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Décisions | Sommaires

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C/13914/2024

ACJC/183/2025 du 04.02.2025 sur JTPI/13698/2024 ( SML ) , JUGE

Recours TF déposé le 07.03.2025, 4D_51/2025
Normes : LP.82
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/13914/2024 ACJC/183/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 4 FEVRIER 2025

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, recourant contre un jugement rendu par la 4ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 5 novembre 2024,

et

B______ SARL, sise ______, intimée.

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/13698/2024 du 5 novembre 2024, reçu par A______ le 11 novembre 2024, le Tribunal de première instance, statuant par voie de procédure sommaire, a rejeté la requête de mainlevée provisoire de l'opposition formée par B______ SARL au commandement de payer, poursuite n° 1______ (ch. 1 du dispositif), mis les frais judiciaires en 300 fr. à la charge de A______ (ch. 2 et 3) et dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 4).

B. a. Le 16 novembre 2024, A______ a formé recours contre ce jugement. Il n'a pas pris de conclusion formelle, mais l'on comprend des termes de son recours qu'il souhaite que le jugement querellé soit annulé et que la Cour fasse droit à ses conclusions prises devant le Tribunal.

Il a produit des pièces nouvelles (pièces n° 3, 4 et 7).

b. B______ SARL a répondu au recours le 20 décembre 2024, alors que le délai qui lui avait été imparti pour ce faire arrivait à échéance le 17 décembre 2024.

c. Les parties ont été informées le 17 décembre 2024 de ce que la cause était gardée à juger par la Cour.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier.

a. Le 1er février 2024, A______, en tant qu'acheteur, et B______ SARL, en tant que vendeur, ont conclu un contrat de vente portant sur du matériel visant à cultiver des plantes pour un montant de 30'000 fr. Le contrat précise qu'un acompte de 7'500 fr. a été versé par l'acheteur le jour même et que, dans le cas d'"une réponse non favorable du propriétaire des lieux pour la reprise du bail, la somme de l'acompte" sera rendue.

b. B______ SARL était à l'époque locataire d'un dépôt situé no. ______, rue 2______, à C______ [GE], pour un loyer de 1'775 fr. par mois.

Le 7 mars 2024, D______, soit pour elle E______, et A______ ont déposé auprès de la régie en charge de la gestion de l'immeuble une demande de reprise de ce bail.

c. Le 11 mars 2024, la propriétaire de l'immeuble a validé le transfert de bail en faveur des précités.

Un projet de contrat de bail avec effet au 1er avril 2024 a dès lors été établi, mentionnant E______ et A______ comme colocataires conjoints et solidaires.

Il est indiqué que les locaux sont exclusivement destinés à un usage de dépôt.

d. Le 28 mars 2024, la régie a fait savoir à B______ SARL que les candidats qu'elle avait présentés s'étaient désistés, de sorte que celle-ci restait responsable de ses obligations contractuelles jusqu'au 31 janvier 2025, sous réserve de relocation anticipée.

A______ allègue que ce désistement était dû au fait que son colocataire, E______, avait renoncé à conclure le bail car les locaux n'étaient pas à usage commercial et qu'il avait appris qu'il y avait des plaintes pour nuisances de la part d'autres locataires. La régie lui avait alors conseillé de faire une nouvelle demande en son nom propre.

e. Le 30 mars 2024, A______ a déposé, en son seul nom, une nouvelle demande de location pour le dépôt précité. Il confirmait que la destination des locaux était pour une culture de F______ au titre d'activité commerciale.

f. Le 24 avril 2024, la régie a confirmé par courriel à A______ que son dossier n'avait pas été retenu.

g. Le 15 mai 2024, A______ a fait notifier à B______ SARL un commandement de payer, poursuite n° 1______, portant sur 7'500 fr. au titre de remboursement d'acompte selon contrat du 1er février 2024.

Opposition a été formée à ce commandement de payer.

h. Le 31 mai 2024, A______ a requis du Tribunal la mainlevée provisoire de cette opposition.

i. Lors de l'audience du Tribunal du 23 septembre 2024, B______ SARL s'est opposée à la demande, faisant valoir que le dossier déposé par sa partie adverse en son seul nom pour la reprise du bail était "complètement bidon".

