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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/19900/2022

AARP/269/2023 du 28.07.2023 sur JTDP/213/2023 ( PENAL ) , REJETE

Descripteurs : EXPULSION(DROIT PÉNAL)
Normes : CP.66a
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/19900/2022 AARP/269/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 27 juillet 2023

 

Entre

A______, domicilié c/o B______, ______, actuellement détenu à la prison de C______, ______, comparant par Me D______, avocate,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/213/2023 rendu le 17 février 2023 par le Tribunal de police,

 

et

E______, F______ et G______, parties plaignantes ,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 17 février 2023, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnu coupable de brigandage (art. 140 ch. 1 du Code pénal [CP]), de vol (art. 139 ch. 1 CP), de tentative de vol (art. 139 ch. 1 cum 22 al. 1 CP) et de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b de la Loi sur les étrangers et l'intégration [LEI]), l'a condamné à une peine privative de liberté de 15 mois, sous déduction de 151 jours de détention avant jugement, a ordonné son expulsion de Suisse pour une durée de cinq ans, avec signalement dans le système d'information Schengen (SIS), a ordonné son maintien en détention pour des motifs de sûreté, a statué sur les inventaires et condamné A______ aux frais de la procédure.

A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant à ce qu'il soit renoncé au prononcé de son expulsion.

b. Selon l'acte d'accusation du 10 janvier 2023, il était reproché ce qui suit à A______ :

Il a, le 26 juillet 2022, à Genève, vers 05h00, suivi G______ dans son appartement sis chemin 1______ no. ______, à H______, les deux hommes ayant préalablement discuté ensemble dans le bus entre les arrêts de de I______ et J______, appartement dans lequel il a dérobé, avec conscience et volonté, de nombreux biens, soit notamment un ordinateur portable, une console [de marque] K______, des sacs à main de marque, des pantalons, des bijoux et des parfums, appartenant à G______ et à F______ pour s'enrichir indûment de leur valeur, avant d'asséner des coups à G______ qui est intervenu après avoir constaté que A______ quittait son appartement avec des biens qui lui appartenaient. Dans le but de conserver son butin et d'assurer sa fuite, A______ a ainsi causé différentes blessures à G______ (soit essentiellement des hématomes et des dermabrasions).

Il a, le 29 août 2022, entre 23h30 et 23h55, à Genève, sur la terrasse de l'établissement public "L______", sis rue 2______ no. ______, intentionnellement dérobé la sacoche de E______, laquelle contenait notamment des cartes bancaires, des clés et la somme de CHF 100.-, dans le but de se l'approprier illégalement et de s'enrichir indûment à due concurrence de sa valeur ainsi que de son contenu.

Il a, le 20 septembre 2022, vers 00h50, à Genève, sur le quai 3______, intentionnellement tenté de dérober une montre de marque M______ à N______, personne à mobilité réduite, afin de s'enrichir indûment de sa valeur, sans y parvenir.

Il a, entre le 6 août 2022, lendemain de sa dernière condamnation, et le 20 septembre 2022, date de son interpellation, persisté à séjourner sur le territoire helvétique, notamment à Genève, alors qu'il était démuni des autorisations nécessaires, d'un document d'identité et qu'il ne disposait pas des moyens financiers suffisants permettant d'assurer sa subsistance durant son séjour ainsi que ses frais de retour, étant encore précisé qu'il fait l'objet d'une interdiction d'entrée en Suisse, valable du 8 novembre 2014 au 8 novembre 2034, laquelle lui a été dûment notifiée.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. Les faits visés dans l'acte d'accusation, ayant fondé la condamnation, ne sont pas contestés, de sorte qu'il sera renvoyé au jugement entrepris (art. 82 al. 4 CPP).

b.a. À teneur du dossier, A______ est né le ______ 1989 en Palestine. Il indique être arrivé en Suisse en 2002, ses antécédents de police débutant en 2005 pour des infractions à la législation sur les étrangers. Il n'a pas de travail et indique n'avoir jamais eu ni documents d'identité ni statut administratif en Suisse. Il est sans profession et indique subvenir à ses besoins grâce à l'aide de ses amis.

