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C/1179/2023

ACJC/332/2024 du 06.03.2024 sur OTPI/596/2023 ( SP ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/1179/2023 ACJC/332/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MERCREDI 6 MARS 2024

Entre

1) Monsieur A______, domicilié ______, Etats-Unis d'Amérique,

2) Madame B______, domiciliée ______, Etats-Unis d'Amérique,

3) Monsieur C______, domicilié ______, Etats-Unis d'Amérique,

4) D______, domicilié ______, Etats-Unis d'Amérique,

Tous appelants contre une ordonnance rendue par le Tribunal de première instance de ce canton le 26 septembre 2023, représentés par Me Serge CALAME, avocat, MLL Froriep SA, rue du Rhône 65, case postale 3199, 1211 Genève 3,

et

1) Madame E______, domiciliée ______ Chili, intimée, représentée par
Me Pierre DUCRET, avocat, CMS von Erlach Partners SA, esplanade de Pont-Rouge 9, case postale 1875, 1211 Genève 26,

2) F______, sise ______ [GE], autre intimée, représentée par
Me Emma LOMBARDINI, avocate, Poncet Turrettini, rue de Hesse 8, case postale, 1211 Genève 4.


EN FAIT

A.           Par ordonnance OTPI/596/2023 du 26 septembre 2023, notifiée aux parties le 28 septembre 2023, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal) a rejeté la requête de mesures provisionnelles formée par A______, B______, C______ et D______ (ch. 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 1'650 fr., les mettant à la charge de ces derniers, conjointement et solidairement, et les compensant avec les avances de frais fournies (ch. 2), condamné A______, B______, C______ et D______, conjointement et solidairement, à payer à E______ 1'000 fr. à titre de dépens (ch. 3), dit qu'il n'était pas alloué de dépens en faveur de [la banque] F______ (ch. 4) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5).

Le Tribunal a retenu que la requête visait principalement à garantir le paiement d'une éventuelle créance dans l'hypothèse où A______, B______, C______ et D______ obtenaient gain de cause dans des procédures à l'étranger, de sorte qu'il s'agissait d'un séquestre déguisé. Les précités n'avaient en outre pas rendu vraisemblable l'existence d'un préjudice difficilement réparable, le seul préjudice financier n'en étant pas un.

B.            a. Par acte expédié le 9 octobre 2023 au greffe de la Cour de justice (ci-après: la Cour), A______, B______, C______ et D______ appellent de cette décision, dont ils sollicitent l'annulation avec suite de frais judiciaires et dépens de première et deuxième instance.

Cela fait, ils concluent à ce que la Cour interdise tout acte de disposition sur le compte bancaire n° 1______ (IBAN : 2______) auprès de la F______ à Genève, sise [à l'adresse] ______ [GE], sous la menace de la peine de l'art. 292 CP qui réprime l'insoumission à une décision de l'autorité, ordonne à ladite banque de bloquer tous les avoirs de quelque nature que ce soit, déposés sur le compte bancaire précité et dise que l'ordonnance rendue sur mesures provisionnelles déploiera ses effets jusqu'à reconnaissance en Suisse d'une décision exécutoire établissant la titularité du compte bancaire en question.

b. Dans sa réponse, E______ conclut, avec suite de frais judiciaires et dépens, à ce que la Cour, à la forme, retire du dossier les pièces 24 à 29bis produites par A______, B______, C______ et D______, déclare irrecevables les allégués n° 14 et 15 et 17 à 23 de l'appel, déclare irrecevable l'appel formé par ses adverses parties et, au fond, principalement, confirme l'ordonnance entreprise. Subsidiairement, elle conclut à ce que la Cour astreigne A______, B______, C______ et D______, conjointement et solidairement, à fournir des sûretés à hauteur de 1'028'500 fr. dans un délai de dix jours à compter de la notification de l'arrêt de la Cour.

Elle produit des pièces envoyées au Tribunal le 26 septembre 2023, à savoir une déclaration conjointe de Mes G______ et H______ du 25 septembre 2023 avec ses annexes (pièce n° 53), une plainte pénale du 22 septembre 2023 (pièce n° 54), un courrier de Me Pierre DUCRET au Tribunal du 26 septembre 2023 (pièce n° 55) et un bordereau de pièces complémentaires du 26 septembre 2023 (pièce n° 56). Elle produit également de nouvelles pièces, à savoir un courrier de Me Pierre DUCRET à Me Serge CALAME du 6 octobre 2023 (pièce n° 57) et un état des avoirs du compte joint du 30 septembre 2023 (pièce n° 58).

c. Invitée à se déterminer, F______ s'en est rapportée à justice sur l'appel interjeté contre l'ordonnance litigieuse.

d. A______, B______, C______ et D______ ont répliqué, ce qui a entraîné une duplique de E______. Ils ont persisté dans leurs conclusions respectives.

e. Les parties ont été informées par plis du greffe de la Cour du 4 janvier 2024 de ce que la cause était gardée à juger.

C.           Il résulte de la procédure les éléments de faits pertinents suivants:

a. I______, de nationalité suisse, est décédé le ______ 2021 au Chili.

b. A son décès, il a laissé trois enfants, issus d'une première union, à savoir A______, B______ et C______, ainsi que son épouse, E______.

E______ est mère de deux enfants, à savoir J______ et K______, issus d'une précédente union.

c. La succession de feu I______ a été ouverte au Chili et ses héritiers sont ses trois enfants et son épouse.

d. Feu I______ a laissé des dispositions testamentaires aux Etats-Unis et au Chili.

d.a Selon l'article 3 du testament chilien du 24 décembre 2010, le "quart de libre disposition" ainsi que le "quart d'améliorations" de la succession sont dévolus à E______.

