Aller au contenu principal

Décisions | Tribunal administratif de première instance

1 resultats
A/1597/2023

JTAPI/104/2024 du 08.02.2024 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : ERREUR;PISCINE;ABUS DE DROIT;PRINCIPE DE LA BONNE FOI
Normes : LPA.60; RCI.3.al3
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1597/2023 LCI

JTAPI/104/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 8 février 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Laurent STRAWSON, avocat, avec élection de domicile

 

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

B______ SA, représentée par Me François BELLANGER, avocat, avec élection de domicile

Monsieur C______ et Madame D______


EN FAIT

1.             Madame D______ et Monsieur C______ sont propriétaires de la parcelle n° 1______ de la commune de E______ (ci-après: la commune) à l'adresse ______[GE].

Monsieur A______ est propriétaire de la parcelle n° 2______ de la commune, à l'adresse ______[GE].

2.             Le 12 septembre 2022, la B______ SA (ci-après: B______) a déposé une demande d'autorisation de construire portant sur la construction de deux villas contiguës et d'une villa individuelle (30% THPE), avec la création de couverts à voitures, d'une véranda et d'une piscine sur la parcelle n° 1______. Cette demande a été enregistrée sous la référence APA 3______.

La parcelle n° 1______, d'une surface de 1'886 m2, doit faire l'objet d'une division parcellaire pour devenir les parcelles nos 4______, d'une surface de 1'129 m2 (accueillant les deux villas contiguës), et 5______, d'une surface de 756.65 m2 (accueillant la maison individuelle).

3.             Lors de son instruction, plusieurs instances de préavis ont été consultées, notamment:

-                 le 17 janvier 2023, la direction des autorisations de construire (ci-après: DAC) après avoir requis la poursuite de l'instruction, notamment en lien avec les constructions de peu d'importance (ci-après: CDPI), a émis un préavis favorable, sans observation ;

-                 le 18 janvier 2023, l'office cantonal des transports (ci-après: OCT) a préavisé favorablement le projet, sous conditions ;

-                 le 23 janvier 2023, après avoir requis des modifications du projet en lien avec les canalisations et la localisation des poubelles, la commune a émis un préavis favorable, sans observation ;

-                 le 8 mars 2023, la commission d'architecture (ci-après: CA), après avoir sollicité des modifications du projet au niveau de la pleine terre et des mouvements de terrain, a rendu un préavis favorable, sans observation.

4.             Par acte du 17 mars 2023, les propriétaires actuels de la parcelle n° 1______ se sont engagés à inscrire une restriction de droit public au registre foncier allouant une surface de 71 m2 à la parcelle n° 5______ pour le calcul du rapport des surfaces afférents à l'APA 3______.

5.             Le 23 mars 2023, le département a délivré l'autorisation de construire sollicitée, laquelle a été publiée dans la Feuille d'avis officielle (ci-après: FAO) du même jour.

6.             Par acte du 8 mai 2023, sous la plume de son conseil, M. A______ (ci-après: le recourant) a formé recours contre la décision précitée auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après: le tribunal) concluant à son annulation, sous suite de frais et dépens.

Le calcul du rapport de surfaces était erroné s'agissant de la prise en compte des CDPI. La piscine, d'une surface de 28.5 m2, aurait dû être comptabilisée en tant que CDPI. En l'ajoutant à l'ensemble de ces constructions projetées sur la future parcelle n° 5______, la surface totale de celles-ci serait en réalité de 68.85 m2, ce qui dépassait la surface admissible maximale à hauteur de 8.32 m2 selon la réglementation en vigueur (8% de 756.65 m2).

Il existait des divergences entre les plans du géomètre et les plans de l'architecte. En effet, ces derniers indiquaient que la villa A et les CDPI seraient plus en retrait de 70 cm contrairement à ce qui était mentionné sur les plans de géomètre.

À l'appui de son recours, le recourant a notamment produit une copie des plans du géomètre sur lesquels les incohérences étaient mises en évidence.

