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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3113/2023

JTAPI/355/2024 du 16.04.2024 ( LDTR ) , REJETE

ATTAQUE

Descripteurs : PERMIS DE CONSTRUIRE;TRAVAUX D'ENTRETIEN(CONSTRUCTION);LOYER CONTRÔLÉ;RÉNOVATION D'IMMEUBLE;AMENDE
Normes : LCI.52; LDTR.3; RGL.1; LCI.129.lete; LDTR.2; LDTR.9
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3113/2023 LDTR

JTAPI/355/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 16 avril 2024

 

dans la cause

 

A______ SA, représentée par Me Daniel KINZER, avocat, avec élection de domicile

 

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

B______ SA

 


EN FAIT

1.             A______ SA (ci-après : la propriétaire) est propriétaire de la parcelle n° 1______ de la commune de C______, sur laquelle est érigé un immeuble d'habitation à l'adresse ______[GE].

2.             L'appartement au deuxième étage de l'immeuble sis ______[GE] a été occupé par Monsieur D______ entre 1982 et 2019. Le loyer était fixé à CHF 7'200.- l'an dès le 1er janvier 1982.

3.             L'appartement a ensuite été loué à Monsieur E______ du 1er septembre au 30 novembre 2020 pour un loyer de CHF 20'160.-, puis à Madame F______ et Monsieur G______ pour le même loyer. Les époux ont quitté cet appartement le 30 avril 2023.

4.             Par courrier du 30 mai 2023, la propriétaire a informé l'office cantonal du logement et de la planification foncière (ci-après : OCLPF) du département du territoire (ci-après : DT ou le département) qu'au départ de M. D______ de l'appartement, les canalisations d'eaux usées de la salle de bain, des toilettes et de la cuisine ainsi que les canalisations d'alimentation s'étaient révélées presque totalement bouchées. Pour cette raison, elle avait décidé, dans l'urgence, de remplacer les conduites, ce qui avait impliqué de casser certains murs pour accéder aux canalisations et permettre la réalisation de ces travaux. Les pièces touchées avaient dû être remises en état et elle en avait profité pour changer les équipements sanitaires et de la cuisine (meubles et électroménager). Le carrelage ayant été abîmé dans ce contexte, elle l'avait également remplacé.

Le coût total de ces travaux s'était élevé à CHF 63'500.-.

Selon elle, ces travaux relevaient de l'entretien et n'étaient pas soumis à autorisation mais les époux avaient toutefois attiré son attention lors de leur départ, sur le fait qu'à leur avis ces travaux étaient soumis à autorisation de construire. Si par impossible tel devait être le cas, elle s'engageait à entreprendre toutes les démarches utiles pour obtenir une autorisation de construire, rétroactivement.

5.             Par courrier du 12 juin 2023, l'OCLPF a répondu à la propriétaire que les travaux décrits étaient effectivement susceptibles d'être assujettis à la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) et à la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (mesures de soutien en faveur des locataires et de l'emploi) du 25 janvier 1996 (LDTR - L 5 20) au vu de leur nature, leur ampleur et leur coût. Il l'a ainsi invitée à déposer une requête en autorisation de construire pour ces travaux, au vu du fait qu'il n'appartenait pas à cette dernière de déterminer si les travaux étaient assujettis ou non à la LDTR.

6.             En date du ______ 2023, la propriétaire, par l'intermédiaire de la régie B_______ SA, a requis une autorisation de construire en procédure accélérée, visant à régulariser la rénovation de la cuisine, de la salle de bain et des colonnes de chutes (APA 2______).

7.             Dans le cadre de l'instruction de cette requête plusieurs instances ont été consultées, dont l'OCLPF.

Le 24 août 2023, après avoir requis à plusieurs reprises la production de pièces complémentaires, notamment la correction du formulaire D12 en lien avec le nombre de pièces, l'OCLPF a rendu un préavis favorable sous conditions. Le loyer de l'appartement de 2.5 pièces n'excéderait pas, après travaux CHF 8'513.-/an soit CHF 3'405.- /pièce/an. Ce loyer serait appliqué pour une période de trois ans avec effet rétroactif dès la date de prise d'effet du bail, soit dès le 1er septembre 2020.

Sous la rubrique remarque, il était précisé que les travaux effectués étaient des travaux de rénovation et non d'entretien et qu'une autorisation aurait dû être demandée. Les travaux étaient finis au moment de l'entrée de M. E______ le 1er septembre 2020. À cette date, le plafond de la fourchette des loyers répondant aux besoins prépondérants de la population (ci-après : BPP) était de CHF 3'405.- /p/an selon l'arrêté relatif à la révision des loyers répondant aux besoins prépondérants de la population du 24 août 2011 (ArRLoyers - L 5 20.05). Le plafond avait été augmenté à CHF 3'528.- /p/an le 14 janvier 2022 selon le nouvel arrêté du Conseil d'État. Le loyer maximum aurait donc été fixé à CHF 3'405.-/p/an (et non à CHF 3'528.-/p/an) pour cette APA.

L'appartement comptait, avant et après travaux, 2.5 pièces RGL. Selon le dernier plan présenté, il était composé d'un séjour de 15,37 m2 (1 pièce distincte) d'une chambre de 12,39 m2 (1 pièce distincte) et d'une cuisine de 7,74 m2, soit une surface nette RGL de 35,5 m2 et 2 pièces distinctes. Selon le règlement d'exécution de la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 24 août 1992 (RGL - I 4 05.01) en vigueur, cela correspondait à un appartement de 2.5 pièces.

8.             Le _______2023, le département a délivré l'autorisation de construire requise, laquelle précisait à son chiffre 7 que les conditions figurant dans les préavis, dont celui de l'OCLPF, devaient être strictement respectées et faisaient partie intégrante de l'autorisation.

9.             Par décision du ______2023, faisant suite à l'APA 2______, le département a ordonné à la propriétaire d'établir un nouvel avis de fixation du loyer initial (formule officielle) respectant la condition n° 2 du préavis LDTR, repris au chiffre 7 de l'autorisation de construire et le remboursement du trop-perçu aux locataires concernés soit :

- CHF 1'942.- à M. E______ ;

- CHF 16'021,50 à Mme F______ et M. G______.

Il lui a par ailleurs infligé une amende de CHF 3'900.- au vu de l'infraction commise et compte tenu de sa gravité tant objective que subjective.

10.         Par acte du 25 septembre 2023, la propriétaire a recouru contre la décision du _______ 2023 auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal). Elle a conclu à ce que le tribunal constate que les travaux réalisés en août 2020 n'étaient pas soumis à autorisation ; à l'annulation de l'autorisation de construire du 25 août 2023 ; subsidiairement, à ce que le tribunal constate que l'appartement en question comportait 3.5 pièces ; à l'annulation du ch. 7 de la décision et à ce qu'il soit dit que le loyer après travaux était fixé à CHF 11'918.-/an, soit CHF 3'405.-/pièce/an, le tout sous suite de frais et dépens.

Cette procédure a été inscrite sous A/3113/2023.

L'appartement en question, d'une surface totale de 51,86 m2, était composé d'une grande pièce à vivre (salon) de plus de 15 m2, d'une chambre, d'une cuisine, d'un grand hall ainsi que d'une salle de bain et WC séparé. Il avait toujours été considéré comme un appartement de 3,5 pièces, comme cela ressortait notamment de l'état locatif théorique établi lors de l'acquisition de l'immeuble et des contrats de bail.