L'article 4 désigne E______ en qualité d'exécutrice testamentaire.

d.b A teneur du préambule du testament américain du 17 juin 2019, feu I______ a révoqué tous les testaments et dispositions testamentaires précédents, exceptés les testaments et dispositions testamentaires relatifs à la cession de biens situés en dehors des Etats-Unis et exécutés conformément à la loi chilienne ou suisse.

Selon l'article 7 dudit testament, "si E______ lui survivait et était sa conjointe légitime au moment de son décès, il donnerait et lèguerait tout le reste, résiduel et restant de ses biens et de sa succession, meubles et immeubles, quel qu'en soit la nature ou l'emplacement, qu'il possédait ou dont il avait droit au moment de son décès (sa "succession résiduaire") à ses "L______ Trustees", nommés ci-après EN FIDUCIE (connu sous le nom de M______ TRUST), qui serait détenu et administré aux fins décrites dans le reste de l'article. M______ TRUST serait maintenu et administré par les lois d'un état des Etats-Unis ou par le District de N______ [États-Unis]".

Aux termes de l'article 12 du testament américain, feu I______ a désigné deux de ses enfants, A______ et B______, ainsi que son avocat, D______, en qualité d'exécuteurs testamentaires. Il a également nommé ce dernier ainsi que [la banque] O______ USA, sise à P______, Q______ [États-Unis], en qualité de "L______ Trustees" du M______ TRUST.

e. De son vivant, feu I______ était titulaire avec son épouse d'un compte joint n° 1______ (IBAN: 2______) ouvert auprès de F______ en 2006 (ci-après également : le compte joint).

Ce compte était notamment alimenté par des distributions de deux trusts, R______ TRUST et S______ TRUST, dont E______ et feu I______ étaient tous deux bénéficiaires du vivant de ce dernier et dont E______ est l'unique bénéficiaire depuis le décès de son époux le ______ 2021.

Les 3 janvier, 1er avril et 4 juillet 2022, les trustees de R______ TRUST et S______ TRUST ont effectué six versements sur le compte joint pour un montant total de 529'583.90 USD.

Les avoirs déposés sur le compte joint s'élevaient à 17'348'161 USD au 31 décembre 2022 et à 21'748'688 USD au 30 septembre 2023.

f. Aux termes du contrat de compte y relatif, "chaque titulaire du compte joint a la faculté d'effectuer toutes opérations y relatives, en agissant individuellement et sans l'accord ni la participation du/des autre(s) titulaire(s) du compte, et en particulier d'effectuer tous actes de gestion d'administration et de disposition […]" (art. 2 du contrat).

L'article 8 prévoit que "le présent contrat ne s'éteindra pas par le décès d'un ou des titulaires […]".

A teneur de l'article 10, "en cas de décès de l'un des titulaires, les héritiers de celui-ci deviennent les successeurs juridiques du titulaire décédé".

g. Depuis le décès de feu I______, ses quatre héritiers et les enfants de E______ sont en litiges sur de nombreux points.

g.a Devant les autorités chiliennes, A______, B______ et C______ ont contesté, en vain, la qualité d'exécutrice testamentaire de E______, puis tenté d'obtenir une reddition de compte. Ils ont également entamé une procédure tendant à faire constater l'indignité de E______, au motif qu'elle aurait caché aux autorités chiliennes l'existence du testament américain. La fille de E______, J______, a déposé une plainte pénale contre son frère pour gestion déloyale et détournement de fonds au préjudice de leur mère, ainsi qu'initié une procédure pour que sa mère soit déclarée incapable de discernement, qu'elle soit privée de ses droits d'administrer ses biens et qu'un curateur soit nommé à cette fin. Ces deux dernières procédures sont encore en cours. Dans le cadre de la plainte pénale précitée, E______ a été entendue par un policier le 9 mai 2023.

g.b Aux Etats-Unis, A______, B______ et C______ ont intenté, en vain, une procédure judiciaire afin de placer E______ sous curatelle.

h. Par courrier du 17 février 2022, D______ s'est adressé à F______, afin d'obtenir des informations et des relevés détaillés des comptes ouverts en ses livres au nom de feu I______ ainsi que le blocage de ces derniers.

i. Par courriel du 3 mai 2022, F______ a accepté de transmettre les relevés du compte joint aux enfants du défunt.

j. Par courrier du 14 novembre 2022, E______ a requis de F______ qu'elle lui transfère la moitié des actifs déposés sur le compte joint.

k. Par courrier du 18 novembre 2022, F______ a indiqué aux héritiers qu'elle exigerait une instruction de transfert conjointe pour pouvoir diviser les avoirs sur le compte joint, liquider la succession et transférer les avoirs déposés. Elle n'exécuterait pas d'instruction dans ce sens sans l'accord des quatre héritiers, en particulier sachant qu'un litige existait entre eux.

l. Par courrier du 2 décembre 2022, E______ a mis en demeure F______ de lui transférer la moitié des avoirs déposés sur le compte joint sur son compte personnel n° 3______ ouvert auprès de la même banque.

m. Le 6 décembre 2022, E______ a saisi le Tribunal d'une demande en paiement à l'encontre de F______ (procédure n° C/4______/2022).

D. a.a Par acte déposé au greffe du Tribunal le 25 janvier 2023, A______, B______, C______ et D______ ont formé une requête de mesures provisionnelles à l'encontre de E______ et de F______, concluant, sous suite de frais et sous la menace de la peine prévue à l'article 292 CP, à ce que le Tribunal interdise tout acte de disposition sur le compte bancaire n° 1______ auprès de la F______, ordonne à cette dernière de bloquer tous les avoirs de quelque nature que ce soit, déposés sur ledit compte et, principalement, dise que l'ordonnance rendue sur mesures provisionnelles déploierait ses effets jusqu'à reconnaissance en Suisse d'une décision exécutoire établissant la titularité du compte litigieux, subsidiairement, jusqu'à accord exprès de leur part ou droit jugé dans une action matérielle.

a.b A l'appui de leur requête, ils ont notamment fait valoir que la composition des actifs successoraux n'était pas encore définie avec certitude, le défunt ayant disposé de ses biens au Chili et à l'étranger selon des dispositions et testaments stipulant des solutions différentes. Ils avaient contesté la validité du testament chilien dans le cadre de procédures initiées tant au Chili qu'aux Etats-Unis et une audience était prochainement convoquée au Chili afin d'établir un inventaire des biens du défunt, de sorte qu'à l'issue de cette procédure il serait décidé si le compte ouvert auprès de F______ faisait ou non partie de la masse successorale.

