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Décisions | Chambre pénale de recours

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PS/26/2024

ACPR/387/2024 du 24.05.2024 ( RECUSE ) , IRRECEVABLE

Descripteurs : RÉCUSATION;MINISTÈRE PUBLIC;DÉLAI
Normes : CPP.58; CPP.56.letf

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

PS/26/2024 ACPR/387/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du vendredi 24 mai 2024

 

Entre

 

Le dénommé A______, domicilié ______, France, agissant en personne,

requérant,

 

et

 

B______, Procureure, p.a. Ministère public, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

citée.

 


Vu :

-          l'intervention des services de police le 2 novembre 2023 vers 4h00, en lien avec l'agression commise au préjudice du dénommé A______ [sans prénom connu], à la rue 1______ no. ______, à Genève;

-          les procès-verbaux de son audition du 2 novembre 2023 à la police, la première à 8h03 en qualité de prévenu d'entrée illégale en Suisse, et la seconde à 11h03 en tant que victime de l'agression;

-          l'ordonnance pénale du 3 novembre 2023, par laquelle la Procureure B______ a condamné le dénommé A______ à une peine pécuniaire de 30 jours-amende, avec sursis, pour infraction à l'art. 115 al. 1 let. a LEI;

-          l'opposition déposée le 13 novembre 2023 au greffe du Ministère public;

-          le procès-verbal de l'audience sur opposition du 19 mars 2024, tenue par C______, greffière-juriste;

-          la demande de récusation, datée du 1er mars 2024 mais déposée le 19 mars 2024 au Ministère public;

-          les observations de la ______ procureure, D______, en l'absence de B______;

-          l'absence de réplique.

Attendu que :

-          lors de ses deux auditions à la police, le requérant a, en substance, soutenu être victime de racisme, refusé de s'exprimer et de signer les procès-verbaux;

-          dans son courrier d'opposition, il se plaint de ne pas avoir été entendu par la police ni par la Procureure B______;

-          lors de l'audience sur opposition, il sollicite la récusation de B______, alléguant l'avoir déjà fait "dans plusieurs courriers" et être "victime de racisme" de sa part. Il souhaite que sa plainte soit instruite et que "le dossier soit repris depuis le début" afin que ses agresseurs "passent au tribunal". En outre, la procureure a "la haine contre [lui]"; elle aurait dit "de vive voix qu'elle n'aimait pas les noirs";

-          à teneur de son courrier du même jour – qui serait sa "septième lettre contre la Procureure B______" [les précédentes, à l'exception du courrier d'opposition, ne figurent pas au dossier] –, il lui reproche une violation de l'art. 30 al. 1 CEDH. Il la soupçonne d'être partiale et dénonce "la haine raciale discriminatoire exagérée" qu'il a subie, la citée lui ayant dit avoir "la haine contre [lui] parce qu'[il] est un africain de peau noir".

Considérant, en droit, que :

-          la Chambre de céans, autorité de recours au sens de l'art. 20 al. 1 CPP, est compétente pour connaître des demandes en récusation formées contre un membre du ministère public (art. 59 al. 1 let. b CPP);

-          prévenu à la procédure pendante contre lui (art. 104 al. 1 let. a CPP), le requérant dispose de la qualité pour agir (art. 58 al. 1 CPP);

-          la demande de récusation doit être présentée sans délai par les parties dès qu'elles ont connaissance d'un motif de récusation (art. 58 al. 1 CPP);

-          même si la loi ne prévoit aucun délai particulier, il y a lieu d'admettre que la récusation doit être formée aussitôt, c'est-à-dire dans les jours qui suivent la connaissance de la cause de récusation, sous peine de déchéance (ATF 140 I 271 consid. 8.4.3 p. 275) ; la jurisprudence admet le dépôt d'une demande de récusation six à sept jours après la connaissance des motifs (arrêt du Tribunal fédéral 1B_630/2020 du 23 mars 2021 consid. 2.2 et les arrêts cités), mais considère qu'une demande déposée deux à trois semaines après est tardive (L. MOREILLON / A. PAREIN-REYMOND, Petit commentaire du code de procédure pénale, 2e éd., Bâle 2016, n. 3 ad art. 58 CPP ; arrêts du Tribunal fédéral 1B_14/2016 du 2 février 2016 consid. 2 et 1B_60/2014 du 1er mai 2014 consid. 2.2);

-        il incombe à la partie qui se prévaut d'un motif de récusation de rendre vraisemblable qu'elle a agi en temps utile, en particulier eu égard au moment de la découverte de ce motif (arrêt du Tribunal fédéral 1B_348/2022 du 11 août 2022 consid. 3.);

-          selon l'art. 56 CPP, toute personne exerçant une fonction au sein d'une autorité pénale est tenue de se récuser lorsque d'autres motifs que ceux énoncés aux let. a à e, notamment lorsqu'un rapport d'amitié étroit ou d'inimitié avec une partie ou son conseil juridique, sont de nature à la rendre suspecte de prévention (let. f);

-        la procédure de récusation a pour but d'écarter un magistrat partial, respectivement d'apparence partiale, afin d'assurer un procès équitable à chaque partie (ATF 126 I 68 consid. 3a p. 73; arrêt du Tribunal fédéral 1B_430/2021 du 22 octobre 2021 consid. 2.3.2);

-          l'impartialité subjective d'un magistrat se présume jusqu'à preuve du contraire (arrêt du Tribunal fédéral 6B_621/2011 du 19 décembre 2011; ATF 136 III 605 consid. 3.2.1, p. 609; arrêt de la CourEDH Lindon, § 76);

-        en l’occurrence, le requérant reproche, dans une large mesure, à la citée d'avoir rendu l'ordonnance de condamnation du 3 novembre 2023 à son encontre, seul acte de procédure effectué par la magistrate dans la présente procédure;

-        la requête en récusation du 19 mars 2024 – formée plusieurs mois après le prononcé de l'ordonnance susmentionnée – s'avère manifestement tardive et doit, pour ce motif, être déclarée irrecevable;

-        au surplus, il sera relevé que la procédure de récusation n'a pas pour objet de permettre aux parties de contester la manière dont est menée l'instruction (ATF 143 IV 69 consid. 3.2 p. 74 s.). La conduite de l'instruction et les décisions prises à l'issue de celle-ci doivent être contestées par les voies de recours ordinaires (arrêt du Tribunal fédéral 1B_292/2012 du 13 août 2012 consid. 3.2), ce que le requérant n'ignore pas puisqu'il a formé opposition à l'ordonnance pénale;

-        à supposer qu'il faille interpréter le courrier d'opposition du 13 novembre 2023 comme étant également une requête en récusation, celle-ci serait en tout état infondée dès lors que les griefs du requérant sur de prétendues remarques racistes de la Procureure ne reposent sur aucun élément au dossier et qu'on ne voit pas quand les propos allégués auraient été tenus puisqu'il n'a jamais vu la Procureure en question;

-          le requérant, qui n'a pas gain de cause, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 600.- (art. 59 al. 4 et 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP; E 4 10.03).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Déclare irrecevable la demande de récusation du 19 mars 2024 contre la Procureure B______.

Met à la charge du dénommé A______ les frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 600.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au requérant, à la citée et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Monsieur Xavier VALDES TOP, greffier.

 

Le greffier :

Xavier VALDES TOP

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

PS/26/2024

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- demande sur récusation (let. b)

CHF

515.00

Total

CHF

600.00