7.             Le 14 août 2023, le département a transmis ses observations, accompagnées de son dossier et de nouveaux plans de géomètre visés ne varietur le 11 août 2023. Il a conclu à ce que le tribunal prenne en considération lesdits plans en lieu et place de ceux visés ne varietur le 23 mars 2023 ainsi qu'au rejet du recours.

Ce qui caractérisait les CDPI était le fait qu'il s'agissait de constructions hors sol, présentant un certain gabarit, soit un certain volume en surface, ce qui n'était pas le cas des piscines. Cette construction n'était ainsi pas à prendre en compte dans le calcul des CDPI.

Suite au dépôt du recours, il avait effectivement constaté des irrégularités entre les plans du géomètre et ceux de l'architecte, le premier n'ayant pas correctement côté ses plans. Il avait dès lors sollicité de la requérante la production de nouveaux plans de géomètre, avant de les valider. Les critiques de la recourante étaient ainsi justifiées, mais sur la base du principe d'économie de la procédure, le tribunal pouvait prendre en considération les nouveaux plans produits en lieu et place de ceux visés ne varietur le 23 mars 2023.

8.             Le 18 août 2023, sous la plume de son conseil, B______ a transmis ses observations, concluant au rejet du recours.

Le recours paraissait manifestement abusif, dès lors que celui-ci était motivé sommairement et ne contenait pas les bases légales prétendument violées, ce que le tribunal devait prendre en compte pour fixer le montant des frais et dépens. En outre, la qualité pour recourir du recourant était douteuse.

Vu la jurisprudence récente, la piscine n'étant pas couverte, il ne s'agissait pas d'une CDPI, de sorte qu'elle ne devait pas être prise en considération dans le calcul de ces constructions.

Les prétendues divergences invoquées par le recourant n'étaient pas basées sur la violation de normes légales, de sorte que son grief devait être déclaré irrecevable. En tout état, il n'y avait aucune différence s'agissant de l'implantation du bâtiment. La différence se situait uniquement au niveau des distances d'alignement, ce qui avait été corrigé dans l'intervalle vu les plans de géomètre révisés. Il s'agissait ainsi d'une modification purement technique et mineure apportée aux plans après le dépôt du recours et qui ne touchait pas à la substance du projet. En outre, l'OCT, soit l'instance compétente en matière d'alignement à la route, s'était prononcée favorablement au projet, sans émettre de réserves à ce sujet.

9.             Invité à formuler sa réplique, le recourant n'y a pas donné suite dans le délai imparti.

10.         Le détail des écritures et des pièces produites sera repris dans la partie « En droit » en tant que de besoin.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             L'intimée émet cependant des doutes quant à la qualité pour recourir du recourant.

4.             La qualité pour recourir est reconnue à toute personne atteinte par la décision attaquée et qui dispose d’un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (art. 60 let. b LPA).

Le recourant doit se trouver dans une relation spéciale, étroite et digne d’être prise en considération avec l’objet de la contestation et retirer un avantage pratique de l’annulation ou de la modification de la décision attaquée, qui permette d’admettre qu’il est touché dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l’intérêt général, de manière à exclure l’action populaire. Cet intérêt digne de protection ne doit pas nécessairement être de nature juridique, un intérêt de fait étant suffisant (ATF 144 I 43 consid. 2.1 ; 143 II 506 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_206/2019 du 6 août 2019 consid. 3.1). Un recours dont le seul but est de garantir l’application correcte du droit demeure irrecevable, parce qu’assimilable à l’action populaire (ATF 144 I 43 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_98/ 2023 du 14 juin 2023 consid. 6.3 ; ATA/665/2023 du 20 juin 2023 consid. 5.3).

5.             En matière de droit des constructions, le voisin direct de la construction ou de l’installation litigieuse a en principe la qualité pour recourir (ATF 139 II 499 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_164/2019 du 20 janvier 2021 consid. 1). Les intérêts d’un voisin peuvent être lésés de façon directe et spéciale aussi en l’absence de voisinage direct, lorsqu’une distance relativement faible sépare l’immeuble des recourants de l’installation litigieuse (ATF 121 II 171 consid. 2b). La qualité pour recourir a ainsi été admise pour des distances variant entre 25 et 150 m (ATA/1218/2015 du 10 novembre 2015 consid. 2c et les références citées).