Dans l'intervalle, la banque s'était engagée à ne pas exécuter d'instruction qui n'émanerait pas de l'ensemble des héritiers. Or, le 2 décembre 2022, E______ avait mis F______ en demeure de lui transférer la moitié des avoirs déposés sur le compte joint sur son compte personnel puis avait ouvert action contre la banque. Dans ces circonstances, et étant relevé que E______ était incapable de discernement depuis quelques temps, il se justifiait de figer urgemment le compte joint en attendant l'issue des procédures pendantes au Chili et aux Etats-Unis, lesquelles permettraient de clarifier les différents aspects de la succession et notamment le statut du compte. Dans l'hypothèse où le compte devait tomber dans la masse successorale du défunt, l'exécution des instructions de E______ impliquerait une atteinte indéniable aux droits successoraux d'héritiers réservataires. Le recouvrement d'actifs soustraits à tort s'avèrerait quasiment impossible, compte tenu de l'incapacité de discernement de E______, de son domicile au Chili et des influences qu'elle pourrait subir de son entourage.

b. Aux termes de ses déterminations du 20 mars 2023, F______ s'en est rapportée à justice et a requis qu'aucun frais ni dépens ne soit mis à sa charge. Elle a également relevé qu'elle n'avait pas pour habitude de ne pas se conformer aux décisions de justice la concernant, qu'un ordre permanent de 7'000 USD en faveur de E______ était débité du compte litigieux, ce dont A______, B______, C______ et D______ étaient informés, que la banque s'acquittait également de frais relatifs à des tombes de la famille de feu I______ en 950 fr. par an et qu'elle devait également pouvoir débiter ses frais, notamment de tenue de compte.

c.a Dans sa réponse du 10 août 2023, E______ a conclu, sous suite de frais, au rejet de la requête et subsidiairement, à ce que A______, B______, C______ et D______ soient astreints à fournir des sûretés à hauteur de 825'500 fr. dans un délai de dix jours, sous peine de rejet de leur requête de mesures provisionnelles.

c.b En substance, elle a contesté les allégations de A______, B______, C______ et D______ relatives à sa prétendue incapacité de discernement et fait valoir qu'en sa qualité de titulaire du compte joint, elle avait la faculté d'effectuer toutes opérations y relatives, en agissant individuellement, même sans l'accord ni la participation de l'autre titulaire, conformément au contrat du 18 septembre 2006. Elle était, avec feu son époux, ayant droit économique de la moitié des avoirs versés sur le compte joint qui provenaient de trusts dont ils étaient tous deux bénéficiaires. Au décès de son époux, elle était devenue l'unique bénéficiaire des trusts, lesquels avaient continué à lui verser des revenus sur le compte joint, à son seul bénéfice. Elle n'avait toutefois pas pu obtenir de F______ la restitution, sur son compte personnel, desdits montants. Elle était ainsi bénéficiaire de plus de la moitié des actifs en compte, dont elle était libre de disposer et sur lesquels A______, B______, C______ et D______ ne pouvaient faire valoir aucune prétention.

Aux termes du testament chilien rédigé par feu I______, E______ avait été instituée héritière à hauteur de 70% de la succession. Le testament américain subséquent ne remettait pas en cause ces dispositions. Dans ces circonstances, elle avait mis F______ en demeure le 2 décembre 2022 de lui transférer la moitié des avoirs du compte joint sur son compte personnel puis, au vu du refus de cette dernière de s'exécuter, elle avait été contrainte d'intenter une action à son encontre.

Selon elle, la mesure requise par A______, B______, C______ et D______ constituait un séquestre déguisé en tant qu'elle visait des créances à l'encontre de F______ faisant partie de la succession. Les conditions relatives au prononcé de mesures provisionnelles n'étaient de surcroît pas réalisées. A______, B______, C______ et D______ ne rendaient pas vraisemblable une quelconque prétention de droit matériel ou une atteinte à une telle prétention. Ils échouaient à rendre vraisemblable sa prétendue insolvabilité ou les difficultés liées à son domicile à l'étranger pour recouvrer les montants qui leur seraient éventuellement dus.

Dans l'hypothèse où il serait fait droit à la requête, A______, B______, C______ et D______ devraient être astreints à verser des sûretés en 825'500 fr. correspondant à la perte d'intérêts pendant la durée de la procédure au fond ainsi qu'aux frais de recouvrement y relatifs, estimés à 50'000 fr.

d. Le Tribunal a entendu les parties lors de l'audience du 18 septembre 2023 lors de laquelle A______, B______, C______ et D______ ont produit des pièces complémentaires, notamment des déclarations de diverses personnes devant la police chilienne (pièces n° 24 à 29bis).

Au terme de l'audience, les parties ont plaidé, persistant dans leurs conclusions respectives, et le Tribunal a gardé la cause à juger.

e. Le 22 septembre 2023, K______ a déposé plainte pénale au Chili notamment à l'encontre de sa sœur ainsi que des enfants de feu I______ pour possession et utilisation, dans une procédure de nature civile, de déclarations auprès d'un policier qui ne ressortent d'aucun dossier pénal.

f. Par courrier du 26 septembre 2023, E______ a requis du Tribunal qu'il écarte du dossier les pièces 24 à 29bis, celles-ci soit étant constitutives de faux soit ayant été obtenues de manière illicite. Elle a produit un chargé de pièces complémentaires comprenant une déclaration conjointe de Mes G______ et H______ avec ses annexes (pièce n° 53) et une plainte pénale déposée le 22 septembre 2023 par K______ à l'encontre notamment de J______, B______, A______ et C______ (pièce n° 54).