Il est célibataire, mais dit être fiancé à B______ avec laquelle il a un enfant qu'il n'a pas reconnu. À l'instruction, il a déclaré n'avoir plus de contact avec son fils, que sa mère ne le laisse pas voir (C-4, C-23 verso), puis à l'audience de jugement s'occuper régulièrement de son enfant (PV d'audience de jugement, p. 2). Il a alors précisé qu'après avoir effectué 11 mois de détention à O______, la sortie étant intervenue en février 2022, il avait rencontré quelques difficultés administratives et avait commencé à boire, la mère de son fils n'ayant alors pas voulu qu'il voie l'enfant en étant alcoolisé. B______ a déclaré par écrit le 16 février 2023 être fiancée au précité avec lequel elle a un enfant dont il s'occupe depuis sa naissance. Elle produit en annexe une copie du permis C de l'enfant P______, né le ______ 2013, de nationalité portugaise. B______ n'a pas été citée comme témoin ni devant le MP ni devant le TP. À sa sortie de prison, A______ et B______ souhaitent se marier, l'appelant désirant s'occuper de son fils et travailler.

A______ n'a pas souhaité que ses proches soient informés de sa mise en détention (C-4) et a sollicité une aide financière au début de celle-ci car il n'avait "personne qui peut [m']aider" (C-6).

b.b. Le dossier du MP contient notamment :

- une lettre de A______ du 17 novembre 2022 demandant du MP d'avoir accès à quelques numéros de ses proches, contenus dans son téléphone, pour pouvoir appeler "pour subvenir à [mes] besoins", ajoutant avoir un fils "que je n'ai pas eu de ces nouvelles et ça me fait male de ne pas savoire comme il va" (Y-46). En particulier, A______ a demandé à obtenir le numéro de téléphone d'une dénommée Q______, affirmant qu'il s'agissait de "ma copine" (Y-49) ;

- une demande de visite en prison formée le 2 décembre 2022 par B______, titulaire d'un permis C (Y-54), sans profession, se présentant elle-même comme la fiancée de A______ (Y-53).

c. Sur demande de la Cour, le greffe de la prison a communiqué le 18 avril 2023 la liste des visites reçues par A______ en détention, dont il ressort que B______ est venue le voir 18 fois entre le 8 décembre 2022 et le 17 avril 2023.

C. La juridiction d'appel a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite avec l'accord des parties.

a. Selon son mémoire d'appel, A______ persiste dans ses conclusions.

Sa fiancée avait toujours vécu en Suisse. Lui-même n'avait jamais eu l'opportunité de régulariser sa situation administrative, n'ayant pas eu d'aide pour ce faire. Il s'était occupé de son fils, qu'il adore, depuis sa naissance, ce dont le pédiatre, les enseignants ou son entourage pouvaient cas échéant témoigner. La centaine de photos qu'il avait montrées au premier juge en atteste également. Il ne l'a pas reconnu du seul fait de sa situation administrative irrégulière. L'absence de visite en prison s'expliquait par son propre refus que son fils soit informé de sa détention. Il l'appelait cependant chaque jour depuis qu'il avait changé d'établissement. Son Conseil, qui l'a confirmé dans ses écritures, était désormais mandaté pour entreprendre les démarches nécessaires à sa régularisation et avait rencontré sa fiancée à plusieurs reprises.

Il regrettait amèrement les faits, commis dans un contexte de profonde dépression accompagnée d'abus d'alcool et de drogue.

Il convenait de faire application du cas de rigueur (art. 66a al. 2 CP). Le premier juge avait mis en doute sa paternité alors qu'il avait vu les nombreuses photos de l'enfant et de son père, depuis la naissance du premier, et alors que la mère de l'enfant avait confirmé cet état de fait. Le premier juge avait également ignoré qu'il vivait en Suisse depuis 2002, y compris en concubinage avec la mère de l'enfant pendant de nombreuses années. L'absence de relations personnelles en détention avait été motivée par un souci de protéger l'enfant et des contact téléphoniques avaient désormais lieu. Il incarnait une figure paternelle pour l'enfant et l'empêcher d'être présent auprès de lui porterait atteinte aux droits fondamentaux de l'enfant et aux siens.

