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Décisions | Sommaires

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C/18742/2021

ACJC/901/2022 du 29.06.2022 sur JTPI/1066/2022 ( SML ) , JUGE

Normes : LP.80.al1; CPC.336.al2; LP.81.al1
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/18742/2021 ACJC/901/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du MERCREDI 29 JUIN 2022

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______[GE], recourant contre un jugement rendu par la 5ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 27 janvier 2022, comparant par Me Patrick KÖNITZER, avocat, KAISER ODERMATT & PARTNER AG, Baarerstrasse 12, case postale 458, 6301 Zoug, en l'étude duquel il fait élection de domicile,

et

B______ LTD, sise ______[VD], Grande-Bretagne, intimée, comparant par Me Monia KARMASS, avocate, LIBRA LAW, avenue de Rhodanie 54, case postale 1044, 1001 Lausanne, en l'étude de laquelle elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/1066/2022 du 27 janvier 2022, reçu le 4 février 2022 par A______, le Tribunal de première instance a prononcé la mainlevée définitive de l'opposition formée par ce dernier au commandement de payer, poursuite n° 2______ intentée à son encontre par B______ LTD (chiffre 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 300 fr., compensés avec l'avance effectuée et mis à la charge de A______, condamné à verser à B______ LTD 300 fr. à ce titre (ch. 2 et 3) et 333 fr. TTC à titre de dépens (ch. 4).

Le Tribunal a considéré que A______ avait fait valoir le moyen de la compensation à hauteur de 900 fr. sur la base de trois jugements du 31 mai 2021. B______ LTD avait cependant objecté que lesdits jugements ne comportaient pas la mention attestant qu'ils étaient exécutoires, de sorte qu'il fallait faire intégralement droit à la requête de mainlevée.

B. a. Par acte expédié le 8 février 2022 à la Cour de justice, A______ recourt contre le jugement précité, dont il requiert l'annulation. Il conclut, avec suite de frais, au rejet de la requête de mainlevée définitive à hauteur de 900 fr.

Il produit six pièces nouvelles, dont un extrait de la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (FAO) (pièce 7).

Préalablement, il a requis la suspension de l'effet exécutoire attaché au jugement attaqué.

b. B______ LTD a conclu au rejet de cette requête, en produisant trois pièces nouvelles, soit un arrêt du Tribunal fédéral du ______ 2021 (cause 6______/2021), un arrêt de la Cour de justice du ______ 2021 (cause C/7______/2020) et une ordonnance du Tribunal fédéral du ______ 2021 (cause 8______/2021), rendus dans trois causes ayant opposé les parties (pièces 3 à 5).

c. Dans sa réponse du 21 février 2022, B______ LTD conclut, avec suite de frais, au rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité.

Elle forme des allégués nouveaux "pour une meilleure compréhension du litige" et développe un argumentation nouvelle fondée sur les art. 85 et 86 CO.

Elle produit deux pièces nouvelles, soit un courrier adressé le 19 janvier 2021 par son conseil au Tribunal dans la procédure C/1______/2019 (pièce 3), ainsi qu'une lettre du 14 octobre 2021 de son conseil au conseil de A______ (pièce 5).

d. Par arrêt du 24 février 2022, la Cour a rejeté la requête de A______ tendant à la suspension de l'effet exécutoire attaché au jugement attaqué et dit qu'il serait statué sur les frais dans l'arrêt rendu au fond.

e. Les parties ont été informées le 23 mai 2022 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier de première instance:

a. Sur réquisition d'B______ LTD, l'Office des poursuites a notifié le 26 août 2021 à A______ un commandement de payer, poursuite n° 2______, portant sur 6'100 fr. plus intérêts moratoires à 5 % dès le 7 juin 2021, dus à titre de "participation aux frais judiciaires ordonnée par le Tribunal de première instance dans son jugement du 3 mai 2021 (cause C/1______/2019-15)".

A______ y a formé opposition.

b. Par acte du 30 septembre 2021, B______ LTD a requis du Tribunal le prononcé de la mainlevée définitive de ladite opposition.