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions de première instance sur mesures provisionnelles (art. 308 al. 1 let. b CPC). Dans les affaires patrimoniales, il est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

La décision querellée est une décision de rejet de mesures provisionnelles. Compte tenu des actifs litigieux, la valeur litigieuse de 10'000 fr. est largement atteinte. La voie de l'appel est ouverte.

1.2 Interjeté dans le délai de 10 jours et la forme prescrits (art. 142 al. 1, 248 let. d, 311 al. 1 et 314 al. 1 CPC), par des personnes ayant un intérêt digne de protection (art. 59 al. 1 et 2 let. a CPC), l'appel est recevable. Il en va de même de la réponse, de la réplique et de la duplique (art. 314 al. 1 et 316 al. 2 CPC).

E______ sera désignée ci-après comme l'intimée n° 1 et F______ comme l'intimée n° 2.

1.3 L'appel peut être formé pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) et constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). Le juge d'appel dispose d'un plein pouvoir d'examen de la cause en fait et en droit. Les mesures provisionnelles étant soumises à la procédure sommaire (art. 248 let. d CPC), la Cour peut toutefois s'en tenir à la vraisemblance des faits allégués et à un examen sommaire du droit (ATF 127 III 474 consid. 2b/bb, JdT 2002 I 352; arrêt du Tribunal fédéral 5A_12/2013 du 8 mars 2013 consid. 2.2).

Les maximes des débats (art. 55 al. 1 CPC et 255 CPC a contrario) et de disposition (art. 58 al. 1 CPC) sont applicables.

1.4 L'état de fait ci-dessus a été complété dans la mesure utile, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'examiner plus avant les griefs des appelants tirés d'une constatation inexacte des faits par le Tribunal.

1.5.1 En raison du domicile des parties, la cause revêt un caractère international (ATF 136 III 142 consid. 3.2; 132 III 609 consid. 4).

Le juge suisse saisi examine d'office sa compétence ainsi que la question du droit applicable au litige, sur la base du droit international privé suisse en tant que lex fori (ATF 136 III 142 consid. 3.2; 135 III 259 consid. 2.1; 133 III 37 consid. 2).

En l'absence de convention internationale, il y a lieu, pour statuer sur ces aspects, de se référer à la loi fédérale sur le droit international privé (LDIP).

A teneur de l'art. 10 let. b LDIP sont compétents pour prononcer des mesures provisoires les tribunaux du lieu de l'exécution de la mesure, pour autant que celle-ci soit urgente et nécessaire (ATF 134 III 326; ACJC/1110/2012 du 8 août 2012 consid. 4.1; Bucher, Commentaire romand LDIP/CL, 2011, n. 18 ad art. 10 LDIP).

Les dispositions de la LDIP ne précisent pas selon quelle loi les mesures provisoires doivent être examinées (Bucher, op. cit., n. 7 ss ad art. 10 LDIP). Il n'est pas arbitraire d'appliquer le droit suisse lorsque l'affaire est urgente, notamment en matière de séquestre (arrêts du Tribunal fédéral 5A_60/2013 du 27 mai 2013 consid. 3.2.1.2; 5A_259/2010 du 26 avril 2012 consid. 7.3.2.2; 5P_355/2006 du 8 novembre 2006 consid. 4.2).

1.5.2 En l'espèce, les mesures requises tendent notamment au blocage d'avoirs détenus par l'intimée n° 1 auprès d'un établissement genevois, de sorte que le lieu d'exécution se situe à Genève. Ces mesures apparaissent prima facie revêtir un caractère urgent et nécessaire. En effet, il conviendrait d'éviter que, dans l'hypothèse où il serait fait droit au fond à la prétention des appelants, ceux-ci ne puissent plus obtenir les fonds.

Par conséquent, c'est à juste titre que le Tribunal a admis sa compétence rationae loci et rationae materiae (art. 86 al. 1 et al. 2 let. a et c LOJ). Le premier juge a par ailleurs à juste titre appliqué le droit suisse s'agissant des conditions relatives au prononcé de mesures provisionnelles.

2. L'intimée n° 1 a produit des pièces nouvelles et allégué des faits nouveaux. Elle expose que ceux-ci reprennent les pièces et allégués qu'elle a fait valoir dans son courrier du 26 septembre 2023 au Tribunal en réponse aux nombreuses pièces complémentaires produites par les appelants lors de l'audience du 18 septembre 2023.

Les appelants ont également allégué des faits nouveaux. L'intimée n° 1 requiert que les allégués n° 14 et 15 et 17 à 23 de l'appel soient déclarés irrecevables.

2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b).

2.1.1 Les pseudo nova sont des faits et moyens de preuve qui étaient déjà survenus lorsque les débats principaux de première instance ont été clôturés. Leur admissibilité est largement limitée en appel, dès lors qu'ils sont irrecevables lorsqu'en faisant preuve de la diligence requise, ils auraient déjà pu être invoqués dans la procédure de première instance. Il appartient au plaideur d'exposer en détails les motifs pour lesquels il n'a pas pu les présenter en première instance déjà (ATF 143 III 42 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_1006/2017 du 5 février 2018 consid. 3.3).

Les pièces nouvelles ne sont pas recevables en appel pour la seule raison qu'elles ont été émises postérieurement au prononcé de la décision attaquée. La question à laquelle il faut répondre pour déterminer si la condition de l'art. 317 al. 1 CPC est remplie est celle de savoir si le moyen de preuve n'aurait pas pu être obtenu avant la clôture des débats principaux de première instance (arrêt du Tribunal fédéral 5A_266/2015 du 24 juin 2015 consid. 3.2.2 et 3.2.3).