La proximité avec l’objet du litige ne suffit cependant pas à elle seule à conférer au voisin la qualité pour recourir contre la délivrance d’une autorisation de construire. Les tiers doivent en outre retirer un avantage pratique de l’annulation ou de la modification de la décision contestée, qui permette d’admettre qu’ils sont touchés dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l’intérêt général des autres habitants de la collectivité concernée (ATF 139 II 499 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_727/2016 du 17 juillet 2017 consid. 4.2.3 ; ATA/17/2023 du 10 janvier 2023 consid. 11b). Le recourant doit rendre vraisemblables les nuisances qu’il allègue et sur la réalisation desquelles il fonde une relation spéciale et étroite avec l’objet de la contestation (ATF 125 I 173 consid. 1b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_469/2014 du 24 avril 2015 consid. 2.2 ; 1C_453/ 2014 du 23 février 2015 consid. 4.2 et 4.3).

6.             En l'espèce, le recourant est propriétaire de la parcelle directement voisine de celle sur laquelle porte l'autorisation de construire litigieuse, de sorte qu'il dispose a priori de la qualité pour recourir.

En outre, il se prévaut de la violation des normes relatives au calcul des CDPI ainsi que de la cohérence des plans produits dans le cadre de l'instruction. À cet égard, bien que le recourant ne précise pas la base légale sur laquelle il fonde son second grief, il convient de prendre en compte que le département a expressément admis l'existence des incohérences repérées par le recourant, de sorte que le grief ne saurait être déclaré irrecevable pour ce seul motif, sauf à faire preuve de formalisme excessif. Par ailleurs, il convient de garder à l'esprit que l'art. 10B al. 2 let. a et b du règlement d’application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RCI – L 5 05.01) exige notamment la production de plans de géomètre côtés et conformes. Partant, il convient d'admettre que le recourant se prévaut de griefs basés sur le droit des constructions, susceptibles d'exercer une influence sur sa situation concrète, de sorte que sa qualité pour recourir doit être admise.

7.             En préambule, le département sollicite du tribunal qu'il prenne en considération les plans de géomètre visés ne varietur le 11 août 2023 et non ceux visés ne varietur le 23 mars 2023.

8.             Le tribunal de céans a déjà jugé qu'une modification purement technique et mineure apportée aux plans après le dépôt du recours et qui ne touche pas à la substance du projet n'exige pas le dépôt d'une nouvelle demande ni d'être publiée. La validation du projet modifié dans le cadre de l'attestation globale de conformité peut être conforme au principe d'économie de procédure et ne pas violer le droit d'être entendu si les parties ont eu la possibilité de s'exprimer au sujet de la modification du projet avant que le tribunal ne rende son jugement (cf. p. ex JTAPI/361/2023 du 29 mars 2023 consid. 34 ; JTAPI/700/2020 du 26 août 2020 consid. 13 et les références citées).

9.             En l'espèce, aucune des parties ne conteste l'existence de divergences entre les plans d'architecte et ceux du géomètre produit dans le cadre de l'instruction. À l'appui de son recours, le recourant a identifié ces irrégularités lesquelles portent essentiellement sur l'alignement des villas contiguës par rapport à la route de F______ et consiste en une divergence de l'ordre de 70 cm entre ces plans.

Or, après le dépôt du recours, le département a exigé de la requérante la production de nouveaux plans de géomètre corrigés, ce qu'elle a fait. Ces plans ont ensuite été visés ne varietur par le département en date du 11 août 2023 et transmis au tribunal à l'appui des observations de l'autorité intimée.

