Bâle 2017, n. 127 ad art. 251 CP).

Sont constitutifs d'un avantage le maintien d'une relation de clientèle, ne serait-ce que parce que la perte d'un client entraîne une baisse de chiffre d'affaires (ATF
115 IV 51 consid. 7), l'exercice plus difficile d'une action en garantie des défauts contre soi (arrêt du Tribunal fédéral 6B_243/2014 du 15 juillet 2014 consid. 4.4), l'avantage obtenu en matière de preuve au moyen d'un titre dont le contenu est inexact, même si le faux document doit permettre de faire triompher une prétention légitime (ATF 106 IV 375 consid. 2). Ainsi, celui qui veut obtenir une prétention légitime ou éviter un inconvénient injustifié au moyen d'un titre faux est également punissable (ATF 106 IV 375 ; 128 IV 265, JdT 2004 IV 132, consid. 2.2 ; 121 IV 90, JdT 1997 IV 63, consid. 2 ; M. DUPUIS et al., Code pénal - Petit commentaire, 2ème éd., Bâle 2017, n. 55 ad art. 251 CP).

En ce qui concerne le dessein d'obtenir un avantage illicite (pour soi-même ou un tiers), l'avantage en question peut être patrimonial ou d'une autre nature, il suffit que l'auteur veuille améliorer sa situation personnelle ou celle d'un tiers. Celui qui se rend coupable d'un faux dans les titres ne recherche pas forcément un avantage patrimonial direct ; ce qu'il désire, c'est bénéficier – sans droit – de la force probante accrue reconnue à un tel document et qui est précisément le bien que l'on veut protéger. Cela suffit donc pour que l'on doive admettre qu'il a agi dans le dessein de se procurer un avantage illicite (ATF 119 III 234 consid. 2c).

4.1.4. Selon l'art. 270 al. 1 CO, lorsque le locataire estime que le montant du loyer initial est abusif au sens des art. 269 et 269a, il peut le contester notamment si le bailleur a sensiblement augmenté le loyer initial pour la même chose par rapport au précédent loyer.

L'art. 270 al 2 CO précise qu'en cas de pénurie de logements, les cantons peuvent rendre obligatoire, sur tout ou partie de leur territoire, l'usage de la formule officielle mentionnée à l'art. 269d pour la conclusion de tout nouveau bail.

La formule officielle, en application des art. 269d CO et 19 al. 3 OBLF, doit être agréée par le canton et notamment contenir le montant de l'ancien loyer et état des charges, le montant du nouveau loyer et état des charges, la date d'entrée en vigueur et la hausse, les motifs précis de la hausse, les conditions légales dans lesquelles le locataire peut contester le bien-fondé de la prétention ainsi que la liste des autorités de conciliation existantes dans le canton et leurs compétences à raison du lieu.

4.1.5. L'usage de la formule officielle lors de la conclusion d'un nouveau contrat de bail d'habitation a été rendu obligatoire par le canton de Vaud sur son territoire, en application de l'art. 270 al. 2 CO (art. 1 et 3 de loi vaudoise sur l'utilisation d'une formule officielle au changement de locataire [LFOCL] ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_491/2012 du 6 décembre 2012 consid. 3.1.1).

L'art. 2 LFOCL précise que la formule officielle est agréée par le canton de Vaud et qu'elle doit contenir le montant du loyer et frais accessoires dus par le précédent locataire, ainsi que la date de leur entrée en vigueur, le montant du nouveau loyer et frais accessoires, les motifs précis de la hausse éventuelle, le droit de contestation du locataire au sens de l'art. 270 al. 1 CO, le délai de contestation et l'adresse des commissions de conciliation en matière de baux et loyer.