2.1.2 La procédure sommaire est introduite par une requête (art. 252 al. 1 CPC). Lorsque la requête ne paraît pas manifestement irrecevable ou infondée, le tribunal donne à la partie adverse l'occasion de se déterminer oralement ou par écrit (art. 253 CPC).

La réponse doit être transmise au requérant. Celui-ci a la possibilité de prendre position sur les arguments du défendeur en vertu de son droit de réplique (ATF 144 III 117 consid. 1; Bohnet, Commentaire romand, CPC, 2ème éd., 2019, n. 9 ad art. 253 CPC).

Dans la procédure sommaire, aucune des parties ne doit cependant s'attendre à ce que le tribunal ordonne un deuxième échange d'écritures ou des débats oraux après une première audition. Dans cette mesure, les parties n'ont pas le droit de s'exprimer deux fois sur le fond. En principe, la clôture du dossier intervient après une seule prise de position (ATF 144 III 117 consid. 2.2).

Il s'ensuit que le requérant doit proposer toutes ses preuves avec sa requête (Bohnet, op. cit., n. 9 ad art. 252 CPC). Ce n'est que si une audience a lieu après un premier échange d'écritures ou si un second échange d'écritures est ordonné que le Tribunal fédéral et certains auteurs admettent que des faits nouveaux et des offres de preuve nouvelles peuvent encore être introduits au début des débats principaux, par application analogique de l'art. 229 CPC (ATF 144 III 117 consid. 2.2; Bohnet, ibidem).

Cela ne change cependant rien au fait que les parties ont le droit de se déterminer, dans un délai approprié, sur tout acte du tribunal ou de la partie adverse, indépendamment du fait que celui-ci contienne ou non des éléments nouveaux et importants (arrêt du Tribunal fédéral 5A_82/2015 du 16 juin 2015 consid. 4.1). Toutefois, ce droit de réplique inconditionnel permet de préciser, voire de compléter, ses arguments, mais pas de présenter des nouveaux allégués ou offres de preuve. En ce cas, ces nova sont écartés du dossier, la réplique n'étant prise en considération que pour le reste (arrêt du Tribunal fédéral 4A_557/2017 du 21 février 2018 consid. 2.1 à 2.3).

Pour que le droit de réplique soit garanti, il faut que le tribunal laisse un laps de temps suffisant à la partie concernée, entre la remise de la prise de position ou des pièces nouvelles et le prononcé de sa décision, pour qu'elle ait la possibilité de déposer des observations si elle l'estime nécessaire à la défense de ses intérêts. Selon la jurisprudence, le délai d'attente sur lequel doit compter le tribunal ne saurait, en règle générale, être inférieur à dix jours ni supérieur à celui pour recourir. Ce délai d'attente comprend le temps nécessaire au plaideur pour faire parvenir son éventuelle réplique au tribunal (arrêts du Tribunal fédéral 5D_112/2013 du 15 août 2013 consid. 2.2.3; 5A_750/2016 du 15 novembre 2016 consid. 2.1).

2.2.1 En l'espèce, les faits nouveaux allégués et les pièces n° 53 à 56 produites par l'intimée n° 1 dans le cadre de la réponse à l'appel correspondent aux faits nouveaux et pièces nouvelles transmis au Tribunal le 26 septembre 2023, soit après que la cause ait été gardée à juger par le Tribunal. Ces allégations et pièces nouvelles sont en relation avec les pièces complémentaires produites par les appelants lors de l'audience de débats du 18 septembre 2023 et n'auraient pas pu être formées, respectivement produites, avant cette dernière date. Il s'agit ainsi de vrais novas.

Ces faits et moyens de preuve nouveaux ont croisé l'ordonnance querellée, datée du 26 septembre 2023, ce alors même que le délai du droit inconditionnel à la réplique de dix jours au minimum n'avait pas encore expiré.

Les pièces nouvelles n° 53 à 56 et les faits nouveaux y relatifs sont dès lors recevables.

S'agissant des pièces n° 57 et 58, elles sont postérieures à la mise en délibération de la cause par le Tribunal, n'auraient pas pu être produites devant celui-ci et ont été versées à la procédure à la première occasion utile. Elles sont ainsi recevables, de même que les faits qui s'y rapportent.

2.2.2 Les allégués nouveaux des appelants, les allégués n° 14 et 15 de l'appel résument les allégués n° 7 à 13 de la requête de mesures provisionnelles. Il ne s'agit dès lors pas de faits nouveaux. Ces allégués sont partant recevables, tout comme les allégués n° 1 à 13 et 16, dont la recevabilité n'est pas contestée.

Quant aux allégués n° 17 à 23 de l'appel, ils se réfèrent aux pièces n° 24 à 29bis que les appelants ont produites en première instance lors de l'audience de débats du 18 septembre 2023. Ils n'ont en revanche pas été allégués en première instance. Par conséquent, ces faits nouveaux sont des faux novas. Ils auraient pu et dû faire l'objet d'allégués nouveaux introduits devant le premier juge. Allégués pour la première fois en appel, ils sont tardifs et donc irrecevables.

3. L'intimée n° 1 sollicite que les pièces n° 24 à 29bis produites par les appelants soient écartées du dossier au motif qu'elles auraient été obtenues de manière illicite.

3.1 Selon l'art. 152 al. 2 CPC, le tribunal ne prend en considération les moyens de preuve obtenus de manière illicite que si l'intérêt à la manifestation de la vérité est prépondérant.

Cette règle vise tant la preuve obtenue en violation d'une norme de droit matériel, qui protège le bien juridique lésé contre l'atteinte en cause, que celle recueillie en violation d'une règle de procédure (ATF 140 III 6 consid. 3.1).

