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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/24965/2021

ACPR/494/2022 du 25.07.2022 sur OTMC/2197/2022 ( TMC ) , REFUS

Descripteurs : DÉTENTION PROVISOIRE;RISQUE DE FUITE;ACTE D'ORDRE SEXUEL AVEC UN ENFANT;INCESTE
Normes : CPP.221; CPP.237; CP.187

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/24965/2021 ACPR/494/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 25 juillet 2022

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison B______, comparant par Me C______, avocate, ______, ______ Genève,

recourant,

contre l'ordonnance rendue le 8 juillet 2022 par le Tribunal des mesures de contrainte,

et

LE TRIBUNAL DES MESURES DE CONTRAINTE, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A.           Par acte expédié au greffe de la Chambre de céans le 18 juillet 2022, A______ recourt contre l'ordonnance du 8 juillet 2022, notifiée le 12 suivant, par laquelle le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après : TMC) a refusé sa mise en liberté.

Le recourant conclut à l'annulation de l'ordonnance précitée et à sa libération immédiate, moyennant diverses mesures de substitution, qu'il énumère.

B.            Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. A______, ressortissant algérien né en 1971, a été arrêté le 30 décembre 2021 et placé en détention provisoire le lendemain, pour une durée de trois mois régulièrement prolongée depuis, en dernier lieu – par ordonnance du 27 juin 2022 – au 29 septembre 2022.

b. A______ est prévenu d'actes d'ordre sexuel avec un enfant (art. 187 CP), contrainte sexuelle (art. 189 CP), inceste (art. 213 CP) et violation du devoir d'assistance et d'éducation (art. 219 CP) pour avoir, à Genève, entre le 9 décembre 2015 et le 18 décembre 2021, à de multiples reprises, procédé à divers actes sexuels (attouchements, cunnilingus, pénétration digitale et frottement de son pénis sur le sexe jusqu'à éjaculation) sur sa fille D______ – née le ______ 2004 –, alors qu'elle était âgée de 11 à 17 ans.

Le prévenu conteste les faits.

c. D______ a été entendue selon le protocole d'audition d'enfants victimes d'infraction (NICHD). Elle a, en substance, déclaré qu'au moment de la séparation de ses parents, lorsqu'elle avait 11 ans, son père avait commencé à la rejoindre dans son lit, la nuit, pour procéder sur elle aux actes sus-énoncés. Cela avait commencé au domicile familial, lorsque ses parents ne dormaient plus ensemble, puis, régulièrement, dans tous les autres logements qu'il avait occupés par la suite, dans lesquels elle se rendait dans le cadre du droit de visite. La dernière fois, c'était arrivé le 18 décembre 2021.

d. E______, ex-épouse du prévenu et mère de D______, a déclaré avoir découvert, le 28 décembre 2021, un test de grossesse non utilisé dans la chambre de sa fille et l'avoir questionnée à ce sujet. D______ s'était effondrée, en pleurs, en lui disant "tu sais pourquoi". Elle avait alors dit à sa fille "je veux que tu me dises", et, après quelques minutes, D______ avait précisé "c'est mon père". Elle (la mère) a précisé qu'elle avait lu, "il y a six ans", dans le journal intime de sa fille, que son père venait la nuit dans sa chambre. Questionnée, D______ lui avait alors dit que son père lui faisait des câlins par-dessus la couverture. Elle avait confronté D______ et son père. Rétrospectivement, elle pensait avoir "mal jugé le cas" à l'époque. Son mari s'était effondré. Aucune suite n'avait été donnée à cet événement.

e. Au dossier figure un extrait du carnet intime de D______, où il est noté, à la date du 1er novembre 2017, que son père, qu'elle appelle "A______", "vient la nuit pendant que je dors il me touche les parties et tout mais ça fait depuis longtemps mais ma mère ne le sait pas".

f. Devant le Ministère public, le 8 mars 2022, D______, assistée de son curateur de représentation, a été confrontée à son père, sans mesures particulières ni paravent. Elle a maintenu ses déclarations et le prévenu a persisté à contester les faits reprochés.

