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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/24365/2022

AARP/241/2025 du 26.06.2025 sur OPMP/10911/2022 ( REV ) , PARTIEL

Descripteurs : DÉLAI DE RECOURS;RÉVISION(DÉCISION);LIBÉRATION CONDITIONNELLE
Normes : LEI.115; LEI.119; CPP.410; CP.385
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/24365/2022 AARP/241/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 26 juin 2025

 

Entre

A______, actuellement en exécution de peine à la Prison de Champ-Dollon, chemin de Champ-Dollon 22, 1241 Puplinge, comparant par Me Dina BAZARBACHI, avocate, BAZARBACHI LAHLOU & ARCHINARD, rue Micheli-du-Crest 4, 1205 Genève,

demandeur en révision,

 


contre l'ordonnance pénale OPMP/10911/2022 rendue le 17 novembre 2022 par le Ministère public,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

défendeur en révision.


EN FAIT :

A. a. Par demande du 22 mars 2025, A______ a sollicité la révision de l'ordonnance pénale OPMP/10911/2022 du 17 novembre 2022 rendue par le Ministère public (MP), à teneur de laquelle il a été déclaré coupable d'infraction à l'art. 115 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration (LEI) et d'infraction à l'art. 119 LEI, et condamné à une peine privative de liberté d'ensemble de 180 jours comprenant la révocation de la libération conditionnelle accordée par le Tribunal d'application des peines et des mesures (TAPEM) le 9 juin 2022 (solde de peine de deux mois et trois jours), sous déduction de trois jours de détention avant jugement.

b. Cette ordonnance n'a pas été frappée d'opposition dans le délai de l'art. 354 al. 1 du code de procédure pénale suisse (CPP), de sorte qu'elle est entrée en force de chose jugée (art. 354 al. 3 CPP) et a été inscrite à son casier judiciaire.

c. À l'appui de sa demande, il indique que la libération conditionnelle accordée par le TAPEM le 9 juin 2022 a été révoquée à deux reprises, une première fois par ordonnance pénale du 18 octobre 2022, dans le cadre de la procédure P/2______/2022, et une seconde fois le 17 novembre 2022, dans le cadre de la présente procédure P/24365/2022. Partant, il a été condamné à purger à deux reprises le même solde de peine.

d. Le demandeur précise que la révocation de la libération conditionnelle ordonnée le 18 octobre 2022 n'avait certainement pas été mentionnée dans le casier judiciaire au moment du prononcé de l'ordonnance pénale du 17 novembre 2022 et, par conséquent, le Procureur en charge n'en avait probablement pas connaissance, lorsqu'il a prononcé ladite révocation.

e. A______ a été écroué le 18 février 2025 en exécution de la peine privative de liberté prononcée par ordonnance pénale du 17 novembre 2022 (P/1______/2022), étant précisé que sa peine prendra fin le 14 août 2025.

f. Enfin, le demandeur prétend être illettré, sans défenseur au moment des faits et ignorant le système juridique suisse.

g. Il conclut à l'annulation de l'ordonnance litigieuse et à ce qu'une peine plus clémente soit prononcée, subsidiairement à ce que la cause soit renvoyée au MP pour qu'une nouvelle décision soit rendue.


 

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. Le 16 novembre 2022, A______, connu des autorités policières, a été arrêté en lien avec une mesure d'interdiction de pénétrer dans le canton de Genève, valablement prononcée à son encontre à partir du 18 octobre 2022, pour une durée de 12 mois.

b. Dans le cadre de son audition à la police, il a rempli, daté et signé le formulaire relatif aux droits et obligations du prévenu. Il a répondu aux questions en langue française, n'ayant pas eu besoin d'un traducteur. Il a d'ailleurs concédé qu'il était au courant de la mesure d'interdiction d'entrée sur le territoire genevois, qui lui avait été notifiée le 18 octobre 2022. Une copie de ladite décision, signée de sa main, a été versée à la présente procédure.

c. Selon une note du Procureur du 17 novembre 2022, une copie de l'ordonnance pénale du 18 octobre 2022 (P/2______/2022) a été versée à la présente procédure "pour les besoins de l'instruction". À teneur du dispositif de cette dernière ordonnance, la libération conditionnelle accordée par le TAPEM le 9 juin 2022 a été révoquée et le prévenu a été condamné à une peine privative de liberté d'ensemble de 180 jours, incluant le solde de peine faisant l'objet de la révocation. Cette ordonnance avait été notifiée au prévenu en main propre le 18 octobre 2022, qui avait reçu un exemplaire original. Cette ordonnance est entrée en force, n'ayant pas fait l'objet d'une opposition.