La jurisprudence précise que l'utilisation de preuves dites illicites n'est pas exclue en toutes circonstances mais qu'il y a lieu de procéder à une pesée des intérêts en présence. Le juge doit procéder à une pesée de l'intérêt à la protection du bien lésé par l'obtention illicite et de l'intérêt à la manifestation de la vérité (ATF 140 III 6 consid. 3.1).

A titre d'exemple et en s'appuyant sur la jurisprudence du Tribunal fédéral et de la CourEDH, le législateur cite le titre obtenu sous la menace ou par la violence, pour lequel l'intégrité personnelle prime en principe l'intérêt à la manifestation de la vérité. Il nomme également la pièce "simplement" dérobée qui, elle, peut par contre être utilisée si l'établissement de la vérité l'exige (Message du Conseil fédéral du 28 juin 2006 relatif au code de procédure civile suisse, in FF 2006 p. 6841 ss, spéc. 6922 s.; Chabloz/Copt, Petit Commentaire du Code de procédure civile, 2021, n. 15 ad art. 152 CPC).

Il est ainsi généralement admis que l'intégrité physique, psychique ou spirituelle a plus de poids que les valeurs matérielles telles que la propriété ou la possession (Chabloz/Copt, op. cit., n. 15 ad art. 152 CPC).

Le bien juridique protégé par les infractions du droit pénal relatives aux titres est la confiance qui, dans les relations juridiques, est placée dans un titre comme moyen de preuve, nommée publica fides. L'art. 251 CP protège également, médiatement, les intérêts des particuliers qui sont potentiellement lésés par l'utilisation d'un titre trompeur (Kinzer, Commentaire romand, Code pénal II, n. 3 ad art. 251 CP).

Celui qui se prévaut de l'illicéité de l'obtention du moyen de preuve a la charge de la preuve. Autrement dit, il n'appartient pas à l'autre partie de démontrer la licéité de l'obtention du moyen de preuve (arrêt du Tribunal fédéral 5A_643/2020 du 11 septembre 2020 consid. 4.4).

3.2 En l'espèce, il n'est pas rendu vraisemblable que les pièces litigieuses aient été obtenues par les appelants de manière illicite. En particulier, ce n'est pas parce que le fils de l'intimée n° 1 a déposé plainte pénale au Chili pour possession et utilisation dans une procédure civile de déclarations devant un officier de police qui ne ressortent d'aucun dossier pénal dans cet Etat ou encore que les avocats de l'intimée n° 1 aient rédigé une déclaration conjointe dans ce sens le 25 septembre 2023, que l'infraction est réalisée, aucune condamnation n'étant rendue vraisemblable et aucun document officiel constatant dite infraction n'ayant été versée au dossier.

Même à supposer que ces pièces aient été obtenues de manière illicite ou qu'elles constituent, comme le soutient l'intimée n° 1, des faux dans les titres, l'intérêt à la manifestation de la vérité apparaît prépondérant dans le cas d'espèce. En effet, l'intérêt à pouvoir déterminer la capacité de discernement de l'intimée n° 1 – objet principal sur lequel portent les pièces litigieuses – prime sur le moyen d'obtention desdites pièces, celles-ci n'ayant en tout état pas été obtenues par une atteinte à l'intégrité physique, psychique ou spirituelle. De même, l'intérêt à la manifestation de la vérité prime sur l'intérêt de l'intimée n° 1 qui serait potentiellement lésée par l'utilisation de ces pièces.

Partant, il n'y a pas lieu d'écarter les pièces litigieuses du dossier.

4. Les appelants reprochent au Tribunal d'avoir retenu que leur requête de mesures provisionnelles s'apparentait à un "séquestre déguisé". Leur prétention serait matérielle puisque, selon eux, l'article 7 du testament américain prévoit la constitution du M______ TRUST au moyen de la "succession résiduaire" de feu I______ et que le compte joint en ferait intégralement partie.

Ils soutiennent également que puisque les mesures requises n'auraient qu'un faible impact sur les droits et la situation de l'intimée n° 1, l'appréciation de l'existence du droit matériel invoqué et des conditions des mesures provisionnelles devrait être plus souple.

Les appelants reprochent également au Tribunal d'avoir retenu qu'ils n'avaient pas rendu vraisemblable le caractère difficilement réparable du dommage qu'ils invoquaient. Le fait de devoir intenter un procès en dommages-intérêts, ajouté au fait que l'intimée n° 1 était domiciliée à l'étranger, d'un âge avancé et susceptible d'être manipulée leur causerait un préjudice difficilement réparable.

4.1.1 Selon l'art. 261 al. 1 CPC, le juge ordonne les mesures provisionnelles nécessaires lorsque le requérant rend vraisemblable qu'une prétention dont il est titulaire est l'objet d'une atteinte ou risque de l'être (let. a) et que cette atteinte risque de lui causer un préjudice difficilement réparable (let. b). Il s'agit là de conditions cumulatives (Bohnet, Commentaire romand CPC, 2ème éd. 2019, n. 3 ad art. 261 CPC).

L'octroi de mesures provisionnelles suppose la vraisemblance du droit invoqué et des chances de succès du procès au fond, ainsi que la vraisemblance, sur la base d'éléments objectifs, qu'un danger imminent menace le droit du requérant, enfin la vraisemblance d'un préjudice difficilement réparable, ce qui implique une urgence (Message du Conseil fédéral du 28 juin 2006 relatif au code de procédure civile suisse, in FF 2006 p. 6841 ss, spéc. 6961; Bohnet, op. cit., n. 3 ss ad art. 261 CPC).