4.1.6. Cette formule poursuit un objectif de protection du locataire, partie faible au contrat, en cas de pénurie de logement. Elle a ainsi pour but i) de clarifier la situation juridique en informant le locataire de sa possibilité de saisir l'autorité de conciliation afin de contester le montant du loyer en lui fournissant toutes les indications utiles et à titre préventif ii) de dissuader le bailleur d'augmenter de façon abusive les loyers lors d'un changement de locataire (ATF 120 II 341 consid. 3 ; 140 III 583 consid. 3.1 ; ATF 137 III 547 consid. 2.3).

En matière de bail, contrairement au principe général "nul n'est censé ignorer la loi", le législateur présume l'ignorance du locataire (ATF 113 II 187 consid. 1a). Le locataire entrant n'ayant pas connaissance du loyer payé par son prédécesseur et la possibilité d'exiger du bailleur que ce dernier communique l'ancien loyer au locataire (art. 256a al. 2 CO) n'ayant pas été jugée suffisante pour le protéger contre une augmentation de loyer (BO CN 989 p. 530), le bailleur doit fournir au locataire toutes les informations utiles listées à l'art. 19 OBLF (ATF 137 III 547 consid. 2.3).

L'usage de la formule officielle à la conclusion du bail devrait, selon certains auteurs, être généralisée à toute la Suisse, y compris aux cantons ne connaissant pas la pénurie, pour éviter certains contournements, notamment le propriétaire qui laisse l'appartement vacant pendant quelques mois et prétend ensuite qu'il ne peut pas déclarer le loyer du locataire précédent parce que l'appartement n'était pas loué ou celui qui loue le bien à un homme de paille, par exemple son propre employé, pour une certaine période, à un loyer fictif plus élevé, avant que le bien ne soit loué à un tiers. De plus, un propriétaire qui déclare délibérément un loyer fictif en guise de loyer précédent peut être poursuivi pour faux dans les titres ou escroquerie. Lorsque le bailleur falsifie intentionnellement le contrat du précédent locataire, il commet un faux dans les titres (D. LACHAT, K. GROBET THORENS, X. RUBLI et P. STASNI, Le bail à loyer, réédition revue et complétée, 2019, p. 252).

4.1.7. L'art. 269d al. 2 CO, applicable par renvoi de l'art. 270 al. 2 CO, prévoit expressément la nullité de la majoration du loyer lorsque celle-ci n'a pas été notifiée au moyen de la formule officielle (let. a) ou que les motifs n'y sont pas indiqués (let. b). Ainsi, lorsque la formule officielle n'a pas été employée par le bailleur alors qu'elle était obligatoire ou que la hausse de loyer par rapport à celui payé par le précédent locataire n'y a pas été motivée, le Tribunal fédéral a retenu, selon une interprétation téléologique fouillée de l'art. 270 al. 2 CO, la nullité partielle du contrat, limitée au loyer, au sens de l'art. 20 al. 2 CO (ATF 120 II 206, SJ 1994, p. 237 ; 120 II 341 consid. 5d ; 140 III 583 consid. 3.2).

La jurisprudence se montre rigoureuse s'agissant des mentions portées sur les formules officielles. Ainsi une hausse de loyer signifiée est nulle lorsque les motifs de majoration, non mentionnés dans la formule officielle, sont indiqués uniquement dans une annexe ou dans une lettre d'accompagnement, ou lorsqu'ils ne sont, selon le principe de la confiance, pas suffisamment précis pour que le destinataire en comprenne toute la portée. Il en va de même d'une clause d'échelonnement du loyer pas suffisamment explicitée dans l'avis de notification du loyer (ATF 120 II 208 consid. 3b ; 118 II 132 consid. 2 ; 106 II 360 consid. 3c à d). Dans le même sens, le Tribunal fédéral a jugé que lorsque les facteurs invoqués par le bailleur pour motiver la hausse de loyer lors de la conclusion d'un nouveau bail sont antinomiques, la sanction liée au vice de forme dans la notification du loyer est la nullité partielle du contrat de bail quant au loyer convenu (ATF 124 III 62 consid. 2a ; 120 II 341 consid. 5 ; 124 III 62 consid. 2a ; 137 II 547 ; arrêts du Tribunal fédéral 4A_276/2011 du 11 octobre 2011 consid. 4.4 et 4A_168/2014 du 30 octobre 2014 consid. 3.2.1).