Reprenant les éléments exposés dans son courrier du 30 mai 2023 à l'OCLPF, elle considérait que les travaux réalisés dans l'appartement ne pouvaient être qualifiés de travaux de rénovation mais devaient être considérés comme des travaux d'entretien, non soumis à autorisation. Si ces travaux devaient faire l'objet d'une autorisation de construire, la décision devait être réformée en ce sens que le loyer après travaux devait être fixé à CHF 11'918.-/an dès lors que l'appartement comportait 3,5 pièces. D'ailleurs cet appartement avait une surface de 51,86 m2, soit supérieure à la surface nette minimum requise pour un appartement de 4 pièces, soit 49 m2 au sens de l'art. 1 al. 5 RGL. Or, selon l'art. 9 al. 4 LDTR, la fourchette des loyers pouvait être dépassée si la surface brute locative des pièces était importante ce qui était manifestement le cas ici. L'OCLPF ne pouvait dès lors effectuer une simple multiplication du loyer maximal correspondant aux BPP par le prétendu nombre de pièces et devait tenir compte de la surface très généreuse de l'appartement dans la fixation du loyer. Au vu de ce qui précédait, le loyer maximum autorisé après travaux avait été fixé en violation de la LDTR, de sorte que le ch. 7 de l'autorisation de construire devait être annulé.

11.         Par acte du 4 octobre 2023, la propriétaire a recouru contre la décision du département du ______2023 auprès du tribunal, lequel l'a enregistré sous A/3269/2023.

Elle a conclu à l'annulation de la décision précitée, sous suite de frais et dépens. Préalablement, elle sollicitait la jonction de cette procédure avec la procédure A/3113/2023.

L'ordre de remise en état n'était pas fondé et devait être annulé, dès lors que l'APA qu'elle avait contestée n'était pas entrée en force eu égard à ses arguments développés dans son recours du 25 septembre 2023.

Concernant l'amende, elle n'avait commis aucune infraction s'agissant de la réalisation de travaux d'entretien non soumis à autorisation. Par ailleurs, le département n'avait pas motivé sa décision, de sorte qu'elle ignorait les raisons ayant amené l'autorité à fixer l'amende à CHF 3'900.-. La décision querellée devait être annulée pour cette raison également.

12.         Par décision du _______2023 (DITAI/3______), le tribunal a joint les procédures A/3113/2023 et A/3269/2023 sous le numéro de cause A/3113/2023.

13.         En date du 27 novembre 2023, le département a transmis ses observations au tribunal, accompagnées de son dossier. Il a conclu au rejet des recours formés les 25 septembre et 4 octobre 2023 et à la condamnation de la recourante aux dépens de l'instance.

Il ressortait du dossier et des déclarations de la recourante que les travaux avaient porté sur la rénovation de la cuisine, de la salle de bain et des WC dans leur entièreté, avec le remplacement du carrelage et du mobilier. Les travaux avaient également porté sur les colonnes de chute, l'électricité, la peinture et le sol (conformément au formulaire D12). La rénovation complète de la cuisine et de la salle de bain n'apparaissait pas justifiée simplement en raison du remplacement des canalisations comme l'alléguait la recourante. Ainsi, il n'était pas possible au vu de leur ampleur de considérer qu'il s'agissait de simples travaux d'entretien non soumis à autorisation.

Conformément à la jurisprudence, il convenait de prendre en compte la répercussion des travaux sur le loyer. En l'occurrence, celui-ci était passé de CHF 7'200.- par an à CHF 20'160.- par an, soit une augmentation importante de l'ordre de 180 %.

De plus, le coût par pièce des travaux, qu'il était possible de prendre en compte selon la jurisprudence était considérable dans le cas présent. En effet, le coût total s'élevait à CHF 63'500.-, ce qui, pour un logement de 2.5 pièces n'était pas négligeable et équivalait à CHF 25'400.-, la pièce. D'ailleurs, même en se basant sur un nombre de pièces de 3.5 pièces comme le prétendait la recourante, le coût par pièce aurait été conséquent et faisait pencher la balance vers une qualification des travaux de rénovation et non de simple entretien.

Il n'avait ainsi pas violé les art. 3 et 9 LDTR en qualifiant les travaux de rénovation et en fixant le loyer à CHF 8'513.- par an pour une durée de trois ans, dès le 1er septembre 2018 [rec 2020].

Concernant le nombre de pièces de l'appartement, il convenait d'appliquer l'art. 1 RGL. Pour le calcul du nombre de pièces, il était tenu compte de la surface nette, tel que défini à l'art. 4 RGL.

Il ressortait du dossier et des préavis de l'OCLPF que l'appartement comportait un séjour de 15,37 m2 et une chambre de 12,39 m2 qui devaient être comptabilisés comme deux pièces distinctes. Avec la cuisine de 7,74 m2, la surface nette de l'appartement s'élevait à 35.5 m2. Cette surface nette étant inférieure à 39 m2, il devait être considéré que le logement comptait 2.5 pièces et non 3.5 pièces.

Partant, c'était à juste titre que l'OCLPF avait fixé le loyer sur la base d'un logement de 2.5 pièces, soit d'un montant de CHF 8'513.- l'an.

L'ordre de remise en état était fondé puisque selon la jurisprudence, il n'était pas nécessaire que la décision de régularisation APA 2______ soit en force.

Le principe de l'amende était justifié dès lors que les travaux en question étaient soumis à autorisation. Pour la fixation de son montant, il avait pris en considération le fait que les travaux avaient été exécutés avant qu'une demande d'autorisation de construire ne soit déposée et que les travaux avaient eu une répercussion non négligeable sur le montant des loyers fixés comportant une augmentation de 180 %. Il avait également pris en compte le statut de professionnelle de l'immobilier de la recourante, laquelle devait pouvoir avoir conscience du fait que ces travaux étaient susceptibles d'être soumis à autorisation de construire, étant précisé qu'en cas de doute, elle aurait pu se renseigner auprès du département, ce qu'elle n'avait de toute évidence pas jugé utile de faire avant de réaliser les travaux. Elle l'avait ainsi mis devant le fait accompli et ce n'était qu'après que ses anciens locataires lui aient fait une remarque à ce propos qu'elle avait contacté l'autorité intimée. S'agissant du montant de l'amende, il se situait dans la fourchette basse des montants prévus par la loi. Enfin, la recourante ne démontrait pas que le paiement de l'amende la confronterait à une situation financière particulièrement difficile. Par ailleurs la jurisprudence admettait qu'un montant de CHF 5'000.- était a priori adapté aux ressources financières d'une personne morale.

14.         En date du 22 décembre 2023, la recourante a répliqué.

Contrairement à ce que supposait le DT, l'augmentation de loyer intervenue lors de la relocation était uniquement liée à la conjoncture et plus particulièrement à l'évolution du prix des loyers entre 1982 et 2020 (38 ans). Pour le surplus, elle a persisté dans son argumentation.

15.         Le 12 janvier 2024, le département a dupliqué.

16.         Le 20 janvier 2024, la recourante a transmis au tribunal des observations spontanées.

Il était de notoriété publique que les loyers avaient fortement évolué en 38 ans et le loyer de l'appartement aurait augmenté avec ou sans travaux.

Pour le surplus, elle a campé sur ses positions.

17.         Par courrier du 26 mars 2024, le tribunal a informé les parties qu'en raison de la récusation des trois juges assesseurs représentant les bailleurs dans la présente procédure, la composition paritaire prévue par l'art. 45 al. 3 let. c LDTR n'était pas possible, de sorte que la cause serait jugée avec les assesseurs suivants :

a) Monsieur Thierry ESTOPPEY, architecte représentant des milieux professionnels de sa branche ;

b) Madame Suzanne AUBERT-LEBET, représentante d'organisation de sauvegarde du patrimoine et de l'environnement ;

c) Monsieur François HILTBRAND, architecte représentant des milieux professionnels de sa branche ;

d) Madame Diane SCHASCA, représentante des organisations de défense des locataires.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation du 25 janvier 1996 (LDTR - L 5 20) et de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05, art. 143 et 145 al. 1 LCI ; art. 45 al. 1 LDTR).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'égalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

L'autorité chargée d'appliquer la loi dispose d'un pouvoir d'appréciation lorsque la loi lui laisse une certaine marge de manœuvre. Cette dernière peut notamment découler de la liberté de choix entre plusieurs solutions, ou encore de la latitude dont l'autorité dispose au moment d'interpréter des notions juridiques indéterminées contenues dans la loi. Bien que l'interprétation de notions juridiques indéterminées relève du droit, que le juge revoit en principe librement, un tribunal doit néanmoins restreindre sa cognition lorsqu'il résulte de l'interprétation de la loi que le législateur a voulu, par l'utilisation de telles notions, reconnaître à l'autorité de décision une marge de manœuvre que le juge doit respecter, étant précisé que cette marge de manœuvre ne revient pas à limiter le pouvoir d'examen du juge à l'arbitraire (ATF 140 I 201 consid. 6.1 et les références citées).

