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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/8198/2023

ACPR/79/2025 du 27.01.2025 sur OTDP/2778/2024 ( TDP ) , ADMIS

Descripteurs : CAPACITÉ D'ESTER EN JUSTICE;CURATELLE;DROITS STRICTEMENT PERSONNELS;ORDONNANCE PÉNALE;FORMALISME EXCESSIF;OPPOSITION(PROCÉDURE)
Normes : CPP.356; CPP.106; CC.390; CPP.127

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/8198/2023 ACPR/79/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 27 janvier 2025

 

Entre

A______, représentée par Me B______, avocat,

recourante,

contre l'ordonnance rendue le 2 décembre 2024 par le Tribunal de police,

et

LE TRIBUNAL DE POLICE, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève, case postale 3715, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B,
1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. Par acte déposé le 12 décembre 2024, A______ recourt contre l'ordonnance du 2 précédent, par laquelle le Tribunal de police a constaté l'irrecevabilité de l'opposition formée en son nom par sa curatrice, C______, et dit que l'ordonnance pénale rendue le 6 juillet 2023 devait être assimilée à un jugement entré en force.

Elle conclut, préalablement, à l'octroi de l'assistance juridique pour la procédure de recours et à la nomination de Me B______ pour la défense de ses intérêts. Sur le fond, elle conclut à l'annulation de l'ordonnance querellée et au constat de la validité de l'opposition à l'ordonnance pénale; subsidiairement au renvoi de la cause au Tribunal de police pour nouvelle décision dans le sens des considérants; plus subsidiairement encore, à l'octroi d'un délai supplémentaire pour "corriger" l'opposition, à l'annulation de l'ordonnance pénale du 6 juillet 2023 et au renvoi de la cause au Tribunal de police pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

Les frais de la procédure de recours devaient enfin être laissés à la charge de l'État et une indemnité de CHF 1'524.21 TTC être allouée à Me B______ pour l'activité déployée.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______, née le ______ 1965, de nationalité portugaise, est suivie depuis 2018 dans le contexte d'un tableau clinique complexe, comprenant un trouble dépressif récurrent et des troubles mentaux et du comportement liés à la consommation d'alcool.

b. Par ordonnance du 21 novembre 2022, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après TPAE) a institué une curatelle de représentation et de gestion en faveur de A______, désigné C______, intervenante en protection de l'adulte auprès du Service de protection de l'adulte, à la fonction de curatrice, et lui a confié la tâche de représenter l'intéressée dans ses rapports avec les tiers, en particulier en matière d'affaires administratives et juridiques, de gérer ses biens et revenus et d'administrer ses affaires courantes (art. 391 al. 3, 394 al. 1 et 395 al. 1 CC).

c. Le 5 juillet 2023, A______ a été entendue par la police, après avoir pénétré dans un commerce et y avoir emporté la caisse enregistreuse, avec son contenu.

d. Par ordonnance pénale du 6 juillet 2023, notifiée le jour même en mains propres, le Ministère public a déclaré A______ coupable de vol, de dommages à la propriété et de violation de domicile et l'a condamnée à une peine privative de liberté de 45 jours, sous déduction d'un jour de détention avant jugement, mais a renoncé à son expulsion.

e. Par courrier du 17 juillet 2023, C______, a, en sa qualité de curatrice de A______, formé opposition à cette ordonnance.

f. Par ordonnance du 5 décembre 2023, le Ministère public a ordonné une défense d'office des intérêts de A______, au vu de son indigence et de la gravité et de la complexité du cas, et nommé Me B______, avocat, à cette fin.

g. Lors de l'audience sur opposition qui s'est tenue le 30 avril 2024, et à laquelle elle était assistée par son avocat, A______, a maintenu son opposition, affirmant que la caisse enregistreuse ne contenait pas CHF 500.-, comme le prétendait le plaignant, mais seulement CHF 70.-.

h. Par ordonnance du 28 octobre 2024, le Ministère public a déclaré maintenir l'ordonnance pénale du 6 juillet 2023 et a transmis la procédure au Tribunal de police.

i. Par courrier du 8 novembre 2024, le Tribunal de police a interpellé A______ sur l'apparente irrecevabilité de son opposition, rappelant que cet acte était susceptible de constituer l'exercice d'un droit strictement personnel au sens de l'art. 19c CC, dont l'exercice ne pouvait pas être attribué au curateur lorsque la personne à protéger était capable de discernement.

j. Dans le délai imparti, A______ lui a répondu que la curatelle de représentation et de gestion dont elle faisait l'objet s'étendait aux rapports avec les tiers, en particulier en matière d'affaires juridiques, de sorte que C______ avait le pouvoir de former opposition en son nom et pour son compte, ce d'autant plus qu'elles avaient discuté ensemble de cette démarche au préalable.

