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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/1116/2022

JTAPI/544/2023 du 12.05.2023 ( OCPM ) , REJETE

Descripteurs : AUTORISATION DE SÉJOUR;CAS DE RIGUEUR;ATTEINTE À LA SANTÉ;DÉCISION DE RENVOI;SOINS MÉDICAUX;ADMISSION PROVISOIRE
Normes : LEI.29; LEI.30; LEI.32; OASA.31; LEI.64; LEI.83
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1116/2022

JTAPI/544/2023

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 12 mai 2023

 

dans la cause

 

Madame A______, représentée par CSP-CENTRE SOCIAL PROTESTANT, avec élection de domicile

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Madame A______, née le ______ 1983, est ressortissante du Brésil.

2.             Le 20 avril 2020, Mme A______ a déposé une demande d'autorisation de séjour auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM), indiquant être arrivée en Suisse en juillet 2019.

Selon le formulaire M remis, elle avait trois enfants, nés en 1999, 2000 et 2002.

3.             Le 17 avril 2020, Mme A______ a sollicité un permis de séjour afin de pouvoir se faire soigner. Selon le certificat médical du 2 juin 2020 joint, elle souffrait d'un cancer papillaire de la thyroïde.

4.             Le 10 juin 2020, en réponse à la demande de l'OCPM, elle lui a notamment transmis un rapport médical détaillé du 2 juin 2020.

5.             Par courrier du 22 janvier 2021, l’OCPM a réclamé à Mme A______ un nouveau rapport médical ainsi que le justificatif de ses moyens financiers. Aucune suite n’a été donnée à ce courrier.

6.             Par courrier réceptionné le 8 février 2021, la logeuse de Mme A______, Madame C______, a informé l'OCPM que l’intéressée avait quitté son logement depuis le 30 novembre 2020.

7.             Le 2 mars 2021, l’OCPM a adressé à Mme A______ un courrier d'intention de par l'entremise du dispositif de la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO).

8.             Par courrier du 29 juin 2021, Mme A______ a transmis à l’OCPM un nouveau rapport médical détaillé.

9.             Par courriel du 12 novembre 2021, Mme A______, agissant sous la plume d’un mandataire, a informé l’OCPM vivre clandestinement à Genève depuis le mois d'août 2019, suite à un projet de mariage qui n'avait pas abouti. Elle rencontrait d'importants problèmes de santé qui avaient affecté sa capacité de travail depuis le mois de novembre 2019 (plusieurs cancers) au point qu'elle avait dû déposer une demande d'autorisation de séjour afin d'être affiliée à une assurance maladie et de bénéficier d'un soutien financier de la part de l'Hospice général (ci-après : HG).

Elle souffrait encore actuellement de problèmes de santé importants qui nécessitaient un suivi à Genève. Elle invitait l’OCPM à l’informer de l'état de traitement de son dossier, à tenir compte des éléments précités et à bien vouloir lui communiquer rapidement l'attestation de domicile dont elle avait besoin pour l'HG.

Elle a joint un certificat médical du 8 novembre 2021 du Dr D______, chef de clinique aux Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) indiquant qu’elle était dans l'attente d'une intervention chirurgicale ORL, une lettre de sortie et un compte-rendu opératoire du 5 novembre 2021 ainsi que l’historique de ses problèmes médicaux, à savoir, notamment l’opération d'un cancer de la thyroïde le 14 juillet 2020, une curithérapie par iode radioactif le 1er février 2021, une chirurgie en lien avec un concha bullosa et une obstruction nasale mécanique le 7  juillet 2021, une hospitalisation pour une infection post-opératoire le 5  novembre 2021 et, à venir, deux chirurgies en lien avec des glandes salivaires obstruées, séquelles du traitement oncologique.

10.         Par courriel du même jour, l’OCPM a informé Mme A______ de son projet d'intention de refus, dont il lui a remis copie, et lui a imparti un nouveau délai de 30 jours pour faire valoir ses observations. Sur le fond, il constatait que son cancer pouvait être traité au Brésil

11.         Le 15 novembre 2021, Mme A______ a informé l’OCPM de sa nouvelle adresse c/o E______, Genève.

12.         Par courriel du 17 décembre 2021, Mme A______, sous la plume de son mandataire, a transmis à l’OCPM une actualisation partielle de sa situation médicale et des soins encore nécessaires. En substance, un nouveau point sur sa situation apparaissait nécessaire à la fin du printemps prochain.

Elle a joint un rapport médical de la Dre F______, de l’unité chirurgie Cervico-facial des HUG du 26 novembre 2021.

13.         Par courriel du 4 mars 2022, Mme A______, sous la plume de son mandataire, a informé l’OCPM que son état de santé exigeait toujours un suivi médical rapproché et spécialisé. Un point pourrait être fait dans six mois s’il voulait bien suspendre l’examen du dossier durant cette période.

Elle a joint un rapport médical du 1er mars 2022 du Dr D______ duquel il ressort qu'une intervention médicale sous la forme d'une sialendoscopie parotidienne bilatérale avait été reportée à une date indéterminée en raison de la situation sanitaire actuelle. Cette intervention consistait en une exploration et dilatation de l'arbre salivaire des glandes parotides afin d'identifier puis de lever différentes obstructions pouvant causer la symptomatologie de la patiente, manifestée par une xérostomie. Les obstructions des canaux salivaires étaient une complication connue du traitement par iode radioactif dont la patiente avait bénéficié dans le cadre du traitement de son cancer de la thyroïde. Le traitement du cancer thyroïdien était terminé sur le plan ORL, la patiente bénéficiant néanmoins d'un suivi dans le service d'endocrinologie. En revanche les complications en lien avec le traitement du cancer étaient en attente de prise en charge notamment par le biais de cette intervention.

14.         À teneur d’une attestation établie le 21 décembre 2021 par l’HG, Mme A______ était aidée financièrement depuis le 1er avril 2020, pour un montant de CHF 31'049.-.