4.             Saisi d'un recours, le tribunal applique le droit d'office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n'est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (ATA/1024/2020 du 13 octobre 2020 consid. 1 et les références citées).

5.             La recourante soutient que l'appartement en cause comporte 3.5 pièces et non 2.5 pièces, comme retenu par le département.

Il y a ainsi lieu de trancher cette question pour déterminer le quotient par lequel les montants du coût des travaux ou du loyer doivent être divisés pour obtenir des données par pièce (ATA/334/2014 du 13 mai 2014 ATA/641/2013 du 1er octobre 2013 ; ATA/826/2012 du 11 décembre 2012 ; ATA/645/2012 du 25 septembre 2012 ; ATA/570/2010 du 31 août 2010 ; ATA/100/2010 du 16 février 2010).

6.             Selon l’art. 52 LCI, toute pièce pouvant servir à l’habitation doit avoir en principe 9 m2, mais au minimum 6 m2 de surface (al. 1). Elle doit être aérée et éclairée par un jour vertical ouvrant sur l’extérieur (al. 2).

7.             Pour calculer le nombre de pièces au sens de la LDTR, le département se réfère à l'art. 1 RGL, qui s’applique au calcul du nombre de pièces des logements soumis à la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 4 décembre 1977 (LGL - I 4 05), sauf des logements d’utilité publique. La chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) admet depuis de nombreuses années que, dans la mesure où les buts poursuivis par la LDTR et la LGL relèvent d’un même souci de préserver l’habitat et de lutter contre la pénurie de logements à Genève, on peut parfaitement appliquer la disposition précitée, par analogie, au calcul du nombre de pièces selon la LDTR (cf. not. ATA/334/2014 du 13 mai 2014 ; ATA/328/2013 du 28 mai 2013 ; ATA/826/2012 du 11 décembre 2012 ; ATA/645/2012 du 25 septembre 2012 ; ATA/570/2010 du 31 août 2010 ; ATA/322/2008 du 17 juin 2008).

8.             Il en résulte que le propriétaire ou son architecte/ingénieur ne peut pas calculer le nombre de pièces selon ses propres critères ou ceux d’autres normes (cf. Emmanuelle GAIDE/Valérie DÉFAGO GAUDIN, La LDTR, Démolition, transformation, rénovation, changement d'affectation et aliénation, Immeubles de logements et appartements, 2014, n° 6.2 p. 144).

9.             Le RGL est applicable aux immeubles admis au bénéfice de la loi du 28 juin 1974 ainsi que l’une des lois abrogées en application de l’art. 33 de ladite loi, sous réserve des dispositions particulières fixées par le Conseil d’État pour chacun de ces immeubles (art. 88 RGL).

10.         La chambre administrative a déjà eu l'occasion d'appliquer l'art. 1 RGL à des immeubles construits bien avant l'entrée en vigueur de celui-ci (cf. not. ATA/334/2014 du 13 mai 2014 ; ATA/641/2013 du 1er octobre 2013; ATA/645/2012 du 25 septembre 2012 ; ATA/859/2010 du 7 décembre 2010).

11.         À teneur de l’art. 1 al. 4 RGL, pour le calcul du nombre de pièces des logements, il est tenu compte de la surface nette, telle que définie à l'art. 4 RGL.

Selon l’al. 5 de cette disposition, la surface nette minimum pour un appartement de 2.5 pièces est de 33 m2 et pour un appartement de 3.5 pièces de 46 m2.

12.         Par surface nette du logement, il faut entendre l’addition des surfaces des pièces, d'au moins 9 m2, et des demi-pièces, d'au moins 6 m2, habitables du logement et de la cuisine, ainsi que du laboratoire (art. 4 al. 1 RGL).

13.         La surface nette se calcule entre les murs intérieurs. Elle est en principe prise en compte dans un rapport maximum largeur-longueur de 1 à 2,2 m. La surface des armoires et des aménagements des cuisines n'est pas déduite (art. 4 al. 2 RGL).

14.         Ne sont pas pris en compte les gaines techniques, halls, dégagements, couloirs, réduits et locaux sanitaires, loggias, balcons, terrasses, jardins, ni les trémies des escaliers des duplex (art. 4 al. 3 RGL).

15.         Pour les logements comportant deux pièces au plus, la surface nette du logement comprend la surface des halls et dégagements. Pour les autres logements, lorsque l’accès à une chambre se fait par une autre pièce, il est en principe déduit la surface de passage théorique de 1 m de large (art. 4 al. 4 RGL).

16.         En l’espèce, l’appartement comporte un séjour, une chambre et une cuisine. Aussi, le calcul de la surface nette de l’appartement, en application de l’art. 4 al. 4 RGL précité, se fait en additionnant la surface nette de la cuisine (7,74 m2), celle du séjour (15,37 m2) et celle de la chambre (12,39 m2), soit un total de 35,5 m2. En effet, le hall d'entrée, même s'il peut sembler spacieux, ne compte pas comme une pièce (art. 4 al. 3 RGL).

Partant, l’appartement ayant une surface nette de logement inférieure à 46 m2 –, c'est à juste titre que l'OCLPF l'a considéré, en application de l’art. 1 al. 5 RGL, comme un logement de 2.5 pièces et non de 3.5 pièces.

17.         La recourante soutient que les travaux réalisés en août 2020 relèvent de l’entretien et ne sont pas soumis à autorisation.

18.         La LDTR a pour but de préserver l’habitat et les conditions de vie existants, ainsi que le caractère actuel de l’habitat dans les zones visées expressément par la loi (art. 1 al. 1 LDTR). À cet effet, et tout en assurant la protection des locataires et des propriétaires d’appartements, elle prévoit notamment l’encouragement à des travaux d’entretien et de rénovation raisonnables et proportionnés des maisons d’habitation (art. 1 al. 2 let. b LDTR).

Plus spécifiquement, la LDTR vise plusieurs objectifs, notamment améliorer la protection des locataires (MGC 1997 64/X 10562), et conserver sur le marché certains types de logements qui répondent à un besoin en raison de leur prix et de leur conception (ATF 116 Ia 401 consid. 9c).

La réglementation qu'elle met en place est conforme au droit fédéral, à la garantie de la propriété et à la liberté économique, y compris dans la mesure où elle prévoit un contrôle des loyers après transformations (ATF 116 Ia 401 consid. 9c ; 111 Ia 401 consid. 9 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_195/2021 du 28 octobre 2021 consid. 5.1.3).

19.         Selon l’art. 3 al. 1 let. d LDTR, par transformation, on entend notamment tous les travaux qui ont pour objet la rénovation, c’est-à-dire la remise en état, même partielle, de tout ou partie d’une maison d’habitation, en améliorant le confort existant sans modifier la distribution des logements, sous réserve de l'art. 3 al. 2 LDTR.

Selon cette dernière disposition, par travaux d’entretien, non assujettis à la LDTR, il faut entendre les travaux courants d’entretien faisant partie des frais d’exploitation ordinaires d’une maison d’habitation. Les travaux raisonnables d’entretien régulier ne sont pas considérés comme travaux de transformation, pour autant qu’ils n’engendrent pas une amélioration du confort existant.

Le législateur a précisé que les travaux courants d'entretien sont ceux qui sont déjà couverts par les loyers, ou devraient l’être, une partie du loyer étant précisément censée permettre la constitution d’une réserve pour travaux d’entretien (MGC 1999 9/II 1082).