C. Dans son ordonnance querellée, le Tribunal de police s'est fondé sur la doctrine, selon laquelle, tant et aussi longtemps que la personne concernée conservait sa capacité de discernement, le pouvoir de représentation du curateur ne s'étendait pas aux droits strictement personnels, catégorie dans laquelle rentrait, entre autres, celui de recourir contre un jugement. Or, l'ordonnance rendue par le TPAE ne mentionnait ni d'incapacité de discernement, ni de restriction des droits civils de l'intéressée, de sorte que sa curatrice ne pouvait valablement former opposition en son nom.

D. a. Dans son recours, A______ fait valoir que le curateur institué devenait le représentant légal de la personne concernée dans le cadre des tâches qui lui étaient confiées, de sorte que, dans la mesure où l'ordonnance du TPAE lui avait conféré un tel pouvoir en matière juridique, C______ était habilitée à former opposition à l'ordonnance pénale au nom de sa protégée. Déclarer cette opposition irrecevable procédait au demeurant d'un formalisme excessif et consacrait une violation du droit d'accès au juge. Il semblait d'ailleurs que, selon une pratique constante, le Service de protection de l'adulte faisait lui-même opposition aux ordonnances pénales concernant les personnes sous curatelle de représentation juridique ou générale, sans que cela n'ait jamais posé problème, de sorte qu'elle n'avait aucune raison de penser qu'il en irait autrement dans son cas. En toute hypothèse, un bref délai supplémentaire aurait dû lui être imparti pour, le cas échéant, remédier à cette informalité. Enfin, si par impossible ces arguments devaient ne pas être retenus, il conviendrait de considérer qu'elle se trouvait dans un cas de défense obligatoire.

b. Dans ses observations, le Tribunal de police se réfère à son ordonnance querellée.

c. La recourante n'a pas répliqué et la cause a été gardée à juger.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une décision sujette à contestation auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. b CPP) et émaner de la prévenue, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP) qui a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à l'annulation de cette décision (art. 382 al. 1 CPP).

2.             2.1. Le prévenu peut former opposition contre l'ordonnance pénale devant le ministère public, par écrit et dans un délai de dix jours (art. 354 al. 1 let. a CPP).

S'il décide de maintenir sa décision, le ministère public transmet sans retard le dossier au tribunal de première instance en vue des débats. L'ordonnance pénale tient alors lieu d'acte d'accusation (art. 356 al. 1 CPP).

Conformément à l'art. 356 al. 2 CPP, le juge statue sur la validité de l'ordonnance pénale et de l'opposition. Lorsque l'opposition n'est pas valable, il n'entre pas en matière et n'examine donc pas le bien-fondé de la contestation (cf. Message du 21 décembre 2005 relatif à l'unification de la procédure pénale, FF 2006 1275).

2.2. La capacité d'ester en justice est la faculté de mener soi-même le procès ou de désigner soi-même un mandataire qualifié pour le faire (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 6 ad art. 106).

En vertu de l'art. 106 CPP, le prévenu ne peut valablement accomplir des actes de procédure que s'il a l'exercice des droits civils (al. 1). Dans la négative, il doit agir par l’intermédiaire de son représentant légal (al. 2).

2.3.1. Conformément à l'art. 390 al. 1 ch. 1 CC, l'autorité de protection de l'adulte institue une curatelle lorsqu'une personne majeure est partiellement ou totalement empêchée d'assurer elle-même la sauvegarde de ses intérêts en raison d'une déficience mentale, de troubles psychiques ou d'un autre état de faiblesse qui affecte sa condition personnelle.