Le prévenu a d'ores et déjà exécuté la peine privative de liberté prononcée par ordonnance pénale du 18 octobre 2022, du 15 décembre 2022 au 8 décembre 2023 à la prison Champ-Dollon.

d. À teneur de l'extrait de son casier judiciaire suisse, état au 17 novembre 2022, six condamnations y figurent, la dernière étant datée du 12 février 2022. A______ a alors été condamné par le MP à une peine privative de liberté de 90 jours, sous déduction de deux jours de détention provisoire. Est mentionnée sous cette dernière rubrique la libération conditionnelle octroyée par le TAPEM le 9 juin 2022, délai d'épreuve d'un an et peine restante de deux mois et trois jours. En outre, deux enquêtes pénales en cours d'instruction y sont également inscrites, l'une datée du 18 octobre 2022 et l'autre du 17 novembre 2022.

e. L'ordonnance pénale du 17 novembre 2022 a été notifiée en main propre à A______ le jour même aux violons de l'Hôtel de police de Carl-Vogt et un exemplaire lui a été remis au moment de sa mise en liberté. À teneur du dispositif de cette nouvelle ordonnance, la libération conditionnelle accordée par le TAPEM le 9 juin 2022 a été révoquée et le prévenu condamné à une peine privative de liberté d'ensemble, incluant le solde de peine faisant l'objet de la révocation ainsi que la nouvelle peine privative de liberté.

f. Aucune opposition n'a été formée contre cette décision qui est entrée en force.

g. Un nouvel extrait du casier judiciaire suisse du demandeur, état au 19 décembre 2022, figure du dossier, à teneur duquel la mention de la révocation de la libération conditionnelle du 18 octobre 2022 est inscrite, information qui a d'ailleurs été surlignée en jaune.

C. a. Dans le cadre de la procédure de révision introduite par-devant la Chambre d'appel et de révision (CPAR), le MP s'est interrogé sur l'existence de faits nouveaux au sens de l'art. 410 al. 1 let. a CPP, qui n'auraient pas été connus du MP au moment du prononcé de la décision litigieuse, tout en s'en remettant à justice. Pour le surplus, il ne s'oppose pas au prononcé d'une peine plus clémente, qui ne devrait toutefois pas être inférieure à une peine de 150 jours-amende et ne constituerait plus une peine d'ensemble.

b. Les observations du MP ont été transmises au demandeur, qui n'a pas réagi, et la cause a été gardée à juger, à l'issue d'un délai de dix jours.

c. Par courrier du 19 juin 2025, A______ a sollicité, sous la plume de son conseil, sa mise en liberté immédiate.

d. Invité à se déterminer, le MP a conclu au rejet de la demande de mise en liberté, considérant que les motifs de révision n'apparaissaient pas réalisés.

e. Les observations du MP ont été transmises au demandeur, en lui impartissant un délai de trois jours pour répliquer. Dans ce délai, le demandeur a persisté dans ses conclusions, tout en rappelant que la CPAR avait déjà eu à trancher un cas similaire, notamment dans un arrêt AARP/103/2020 du 4 mars 2020.

f. La cause a ensuite été gardée à juger.

EN DROIT :

1. 1.1. La CPAR est l'autorité compétente en matière de révision (art. 21 al. 1 let. b CPP cum art. 129 al. 1 et 130 al. 1 let. a de la Loi d'organisation judiciaire [LOJ]).

1.2. Les demandes de révision doivent être motivées et adressées par écrit à la juridiction d'appel. Les motifs de révision doivent être exposés et justifiés dans la demande (art. 411 al. 1 CPP).

1.3. La demande en révision en raison de faits ou de moyens de preuve nouveaux n'est soumise à aucun délai (art. 411 al. 2 in fine CPP).

2. 2.1.1. L'art. 410 al. 1 let. a CPP permet à toute personne lésée par une ordonnance pénale d'en demander la révision s'il existe des faits nouveaux antérieurs au prononcé ou de nouveaux moyens de preuve qui sont de nature à motiver l’acquittement ou une condamnation sensiblement moins sévère du condamné.