Elle a allégué que A______ n'avait en réalité versé que 7'000 fr., et non 7'500 fr. d'acompte. A______ ne s'est pas spécifiquement prononcé sur ce point lors de l'audience, persistant dans ses conclusions.

Le Tribunal a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience.

EN DROIT

1.             1.1 En matière de mainlevée d'opposition, seule la voie du recours est ouverte (art. 309 let. b ch. 3 CPC).

Aux termes de l'art. 321 al. 1 et 2 CPC, le recours, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l'instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée, pour les décisions prises en procédure sommaire (art. 251 let. a CPC).

1.2 Interjeté dans le délai et selon la forme prévus par la loi, le recours est recevable.

1.3 Tel n'est pas le cas de la réponse au recours, qui a été déposée après l'échéance du délai légal (art. 321 al. 2 et 322 al. 1 CPC).

1.4 Dans le cadre d'un recours, le pouvoir d'examen de la Cour est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC). L'autorité de recours a un plein pouvoir d'examen en droit, mais un pouvoir limité à l'arbitraire en fait, n'examinant par ailleurs que les griefs formulés et motivés par le recourant (Hohl, Procédure civile, Tome II, 2ème éd., Berne, 2010, n° 2307).

Le recours est instruit en procédure sommaire (art. 251 let. a CPC), la preuve des faits allégués devant être apportée par titres (art. 254 CPC). Les maximes des débats et de disposition s'appliquent (art. 55 al. 1, 255 let. a a contrario et art. 58 al. 1 CPC).

2. Les pièces nouvelles produites par le recourant sont irrecevables, conformément à l'art. 326 al. 1 CPC.

3 Le Tribunal a considéré que la situation juridique n'était pas suffisamment claire pour que la mainlevée provisoire puisse être accordée car il convenait d'éclaircir préalablement la question de savoir si le recourant avait failli à ses obligations contractuelles s'agissant de la reprise du contrat de bail.

Le recourant fait valoir que le retrait du colocataire initialement prévu n'est pas pertinent; il ne s'était pas désisté, étant souligné que le contrat de vente ne liait pas le colocataire en question.

3.1 Aux termes de l'art. 82 LP, le créancier dont la poursuite se fonde sur une reconnaissance de dette constatée par acte authentique ou sous seing privé peut requérir la mainlevée provisoire (al. 1). Le juge la prononce si le débiteur ne rend pas immédiatement vraisemblable sa libération (al. 2).

Constitue une reconnaissance de dette au sens de cette disposition, en particulier, l'acte sous seing-privé, signé par le poursuivi ou son représentant, d'où ressort sa volonté de payer au poursuivant, sans réserve ni condition, une somme d'argent déterminée, ou aisément déterminable et exigible (ATF 148 III 145 consid. 4.1.1; 145 III 20 consid. 4.1.1.1; ATF 139 III 297 consid. 2.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_688/2022 du 23 novembre 2022 consid. 4.1.1). Il peut s'agir soit d'une reconnaissance de dette formelle (art. 17 CO), soit d'un ensemble de pièces dans la mesure où il en ressort les éléments nécessaires (ATF 139 III 297 précité).

Dans un contrat bilatéral, lorsque l'exception d'inexécution est invoquée, le créancier doit prouver qu'il a exécuté sa prestation (Abbet/ Veuillet, La mainlevée de l'opposition, 2022, n. 147 ad art. 82 LP).

Si la reconnaissance de dette est soumise à une condition suspensive, le poursuivant ne peut obtenir la mainlevée que s'il prouve que la condition est réalisée. L'existence d'une condition suspensive ne résultant pas du titre mais d'accords non écrits ou implicites doit en revanche être rendue vraisemblable par le débiteur poursuivi (Abbet/ Veuillet, op. cit., n. 65 ad art. 82 LP).