La disposition a été formulée de manière vague afin de pouvoir englober tous les degrés d'un état de faiblesse et viser tous les types de curatelle. La sauvegarde des intérêts dont il est question peut concerner tant la gestion des affaires personnelles que celle des affaires patrimoniales, y compris les rapports juridiques avec les tiers, et comprend également les intérêts qui doivent être défendus dans le cadre d'une procédure (arrêt du Tribunal fédéral 5C.25/2003 du 27 mai 2003 consid. 4.3.1; P. PICHONNAZ / B. FOËX / C. FOUNTOULAKIS (éds), Commentaire romand : Code civil I – Art. 1-456 CC, 2ème éd., Bâle, 2024, n. 21 et 24 ad art. 390).

Être empêché d'assurer la sauvegarde de ses intérêts est une notion relative, qui se mesure à l'aune du genre d'affaires que la personne est amenée à gérer. La nature et l'étendue de cet empêchement auront une influence sur le type de curatelle ordonnée (accompagnement, représentation, coopération, curatelle de portée générale), de même que sur le type de tâches confiées au curateur et l'ampleur de ces dernières (A. LEUBA / M. STETTLER / A. BÜCHLER / C. HÄFELI (éds), Comm. Fam. Protection de l'adulte, Berne, 2013, n. 20 ad art. 390).

La personne doit être empêchée, non seulement de gérer elle-même ses propres affaires de manière adéquate, mais également de donner un pouvoir de représentation à un tiers, de le surveiller, de lui donner des instructions ou de révoquer son mandat si nécessaire (A. LEUBA / M. STETTLER / A. BÜCHLER / C. HÄFELI (éds), op.cit., n. 25 ad art. 390).

L'autorité de protection de l'adulte détermine, en fonction des besoins de la personne concernée, les tâches à accomplir dans le cadre de la curatelle (art. 391 al. 1 CC).

2.3.2. La loi prévoit différents types de curatelle, lesquels n'ont pas tous le même effet sur l'exercice des droits civils.

La curatelle d'accompagnement, instituée, avec le consentement de la personne qui a besoin d'aide, lorsque celle-ci doit être assistée pour accomplir certains actes, ne confère pas au curateur de pouvoir de représentation et ne limite donc pas l'exercice des droits civils de la personne concernée (art. 393 CC).

Le protégé placé sous curatelle de portée générale est en revanche privé de plein droit de l’exercice des droits civils (art. 398 al. 3 CC).

Lorsque, comme dans le cas présent, une curatelle de représentation est instituée, elle ne prive pas de plein droit l'intéressé de l'exercice des droits civils et l'autorité de protection de l'adulte doit, si telle est son intention, limiter expressément celui-ci dans sa décision (art. 394 al. 2 CC; A. LEUBA / M. STETTLER / A. BÜCHLER / C. HÄFELI (éds), Comm. Fam. Protection de l'adulte, Berne, 2013, n. 12 ad art. 395).

Cette décision doit respecter le principe de la proportionnalité. La capacité civile de la personne concernée ne peut être restreinte que dans la mesure absolument nécessaire et si cette limitation s'avère adéquate dans le cas d'espèce. Tel est notamment le cas lorsque la volonté ou l'aptitude à collaborer de la personne concernée font défaut; la condition préalable à la bonne exécution de la curatelle n'est en effet plus réalisée. Il doit toujours exister des indices concrets que la personne risque objectivement de faire obstacle aux actes du curateur. Une limitation de l'exercice des droits civils pour les procédures devant les tribunaux est par exemple envisageable, lorsque la personne se montre quérulente (P. PICHONNAZ / B. FOËX / C. FOUNTOULAKIS (éds), op.cit., n. 28 et 29 ad art. 394).

2.3.3. La personne ne devant être représentée que dans la mesure nécessaire, l'autorité doit déterminer précisément le type de tâches pour lesquelles le curateur est compétent. Sont particulièrement visées les affaires de logement, de santé, d'éducation, d'emploi, les affaires administratives, les relations sociales, d'éventuelles procédures judiciaires, ainsi que la gestion des biens et des revenus (P. PICHONNAZ / B. FOËX / C. FOUNTOULAKIS (éds), op.cit., n. 3 ad art. 394).