15.         Par décision du 7 mars 2022, l’OCPM a refusé d’octroyer à Mme A______ une autorisation de séjour et a prononcé son renvoi, un délai au 7 juin 2022 lui étant imparti pour ce faire.

En substance, les conditions de l'art. 29 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) n’étaient manifestement pas remplies dans la mesure où la durée du traitement nécessaire était inconnue à ce jour selon les informations au dossier. L’intéressée ne disposait en outre pas de moyens financiers propres, étant bénéficiaire de l'aide sociale.

Par ailleurs, la durée de son séjour en Suisse ne saurait constituer un élément déterminant susceptible de justifier une suite favorable à sa demande d'autorisation de séjour pour cas de rigueur au sens de l'art. 31 OASA. Agée de 38  ans, elle était en effet arrivée en Suisse à l’âge de 36 ans et avait donc vécu toute son enfance, son adolescence et sa vie d'adulte au Brésil. De plus, elle ne pouvait pas se prévaloir d'une intégration sociale ou professionnelle particulièrement marquée au point de devoir admettre qu'elle ne puisse quitter la Suisse sans devoir être confronté à des obstacles insurmontables, n'ayant pas créé avec la Suisse des attaches à ce point profondes et durables pour qu'elle ne puisse plus raisonnablement envisager un retour dans son pays d'origine. En outre, son intégration ne revêtait aucun caractère exceptionnel étant rappelé qu’elle émargeait à l'aide sociale. Elle n’avait pas non plus acquis des connaissances professionnelles ou des qualifications spécifiques telles qu'elle ne pourrait plus les mettre en pratique au Brésil. Quant à sa situation personnelle, elle ne se distinguait guère de celle de bon nombre de ses concitoyens connaissant les mêmes réalités au Brésil. Enfin, l'existence d'un traitement médical à venir, sous la forme d'une sialendoscopie parotidienne bilatérale, suite au traitement d'un cancer de la thyroïde n'était pas constitutif, à lui seul, d'un cas de rigueur, ce d'autant plus qu'elle était entrée en Suisse en étant déjà malade. Dite chirurgie, reportée à une date indéterminée en raison de la situation sanitaire, ne semblait pas être d’une urgence absolue et pourrait par ailleurs également être réalisée au Brésil qui offrait toutes les prestations médicales, comme le relevait la section analyse du SEM (Medical Country of Origin Information (MedCOL). A ce sujet, il existait au Brésil un système de santé appelé le Sistema Unico de Saude (SUS) qui donnait un accès gratuit et universel aux soins dans les établissements publics et privés conventionnés. La gratuité et l'universalité du système de santé brésilien étaient garanties par la constitution brésilienne et tous les résidents au Brésil pouvaient donc bénéficier du SUS.

Dans la mesure où la prise en charge médicale dans le pays d'origine était possible et qu’aucun élément au dossier ne démontrait que le traitement devrait exclusivement se faire en Suisse afin de garantir la dignité humaine de l’intéressée, son renvoi était donc raisonnablement exigible. Au surplus, le dossier ne fait pas apparaître que son exécution ne serait pas possible ou pas licite au sens de l’art. 83 al. 2 et 3 LEI.

16.         Par acte du 7 avril 2022, Mme A______ a recouru devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) contre cette décision, concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation et à ce qu’il soit ordonné à l’OCPM de transmettre son dossier avec un préavis favorable au SEM en vue de la délivrance d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur, soit subsidiairement d’une admission provisoire, en sa faveur.

Elle rencontrait de nombreux problèmes de santé qui étaient traités correctement à Genève. Sa vie serait en danger si on l’obligeait à rentrer au Brésil où elle n’avait plus rien, ayant dû s’endetter pour venir à Genève.

Elle a joint un certificat du 31 mars 2022 de la Dre G______ faisant état de son suivi actuel en Suisse. Cette praticienne indiquait par ailleurs que la patiente était en cours d’investigations pour des plaintes compatibles avec une atteinte cardiovasculaire et souffrait notamment d’un trouble anxiodépressif, avec une détresse extrême, ayant conduit à la prise d’antidépresseurs.

17.         Le 2 juin 2022, l’OCPM s’est déterminé sur le recours, concluant à son rejet. Il a transmis son dossier.

18.         La recourante a répliqué le 28 juin 2022, rappelant sa situation et ses problématiques médicales. Elle venait de recevoir une convocation pour une intervention chirurgicale qui aurait lieu le 23 septembre 2022 aux HUG, dans l’objectif d’installer des stends dans les glandes salivaires supérieures de manière à pouvoir retrouver une salivation acceptable. Elle ne pourrait bénéficier d’une telle opération au Brésil. Elle venait d’une favéla dans la ville de Recife, s’était endettée pour venir en Suisse et sa vie serait en danger en cas de retour. Elle perdait continuellement du sang et avait besoin de fer en moyenne tous les trois mois. Un rendez-vous post-opératoire pour l’ablation de l’utérus et une hyperménorrhée était enfin prévu le 21 septembre 2022.

Elle a joint une clef USB contenant une vidéo illustrant la situation au Brésil ainsi que divers documents médicaux dont un rapport médical du Dr D______ du 17  décembre 2021 indiquant notamment ignorer si le traitement médical dans le pays d’origine était possible.

19.         Par duplique du 6 juillet 2022, l’OCPM a informé le tribunal être disposé à octroyer à la recourante un délai de départ adéquat tenant compte de sa capacité à voyager, sur présentation d’un certificat médical indiquant la durée de rétablissement estimée après l’intervention chirurgicale prévue le 23 septembre 2022. Pour le surplus, il maintenait sa décision.

20.         Par courrier du 22 juillet 2022, persistant dans ses arguments et conclusions, la recourante a encore relevé qu’une autre opération était prévue. Dans ses conditions, elle proposait la suspension de la procédure pour une durée de six mois.

21.         Par courrier du 4 août 2022, l’OCPM a informé le tribunal s’opposer à la suspension de la procédure, rappelant qu’il était prêt à aménager le délai de départ afin de tenir compte de l’intervention chirurgicale du 23 septembre 2022 et de la convalescence qui s’en suivrait.