Le juge doit ainsi notamment évaluer les chances de succès de la demande au fond, et admettre ou refuser la mesure selon que l'existence du droit allégué apparaît plus vraisemblable que son inexistence. Lorsqu'il peut ainsi statuer sur la base de la simple vraisemblance, le juge n'a pas à être persuadé de l'exactitude des allégations du requérant, mais il suffit que, sur la base d'éléments objectifs, il acquière l'impression que les faits pertinents se sont produits, sans qu'il doive exclure pour autant la possibilité qu'ils se soient déroulés autrement; quant aux questions de droit, il peut se contenter d'un examen sommaire (arrêts du Tribunal fédéral 4A_508/2012 du 9 janvier 2013 consid. 4.2 et 5P_422/2005 du 1er juin 2006 consid. 3).

Le requérant doit rendre vraisemblable qu'il s'expose, en raison de la durée nécessaire pour rendre une décision définitive, à un préjudice qui ne pourrait pas être entièrement supprimé même si le jugement à intervenir devait lui donner gain de cause. En d'autres termes, il s'agit d'éviter d'être mis devant un fait accompli dont le jugement ne pourrait pas complètement supprimer les effets (arrêts du Tribunal fédéral 4A_50/2019 du 28 mai 2019 consid. 6.6.2; 4A_611/2011 du 3 janvier 2012 consid. 4.1). Est difficilement réparable le préjudice matériel, patrimonial ou immatériel qui sera plus tard impossible ou difficile à mesurer ou à compenser entièrement (ATF 138 III 378 consid. 6.3).

Le juge doit procéder à une pesée des intérêts entre les deux préjudices difficilement réparables, celui du demandeur à l'action si la mesure n'était pas exécutée immédiatement et celui qu'entraînerait pour le défendeur l'exécution de cette mesure (ibidem).

La simple exécution de créances d'argent n'emporte pas en soi un dommage difficilement réparable dans la mesure où la personne concernée peut en obtenir la restitution si elle obtient finalement gain de cause (ATF 138 III 333 consid. 1.3.1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_143/2012 du 9 mai 2012 consid. 2.2.1; 5D_52/2010 du 10 mai 2010 consid. 1.1.1 in SJ 2011 I p. 134).

4.1.2 Selon l'art. 262 CPC, le Tribunal peut ordonner toute mesure provisionnelle propre à prévenir ou à faire cesser le préjudice, notamment les mesures suivantes : l'interdiction (let. a), l'ordre de cessation d'un état de fait illicite (let. b), l'ordre donné à une autorité qui tient un registre ou à un tiers (let. c), la fourniture d'une prestation en nature (let. d) ou le versement d'une prestation en argent, lorsque la loi le prévoit (let. e).

Selon l'art. 263 CPC, si l'action au fond n'est pas encore pendante, le tribunal impartit au requérant un délai pour le dépôt de la demande, sous peine de caducité des mesures ordonnées.

L'art. 269 CPC réserve diverses dispositions d'autres lois en matière de mesures provisionnelles. La Loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite (RS 281.1; ci-après: LP) constitue l'exception principale.

La garantie provisoire de dettes d'argent est réglée par les art. 271 ss LP relatifs au séquestre et il ne peut être prononcé de mesures provisionnelles pour protéger les créances pécuniaires à titre provisoire ("séquestre déguisé"; ATF 86 II 291 consid. 2; 108 II 180 consid. 2; arrêts du Tribunal fédéral 5D_54/2008 du 23 juin 2008 consid. 2.3 et 5A_853/2013 du 23 mai 2014 consid. 2.2.3 et 3.3). Le champ d'application des mesures provisionnelles conservatoires est donc en principe limité à la protection des droits réels ou personnels dont la nature n'est pas pécuniaire (arrêts du Tribunal fédéral 5A_853/2013 du 23 mai 2014 consid. 2.2.3 et 3.3 et 5A_852/2010 du 28 mars 2011 consid. 3.1; Hohl, Procédure civile, tome II, 2010, n. 1747 s.).

La Cour a eu l'occasion de juger qu'une interdiction faite à un tiers, soit une banque, de donner suite à toute instruction de transfert ou de disposition relative à tout compte détenu par une partie dont les droits successoraux et la fonction d'exécuteur testamentaire étaient contestés, ne tendaient pas à obtenir une garantie pour le recouvrement d'une éventuelle créance mais visait à immobiliser des biens, sous contrôle de ladite partie (en sa qualité d'exécuteur testamentaire), mais susceptibles d'entrer dans la masse successorale faisant l'objet de la mission d'exécuteur testamentaire litigieuse à l'étranger, de sorte qu'une telle mesure ne constituait pas un "séquestre déguisé" (ACJC/903/2021 du 8 juillet 2021 consid. 3.1.2; ACJC/521/2019 du 4 avril 2019 consid. 7.2).

4.2 En l'espèce, il y a lieu d'examiner si les conditions pour le prononcé de mesures provisionnelles, tendant au blocage d'un compte bancaire et à une interdiction faite aux intimées de procéder ou de faire procéder à un transfert d'avoirs, sont réunies.

4.2.1 Selon les appelants, la requête de mesures provisionnelles ne serait pas un "séquestre déguisé", puisque le compte joint constituerait un objet mobilier qu'il y aurait lieu de protéger afin de garantir son intégration dans le trust une fois celui-ci constitué. Prima facie, les testaments litigieux ne permettent pas de retenir ce cas de figure.

En effet, certes le testament américain révoque toutes les dispositions testamentaires antérieures dont le testament chilien fait partie. Cela étant, le testament américain réserve également dans le préambule "les testaments et dispositions testamentaires relatifs à la cession de biens situés en dehors des Etats-Unis et exécutés conformément à la loi chilienne ou suisse". Ainsi, il faut comprendre que le testament américain ne s'applique pas aux biens situés en Suisse, dont le compte joint fait partie. Le fait que le de cujus ait précisé à l'article 7 du testament américain que le M______ TRUST réunirait l'ensemble des biens restants "quel qu'en soit la nature ou l'emplacement" peut et doit ainsi être interprété à la lumière du préambule précité, à savoir qu'il devra réunir uniquement le reste des avoirs situés aux Etats-Unis. Le compte joint étant situé en Suisse, il ne semble pas faire partie des avoirs qui devront être intégrés dans le trust précité. Il s'agit ainsi d'un compte bancaire dont la dévolution sera vraisemblablement réglée à la lumière du testament chilien.

