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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/20552/2019

AARP/213/2023 du 23.06.2023 sur JTDP/1393/2022 ( PENAL ) , REJETE

Descripteurs : VITESSE MAXIMALE;EXCÈS DE VITESSE
Normes : LCR.90.al2
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/20552/2019 AARP/213/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 15 juin 2023

 

Entre

A______, domicilié ______ [France], comparant par Me Jacques ROULET, avocat, Roulet Avocats, Rond-Point de Plainpalais 2, 1205 Genève,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/1393/2022 rendu le 15 novembre 2022 par le Tribunal de police,

 

et

CAISSE DE COMPENSATION B______, domiciliée ______ [GE],

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 15 novembre 2022, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnu coupable de détournement de cotisations sociales (art. 87 al. 4 de la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants [LAVS]), de détournement de cotisations sociales (art. 76 al. 3 de la loi sur la prévoyance professionnelle [LPP]) et de violation grave des règles de la circulation routière (art. 90 al. 2 de la loi fédérale sur la circulation routière [LCR]), l'a acquitté d'omission d'affiliation à une assurance sociale (art. 87 al. 3 LAVS) et de détournement de cotisations sociales s'agissant de trois des montants reprochés et l'a condamné à une peine pécuniaire de 180 jours-amende à CHF 100.- l'unité, avec sursis (délai d'épreuve : trois ans).

Le TP a également renoncé à révoquer le sursis octroyé le 3 janvier 2019 par le Ministère public du canton du Valais, a mis à la charge de A______ 80% des frais de la procédure, un émolument complémentaire de jugement de CHF 600.- en sus, et l'a indemnisé pour les dépenses occasionnées par la procédure à hauteur de 20%.

A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant à son acquittement du chef de violation grave des règles de la circulation routière, au prononcé d'une peine pécuniaire n'excédant pas 100 jours-amende, ainsi qu'à l'octroi d'une indemnité, pour ses frais de défense en première instance et en appel.

b.a. Selon l'acte d'accusation du 10 février 2022, il est encore reproché ce qui suit à A______ :

À Thônex, sur la route de Jussy à la hauteur du numéro 66, le 25 mai 2020 à 10h00, il a circulé au guidon du motocycle à la vitesse de 66 km/h, après déduction d'une marge de sécurité de 5 km/h, alors que la vitesse maximale autorisée et signalée sur ce tronçon était de 30 km/h, soit un dépassement de 36 km/h à l'intérieur d'une localité.

b.b. Par le même acte d'accusation, il est également reproché à A______, faits non contestés en appel, d'avoir, du 1er janvier 2018 au 31 août 2019, en sa qualité d'associé gérant et directeur de A______ SARL aujourd'hui radiée, déduit des cotisations sociales des salaires des employés, sans les reverser à la CAISSE DE COMPENSATION B______ à laquelle il était affilié, pour un total de CHF 22'982.88 au titre de cotisations AVS-AI-APG, CHF 5'024.35 au titre de cotisations d'assurance-chômage, CHF 205.60 au titre de cotisations à l'assurance maternité cantonale et CHF 21'072.85 au titre de cotisations de prévoyance professionnelle.

B. Les faits pertinents au stade de l'appel sont les suivants, étant renvoyé pour le surplus au jugement entrepris (art. 82 al. 4 du code de procédure pénale [CPP]) :

a. Le 20 mai 2020, à 10h00, A______ a circulé au volant de son motocycle sur la route de Jussy à la hauteur du n°116, soit entre le chemin de Chantebise et le giratoire de la route de Mon-Idée, en direction de la rue Peillonnex, à 66 km/h, marge de sécurité de 5 km/h déduite, alors que la vitesse autorisée était limitée à 30 km/h en raison de travaux.

b. À cet endroit, la route de Jussy comporte une voie de circulation par sens de marche, ainsi qu'une voie de bus et est traversée de part et d'autre par un passage piéton. Le tronçon en question est rectiligne. Le jour des faits, la visibilité était bonne et la route sèche.

c. Le rapport de renseignements de la police du 23 juin 2020 relève que l'excès de vitesse a été constaté au moyen d'un radar fixe, dont les images montrent notamment la présence d'une barrière de chantier, située sur la voie opposée au sens de circulation de A______.