22.         Par courrier du 11 octobre 2022, le tribunal a invité Mme A______ à lui fournir un rapport médical actualisé relatif à son état de santé, notamment à la suite de l’opération précitée.

23.         Par courrier du 24 octobre 2022, Mme A______ a informé le tribunal que son opération avait été repoussée au 18 novembre 2022. Des examens étaient par ailleurs en cours concernant ses autres problèmes médicaux et des solutions devraient être proposées ces prochaines semaines. Elle réitérait dès lors sa demande de suspension de la procédure pour une durée de six mois afin que sa situation médicale soit clarifiée et stabilisée.

24.         Le 29 novembre 2022, faisant suite à l’invite du tribunal de lui fournir un rapport médical actualisé relatif à son état de santé, la recourante a indiqué avoir subi l’opération des glandes salivaires le 30 novembre 2022. L’opération ne s’était toutefois pas passée comme prévu et une nouvelle intervention était envisagée. Dans le cadre de son suivi post cancer, une glande lymphatique suspecte lui avait été trouvée au cou. Enfin on lui avait trouvé des polypes utérins et une hystéroscopie était envisagée. Elle était dans l’attente de rapports médicaux en lien avec ces différentes problématiques.

25.         Le 6 février 2023, faisant suite à une nouvelle invite du tribunal, Mme A______ a transmis le rapport du 30 novembre 2022 du Dr D______ relatif à son opération. Comme déjà indiqué, une nouvelle intervention était envisagée suite à l’échec de l’opération du 30 novembre 2022. Un rendez-vous médical était prévu le 8 février 2023 concernant ses polypes utérins et son hyperménorrhée.

26.         Le 27 février 2023, le mandataire nouvellement constitué pour la défense de Mme  A______ a transmis au tribunal divers documents médicaux dont un rendez-vous pour une consultation gynécologique le 5 avril 2023, un rapport du 24  novembre 2022 du Dr H______, chef de clinique du service de gynécologie indiquant que la patiente n’ayant pas donné son consentement, l’hystéroscopie n’avait pu être faite, ainsi que deux rapports de consultations ambulatoires de gynécologie des 13 octobre et 17 novembre 2022.

27.         Lors de l'audience du 1er mars 2023 devant le tribunal, le Dr D______, entendu en qualité de témoin, a expliqué suivre la recourante depuis le 4 juin 2021. Mme A______ avait été traitée pour un cancer de la tyroïde diagnostiqué en 2019, ainsi que pour les suites et complications liées au traitement de ce type de cancer. La chirurgie en lien avec un concha bulloza et une obstruction nasale mécanique du 7 juillet 2021 n'était a priori pas lié à un problème oncologique contrairement à son opération du 14 juillet 2020, la curiethérapie du 1er février 2021 et la sialendoscopie parotidienne bilatérale du 30 novembre 2022.

Comme indiqué dans son rapport du 1er mars 2022, le traitement du cancer de Mme A______ était terminé et, aujourd'hui, seuls étaient encore nécessaires un suivi endoctrinologique, ainsi qu'une nouvelle sialendoscopie, la première opération ayant échoué. Le suivi endoctrinologique consistait en des examens biologiques, une échographie et une radiologie, une fois l'an, afin de vérifier l'absence de récidive du cancer de la thyroïde. Il ignorait si un tel suivi serait possible au Brésil. A priori, il devrait l'être dans des hôpitaux de grandes villes et/ou universitaires. Il s'agissait d'examens courants utilisant des instruments que l'on trouvait en général dans de tels hôpitaux. Il avait des doutes quant à son accessibilité, n'ayant pas d'informations concrètes sur le Brésil. S'agissant de la sialendoscopie, une nouvelle intervention était agendée le 10 mars 2023 avec l'utilisation d'une autre technique. Il s'agissait d'une opération de confort qui pouvait toutefois, si elle n'était pas traitée, grandement impacter la qualité de vie du patient. Cela semblait être le cas pour Mme A______. On savait immédiatement après l'intervention si le geste était réussi. Ses bénéfices pouvaient être constatés au bout de trois semaines environ, sans toutefois que l’on sache s'ils étaient définitifs ou temporaires. Parfois il était nécessaire de refaire une intervention. Il ignorait si ce type d'intervention était possible au Brésil. Il ne s'agit pas d'une technique extrêmement répandue. À sa connaissance, il s'agissait de la seule intervention permettant de traiter ce type de problème. À sa connaissance, l'examen des glandes lymphatiques suspectes trouvées sur le cou de Mme A______ était revenu négatif. Il n’était pas au courant de son dossier gynécologique. À sa connaissance, des polypes utérins n’étaient pas en lien avec le cancer de la thyroïde. L'hystéroscopie était un examen de l'utérus. Il ignorait les éventuels motifs d'un tel geste dans le cas de la recourante. À priori, le cancer de la thyroïde, désormais traité, n'avait pas d'impact sur la capacité de travail de Mme  A______. Sa problématique salivaire, en revanche, pourrait avoir un impact sur son état psychologique et partant sa capacité de travail.

Sur question du conseil de Mme A______, il n'y avait pas de suivi particulier à la suite de l'opération des glandes salivaires. On revoyait les patients régulièrement pour vérifier le bénéfice subjectif de l'intervention. En fonction dudit bénéfice, ils pouvaient décider de procéder ou non à une nouvelle intervention. Ces interventions pourraient se répéter régulièrement. Toutefois, ils avaient constaté que le bénéfice diminuait conséquemment déjà après la première intervention. Dans le cas de Mme A______, le problème n'étant pas dû à une maladie sous-jacente, mais à des cicatrices liées à son traitement oncologique, il avait bon espoir que son problème soit réglé suite à l'opération du 10 mars 2023, si cette dernière réussissait.