Force est de constater que si l'existence de divergences entre les plans d'architecte et ceux du géomètre est incontestable, celles-ci ne sont que d'une portée mineure et ne modifie en rien la substance du projet autorisé, notamment en terme d'implantation, d'architecture ou de volumétrie. De plus, il convient de garder à l'esprit que seuls les plans de géomètre ont été modifié après coup, sans que les autres éléments du projet n'aient été modifiés. En outre, dans le cadre de la présente procédure, le recourant s'est vu offert la possibilité de se déterminer sur les nouveaux plans produits, ce qu'il n'a pas fait. À ce stade, un renvoi du dossier au département pour ce seul motif contreviendrait au principe de l'économie de procédure, qui commande à l'autorité de mener la procédure de la manière la plus raisonnable possible, en évitant des pertes de temps inutiles, des actes sans portée réelle, ou en facilitant le cheminement ordonné des opérations (Pierre MOOR/Etienne POLTIER, Droit administratif, vol. II, 3ème éd., 2011, n. 2.2.4.7 p. 264 s ; ATF 133 II 257 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_84/2012 du 15 décembre 2012 consid. 3.3.4, non publié in ATF 139 IV 137 ; ATA/414/2017 consid. 4c précité).

Au vu de ce qui précède, par économie de procédure, le tribunal de céans donnera acte aux parties que les plans de géomètre à prendre en considération pour examiner la conformité du projet sont ceux visés ne varietur le 11 août 2023.

Sur cette base, le grief relatif aux divergences entre les plans d'architecte et ceux de géomètre est manifestement devenu sans objet.

10.         Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3). Elle doit en outre en outre utiliser sa marge de manœuvre conformément à ses devoirs en tenant compte du but de la loi, afin de servir au mieux l'intérêt public (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème édition, 2018, p. 179 n. 513).

11.         Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n’ont qu’un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l’autorité reste ainsi libre de s’en écarter pour des motifs pertinents et en raison d’un intérêt public supérieur. Toutefois, lorsqu’un préavis est obligatoire, il a un poids certain dans l’appréciation qu’est amenée à effectuer l’autorité de recours et il convient de ne pas le minimiser (ATA/448/2021 du 27 avril 2021 consid. 6a et les références citées). Cependant, ce poids n'oblige jamais l'administration à les suivre, pour autant qu'elle ait des motifs d'agir ainsi. De plus, lorsque deux préavis obligatoires sont opposés, aucun d'entre eux n'a une prééminence automatique sur le second. Il appartient à l'autorité d'en apprécier globalement les motifs avant de rendre sa décision (ATA/724/2020 du 4 août 2020 consid. 3f).

Selon une jurisprudence bien établie, la juridiction de recours observe une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des commissions de préavis, pour autant que l’autorité inférieure suive l’avis de celles-ci. Elles se limite à examiner si le département ne s'est pas écarté sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/896/2021 du 31 août 2021 consid. 4d ; ATA/155/2021 du 9 février 2021 consid. 7c et 10e ; ATA/1311/2020 du 15 décembre 2020 consid. 7d ; ATA/724/2020 du 4 août 2020 consid. 3e ; ATA/1098/2019 du 25 juin 2019 consid. 2e).

12.         Le recourant prétend que la surface de la piscine aurait dû être prise en compte dans le calcul des CDPI.

13.         La LCI ne donne aucune définition des CDPI. Ces dernières y sont toutefois mentionnées dans diverses dispositions, notamment à l’art. 3 al. 7 let. c LCI qui prévoit qu’elles peuvent être soumises à la procédure accélérée d’autorisation de construire ; à l’art. 43 LCI pour indiquer qu’elles peuvent être édifiée en limite de propriété ou à une distance inférieure à celle prévue pour les distances aux limites de propriétés, dans les conditions fixées par le règlement d’application (même principe à l’art. 68 pour la zone 5 et à l’art. 81 al. 2 LCI pour les zones industrielles, artisanales ou ferroviaires) ; dans la définition de constructions en ordre contigu : est réputée en ordre contigu, l’édification de deux maisons au moins, réunies par un mur mitoyen ou par une CDPI et disposant chacune de son propre accès de plain-pied (art. 58 al. 2 LCI) ; en zone 5, dans la disposition qui fixe les différents rapports de surfaces des constructions hors sol, la LCI prévoit que les CDPI ne sont pas prises en considération pour ce calcul (art. 59 al. 7 LCI) mais en principe dans celui du calcul du rapport des surfaces de sous-sol (art. 59 al. 8 LCI), le département pouvant toutefois admettre une surface de sous-sol non comprise dans le calcul du rapport des surfaces, si la construction de garages au sous-sol permet de renoncer à l’édification de CDPI à destination de garages en surface (art. 59 al. 9 LCI).