L'opérateur 1______ en charge de la mise en place et de la surveillance du radar le 20 mai 2020 a été contacté par la police et a fourni les images de la route de Jussy qu'il avait prises ce jour-là. La photographie P1, prise juste après le giratoire de l'intersection avec la route Mon-Idée, montre la présence d'un panneau provisoire de limitation à 30km/h sur la droite de la route, ainsi que des barrières de chantier le long de la voie opposée. La photographie P2 montre le lieu de l'infraction depuis l'autre sens de circulation, un panneau de limitation à 30 km/h étant également situé le long des barrières.

d. Lors de ses auditions successives, A______ a admis avoir circulé à 66 km/h sur le tronçon indiqué, contestant avoir su que la vitesse était limitée à 30km/h. Il empruntait régulièrement ce tronçon et la vitesse maximale autorisée avant les travaux était de 60 km/h. Le jour des faits, en arrivant depuis la route de Mon-Idée, il avait tourné à droite sur la route de Jussy et n'avait vu aucune signalisation à cet endroit. Il n'y avait pas de travaux sur sa voie de circulation. Après avoir été contacté par la police pour être entendu, il s'était rendu sur les lieux de l'infraction et avait constaté qu'un panneau de limitation à 30 km/h était effectivement placé sur la route de Mon-Idée peu avant le carrefour avec la route de Jussy. Il avait pris des photos, mais lors sa prise de vue, un bus était passé, dissimulant le panneau. Il n'était ainsi pas impossible qu'il ne l'avait pas vu pour ce motif le jour des faits. De plus, il avait remarqué que dans le sens inverse de circulation, la limitation de vitesse à 30 km/h était levée bien avant le n° 116 de la route de Jussy. Il regrettait néanmoins d'avoir commis cet excès de vitesse.

A______ a produit les photographies qu'il a prises le 4 juin 2020, puis à différentes dates en 2021, dont il ressort que la configuration et les limitations de vitesse ont été modifiées à plusieurs reprises sur ce tronçon en raison du chantier.

C. a. La juridiction d'appel a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite avec l'accord des parties.

b. Selon son mémoire d'appel, A______ persiste dans ses conclusions. À titre de réquisition de preuve, il sollicitait la production par la police de la preuve de la date à laquelle les images P1 et P2 ont été prises.

Contrairement à ce qu'avait retenu le premier juge, il n'était pas établi que les photographies fournies par la police avaient été prises le jour des faits. L'expression "le jour en question" dans le rapport de police ne permettant pas de comprendre s'il s'agissait du 20 mai 2020 ou plutôt du jour où l'opérateur avait été contacté par la police. Ces photographies présentaient pourtant des différences en comparaison de celles qu'il avait prises lui-même le 4 juin 2020. En particulier, l'image annexée au rapport de police montrait, juste après le carrefour où il s'était engagé sur la route de Jussy (P1), un panneau de limitation à 30 km/h, qui ne figurait pas sur sa photographie n° 7, montrant le carrefour et la présence d'un arrêt de bus absent sur la photographie de la police. Les travaux menés à cet endroit avaient passablement modifié la configuration du tronçon, qui pouvait changer d'un jour à l'autre, l'arrêt de bus notamment ayant été déplacé à plusieurs reprises.

Sur la base de ces éléments, il ne pouvait pas être tenu pour établi qu'un panneau de limitation de vitesse était présent à l'endroit où il s'était engagé sur la route de Jussy, ce qu'il contestait fermement depuis le début de la procédure. En tous les cas, au vu du doute subsistant à ce sujet, son acquittement devait être prononcé.

c. Le MP conclut au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement entrepris.

Les photographies fournies par l'opérateur avaient manifestement été prises le jour de l'excès de vitesse. Il était en revanche admis par l'appelant qu'il avait photographié les lieux après le 4 juin 2020, soit déjà plus de deux semaines après les faits. Il était ainsi vraisemblable que la configuration des lieux eut évolué entre temps et notamment l'emplacement de l'arrêt de bus et des panneaux de signalisation.

d. Le TP se réfère intégralement au jugement rendu.

D. A______, ressortissant suisse, est né le ______ 1973 à Genève. Il est divorcé et père de deux enfants pour lesquels il verse une contribution d'entretien mensuelle de CHF 1'940.-. Il est électricien et travaille à son compte pour la société A______ SÀRL. Il réalise un revenu net de CHF 4'000.-. Son loyer s'élève CHF 1'426.- et sa prime d'assurance maladie à CHF 460.-.