Mme A______ a expliqué être arrivée à Genève en 2019 en raison de projets de mariage qui n’avaient toutefois pas fonctionné, en 2019 déjà. Elle était célibataire depuis cette date et travaillait pour la personne qui la logeait en échange du gîte et du couvert. Ne parvenant plus à travailler en raison de son cancer, elle avait dû quitter ce logement. Elle avait pu loger quelques temps chez une personne qu’elle avait connue à travers l'église. Elle n’avait jamais logé chez M. E______ mais ce dernier l’avait autorisée à utiliser son adresse pour recevoir les courriers de l'hôpital. Elle louait depuis 2021 une chambre chez ce dernier. Sur le plan gynécologique, sa prochaine intervention, soit une hystéroscopie afin de pouvoir faire par la suite une biopsie des polypes utérins puis, selon le résultat procéder ou non à l'ablation de son utérus, était prévue le 5  avril 2023. Elle avait déjà fait sept biopsies. Selon sa gynécologue, elle devrait se faire retirer l'utérus. Elle était également suivie en raison de problèmes psychologiques liés à toute sa problématique médicale. Actuellement, elle prenait des antidépresseurs et un relaxant. Elle n’avait plus d'activité professionnelle depuis 2019. Ses trois enfants vivaient en Europe. Elle avait deux filles au Portugal et un fils à Genève. Elle ignorait si ce dernier, qui étudiait dans une école de commerce, était au bénéfice d'une autorisation de séjour. Il était logé gratuitement dans un studio, chez la mère de M. E______. Elle lui fournissait la nourriture. Elle avait fait venir ses enfants en Europe lorsqu’elle avait appris qu’elle avait un cancer, car elle avait peur de mourir. Elle avait vendu sa maison au Brésil pour payer leurs billets d'avion et contracté un prêt auprès d'un usurier. Ses deux filles et sa petite-fille avaient entamé une procédure au Portugal, afin d'obtenir un permis de résidence.

La représentante de l’OCPM a confirmé qu’une adaptation du délai de départ de la recourante était possible pour tenir compte des deux interventions à venir.

Le conseil de Mme A______ a persisté dans les conclusions de son recours et réitérer sa demande de suspension de la procédure pour une durée de six mois, afin que l'on y voie plus clair sur sa situation médicale.

A l’issue de l’audience, un délai au 30 mars 2023 a été imparti à Mme A______ pour faire parvenir au tribunal un rapport médical actualisé du Dr  D______, suite à l'intervention prévue le 10 mars 2023. À réception de ce rapport, un bref délai sera accordé à l'OCPM pour se déterminer sur ce dernier et la requête de suspension.

28.         Le 6 avril 2023, Mme A______ a transmis au tribunal la lettre de sortie des soins aigus du Dr D______ et le compte-rendu opératoire du 31 mars 2023. Elle l’a par ailleurs informé avoir subi une gastroscopie et colposcopie le 27 mars 2023 ainsi qu’une biopsie dont les résultats étaient attendus aux alentours du 21 avril 2023. Elle avait enfin un rendez-vous le 5 avril 2023 en lien avec le traitement de polypes utérins et de son hyperménorrhée.

Il ressort desdites pièces qu’une dernière tentative gauche serait rediscutée en fonction du bénéfice droit et après IRM. L’intéressée était en arrêt maladie jusqu’au 2 avril 2023 à 100%. Le suivi à la sortie consistait en une antibiothérapie pour 7 jours, une corticothérapie pour un mois et un PC en consultation spécialisée des glandes salivaires.

29.         Dans le délai prolongé au 3 mai 2023 pour sa détermination, l’OCPM s’est opposé à la demande de suspension, relevant que la recourante était apte à exercer une activité lucrative depuis le 3 avril 2023 et que les résultats de sa biopsie n’avaient pas été versés au dossier.

30.         Ce courrier a été transmis à la recourante, pour information.

31.         Par courrier du 12 mai 2023, la recourante, sous la plume de son conseil, a informé le tribunal que la biopsie du 27 mars 2023 n’avait pas montré de trace de cancer. En revanche, le rapport d’hystéroscopie du 18 avril 2023, démontrait la présence d’au minimum quatre polypes. Un rendez-vous était prévu le 14 juin 2023 en vue de décider de lui retirer ou non l’utérus dans le but de traiter ces polypes. Un rendez-vous était enfin prévu le 9 juin 2023 avec le Dr D______ afin d’évaluer la situation post-opératoire.

Elle a joint un rapport d’hystéroscopie du 18 avril 2023 faisant état de la présence d’au minimum quatre polypes endométriaux, à base d’implantation large, d’aspects bénins ainsi qu’un rendez-vous pour une consultation gynécologique du 14 juin 2023.

EN DROIT

1.             Le tribunal connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'OCPM relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente par le destinataire de la décision attaquée, le recours est recevable (art. 57, 60 et 62 à 65 LPA).

3.             Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid.  4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2).

4.             Selon la maxime inquisitoire, qui prévaut en particulier en droit public, l'autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés. Elle ne dispense pas pour autant les parties de collaborer à l'établissement des faits ; il incombe à celles-ci d'étayer leurs propres thèses, de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuves disponibles, spécialement lorsqu'il s'agit d'élucider des faits qu'elles sont le mieux à même de connaître (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 4.1 ; 2C_1156/2018 du 12 juillet 2019 consid. 3.3 et les arrêts cités). En matière de droit des étrangers, l'art. 90 LEI met un devoir spécifique de collaborer à la constatation des faits déterminants à la charge de l'étranger ou des tiers participants (ATF 142 II 265 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 4.1 ; 2C_323/2018 du 21 septembre 2018 consid. 8.3.3 ; 2C_767/2015 du 19 février 2016 consid. 5.3.1).

Lorsque les preuves font défaut ou s'il ne peut être raisonnablement exigé de l'autorité qu'elle les recueille pour les faits constitutifs d'un droit, le fardeau de la preuve incombe à celui qui entend se prévaloir de ce droit (cf. ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_27/2018 du 10 septembre 2018 consid. 2.2 ; 1C_170/2011 du 18 août 2011 consid. 3.2 et les références citées ; ATA/99/2020 du 28 janvier 2020 consid. 5b). Il appartient ainsi à l'administré d'établir les faits qui sont de nature à lui procurer un avantage et à l'administration de démontrer l'existence de ceux qui imposent une obligation en sa faveur (ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4a ; ATA/1155/2018 du 30 octobre 2018 consid. 3b et les références citées).