Etant ressortissant palestinien, il y avait une impossibilité objective de le renvoyer dans son pays d'origine.

En sus, il n'était pas un délinquant dangereux, comme l'attestaient les courtes peines inscrites dans son casier judiciaire, et les faits commis devaient être replacés dans leur contexte. Le risque de récidive était inexistant au vu des démarches qui allaient être entreprises en vue de son mariage qui permettrait sa régularisation administrative.

Dans le respect du principe de proportionnalité et au vu des motifs évoqués, il convenait de renoncer à prononcer son expulsion.

b. Le MP conclut au rejet de l'appel.

Le cas de rigueur permettant de renoncer au prononcé de l'expulsion devait être apprécié selon divers critères, notamment la nature et la gravité de l'infraction, la dangerosité du prévenu (pronostic sur la récidive) et la solidité des liens familiaux, sociaux et culturels du prévenu. En l'espèce, A______ se trouvait en séjour illégal en Suisse depuis son arrivée, de multiples condamnations figuraient à son casier judiciaire et il n'avait pas démontré l'existence de liens sociaux spécialement intenses avec la Suisse. En particulier, il n'avait pas démontré qu'il entretenait une relation assimilée à l'union conjugale avec B______ avec laquelle il n'était plus en couple avant sa détention. Il n'avait pas plus démontré qu'il entretenait des relations régulières avec son fils ni qu'il était en mesure de lui apporter un soutien financier, moral ou encore affectif. En revanche, l'intérêt public présidant à son expulsion était considérable, au vu notamment de sa précarité financière qui l'avait conduit, selon ses propres déclarations, à commettre des infractions. Au surplus, la peine menace du brigandage rendait obligatoire l'inscription de l'expulsion dans le système SIS.

c. Le TP se réfère intégralement à son jugement.

D. Selon l'extrait de son casier judiciaire, A______ a été condamné à onze reprises entre 2014 et 2022, soit notamment :

- le 29 août 2016, par le MP, à une peine privative de liberté de trois mois, pour séjour illégal et menaces ;

- le 1er septembre 2019, par le MP, à une peine privative de liberté de 150 jours ainsi qu'à une peine pécuniaire de 30 jours-amende à CHF 10.- l'unité, pour vol, dommages à la propriété, violation de domicile, injure, séjour illégal et opposition aux actes de l'autorité ;

- le 29 avril 2021, par le TP, à une peine privative de liberté de 60 jours ainsi qu'à une amende de CHF 100.- pour vol et consommation de stupéfiants ;

- le 5 août 2022, par le MP, à une peine pécuniaire de 50 jours-amende à CHF 30.- l'unité, pour empêchement d'accomplir un acte officiel et pour séjour illégal ;

- le 28 août 2014, le 4 décembre 2014, le 9 septembre 2017, le 23 mars 2018 et le 28 mai 2018, par le MP, pour séjour illégal.

E. Me D______, défenseure d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, 4h30 d'activité de cheffe d'étude.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. 2.1. Conformément à l'art. 66a al. 1 CP, le juge expulse un étranger du territoire suisse pour une durée de cinq à quinze ans s'il est reconnu coupable de l'une des infractions énumérées aux let. a à o, également sous la forme de tentative (ATF 144 IV 168 consid. 1.4.1), notamment en cas de condamnation pour brigandage (let. c).

Selon l'al. 2 de cette même disposition, le juge peut exceptionnellement renoncer à une expulsion lorsque celle-ci mettrait l'étranger dans une situation personnelle grave et que les intérêts publics à l'expulsion ne l'emportent pas sur l'intérêt privé de l'étranger à demeurer en Suisse. À cet égard, il tiendra compte de la situation particulière de l'étranger qui est né ou qui a grandi en Suisse.