Selon l'extrait du casier judiciaire suisse, il a été condamné le 15 janvier 2019 par le Ministère public du canton du Valais, à une peine pécuniaire de 45 jours-amende à CHF 250.-, avec sursis et délai d'épreuve de deux ans, ainsi qu'à une amende de CHF 3'250.-, pour circulation sans assurance-responsabilité civile (art. 96 al. 2 ch. 1 LCR) et non restitution de permis de conduire et/ou de plaques de contrôle (art. 97 al. 1 let. b LCR).

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. 2.1. Aux termes de l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure de recours se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. L'art. 389 al. 3 CPP règle les preuves complémentaires. Ainsi, la juridiction de recours administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours. Conformément à l'art. 139 al. 2 CPP, il n'y a pas lieu d'administrer des preuves sur des faits non pertinents, notoires, connus de l'autorité ou déjà suffisamment prouvés. Cette disposition codifie, pour la procédure pénale, la règle jurisprudentielle déduite de l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.) en matière d'appréciation anticipée des preuves (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1173/2016 du 7 août 2017 consid. 2.1 ; 6B_71/2016 du 5 avril 2017 consid. 2.1.3). Le magistrat peut ainsi refuser des preuves nouvelles, lorsqu'une administration anticipée de ces preuves démontre qu'elles ne seront pas de nature à modifier le résultat de celles déjà administrées (ATF 136 I 229 consid. 5.3). Ce refus d'instruire ne viole le droit d'être entendu des parties et l'art. 389 al. 3 CPP que si l'appréciation anticipée effectuée est entachée d'arbitraire (ATF 141 I 60 consid. 3.3).

2.2. La réquisition formulée par l'appelant, tendant à la production de preuve de la date à laquelle les images de la route de Jussy ont été prises par la police, sera rejetée, dans le mesure où elle ne s'avère pas nécessaire, au regard du rapport de police versé à la procédure, dont il n'y a pas lieu de s'écarter, pour les motifs qui seront exposés ci-après.

3. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 Cst. et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large.

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3 ; 138 V 74 consid. 7).

4. 4.1.1. L'art. 27 al. 1 LCR impose aux usagers de la route de se conformer aux signes et aux marques. Ceux-ci ne sont obligatoires que s'ils sont clairs et que leur portée est aisément reconnaissable (ATF 127 IV 229 consid. 2c.aa ; 106 IV 138 consid. 3).

À teneur de l'art. 16 al. 2 de l'Ordonnance sur la signalisation routière (OSR), le signal "vitesse maximale" doit être observé jusqu'au signal correspondant indiquant la fin de la prescription, mais au plus jusqu'à la fin de la prochaine intersection.

4.1.2. L'art. 90 LCR constitue la base légale pour réprimer la violation des règles de la circulation routière (ATF 100 IV 71 consid. 1).

L'art. 90 al. 2 LCR sanctionne, au titre de délit, celui qui, par une violation grave d'une règle de la circulation, crée un sérieux danger pour la sécurité d'autrui ou en prend le risque.

Pour déterminer si une violation d'une règle de la circulation doit être qualifiée de grave au sens de l'art. 90 al. 2 LCR, il faut procéder à une appréciation aussi bien objective que subjective. D'un point de vue objectif, la violation grave d'une règle de circulation au sens de l'art. 90 al. 2 LCR suppose que l'auteur ait mis sérieusement en danger la sécurité du trafic. Il y a création d'un danger sérieux pour la sécurité d'autrui non seulement en cas de mise en danger concrète, mais déjà en cas de mise en danger abstraite accrue (ATF 143 IV 508 consid. 1.3 ; 142 IV 93 consid. 3.1 ; 131 IV 133 consid. 3.2). Subjectivement, l'art. 90 al. 2 LCR exige un comportement sans scrupules ou gravement contraire aux règles de la circulation, c'est-à-dire une faute grave et, en cas d'acte commis par négligence, à tout le moins une négligence grossière. Celle-ci doit être admise lorsque le conducteur est conscient du caractère généralement dangereux de son comportement contraire aux règles de la circulation. Mais une négligence grossière peut également exister lorsque, contrairement à ses devoirs, l'auteur ne prend absolument pas en compte le fait qu'il met en danger les autres usagers, en d'autres termes s'il se rend coupable d'une négligence inconsciente. Dans de tels cas, une négligence grossière ne peut être admise que si l'absence de prise de conscience du danger créé pour autrui repose elle-même sur une absence de scrupules (ATF 131 IV 133 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_345/2019 du 18 avril 2019 consid. 2.1). Plus la violation de la règle de la circulation est objectivement grave, plus on admettra l'existence d'une absence de scrupules, sauf indice particulier permettant de retenir le contraire (ATF 142 IV 93 consid. 3.1).