La jurisprudence retient également que, dans un avis de ce genre, l'indication des motifs d'une éventuelle hausse tout comme l'indication du loyer antérieur, sont essentielles pour permettre au nouveau locataire de se déterminer en toute connaissance de cause et de choisir entre contester le loyer convenu ou, au contraire, s'en accommoder (arrêt du Tribunal fédéral 4A_517/2014 du 2 février 2015 consid. 4.1.1). Il ne suffit pas que le locataire ait eu vent du loyer versé par l'ancien locataire par une autre voie, par exemple à la suite d'une information délivrée par ce dernier (arrêt du Tribunal fédéral 4A_168/2014 du 30 octobre 2014 consid. 3.1 et 3.2 et les arrêts cités). Ainsi, l'absence de l'indication du loyer antérieur dans l'avis de fixation du loyer initial constitue un vice dirimant de la communication qui fait l'objet de l'art. 270 al. 2 CO (arrêt du Tribunal fédéral 4A_214/2007 du 12 novembre 2007 consid. 3).

4.2.1. En l'espèce, tel que l'a retenu le TCO, il y a tout d'abord lieu de relever que les contrats de bail et les avis de fixation du loyer initial sont des titres dans la mesure où ils sont destinés et propres à prouver un fait ayant une portée juridique. Le contrat de bail est propre à prouver la relation juridique existant entre bailleur et locataire et les conditions de la location. Le contrat et l'avis de fixation prouvent d'autre faits (le dernier locataire, le dernier loyer payé et la hausse de loyer intervenue) ayant une portée juridique (la possibilité pour le locataire de contester son loyer initial).

L'auteur réel des titres litigieux mensongers correspond bien à son auteur apparent (la bailleresse et son représentant, soit la régie), de sorte que l'infraction s'analyse sous l'angle du faux intellectuel. Pour déterminer si leur contenu mensonger tombe sous le coup de l'art. 251 CP, il faut ainsi déterminer si, compte tenu de la législation applicable et du contexte de la conclusion d'un nouveau contrat de bail, leur qualité leur confère une crédibilité accrue auquel le nouveau locataire doit pouvoir se fier raisonnablement.

L'avis de fixation du loyer initial n'est pas un document quelconque. Il découle de l'art. 270 CO et son contenu est défini à l'art. 19 OBLF. Ainsi, en cas de pénurie de logement, lors de la conclusion d'un nouveau bail, le bailleur a l'obligation légale de fournir au locataire un certain nombre d'informations écrites, lesquelles doivent non seulement être transmises au moyen d'une formule officielle agréée par le canton, mais également respecter le contenu imposé par la loi. Il constitue une pièce essentielle, non seulement pour la connaissance précise par le locataire de son droit de contester une éventuelle hausse de loyer ou au contraire de s'en accommoder, mais également pour permettre aux juridictions des baux et loyers d'analyser le bien-fondé ou non d'une contestation du loyer initial. En outre, cet avis indique à la partie faible du contrat – le locataire – la voie de droit à suivre en cas de contestation. Ainsi, cette formule officielle permet au locataire de faire son analyse de la situation, d'être informé de sa possibilité de saisir la justice et enfin d'éviter les hausses abusives de loyer. Elle a ainsi manifestement pour finalité que le propriétaire garantisse l'exactitude des informations données au locataire. Sauf exception, le locataire n'a en effet, en pratique, aucun moyen de contrôler l'exactitude des informations figurant sur l'avis. Au contraire, en réalité, il ne peut que se fonder sur les mentions y figurant et est d'autant plus légitimé à le faire qu'elles sont inscrites sur un document à caractère officiel qui mentionne des dispositions légales ainsi que la voie de droit à suivre pour saisir la justice. En outre, le contexte de la signature d'un nouveau contrat de bail – ce d'autant plus en période de pénurie de logements – est particulier. En effet, les locataires se trouvent presque toujours dans un environnement ultra compétitif dans lequel il faut décider très rapidement de conclure ou non ledit contrat, lequel porte sur un élément essentiel de leur vie. On ne saurait donc leur imposer d'avoir à vérifier l'exactitude des éléments figurant sur l'avis. A l'instar de la désignation de l'origine de la viande par le grossiste, qui vise la protection des consommateurs, l'avis de fixation du loyer initial a ainsi notamment pour but la protection des locataires.