20.         C’est le département, et non l’administré, qui détermine dans chaque cas si des travaux relèvent de l’entretien ou de la transformation. Si des travaux de pur entretien ne nécessitent pas d’autorisation, il incombe toutefois au propriétaire, en cas de doute, de demander l’avis du département et d’effectuer les démarches nécessaires pour agir en conformité de la loi (ATA/694/2016 du 23 août 2016 consid. 7 ; Emmanuelle GAIDE/Valérie DÉFAGO GAUDIN, La LDTR op. cit. , p. 186).

21.         À teneur de l’art. 9 al. 1 LDTR, une autorisation est nécessaire pour toute transformation ou rénovation au sens de l’art. 3 al. 1 LDTR. Elle est accordée notamment pour les travaux de rénovation, c’est-à-dire la remise en état, même partielle, de tout ou partie d’une maison d’habitation, en améliorant le confort existant sans modifier la distribution des logements (art. 3 al. 1 let. d LDTR), et si les logements transformés répondent, quant à leur genre, leur loyer ou leur prix, aux besoins prépondérants de la population (art. 9 al. 2 LDTR).

22.         Par besoins prépondérants de la population, il faut entendre les loyers accessibles à la majorité de la population (art. 9 al. 3 LDTR). Selon l’arrêté relatif à la révision des loyers répondant aux besoins prépondérants de la population du 24 août 2011, en vigueur jusqu’au 14 janvier 2022 (aArLoyers - L 5 20.05), les loyers correspondant aux besoins prépondérants de la population, fondés sur le revenu brut médian des contribuables personnes physiques 2007, étaient compris entre CHF 2'536.- et CHF 3'405.- la pièce par année. À partir du 14 janvier 2022, ces loyers ont été portés à une fourchette allant de CHF 2'627.- à CHF 3'528.- la pièce par année.

La fourchette des loyers peut exceptionnellement être dépassée si la surface brute locative des pièces est importante (art. 9 al. 4 LDTR). Elle peut être dépassée si des circonstances particulières le justifient, soit si la protection du patrimoine génère des coûts supplémentaires (art. 9 al. 5 LDTR).

Un logement correspond en principe par son genre ou par son loyer aux besoins prépondérants de la population notamment lorsqu'il entre dans la catégorie des appartements dans lesquels règne la pénurie au sens de l'art. 25 LDTR. Selon l'arrêté déterminant les catégories de logements où sévit la pénurie en vue de l'application des art. 25 à 39 de la LDTR (ArAppart - L 5 20.03) déterminant au moment des faits, comme selon celui actuellement en vigueur, il y a pénurie dans toutes les catégories d'appartements d'une à sept pièces inclusivement.

23.         Pour opérer la distinction entre travaux d'entretien et travaux de transformation, le raisonnement, admis de manière constante par la chambre administrative, se décline en deux temps. Premièrement, il faut examiner, si, de par leur nature, les travaux en cause relèvent de l'entretien ou, au contraire, consistent en des travaux de rénovation, la jurisprudence de la chambre administrative précisant, sur ce point, que des travaux d'entretien sont susceptibles d'aboutir à une rénovation ou à une transformation soumise à la LDTR lorsque, n'ayant pas été exécutés périodiquement ou par rotation tout au long de l'existence de l'immeuble, ou encore parce qu'ils n'ont pas été exécutés du tout pendant de nombreuses années, leur accumulation, même en tenant compte d'une exécution rationnelle commandant un regroupement, leur confère une incidence propre à engendrer un changement de standing de l'immeuble (travaux différés). Secondement, il convient de s'attacher à l'ampleur et, partant, au coût desdits travaux et à leur répercussion sur le montant du loyer, dès lors qu'il pourrait en résulter un changement d'affectation qualitatif des logements (ATA/651/2022 du 23 juin 2022 consid. 7b ; ATA/422/2020 du 30 avril 2020 consid. 6 et les arrêts cités).

24.         Il ressort des travaux législatifs ayant précédé la modification de l'art. 3 al. 1 let. d et al. 2 LDTR adoptée en 1999, que le Grand Conseil désirait, pour tracer une limite précise entre travaux soumis et non soumis à la loi, que soient pris en compte le coût de ces derniers et leur incidence sur les loyers, comme prévu par la jurisprudence (MGC 1999 9/11 1076). Lors du deuxième débat concernant le projet de modification de la LDTR, de nombreux amendements ont été soumis au Grand Conseil, notamment celui de préciser, à l’art. 3 al. 1 let. d LDTR, que devaient être considérés comme travaux de rénovation ceux dont le coût total engendrait une augmentation de loyer de plus de 20% (MGC 1999 9/1 1211). Cet amendement a été rejeté par 48 non contre 46 oui (MGC 1999 10/11 1212 ; ATA/382/2008 du 29 juillet 2008 consid. 2c et l'arrêt cité).

25.         Selon la jurisprudence, lorsque le coût des travaux n'est pas susceptible d'entraîner à lui seul une soumission des travaux à la LDTR, c'est la combinaison de ce montant et de son impact sur les loyers qui est jugée déterminante (ATA/651/2022 précité consid. 7b et l'arrêt cité).

26.         La distinction entre travaux d'entretien et travaux de transformation peut être délicate à opérer. Le critère de l'accroissement du confort existant est déterminant pour distinguer des travaux de transformation des travaux d'entretien, la LDTR ne devant pas instituer un contrôle général des loyers. Il est toutefois possible de s'en écarter lorsque l'importance des travaux justifie d'assimiler les travaux de rénovation à des travaux de transformation. Selon la jurisprudence, l'exécution de travaux de remise en état auxquels le bailleur est tenu en vertu de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220) ne procure en général pas un confort supplémentaire au locataire par rapport à ce qui est convenu dans le contrat de bail. Il s'agit, au contraire, de la suppression de défauts graves ou de moyenne importance, soit ceux qui empêchent ou restreignent l'usage prévu. À l'inverse, la plupart des gros travaux de rénovation, comme le présume le législateur fédéral, comprennent une part d'accroissement du confort (art. 14 al. 1 de l’ordonnance sur le bail à loyer et le bail à ferme d'habitation et de locaux commerciaux du 9 mai 1990 - OBLF - RS 221.213.11 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_405/2015 du 6 avril 2016 consid. 3.2). Seules les remises en état qui vont au-delà de ce qui est nécessaire pour assurer le maintien de la chose louée en l'état tombent sous le coup de l'art. 3 al. 1 let. d LDTR. Il n'est pas arbitraire de tenir compte à cet égard des circonstances dans lesquelles les travaux sont accomplis et notamment de leur accumulation en raison d'un défaut d'entretien courant des bâtiments concernés (arrêt du Tribunal fédéral 1C_195/2021 du 28 octobre 2021 consid. 4.1.2 et les références citées). Des travaux isolés, effectués longtemps auparavant, ne démontrent pas la régularité de l'entretien (ATA/651/2022 précité consid. 8a et les références citées).

27.         Le Tribunal fédéral a précisé que le fait de soumettre des travaux à autorisation au sens de la LDTR n'entrave pas la bonne application du droit fédéral, lorsque ceux-ci vont au-delà des travaux d'entretien courant imposés par le CO (arrêt du Tribunal fédéral 1C_405/2015 précité consid. 3.2).

28.         L'installation de nouveaux sanitaires, l'agencement d'une cuisine, la mise en conformité de l'installation électrique, la pose de nouveaux revêtements de sols et de parois ainsi que des travaux de peinture et de serrurerie relèvent en principe de l'entretien au regard de leur nature (ATA/40/2010 du 26 janvier 2010 et les références citées). C'est lorsqu'ils sont effectués séparément, et selon les circonstances, que chacun de ces travaux peuvent être qualifiés de travaux d'entretien. Cela ne signifie pas pour autant qu'une rénovation comprenant l'ensemble des travaux devra nécessairement elle aussi être considérée comme étant limitée à des travaux d'entretien (arrêt du Tribunal fédéral 1C_405/2015 du 6 avril 2016 consid. 4.3 ; ATA/651/2022 précité consid. 8a et l'arrêt cité).