14.         La définition des CDPI se trouve dans le RCI comme indiqué précédemment. Selon son art. 3 al. 3, sont réputées constructions de peu d’importance, à la condition qu’elles ne servent ni à l’habitation, ni à l’exercice d’une activité commerciale, industrielle ou artisanale, celles dont la surface n’excède pas 50 m2 et qui s’inscrivent dans un gabarit limité par :

a) une ligne verticale dont la hauteur n’excède pas 2,50 m ;

b) une ligne oblique faisant avec l’horizontale partant du sommet de la ligne verticale un angle de 30° ;

c) une ligne horizontale de faîtage située à 4,50 m du sol au maximum.

La même disposition prévoit encore que dans le cadre d’un projet de construction en ordre contigu ou sous forme d’habitat groupé, et afin d’améliorer l’insertion dans le site et pour autant qu’il n’en résulte pas de gêne pour le voisinage, le département peut autoriser, après consultation de la commission d’architecture, des constructions de peu d’importance groupées d’une surface de plus de 50 m2 au total. Dans tous les cas, la surface totale des constructions de peu d’importance ne doit pas excéder 8% de la surface de la parcelle et au maximum 100 m2 (art. 3 al. 3 RCI ; ATA/318/2017 du 21 mars 2017 ; ATA/284/2016 du 5 avril 2016 ; ATA/1345/2015 du 15 décembre 2015), ces seuils constituant des conditions cumulatives (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_641/2012 du 30 avril 2013 consid. 3.3).

15.         Les CDPI font l’objet d’une directive du département du 3 février 2014, modifiée d’abord le 10 mars 2017 sous le numéro 024-v5, puis le 9 mars 2021 sous le numéro 024-v7 (ci-après : la directive CDPI). Cette dernière version comporte quelques ajouts issus de la jurisprudence (ATA/805/2020 du 25 août 2020 ; ATA/1300/2019 du 27 août 2019 consid. 4e et les arrêts cités : pour le calcul relatif aux balcons/terrasses), mais ne change pas le contenu de la version antérieure.

S’agissant des types de construction considérée comme CDPI, la directive cite les garages, ateliers non professionnel, couverts à voitures, couverts de plaisance, couverts à bois, abris ou cabanes de jardin et pool-house.

16.         La chambre administrative se fonde, de jurisprudence constante, sur la directive CDPI pour déterminer les surfaces à prendre en compte à ce titre, (ATA/93/2021 du 26 janvier 2021 consid. 9d et 10 ; ATA/1104/2020 du 3 novembre 2020 consid. 3d et 4).

17.         Les directives n’ont pas force de loi et ne lient ni les administrés, ni les tribunaux, ni même l’administration. Elles ne dispensent pas cette dernière de se prononcer à la lumière des circonstances concrètes du cas d’espèce. Par ailleurs, elles ne peuvent sortir du cadre fixé par la norme supérieure qu’elles sont censées concrétiser. En d’autres termes, à défaut de lacune, elles ne peuvent prévoir autre chose que ce qui découle de la législation ou de la jurisprudence (ATF 141 II 338 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_522/ 2012 du 28 décembre 2012 consid. 2.3). Le juge peut toutefois en tenir compte lorsqu’elles permettent une application correcte des normes légales dans un cas concret (cf. ATA/25/2022 du 11 janvier 2022 consid. 3g).

18.         Dans le cadre de l’application de l’art. 3 al. 3 RCI, la jurisprudence a déjà été amenée à préciser que les surfaces déterminantes étaient celles de l’emprise au sol d’une construction (ATA/927/2021 du 7 septembre 2021 consid. 3b et les références citées).

19.         Dans un arrêt du 9 mai 2023, le Tribunal fédéral a confirmé la jurisprudence de la chambre administrative (ATA/437/2023 précité consid. 6 ; ATA/791/2022 du 9 août 2022), selon laquelle une piscine extérieure non couverte, quelle que soit sa surface, est exclue du champ d'application de l'art. 3 al. 3 RCI et n’entre en conséquence pas dans le calcul des CDPI (arrêt du Tribunal fédéral 1C_494/2022).