En définitive, il résulte des caractéristiques de l'avis de fixation du loyer initial et des circonstances liées à sa remise, que ce document donne au locataire des assurances objectives quant à la véracité des informations qu'il mentionne. Il s'agit donc d'un document digne de confiance, de telle sorte qu'une vérification de son contenu par le locataire n'est pas nécessaire et ne saurait être exigée de ce dernier. Il est ainsi manifeste que l'avis de fixation du loyer initial revêt une force probante accrue à laquelle le locataire doit pouvoir raisonnablement se fier. Le fait que le Tribunal fédéral a jugé que la fixation du loyer était nulle lorsque le seul vice qui affecte l'avis est que les motifs justifiant la hausse de loyer sont contradictoires, quand bien même le montant du dernier loyer et le nom du dernier locataire sont véridiques, illustre que cette formule a bien une valeur probante accrue. Partant, lorsqu'elle contient sciemment de fausses informations, elle doit être qualifiée de faux intellectuel.

Cette formule diffère ainsi du simple affidavit, adressé à l'autorité, dont il ne résulte rien d'autre du document lui-même ou de la loi que le fait qu'il comprend des déclarations de parties vérifiables par l'autorité en question. Elles se distinguent également d'autres formulaires destinés aux autorités, telle une déclaration en douane, même si son contenu est défini par la loi. Celui-ci est en effet sujet à vérification par la destinataire du document en cause, soit en l'occurrence l'autorité douanière, et l'inexactitude des informations données n'entraîne des conséquences que pour son auteur.

L'appelant erre en faisant fi des circonstances concrètes et en se contentant d'affirmer de manière toute générale, que le bailleur n'a aucune obligation particulière envers le locataire. De même, l'argumentation de l'appelant en lien avec le billet à ordre n'appelle pas une autre conclusion dans la mesure où la qualification de faux intellectuels de formules officielles de notification du loyer initial mensongères ne repose pas, comme le sous-entend l'appelant, uniquement sur le fait que la loi en définit en principe le contenu, mais bien sur le fait qu'elles sont censées offrir, de par la loi, et de par le contexte de leur remise, des garanties spéciales de véracité à leur destinataire, soit le locataire.

S'agissant du contrat de bail, il y lieu de retenir qu'il suit le même sort que l'avis de fixation du loyer initial. En effet, comme cet avis fait partie intégrante du contrat de bail, sa force probante accrue rejaillit sur ce dernier avec pour corollaire que le faux intellectuel de l'avis de fixation du loyer initial vient contaminer le contrat de bail qui en partage donc le qualificatif. Cette analyse rejoint la jurisprudence du Tribunal fédéral évoquée ci-dessus, selon laquelle ce n'est que s'il existe des garanties spéciales – soit en l'espèce les éléments figurant sur la formule officielle – de ce que les déclarations concordantes des parties correspondent à leur volonté réelle, qu'un contrat en la forme écrite simple peut être qualifié de faux intellectuel dans les titres. Le mensonge relatif au nom de l'ancien locataire vient quant à lui s'ajouter à ceux figurant dans l'avis de fixation du loyer initial, étant précisé que cette information apparaît comme étant un élément également utile pour assurer la protection des locataires, même si elle n'est pas expressément listée à l'art. 19 OBLF ni dans la législation vaudoise.