29.         Dans l'ATA/334/2014 du 13 mai 2014, confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_323/2014 du 10 octobre 2014, la chambre administrative a considéré que devaient être soumis à autorisation des travaux qui avaient pour but de remettre entièrement à neuf un appartement à l'occasion d'un changement de locataire, par la réfection complète des murs, des plafonds, des parquets dans toutes les pièces et des agencements de cuisine, pour un coût de CHF 8'570.- la pièce, étant précisé qu'en l'occurrence, le loyer avant travaux dépassait déjà le montant maximal du loyer correspondant aux besoins prépondérants de la population (Stéphane GRODECKI/Valérie DÉFAGO GAUDIN, La jurisprudence genevoise en matière d’aménagement du territoire et de droit public des constructions rendue en 2014, RDAF 2015 I p. 31).

30.         La chambre administrative a également confirmé que des travaux ayant pour but la remise à neuf d'un appartement à l'occasion d'un changement de locataire par le rafraîchissement des peintures (plafonds, murs, boiseries et radiateurs de toutes les pièces), la réfection de l'ensemble des installations sanitaires (remplacement de la baignoire, du mélangeur de lavabo, de l'évier, de la robinetterie et des divers accessoires), l'installation d'un nouvel agencement de cuisine, le remplacement du carrelage et des faïences, l'installation d'un nouveau système électrique, le ponçage et la vitrification différés des parquets et la pose de vannes thermostatiques, devaient être assimilés à des travaux de rénovation, constat confirmé par le coût des travaux, soit CHF 26'240.- pour un appartement de trois pièces, par leur impact sur le loyer, qui avait augmenté de 54% à la suite de ces derniers, et par le défaut d'entretien régulier de l'appartement (ATA/440/2015 du 12 mai 2015 consid. 10).

De même, elle a retenu que des travaux – exécutés pour un montant de CHF 11'407.- par pièce dans un logement ne correspondant, avant travaux, pas aux besoins prépondérants de la population – comprenant la réfection complète des peintures, papiers peints et parquets, avec la pose de radiateurs, l'installation d'un agencement de cuisine et de nouveaux sanitaires et la mise en conformité des installations électriques, devaient faire l'objet d'une autorisation (ATA/645/2012 du 25 septembre 2012 consid. 11).

31.         Dans un arrêt récent (ATA/422/2020 du 30 avril 2020), la chambre administrative a eu à trancher le cas de travaux exécutés en 2010 dans un appartement de cinq pièces de 90 m2, à l'occasion d'un changement de locataires, portant sur le remplacement de l'agencement de la cuisine, le remplacement de l'équipement électroménager, l'installation d'une nouvelle hotte, la réfection du câblage électrique de la cuisine et du salon, la démolition du pan de la cloison séparant la cuisine du salon, la pose d'un carrelage sur l'existant à la cuisine et à la salle de bains, la pose de faïence sur l'existant à la cuisine et à la salle de bains, le remplacement d'un lavabo, le remplacement du mélangeur et de la batterie de bain ainsi que la coupure, la vidange et la dépose des installations sanitaires en attendant la réfection du carrelage de la salle de bains, la réfection du tube de douche, le rafraîchissement de la peinture ainsi que le ponçage et l'imprégnation du parquet. Ces travaux, dont le coût s’était élevé à CHF 34'254.25, soit CHF 6'850.- par pièce, avaient concerné toutes les pièces de l'appartement. La chambre administrative a retenu que, pris indépendamment les uns des autres, ils relevaient certes de l'entretien courant de l'appartement, mais représentaient ensemble des travaux dont l'ampleur équivalait à des travaux de transformation. Le loyer après travaux était passé à CHF 5'232.- la pièce par an, soit une augmentation de 77.95 %, le faisant changer de catégorie d'appartements locatifs. Quand bien même les travaux entrepris n'apparaissaient pas somptuaires, ils avaient toutefois été suffisants pour que leur coût et leur impact sur le loyer eut entrainé un changement ayant pour conséquence une modification de l'affectation qualitative de l'appartement concerné. De tels travaux étaient dès lors soumis à autorisation.

32.         Dans un arrêt plus récent (ATA/263/2021 du 2 mars 2021, confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_195/2021 du 28 octobre 2021), la chambre administrative a constaté que le coût global des travaux dans un appartement de quatre pièces s'était élevé à CHF 27'340.95, soit CHF 6'835.25 la pièce, ce qui était inférieur au montant retenu par la jurisprudence pour qualifier les travaux de grande ampleur, soit CHF 10'000.-. Le montant mensuel du loyer avait toutefois été porté à CHF 2'800.- (soit CHF 33'600.- par année) après l'exécution des travaux, ce qui était élevé par rapport au loyer avant travaux de CHF 19'200.- (recte par le Tribunal fédéral : CHF 20'920.-). Un tel loyer était plus élevé que la moyenne des loyers dans un immeuble semblable, arrêté à CHF 2’038.- (soit CHF 24'456.- par an) selon les statistiques genevoises. Son augmentation de 75% (recte par le Tribunal fédéral : 60%) ne pouvait ainsi se justifier par la seule référence aux loyers du quartier, ni par le fait qu'il avait été inchangé depuis quatorze ans, ou encore qu'il était, préalablement aux travaux de 2017, supérieur au loyer correspond aux besoins prépondérants de la population.

33.         Dans un arrêt du 22 août 2023 (ATA/870/2023), la chambre administrative a considéré que CHF 39'275.- de travaux (peinture dans l’entier de l’appartement, ponçage et vitrification du parquet, remise en état d’éléments électriques, réglage de portes, armoires et fenêtres, remplacement à l’identique de carrelage et des faïences du WC visiteurs, de la batterie du lavabo, porte savon, porte-verre et siège WC) dans un appartement de quatre pièces, occupé par le même locataire pendant 14 ans, ayant fait l’objet de travaux d’entretien pendant cette durée pour un montant de CHF 1’228.- et le loyer ayant subi une hausse de 56% au départ du locataire, était soumis à autorisation s’agissant de travaux d’entretien différés. Le loyer/pièce passait de CHF 4'983.- avant travaux à CHF 7'800.- après travaux, ces derniers représentant CHF 9'818.-/pièce. Un recours est actuellement pendant contre cet arrêt devant le Tribunal fédéral.

34.         En revanche, la chambre administrative a considéré que n'étaient pas soumis à la LDTR des travaux d'entretien différés ou non dans le temps, dont le coût par pièce était inférieur à CHF 10'000.- (ATA/642/2013 du 1er octobre 2013 ; ATA/40/2010 du 26 janvier 2010; Emmanuelle GAIDE/Valérie DÉFAGO GAUDIN, op. cit., p. 193 ss.). Elle a toutefois précisé qu'il ne lui appartenait pas de dicter au département de ne pas requérir de demande d'autorisation de construire pour des travaux de moins de CHF 10'000.- par pièce (ATA/694/2016 précité consid. 6d ; ATA/574/2014 du 29 juillet 2014 ; ATA/334/2014 précité consid. 14).

35.         Le département peut ainsi recourir au critère du coût par pièce des travaux, mais doit le relativiser. En réalité, pour déterminer la qualification de travaux entrepris dans des logements situés dans des bâtiments visés à l'art. 2 LDTR et, partant, la nécessité de demander une autorisation, il convient de prendre en compte la situation dans son ensemble et d'appliquer à celle-ci les différents critères précités, à savoir la nature des travaux, leur ampleur dans leur ensemble, le moment auquel ils interviennent, leur répercussion sur le loyer précédent ou futur et sa conformité aux besoins prépondérants de la population, sans que les travaux entrepris conduisent à un changement d'affectation qualitatif du logement, ainsi que leur rapport avec la valeur de l'immeuble de manière proportionnelle, tout en évaluant dans quelle mesure les travaux effectués permettent raisonnablement et de manière ordinaire de conserver la chose en bon état (ATA/651/2022 précité consid. 8f ; ATA/694/2016 précité consid. 6d).