4.1.3. La vitesse doit toujours être adaptée aux circonstances, notamment aux particularités du véhicule et du chargement, ainsi qu'aux conditions de la route, de la circulation et de la visibilité. Dans le domaine des excès de vitesse, la jurisprudence a été amenée à fixer des règles précises afin d'assurer l'égalité de traitement. Ainsi, le cas est objectivement grave au sens de l'art. 90 al. 2 LCR, sans égard aux circonstances concrètes, en présence d'un dépassement de la vitesse autorisée de
25 km/h ou plus à l'intérieur des localités, de 30 km/h ou plus hors des localités et sur les semi-autoroutes dont les chaussées, dans les deux directions, ne sont pas séparées et de 35 km/h ou plus sur les autoroutes (ATF 143 IV 508 consid. 1.3).

4.2.1. En l'espèce, il est établi, et au demeurant non contesté par l'appelant, qu'il a roulé à une vitesse de 66 km/h sur la route de Jussy, alors que la vitesse y était temporairement limitée à 30 km/h en raison de travaux.

L'appelant ne saurait être suivi lorsqu'il indique qu'il n'avait pu voir aucun panneau de signalisation sur son trajet avant son passage devant le radar.

Tout d'abord, un panneau était présent pour annoncer le début de la zone 30 km/h à l'approche du giratoire lorsqu'il arrivait de la route de Mon-Idée. Au vu des images qu'il a lui-même produites, d'importants travaux étaient en cours. Il était reconnaissable que la circulation en était perturbée et que la vitesse maximale devait probablement être adaptée. Dans ces conditions, l'éventuelle présence d'un bus TPG à l'instant même de son passage, ce qui n'est nullement étayé, n'était pas de nature à remettre en cause la signalisation de la limitation de vitesse sur le bord de la route.

En tout état, il ressort des images fournies par l'opérateur du radar qu'il y avait bien, le jour des faits, un autre panneau de limitation à 30 km/h, après le giratoire et le passage piéton, à l'endroit où l'appelant s'est engagé sur la route de Jussy. La référence au "jour en question" contenue dans le rapport de police vise nécessairement le 20 mai 2020, l'opérateur ne pouvant ne pas comprendre ce qui lui était demandé. Ces images montrent d'ailleurs la présence de travaux sur la voie opposée, alors qu'une même barrière de chantier est également visible sur la photographie tirée directement du radar, ce qui implique que les travaux avaient bien lieu au même endroit au moment des faits.

Par surabondance, le hasard fait qu'il y a d'autant moins de raison de douter de la présence d'une signalisation de la limitation de vitesse à l'endroit précité que, par arrêt du 10 mars 2023, la CPAR a eu l'occasion de statuer sur une affaire identique, le radar qui a flashé l'appelant ayant enregistré une autre infraction quelques minutes après celle qui lui est reprochée. Dans ce cadre il avait été confirmé par l'Office cantonal des transports (OCT) que le tronçon compris entre le chemin de Chantebise et le giratoire de la route de Mon-Idée, comprenant le n° 116 de la route de Jussy, était limité à 30 km/h dans les deux sens. La signalisation du chantier avait été mise en place le 30 mars 2020, avec contrôle hebdomadaire de chantier par l'OCT et vérification systématique de la signalisation par la police routière avant prises de mesures de vitesse. En cas de déficit de signalisation, l'OCT était contacté par la police routière pour y remédier, ce qui n'avait pas été le cas pour ce chantier (cf. AARP/89/2023 du 10 mars 2023 consid. B.f. et 3.4.1.).

La présence d'une signalisation visible limitant la vitesse à 30 km/h le jour des faits est ainsi établie.