Au vu de ce qui précède, il importe peu, s'agissant des cas AV______/AW______ et AZ______/BA______ que la mention de "loyer inchangé" ne fût pas précisée.

4.2.2. Sur le plan subjectif et quant au dessin spécial, la CPAR considère que l'appelant a agi intentionnellement et ce afin d'éviter des procédures en contestation du loyer initial et donc avec, d'une part, le dessein de porter atteinte aux droits des locataires de contester leur loyer initial et, d'autre part, de procurer à sa sœur et à Q______ SA – et à lui-même in fine – un avantage illicite, soit précisément d'éviter des procédures en contestation du loyer initial. De plus, il a agi, afin d'augmenter le rendement des immeubles grâce à des loyers plus élevés obtenus par le biais de faux intellectuels, soit de manière illicite. Il a ainsi agi également afin de procurer à sa sœur et à Q______ SA – soit à lui-même in fine – un autre avantage illicite. Il est manifeste qu'il a, dans chaque cas, eu l'intention de tromper le locataire.

La CPAR n'a pas à déterminer, directement ou par le biais d'un expert, en fonction de telle ou telle méthode de calcul, si les loyers étaient effectivement abusifs ou non. Cela n'enlèverait rien à l'avantage procuré de tromper le nouveau locataire pour éviter la contestation de loyer. En effet, le fait pour l'intéressé d'avoir intentionnellement profité de la force probante accrue des documents mensongers litigieux remis aux locataires pour parvenir à ses fins réunit tous les éléments de l'infraction qui lui est reprochée. L'augmentation considérable des loyers était en toute hypothèse injustifiée car obtenue en trompant sciemment les locataires par le truchement de documents contenant de fausses informations.

4.3. Le verdict de culpabilité de l'infraction de faux dans les titres sera confirmé.

5. 5.1.1. L'infraction de faux dans les titres est sanctionnée par une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

5.1.2. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1). L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).

5.1.3. L'art. 48 let. d CP prévoit que le juge atténue la peine si l'auteur a manifesté par des actes un repentir sincère. Cette circonstance n'est réalisée que si l'auteur a adopté un comportement particulier, désintéressé et méritoire, qui constitue la preuve concrète d'un repentir sincère. L'auteur doit avoir agi de son propre mouvement dans un esprit de repentir, dont il doit avoir fait la preuve en tentant, au prix de sacrifices, de réparer le tort qu'il a causé (ATF 107 IV 98 consid. 1 et les références citées). Le seul fait qu'un délinquant ait passé des aveux ou manifesté des remords ne suffit pas ; il n'est en effet pas rare que, confronté à des moyens de preuve ou constatant qu'il ne pourra échapper à une sanction, un accusé choisisse de dire la vérité ou d'exprimer des regrets ; un tel comportement n'est pas particulièrement méritoire (ATF
117 IV 112 consid. 1 ; 116 IV 288 consid. 2a). De même, la seule réparation du dommage ne témoigne pas nécessairement d'un repentir sincère ; un geste isolé ou dicté par l'approche du procès pénal ne suffit pas ; l'effort particulier exigé implique qu'il soit fourni librement et durablement (ATF 107 IV 98 consid. 1). Celui qui ne consent à faire un effort particulier que sous la menace de la sanction à venir ne manifeste pas un repentir sincère, il s'inspire de considérations tactiques et ne mérite donc pas d'indulgence particulière (arrêt du Tribunal fédéral 1054/2019 du 27 janvier 2020 consid. 1.1).