36.         Le Tribunal fédéral a ainsi tenu pour non arbitraire le fait de soumettre à la LDTR des travaux d'entretien différés dans le temps, de grande ampleur et qui avaient été suivis d'importantes hausses de loyer (arrêts du Tribunal fédéral 1C_405/2015 du 6 avril 2016 consid. 4.3 ; 1C_323/2014 du 10 octobre 2014 consid. 7.2 ; 1C_624/2013 précité consid. 2.6).

37.         En l’espèce, il est admis que tant l’immeuble que l'appartement concernés sont destinés à de l’habitation et qu'ils sont soumis à la LDTR (art. 2 al. 1 LDTR).

38.         La recourante conteste l'assujettissement à la LDTR des travaux réalisés en 2020. Il ressort du dossier que ces derniers ont porté sur le changement des canalisations, d'une part et d'autre part, sur la rénovation complète de la cuisine, de la salle de bain et des WC, avec notamment, le remplacement des carrelages et du mobilier y compris des appareils électroménagers, de même que la peinture des parois, des plafonds et des radiateurs (y compris : le lessivage, la pose de plinthes et de seuils) ainsi que sur la mise en conformité du système électrique, le tout pour un coût de CHF 63'500.- (soit de CHF 25'400.- par pièce).

39.         La recourante soutient que les travaux précités seraient de l'entretien, dans la mesure où ils n'auraient apporté aucune amélioration du confort existant de l'appartement. Elle perd toutefois de vue, à ce stade de l'analyse, que même si, au vu de la jurisprudence précitée, le critère de l'amélioration du confort existant est pertinent, il n'est pas à lui seul décisif pour qualifier les travaux de rénovation ou d'entretien.

Quand bien même les travaux litigieux, pris indépendamment les uns des autres, relèveraient de l'entretien courant, ils ont été exécutés de manière regroupée, à l'occasion d'un changement de locataire, et doivent donc être considérés comme de l'entretien différé.

40.         En ce qui concerne la répercussion des travaux sur le loyer, ni la loi ni la jurisprudence n'ont défini de seuil à partir duquel l'augmentation de loyer consécutive à des travaux devrait être considérée comme importante. Le département dispose ainsi d'un certain pouvoir d'appréciation dans l'évaluation de ce critère.

En l'occurrence, le montant du loyer annuel a été porté à CHF 20'160.- par an depuis le 1er septembre 2020, soit une augmentation de 180 % du loyer annuel avant travaux fixé à CHF 7'200.-. Cette augmentation du loyer a été considérée par le département comme importante. Dans la mesure où ce pourcentage constitue, une augmentation de près du triple du loyer initial, le raisonnement de l'autorité intimée ne prête pas le flanc à la critique. De plus, ledit pourcentage est bien supérieur au 20% qu'une minorité du Grand Conseil avait proposé comme seuil à partir duquel une augmentation de loyer devait être considérée comme importante (MGC 1999 9/1 1211). Quand bien même cette proposition a été – de peu – refusée, elle donne un bon indice sur la façon d'évaluer la répercussion des travaux sur le loyer.

41.         Enfin, la recourante soutient que la hausse du loyer reposerait uniquement sur l'évolution du prix des loyers entre 1982 et 2020 et non en raison des travaux réalisés.

Cette argumentation n'est pas de nature à remettre en cause l'analyse qui a été effectuée ci-avant. En effet, selon la jurisprudence de la chambre administrative, les comparaisons établies dans le cadre de procédure de recours avec les loyers d'autres logements similaires dans un quartier échappent à la compétence des juridictions administratives, dans la mesure où elles ressortissent au droit du bail (art. 269a let. a CO ; ATA/646/2010 précité consid. 9 ; ATA/502/2008 du 30 septembre 2008).

Dans un arrêt récent (ATA/263/2021 du 2 mars 2021, confirmé par l'arrêt 1C_195/2021 du 28 octobre 2021, la chambre administrative a en outre jugé qu'une augmentation du loyer de 75 % [rec par le Tribunal fédéral : 60%] ne pouvait se justifier par la seule référence aux loyers du quartier, lesquels dépendaient notamment de l'état et du confort de l'objet, ni par le fait qu'il ait été inchangé depuis quatorze ans.

42.         Au vu de ce qui précède, les travaux litigieux doivent être qualifiés de travaux de rénovation au sens de l'art. 3 al. 1 let. d LDTR et étaient donc soumis à autorisation.

43.         Par ailleurs, l'appartement répondant aux BPP, l'art. 9 al. 2 et al. 3 LDTR est applicable. En effet, son loyer avant travaux était de CHF 7'200.- soit CHF 2'880.-/pièce/an, correspondant aux BPP, il s’agit d’un 2.5 pièce soit d’une catégorie de logements où sévit la pénurie (Arrêté déterminant les catégories de logements où sévit la pénurie en vue de l’application des art. 25 à 39 de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d’habitation (ArAppart) du 21 décembre 2022 ; L 5 20.03).

Partant, c’est à bon droit (art. 10 ss LDTR) que le département a fixé, comme condition de l’autorisation, le loyer de l’appartement.

Le grief sera dès lors écarté.

44.         Concernant la fixation du loyer, il a été exposé plus haut que c'est à juste titre que le département a considéré que l'appartement litigieux comptait 2.5 pièces, de sorte que c'est par ce quotient que doit être divisé le montant du loyer par pièce. De plus, comme relevé par l'OCLPF, le plafond de la fourchette des loyers répondant aux besoins de la population était de CHF 3'045.- la pièce par année selon l'ArRloyers du 24 août 2011, applicable lors de la conclusion du nouveau bail le 1er septembre 2020.

45.         La recourante fait grief au département de ne pas avoir pris en considération la surface totale de l'appartement de 51,86 m2 (y compris la surface du hall, de la salle de bain et des WC), laquelle serait importante puisqu'elle dépasserait celle d'un appartement de 4 pièces au sens de l'art. 1 al. 5 RGL (49 m2) et permettrait de dépasser la fourchette des loyers.

46.         À teneur de l'art. 9 al. 4 LDTR, la fourchette des loyers peut exceptionnellement être dépassée si la surface brute locative des pièces est importante.

47.         Selon les constatations du département, les pièces des logements ont en général une surface locative brute moyenne entre 18 et 20 m2 environ. Dans ces cas, la surface brute locative n'est pas considérée comme importante. La doctrine en a déduit que la surface brute locative était donc importante lorsqu'elle était supérieure à 20 m2 (Emmanuelle GAIDE/Valérie DÉFAGO GAUDIN, op. cit. p. 303).

48.         Dans un arrêt du 15 novembre 2005 (ATA/765/2005 consid. 7d), la chambre administrative n'a admis les dépassements du plafond LDTR que lorsque la pièce moyenne mesurait autour de 24 m2 et plus.

Dans un arrêt ATA/391/2013 du 25 juin 2013, consid. 14, la chambre administrative a admis que les surfaces de plancher du séjour (29,4 m2) et de la salle-à-manger (22,3 m2) de l'appartement dont la construction était envisagée pouvaient être considérées comme importantes et justifier une augmentation du loyer maximum autorisée par l'art. 9 al. 3 LDTR, en application de l'art. 9 al. 4 LDTR.

49.         En l'espèce, il n'apparait pas que le département aurait excédé son large pouvoir d'appréciation en considérant que la surface brute locative de l'appartement de 51,86 m2 - qu'on la divise par le quotient de 2.5 ou de 3.5 - n'est pas importante au point d'admettre l'exception prévue par l'art. 9 al. 4 LDTR, les surfaces obtenues (20,74 respectivement 14,8) se révélant inférieures à celles retenues par la jurisprudence.

Ce grief doit être rejeté et c'est à juste titre que l'OCLPF a fixé le loyer maximum à CHF 3'405.- par pièce par année pour une durée de trois ans.

50.         La recourante conteste l’ordre qui lui a été fait d’établir un nouvel avis de fixation de loyer initial (formule officielle).

51.         Celui qui contrevient aux dispositions de LDTR est passible des mesures et des sanctions administratives prévues par les art. 129 à 139 LCI et des peines plus élevées prévues par le code pénal suisse, du 21 décembre 1937 (art. 44 al. 1 LDTR).