Le curateur qui se voit confier la gestion de certains éléments patrimoniaux est investi d'un pouvoir légal de représentation par rapport à ces éléments, y compris sur le plan juridique: la personne concernée est donc liée par les actes du curateur, qu'elle soit privée ou non de sa capacité civile (art. 394 al. 3 CC; P. PICHONNAZ / B. FOËX / C. FOUNTOULAKIS (éds), op.cit., n. 23 ad art. 391). Pour un certain nombre d'actes, notamment pour plaider et transiger, le curateur doit toutefois requérir le consentement de l'autorité de protection de l'adulte lorsqu'il agit au nom de la personne concernée, sous réserve des mesures provisoires prises d'urgence (art. 416 al. 1 ch. 9 CC), à moins que cette dernière soit capable de discernement, que l'exercice de ses droits civils ne soit pas restreint par la curatelle et qu'elle donne son accord (art. 416 al. 2 CC).

En revanche, le curateur ne peut pas représenter la personne capable de discernement pour l'exercice de droits strictement personnels – tels le droit d'interjeter recours, cf. arrêt du Tribunal fédéral 6B_847/2015 du 13 juin 2016 consid. 2.1 –, car cette dernière les exerce directement, même si elle ne possède pas le plein exercice des droits civils. Dans ce cas, la personne concernée peut agir seule, pour autant qu'elle soit capable de discernement, et peut choisir librement son mandataire, qu'il s'agisse du curateur ou d'un avocat (P.-H. STEINAUER / C. FOUNTOULAKIS, Droit des personnes physiques et de la protection de l'adulte, Berne, 2014, n° 216).

2.4.1. Conformément à l'art. 127 al. 1 CPP, le prévenu, la partie plaignante et les autres participants à la procédure peuvent se faire assister d'un conseil juridique pour défendre leurs intérêts.

La défense du prévenu est toutefois réservée aux avocats habilités à représenter les parties devant les autorités judiciaires en vertu de la loi du 23 juin 2000 sur les avocats (LLCA), sous réserve de dispositions cantonales dérogatoires pour la défense en procédure pénale de contravention (art. 125 al. 5 CPP). Les avocats autorisés à défendre en vertu de la première partie de cette disposition sont les avocats inscrits à un registre cantonal des avocats (art. 4 LLCA) ainsi que, conformément aux prescriptions des art. 21 ss. LLCA, les avocats des Etats membres de l'UE ou de l'AELE. Même en l'absence de représentation professionnelle, le prévenu ne peut donc pas désigner n'importe quelle personne pour le défendre (ATF 147 IV 379 consid. 1.2.3).

2.4.2. Selon la jurisprudence, il y a formalisme excessif, constitutif d'un déni de justice formel prohibé par l'art. 29 al. 1 Cst., lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi et complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l'accès aux tribunaux (ATF 145 I 201 consid. 4.2.1; 142 IV 299 consid. 1.3.2; 142 I 10 consid. 2.4.2; 135 I 6 consid. 2.1; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1129/2019 du 27 novembre 2019 consid. 1.1).

Les limitations appliquées au droit d'accès à un tribunal, notamment en ce qui concerne les conditions de recevabilité d'un recours, ne doivent pas restreindre l'accès ouvert à l'individu d'une manière ou à un point tel que le droit s'en trouve atteint dans sa substance même. En outre, les limitations considérées ne se concilient avec l'art. 6 par. 1 CEDH que si elles poursuivent un but légitime et s'il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé. En ce sens, si le droit d'exercer un recours est bien entendu soumis à des conditions légales, les tribunaux doivent, en appliquant des règles de procédure, éviter à la fois un excès de formalisme qui porterait atteinte à l'équité de la procédure, et une souplesse excessive qui aboutirait à supprimer les conditions de procédure établies par la loi (ATF
149 IV 9 consid. 7.2).

En application de ces principes, le Tribunal fédéral a jugé, dans un cas relatif à une déclaration d'appel signée par une personne non admise comme représentant, que, même si le délai légal de recours était échu, un délai convenable devait être imparti à l'intéressé pour réparer le vice, avec l'avertissement qu'à défaut, l'acte ne serait pas pris en considération (ATF 142 I 10 consid. 2.4). La même jurisprudence vaut en cas de dépôt d'un acte non signé (arrêt du Tribunal fédéral 6B_51/2015 du 28 octobre 2015 consid. 2.2).

2.5. En l'espèce, contrairement à ce que soutient la recourante, le fait que sa curatrice se soit vu investie, par le TPAE, du droit de la représenter dans ses rapports avec les tiers, y compris en matière juridique, n'emporte pas pour autant le droit de former opposition à sa place.