Lors de cette audience E______ a également été entendue. Elle a, notamment, expliqué que – à une date non précisée –, elle avait déposé une première demande de divorce mais s'était ensuite rétractée, car elle et son époux s'étaient "remis ensemble". Elle avait ensuite déposé une seconde demande, sur requête commune. La procédure de divorce avait pris fin "en 2018 ou 2019" (page 5).

Interrogée sur la réconciliation de ses parents après leur première séparation, D______ a répondu s'en souvenir, sans pouvoir dire si, durant cette période, ils dormaient dans le même lit ni si son père avait stoppé les attouchements sur elle (page 18).

g. Par mandats d'actes d'enquête des 8 février et 8 mars 2022, le Ministère public a demandé à la police d'entendre l'ex petit-ami de D______, F______, ainsi que l'amie de la précitée, G______.

h. Le 23 mars 2022, la Brigade de police technique et scientifique a rendu son rapport à la suite de l'analyse des traces prélevées sur la couverture et le duvet du lit de D______. Le profil ADN de A______ est compatible avec le profil de mélange retrouvé à plusieurs endroits sur les supports précités.

i. Le 30 mars 2022, la police a procédé à l'audition de G______, en présence de l'avocat du prévenu, qui n'a posé aucune question. Le témoin a déclaré que D______ lui avait dit que son père la touchait depuis l'âge de 11 ans.

j. Selon le rapport de renseignements du 6 avril 2022, F______ n'avait pu être entendu car, vivant à I______[F] et n'ayant pas beaucoup de moyens financiers, il n'était pas en mesure de se déplacer à Genève. Le témoin avait toutefois expliqué, dans un courriel annexé au rapport, que D______ lui avait dit qu'elle subissait des attouchements sexuels de la part de son père depuis six ans, sans entrer dans les détails. Il a produit quelques messages échangés avec la précitée sur ce sujet.

k. Le 4 mai 2022, le Ministère public a ordonné l'expertise psychiatrique du prévenu. Un délai de deux mois a été fixé à l'expert.

l. Le 7 juillet 2022, A______ a requis sa mise en liberté. Le Ministère public s'y est opposé.

m. S'agissant de sa situation personnelle, A______, ressortissant algérien au bénéfice d'un permis C, est arrivé en Suisse en 1999. Il s'est marié en 2006 avec E______, avec laquelle il a eu deux enfants : D______ en 2004 et H______ en 2015. Ils ont divorcé en 2018 ou 2019. Au moment de son arrestation, il était au chômage et percevait des allocations. Auparavant, il était employé dans la restauration. Tous les étés, il se rend en Algérie, où vit une partie de sa famille, l'autre résidant en France.

À teneur de l'extrait du casier judiciaire suisse, il n'a pas d'antécédents judiciaires.

C.           Dans l'ordonnance querellée, le TMC a retenu que les charges demeuraient suffisantes et graves. Aucun élément nouveau n'était survenu depuis la précédente ordonnance du 27 juin 2022. L'instruction suivait son cours et il convenait d'attendre le résultat de l'expertise psychiatrique du prévenu. Le Ministère public envisageait également de procéder à l'audition de F______. Ces actes fondaient la nécessité de maintenir le prévenu en détention. Les risques de fuite, collusion et réitération demeuraient concrets et les mesures de substitution proposées n'étaient pas aptes à les pallier.

D.           a. Dans son recours, le recourant conteste "avec force" les accusations portées contre lui. La période pénale était d'ailleurs erronée puisque entre la séparation d'avec son ex-épouse, en 2017, et leur divorce, en 2018 ou 2019, ils avaient à nouveau formé un couple.

Il invoque une violation du principe de la célérité. L'instruction n'avançait pas, une seule audition de confrontation ayant eu lieu. Alors que le Ministère public avait requis, par mandat d'acte d'enquête du 8 mars 2022, l'audition de F______, celui-ci n'allait être entendu que le 24 août 2022, soit près de six mois plus tard. L'expertise psychiatrique aurait dû être rendue le 4 juillet 2022, selon le mandat.

