Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision
AARP/145/2025 du 16.04.2025 sur JTDP/955/2024 ( PENAL ) , REJETE
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE P/14837/2023 AARP/145/2025 COUR DE JUSTICE Chambre pénale d'appel et de révision Arrêt du 16 avril 2025 |
Entre
A______, sans domicile connu, comparant par Me B______, avocate,
appelant,
contre le jugement JTDP/955/2024 rendu le 30 juillet 2024 par le Tribunal de police,
et
LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,
intimé.
EN FAIT :
A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement JTDP/955/2024 du 30 juillet 2024, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnu coupable de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers [LEI]), l'a condamné à une peine pécuniaire d'ensemble de 110 jours-amende, à CHF 10.- l'unité, après avoir révoqué les sursis octroyés le 18 janvier 2022 par le Ministère public (MP) et le 8 novembre 2023 par le TP, et a mis les frais de la procédure en CHF 966.- à sa charge.
A______ entreprend ce jugement dans son ensemble, concluant à son acquittement et à son indemnisation à hauteur de CHF 200.- par jour de détention injustifiée, avec intérêts à 5% l'an dès le 19 février 2024.
b. Selon l'ordonnance pénale du 19 février 2024, il est reproché ce qui suit à A______ :
Entre le 9 novembre 2023 et le 5 février 2024, il a séjourné à Genève sans autorisation, alors qu'il faisait l'objet d'une interdiction de pénétrer sur le territoire suisse prononcée par le Secrétariat d'État aux Migrations (SEM), valable du 3 décembre 2022 au 14 mars 2024, notifiée le 30 novembre 2022.
B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :
a. A______, ressortissant guinéen, est né le ______ 2003 à C______, en Guinée. Arrivé en Suisse en 2019, dans le canton du Valais, il n'a pas quitté le territoire helvétique depuis. Il a été au bénéfice d'un livret N du 7 mars 2019 au 7 septembre 2019. Sa demande d'asile a été refusée par décision entrée en force le 17 janvier 2020, un délai au 6 février 2020 lui ayant été imparti pour quitter le territoire. Il a disparu dans la clandestinité entre août 2020 et janvier 2022. Sa demande de réexamen de refus d'asile a fait l'objet d'une décision de non-entrée en matière du 17 juin 2022.
Le 15 mars 2022, le SEM a prononcé à son encontre une décision d'interdiction d'entrée en Suisse, valable du 3 décembre 2022 au 14 mars 2024, décision notifiée le 30 novembre 2022 par la police genevoise, lors d'un contrôle.
b. À teneur du rapport de renseignements du 19 juin 2023, le 18 juin 2023 vers 21h00, au cours d'une patrouille dans le secteur des Pâquis dans le cadre de l'opération D______, A______ a été contrôlé par la police (matricules des agents 1______ et 2______) alors qu'il était installé à une terrasse de la rue 3______. Il était dépourvu de pièce d'identité. Lors des contrôles effectués sur place, les agents ont constaté que l'intéressé séjournait illégalement en Suisse et faisait l'objet d'une interdiction d'entrée en Suisse. Il a été acheminé au poste de police de E______, où il a été fouillé et auditionné.
Le test AFIS a confirmé son identité et la fouille a permis la découverte de CHF 123.60 en espèces et d'un téléphone portable non signalé volé. Après avoir refusé de répondre aux questions de la police et de signer les documents qui lui étaient soumis, A______ a été remis en liberté à 23h20.
c. Le 6 février 2024, vers 02h50, A______ a été contrôlé par la police alors qu'il cheminait sur la rue 4______, dans le secteur des Pâquis.
Le rapport de renseignements du même jour indique que lors d'une patrouille motorisée, l'attention des policiers (matricules des agents 5______ et 6______) s'était portée sur un homme qui cheminait à la rue 4______. Le sergent-chef (6______) avait "immédiatement reconnu" cet homme comme étant A______. De ce fait, ils avaient procédé à son contrôle. Alors qu'il était démuni de document d'identité, celui-ci avait confirmé oralement son identité et été conduit au poste de police de F______. La fouille, effectuée dans le but de rechercher des stupéfiants, n'avait apporté aucun élément.
Après avoir refusé de répondre aux questions de la police et de signer les documents qui lui étaient soumis, A______ avait été mis à disposition du MP pour la suite de la procédure.
d. Le même jour, le MP a joint la procédure P/3544/2024 visant les faits du 6 février 2024 à la procédure P/14837/2023, concernant ceux du 18 juin 2023, sous ce dernier numéro et rendu une ordonnance pénale condamnant A______ pour séjour illégal du 9 novembre 2023 au 5 février 2024. Les faits du 18 juin 2023 n'ont fait l'objet d'aucune décision.
e. A______ a déclaré devant le MP, puis devant le premier juge, que son autorisation de séjourner en Suisse était "périmée" mais qu'il avait intenté une procédure de recours à cet égard. Il n'avait pas quitté la Suisse depuis 2019, faute d'avoir un autre endroit où se rendre. Il travaillait de temps à autre dans son foyer en Valais et venait à Genève car il y avait des amis.
C. a. La juridiction d'appel a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite avec l'accord des parties.
b. Selon son mémoire d'appel, A______ persiste dans ses conclusions.
Les preuves obtenues lors de ses interpellations des 18 juin 2023 et 6 février 2024 étaient illicites et donc inexploitables, ce qui devait conduire à son acquittement. Le 18 juin 2023, il avait été contrôlé par la police, puis fouillé et auditionné, alors qu'il était tranquillement assis à la terrasse d'un café. Son contrôle avait eu lieu dans le cadre d'une opération policière "D______" visant le trafic de stupéfiants à Genève, mais qui ciblait fréquemment des personnes noires. À teneur de leur rapport, les policiers n'avaient pourtant évoqué aucun élément laissant soupçonner qu'il pouvait participer à un tel trafic de stupéfiants. Il n'avait suscité aucun soupçon, même vague, de commission d'une infraction. Il était ainsi manifeste qu'il avait été contrôlé uniquement en raison de la couleur de sa peau, acte qui s'apparentait à un profilage racial couplé à une "fishing expedition". Les preuves ainsi récoltées était, partant, inexploitables. Lorsqu'il avait, le 6 février 2024, été contrôlé par un policier l'ayant reconnu alors qu'il se promenait dans le quartier des Pâquis, il ne s'agissait que de la conséquence directe de sa première interpellation, si tant est qu'il ne s'agissait pas d'un nouveau cas de profilage racial. Ces pratiques policières de délits de faciès, relevant de l'abus d'autorité, devaient être fermement condamnées par la Cour de céans, qui ne pouvait se permettre de laisser la question ouverte comme l'avait fait le premier juge.
Subsidiairement, il conclut au prononcé d'une peine pécuniaire clémente mais ferme, laquelle rendrait la révocation des sursis inutiles. Il avait reconnu les faits reprochés et les regrettait, leur gravité demeurant très légère.
c. Le MP conclut au rejet de l'appel, sous suite de frais.
L'appelant ne remettait pas réellement en cause le raisonnement du premier juge, selon lequel le contrôle du 18 juin 2023 n'était pas pertinent pour la période pénale visée par la présente procédure. L'appelant avait eu régulièrement affaire à la police, ce qui ne rendait pas invraisemblable que le policier l'eut reconnu le 6 février 2024, sans que cela ne soit en lien direct avec l'arrestation – par hypothèse illicite aux dires de l'appelant – du 18 juin 2023.
d. Le TP se réfère intégralement au jugement rendu.
D. A______ est célibataire, sans enfant. Il a été scolarisé en Guinée, sans être en mesure d'indiquer jusqu'à quel âge. Lors de son placement dans un foyer en Valais, il avait pu effectuer des petits travaux. Il avait le projet de suivre des cours de français et une formation professionnelle, projet qu'il avait abandonné après le refus de sa demande d'asile. Il n'a pas de profession, ni de domicile connu.
Selon les renseignements de police figurant à la procédure, A______ avait déjà fait l'objet de sept interpellations pour infractions à la LEI depuis 2021, préalablement à celles des 18 juin 2023 et 6 février 2024.
Selon extrait de son casier judiciaire suisse, A______ a été condamné :
- le 18 janvier 2022, par le MP, à une peine pécuniaire de 45 jours-amende à CHF 10.-, avec sursis et délai d'épreuve de trois ans (prolongé d'un an par jugement du 8 novembre 2023), pour entrée illégale et séjour illégal (période pénale du 24.12.2021 au 17.01.2022) ;
- le 8 novembre 2023, par le TP, à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à CHF 30.-, avec sursis et délai d'épreuve de trois ans, pour empêchement d'accomplir un acte officiel, séjour illégal (période pénale du 19.01.2022 au 06.01.2023 et du 03.02.2023 au 29.04.2023) et non-respect d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée (les 06.01.2023, 01.03.2023 et 29.04.2023).
E. Me B______, défenseure d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, trois heures et 30 minutes d'activité de cheffe d'étude.
EN DROIT :
1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).
La Chambre n'examine que les points attaqués du jugement de première instance (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP), sans être liée par les motifs invoqués par les parties ni par leurs conclusions (art. 391 al. 1 CPP).
2. 2.1. Se rend coupable d'infraction à l'art. 115 al. 1 let. b LEI, quiconque séjourne illégalement en Suisse.
2.2.1. Selon l'art. 215 al. 1 CPP, afin d'élucider une infraction, la police peut appréhender une personne et, au besoin, la conduire au poste dans les buts d'établir son identité (let. a), de l'interroger brièvement (let. b), de déterminer si elle a commis une infraction (let. c) ou de déterminer si des recherches doivent être entreprises à son sujet ou au sujet d'objets se trouvant en sa possession (let. d).
L'appréhension au sens de l'art. 215 CPP ne suppose pas d'emblée, au contraire de l'arrestation provisoire, que la personne concernée soit soupçonnée d'un délit (cf. ATF 139 IV 128 consid. 1.2 et ATF 142 IV 129 consid. 2.2). Lors d'une appréhension, parfois aussi appelée contrôle d'identité, la police restreint passagèrement la liberté de mouvement de personnes dans l'exercice de son droit d'investigation. Cette mesure lui permet d'établir l'identité d'une personne et de déterminer si elle a commis une infraction ou si elle a un lien quelconque avec celle-ci, pour avoir par exemple vu quelque chose ou pour se trouver en possession d'objets recherchés (Message du Conseil fédéral du 21 décembre 2005 relatif à l'unification du droit de procédure, FF 2006 1057, pp. 1205 et 1206).
Si la personne appréhendée ne se conforme pas à ses devoirs, découlant de l'art. 215 al. 2 let. b à d CPP, de présenter ses papiers d'identité, les objets qu'elle transporte avec elle, ainsi que d'ouvrir ses bagages ou son véhicule, la police a le droit de perquisitionner les vêtements, les objets qu'elle a sur elle, les bagages et les véhicules sans mandat de perquisition du Ministère public, aux conditions de l'art. 241 al. 3 CPP en relation avec l'art. 250 CPP. Ces perquisitions se limitent à la garantie des buts de l'appréhension au sens de l'art. 215 al. 1 CPP. Dans ce sens également, la police, en application de l'art. 241 al. 4 CPP, a le droit de fouiller la personne appréhendée sur la base de sa compétence propre, pour des raisons de sécurité, dans le but d'éloigner un danger (ATF 139 IV 128 consid. 1.2 et 1.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 7B_102/2024 du 11 mars 2024 consid. 2.4.3).
L'appréhension à des fins d'investigations pénales, au sens de l'art. 215 CPP, requiert donc un vague soupçon de commission d'infraction et se distingue des contrôles de police préventifs et de sécurité, lesquels trouvent leurs fondements dans les lois cantonales de police (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1297/2017 du 26 juillet 2018 consid. 2.4.1).
2.2.2. Selon l'art. 45 al. 1 de la loi genevoise sur la police (LPol), celle-ci exerce ses tâches dans le respect des droits fondamentaux et des principes de légalité, de proportionnalité et d'intérêt public.
L'art. 47 LPol autorise les membres autorisés du personnel de la police d'exiger de toute personne qu'ils interpellent dans l'exercice de leur fonction qu'elle justifie de son identité (al. 1). Si la personne n'est pas en mesure de justifier de son identité et qu'un contrôle supplémentaire se révèle nécessaire, elle peut être conduite dans les locaux de la police pour y être identifiée (al. 2). L'identification doit être menée sans délai ; une fois cette formalité accomplie, la personne quitte immédiatement les locaux de la police (al. 3).
2.2.3. Dans l'arrêt 7B_102/2024 précité, visant le cas d'un ressortissant guinéen contrôlé, sans motif concret, par la police dans un tram à Genève, le TF a reconnu que la fouille du téléphone portable de l'intéressé dans la foulée s'apparentait à une "fishing expedition". Cette mesure était, en l'espèce, disproportionnée et, dépassant le cadre de l'art. 215 CPP, était soumise à l'exigence d'un mandat, selon l'art. 241 al. 1 CPP. Il n'y avait en particulier aucun indice, au moment de son interpellation, d'un lien du prévenu dans cette affaire avec un trafic de cocaïne contre lequel était dirigée l'opération D______ (cette opération étant, selon les explications fournies par le Tribunal des mesures de contrainte dans la procédure en question, "destinée spécifiquement à déstabiliser les réseaux de trafiquants de cocaïne en procédant à des contrôles en divers lieux du canton, soit une mission clairement d'intérêt, de sécurité et de santé publics", les policiers étant "formés pour identifier divers signes laissant penser qu'une personne pourrait s'adonner au trafic, signes qui peuvent être liés au comportement général d'une personne, à un état de stress et à tout autre élément pertinent relevant des techniques policières (...) " [consid. 2.5.2]). Le TF a également relevé que d'éventuels indices d'infractions à la LEI, lesquels ne ressortaient pas du dossier, ne justifiaient pas encore une perquisition d'un téléphone, cette mesure allant au-delà de ce qui était nécessaire dans le cadre d'une appréhension au sens de l'art. 215 CPP (consid. 2.4.4).
2.2.4. La Cour européenne des droits de l'homme (CourEDH) a récemment condamné la Suisse pour profilage racial, en violation des art. 8 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (arrêt CourEDH Wa Baile c. Suisse du 20 février 2024, réquisitions n° 43868/18 et 25883/21). Le cas traité concernait un suisse d'origine kenyane qui avait été contrôlé et fouillé en 2015 par la police en gare de Zurich alors qu'il n'existait aucun soupçon d'infraction. Ayant refusé de présenter ses documents d'identité, lesquels se trouvaient dans son sac, il avait été condamné à une amende pour refus d'obtempérer aux injonctions de la police. Compte tenu des circonstances du contrôle d'identité (les policiers avaient retenu une suspicion d'infraction à la loi fédérale sur les étrangers uniquement sur la base du comportement de l'intéressé qui avait détourné le regard à l'approche du policier) et du lieu où il avait été effectué, le requérant pouvait se prévaloir d'un grief de discrimination fondée sur sa couleur de peau.
2.3.1. En l'espèce, les griefs de l'appelant concernant le 18 juin 2023 tombent à faux.
Tout d'abord, comme l'a à juste titre rappelé le premier juge, l'intervention du 18 juin 2023, malgré le constat que l'appelant était présent à Genève en violation d'une interdiction de territoire suisse, n'a donné lieu à aucun reproche dans l'ordonnance pénale valant acte d'accusation. Il y a lieu de considérer que ces faits ont fait l'objet d'un classement implicite de la part du MP, de sorte que le "moyen de preuve", constitué du rapport de police faisant suite à son appréhension, n'a, en tout état, pas été utilisé contre l'appelant. Il ne saurait ainsi s'en prévaloir pour justifier son acquittement dans la présente procédure.
Sans que cette question ne soit déterminante dans le cas d'espèce, il peut être relevé que l'opération D______, dans le cadre de laquelle le contrôle de l'appelant s'est inscrit à teneur du rapport de police du 19 juin 2023, a pour but premier la prévention du trafic de stupéfiants et peut justifier un contrôle de police préventif, fondé sur l'art. 47 LPol, à distinguer d'une appréhension au sens de l'art. 215 CPP.
Quant à l'intervention policière du 6 février 2024, seule pertinente pour les faits reprochés, elle n'est aucunement en lien avec celle menée près de huit mois plus tôt, par des policiers différents. Si l'on ignore à la lecture du rapport de police comment le sergent-chef a "immédiatement reconnu" l'appelant, il y a lieu de noter, comme le signifie le MP, que l'appelant avait déjà eu affaire à la police à de nombreuses reprises pour des infractions à la LEI, même antérieurement au contrôle du 18 juin 2023. Sans que cela ne soit en lien avec ce dernier contrôle, ce policier pouvait avoir de légitimes soupçons que l'appelant était à nouveau en train de commettre une infraction de séjour illégal en se trouvant alors dans les rues de Genève. Cette infraction était d'ailleurs effectivement commise, ce qu'admet l'intéressé, récidiviste en la matière, la situation étant largement différente du cas Wa Baile c. Suisse traité par la CourEDH. L'appelant se trouvait alors démuni de papiers d'identité ; les policiers étaient ainsi fondés à procéder à son appréhension et à le conduire au poste en vue de son identification (AFIS) et de sa fouille. Dans ces circonstances, l'action de la police n'est pas allée au-delà de ce qui est autorisé par l'art. 215 CPP, contrairement à la perquisition considérée comme disproportionnée dans l'affaire traitée par l'arrêt du Tribunal fédéral 7B_102/2024.
Par conséquent, l'appréhension de l'appelant du 6 février 2024 ne saurait être considérée comme illicite.
2.3.2. Les éléments constitutifs de l'infraction de séjour illégal sont par ailleurs remplis.
L'appelant s'est trouvé sur le territoire suisse, plus particulièrement à Genève, entre le 9 novembre 2023 et le 6 février 2024, alors qu'il n'était pas au bénéfice d'une autorisation de séjour et qu'il était soumis à une interdiction de territoire prononcée par le SEM et valable du 30 novembre 2022 au 14 mars 2024. L'appelant ne remet pas ces faits en cause, pas plus que l'élément subjectif, le TP ayant retenu qu'il avait parfaitement connaissance de cette interdiction qui lui avait été notifiée le 3 décembre 2022.
Partant, le verdict de culpabilité de l'appelant du chef de séjour illégal au sens de l'art. 115 al. 1 let. b LEI sera confirmé.
3. 3.1.1. Le séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI) est passible d'une peine privative de liberté d'un an au plus ou d'une peine pécuniaire.
3.1.2. Le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (art. 47 al. 1 CP). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
3.1.3. Aux termes de l'art. 46 al. 1 CP, si, durant le délai d'épreuve, le condamné commet un crime ou un délit et qu'il y a dès lors lieu de prévoir qu'il commettra de nouvelles infractions, le juge révoque le sursis ou le sursis partiel. Si la peine révoquée et la nouvelle peine sont du même genre, il fixe une peine d'ensemble en appliquant par analogie l'art. 49 CP. S'il n'y a pas lieu de prévoir de nouvelles infractions, le juge renonce à ordonner la révocation (al. 2).
La révocation du sursis ne se justifie ainsi qu'en cas de pronostic défavorable, à savoir lorsque la nouvelle infraction laisse entrevoir une réduction sensible des perspectives de succès de la mise à l'épreuve. Par analogie avec l'art. 42 al. 1 et 2 CP, le juge se fonde sur une appréciation globale des circonstances du cas d'espèce pour estimer le risque de récidive. En particulier, il doit prendre en considération l'effet dissuasif que la nouvelle peine peut exercer, si elle est exécutée. Il peut parvenir à la conclusion que l'exécution, le cas échéant, de la nouvelle peine aura un effet dissuasif suffisant, justifiant de renoncer à la révocation du sursis antérieur. L'inverse est également admissible : si le sursis précédent est révoqué, l'exécution de la peine qui en était assortie peut conduire à nier l'existence d'un pronostic défavorable pour la nouvelle peine et, partant, à assortir cette dernière du sursis (ATF 134 IV 140 consid. 4.2 à 4.5).
En cas de révocation du sursis, le juge doit fixer une peine d'ensemble en partant méthodiquement de la peine infligée pour l'infraction nouvellement commise pendant le délai d'épreuve, selon les principes fixés à l'art. 47 CP, en tant que "peine de départ" (Einsatzstrafe). Cette nouvelle peine doit être augmentée en raison de la peine dont le sursis est révoqué, par application analogique du principe de l'aggravation
(ATF 145 IV 146 consid. 2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_444/2023 du 17 août 2023 consid. 4.1.1 et 4.1.2).
3.2.1. La faute de l'appelant est de gravité modérée. Il est demeuré sur le territoire suisse, la période pénale étant d'un peu moins de trois mois, alors qu'il ne disposait pas d'une autorisation et qu'il avait déjà été condamné à deux reprises pour des faits de même typicité.
Si sa situation personnelle, précaire, explique les faits, elle ne les excuse pas. Il a expliqué être dans l'attente de l'issue de son recours, alors même qu'aucune voie de droit n'apparaît avoir été utilisée. Il lui appartenait pourtant de tenter des démarches afin de régulariser sa situation en Suisse, ou de se conformer aux décisions dont il a fait l'objet. Son mobile relevant de la convenance personnelle. Sa collaboration a été bonne, le prévenu n'ayant pas nié les faits reprochés, lesquels étaient toutefois difficilement contestables. Il n'a pas exprimé de regrets avant la procédure d'appel, alors que ceux exprimés par le truchement de son conseil, apparaissent dictés pour les besoins de la procédure. L'appelant n'élabore pas d'autre projet que de rester en Suisse, malgré ses condamnations successives pour séjour illégal.
Le genre de peine est acquis à l'appelant, dès lors que, outre l'interdiction de reformatio in pejus (art. 391 al. 2 CPP), le principe de la primauté du refoulement sur une peine privative de liberté trouve application (cf. ATF 150 IV 329 consid. 1.2.1 ; 147 IV 232 consid. 1.2 et 1.6 ; 145 IV 197 consid. 1.4.3).
Il a deux antécédents de même genre, les peines prononcées avec sursis et la prolongation du délai d'épreuve du 8 novembre 2023, couplée d'un avertissement, ne l'ayant pas empêché de récidiver. L'appelant n'indique pas, même en appel, avoir pris des mesures pour quitter la Suisse ou y régulariser son séjour de sorte qu'il ne fournit aucun élément permettant de retenir une amélioration de son pronostic.
Pour ces raisons, le pronostic de l'appelant apparaît sous un jour défavorable et il ne saurait être mis, une nouvelle fois, au bénéfice du sursis.
3.2.2. Il doit être constaté que l'appelant a récidivé en se sachant non seulement dans le délai d'épreuve accordé le 8 novembre 2023, mais encore après avoir déjà reçu un avertissement et une prolongation de son délai d'épreuve du 18 janvier 2022. Il sera partant retenu, avec le premier juge, que le pronostic défavorable commande également la révocation des deux sursis, le prononcé de la présente peine ferme n'étant pas suffisant à détourner l'appelant de nouvelles récidives.
La révocation des sursis prononcés les 18 janvier 2022 par le MP et le 8 novembre 2023 par le TP sera dès lors confirmée.
3.2.3. La fixation d'une peine pécuniaire d'ensemble se justifie. L'appelant ne remet pas en question, au-delà de l'acquittement plaidé, le quantum de celle-ci, lequel ne prête effectivement pas le flanc à la critique.
La peine pécuniaire de base de 20 jours-amende, en lien avec la nouvelle infraction, a été augmentée dans une juste proportion de 90 jours-amende, par le concours avec les peines de 45 et 60 jours-amende dont le sursis a été révoqué (art. 46 al. 1 CP). Le montant du jour-amende, fixé au minimum légal pour tenir compte de sa situation personnelle et financière (art. 34 al. 2 CP), est adéquat.
Les onze jours de détention subis par l'appelant seront dès lors imputés sur cette peine (art. 51 CP), ce qui exclut toute indemnisation (ATF 141 IV 236 consid. 3.3).
3.3. Le jugement querellé sera, partant, intégralement confirmé.
4. L'appelant, qui succombe, supportera les frais de la procédure envers l'État (art. 428 al. 1 CPP), y compris un émolument d'arrêt de CHF 800.- (art. 14 al. 1 let. e du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale).
5. Considéré globalement, l'état de frais produit par Me B______, défenseure d'office de A______, satisfait les exigences légales et jurisprudentielles régissant l'assistance judiciaire gratuite en matière pénale. Sa rémunération sera partant arrêtée à CHF 908.05, correspondant à trois heures et 30 minutes d'activité au tarif de CHF 200.-/heure plus la majoration forfaitaire de 20% et l'équivalent de la TVA au taux de 8.1% en CHF 68.04.
* * * * *
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/955/2024 rendu le 30 juillet 2024 par le Tribunal de police dans la procédure P/14837/2023.
Le rejette.
Condamne A______ aux frais de la procédure d'appel, en CHF 955.-, lesquels comprennent un émolument de CHF 800.-.
Arrête à CHF 908.05, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me B______, défenseure d'office de A______.
Confirme le jugement entrepris, dont le dispositif est le suivant :
"Déclare A______ coupable de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI).
Révoque le sursis octroyé le 18 janvier 2022 par le Ministère public à la peine de 45 jours-amende à CHF 10.- le jour, sous déduction de 1 jour de détention avant jugement et le sursis octroyé le 8 novembre 2023 par le Tribunal de police à la peine de 60 jours-amende à CHF 10.- le jour, sous déduction de 6 jours de détention avant jugement (art. 46 al. 1 CP).
Condamne A______ à une peine pécuniaire d'ensemble de 110 jours-amende, sous déduction de 11 jours-amende, correspondant à 11 jours de détention avant jugement, incluant les peines dont le sursis a été révoqué et les jours de détention y relatifs (art. 34 et 51 CP).
Fixe le montant du jour-amende à CHF 10.-.
Rejette les conclusions en indemnisation de A______ (art. 429 CPP).
Condamne A______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 966.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.- (art. 426 al. 1 CPP).
Fixe à CHF 1'297.20 l'indemnité de procédure due à Me B______, défenseur d'office de A______ (art. 135 CPP). "
Notifie le présent arrêt aux parties.
Le communique, pour information, au Tribunal de police, au Secrétariat d'État aux migrations et à l'Office cantonal de la population et des migrations.
La greffière : Linda TAGHARIST |
| Le président : Vincent FOURNIER |
Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.
| ÉTAT DE FRAIS |
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| COUR DE JUSTICE |
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Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).
Total des frais de procédure du Tribunal de police : | CHF | 966.00 |
Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision |
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Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c) | CHF | 00.00 |
Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i) | CHF | 80.00 |
Procès-verbal (let. f) | CHF | 00.00 |
État de frais | CHF | 75.00 |
Émolument de décision | CHF | 800.00 |
Total des frais de la procédure d'appel : | CHF | 955.00 |
Total général (première instance + appel) : | CHF | 1'921.00 |