52.         Parmi les mesures administratives à disposition de l’autorité compétente figure l’ordre de remise en conformité (art. 129 let. e LCI). L’objectif d’une telle mesure est de rétablir une situation conforme au droit (ATA/185/2021 précité consid. 5f).

Selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, une mesure visant les loyers, notamment le remboursement du trop-perçu de loyer et l'établissement d'un nouveau bail conforme aux conditions de l'autorisation de construire accordée, constitue une forme de remise en état au sens de l'art. 129 let. e LCI (ATA/185/2021 précité consid. 5f et les arrêts cités ; ATA/531/2012 du 21 août 2012 consid. 7b confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_496/2012 du 12 février 2013).

Le Tribunal fédéral a confirmé la conformité au droit de la jurisprudence précitée. Selon lui, une telle extension jurisprudentielle ne heurte pas le principe de la légalité, dès lors qu'il suffit, pour respecter les exigences qui en découlent, que l'obligation inexécutée ait elle-même une base légale, sans que l'intervention pour le rétablissement de la situation antérieure, qui aurait dû être maintenue si l'administré avait respecté ses devoirs, doive elle-même être expressément mentionnée dans la loi (ATF 111 Ib 213 consid. 6c p. 226; 105 Ib 272 consid. 1c p. 276 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.55/2000 du 13 avril 2000 et les références citées).

La répétition de l'indu (art. 63 al. 1 CO par analogie) fait par ailleurs partie des principes généraux du droit administratif, applicable sans base légale expresse. Dès lors, la restitution de loyers perçus en trop ordonnée par le département ne viole pas le principe de la légalité (arrêt du Tribunal fédéral 1C_250/2010 du 26 août 2010 consid. 3.2 et la référence).

Dans la mesure où l'art. 12 LDTR institue un contrôle des loyers après l'exécution des travaux de rénovation, l'obligation faite au propriétaire sous cet aspect inclut celle d'inscrire, dans le contrat de bail concerné, le montant du loyer fixé dans l'autorisation de rénover pendant le contrôle et de rectifier un bail à loyer qui s'en écarterait (arrêts du Tribunal fédéral 1C_184/2013 du 8 janvier 2014 consid. 2.1 ; 1C_496/2012 du 12 février 2013 consid. 3.2.1 ; ATA/260/2014 du 15 avril 2014 consid. 11a et les autres arrêts cités).

Le blocage du loyer peut porter rétroactivement sur la période entre la fin des travaux exécutés illicitement et, en soi, l'entrée en force de l'autorisation de construire obtenue après coup, avec obligation de rembourser le trop-perçu au locataire (ATA/185/2021 précité consid. 5g et la référence citée).

S'agissant des locataires ayant déjà quitté l'appartement incriminé et qui ont versé un loyer supérieur à celui bloqué après coup, il n'y a pas lieu d'imposer au propriétaire d'établir un nouveau bail corrigé. En revanche, le département est en droit d'ordonner au propriétaire de rembourser le trop-perçu de loyer à ces locataires, l'obligation de restituer le loyer ne valant que pour la durée du contrôle étatique instaurée par la LDTR (ATA/185/2021 précité consid. 5g et les références citées).

La chambre administrative considère que, s'il ne peut être ordonné au bailleur d'établir un nouveau contrat de bail corrigé pour des locataires ayant quitté le logement, la solution est autre s'agissant de la formule de fixation du loyer initial. Celle-ci est nécessaire lors de l'établissement de tout nouveau bail ou de toute modification du montant du loyer. Dès lors qu'elle résulte d'un acte unilatéral du bailleur, le départ des locataires concernés n'empêche aucunement celui-ci d'établir une nouvelle formule, document essentiel puisqu'à même de documenter l'augmentation du loyer de l'appartement en question. La notification, selon les règles du droit du bail, d'une nouvelle formule indiquant le loyer fixé pendant trois ans selon la décision litigieuse est une mesure nécessaire pour le rétablissement d'une situation conforme au droit au sens de l'art. 129 let. e LCI (ATA/185/2021 précité consid. 5g ; ATA/1343/2020 du 22 décembre 2020 consid. 3f et 4).

53.         En l'occurrence, il est établi que les travaux litigieux étaient soumis à autorisation et que le loyer aurait dû être bloqué en conséquence pendant une période de trois ans après leur exécution.

L'ordre adressé à la recourante d'établir un nouvel avis de fixation du loyer initial et de rembourser le trop-perçu aux anciens locataires est fondé sur ce constat et a pour objectif de rétablir une situation conforme au droit. Au vu de la jurisprudence précitée, cette double mesure, qui découle par ailleurs des art. 10 al. 1, 12 et 14 al. 1 LDTR et du principe général de la répétition de l'indu, est en tous points conforme.

Le grief sera ainsi écarté.

54.         La recourante conteste l'amende de CHF 3'900.- infligée par le DT, dès lors qu'elle n'aurait commis aucune infraction. En outre, la décision n'était pas motivée et le département aurait dû renoncer à prononcer l'amende compte tenu des circonstances dans lesquelles elle avait entrepris les travaux, à savoir une situation d'urgence, au vu des canalisations bouchées.

55.         Selon l'art. 137 LCI, en relation avec l'art. 44 al. 1 LDTR, est passible d'une amende administrative de CHF 100.- à CHF 150'000.- tout contrevenant à la LCI et LDTR (al. 1). Le montant maximum de l'amende est de CHF 20'000.- lorsqu'une construction, une installation ou tout autre ouvrage a été entrepris sans autorisation mais que les travaux sont conformes aux prescriptions légales (al. 2). Il est tenu compte, dans la fixation du montant de l'amende, du degré de gravité de l'infraction ; constituent notamment des circonstances aggravantes la violation des prescriptions susmentionnées par cupidité, les cas de récidive et l'établissement, par le mandataire professionnellement qualifié, d'une attestation, au sens de l'art. 7 LCI, non conforme à la réalité (al. 3). Si l'infraction a été commise dans la gestion d'une personne morale, d'une société en commandite, d'une société en nom collectif ou d'une entreprise à raison individuelle, les sanctions sont applicables aux personnes qui ont agi ou auraient dû agir en son nom, la personne morale, la société ou le propriétaire de l'entreprise individuelle répondant solidairement des amendes. Les sanctions sont applicables directement aux sociétés ou entreprises précitées lorsqu'il n'apparaît pas de prime abord quelles sont les personnes responsables (al. 4). La poursuite et la sanction administrative se prescrivent par sept ans (al. 5).

56.         Les amendes administratives prévues par les législations cantonales sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des contraventions pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. La quotité de la sanction administrative doit ainsi être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/174/2023 du 28 février 2023 consid. 2.1.3 et les arrêts cités).

57.         En vertu de l’art. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 (LPG – E 4 05), les dispositions de la partie générale du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) s’appliquent à titre de droit cantonal supplétif. On doit cependant réserver celles qui concernent exclusivement le juge pénal (ATA/440/2019 du 16 avril 2019 ; ATA/19/2018 du 9 janvier 2018). Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût-ce sous la forme d’une simple négligence (cf. not. ATA/559/2021 précité consid. 7d ; ATA/206 2020 du 25 février 2020 consid. 4b ; ATA/13/2020 du 7 janvier 2020 consid. 7c et les références citées). Selon la jurisprudence constante, l’administration doit faire preuve de sévérité afin d’assurer le respect de la loi (ATA/174/2023 précité consid. 2.1.4 et les arrêts cités).

58.         L’autorité qui prononce une mesure administrative ayant le caractère d’une sanction doit également faire application des règles contenues aux art. 47 ss CP (principes applicables à la fixation de la peine), soit tenir compte de la culpabilité de l’auteur et prendre en considération, notamment, les antécédents et la situation personnelle de ce dernier (art. 47 al. 1 CP). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (art. 47 al. 2 CP ; ATA/174/2023 précité consid. 2.1.5 et les arrêts cités).