Le risque de fuite n'était nullement concret. Il vivait en Suisse depuis 1999 et y travaillait jusqu'à son licenciement pour raisons économiques. Il continuait toutefois à chercher du travail de manière assidue. Puisque son épouse "aurait eu" une conversation avec lui "en 2017" s'agissant de potentiels attouchements sexuels sur leur fille, il aurait déjà pu fuir le territoire suisse à ce moment-là, s'il l'avait voulu. L'éventuel risque de fuite pourrait quoi qu'il en soit être pallié par le dépôt d'une pièce d'identité et sa présentation au Service de probation et insertion, ainsi qu'à un poste de police. Sa sœur était, de plus, disposée à déposer une caution de CHF 3'000.- pour garantir sa sortie. Il pourrait résider dans un foyer, pour que sa présence en Suisse puisse être contrôlée.

Le risque de collusion invoqué n'était pas concret à l'égard de sa fille, celle-ci étant assistée par un curateur de représentation et ayant déjà été entendue par la police, puis par le Ministère public en audition contradictoire. Un bracelet électronique pourrait pallier tout risque de collusion.

Aucun élément au dossier ne permettait de laisser penser qu'il était un prédateur sexuel, n'ayant aucun antécédent judiciaire spécifique ni n'ayant jamais eu de comportements sexuels déviants. Le risque de réitération n'existait donc pas.

b. Le Ministère public conclut au rejet du recours. L'audition de F______, étudiant à I______ [F], qui s'était révélée compliquée, était désormais fixée au 24 août 2022 par la police, étant précisé que la voie de l'entraide internationale aurait eu pour effet de ralentir l'instruction. L'expert psychiatre avait requis, le 21 juin 2022, un délai au 22 juillet suivant pour le dépôt de son rapport. À réception de l'expertise, il (le Ministère public) se déterminerait sur l'éventuelle audition de l'expert et les éventuelles réquisitions de preuve complémentaires formulées par les parties.

Les risques de collusion, fuite et réitération demeuraient concrets, et les mesures proposées n'étaient pas aptes à les pallier.

c. Le TMC maintient les termes de son ordonnance, sans formuler d'observations.

d. Le recourant a répliqué. Les charges, certes graves, ne nécessitaient pas à elles seules son maintien en détention. Les déclarations de G______ étaient plus que succinctes, et ce témoin aurait très bien pu parler avec D______ avant son audition. Le journal intime pouvait avoir été écrit n'importe quand. Aucun constat médical n'était versé à la procédure.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 222 et 393 al. 1 let. c CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Le recourant déclare contester les faits.

2.1.       Pour qu'une personne soit placée en détention provisoire ou pour des motifs de sûreté, il doit exister à son égard des charges suffisantes ou des indices sérieux de culpabilité, susceptibles de fonder de forts soupçons d'avoir commis une infraction (art. 221 al. 1 CPP). L'intensité de ces charges n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale; si des soupçons, même encore peu précis, peuvent être suffisants dans les premiers temps de l'enquête, la perspective d'une condamnation doit apparaître avec une certaine vraisemblance après l'accomplissement des actes d'instruction envisageables. Au contraire du juge du fond, le juge de la détention n'a pas à procéder à une pesée complète des éléments à charge et à décharge ni à apprécier la crédibilité des personnes qui mettent en cause le prévenu. Il doit uniquement examiner s'il existe des indices sérieux de culpabilité justifiant une telle mesure (ATF 143 IV 330 consid. 2.1; 143 IV 316 consid. 3.1 et 3.2).

2.2.       En l'état, les déclarations constantes et crédibles de la fille du prévenu, ses annotations dans son journal intime, les révélations qu'elle a faites à son amie – rapportées par celle-ci – et celles de l'ex-épouse du recourant, laquelle déclare avoir déjà confronté par le passé le prévenu à de telles suspicions après avoir lu le journal intime de sa fille, constituent de forts soupçons d'infractions graves, au sens de l'art. 221 al. 1 CPP.