Par ailleurs, en procédure administrative, tant fédérale que cantonale, la constatation des faits est gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves (art. 20 al. 1 2ème phr. LPA ; ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; 130 II 482 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_668/2011 du 12 avril 2011 consid. 3.3 ; ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4b). Le juge forme ainsi librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées et ce n'est ni le genre, ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4b et les arrêts cités).

5.             La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (cf. art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas en l'espèce.

6.             Selon l’art. 29 LEI, un étranger peut être admis en vue d’un traitement médical si le financement et le départ de Suisse sont garantis.

7.             Même lorsque les conditions posées à cet article sont cumulativement remplies, l’étranger ne dispose pas d’un droit à la délivrance d’une autorisation de séjour pour suivre un traitement médical en Suisse, l’art. 29 LEI étant rédigé en la forme potestative (« Kann-Vorschrift »), sauf à pouvoir se prévaloir d’une disposition particulière du droit fédéral ou d’un traité lui conférant un tel droit (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-235/2018 du 4 avril 2019 consid. 6.1), ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

8.             L’autorisation de séjour pour traitement médical est une autorisation de courte durée. Elle peut ainsi être octroyée pour une durée limitée d’une année au plus (art. 32 al. 1 LEI). Une prolongation jusqu’à une durée totale de deux ans est toutefois envisageable (art. 32 al. 3 LEI). Les conditions d’un tel séjour d’une durée inférieure ou égale à nonante jours sur une période de cent-quatre-vingts jours sont quant à elles réglées par les dispositions relatives au visa Schengen (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-235/2018 du 4 avril 2019 consid. 6.3 et références citées).

9.             La notion de traitement médical au sens de l’art. 29 LEI doit être interprétée de manière large : sont ainsi également assimilés à un traitement médical, un séjour de réhabilitation faisant suite à une maladie et une cure. Selon la doctrine, la nécessité d’un traitement médical en Suisse n’est plus une condition d’application de l’art. 29 LEI. Un simple souhait suffit (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-235/2018 du 4 avril 2019 consid. 6.4 et références citées).

10.         Par ailleurs, il ressort de la doctrine et de la jurisprudence que le séjour pour traitement médical au sens de l’art. 29 LEI est de nature temporaire et que l’étranger requérant l’application de cette disposition légale doit apporter la garantie qu’il quittera la Suisse à l’issue du traitement suivi (art. 5 al. 2 LEI). À ce titre, l’autorité administrative doit analyser si le retour du requérant dans son pays d’origine apparaît comme certain compte tenu, d’une part, de sa situation personnelle, familiale et professionnelle, et, d’autre part, de la situation politique, économique et sociale du pays de provenance. Ainsi par exemple, le départ de Suisse n’est pas assuré lorsque l’intéressé doit suivre un traitement médical sur une longue période (cinq à dix ans) et que la fin de son séjour envisagé en Suisse n’est pas clairement définie (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-235/2018 du 4 avril 2019 consid. 6.6 et les références citées).

11.         En l’espèce, séjournant en Suisse depuis août 2019, soit depuis plus de trois ans, la recourante ne remplit à l’évidence pas les conditions de durée de l’art. 32 al. 1 et 3 LEI. En outre, dans la mesure où elle souhaite désormais demeurer en Suisse puisqu’elle requiert la délivrance d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur, il convient de retenir que son retour au Brésil n’est manifestement pas garanti.

C’est ainsi à juste titre que l’OCPM a écarté la possibilité de lui octroyer une autorisation de séjour pour traitement médical.

12.         La recourante se prévaut de son état de santé et de son état de détresse en lien avec ce dernier pour solliciter une autorisation de séjour pour cas de rigueur.

13.         Les dérogations aux prescriptions générales d’admission (art. 18 à 29 LEI) sont énoncées de manière exhaustive à l’art. 30 al. 1 LEI ; il est notamment possible de déroger aux conditions d’admission dans le but de tenir compte des cas individuels d’extrême gravité ou d’intérêts publics majeurs (let. b). En vertu de l’art. 30 al. 2 LEI, le Conseil fédéral en a fixé les conditions et la procédure dans l’OASA.

14.         L'art. 31 al. 1 OASA prévoit que pour apprécier l'existence d'une telle situation, il convient de tenir compte, notamment, de l'intégration du requérant sur la base des critères d'intégration définis à l'art. 58a al. 1 LEI (let. a), de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de la situation financière (let. d), de la durée de la présence en Suisse (let. e), de l'état de santé (let. f), ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g).

Ces critères, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs (ATF 137 II 345 consid. 3.2.3 ; 137 II 1 consid. 1 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3986/2015 du 22 mai 2017 consid. 9.3 ; ATA/465/2017 du 25 avril 2017), d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (cf. ATA/1669/2019 du 12 novembre 2019 consid. 7b).

Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, de sorte que les conditions pour la reconnaissance de la situation qu'ils visent doivent être appréciées de manière restrictive et ne confèrent pas un droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1 ; ATA/667/2021 du 29 juin 2021 consid. 6a ; ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 7c ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1020/2017 du 27 juin 2017 consid. 5b ; cf. aussi arrêts du Tribunal fédéral 2C_602/2019 du 25 juin 2019 consid. 3.3 ; 2C_222/2017 du 29 novembre 2017 consid. 1.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (cf.  ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/667/2021 du 29 juin 2021 consid. 6a ; ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 7c ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c).

15.         Lors de l’appréciation d’un cas de rigueur, il y a lieu de tenir compte de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce, étant relevé que l’art. 30 al. 1 let. b LEI n’a pas pour but de soustraire des étrangers aux conditions de vie de leur pays d’origine, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation si rigoureuse qu’on ne saurait exiger d’eux qu’ils tentent de se réadapter à leur existence passée. On ne saurait tenir compte des circonstances générales (économiques, sociales, sanitaires) affectant l’ensemble de la population restée sur place, auxquelles les personnes concernées pourraient être également exposées à leur retour, sauf si celles-ci allèguent d’importantes difficultés concrètes propres à leur cas particulier (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-6616/2017 du 26 novembre 2019 consid. 6.5 et références citées).