Les appelants n'ont ainsi qu'une prétention d'ordre pécuniaire à faire valoir contre l'intimée n° 1 tendant au partage du compte joint.

C'est, par conséquent, à juste titre que le Tribunal a retenu que la requête des appelants constituait un "séquestre déguisé" et que les appelants devaient ainsi être déboutés de leur requête.

Ceci suffit à sceller le sort de l'appel et à confirmer l'ordonnance entreprise.

4.2.2 A titre superfétatoire, il y a lieu d'ajouter, comme retenu par le premier juge, que ni une atteinte à la prétention des appelants ni un préjudice difficilement réparable n'ont été rendus vraisemblables par les appelants.

En effet, l'incapacité de discernement de l'intimée n° 1 n'est pas rendue vraisemblable, aucune des deux procédures intentées par les appelants aux fins de nommer un curateur en sa faveur n'ayant abouti et aucune autre pièce au dossier ne permettant de constater une telle incapacité. Les déclarations écrites devant la police chilienne produites par les appelants le 18 septembre 2023 constituent, pour certaines, de simples allégations de parties (cf. pièces n° 24 à 25bis) et, pour d'autres, n'émanent pas de professionnels du domaine médical (cf. pièces n° 26 à 29bis). Ils ne sont ainsi pas susceptibles d'attester d'une incapacité de discernement de l'intimée. En revanche, il ressort du dossier que l'intimée n° 1 a pu témoigner le 9 mai 2023 devant la police chilienne dans le cadre de la procédure pénale initiée par sa fille contre son fils. Si elle n'avait pas été capable de discernement, elle n'aurait vraisemblablement pas pu témoigner. Il ne saurait ainsi être retenu, sans autre élément de preuve, que le fils de l'intimée n° 1 exploiterait la faiblesse de sa mère pour ses propres intérêts, au détriment des intérêts de sa mère et de sa sœur.

Par ailleurs, le fait que l'intimée n° 1 soit domiciliée au Chili ne permet pas, à lui seul, de constater qu'une éventuelle procédure intentée contre elle, que ce soit en partage de la succession ou en paiement de dommages-intérêts, serait à ce point compliquée et/ou particulièrement longue qu'elle créerait un préjudice difficilement réparable aux appelants. En effet, dans toutes les procédures intentées jusqu'à ce jour par les appelants contre l'intimée n° 1, que ce soit aux Etats-Unis, au Chili ou encore en Suisse, celle-ci a pris une part active ou s'est faite représenter.

De plus, il n'est pas non plus rendu vraisemblable ni que l'intimée n° 1 tenterait de soustraire des avoirs appartenant à la succession ni qu'elle serait insolvable. En effet, le fait de demander à l'intimée n° 2 le versement sur son compte personnel de la moitié du compte joint, alors même que l'intimée n° 1 allègue pouvoir prétendre, à teneur du testament chilien, à 70 % de la succession (20% s'agissant de sa part réservataire + 25% de "quart de libre disposition" + 25% de "quart d'améliorations") en sus de la moitié du compte lui revenant, soit au moins 85% des avoirs totaux déposés sur ce compte, laisse plutôt penser qu'elle n'entend justement pas soustraire des actifs à la succession mais uniquement récupérer ce qui lui appartient de plein droit, à savoir sa part en tant que co-titulaire du compte joint.

Enfin, comme l'a retenu le Tribunal, l'insolvabilité de l'intimée n° 1 n'est pas non plus rendu vraisemblable. Si elle était condamnée à payer un montant en faveur des appelants, il n'est pas rendu vraisemblable qu'elle ne serait pas en mesure de s'en acquitter.

A la lumière des éléments qui précèdent, c'est à juste titre que le Tribunal a retenu que les conditions pour le prononcé de mesures provisionnelles tendant au blocage du compte joint n'étaient pas réunies et que les appelants devaient être déboutés de leurs conclusions.

L'ordonnance querellée doit ainsi être confirmée pour cette raison également.

5. 5.1 Les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 1'440 fr. (art. 26 et 37 RTFMC), mis à la charge des appelants, qui succombent intégralement (art. 106 al. 1 CPC) et compensés avec l'avance effectuée, acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

5.2 Les appelants seront condamnés, conjointement et solidairement, à verser à l'intimée n° 1, 1'500 fr. à titre de dépens d'appel, débours compris et sans TVA, l'intimée n° 1 ayant son domicile à l'étranger (arrêt du Tribunal fédéral 4A_623/2015 du 3 mars 2016; art. 84, 85, 88 et 90 RTFMC; art. 23 al. 1, 25 et 26 LaCC).

Il ne sera pas alloué de dépens à l'intimée n° 2, celle-ci n'en réclamant pas.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 9 octobre 2023 par A______, B______, C______ et D______ contre l'ordonnance OTPI/596/2023 rendue le 26 septembre 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/1179/2023‑16 SP.

Au fond :

Confirme l'ordonnance entreprise.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais d'appel :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'440 fr., les met à la charge de A______, B______, C______ et D______, conjointement et solidairement, et les compense avec l'avance de frais fournie, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______, B______, C______ et D______ à payer, conjointement et solidairement, 1'500 fr. à E______ au titre de dépens d'appel.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens d'appel à F______.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Monsieur Ivo BUETTI, juges; Madame Mélanie DE RESENDE PEREIRA, greffière.

 

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Mélanie DE RESENDE PEREIRA

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.