4.2.2. En circulant à 66 km/h sur le tronçon en question limité à 30 km/h, commettant ainsi un excès de vitesse de 36 km/h, marge de sécurité déduite, l'appelant a gravement violé une règle de la circulation routière et engendré un danger abstrait accru. Il n'était pas, selon le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, à même d'éviter qu'un accident de la circulation ne se produise pour le cas où une personne ou un obstacle imprévu serait survenu d'un côté ou de l'autre de la route. Or, cette éventualité était hautement probable en présence de travaux, d'une part, et d'un trottoir ainsi que de nombreuses sorties de véhicules bordant des habitations, d'autre part. La première condition objective de la création d'un danger sérieux pour la sécurité du trafic est réalisée.

Sous l'angle subjectif, bien qu'inattentif à la signalisation, l'appelant reconnaît avoir vu, à tout le moins, des travaux sur la voie opposée, ainsi qu'avoir circulé à 66 km/h dans une configuration des lieux pouvant impliquer la présence, notamment, de piétons ou d'ouvriers, ce qui aurait dû l'inciter à redoubler de prudence (cf. arrêts du Tribunal fédéral 6B_672/2018 du 20 septembre 2018 consid. 1.2 et 6B_444/2016 du 3 avril 2017 consid. 1.3.2). Il sera dès lors retenu, il a agi par une négligence grossière, à la limite du dol éventuel, faisant fi des risques de danger créé pour autrui.

4.2.3. Par conséquent, le verdict de culpabilité du chef de violation grave des règles de la circulation routière, au sens de l'art. 90 al. 2 LCR, sera confirmé.

5. 5.1.1. La violation grave des règles de la circulation routière est sanctionnée par une peine privative de liberté de trois ans au plus ou par une peine pécuniaire (art. 90 al. 2 LCR).

5.1.2. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 141 IV 61 consid. 6.1.1 ; 136 IV 55 consid. 5 et 134 IV 17 consid. 2.1).

5.1.3. La peine pécuniaire est de trois jours-amende au moins et ne peut excéder
180 jours-amende. Le juge fixe leur nombre en fonction de la culpabilité de l'auteur (art. 34 al. 1 CP).

5.1.4. La Directive B.5 édictée par le Procureur général (barème LCR) préconise le prononcé d'une peine pécuniaire de 180 jours-amende pour les excès de vitesse de 33 à 34 km/h, lorsque la vitesse est limitée jusqu'à 30 km/h (hors et en localité). Dès 35 km/h de dépassement, le prévenu fait l'objet d'un acte d'accusation. Si de telles prescriptions n'ont qu'une valeur indicative, elles jouent néanmoins un rôle dans l'appréciation subjective de la faute.

Un autre facteur déterminant est la teneur de l'art. 90 al. 4 let. a LCR qui prescrit, dès 40 km/h de dépassement de la limite de 30 km/h, une peine privative de liberté d'au moins un an.

5.1.5. Le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire ou d'une peine privative de liberté de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits (art. 42 al. 1 CP).

Sur le plan subjectif, le juge doit poser, pour l'octroi du sursis – ou du sursis partiel –, un pronostic quant au comportement futur de l'auteur. En l'absence de pronostic défavorable, il doit prononcer le sursis. Celui-ci est ainsi la règle dont le juge ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable ou hautement incertain (ATF 135 IV 180 consid. 2.1 p. 185 s. ; ATF 134 IV 1 consid. 4.2.2 p. 5).

Si le juge suspend totalement ou partiellement l'exécution d'une peine, il impartit au condamné un délai d'épreuve de deux à cinq ans (art. 44 al. 1 CP).

5.2. En l'espèce, l'appelant ne conteste la peine ni dans sa nature, ni dans sa quotité, dans l'hypothèse d'une confirmation du verdict de culpabilité du chef de violation grave des règles de la circulation.

Ainsi que retenu par le TP au sujet de cette dernière infraction, la faute de l'appelant n'est pas négligeable. Il a agi au détriment de la sécurité d'autrui et sans considération pour les règles de la circulation applicables, commettant un excès de vitesse conséquent alors qu'il se trouvait en présence d'un chantier avec les risques d'accident que cela comporte, par pure convenance personnelle. Il a été inattentif à la signalisation en place, dont il persiste encore à nier l'existence.