Elle a allégué que la procédure C/1______/2019-15 qu'elle avait engagée à l'encontre de A______ - tendant au paiement par ce dernier de 2'000'000 fr. à titre de dommages-intérêts - était devenue sans objet, ce que le Tribunal avait constaté par jugement JTPI/5751/2021 du 3 mai 2021. Le Tribunal avait fixé les frais judiciaires à 10'200 fr. et condamné A______ à lui verser 6'100 fr. à titre de participation auxdits frais. Le jugement n'avait pas fait l'objet d'appel ou de recours et était par conséquent exécutoire.

B______ LTD a produit, outre le commandement de payer précité, le jugement du Tribunal du 3 mai 2021 - communiqué pour notification aux parties le 5 mai 2021 et condamnant A______ à verser 6'100 fr. à B______ LTD -, et un courrier de la Cour du 18 juin 2021 indiquant qu'aucun appel n'avait été déposé à ce jour par A______.

c. Lors de l'audience du Tribunal du 21 janvier 2022, B______ LTD a persisté dans sa requête.

A______ a invoqué la compensation à hauteur de 900 fr., en produisant (pièces 2 à 4) trois jugements du Tribunal du 31 mai 2021, communiqués aux parties le 3 juin 2021, lesquels condamnent tous trois B______ LTD à lui verser 300 fr. à titre de dépens (causes nos C/3______/2021, C/4______/2021 et C/5______/2021). Ces jugements ont été rendus dans le cadre d'une procédure de faillite sans poursuite préalable et indiquent qu'ils peuvent faire l'objet d'un recours devant la Cour dans les 10 jours suivant leur notification.

A______ a produit, outre ces trois jugements:

- un courrier du 17 juin 2021 - mentionnant comme objet "A______ vs. B______ Ltd. (C/4______/2021-C/3______/2021-C/5______/2021)" - par lequel son conseil mettait en demeure B______ LTD "de bien vouloir s'acquitter des CHF 300 de dépens que le Tribunal de première instance a[vait] mis à sa charge dans un délai de 10 jours " (pièce 5);

- la réponse du 21 juin 2021, par laquelle B______ LTD relevait que A______ n'avait "toujours pas payé à B______ les sommes auxquelles il a[vait] été condamné par sentence arbitrale du 29 octobre 2020, d'un montant total de CHF 1'358'384.05, alors même qu'il ne contest[ait] pas les frais d'arbitrage et les dépens d'un montant total de CHF 227'467.05"; B______ LTD invoquait donc la compensation à l'encontre de A______ "pour sa créance de CHF 300, qui représent[ait] 0.02% de la somme totale qu'il d[evait] lui-même à B______ Ltd. Conformément à l'article 85 CO, ce montant sera[it] imputé sur les intérêts dus par M. A______ sur le premier montant exigible, à savoir celui qui découl[ait] de la sentence arbitrale du 29 octobre 2020" (pièce 6).

B______ LTD a contesté la créance compensante car les trois jugements n'étaient pas accompagnés d'attestations démontrant leur caractère exécutoire.

A______ a déclaré qu'il n'avait pas demandé lesdites attestations, au motif que sa situation était obérée. Par ailleurs, ces documents n'étaient pas nécessaires et le caractère exécutoire des jugements ressortait des pièces 5 et 6 produites.

B______ LTD a relevé "qu'à teneur de la pièce 6, il y aurait une surcompensation de la créance compensante".

A______ a enfin déclaré qu'il n'avait pas invoqué la compensation "pour cette créance d'environ CHF 1'300'000.-".

Le Tribunal a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience.

EN DROIT

1. 1.1 S'agissant d'une procédure de mainlevée, seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. a et 309 let. b ch. 3 CPC). Selon l'art. 251 let. a CPC, la procédure sommaire est applicable aux décisions rendues en matière de mainlevée d'opposition.

Aux termes de l'art. 321 al. 1 et 2 CPC, le recours, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l'instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée, pour les décisions prises en procédure sommaire (art. 251 let. a CPC).

En l'espèce, le recours a été formé dans le délai et la forme prévus par la loi, de sorte qu'il est recevable.