5.1.4. D'après l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion.

Pour satisfaire à cette règle, le juge, dans un premier temps, fixera la peine pour l'infraction la plus grave, en tenant compte de tous les éléments pertinents, parmi lesquels les circonstances aggravantes ou atténuantes. Dans un second temps, il doit augmenter la peine de base pour tenir compte des autres infractions en application du principe de l'aggravation (ATF 144 IV 217 consid. 3.5 ; 127 IV 101 consid. 2b p. 104 ; 116 IV 300 consid. 2c/dd p. 305 ; 93 IV 7 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1216/2017 du 11 juin 2018 consid. 1.1.1), en tenant là aussi compte de toutes les circonstances y relatives (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1175/2017 du 11 avril 2018 consid. 2.1 in medio ; 6B_688/2014 du 22 décembre 2017 consid. 27.2.1). Une peine d'ensemble en application du principe de l'aggravation suppose, à la différence de l'absorption et du cumul des peines, que le tribunal ait fixé (au moins de manière théorique) les peines (hypothétiques) de tous les délits. Le prononcé d'une peine unique dans le sens d'un examen global de tous les délits à juger n'est pas possible (ATF 144 IV 217 consid. 3.5).

5.1.5. Les nouvelles dispositions sur le droit des sanctions sont entrées en vigueur le 1er janvier 2018. En l'espèce, l'application de l'ancien ou du nouveau droit ne conduit pas à une solution différente, de sorte que le nouveau droit ne s'applique pas au titre de "lex mitior".

5.1.6. La durée de la peine privative de liberté est, en principe, de six mois au moins et de 20 ans au plus (art. 40 aCP).

5.1.7. Le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine privative de liberté de six mois au moins et de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits (art. 42 al. 1 aCP).

Le juge doit poser, pour l'octroi du sursis, un pronostic quant au comportement futur de l'auteur. En l'absence de pronostic défavorable, il doit prononcer le sursis. Celui-ci est la règle dont le juge ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable ou hautement incertain (ATF 135 IV 180 consid. 2.1 ; 134 IV 1 consid. 4.2.2).

La question de savoir si le sursis serait de nature à détourner le prévenu de commettre de nouvelles infractions doit être tranchée sur la base d'une appréciation d'ensemble, tenant compte des circonstances de l'infraction, des antécédents de l'auteur, de sa réputation et de sa situation personnelle au moment du jugement, notamment de l'état d'esprit qu'il manifeste. Le pronostic doit être posé sur la base de tous les éléments propres à éclairer l'ensemble du caractère du prévenu et ses chances d'amendement. Il n'est pas admissible d'accorder un poids particulier à certains critères et d'en négliger d'autres qui sont pertinents (ATF 135 IV 180 consid. 2.1 ; 134 IV 140 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1457/2020 du 15 avril 2021 consid. 2.1). Le défaut de prise de conscience de la faute peut justifier un pronostic défavorable, car seul celui qui se repent de son acte mérite la confiance que l'on doit pouvoir accorder au condamné bénéficiant du sursis (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1457/2020 du 15 avril 2021 consid. 2.1).

5.2. En l'espèce, la faute de l'appelant est lourde. Il a trompé des locataires, les privant de leurs droits essentiels, au mépris du principe législatif et constitutionnel de protection de la partie faible, et cela par pur appât du gain, ayant agi dans une logique de rentabilité accrue des immeubles visés par la procédure au moyen de procédés illicites. Il s'est montré totalement indifférent à la situation concrète des locataires qu'il a lésés, dont certains étaient des travailleurs modestes. Il a même affiché, dans ses échanges avec la régie, un profond dédain à l'égard de plusieurs d'entre eux. Son comportement doit être tenu pour d'autant plus répréhensible qu'il exerce la profession d'avocat.

La période pénale est très longue, soit plus de huit ans. La volonté délictuelle était intense, l'intéressé ayant eu à tout moment le moyen de mettre fin à ses agissements, ce qu'il n'a pas fait. Au contraire, il a agi de manière répétée et systématique, à chaque relocation d'appartements, nonobstant les mises en garde de la régie en 2010 déjà et la procédure intentée par BK______ en 2016. Il a malgré cela persisté dans ses agissements, lesquels n'ont pris fin que lorsqu'ils ont été dénoncés à la Commission du Barreau puis au MP, en 2018. Il y a concours d'infractions entre les différentes occurrences de faux dans les titres dont il s'est rendu coupable – facteur d'aggravation de la peine.