16.         Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d’un cas d’extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, l’intéressé possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu’il ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d’origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu’en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d’études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n’arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l’aide sociale ou des liens conservés avec le pays d’origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-6322/2016 du 1er mai 2018 consid.4.6 et les références citées ; ATA/1130/2017 du 2 août 2017 consid. 5b).

17.         La durée totale du séjour constitue un critère important de reconnaissance d’un cas de rigueur. Il importe cependant de rappeler que selon la jurisprudence applicable en la matière, le simple fait pour un étranger de séjourner en Suisse pendant de longues années ne permet pas d’admettre un cas personnel d’une extrême gravité. En outre, la durée d’un séjour illégal, ainsi qu’un séjour précaire ne doivent normalement pas être pris en considération ou alors seulement dans une mesure très restreinte, sous peine de récompenser l’obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4145/2017 du 10 octobre 2018 consid. 5.1 et les références citées). Par durée assez longue, la jurisprudence entend une période de sept à huit ans (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-7330/2010 du 19 mars 2012 ; ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017).

18.         D’une manière générale, lorsqu’une personne a passé toute son enfance, son adolescence et le début de sa vie d’adulte dans son pays d’origine, il y reste encore attaché dans une large mesure. Son intégration au milieu socioculturel suisse n’est alors pas si profonde et irréversible qu’un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet. Il convient de tenir compte de l’âge du recourant lors de son arrivée en Suisse, et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, de la situation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d’exploiter ses connaissances professionnelles dans le pays d’origine (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-646/2015 du 20  décembre 2016 consid. 5.3).

19.         Selon la jurisprudence, des motifs médicaux peuvent, selon les circonstances, conduire à la reconnaissance d’un cas de rigueur lorsque l’intéressé démontre souffrir d’une sérieuse atteinte à la santé qui nécessite, pendant une longue période, des soins permanents ou des mesures médicales ponctuelles d’urgence, indisponibles dans le pays d’origine, de sorte qu’un départ de Suisse serait susceptible d’entraîner de graves conséquences pour sa santé. En revanche, le seul fait d’obtenir en Suisse des prestations médicales supérieures à celles offertes dans le pays d’origine ne suffit pas à justifier une exception aux mesures de limitation. (ATF 128 II 200 consid. 5.3 ; ATA/1217/2020 du 1er décembre 2020 ; ATA/1162/ 2020 du 17 novembre 2020 consid. 6c ; ATA/801/2018 du 7 août 2018 consid. 8a et les références cités).

Une grave maladie (à supposer qu’elle ne puisse pas être soignée dans le pays d’origine) ne saurait cependant justifier à elle seule la reconnaissance d’un cas de rigueur, l’aspect médical ne constituant que l’un des éléments, parmi d’autres à prendre en considération (cf. ATF 128 II 200 consid. 5.1 à 5.4 ; 123 II 125 consid. 5b/dd et les références citées ; arrêts du Tribunal administratif fédéral C-6545/ 2010 du 25 octobre 2011 consid. 6.4 ; C-7939/2007 du 29 mars 2010 consid. 7.2 et 7.2.2). Ainsi, en l’absence de liens particulièrement intenses avec la Suisse, le facteur médical ne saurait constituer un élément suffisant pour justifier la reconnaissance d’un cas personnel d’extrême gravité.

Les motifs médicaux constituent avant tout un obstacle à l’exécution du renvoi au sens de l’art. 83 al. 4 LEI et un individu ne pouvant se prévaloir que d’arguments d’ordre médical ne se distingue pas de ses compatriotes restés dans son pays d’origine et souffrant de la même maladie (cf. ATA/895/2019 du 14 mai 2019 consid. 6f ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-7044/2014 du 19 juillet 2016 consid. 5.5.1 ; C-5710/2011 du 13 décembre 2013 consid. 5.1 ; F-4125/206 du 26  juillet 2017 consid. 5.4.1).

20.         En l’espèce, la recourante séjourne sur le sol helvétique depuis août 2019, soit moins de quatre ans, ce qui ne correspond nullement à une très longue durée au sens des critères susmentionnés, au terme de laquelle il faudrait nécessairement retenir que le renvoi de Suisse constituerait pour elle un véritable déracinement et donc une mesure disproportionnée, ce d’autant qu’elle a vécu dans son pays d’origine jusqu’à ses 36 ans. Ce séjour s’est en outre déroulé en premier lieu dans l’illégalité, puis par tolérance de l’autorité intimée.

Son intégration professionnelle et/ou socioculturelle en Suisse ne peut être qualifiée d’exceptionnelle, ayant dans un premier temps travaillé dans l’économie domestique et étant, depuis le 1er avril 2020, aidée financièrement par l’HG, en raison de ses problèmes de santé. Ayant désormais recouvré sa capacité de travail, la recourante devrait être en mesure de subvenir à ses besoins dans son pays d'origine. De même, bien que le marché du travail y soit sans doute plus incertain qu'en Suisse, il n'est pas établi qu'elle serait empêchée de s'y réinsérer, étant relevé qu’elle devait vraisemblablement y exercer une activité lucrative avant d’arriver à Genève. Quoi qu’il en soit, aucun élément du dossier n’atteste que les difficultés auxquelles elle devrait faire face en cas de retour seraient plus lourdes que celles que rencontrent généralement d'autres compatriotes contraints de retourner dans leur pays d'origine au terme d'un séjour régulier en Suisse.