1.2 Dans le cadre d'un recours, le pouvoir d'examen de la Cour est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits
(art. 320 CPC). L'autorité de recours a un plein pouvoir d'examen en droit, mais un pouvoir limité à l'arbitraire en fait, n'examinant par ailleurs que les griefs formulés et motivés par le recourant (Hohl/De Poret Bortolaso/Aguet, Procédure civile, Tome II, 2ème édition, Berne, 2010, n. 2307).

Par ailleurs, la maxime des débats s'applique et la preuve des faits allégués doit être apportée par titre (art. 55 al. 1, 255 let. a a contrario et 254 CPC). En outre, la maxime de disposition s'applique (art. 58 al. 1 CPC).

1.3 S'agissant d'une procédure de mainlevée définitive, la Cour doit vérifier d'office si la requête est fondée sur un titre de mainlevée valable (arrêt du Tribunal fédéral 5P.174/2005 du 7 octobre 2005 consid. 2.1). Dans cette mesure, la Cour applique librement le droit.

2. Les conclusions, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables (art. 326 al. 1 CPC).

Les faits notoires ou notoirement connus du tribunal ne doivent pas être prouvés (art. 151 CPC; faits notoires).

Ainsi, les allégations et pièces nouvelles des parties ne sont pas recevables et la Cour examinera la cause sur la base du dossier dont disposait le premier juge. La question de savoir si certaines pièces nouvelles des parties visent des faits notoires peut demeurer indécise, dans la mesure où ces pièces ne sont pas déterminantes pour la solution du litige.

3. Le recourant fait grief au Tribunal d'avoir violé les art. 80 al. 1 et 81 al. 1 LP en faisant droit à la requête de mainlevée dans son intégralité, au motif qu'il n'avait pas fourni une attestation du caractère exécutoire des trois jugements du 31 mai 2021. Il ressortait des pièces qu'il avait produites, et notamment de sa pièce 6, que l'intimée avait admis sans réserve la créance compensante, puisqu'elle avait invoqué la compensation à son encontre "pour sa créance de CHF 300 [recte: 3 x CHF 300, soit CHF 900]".

A titre subsidiaire, si la Cour devait reconnaître le caractère exécutoire des jugements du 31 mai 2021, l'intimée invoque nouvellement l'imputation des trois montants résultant de ces jugements "sur le paiement des intérêts dus par le recourant" sur la "créance totale" de 1'358'386 fr. 05. La compensation invoquée par le recourant "consisterait en un paiement partiel" de cette dette, régi par l'art 85 CO. L'intimée fait valoir nouvellement que le 21 juin 2021 elle a notifié au recourant, conformément à l'art 86 CO, "sa volonté d'imputer la créance de CHF 300, augmentée par la suite à CHF 900, sur les intérêts dus par le recourant". Celui-ci ne s'étant pas "opposé à cette proposition d'imputation", "la créance compensatrice invoquée par l'intimée devrait être déduite des intérêts que le recourant doit encore à l'intimée". Ladite créance serait donc elle-même "largement compensée par les intérêts dus par cette dernière", de sorte que le recours devrait être de toute façon rejeté.

3.1

3.1.1 Le créancier qui est au bénéfice d'un jugement exécutoire peut requérir du juge la mainlevée définitive de l'opposition (art. 80 al. 1 LP).

Le juge de la mainlevée doit examiner d'office l'existence d'un titre à la mainlevée définitive dans la poursuite pendante, notamment le caractère exécutoire de la décision invoquée (GILLIERON, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, Lausanne, 1999, no 22 ad art. 80 LP).

La preuve du caractère exécutoire doit être apportée par le poursuivant au moyen de l'attestation du caractère exécutoire délivrée par le tribunal qui a rendu la décision (art. 336 al. 2 CPC) (ABBET, La mainlevée de l'opposition, Commentaire des art. 79 à 84 LP, 2017, n. 72 et 73 ad art. 80 LP). Cette attestation est nécessaire pour que la procédure d’exécution puisse suivre son cours auprès du juge de la mainlevée (JEANDIN, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2019, n. 9 ad art. 336 CPC).