Que le recourant et son ex-épouse se soient réconciliés, durant un laps de temps non précisé, entre leur première séparation et le prononcé du divorce – ce qui pourrait avoir interrompu les actes dénoncés par D______– n'est nullement de nature à annihiler les charges.

Le recourant critique la brièveté des déclarations de G______, mais son avocat n'a pas posé de questions lors de l'audition de ce témoin par la police et le prévenu n'a pas non plus demandé à être confronté à elle devant le Ministère public. Le journal intime de D______ pourrait, avec l'accord de celle-ci, être produit à la procédure entièrement ou sous forme caviardée, pour confirmer que les extraits produits s'insèrent chronologiquement dans celui-ci. Il appartiendra aussi au Ministère public de requérir le dépôt du rapport gynécologique et des prélèvements effectués aux Hôpitaux universitaires de Genève le 29 décembre 2021.

En l'état, les charges contre le prévenu se sont confirmées en cours d'instruction.

3.             Le recourant invoque une violation du principe de la célérité.

3.1. Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable (art. 29 al. 3 Cst.). Les autorités pénales engagent les procédures pénales sans délai et les mènent à terme sans retard injustifié (art. 5 al. 1 CPP). Lorsque le prévenu est détenu, la procédure est conduite en priorité (art. 5 al. 2 CPP).

Le grief de violation du principe de la célérité ne doit être examiné, lors du contrôle judiciaire de la détention, que pour autant que le retard dans la procédure soit propre à mettre en cause la légalité de la détention provisoire et, donc, à justifier un élargissement. N'importe quel retard n'est cependant pas suffisant. Il doit s'agir d'un manquement particulièrement grave, faisant au surplus apparaître que l'autorité de poursuite n'est plus en mesure de conduire la procédure à chef dans un délai raisonnable (ATF 140 IV 74 consid. 3.2; 137 IV 118 consid. 2.1). La diligence consacrée à une instruction pénale ne s'apprécie pas seulement à l'aune du nombre ou de la fréquence des audiences d'instruction (ACPR/339/2020 du 22 mai 2020 consid. 5.2.; ACPR/196/2018 du 4 avril 2018 consid. 5.2.; ACPR/373/2013 du 7 août 2013 consid. 3.3.). On ne saurait reprocher à l'autorité quelques temps morts, qui sont inévitables dans une procédure.

La violation éventuelle du principe de la célérité n'entraîne pas la libération immédiate du détenu lorsque la détention demeure matériellement justifiée (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1B_150/2012 du 30 mars 2012 consid. 3.3; 1B_44/2012 consid. 4 et 5).

3.2. En l'espèce, l'avancement de l'instruction ne souffre aucune critique. Depuis l'arrestation du recourant, les parties ont été confrontées et l'un des témoins – l'amie de D______ – a été entendu par la police, en présence de l'avocat du recourant. Les difficultés rencontrées pour l'audition du second témoin – l'ex petit-ami de D______ – s'expliquent par son domicile à l'étranger et ses problèmes financiers. Il sera toutefois entendu le 24 août 2022, délai qui paraît raisonnable et n'a nullement retardé l'instruction au regard de l'expertise psychiatrique ordonnée et non encore rendue. Le rapport paraît sur le point d'être déposé et les parties auront l'occasion de faire connaître leurs éventuelles requêtes d'actes d'instruction complémentaires. Le recourant n'allègue pas avoir requis – et cela ne ressort pas non plus du dossier – des actes d'enquête qui n'auraient jusqu'ici pas été menés.

Ce grief sera dès lors rejeté.