Enfin, les motifs médicaux allégués à l’appui de sa demande ne sauraient justifier, à eux seuls, l’octroi d’un permis de séjour. Au surplus, la recourante n’a pas démontré à satisfaction de droit que les suivis et traitements dont elle aurait besoin seraient indisponibles au Brésil. S’agissant tout d’abord de son cancer thyroïdien, le Dr D______ a confirmé lors de l’audience que le traitement était terminé, seul un suivi endocrinologique étant désormais requis, lequel devrait à priori être possible au Brésil, s'agissant d'examens courants utilisant des instruments que l'on trouvait en général dans des hôpitaux de grandes villes ou universitaires. Il a pour le surplus expliqué que la sialendoscopie était une opération de confort. S’il était parfois nécessaire de refaire une telle intervention, il avait pu constater que le bénéfice diminuait conséquemment déjà après la première intervention. Il n'y avait pas de suivi particulier à la suite de l'opération des glandes salivaires. On revoyait les patients régulièrement pour vérifier le bénéfice subjectif de l'intervention. En fonction dudit bénéfice, il pouvait être décidé de procéder ou non à une nouvelle intervention. Il ne ressort de plus pas du dossier et des dernières pièces versées, que ses problèmes gynécologiques et psychologiques seraient d’une gravité et/ou complexité médicale particulières, s’agissant à ce stade uniquement de polypes utérins non cancérigènes, d’une éventuelle ablation de l’utérus et de la prise d’antidépresseurs et de relaxants. L’on relèvera en outre qu’à la connaissance du Dr D______ l’examen des glandes lymphatiques suspectes trouvées sur le cou de la recourante est revenu négatif, ce que ne vient infirmer aucune pièce du dossier. L’OCPM a encore expliqué, sans être contredit, que le Brésil offre toutes les prestations médicales, comme le relève la section analyse du SEM (MedCOL). A ce sujet, le SUS donne un accès gratuit et universel aux soins dans les établissements publics et privés conventionnés. La gratuité et l'universalité du système de santé brésilien sont garanties par la constitution brésilienne et tous les résidents au Brésil peuvent donc bénéficier du SUS. Le tribunal a également pu vérifier que la ville de Recife, où vivait la recourante avant son arrivée en Suisse, dispose de très nombreux hôpitaux, publics et privés, comprenant notamment des services oncologiques et/ou gynécologiques. En tout état, il faut rappeler que, conformément à la jurisprudence, le seul fait d’obtenir en Suisse des prestations médicales supérieures à celles offertes dans le pays d’origine ne suffit pas pour justifier une exception aux mesures de limitation du nombre des étrangers. Au demeurant, en l’absence de liens particulièrement intenses avec la Suisse, ce facteur médical ne peut à lui seul constituer un élément suffisant pour la reconnaissance d’un cas personnel d’extrême gravité.

Ainsi, au vu de l’ensemble de ces circonstances, l’appréciation que l’autorité intimée a faite de la situation de la recourante sous l’angle des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA apparaît parfaitement admissible. Dans ces conditions, le tribunal, qui doit respecter la latitude de jugement conférée à l’OCPM, ne saurait en corriger le résultat en fonction d’une autre conception, sauf à statuer en opportunité, ce que la loi lui interdit de faire (art. 61 al. 2 LPA).

21.         Selon l’art. 64 al. 1 let. c LEI, l’autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l’encontre d’un étranger auquel l’autorisation de séjour est refusée ou dont l’autorisation n’est pas prolongée.

22.         Elle ne dispose à ce titre d’aucun pouvoir d’appréciation, le renvoi constituant la conséquence logique et inéluctable du rejet d’une demande d’autorisation (cf.  arrêts du Tribunal administratif fédéral C-5268/2008 du 1er juin 2011 consid.  10 ; C-406/2006 du 2 septembre 2008 consid. 8 et la référence citée ; ATA/1118/2020 du 10 novembre 2020 consid. 11a ; ATA/991/2020 du 6 octobre 2020 consid. 6b).

23.         En l’occurrence, dès lors qu’il a refusé de délivrer une autorisation de séjour à la recourante, l’OCPM devait en soi ordonner son renvoi de Suisse en application de l’art. 64 al. 1 let. c LEI.

24.         Reste toutefois à déterminer si l'exécution de cette mesure est possible, licite et peut être raisonnablement exigée au sens de l'art. 83 al. 4 LEI, au vu des problèmes de santé de l’intéressée qui indique au surplus que sa vie serait en danger en cas de retour au Brésil.

25.         Selon l’art. 83 al. 1 LEI, le SEM décide d’admettre provisoirement l’étranger si l’exécution du renvoi ou de l’expulsion n’est pas possible, n’est pas licite ou ne peut être raisonnablement exigée. Ces trois conditions susceptibles d’empêcher l’exécution du renvoi sont de nature alternative : il suffit que l’une d’elles soit réalisée pour que le renvoi soit inexécutable.

26.         L’exécution du renvoi n’est pas possible lorsque l’intéressé ne peut quitter la Suisse pour son État d’origine, son État de provenance ou un État tiers, ni être renvoyé dans l’un de ces États (art. 83 al. 2 LEI). Elle n’est pas licite lorsque le renvoi serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEI). Elle n’est pas raisonnablement exigible si elle met concrètement en danger l’étranger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEI).

27.         S’agissant spécifiquement des personnes en traitement médical en Suisse, l’exécution du renvoi ne devient inexigible, en cas de retour dans leur pays d’origine, que dans la mesure où elles pourraient ne plus recevoir les soins essentiels garantissant des conditions minimales d’existence. Par soins essentiels, il faut entendre les soins de médecine générale et d’urgence absolument nécessaires à la garantie de la dignité humaine (arrêts du Tribunal administratif fédéral D-6799/2017 du 8 octobre 2020 ; E-3320/2016 du 6 juin 2016 et les références citées). Ainsi, si les soins essentiels nécessaires ne peuvent pas être assurés dans le pays d’origine de l’étranger concerné, en raison de l’absence de possibilités de traitement adéquat, si l’état de santé de l’intéressé se dégradait très rapidement au point de conduire d’une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité physique, l’exécution du renvoi sera raisonnablement exigible (ATA/137/2022 du 8 février 2022 consid. 9d).