La loi ne définit pas ce qu'il faut entendre par une « situation personnelle grave » (première condition cumulative) ni n'indique les critères à prendre en compte dans la pesée des intérêts (seconde condition cumulative). Il convient de s'inspirer des critères énoncés à l'art. 31 de l'ordonnance du 24 octobre 2007 relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative (OASA). L'art. 31 al. 1 OASA prévoit qu'une autorisation de séjour peut être octroyée dans les cas individuels d'extrême gravité. L'autorité doit tenir compte notamment de l'intégration du requérant selon les critères définis à l'art. 58a al. 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration (LEI), de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants, de la situation financière, de la durée de la présence en Suisse, de l'état de santé ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance. Comme la liste de l'art. 31 al. 1 OASA n'est pas exhaustive et que l'expulsion relève du droit pénal, le juge devra également, dans l'examen du cas de rigueur, tenir compte des perspectives de réinsertion sociale du condamné (ATF 144 IV 332 consid. 3.3.1 et 3.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_379/2021 du 30 juin 2021 consid. 1.1).

La clause de rigueur doit être appliquée de manière restrictive (ATF 146 IV 105 ; arrêt du tribunal fédéral 6B_177/2021 consid 3.1.1). Le juge de l'expulsion doit tenir compte de l'intégration de l'intéressé et du respect qu'il a manifesté de l'ordre juridique suisse, ainsi que sa situation financière (arrêt du Tribunal fédéral 6B_422/2021 consid. 1.4.5).

En règle générale, il convient d'admettre l'existence d'un cas de rigueur au sens de l'art. 66a al. 2 CP lorsque l'expulsion constituerait, pour l'intéressé, une ingérence d'une certaine importance dans son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par la Constitution fédérale (art. 13 Cst.) et par le droit international, en particulier l'art. 8 CEDH (arrêt du Tribunal fédéral 6B_255/2020 du 6 mai 2020 consid. 1.2.1 et références citées). Pour se prévaloir d'un droit au respect de sa vie privée, l'étranger doit établir l'existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d'une intégration ordinaire. Une pesée des intérêts en présence, en considérant la durée du séjour en Suisse comme un élément parmi d'autres et en n'accordant qu'un faible poids aux années passées en Suisse dans l'illégalité, en prison ou au bénéfice d'une simple tolérance, doit être préférée à une approche schématique qui consisterait à présumer, à partir d'une certaine durée de séjour en Suisse, que l'étranger y est enraciné et dispose de ce fait d'un droit de présence dans notre pays (ATF 134 II 10 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_153/2020 du 28 avril 2020 consid. 1.3.2). La reconnaissance d'un cas de rigueur ne se résume pas non plus à la simple constatation des potentielles conditions de vie dans le pays d'origine ou du moins la comparaison entre les conditions de vie en Suisse et dans le pays d'origine, mais aussi à la prise en considération des éléments de la culpabilité ou de l'acte (M. BUSSLINGER / P. UEBERSAX, Härtefallklausel und migrationsrechtliche Auswirkungen der Landesverweisung, cahier spécial, Plaidoyer 5/2016, p. 101 ; G. FIOLKA / L. VETTERLI, Die Landesverweisung in Art. 66a ff StGB als strafrechtliche Sanktion, cahier spécial, Plaidoyer 5/2016, p. 87 ; AARP/185/2017 du 2 juin 2017 consid. 2.2).

L'expulsion d'un étranger qui séjourne depuis longtemps en Suisse doit se faire avec une retenue particulière. Elle n'est toutefois pas exclue en cas d'infractions graves ou répétées, même s'agissant d'un étranger né en Suisse et qui y a passé l'entier de sa vie, étant précisé qu'en droit des étrangers, une révocation de l'autorisation de séjour est prévue par l'art. 62 al. 1 let. b LEI en cas de "peine privative de liberté de longue durée", c'est-à-dire toute peine privative de liberté supérieure à un an (cf. ATF
139 I 145 consid. 2.1 p. 147), résultant d'un seul jugement pénal, qu'elle ait été prononcée avec sursis ou sans sursis (cf. ATF 139 I 16 consid. 2.1 p. 18). On tiendra alors particulièrement compte de l'intensité des liens de l'étranger avec la Suisse et des difficultés de réintégration dans son pays d'origine (ATF 144 IV 332 consid. 3.3.3 et les arrêts cités). Un séjour légal de dix années suppose en principe une bonne intégration de l'étranger (ATF 144 I 266 consid. 3.9 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1431/2019 du 12 février 2020 consid. 1.3.1).