L'attestation du caractère exécutoire n'est toutefois qu'un simple moyen de preuve (ABBET, op. cit., n. 75 ad art 80 LP). Le caractère exécutoire d'une décision peut aussi être prouvé en démontrant qu’il n’existe pas de voie de recours ordinaire contre le jugement correspondant. Un extrait du procès-verbal montrant que les parties ont renoncé à recourir ou la décision de la juridiction d’appel rejetant l’appel ou déclarant celui-ci irrecevable constitue également une preuve possible. Le caractère exécutoire peut également résulter du fait que le défendeur n’a pas contesté le caractère exécutoire du jugement, ainsi que du fait qu’il n’existe aucun indice de recours contre la décision et que plusieurs années se sont écoulées depuis le prononcé de celle-ci (STAEHELIN, in Basler Kommentar, Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs I, 3ème éd., 2021, n. 55 ad art. 80 LP).

Une décision qui ne peut être attaquée que par un recours extraordinaire acquiert ex lege force de chose jugée dès son prononcé. Elle est exécutoire, à moins qu’un recours ait été déposé en temps utile et que l’instance saisie du recours en ait alors suspendu l’exécution (art. 336 al 1 let. a CPC; octroi de l’effet suspensif, lequel déploie des effets ex tunc) comme le lui permet la procédure de recours (art.325 CO) (JEANDIN, op. cit., n. 5 ad art. 336 CPC).

3.1.2 Lorsque la poursuite est fondée sur un jugement exécutoire rendu par un tribunal, le juge ordonne la mainlevée définitive de l’opposition, à moins que l’opposant ne prouve par titre que la dette a été éteinte ou qu’il a obtenu un sursis postérieurement au jugement, ou qu’il ne se prévale de la prescription (art. 81 al. 1 LP).

Dans la procédure de mainlevée définitive, les moyens de défense du débiteur sont fortement limités (art. 81 LP); un titre à la mainlevée définitive ne peut être remis en cause qu'au moyen de pièces totalement univoques (ATF 140 III 372 consid. 3.1). Le titre de mainlevée au sens de l'art. 81 al. 1 LP créant la présomption que la dette existe, cette présomption ne peut être renversée que par la preuve stricte du contraire (ATF 136 III 624 consid. 4.2.1). Lorsque l'opposant se prévaut de l'extinction de la dette par compensation, il ne peut le prouver que par la production de titres qui justifieraient eux-mêmes la mainlevée définitive ou à tout le moins la mainlevée provisoire (ATF 115 III 97 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_703/2019 du 27 avril 2020 consid. 4.1).

3.1.3 La loi règle l'imputation d'un paiement du débiteur en cas de paiement partiel d'une seule dette (art. 85 CO) et en cas de pluralité de dettes (art. 86 et 87 CO).

Le créancier a en principe le droit de refuser le paiement partiel d’une dette (art. 69 al. 1 CO). S’il accepte un tel paiement, il ne doit pas être prétérité. L'art. 85 CO le protège, en refusant au débiteur le droit de choisir la partie de la dette sur laquelle il entend imputer son paiement. Plus précisément, le débiteur doit imputer le paiement partiel en priorité sur les intérêts et les frais (art. 85 al.1 CO) et sur la partie la moins garantie de la dette (art. 85 al. 2 CO) (Loertscher/Tolou, Commentaire romand, CO I, 2021, n. 1 ad art. 85 CO).

La dette d’intérêts n’étant pas considérée comme étant une dette distincte de la dette en capital, les art. 86 et 87 CO, qui traitent de l’imputation en cas de pluralité de dettes, ne s’appliquent pas lorsqu’on est en présence d’une seule dette en capital avec intérêts (Loertscher/Tolou, op. cit., n. 3a ad art. 85 CO).

L'art. 86 CO règle le cas où le paiement ne suffit pas à acquitter les diverses dettes qu’un débiteur doit payer au même créancier. A la différence de l'art. 85 CO, qui concerne le paiement partiel d’une seule dette, il accorde la priorité du choix au débiteur (art. 86 al. 1 CO); à défaut, le choix passe au créancier, sous réserve d’une opposition immédiate de la part du débiteur (art. 86 al. 2 CO). Ce système en cascade est complété par l'art 87 CO, qui détermine l’ordre d’imputation en l’absence de choix du débiteur et du créancier (Loertscher/Tolou, op. cit., n. 1 ad art. 86 CO).