20.         En l'espèce, il ressort manifestement de la jurisprudence précitée qu'une piscine extérieure non couverte, comme c'est le cas en l'espèce, peu importe sa dimension, n'est pas à prendre en compte dans le calcul des CDPI, de sorte que le tribunal de céans ne saurait retenir une quelconque violation du droit à ce sujet. Au surplus, aucun autre élément ne permet de douter du calcul de la surface des CDPI effectué par la requérante. En particulier, la DAC a émis un préavis favorable, sans observation, après avoir requis des modifications du projet notamment en lien avec les CDPI. Cette question a ainsi été manifestement examinée de manière détaillée par l'instance compétence, sans qu'elle n'émette de remarques à ce sujet, et sans qu'aucun élément du dossier ne permette de douter que l'examen de cette instance n'ait pas été effectué de manière objective et conforme aux buts poursuivis par la loi. Le grief est ainsi écarté.

21.         Enfin, l'intimée est d'avis que le dépôt du recours constituerait un abus de droit, ce qui devrait avoir une influence sur la fixation des frais et dépens.

22.         Valant pour l’ensemble de l’activité étatique, le principe de la bonne foi, exprimé aux art. 9 et 5 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst - RS 101), exige que l’administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale (ATF 138 I 49 consid. 8.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_341/2019 du 24 août 2020 consid. 7.1).

L’abus de droit consiste notamment à utiliser une institution juridique à des fins étrangères au but même de la disposition légale qui la consacre, de telle sorte que l’écart entre le droit exercé et l’intérêt qu’il est censé protéger soit manifeste (ATF 138 III 401 consid. 2.2 ; 137 III 625 consid. 4.3 ; 135 III 162 consid. 3.3.1).

Ce principe lie également les administrés. Ceux-ci ne doivent pas abuser d’une faculté que leur confère la loi en l’utilisant à des fins pour lesquelles elle n’a pas été prévue. Ce faisant, ils ne violent certes pas la loi, mais ils s’en servent pour atteindre un but qui n’est pas digne de protection (ATA/500/2011 du 27 juillet 2011 et les références citées).

23.         En l'espèce, si le grief du recourant relatif au calcul des CDPI a certes été rejeté, il n'apparait pas que son argumentaire est aussi bancal que le prétend l'intimée. En effet, par le biais de son recours, le recourant a présenté une argumentation détaillée qui poursuivait le respect de normes juridiques de droit public, dont la violation aurait pu entrainer l'annulation de la décision querellée, sans que rien ne permette de constater que son argument était manifestement dépourvu de tout fondement ou basé sur des motivations étrangères à la loi. En outre, il convient de garder à l'esprit que son second grief relatif à la cohérence des plans était pleinement justifié et à entrainer une modification subséquente des plans de géomètre. Partant, on ne saurait admettre en l'espèce que le recourant aurait commis un quelconque abus de droit, en raison du rejet de ses griefs.

24.         Mal fondé, le recours sera rejeté.

25.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 900.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.

26.         Vu l'issue du litige, une indemnité de procédure de CHF 1'200.-, à la charge du recourant, sera allouée à B______ (art. 87 al. 2 à 4 LPA et 6 RFPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 8 mai 2023 par Monsieur A______ contre la décision du département du territoire du 23 mars 2023 ;

2.             donne acte département du territoire ainsi qu'aux parties que les plans de géomètre visés ne varietur le 23 mars 2023 sont remplacés par ceux visés ne varietur le 11 août 2023 ;

3.             rejette le recours interjeté le 8 mai 2023 par Monsieur A______ contre la décision du département du territoire du 23 mars 2023 ;

4.             met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 900.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

5.             condamne Monsieur A______ à verser à B______ SA une indemnité de procédure de CHF 1'200.- ;

6.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Gwénaëlle GATTONI, présidente, Isabelle KOECHLIN-NIKLAUS et Julien PACOT, juges assesseurs

Au nom du Tribunal :

La présidente

Gwénaëlle GATTONI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

 

Genève, le

 

Le greffier