Sa situation personnelle, confortable, malgré le litige l'opposant à ses anciens associés, n'explique en rien ni n'excuse son comportement.

Sa collaboration à la procédure a été bonne au début puis particulièrement mauvaise. Actuellement, sa prise de conscience apparaît quasiment nulle. S'il a ainsi initialement admis les faits, il a ensuite nié l'évidence, fourni des explications variables et n'a pas hésité à rejeter la faute sur ses employés pour se soustraire à ses responsabilités.

Son manque de collaboration et son absence de prise de conscience excluent toute réduction de peine au sens de l'art. 48 let. d CP. Par ailleurs, si l'appelant a effectivement versé aux locataires lésés les indemnités convenues d'entente avec eux, il faut relever qu'elles ne correspondent ni plus ni moins qu'à la différence entre le loyer payé par ceux-ci et le véritable loyer payé par les réels derniers locataires, et ont, à teneur du dossier, conduit au retrait de plainte pénale des personnes qui avaient déclaré vouloir participer à la procédure. Il faut en outre souligner que seuls les loyers des locataires encore en place dans les immeubles concernés ont été réduits aux montants du véritable précédent loyer, avec au demeurant des échelons d'augmentation de loyer pour l'avenir. Les montants des loyers payés par les locataires ayant succédé aux personnes lésées ne sont quant à eux pas connus et l'appelant, bien qu'interrogé à ce propos, n'a pas souhaité s'exprimer. Il ne peut dans ces conditions être retenu que ce dernier a, par le paiement des montants convenus avec les locataires lésés et l'abaissement – temporaire – des loyers des seuls locataires encore en place, fourni un effort particulièrement méritoire, dans un esprit de repentir et de réparation durable du tort causé. Au vu de l'ensemble des éléments qui précèdent, il apparaît au contraire que le geste de l'appelant, limité, relevait essentiellement de considérations tactiques. Une atténuation de peine au sens de l'art. 48 let. d CP ne se justifie dès lors aucunement.

L'absence d'antécédents est un facteur neutre sur la fixation de sa peine.

Compte tenu des éléments qui précèdent, la CPAR parvient à la conclusion que la peine pour l'infraction abstraitement la plus grave, soit en l'occurrence le faux dans les titres commis au détriment des locataires AH______/AI______, devrait être sanctionnée par une peine privative de liberté de six mois. Cette peine devrait à tout le moins être aggravée de deux mois (peine hypothétique de quatre mois) pour chacune des neuf autres occurrences de faux dans les titres, ce qui porte la peine à 24 mois.

Les conditions du sursis sont remplies vu l'absence d'antécédent, le pronostic n'étant pas clairement défavorable malgré l'absence de prise de conscience de l'intéressé. Un délai d'épreuve d'une durée de trois ans paraît adéquat.

La peine telle que fixée par les premiers juges n'est ainsi nullement critiquable.

L'appel principal et l'appel joint seront rejetés et le jugement de première instance confirmé.

6. 6.1.1. Aux termes de l'art. 428 al. 1 CPP, les frais de procédure de recours sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé.

Lorsqu'une partie obtient gain de cause sur un point, mais succombe sur un autre, le montant des frais à mettre à sa charge dépend de manière déterminante du travail nécessaire à trancher chaque point (arrêt du Tribunal fédéral 6B_369/2018 du 7 février 2019 consid. 4.1).