4.             Le recourant conteste le risque de fuite.

4.1.       Conformément à l'art. 221 al. 1 let. a CPP, la détention provisoire peut être ordonnée s'il y a sérieusement lieu de craindre que le prévenu se soustraie à la procédure pénale ou à la sanction prévisible en prenant la fuite. Selon la jurisprudence, le risque de fuite doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères, tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens avec l'État qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger, qui font apparaître le risque de fuite non seulement possible, mais également probable. La gravité de l'infraction ne peut pas, à elle seule, justifier le placement ou le maintien en détention, même si elle permet souvent de présumer un danger de fuite en raison de l'importance de la peine dont le prévenu est menacé (ATF 145 IV 503 consid. 2.2; 143 IV 160 consid. 4.3).

4.2.       Conformément au principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst., concrétisé par l'art. 237 al. 1 CPP), le tribunal compétent ordonne une ou plusieurs mesures moins sévères en lieu et place de la détention si elles permettent d'atteindre le même but que la détention, par exemple la fourniture de sûretés (al. 2 let. a), la saisie des documents d'identité et autres documents officiels (al. 2 let. b), l'assignation à résidence ou l'interdiction de se rendre dans un certain lieu ou un certain immeuble (al. 2 let. c), l'obligation de se présenter régulièrement à un service administratif (al. 2 let. d). La liste des mesures de substitution énoncée à l'art. 237 CPP n'est pas exhaustive (arrêt du Tribunal fédéral 1B_654/2011 du 7 décembre 2011 consid. 4.2).

À teneur de l'art. 238 CPP, le tribunal peut, s'il y a danger de fuite, astreindre le prévenu au versement d'une somme d'argent afin de garantir qu'il se présentera aux actes de procédure et se soumettra à l'exécution d'une sanction privative de liberté (al.1). Le montant des sûretés dépend de la gravité des actes reprochés au prévenu et de sa situation personnelle (al. 2).

4.3. En l'espèce, si le recourant est certes au bénéfice d'un permis d'établissement, il est divorcé et n'a pas entamé de liaison stable et suivie avec une autre personne depuis le divorce prononcé en 2018 ou 2019. Au moment de son arrestation, il était, de plus, au chômage. Par conséquent, à part son fils de 7 ans, aucun lien fort ne rattache le recourant à la Suisse, où ne vivent pas non plus sa mère ni ses frères et soeurs. Or, le lien qui unit le recourant à son fils – dont il n'a pas la garde –, n'est pas suffisant, à lui seul, à empêcher qu'il ne décide de retourner vivre dans son pays d'origine, où vit sa famille, pour éviter la procédure pénale dirigée contre lui – dont il conteste les faits – et l'éventuel procès à venir. L'argument selon lequel il n'avait pas fui, il y a quelques années, lorsque sa femme l'avait confronté au contenu du journal intime de leur fille ne réduit nullement le risque de fuite actuel, puisque, à l'époque, ses dénégations avaient suffi à étouffer les soupçons de la précitée, tandis qu'aujourd'hui, il est visé par une procédure judiciaire ayant conduit à son placement en détention provisoire.

Les mesures de substitution proposées ne sont pas de nature à pallier ce risque, au vu de son importance. Une assignation à résidence, même dans un foyer et couplée à un bracelet électronique, servirait uniquement à s'assurer que le recourant se trouve bien à l'emplacement prescrit aux heures prévues ou, au contraire, n'y s'y trouve pas ou plus (arrêt du Tribunal fédéral 1B_142/2018 du 5 avril 2018 consid. 2.1 et les références citées). Un tel outil ne permettrait pas de prévenir une fuite en temps réel, mais uniquement de la constater a posteriori (ATF 145 IV 503 consid. 3.3.1). Il n'est en effet pas exclu que le porteur d'un dispositif de surveillance électronique puisse fuir et, notamment, passer une frontière avant que les forces de l'ordre ne parviennent à l'arrêter, en particulier en cas de résidence proche d'une frontière (cf. ATF 145 IV 503 consid. 3.3). Le risque de fuite est, ici, bien trop important pour que ces mesures puissent être envisagées.

La caution, de CHF 3'000.-, proposée par la sœur du recourant n'est pas suffisante non plus à garantir que le recourant se présente aux actes de la procédure.