Les art. 85 et 86 CO s'appliquent également en matière de compensation (Loertscher/Tolou, op. cit., n. 2 ad art. 85 CO et n. 2 ad art. 86 CO).

3.1.4 La déclaration de compensation doit permettre à son titulaire de comprendre de manière non équivoque l'intention du débiteur de compenser et, en fonction des circonstances, quelles sont les créances compensantes et compensées:

a) lorsqu'il y a plusieurs créances compensées (ou à compenser) exécutables contre le débiteur, celui-ci peut déclarer au moment d'invoquer la compensation quelle(s) créance(s) il entend payer par compensation; en l'absence d'indication, on applique l'art. 86 CO qui fixe l'ordre de l'extinction des créances; le Tribunal fédéral semble toutefois d'un avis contraire et retient que la déclaration de compensation est incomplète (arrêt du Tribunal fédéral 4C.174/1999, SJ 2000 I 178);

b) lorsqu'il dispose de plusieurs créances compensantes exigibles contre le titulaire de la créance compensée, le débiteur doit indiquer la créance dont il entend obtenir l'exécution par compensation (il n'y a pas d'analogie avec l'art. 86 al. 1 CO); ce choix n'appartient pas au titulaire de la créance compensée; l'absence d'indication entraîne l'inefficacité de la compensation (TERCIER/PICHONNAZ, Le droit des obligations, 6ème éd., pp 374-375).

3.1.5 Il n'appartient pas au juge saisi d'une requête de mainlevée définitive de trancher des questions de droit matériel délicates ou pour la solution desquelles le pouvoir d'appréciation joue un rôle important, la décision sur de telles questions étant réservée au juge du fond (ATF 124 III 501 consid. 3a et les références; arrêt du Tribunal fédéral 5A_416/2019 du 11 octobre 2019 consid. 4.2.1).

3.2 En l'espèce, il n'est ni contesté ni contestable que l'intimée disposait d'un titre de mainlevée définitive, à savoir le jugement du Tribunal du 3 mai 2021, dont elle a établi le caractère exécutoire par la production du courrier de la Cour du 18 juin 2021.

3.2.1 Le recourant s'est prévalu de l'extinction partielle de la dette par compensation, en produisant trois jugements du Tribunal du 31 mai 2021, lesquels condamnent l'intimée à lui verser 900 fr. au total. Il n'a cependant déposé ni les attestations du caractère exécutoire de l'art. 336 al. 2 CPC, ni d'autres titres aptes à établir le caractère exécutoire des trois jugements. Cela étant, l'intimée a été en mesure de se déterminer sur cette question lors de l'audience du Tribunal 21 janvier 2022. A cette occasion, elle n'a pas prétendu que lesdites décisions n'étaient pas en force, mais s'est bornée à déclarer que sa partie adverse n'avait pas fourni des attestations démontrant leur caractère exécutoire. Elle n'a pas allégué que des recours avaient été déposés en temps utile et que l’instance saisie en avait suspendu l’exécution. Enfin, lorsqu'en juin 2021 le recourant lui a réclamé le versement des montants résultant des trois décisions, l'intimée ne lui a pas répondu que celles-ci n'étaient pas exécutoires, mais qu'elle se prévalait de la compensation.

En définitive, contrairement à ce qu'a retenu le Tribunal, le recourant a apporté la preuve du caractère exécutoire des jugements qui fondent sa créance compensante de 900 fr.

3.2.2 L'argumentation subsidiaire de l'intimée se fonde sur des allégations nouvelles irrecevables, de sorte qu'il n'y a pas lieu de l'examiner. Lors de l'audience du 21 janvier 2022, l'intimée s'est bornée à évoquer une "surcompensation de la créance compensante", en se référant à la pièce 6 produite par sa partie adverse, sans autres explications. Cette simple évocation ne permettait pas de comprendre qu'elle se prévalait, à titre subsidiaire et dans la procédure, des dispositions de l'art. 85 CO, voire de celles de l'art. 86 CO. Ce dernier article n'était d'ailleurs pas visé dans le courrier du 21 juin 2021 et ce courrier n'était même pas mentionné dans la requête de mainlevée définitive. L'intimée ne prétend au demeurant pas avoir soumis au premier juge ses arguments subsidiaires.