2.1.2. Cette disposition reprend la double exigence posée par l'art. 385 CP, selon laquelle les faits ou moyens de preuve invoqués doivent être nouveaux et sérieux (cf. Message relatif à l'unification du droit de la procédure pénale du 21 décembre 2005, FF 2006 1303 ad art. 417 [actuel art. 410 CPP]). Par faits, on entend les circonstances susceptibles d'être prises en considération dans l'état de fait qui fonde le jugement. Quant aux moyens de preuve, ils apportent la preuve d'un fait, qui peut déjà avoir été allégué. Une opinion, une appréciation personnelle ou une conception juridique nouvelles ne peuvent pas justifier une révision (ATF 141 IV 93 consid. 2.3; 137 IV 59 consid. 5.1.1).

2.1.3. Les faits ou moyens de preuve sont inconnus lorsque le juge n'en a pas eu connaissance au moment où il s'est prononcé, c'est-à-dire lorsqu'ils ne lui ont pas été soumis sous quelque forme que ce soit (ATF 137 IV 59 consid. 5.1.2 ; 130 IV 72 consid. 1 ; 122 IV 66 consid. 2.a). Ils sont sérieux lorsqu'ils sont propres à ébranler les constations de fait sur lesquelles se fonde la condamnation et que l'état de fait ainsi modifié rend possible un jugement sensiblement plus favorable au condamné (ATF 145 IV 197 consid. 1.1 ; 137 IV 59 consid. 5.1.4 ; 130 IV 72 consid. 1).

2.1.4. La procédure de révision ne sert pas à remettre en cause des décisions entrées en force, à détourner des dispositions légales sur les délais de recours ou celles sur la restitution desdits délais, voire à introduire des faits non présentés dans le premier procès en raison d'une négligence procédurale (ATF 145 IV 197 consid. 1.1 ;
130 IV 72 consid. 2.2 ; 127 I 133 consid. 6).

2.1.5. Les conditions d'une révision visant une ordonnance pénale sont restrictives. L'ordonnance pénale est rendue dans le cadre d'une procédure spéciale. Elle a pour spécificité de contraindre le condamné à prendre position. Une absence de réaction de sa part s'interprète comme un acquiescement. Il doit s'opposer dans le délai prévu à cet effet s'il n'adhère pas à sa condamnation, par exemple parce qu'il entend se prévaloir de faits omis qu'il considère comme importants. Le système serait compromis si, une fois le délai d'opposition échu sans avoir été utilisé, le condamné pouvait revenir sur l'acquiescement ainsi donné et demander selon son bon vouloir la révision de l'ordonnance pénale pour des faits qu'il aurait déjà pu faire valoir dans une procédure ordinaire en manifestant son opposition (ATF 130 IV 72 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_982/2020 du 12 mai 2021 consid. 1.1). Il s'ensuit qu'une demande de révision dirigée contre une ordonnance pénale doit être qualifiée d'abusive si elle repose sur des faits que le condamné connaissait initialement, qu'il n'avait aucune raison légitime de taire et qu'il aurait pu révéler dans une procédure ordinaire mise en œuvre par une simple opposition. En revanche, une révision peut entrer en considération à l'égard d'une ordonnance pénale pour des faits et des moyens de preuve importants que le condamné ne connaissait pas au moment du prononcé de l'ordonnance ou dont il ne pouvait pas se prévaloir ou n'avait pas de raisons de se prévaloir à cette époque (ATF 145 IV 197 consid. 1.1 ; 130 IV 72 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_982/2020 du 12 mai 2021 consid. 1.1).

2.1.6. Comme cela résulte du texte même de l'art. 410 al. 1 let. a CPP, la voie de la révision a uniquement pour but de réparer les erreurs de fait commises dans un jugement et qui sont à l'origine du verdict de culpabilité et/ou du prononcé d'une peine ou d'une mesure, à l'exclusion d'une erreur de droit, même grossière, qu'elle soit de fond ou de forme, qui n'est susceptible d'être éliminée que par les voies ordinaires de recours. La voie de recours extraordinaire qu'est la révision n'est ainsi pas ouverte en cas d'erreur de qualification juridique ou d'appréciation des faits imputés au condamné ou encore d'inobservation de la loi. Il en va de même en cas de revirement de jurisprudence (G. PIQUEREZ / A. MACALUSO, Procédure pénale suisse, 3ème éd., Zürich 2011, n. 2067 et note 837, n. 2079 et 2089 s.).

2.1.7. Selon le principe ne bis in idem, qui est un corollaire de l'autorité de chose jugée, nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement par les juridictions du même État en raison d'une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement définitif conformément à la loi et à la procédure pénale de cet État. Ce droit est consacré à l'art. 11 al. 1 CPP et découle en outre implicitement de la Constitution fédérale (ATF 116 IV 262 consid. 3a). Il est par ailleurs garanti par l'art. 14 al. 7 du Pacte-ONU II et par l'art. 4 al. 1 du Protocole n° 7 à la CEDH. Cette disposition précise qu'aucune dérogation n'est autorisée (art. 4 al. 3 du Protocole n° 7 à la CEDH).