59.         Selon l'art. 13 CP, quiconque agit sous l'influence d'une appréciation erronée des faits est jugé d'après cette appréciation si elle lui est favorable (al. 1). Quiconque pouvait éviter l'erreur en usant des précautions voulues est punissable pour négligence si la loi réprime son acte comme infraction par négligence (al. 2). Agit sous l'emprise d'une erreur sur les faits celui qui n'a pas connaissance ou qui se base sur une appréciation erronée d'un élément constitutif d'une infraction pénale (ATF 129 IV 238 consid. 3.1 p. 240). L'erreur ne peut conduire à un acquittement que si elle est excusable (Michel DUPUIS/Bernard GELLER/Gilles MONNIER/ Laurent MOREILLON/Christophe PIGUET/Christian BETTEX/Daniel STOLL [éds], Code pénal - Petit commentaire, 2e éd., n. 18 ad art. 13).

60.         Selon l’art. 21 CP, intitulé « erreur sur l’illicéité », quiconque ne sait ni ne peut savoir au moment d'agir que son comportement est illicite n'agit pas de manière coupable. Le juge atténue la peine si l'erreur était évitable. Cette disposition implique que l'auteur ait cru à tort que son comportement était licite parce qu'il ignorait que l'acte qu'il commettait était interdit ou punissable et, en outre, qu'il avait eu des raisons suffisantes de se croire en droit d'agir. La réglementation de l'erreur sur l’illicéité est stricte. Elle repose sur l'idée que le sujet de droit doit faire l'effort d'acquérir la connaissance des lois et que son ignorance ne l'absout que dans des circonstances particulières (ATF 129 IV 238 consid. 3.1). Selon la jurisprudence, cette erreur est admise à la double condition que l'auteur a agi en se croyant être en droit de le faire et qu'il avait des « raisons suffisantes » de se tromper. Pour exclure l'erreur, il suffit que l'auteur ait eu le sentiment de faire quelque chose de contraire à ce qui se doit (ATF 104 IV 217 consid. 2) ou qu'il eût dû avoir ce sentiment. Il en va de même s'il a été expressément informé de la situation juridique par l'autorité compétente ou qu'il en a éludé les prescriptions. Lorsque le doute est permis quant à la légalité du comportement, l'auteur doit, dans la règle, s'informer de manière plus précise auprès de l'autorité compétente (ATF 129 IV 6 consid. 4.1 et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 6A.54/2006 du 13 février 2007).

61.         Le département jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour fixer la quotité de l’amende. L'instance de recours ne le censure qu’en cas d’excès ou d’abus. Sont pris en considération la nature, la gravité et la fréquence des infractions commises dans le respect du principe de proportionnalité (art. 5 al. 2 Cst. ; ATA/174/2023 du précité consid. 2.1.8 et les arrêts cités).

62.         Doivent être notamment prises en compte au titre de circonstances aggravantes la qualité de mandataire professionnellement qualifié ainsi que celle de professionnel de l'immobilier des recourants (arrêt du Tribunal fédéral 1C_209/2020 du 16 octobre 2020 consid. 2.3.2 ; ATA/706/2022 du 5 juillet 2022 consid. 5 et les références citées), le fait de mettre l'autorité devant le fait accompli (ATA/174/2023 du 28 février 2023 consid. 2.2.1 et les références citées), le fait d’avoir agi par cupidité, la récidive ainsi que le nombre élevé ou la proportion importante des appartements ou immeubles concernés par la violation de la LDTR. Au titre de circonstances atténuantes, doivent être prises en compte notamment l’absence de volonté délictuelle, une violation de la LDTR sur un appartement ou un immeuble isolé seulement et le fait qu’une réaffectation en logement soit aisée. Il doit être tenu compte de la capacité financière de la personne sanctionnée (ATA/174/2023 précité consid. 2.1.9 et les références citées).

Si les antécédents constituent une circonstance aggravante, l’absence d’antécédents est une circonstance neutre qui n’a pas l’effet de minorer la sanction (ATA/174/2023 précité consid. 2.2.2).

63.         En l'espèce, la recourante a exécuté les travaux en cause sans être au bénéfice d'une autorisation, alors que ceux-ci étaient assujettis à la LCI et à la LDTR. Un tel comportement, contraire aux art. 1 al. 1 let. b LCI et 9 LDTR, constitue une infraction réprimée par les art. 137 al. 1 let. a LCI et 44 al. 1 LDTR et peut donc donner lieu au prononcé d'une amende.

La recourante ne saurait raisonnablement se prévaloir du fait qu'elle pouvait, sans requérir d'autorisation, exécuter les travaux en cause, dans la mesure où, selon sa propre appréciation, il s'agissait de simples travaux d'entretien non soumis à la LDTR. Elle ne peut non plus se prévaloir d'aucune urgence, celle-ci n'étant au demeurant pas démontrée. La régie qui la représente ne pouvait ignorer, en tant que professionnelle de l'immobilier, que la distinction entre travaux d'entretien et travaux de transformation est toujours délicate à opérer, ni que l'autorité intimée pouvait appliquer un blocage rétroactif des loyers, découlant de la loi et prévu expressément par la jurisprudence. En usant des précautions voulues, soit en se renseignant auprès du département, elle aurait pu éviter de commettre les infractions reprochées. Dès lors, son erreur était manifestement évitable, même à considérer qu'elle était persuadée que les travaux n'étaient pas soumis à autorisation. Au vu de ce qui précède, la recourante a, à tout le moins, agi par négligence et ainsi commis une faute. On ne saurait retenir qu'elle a agi en fonction d'une appréciation erronée des faits. Une erreur sur l'illicéité est tout autant exclue.

L’amende, qui inclut l'infraction à la LCI et à la LDTR, est en conséquence fondée dans son principe.

64.         En ce qui concerne son montant, le département l'a fixé à CHF 3'900.-.

Il doit être admis que la décision querellée ne mentionne pas les éléments qui ont été pris en compte dans la fixation du montant dans l'amende, ni a fortiori comment ils ont été pondérés, ce qui est regrettable, une motivation permettant d'apprécier au mieux le raisonnement du département.

Concernant sa quotité qui n'est pas contesté en soit, sa quotité reste tout à fait modeste au regard du montant maximum possible de CHF 20'000.- prévu par la loi (art. 137 al. 2 LCI) et du comportement adopté par la recourante. Il sera au surplus relevé que les travaux ont été entrepris sans autorisation et que la recourante a en outre fixé et perçu des loyers contraires à la LDTR. Objectivement, l’infraction est grave. En agissant comme elle l’a fait, elle s'est purement et simplement affranchie de ses obligations légales relevant de la LCI et de la LDTR, mettant ainsi l’autorité devant le fait accompli, étant en particulier rappelé que la politique mise en œuvre par la LDTR, notamment par la procédure d'autorisation commandée par ses art. 3 et 9, procède d'un intérêt public important.

Au surplus, aucun élément au dossier ne laisse à penser que le paiement de l’amende occasionnerait à la recourante, des difficultés financières particulières (ATA/440/2019 précité ; ATA/886/2014 du 11 novembre 2014), ce qu’elle n’allègue au demeurant pas.

65.         En conclusion, le recours interjeté à l’encontre de l'APA/2______/1 du _______ 2023 sera rejeté ainsi que celui à l’encontre de la décision du _______ 2023.

66.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe, est condamnée au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 2’000.- ; il est partiellement couvert par les avances de frais versées à la suite du dépôt des recours.

67.         Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée à la recourante (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 25 septembre 2023 par A______ SA contre la décision du département du territoire du _______ 2023 (APA/2______/1) ;

2.             le rejette ;

3.             déclare recevable le recours interjeté le 4 octobre 2023 par A______ SA contre la décision du département du territoire du _______ 2023 ;

4.             le rejette ;

5.             met à la charge de la recourante, un émolument de CHF 2'000.-, lequel est partiellement couvert par les avances de frais ;

6.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

7.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Caroline DEL GAUDIO-SIEGRIST, présidente, Suzanne AUBERT-LEBET, Thierry ESTOPPEY, François HILTBRAND et Diane SCHASCA, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Caroline DEL GAUDIO-SIEGRIST

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière