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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/14994/2021

AARP/366/2023 du 19.10.2023 sur JTDP/333/2023 ( PENAL ) , ADMIS

Descripteurs : CYBERCRIMINALITÉ
Normes : CP.144bis
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/14994/2021 AARP/366/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 2 octobre 2023

 

Entre

A______, domicilié ______ [GE], comparant par Me B______, avocat,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/333/2023 rendu le 17 mars 2023 par le Tribunal de police,

 

et

C______ SA, partie plaignante, comparant par Me D______, avocat,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 17 mars 2023, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnu coupable de détérioration de données (art. 144bis ch. 1 al. 1 du Code pénal [CP]), l'a condamné à une peine pécuniaire de 30 jours-amende à CHF 60.- et à verser à C______ SA CHF 3'503.85 à titre d'indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure. Les frais de celle-ci ont été mis à sa charge à hauteur de 9/10èmes, de même qu'un émolument complémentaire de jugement de CHF 1'500.-, le solde (1/10ème) l'étant à celle de C______ SA.

A______ entreprend intégralement ce jugement, concluant à son acquittement, subsidiairement, au bénéfice du sursis, et à l'octroi d'une indemnité de CHF 6'914.35 pour ses frais d'avocat.

b. Selon l'ordonnance pénale du 29 novembre 2021, qui tient lieu d'acte d'accusation, il est reproché ce qui suit à A______ :

Entre le 5 et le 9 juillet 2021, il s'est introduit dans le système informatique de C______ SA et y a, sans droit, modifié le mot de passe d'accès, alors qu'il n'était plus le consultant informatique de cette société depuis le 30 juin 2021, mettant ainsi hors d'usage ce système informatique.

B. Les faits de la cause ne sont pour l’essentiel pas contestés par l’appelant et peuvent être résumés comme suit, étant pour le surplus renvoyé au jugement de première instance (art. 82 al. 4 du Code de procédure pénale [CPP]).

a. A______ a été associé de E______ SàRL jusqu'au mois de novembre 2022. Il était également employé par la société F______ SàRL. Les deux sociétés avaient, à la période litigieuse, la même administratrice.

b. Depuis 2003, A______ gérait les serveurs informatiques de C______ SA. En 2021, il fournissait ses prestations en qualité d’employé de F______ SàRL, mais pour le compte de E______ SàRL, qui facturait donc ses services.

c. Un litige est survenu en 2021 entre C______ SA et E______ SàRL. La première a résilié le mandat de la seconde pour le 30 juin 2021 et l’a invitée, ainsi que A______, à lui fournir les mots de passe du système informatique. E______ SàRL a refusé, invitant C______ SA à venir récupérer les mots de passe en s’acquittant des factures en souffrance. Celle-ci a refusé de se rendre dans les locaux de E______ SàRL et l’a enjointe de lui transmettre les mots de passe le 20 juillet 2021 au plus tard.

d. C______ SA a mandaté un nouveau prestataire informatique qui s’est rendu sur place le 29 juin 2021 et a notamment installé un logiciel de prise à distance en se connectant sur le compte administrateur [de] A______.

e. Au cours de la première semaine de juillet 2021, ce nouveau prestataire a constaté que son logiciel avait été désactivé et que le mot de passe du compte administrateur [de] A______ avait été modifié.

f. Le 14 juillet 2021, C______ SA a déposé plainte pénale contre A______ pour ces faits.

g. A______ a admis avoir modifié le mot de passe, affirmant l’avoir fait le 30 juin 2021. À cette occasion, il avait également supprimé le logiciel de prise à distance, ignorant qui l’avait installé et dans quel but.

Il avait agi de la sorte sur instruction de E______ SàRL en raison des factures impayées. Il n’avait pas eu d’autre contact avec cette dernière par la suite. Il ne se souvenait plus du nouveau mot de passe, lequel avait été communiqué uniquement à E______ SàRL.

C. a. Lors de l'audience d'appel, A______ a précisé qu'il n'était plus actionnaire de E______ SàRL depuis novembre 2022, moment de son départ de la société. À la suite d'un changement de direction chez C______ SA, des divergences étaient nées entre lui et le nouveau directeur. Il avait dès lors proposé de confier la gestion de l'informatique à une autre personne, ce qui avait été refusé par C______ SA. Cette dernière avait même sollicité de nouveaux services et commandé du matériel, mais ne s'était pas acquittée des factures y relatives. Il avait reçu un SMS ou un message WhatsApp selon lequel C______ SA mettait fin au contrat pour fin juin 2021, mais n'avait reçu aucune instruction complémentaire. Le système informatique de C______ SA possédait deux comptes administrateurs, dont un sous le nom de A______. Seul le mot de passe de ce compte, qui lui appartenait, avait été modifié le 30 juin 2021, à 18h54, lors de sa dernière connexion. Il n'avait pas été informé de l'intervention d'un autre prestataire. Il avait évoqué le changement de mot de passe avec E______ SàRL, laquelle avait validé son choix. La pratique usuelle, en cas de factures impayées, était d'effacer son propre profil et d'en créer un nouveau pour le prestataire, ce qu'il avait fait. Aucune protection particulière n'avait été mise en place afin d'empêcher que le mot de passe soit réinitialisé. La communication avec C______ SA avait été rompue, de sorte qu'il n'avait pas été en mesure de lui expliquer ce qui précédait, chacun restant sur ses positions : la seule réponse de celle-ci avait été de déposer plainte.

b. Entendu en qualité de témoin aux débats d’appel, G______, associé (sans signature) de E______ SàRL, a confirmé que les rapports entre cette dernière et C______ SA avaient pris fin le 30 juin 2021. Conformément aux instructions de C______ SA, A______ avait été informé du fait qu'il ne devait plus se connecter à son système informatique à compter du 1er juillet 2021.

Il savait que A______ s'était connecté le 30 juin 2021 et avait changé le mot de passe du son propre compte administrateur (A______). Il s'agissait de la procédure habituelle en cas de factures impayées et lui-même n'avait pas donné d'instruction dans ce sens. Ce compte appartenait à A______ et il pouvait en disposer librement. Il n'avait par contre pas changé le mot de passe du compte administrateur général. Celui-ci était conservé dans la base de données du client auprès de E______ SàRL.

c. Par la voix de son conseil, A______ a persisté dans ses conclusions. La période pénale retenue dans l'ordonnance pénale était erronée, puisqu'il s'était connecté pour la dernière fois au système informatique de C______ SA le 30 juin 2021, soit avant la fin des rapports de service. À cette date, il était autorisé à agir et ne s'était dès lors pas connecté sans droit. Il avait par ailleurs uniquement modifié le mot de passe d'un compte administrateur à son nom et dont il était l'ayant droit. Les effets concrets du changement de mot de passe étaient quant à eux inconnus, mais relevaient d'un litige civil.

Il a déposé des conclusions en indemnisation s'agissant de l'activité déployée par son conseil, à hauteur de CHF 6'914.35 TTC (soit 16h à CHF 400.-/heure, plus TVA), dont 7h30 dans le cadre de la procédure d'appel, hors débats d'appel, lesquels ont duré 2h.

d. Le MP n’a pas participé aux débats d’appel et n’a pas pris de conclusions.

e. Par la voix de son conseil, C______ SA fait valoir que la remise des mots de passe avait été demandée à plusieurs reprises depuis le mois de mai 2021, sans succès. Ceux-ci étaient nécessaires pour gérer le support informatique. La modification du mot de passe, admise par A______, l'avait mis hors d'usage et créé un risque de perte de données. A______ avait agi sans droit. Seules ses déclarations permettaient de retenir qu'il s'était connecté le 30 juin 2021. Dans tous les cas, une connexion à 18h54 était tardive, dans la mesure où le contrat prenait fin ce jour-là. A______ avait agi de la sorte dans le but d'obtenir le paiement de factures restées ouvertes.

À l'appui de ses prétentions en indemnisation, C______ SA produit une note d'honoraires de son avocat de CHF 1'130.85 TTC (soit 7h à CHF 150.-/heure, plus TVA), soit 7h dans le cadre de la procédure d'appel, débats d'appel inclus.

 

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 CPP).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. 2.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale (Cst.) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 ; ATF 127 I 28 consid. 2a).

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. La présomption d'innocence est violée lorsque le juge rend un verdict de culpabilité au seul motif que le prévenu n'a pas prouvé son innocence (ATF 127 I 38 consid. 2a) ou encore lorsque le juge condamne le prévenu au seul motif que sa culpabilité est plus vraisemblable que son innocence. En revanche, l'absence de doute à l'issue de l'appréciation des preuves exclut la violation de la présomption d'innocence en tant que règle sur le fardeau de la preuve (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3).

Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3).

2.2. L'art. 144bis CP punit, sur plainte, quiconque, sans droit, modifie, efface, ou met hors d’usage des données enregistrées ou transmises électroniquement ou selon un mode similaire.

Cette disposition protège l'intégrité des données informatiques et l'intérêt de l'ayant droit à un usage sans perturbation. Toute modification est en principe suffisante. La norme envisage expressément l'effacement, s'agissant d'un cas de modification. Quant à la mise hors d'usage, il n'est pas nécessaire que la donnée soit intrinsèquement atteinte ; il suffit qu'elle ne puisse plus être utilisée. La doctrine mentionne notamment, à titre d'exemple, la transformation indue d'un mot de passe (A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ (éds), Commentaire romand, Code pénal II, vol. II, Partie spéciale : art. 111-392 CP, Bâle 2017, n° 3, 4 ad art. 144bis). Une entrave temporaire suffit (M. NIGGLI / H. WIPRÄCHTIGER, Basler Kommentar Strafrecht II: Art. 137-392 StGB, Jugendstrafgesetz, 4ème éd., Bâle 2019, n. 36 ad art. 144bis).

L'infraction est intentionnelle ; le dol éventuel suffit (AARP/99/2021 du 29 mars 2021, consid. 3.1.2; B. CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol. I, 3ème éd., Berne 2010, n° 5, 7 et 8 ad art. 144bis CP).

2.3. En l'espèce, il est établi que le prévenu a modifié le mot de passe permettant l'accès à son compte administrateur personnel sur le système informatique de l'intimée.

Le prévenu a maintenu, de façon constante, s'être connecté pour la dernière fois au système informatique le 30 juin 2021. Aucun élément du dossier ne permet de retenir qu'il l'aurait fait à une date ultérieure. Que le nouveau prestataire ait constaté la modification début juillet 2021 ne permet pas d'affirmer que le prévenu se serait lui-même connecté durant cette période. La version du prévenu est dès lors crédible. Il sera donc retenu que la modification du mot de passe a été effectuée le 30 juin 2021.

Or, à cette date, l'appelant était encore lié contractuellement à l'intimée, qui ne lui avait donné aucune d'instruction lui interdisant l'accès au système informatique avant la fin des rapports de service. Rien ne s'opposait dès lors à ce que l'appelant s'y connecte et modifie les données relatives à son propre compte administrateur. En effet, le compte administrateur général restait quant à lui accessible. Le mot de passe y afférent se trouvait par ailleurs dans la base de données client de E______ SàRL, laquelle avait informé l'intimée de ce qu'elle le mettrait à sa disposition auprès de son secrétariat, moyennant paiement des factures restées ouvertes. L'appelant a de plus expliqué, ce qui n'est pas contesté par l'intimée, qu'il a agi de la sorte après avoir constaté que des modifications avaient été effectuées depuis son compte personnel, sans qu'il ne soit informé qu'un nouveau prestataire avait été mandaté, et qu'il était donc en droit d'intervenir.

Ayant agi dans le cadre de son mandat, l'appelant ne l'a pas fait sans droit. Il n'a également pas mis hors d'usage le système informatique de l'intimée, le mot de passe modifié ne concernant que son propre compte administrateur et non le compte administrateur général.

Partant, les circonstances du cas d'espèce permettent d'exclure l'application de l'art. 144bis CP.

L'appel sera par conséquence admis sur ce point et le jugement du TP réformé.

2.4. Le renvoi de C______ SA à agir par la voie civile sera confirmé, par substitution de motifs (art. 126 al. 2 let. d CPP).

3. 3.1.1. Selon l'art. 428 al. 1 CPP, les frais de la procédure de recours sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé (arrêts du Tribunal fédéral 6B_472/2018 du 22 août 2018 consid. 1.2 ; 6B_620/2016 du 17 mai 2017 consid. 2.1.2).

3.1.2. Par dérogation à l'art. 423 al. 1 CPP, à teneur duquel, en règle générale, les frais d'une procédure pénale sont mis à la charge du canton qui a conduit cette procédure, les art. 426 et 427 CPP permettent à cet égard l'imputation des frais au prévenu, d'une part, et à la partie plaignante ou au plaignant, d'autre part
(ATF 143 IV 488 consid. 2.1), en application du principe selon lequel celui qui a causé les frais doit les supporter (ATF 147 IV 47 consid. 4.2.3 ; 138 IV 248
consid. 4.4.1).

3.1.3. Selon l'art. 427 al. 2 CPP, en cas d'infractions poursuivies sur plainte, les frais de procédure peuvent être mis à la charge de la partie plaignante ou du plaignant qui, ayant agi de manière téméraire ou par négligence grave, a entravé le bon déroulement de la procédure ou rendu celle-ci plus difficile lorsque la procédure est classée ou le prévenu acquitté (let. a) et que le prévenu n'est pas astreint au paiement des frais conformément à l'art. 426 al. 2 (let. b). La condition d'avoir agi de manière téméraire ou par négligence grave et de la sorte entravé le bon déroulement de la procédure ou rendu celle-ci plus difficile ne s'applique qu'au plaignant, conformément à la traduction allemande de l'art. 432 al. 2 CPP. Cette condition ne s'applique pas à la partie plaignante, à la charge de laquelle les frais peuvent être mis sans cette condition (ATF 138 IV 248 consid. 4.2.2 = JdT 2013 IV p. 195 consid. 4.2.2).

3.1.4. Selon l'art. 426 al. 2 CPP, lorsque le prévenu est acquitté, tout ou partie des frais de procédure peuvent être mis à sa charge s’il a, de manière illicite et fautive, provoqué l’ouverture de la procédure ou rendu plus difficile la conduite de celle-ci.

3.1.5. Si l'autorité de recours rend elle-même une nouvelle décision, elle se prononce également sur les frais fixés par l'autorité inférieure (art. 428 al. 3 CPP).

3.2.1. En l'espèce, le prévenu est acquitté, sans qu'un comportement blâmable, qui aurait commandé l'ouverture de la procédure ou l'aurait compliquée, ne puisse lui être reproché. En effet, il n'était pas lui-même en possession du mot de passe administrateur général réclamé par l'intimée, lequel était détenu par son employeur, qui a toujours été en mesure de le transmettre, et aucune relation contractuelle ne le liait directement à la partie plaignante. Dès lors, il ne se justifie pas de mettre à sa charge les frais de la procédure de première instance, ni ceux de la procédure d'appel.

L'intimée a quant à elle déposé la plainte pénale. Elle s'est constituée partie plaignante et a, pleinement et activement, participé à l'ensemble de la procédure. Or, il n'est pas certain qu'elle se serait retrouvée dans cette situation si elle avait averti le prévenu de l'intervention d'un autre prestataire et si ce dernier n'avait pas usé du compte administrateur personnel de l'intéressé à son insu. De surcroît, elle a agi avant même l’échéance du délai qu’elle avait elle-même imparti à son cocontractant, contribuant de la sorte à l’enlisement de la situation et faisant obstacle à une résolution amiable du litige.

Dès lors, s'agissant d'une infraction poursuivie uniquement sur plainte, il se justifie de mettre à sa charge les frais de la procédure préliminaire et de la procédure de première instance, pour tenir compte de l'échec de sa plainte envers le prévenu (ATF 138 IV 248 consid. 4.2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_538/2021 du 8 décembre 2021 consid. 1.1).

3.2.2. Il en ira de même des frais de la procédure d'appel qui comprendront un émolument d'arrêt de CHF 1'500.- (art. 14 al. 1 let. e du Règlement genevois fixant le tarif des frais en matière pénale).

4. 4.1.1. L'art. 429 al. 1 let. a CPP, applicable à l’appel via le renvoi de l’art. 436 al. 1 CPP, prévoit que s’il est acquitté totalement ou en partie ou s'il bénéficie d'une ordonnance de classement, le prévenu a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure.

4.1.2. La décision sur les frais préjuge de la question de l'indemnisation
(ATF 137 IV 352 consid. 2.4.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_548/2018 du 18 juillet 2018 consid. 1.1.2 ; 6B_385/2017 du 5 décembre 2017 consid. 2.1).

L'autorité pénale doit examiner, tout d'abord, si l'assistance d'un conseil était nécessaire, puis, dans l'affirmative, apprécier objectivement la pertinence et l'adéquation des activités facturées (ACPR/140/2013 du 12 avril 2013).

La Cour de justice retient en principe un tarif horaire entre CHF 400.- et CHF 450.- pour un chef d'étude (arrêt du Tribunal fédéral 2C_725/2010 du 31 octobre 2011 consid. 3 et 2C_25/2008 du 18 juin 2008 consid. 3 ; AARP/415/2020 du 15 décembre 2020 consid. 7.3).

4.1.3. Lorsque la partie plaignante ou le plaignant supporte les frais en application de l'art. 427 al. 2 CPP, une éventuelle indemnité allouée au prévenu peut en principe être mise à la charge de la partie plaignante ou du plaignant en vertu de l'art. 432 al. 2 CPP. En se constituant partie plaignante et en participant activement à la procédure dans le cadre d'infractions qui ne se poursuivent pas d'office, la partie plaignante prend le risque de supporter les frais d'avocat du prévenu (art. 432 al. 2 CPP). Le fait que celui-ci ne soit libéré totalement de la poursuite pénale qu'en deuxième instance n'y change rien (arrêts du Tribunal fédéral 6B_459/2022 du 20 mars 2023 consid. 2.2 ; 6B_1081/2021 du 23 novembre 2023 consid. 3).

4.2.1. Dès lors que les frais de la procédure préliminaire et de première instance doivent être supportés par l'intimée, le prévenu, entièrement acquitté, peut prétendre, à la couverture de ses honoraires d’avocat, pour autant que ceux-ci répondent aux critères de nécessité et d’adéquation, y compris au plan tarifaire, dégagés par la jurisprudence fédérale et cantonale.

4.2.2. En l'espèce, l'appelant a déposé des conclusions en indemnisation chiffrées à CHF 2'498.65 pour ses frais d'avocat afférents à la procédure préliminaire et de première instance, correspondant à 5h45 d'activité de son conseil, effectuées entre le 30 janvier et le 16 mars 2023, soit sur une période d'un peu plus d'un mois. Il a requis qu'il y soit ajouté la durée des débats de première instance (1h45 le 17 mars 2023 au tarif du chef d'étude). Il en découle un montant total d'honoraires de son conseil de CHF 3'444.95 (CHF 2'498.65 + [1h45 x CHF 400.-] + CHF 246.30 de TVA à 7.7%). Les prestations effectuées apparaissant, dans leur ensemble, adéquates et proportionnées, au vu de l'activité menée et de la période facturée, de sorte qu'elles sont admissibles. Les tarifs appliqués aux prestations du chef d'étude sont en adéquation à ceux agréés par la Cour de justice dans sa jurisprudence.

Partant, il sied d'allouer à l'appelant une indemnité pour ses frais d'avocat en première instance de CHF 3'444.95 à la charge de l'intimée, TVA incluse.

4.3.2.  En appel, le prévenu conclut à l'octroi d'une indemnité supplémentaire pour ses frais d'avocat de CHF 6'914.35 TTC, correspondant à 16h d'activité de chef d'étude. Toutefois, il sied de retrancher de la note de frais présentée les 7h de prestations devant le TP, activité antérieure à la saisine de la juridiction d'appel et déjà facturée en première instance, et de rectifier le temps évalué pour l'audience d'appel (1h30) à 2h.

Par conséquent, une indemnité de CHF 4'092.60 (CHF 3'800.- + CHF 292.60 de TVA à 7.7%) sera octroyée au prévenu pour ses frais d'avocat en appel, à la charge de la partie plaignante.

4.4. Vu l'issue, il ne sera pas fait droit aux conclusions en indemnisation de l'intimée pour ses propres frais d'avocat.

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/333/2023 rendu le 17 mars 2023 par le Tribunal de police dans la procédure P/14994/2021.

L'admet.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Acquitte A______ du chef de détérioration de données (art. 144bis CP).

Renvoie C______ SA à agir par la voie civile (art. 126 al. 2 let. d CPP).

Condamne C______ SA à payer les frais de la procédure de première instance, qui s'élèvent au total à CHF 3'048.- (art. 427 al. 2 CPP).

Condamne C______ SA à payer les frais de la procédure d'appel, qui s’élèvent à CHF 1'815.-, comprenant un émolument de CHF 1’500.- (art. 428 CPP).

Condamne C______ SA à payer à A______, à titre d'indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits, CHF 3'444.95 pour la procédure préliminaire et de première instance et CHF 4'092.60 pour la procédure d'appel (art. 432 al. 2 CPP).

Rejette les conclusions en indemnisation de C______ SA.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police.

La greffière :

Lylia BERTSCHY

 

La présidente :

Gaëlle VAN HOVE

 

 

Indication des voies de recours :

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

3'048.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

120.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

120.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'500.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'815.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

4'863.00