5.             Le risque de fuite étant réalisé, l'autorité de recours peut se dispenser d'examiner si d'autres risques – alternatifs – le sont également (arrêt du Tribunal fédéral 1B_322/2019 du 17 juillet 2019 consid. 3.3 et la jurisprudence citée).

6.             Le recourant se plaint de la durée – presque sept mois – de sa détention provisoire.

6.1. À teneur des art. 197 al. 1 et 212 al. 3 CPP, les autorités pénales doivent respecter le principe de la proportionnalité lorsqu'elles appliquent des mesures de contrainte, afin que la détention provisoire ne dure pas plus longtemps que la peine privative de liberté prévisible. Selon une jurisprudence constante, la possibilité d'un sursis, voire d'un sursis partiel, n'a en principe pas à être prise en considération dans l'examen de la proportionnalité de la détention préventive (ATF 133 I 270 consid. 3.4.2 p. 281-282 ; 125 I 60 ; arrêts du Tribunal fédéral 1B_750/2012 du 16 janvier 2013 consid. 2, 1B_624/2011 du 29 novembre 2011 consid. 3.1 et 1B_9/2011 du 7 février 2011 consid. 7.2).

6.2. En l'occurrence, les infractions reprochées au recourant sont graves et la peine qu'il encourt concrètement – si les faits devaient être retenus par l'autorité de jugement – dépasse largement la durée de la détention provisoire subie à ce jour, et à l'échéance fixée.

L'instruction paraît toucher à sa fin, le Ministère public prévoyant d'inviter les parties à faire part de leurs éventuels actes d'instruction complémentaires lorsqu'il aura reçu le rapport d'expertise psychiatrique, dont le dépôt paraît imminent. Partant, le principe de la proportionnalité n'est pas violé.

7.             Le recours s'avère ainsi infondé et doit être rejeté.

8.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03), y compris l'émolument pour le présent arrêt. En effet, l'autorité de recours est tenue de dresser un état de frais pour la procédure de deuxième instance, sans égard à l'obtention de l'assistance judiciaire (arrêts du Tribunal fédéral 1B_372/2014 du 8 avril 2015 consid. 4.6 et 1B_203/2011 du 18 mai 2011 consid. 4).

9.             Le recourant plaide au bénéfice d'une défense d'office.

9.1.       Selon la jurisprudence, le mandat de défense d'office conféré à l'avocat du prévenu pour la procédure principale ne s'étend pas aux procédures de recours contre les décisions prises par la direction de la procédure en matière de détention avant jugement, dans la mesure où l'exigence des chances de succès de telles démarches peut être opposée au détenu dans ce cadre, même si cette question ne peut être examinée qu'avec une certaine retenue. La désignation d'un conseil d'office pour la procédure pénale principale n'est pas un blanc-seing pour introduire des recours aux frais de l'État, notamment contre des décisions de détention provisoire (arrêt du Tribunal fédéral 1B_516/2020 du 3 novembre 2020 consid. 5.1).

9.2. En l'occurrence, malgré l'issue du recours, un premier contrôle des charges par l'autorité de recours pouvait se justifier à ce stade de la détention.

L'indemnité du défenseur d'office sera fixée à la fin de la procédure (art. 135 al. 2 CPP).

* * * * *

 


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 900.-.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, au recourant (soit, pour lui, son défenseur), au Ministère public et au Tribunal des mesures de contrainte.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Mesdames Daniela CHIABUDINI et Alix FRANCOTTE, juges; Madame Olivia SOBRINO, greffière.

 

La greffière :

Olivia SOBRINO

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.


 

P/24965/2021

ÉTAT DE FRAIS

 

ACPR/

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

 

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

 

- délivrance de copies (let. b)

CHF

 

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

 

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

815.00

 

-

CHF

 

 

Total (Pour calculer : cliquer avec bouton de droite sur le montant total puis sur « mettre à jour les champs » ou cliquer sur le montant total et sur la touche F9)

CHF

900.00