La deuxième phrase de l'art. 66a al. 2 CP impose expressément de prendre en considération la situation particulière de l'étranger qui est né ou qui a grandi en Suisse. L'examen de la clause de rigueur doit être effectué dans chaque cas sur la base des critères d'intégration habituels. La situation particulière des étrangers nés ou ayant grandi en Suisse est prise en compte en ce sens qu'une durée de séjour plus longue, associée à une bonne intégration – par exemple en raison d'un parcours scolaire effectué en Suisse – doit généralement être considérée comme une indication importante de l'existence d'intérêts privés suffisamment forts et donc tendre à retenir une situation personnelle grave (ATF 146 IV 105 consid. 3.4.4 p. 109 ; 144 IV 332 consid. 3.3.2 et 3.3.3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_153/2020 du 28 avril 2020 consid. 1.4.1).

Un étranger peut se prévaloir de l'art. 8 par. 1 CEDH (et de l'art. 13 Cst.), qui garantit notamment le droit au respect de la vie familiale, pour s'opposer à l'éventuelle séparation de sa famille, pour autant qu'il entretienne une relation étroite et effective avec une personne de sa famille ayant le droit de résider durablement en Suisse. Les relations familiales visées par l'art. 8 par. 1 CEDH sont avant tout celles qui concernent la famille nucléaire, soit celles qui existent entre époux ainsi qu'entre parents et enfants mineurs vivant en ménage commun (arrêts du Tribunal fédéral 6B_627/2021 du 27 août 2021 consid 4.2.2; 6B_379/2021 du 30 juin 2021 consid. 1.2.).

2.2. En l'espèce, l'appelant affirme être arrivé en Suisse en 2002, ce que ses antécédents de police semblent confirmer. Si sa date de naissance est correcte, il avait donc alors 16 ans. Il y réside depuis lors, sans avoir jamais bénéficié d'une quelconque autorisation de séjour. Il n'allègue pas avoir été scolarisé et indique n'avoir pas travaillé. Il ne peut dès lors tirer aucun argument de la durée de son séjour, passé dans l'illégalité. Il n'a démontré aucun lien social et professionnel spécialement intense avec la Suisse, notablement supérieur à ceux qui résulteraient d'une intégration ordinaire.

Il indique certes être le père biologique d'un enfant âgé désormais de 10 ans, ce que confirme la mère de celui-ci dans une attestation écrite. L'appelant n'a cependant pas reconnu l'enfant et n'indique pas participer financièrement à son entretien, ce qu'il serait bien en peine de faire puisqu'il indique vivre de l'aide d'amis. Quant à la vie commune entre les parents et l'enfant, il apparaît qu'elle n'existe en tous les cas plus depuis début 2021 puisque l'appelant a dû purger une peine de 11 mois de détention, au cours de laquelle il n'est pas allégué que les intéressés ont continué à avoir des relations suivies, puis, après quelques mois, est retourné en prison dans le cadre de la présente procédure. Il a souhaité ne pas recevoir de visite de l'enfant depuis sa dernière mise en détention, certes pour protéger l'enfant mais en premier lieu comme conséquence de son propre comportement délictueux. Il n'est ainsi pas établi que l'appelant a pu maintenir une relation étroite et effective avec l'enfant.

Si l'expulsion de l'appelant aura à l'évidence des conséquences sur ses relations avec l'enfant P______, celles-ci pourront cependant perdurer sous forme de contacts téléphoniques, tels qu'ils existent apparemment actuellement, étant rappelé en tout état que la filiation biologique alléguée n'est ni établie ni confirmée par une filiation juridique. L'appelant ne saurait dès lors invoquer une ingérence d'une certaine importance dans son droit au respect de sa vie privée et familiale.

L'expulsion ne placerait ainsi pas l'appelant dans une situation personnelle grave au sens de la jurisrudence.