Il faut en effet considérer que le droit de faire opposition à une ordonnance pénale est de nature strictement personnelle, à l'instar du droit de déposer plainte ou de faire recours contre une décision, de sorte que le curateur ne peut pas représenter son pupille, s'il est capable de discernement (cf. AARP/157/2022 du 23 mai 2022).

En soi, cela ne fait pas obstacle à ce que la personne concernée mandate son curateur pour la défense de ses intérêts.

Une telle démarche se heurte toutefois au monopole des avocats, entre autres institué par l'art. 127 al. 5 CPP. Dans la mesure où l'on ne se trouve pas dans un cas de représentation légale, la désignation par le pupille de son curateur aux fins de le représenter ne permet pas de ménager d'exception à cette prescription.

Jusqu'à ce stade, le raisonnement du Tribunal de police peut donc être avalisé.

En revanche, c'est à juste titre que la recourante invoque un formalisme excessif. Son cas ne diffère en effet guère de celui examiné par le Tribunal fédéral dans l'ATF
142 I 10, dans lequel celui-ci a jugé qu'il convenait d'impartir à l'intéressé un bref délai pour réparer le vice de forme affectant l'acte accompli. La recourante ne saurait dès lors être pénalisée par le fait que le Ministère public a admis la validité de l'opposition, après s'être assuré qu'elle correspondait à sa volonté, sans exiger d'elle qu'elle appose sa signature personnelle sur le courrier, étant relevé que ce dernier, hormis le défaut de signature valable, a été déposé dans la forme et le délai prescrits.

À cela s'ajoute que l'on ne saurait voir, dans l'informalité relevée, une tentative de prolonger sciemment le délai d'opposition. La mise en place d'une curatelle démontre que la recourante est particulièrement vulnérable et qu'à tout le moins, elle n'est pas à même d'assurer elle-même la gestion de ses affaires administratives et juridiques, sans pour autant que les conditions restrictives d'une limitation de l'exercice de ses droits civils soient réalisées. Le fait de consulter sa curatrice à réception de l'ordonnance pénale afin de l'aider à déterminer la suite qu'il convenait de lui donner est par conséquent une démarche adéquate. Que la curatrice ait, par erreur, estimé qu'elle était habilitée à faire opposition au nom et pour le compte de sa pupille, ne saurait avoir de conséquences préjudiciables aux intérêts de celle-ci, dont la situation peut, sur ce point, être assimilée à un cas de défense obligatoire (cf. ATF 143 I 284 consid. 1.3).

3.             Fondé, le recours doit être admis ; partant, l'ordonnance querellée sera annulée et la cause renvoyée au Tribunal de police pour qu'il traite l'opposition.

4. L'admission du recours ne donne pas lieu à la perception de frais (art. 428 al. 1 CPP).

5. La recourante a sollicité d'être mise au bénéfice de l'assistance juridique pour la procédure de recours.

La défense d'office accordée le 5 décembre 2023 demeure toutefois pleinement valable, l'obligation de déposer une nouvelle demande pour la procédure de recours n'étant exigée que pour la partie plaignante et la victime, mais non pour le prévenu (art. 136 al. 3 CPP). L'on ne se trouve par ailleurs pas en présence d'une procédure de recours contre une décision prise par la direction de la procédure sur un point accessoire de la procédure principale, comme c'est le cas en matière de décision de détention avant jugement, qui commanderait d'examiner les chances de succès de la démarche comme critère autonome (cf. arrêt du Tribunal fédéral 6B_363/2022 du 26 septembre 2022 consid. 3.4).

Le défenseur d'office sera dès lors indemnisé, pour l'activité accomplie dans le cadre de la présente procédure de recours, à la fin de la procédure (art. 135 al. 2 CPP).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Admet le recours.

Annule l'ordonnance du Tribunal de police du 2 décembre 2024 et renvoie la cause à ce dernier pour qu'il procède dans le sens des considérants.

Laisse les frais de la procédure de recours à la charge de l'État.

Notifie le présent arrêt, en copie, à la recourante, soit pour elle son conseil, au Ministère public et au Tribunal de police.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Valérie LAUBER, juges; Madame Arbenita VESELI, greffière.

 

La greffière :

Arbenita VESELI

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse
(art. 48 al. 1 LTF).