La procédure de mainlevée est une procédure sur pièces, dont le but n'est pas de constater la réalité de la créance en poursuite, mais l'existence d'un titre exécutoire. Le juge de la mainlevée examine uniquement la force probante du titre produit par le poursuivant, sa nature formelle, et lui attribue force exécutoire si le poursuivi ne rend pas immédiatement vraisemblables ses moyens libératoires. Il doit notamment vérifier d'office l'existence d'une reconnaissance de dette, l'identité entre le poursuivant et le créancier désigné dans ce titre, l'identité entre le poursuivi et le débiteur désigné et l'identité entre la prétention déduite en poursuite et la dette reconnue. Le poursuivi peut se prévaloir de tous les moyens de droit civil - exceptions ou objections - qui infirment la reconnaissance de dette. Il n'a pas à apporter la preuve absolue (ou stricte) de ses moyens libératoires, mais seulement à les rendre vraisemblables (art. 254 al. 1 CPC). Le juge n'a pas à être persuadé de l'existence des faits allégués; il doit, en se fondant sur des éléments objectifs, avoir l'impression qu'ils se sont produits, sans exclure pour autant la possibilité qu'ils se soient déroulés autrement (ATF 142 III 720 consid. 4.1).

Son rôle n'est pas d'interpréter des contrats ou d'autres documents, mais d'accorder rapidement, après examen sommaire des faits et du droit, une protection provisoire au requérant dont la situation paraît claire (ACJC/658/2012 du 11 mai 2012 consid. 5.2; ACJC/1211/1999 du 25 novembre 1999 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral du 10 mai 1968, résumé in JdT 1969 II 32).

3.2 En l'espèce, le recourant a bien produit une reconnaissance de dette au sens de l'art. 82 CO. Le remboursement du montant versé au titre d'acompte sur la vente était soumis à la condition suspensive qu'une réponse non favorable soit donnée à la reprise du bail.

Or cette condition est réalisée puisque la régie a confirmé par écrit au recourant le 24 avril 2024 que sa candidature pour la reprise du bail n'avait pas été retenue.

L'argument de l'intimée selon lequel le dossier présenté par le recourant était "bidon" est dénué de substance et n'est corroboré par aucun élément concret.

Contrairement à ce qu'a retenu le Tribunal, il importe par ailleurs peu de savoir, au stade de la mainlevée de l'opposition, si le recourant a failli à ses obligations contractuelles lors de la reprise du bail.

Le but de la procédure de mainlevée n'est en effet pas de constater la réalité de la créance en poursuite, mais l'existence d'un titre exécutoire. Or le titre produit par le recourant ne prévoit pas d'obligation spécifique à charge du recourant dans le cadre de la reprise du bail. Il n'est en particulier pas mentionné que le bail devait être repris par deux personnes.

A cet égard, le recourant relève à juste titre que E______ n'est pas partie au contrat de vente, de sorte que le fait qu'il ait finalement renoncé à la reprise du bail n'est pas pertinent pour la solution du litige.

Il résulte de ce qui précède que le contrat du 1er février 2024 constitue bien un titre de mainlevée.

Il résulte de ce titre que le recourant a bien versé le jour même 7'500 fr. à l'intimé, et non seulement 7'000 fr.

L'intimé ne fournit aucune pièce à l'appui de ses affirmations selon lesquelles seul le montant de 7'000 fr. a été payé.

La mainlevée sera dès lors prononcée à hauteur de 7'500 fr.

Le jugement querellé sera annulé et il sera statué à nouveau, conformément à ce qui précède (art. 327 al. 3 CPC).

3. L'intimée, qui succombe sur le principe de l'action, sera condamnée aux frais de première et seconde instances (art. 106 CPC).

Les frais judiciaires de première instance seront arrêtés à 300 fr. et ceux de recours à 450 fr. (art. 48 et 61 OELP). Ils seront compensés avec les avances de même montant versées par le recourant, acquises à l'état de Genève (art. 111 CPC).

L'intimée sera condamnée à verser 750 fr. au recourant, à titre de remboursement des frais judiciaires.

Il ne sera pas alloué de dépens au recourant qui plaide en personne et n'en a pas demandé.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 16 novembre 2024 par A______ contre le jugement JTPI/13698/2024 rendu le 5 novembre 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/13914/2024–S1 SML.

Au fond :

Annule ce jugement et, statuant à nouveau :

Prononce la mainlevée provisoire de l'opposition formée par B______ SARL au commandement de payer poursuite 1______.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Met à la charge de B______ SARL les frais judiciaires de première instance et de recours, arrêtés à 750 fr. et compensés avec les avances fournies, acquises à l'Etat de Genève.

Condamne B______ SARL à verser à A______ 750 fr. au titre de frais judiciaires.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens de recours.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Madame Nathalie RAPP, juges; Madame Laura SESSA, greffière.

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Laura SESSA

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.