En toute hypothèse, le recourant oppose une créance de 900 fr. à la créance de 6'100 fr. déduite en poursuite, ce qui permettrait d'envisager l'application de l'art. 85 CO (paiement partiel d'une dette unique par compensation) et exclurait celle de l'art. 86 CO. Pourtant, l'intimée invoque simultanément cette dernière disposition, laquelle s'applique en cas de pluralité de dettes. En première instance, elle n'a formé aucun allégué permettant de retenir qu'elle détiendrait plusieurs créances à l'encontre du recourant. Il n'est pas possible de comprendre de manière non équivoque quelle était l'intention de l'intimée en matière de compensation.

Il résulte de ce qui précède et des développements figurant ci-dessus sous consid. 3.1.3 et 3.1.4 que l'argumentation subsidiaire (irrecevable) de l'intimée soulève des questions de droit matériel délicates, qui ne seraient de toute façon pas du ressort du juge de la mainlevée définitive mais devraient être réservées au juge du fond.

3.2.3 Le recours se révèle fondé, de sorte que le chiffre 1 du dispositif du jugement attaqué sera annulé. Dans la mesure où la cause est en état d'être jugée (art. 327 al. 3 let. b CPC), la mainlevée de l'opposition formée par le recourant au commandement de payer, poursuite n° 2______, sera prononcée à concurrence de 5'200 fr. (6'100 fr. - 900 fr.) plus intérêts moratoires à 5 % dès le 7 juin 2021, cette dernière date n'étant pas contestée.

4. 4.1 Compte tenu de l'issue de la procédure (art. 106 al. 2 CPC) les frais judiciaires de première instance, dont la quotité n'est à juste titre pas contestée, seront mis à concurrence de 250 fr. à charge du recourant et de 50 fr. à charge de l'intimée. Ils seront compensés avec l'avance effectuée par l'intimée, acquise à l'Etat de Genève. Le recourant versera ainsi 250 fr. à l'intimée.

Il lui versera également de dépens de première instance réduits à 280 fr.

Les chiffres 2 à 4 du dispositif du jugement attaqué seront modifiés en conséquence.

4.2 Les frais judiciaires du recours, arrêtés à 450 fr. (art. 48 et 61 OELP), seront mis à la charge de l'intimée, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC). Ils seront compensés avec l'avance effectuée par le recourant, laquelle demeure acquise à l'Etat de Genève, et l'intimée sera condamnée à verser au recourant le montant précité.

L'intimée versera également au recourant 450 fr. à titre de dépens de recours, une réduction en conformité des art. 88 et 90 RTFMC ne se justifiant pas compte tenu de l'ampleur du travail et du temps employé (art. 20 al. 1 et 25 et 26 LaCC; art. 85 RTFMC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 8 février 2022 par A______ contre le jugement JTPI/1066/2022 rendu le 27 janvier 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/18742/2021-5 SML.

Au fond :

Annule le jugement attaqué et, statuant à nouveau :

Prononce la mainlevée définitive de l'opposition formée par A______ au commandement de payer, poursuite n° 2______, à concurrence de 5'200 fr. plus intérêts moratoires à 5 % dès le 7 juin 2021.

Arrête les frais judiciaires de première instance à 300 fr. les met à la charge de A______ à concurrence de 250 fr. et à la charge d'B______ LTD à concurrence de 50 fr., et les compense avec l'avance effectuée, laquelle demeure acquis à l'Etat de Genève.

Condamne A______ à verser à B______ LTD 250 fr. à titre de remboursement des frais judiciaires de première instance et 280 fr. à titre de dépens de première instance.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires de recours à 450 fr., les met à la charge d'B______ LTD et les compense avec l'avance effectuée, laquelle demeure acquise à l'Etat de Genève.

Condamne B______ LTD à verser à A______ 450 fr. à titre de remboursement des frais judiciaires de recours et 450 fr. à titre de dépens de recours.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Monsieur Ivo BUETTI, juges; Madame Laura SESSA, greffière.

 

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Laura SESSA

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.