28.         Selon la jurisprudence, en ce qui concerne l’accès à des soins essentiels, celui-ci est assuré dans le pays de destination s’il existe des soins alternatifs à ceux prodigués en Suisse, qui - tout en correspondant aux standards du pays d’origine - sont adéquats à l’état de santé de l’intéressé, fussent-ils d’un niveau de qualité, d’une efficacité de terrain (ou clinique) et d’une utilité (pour la qualité de vie) moindres que ceux disponibles en Suisse. En particulier, des traitements médicamenteux (par exemple constitués de génériques) d’une génération plus ancienne et moins efficaces, peuvent, selon les circonstances, être considérés comme adéquats. Hormis le critère qualitatif des soins, ceux-ci doivent de plus -, en conformité avec le modèle vu auparavant et développé en matière de droits (sociaux et économiques) de l’homme -, être accessibles géographiquement ainsi qu’économiquement et sans discrimination dans l’État de destination. Quoiqu’il en soit, lorsque l’état de santé de la personne concernée n’est pas suffisamment grave pour s’opposer, en tant que tel, au renvoi sous l’angle de l’inexigibilité, il demeure toutefois un élément à prendre en considération dans l’appréciation globale des obstacles à l’exécution du renvoi (Gregor T. CHATTON/Jérôme SIEBER, Le droit à la santé et à la couverture des soins des étrangers en Suisse, Annuaire du droit de la migration 2019/2020, p. 155 et les références citées).

29.         En revanche, les difficultés socio-économiques qui sont le lot habituel de la population locale, en particulier des pénuries de soins, ne suffisent pas en soi à réaliser une telle mise en danger (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-838/ 2017 du 27 mars 2018 consid. 4.3).

30.         L’art. 83 al. 4 LEI ne confère donc pas un droit général d’accès en Suisse à des mesures médicales visant à recouvrer la santé ou à la maintenir, au simple motif que l’infrastructure hospitalière et le savoir-faire médical dans le pays d’origine de l’intéressé n’atteignent pas le standard élevé prévalant en Suisse. Ainsi, si les soins essentiels nécessaires peuvent être assurés dans le pays d’origine ou de provenance de l’étranger concerné, l’exécution du renvoi sera raisonnablement exigible. Elle ne le sera plus, en raison de l’absence de possibilités de traitement adéquat, si l’état de santé de l’intéressé se dégradait très rapidement au point de conduire d’une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité physique (arrêt du Tribunal administratif fédéral E-2693/2016 du 30 mai 2016 consid. 4.1 et les références citées ; ATA/1455/2017 du 31 octobre 2017 consid. 10d).

31.         En l’espèce, force est de considérer que la recourante n’a pas démontré à satisfaction de droit que ses problèmes de santé seraient d’une gravité telle qu’un retour au Brésil apparaîtrait, d’un point de vue médical, insoutenable. En particulier, l’état dépressif lié à ses problèmes médicaux ne justifie nullement le prononcé d’une admission provisoire. De même, rien au dossier ne permet de retenir qu’elle ne pourrait pas avoir accès aux suivis, éventuels traitements et soins médicaux dont elle aurait besoin, étant relevé que ceux-ci sont disponibles et gratuit à teneur des informations fournies par la section analyse du SEM (MedCOL).

Au besoin, une assistance (notamment par la fourniture d'une réserve de médicaments) et une coordination médicales pourront lui être octroyées au moment de l'exécution du renvoi, afin de la soutenir dans cette phase (cf. arrêt du Tribunal administratif fédéral F-6799/2018 du 11 février 2019 consid. 6.2.2.2). Le canton de Genève pourra également lui verser une aide financière (art. 33 al. 2 RIASI ; cf. ATA/1279/2019 du 27 août 2019 consid. 8). Disposant désormais, à défaut de preuve du contraire, d’une capacité pleine et entière de travail, elle devrait donc pouvoir retrouver un emploi au Brésil ce qui permettra de faciliter sa réintégration. Enfin, il sera rappelé que le fait que la qualité des soins au Brésil ne soit pas la même qu’en Suisse ne saurait être considéré comme un obstacle insurmontable au retour dans le pays d’origine (arrêt du Tribunal fédéral 2C-193/2020 du 18 août 2020 consid. 4.2 et les références citées).

En conclusion, en l’absence d’éléments démontrant que le retour de la recourante au Brésil la mettrait concrètement en danger compte tenu de sa situation médicale ou pour d’autres motifs qu’elle n’a nullement démontrés, il convient de retenir que l’exécution de son renvoi est raisonnablement exigible au sens de l’art. 83 LEI, de sorte que l’OCPM n’avait pas à proposer son admission provisoire au SEM.

Cela étant, cet office ayant indiqué, la dernière fois lors de l'audience du 1er mars 2023, être prêt à aménager le délai de départ de la recourante afin de tenir compte de ses problématiques médicales, il lui en sera donné acte.

32.         En tous points mal fondé, le recours sera dès lors rejeté.

33.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe, est condamnée au paiement d’un émolument s’élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.

34.         La recourante étant au bénéfice de l’assistance juridique suite à la décision de la vice-présidente du Tribunal de première instance du 6 octobre 2022, cet émolument sera laissé à la charge de l’État de Genève, sous réserve du prononcé d’une décision finale du service de l’assistance juridique sur la base de l’art. 19 al. 1 du règlement sur l’assistance juridique et l’indemnisation des conseils juridiques et défenseurs d’office en matière civile, administrative et pénale du 28 juillet 2010 (RAJ - E 2 05.04).

35.         Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

36.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au SEM.


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 7 avril 2022 par Madame A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 7 mars 2022 ;

2.             le rejette ;

3.             met un émolument de CHF 500.- à la charge de la recourante ;

4.             le laisse à la charge de l’État de Genève, sous réserve de la décision finale de l’assistance juridique en application de l’art. 19 al. 1 RAJ ;

5.             dit qu’il n’est pas alloué d'indemnité de procédure ;

6.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10, rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Marielle TONOSSI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

 

Genève, le

 

La greffière