6.1.2. En l'espèce, l'appelant, qui succombe entièrement dans ses conclusions d'appel, supportera la totalité des frais de la procédure envers l'Etat, comprenant un émolument de CHF 4'000.- (art. 428 CPP et 14 al. 1 let. e du règlement fixant le tarif des frais en matière pénale [RTFMP]), et cela quand bien même il obtient gain de cause dans sa défense à l’appel joint du MP. En effet, dans la mesure où la peine devait de toute façon être réexaminée dans le cadre de l'appel principal, et que l'appelant n'a pas développé, au-delà de l'acquittement plaidé, d'argumentaire particulier pour s'opposer aux conclusions du MP, le travail effectué par la Cour n'a été influencé que de façon infime par l'appel joint du MP.

6.2.1. Aux termes de l'art. 436 CPP, les prétentions en indemnité et en réparation du tort moral dans la procédure de recours (y inclus l'appel) sont régies par les art. 429 à 434 CPP (al. 1). Si ni un acquittement total ou partiel, ni un classement de la procédure ne sont prononcés mais que le prévenu obtient gain de cause sur d'autres points, il a droit à une juste indemnité pour ses dépenses (al. 2).

La question de l'indemnisation doit être tranchée après la question des frais. Dans cette mesure, la décision sur les frais préjuge de la question de l'indemnisation (arrêt du Tribunal fédéral 6B_548/2018 du 18 juillet 2018 consid. 1.1.2).

6.2.2. Les frais d'appel ayant été mis à sa charge entièrement, dès lors qu'il a succombé pour l'essentiel dans la présente procédure, l'appelant n'a droit à aucune indemnité pour ses frais de défense en appel.

6.3.1. Condamné, la mise à sa charge des frais de procédure de première instance sera confirmée (art. 426 CPP).

6.3.2. Par identité des motifs, l'appelant n'a droit à aucune indemnité fondée sur l'art. 429 CPP.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Reçoit l'appel de A______ ainsi que l'appel joint du Ministère public formés contre le jugement JTCO/62/2020 rendu le 20 mai 2020 par le Tribunal correctionnel dans la procédure P/7551/2018.

Les rejette.

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 4'455.-, lesquels comprennent un émolument de CHF 4'000.-, et les met à la charge de A______.

Rejette les conclusions en indemnisation de A______ (art. 429 et 436 CPP).

Confirme le jugement entrepris dont le dispositif est le suivant en ce qui le concerne :

"Déclare A______ coupable de faux dans les titres (art. 251 CP).

Acquitte A______ de tentative d'escroquerie (art. 22 cum 146 CP), subsidiairement de faux dans les titres (art. 251 CP) pour les faits visés au point B.a.II.2.

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 24 mois, sous déduction de 8 jours de détention avant jugement (art. 40 CP).

Met A______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

[ ]

*****

Ordonne la confiscation et la destruction du CD-Rom figurant sous chiffre 3 de l'inventaire n° 5______ et des extractions de données figurant sous chiffres 26 et 27 de l'inventaire n° 6______ (art. 69 CP).

Ordonne la confiscation des pièces figurant sous chiffres 1, 6, 10, 11, 13 à 16, 30, 33, 39, 43 et 44 de l'inventaire n° 6______ (art. 69 CP).

Ordonne la restitution à P______ des dossiers figurant sous chiffres 1 et 2 de l'inventaire n° 5______ et des pièces figurant sous chiffres 2 à 5, 7 à 9, 12, 17 à 21, 23 à 25, 28, 29, 31, 32, 34 à 38, 40 à 42 et 45 de l'inventaire n° 6______ (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Ordonne la restitution à A______ de la pièce figurant sous chiffre 22 de l'inventaire n° 6______ (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Rejette les conclusions en indemnisation de A______ (art. 429 CPP).

Condamne A______ et B______, conjointement et solidairement, aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 8'105.-, y compris un émolument de jugement de CHF 4'000.- (art. 426 al. 1 CPP)."

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal correctionnel.

 

Le greffier :

Oscar LÜSCHER

 

Le président :

Gregory ORCI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal correctionnel :

CHF

8'105.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

0.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

280.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

100.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

4'000.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

4'455.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

12'560.00