L'autorité de chose jugée et le principe ne bis in idem requièrent qu'il y ait identité de la personne visée et des faits retenus, soit que les deux procédures ont pour origine des faits identiques ou des faits qui sont en substance les mêmes. La qualification juridique des faits ne constitue pas un critère pertinent. L'interdiction de la double poursuite constitue un empêchement de procéder, dont il doit être tenu compte à chaque stade de la procédure.

Est également consacré sous cet aspect, le principe de l'autorité de la chose jugée selon lequel les faits qui ont fait l'objet d'un jugement entré en force ne peuvent plus être examinés dans une procédure pénale dirigée contre la même personne (ATF 118 IV 371).

2.1.8. En principe, les actes de procédure viciés ne sont pas nuls mais annulables et déploient des effets juridiques lorsqu’ils ne sont pas contestés (ATF 137 I 273 consid. 3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_440/2015 du 18 novembre 2015, consid. 1.2 ; 6B_968/2014 du 24 décembre 2014 consid. 1.4).

2.1.9. Au terme de l'art. 14 de la directive C.6 du Procureur général, le Ministère public renonce à entamer une procédure de révision (art. 410 ss CPP) et annule lui-même une ordonnance pénale en application par analogie des règles sur la révision lorsque l'ordonnance pénale porte manifestement sur des faits déjà appréhendés par une décision rendue antérieurement par lui-même, par un tribunal ou par une autorité d'un autre canton (ne bis in idem). Cette procédure n'est applicable qu'en l'absence de partie plaignante (ne bis in idem ; AARP/348/2015 du 19 août 2015 ; art. 14.1 de la Directive).

Il est procédé de la même manière en cas de nullité de l'ordonnance pénale, notamment en cas d'incompétence du Ministère public ratione aetatis ou de peine illégale. Dans cette dernière hypothèse, une nouvelle ordonnance est notifiée (art. 14.2 de la Directive).

2.2.1. En l'espèce, A______ a été condamné, à teneur de son casier judiciaire suisse, état au 17 novembre 2022, à six reprises, la dernière fois le 12 février 2022 par le MP à une peine privative de liberté de 90 jours, sous déduction de deux jours de détention provisoire. Sous cette sixième occurrence, figure à l'extrait de son casier judiciaire une libération conditionnelle accordée par le TAPEM le 9 juin 2022 (solde de peine de deux mois et trois jours). En outre, deux enquêtes pénales en cours d'instruction y sont également inscrites, l'une datée du 18 octobre 2022 et l'autre du 17 novembre 2022.

A______ a été condamné par ordonnance pénale du 18 octobre 2022, dans le cadre de la procédure P/2______/2022, à une peine privative de liberté d'ensemble de 180 jours comprenant la révocation de la libération conditionnelle accordée par le TAPEM le 9 juin 2022 (solde de peine de deux mois et trois jours). Cette ordonnance est entrée en force, n'ayant pas fait l'objet d'une opposition.

Lors du prononcé de l'ordonnance pénale du 17 novembre 2022, dans le cadre de la présente procédure P/24365/2022, il a été condamné à une peine privative de liberté d'ensemble de 180 jours comprenant – à nouveau – la révocation de la libération conditionnelle accordée par le TAPEM le 9 juin 2022 (solde de peine de deux mois et trois jours). Cette ordonnance est également entrée en force, n'ayant pas fait l'objet d'une opposition.

En prononçant la révocation de la même libération conditionnelle, à deux reprises, condamnant ainsi le prévenu à exécuter deux fois la même peine (solde de peine de deux mois et trois jours, selon le TAPEM), l'ordonnance pénale visée par la demande de révision viole les principes ne bis in idem et de l'autorité de la chose jugée, étant donné que la décision judiciaire du 18 octobre 2022 était entrée en force, n'ayant pas fait l'objet d'une opposition. Force est de constater que le demandeur a été puni à deux reprises, par les autorités genevoises, à subir la même peine. Ainsi, en ordonnant à nouveau la révocation de la libération conditionnelle, déjà révoquée par ordonnance pénale du 18 octobre 2022, la peine d'ensemble prononcée dans l'ordonnance pénale du 17 novembre 2022 s'avère illégale. A cet égard, il n'est pas compréhensible que le MP, qui semble s'être rendu compte de cette erreur (cf. supra B.g.) au moment de l'enregistrement de la condamnation du 17 novembre 2022 au casier judiciaire, n'ait pas immédiatement corrigé son erreur, comme le prévoit sa propre directive en cas de peine illégale.