Au surplus et par surabondance, il y a un intérêt public évident à son éloignement, au vu des actes faisant l'objet de la présente procédure, de ses nombreux antécédents démontrant une absence de respect pour l'ordre juridique suisse, même si plusieurs des condamnations ne concernent pas des délits ou des crimes particulièrement graves. Sa situation administrative, professionnelle et donc financière laisse en outre apparaître, en l'état, des perspectives d'insertion sociale très faibles, la relation avec la mère de l'enfant et avec celui-ci n'ayant pas empêché jusqu'ici l'appelant de réitérer ses comportements contraires au droit.

S'agissant de l'exécutabilité de l'expulsion, l'appelant indiquant être de nationalité palestinienne, il sera rappelé que selon l'art. 18 al. 1 du règlement genevois du 19 mars 2014 sur l'exécution des peines et mesures (REPM), c'est l'Office cantonal de la population et des migrations (OCPM) qui est compétent pour prendre les dispositions de mise en œuvre de l'expulsion prononcée par le juge pénal (art. 66a à 66b CP), ainsi que pour se prononcer sur le report de l'exécution de cette mesure (art. 66d CP).

En fin de compte, les intérêts de l'appelant à rester en Suisse ne l'emportent en tout état ainsi pas sur les intérêts publics à l'expulser.

2.3. Le signalement de l'expulsion dans le système SIS, non discuté en appel au-delà de la conclusion tendant au non prononcé de l'expulsion, se justifie au regard des dispositions applicables dont l'application par le premier juge n'est pas critiquable (art. 20 Ordonnance N-SIS).

3. L'appelant étant désormais en exécution anticipée de peine, il n'y a pas lieu de reconduire la mesure de maintien en détention pour des motifs de sûreté (ATF 139 IV 277 consid. 2.2 à 2.3).

4. L'appelant, qui succombe, supportera les frais de la procédure (art. 428 CPP).

5. Considéré globalement, l'état de frais produit par Me D______, défenseure d'office de l'appelant satisfait les exigences légales et jurisprudentielles régissant l'assistance judiciaire gratuite en matière pénale.

La rémunération de Me D______ sera partant arrêtée à CHF 1'155.60 correspondant à 4h30 heures d'activité au tarif de CHF 200.-/heure plus la majoration forfaitaire de 20% et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% en CHF 75.60.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement rendu le 17 février 2023 par le Tribunal de police dans la procédure P/19900/2022.

Le rejette.

Ordonne en tant que de besoin le maintien de A______ en détention.

Condamne A______ aux frais de la procédure d'appel, en CHF 1'195.-, qui comprennent un émolument de CHF 1'000.-.

Arrête à CHF 1'155.60, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me D______, défenseure d'office de A______.

Confirme le jugement entrepris, dont le dispositif est le suivant :

"Déclare A______ coupable de brigandage (art. 140 ch. 1 CP), de vol (art. 139 ch. 1 CP), de tentative de vol (art. 139 ch. 1 cum 22 al. 1 CP) et de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 15 mois, sous déduction de 151 jours de détention avant jugement (art. 40 CP).

Ordonne l'expulsion de Suisse de A______ pour une durée de 5 ans (art. 66a al. 1 let. c CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

Ordonne le signalement de l'expulsion dans le système d'information Schengen (SIS) (art. 20 de l'ordonnance N-SIS; RS 362.0).

Ordonne, par prononcé séparé, le maintien en détention pour des motifs de sûreté de A______ (art. 231 al. 1 CPP).

Ordonne la restitution à G______ des habits saisis figurant sous chiffres 1 et 2 de l'inventaire no 4______ du 28 juillet 2022 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Ordonne la restitution à A______ du téléphone portable saisi figurant sous chiffre 1 de l'inventaire no 5______ du 20 septembre 2022 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Condamne A______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 2'413.00, y compris un émolument de jugement de CHF 300.00 (art. 426 al. 1 CPP).

Fixe à CHF 5'320.40 l'indemnité de procédure due à Me D______, défenseur d'office de A______ (art. 135 CPP).

[...]

Condamne A______ à payer à l'Etat de Genève l'émolument complémentaire fixé à CHF 600.-."

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police, au Secrétariat d'état aux migrations et à l'Office cantonal de la population et des migrations.

 

Le greffier :

Lylia BERTSCHY

 

La présidente :

Catherine GAVIN

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

3'013.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

120.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

00.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'000.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'195.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

4'208.00