Il a néanmoins fait preuve d'une relative prise de conscience, présentant des excuses pour ces faits, et d'une bonne collaboration. Le jour des faits, les conditions de circulation étaient fluides et la visibilité était bonne.

L'appelant a un antécédent récent en matière de LCR.

Il y a concours d'infraction. La violation grave des règles de la circulation routière est l'infraction la plus grave, dans la mesure où les autres infractions pour lesquelles il a été condamné sont passibles d'une peine pécuniaire de 180 jours-amende au plus (art. 87 al. 3 LAVS et art. 76 al. 3 LPP cum 333 al. 1 let. c CP). Ainsi, à considérer les autres chefs de condamnation non contestés par l'appelant et le genre de la peine fixée par le premier juge, lequel lui est acquis (art 391 al. 2 CPP), il y a lieu de retenir que le maximum de la peine pécuniaire doit être atteint.

À cet égard, on relèvera que, au vu de l'excès de vitesse de 36km/h dans une zone limitée à 30 km/h, seule la déduction de la marge de sécurité a permis à l'appelant d'échapper à la peine-plancher de l'art. 90 al. 3 et 4 LCR, de sorte que la peine infligée par le premier juge, certes conforme au droit, doit déjà être considérée comme clémente.

Ainsi, la peine pécuniaire de 180 jours-amende sera confirmée et le montant du jour-amende à CHF 100.- est proportionné à la situation financière de l'appelant.

L'octroi du sursis, également acquis à l'appelant (art. 391 al. 2 CPP) et la fixation du délai d'épreuve à trois ans, ne sont pas critiquables, au vu de la renonciation à révoquer le sursis antérieur octroyé le 3 janvier 2019 par le Ministère public du canton du Valais.

Le jugement entrepris sera ainsi également confirmé sur ce point.

6. L'appelant, qui succombe, supportera les frais de la procédure d'appel envers l'État comprenant un émolument de CHF 1'500.- (art. 428 CPP et art. 14 al. 1 let. e du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale).

Vu l'issue de la procédure, il n'y a pas lieu de revoir la répartition des frais de première instance.

7. Compte tenu de ce qui précède, les conclusions en indemnisation de l'appelant seront rejetées en ce qu'elles ont trait à la procédure d'appel (art. 429 al. 1 CPP a contrario).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/1393/2022 rendu le 15 novembre 2022 par le Tribunal de police dans la procédure P/20552/2019.

Le rejette.

Condamne A______ aux frais de la procédure d'appel, en CHF 1'635.-, qui comprennent un émolument de CHF 1'500.-.

Confirme le jugement entrepris, dont le dispositif est le suivant :

"Acquitte A______ d'omission d'affiliation à une assurance sociale (art. 87 al. 3 LAVS) et de détournement de cotisations sociales s'agissant des montants de CHF 5'583.35, CHF 3'401.27 et CHF 2'317.25 figurant sous chiffre 1.1 de l'acte d'accusation (art. 87 al. 4 LAVS.)

Déclare A______ coupable de détournement de cotisations sociales (art. 87 al. 4 LAVS), de détournement de cotisations LPP (art. 76 al. 3 LPP) et de violation grave de la loi sur la circulation routière (art. 90 al. 2 LCR).

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 180 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 100.-.

Met A______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Renonce à révoquer le sursis octroyé le 3 janvier 2019 par le Ministère public du canton du Valais (art. 46 al. 2 CP).

Déclare irrecevables les conclusions civiles de la CAISSE DE COMPENSATION B______.

Condamne A______ à 80% des frais de la procédure, qui s'élèvent au total à CHF 1'085.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.- et laisse le solde à la charge de l'Etat (art. 426 al. 1 CPP).

Condamne l'Etat de Genève à verser à A______ un montant de CHF 2'886.- TTC, à titre d'indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure (art. 429 al. 1 let. a CPP).

Rejette les conclusions en indemnisation de A______ pour le surplus (art. 429 CPP).

Fixe l'émolument complémentaire de jugement à CHF 600.-.

Condamne A______ à payer à l'Etat de Genève l'émolument complémentaire fixé à CHF 600.-. "

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police.

 

La greffière :

Aurélie MELIN ABDOU

 

La présidente :

Alessandra CAMBI FAVRE-BULLE

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

1'465.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

0.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

60.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

0.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'500.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'635.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

3'100.00