Quand bien même il n'existe pas de faits nouveaux inconnus du MP au moment de rendre l'ordonnance querellée, il convient d'annuler d’office la peine prononcée dans ladite ordonnance, vu la violation des principes fondamentaux de notre ordre judiciaire (ne bis in idem et autorité de la chose jugée), qui ne souffrent aucune dérogation.

3. 3.1. Au vu de ce qui précède, la peine prononcée par ordonnance pénale du 17 novembre 2022 sera annulée.

3.2. Dans la mesure où la révision est exercée en faveur du condamné et que la CPAR dispose des éléments utiles pour trancher la cause, elle est à même de rendre une nouvelle décision en application de l'art. 413 al. 2 let. b CPP quant à la peine à prononcer.

3.3. En l'espèce, la faute du demandeur n'est pas négligeable. Il n'a respecté ni l'interdiction d'entrer sur le territoire genevois prononcée à peine un mois plus tôt, ni l'interdiction de séjourner sur le territoire genevois, ce qui témoigne d'un mépris marqué pour l'ordre juridique suisse. Il a agi à l'encontre des interdits en vigueur pour des mobiles égoïstes et par pure convenance personnelle. Sa situation personnelle, certes précaire, ne justifie pas ses actes. Sa collaboration a été bonne, ayant admis l'intégralité des faits reprochés. Le demandeur a déjà été condamné à sept reprises, entre le 27 novembre 2018 et le 18 octobre 2022, étant précisé qu'il a de nombreux antécédents spécifiques en matière d'infractions à la LEI. Il y a concours d'infractions, ce qui justifie une augmentation de la peine dans une juste proportion.

Au vu de ce qui précède, seule une peine privative de liberté semble en mesure de dissuader le demandeur de récidiver s'agissant des infractions à la LEI.

L'infraction à l'article 119 al. 1 LEI est punie d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire, alors que celle à l'art. 115 al. 1 let. b LEI est passible d’une peine privative de liberté d'un an au plus ou d’une peine pécuniaire.

L'infraction à l'art. 119 al. 1 LEI étant la plus grave, elle sera punie d'une peine de base de 90 jours, aggravée de 40 jours pour tenir compte de l'infraction à l'art. 115 al. 1 let. b LEI (peine théorique : 60 jours).

Au vu de ce qui précède, il se justifie de donner suite à la demande de révision et de prononcer une peine privative de liberté de 130 jours à l'encontre de A______ en lieu et place de la peine privative de liberté d'ensemble de 180 jours.

4. Vu l'issue de la procédure, les frais de la procédure de révision seront laissés à la charge de l'État (art. 428 CPP). Il n'y a toutefois pas lieu de supprimer ceux mis à la charge du prévenu dans le cadre de la procédure de première instance (art. 428 al. 1 et 5 CPP).

5. Le prononcé de la présente décision rend sans objet la demande de mesures provisionnelles formée par le demandeur. La libération immédiate sera toutefois prononcée, vu l'exécution complète de la peine.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit la demande de révision formée par A______ contre l'ordonnance pénale OPMP/10911/2022 rendue le 17 novembre 2022 par le Ministère public, dans la procédure P/24365/2022.

L'admet.

Annule partiellement cette ordonnance pénale, en ce qui concerne la peine.

Et statuant à nouveau quant à la peine :

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 130 jours, sous déduction de trois jours de détention avant jugement.

Ordonne la mise en liberté immédiate de A______.

Ordonne la modification de l'inscription correspondante dans le casier judiciaire suisse de A______.

Confirme pour le surplus l'ordonnance pénale OPMP/10911/2022 rendue le 17 novembre 2022, qui est entrée en force.

Constate que A______ a été déclaré coupable d'infraction à l'article 115 alinéa 1 lettre b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration (LEI) et d'infraction à l'article 119 alinéa 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration (LEI).

Constate que A______ a été condamné aux frais de procédure préliminaire arrêtés à CHF 250.-.

Laisse les frais de la procédure de révision à la charge de l'État.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Secrétariat d'Etat aux migrations, à l'Office cantonal de la population et des migrations, au Service de la réinsertion et du suivi pénal et à la prison de Champ-Dollon.

La greffière :

Isabelle MERE

 

La présidente :

Sara GARBARSKI


 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière pénale.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.