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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/347/2024

DCSO/251/2024 du 07.06.2024 ( PLAINT ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/347/2024-CS DCSO/251/24

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 6 JUIN 2024

 

Plainte 17 LP (A/347/2024-CS) formée en date du 31 janvier 2024 par A______.

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du 10 juin 2024
à :

-       A______

Chez B______

______

______.

- SCHWEIZERISCHE EIDGENOSSENSCHAFT

c/o Serafe AG

Summelenweg 91

8808 Pfäffikon.

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. Sur réquisition de SERAFE AG, représentant la CONFEDERATION SUISSE, l'Office cantonal des poursuites (ci-après l'Office) a notifié à A______,
c/o B______, rue 2______ no. ______, [code postal] C______ [GE], un commandement de payer la somme de 334 fr. 60 à titre de redevance pour la radio et la télévision du 1er janvier au 30 novembre 2019 (poursuite n° 1______).

Il ressort du procès-verbal de notification du commandement de payer, établi par l'agent notificateur et figurant au dos de cet acte, qu'il a été remis à la débitrice en personne, à son domicile, le 15 décembre 2023.

b. A______ a formé opposition au commandement de payer par l'apposition d'un texte de contestation au dos du commandement de payer, daté du 27 décembre 2023, qu'elle a envoyé à l'Office par pli recommandé posté le 28 décembre 2023 à D______ (Hongrie).

Le pli est entré sur le territoire helvétique et parvenu à la Poste suisse le 5 janvier 2024. Il a été distribué à l'Office le 8 janvier 2024.

c. Par décision datée du 8 janvier 2024, l'Office a rejeté l'opposition formée au commandement de payer au motif qu'elle était intervenue plus de dix jours après la notification du commandement de payer, délai échéant le 4 janvier 2024, compte tenu des féries de poursuite de Noël.

Cette décision mentionnait qu'elle pouvait faire l'objet d'une plainte, à adresser à la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites (ci-après la Chambre de surveillance), avec mention de l'adresse de cette autorité, dans les dix jours suivant sa notification.

Le pli recommandé contenant la décision a été retiré au guichet postal par A______ le 11 janvier 2024 selon le système de suivi postal Track & Trace.

B. a. Par acte expédié le 17 janvier 2024 à l'Office, A______ a formé une plainte contre cette décision, contestant avoir eu connaissance du commandement de payer le 15 décembre, mais uniquement le 19 décembre 2023. Elle avait envoyé son opposition à peine arrivée sur son lieu de vacances en Hongrie. Elle avait tenté de téléphoner à l'Office pour l'avertir de son opposition, mais un répondeur téléphonique annonçait la fermeture des bureaux. Elle n'avait pas trouvé d'adresse électronique. Elle contestait finalement devoir le montant en poursuite car il s'agissait d'une redevance perçue pour la mise à disposition d'une chambre de fonction dans un hôtel de E______ [BE] où elle avait travaillé en qualité de saisonnière. La redevance devait être payée par son employeur.

b. L'Office a retourné ce courrier à la plaignante par pli du 23 janvier 2024, l'invitant à l'adresser à la Chambre de surveillance.

c. La plaignante l'a renvoyé à cette dernière le 31 janvier 2024.

d. Dans ses observations du 7 février 2024, l'Office a conclu à l'irrecevabilité de la plainte, subsidiairement à son rejet.

Il a en substance soutenu que la plaignante a eu connaissance de la décision attaquée le 11 janvier 2024, de sorte que le dépôt de la plainte auprès de la Chambre de surveillance le 31 janvier 2024 était tardif. En outre, le dépôt de la plainte auprès de l'Office n'était pas valable et n'impliquait pas de transmission à l'autorité compétente, la mention de la voie de droit pour attaquer la décision étant expressément indiquée dans celle-ci.

Au fond, l'Office maintenait que l'opposition au commandement de payer avait été formée tardivement, compte tenu d'une réception du commandement de payer valable le 15 décembre 2023 et la remise de l'opposition à la poste suisse le 5 janvier 2024. Par ailleurs, les conditions d'une restitution de délai n'étaient pas réunies.

e. SERAFE AG a renoncé à se déterminer par courrier du 15 février 2024.

f. La Chambre de surveillance a informé les parties par avis du 20 février 2024 qu'elle gardait la cause à juger.

EN DROIT

1.             1.1.1 La Chambre de surveillance est compétente pour statuer sur les plaintes formées en application de l'article 17 al. 1 LP (art. 13 LP; art. 125 et 126 al. 2 let. c LOJ; art. 6 al. 1 et 3 et 7 al. 1 LaLP) contre les mesures de l'Office ne pouvant être contestées par la voie judiciaire.

1.1.2 La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP). Elle peut également être déposée en tout temps en cas de nullité de l'acte contesté (art. 22 al. 1 LP), de retard à statuer et de déni de justice (art. 17 al. 3 LP).

Lorsque la mesure contestée a fait l'objet d'une communication écrite (art. 34 LP), le délai de dix jours commence à courir le lendemain de sa réception par le destinataire (art. 142 al. 1 CPC, applicable par renvoi de l'art. 31 LP).

1.1.3 Les actes doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai soit au tribunal, soit à l'attention de ce dernier, à la poste suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 143 al. 1 CPC applicable en matière de poursuite par renvoi de l'art. 31 LP).

1.1.4 En application de l'art. 32 al. 2 LP, un acte déposé en temps utile auprès d'une autorité de poursuite incompétente – office des poursuites, des faillites ou autorité de surveillance –, notamment une plainte au sens de l'art. 17 LP, est réputé respecter le délai; l'autorité incompétente communique l'acte à l'autorité compétente sans retard. L'application de l'art. 32 al. 2 LP suppose que le déposant se soit trouvé dans l'erreur sur l'autorité qu'il devait saisir ou, autrement dit, qu'il ait cru de bonne foi adresser son acte à l'autorité compétente pour en connaître. Le fait pour un justiciable de s'adresser consciemment et volontairement à une autorité incompétente alors que l'autorité compétente lui est connue doit à cet égard être qualifié d'abus de droit (ATF 145 III 487 consid. 3.4.5; 100 III 8 et 130 III 515 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_421/2012 du 20 décembre 2012 consid. 3.1; Staehelin, Basler Kommentar SchKG Ergänzungsband, ad n° 6 b ad art. 32 LP; Baeriswyl, Milani, Schmid, Zurcher Kommentar, Kommentar zum Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, Hrsg.: Kren Kostkiewicz/Vock, n° 16 ad art. 32 LP).

1.1.5 En application de l'art. 33 al. 4 première phrase LP, quiconque a été empêché sans sa faute d'agir dans le délai fixé peut demander à l'autorité de surveillance ou à l'autorité judiciaire compétente qu'elle lui restitue ce délai. L'intéressé doit, à compter de la fin de l'empêchement, déposer une requête motivée dans un délai égal au délai échu et accomplir auprès de l'autorité compétente l'acte juridique omis (art. 33 al. 4 deuxième phrase LP).

Pour qu'un empêchement non fautif puisse être retenu, il faut que la partie n'ayant pas respecté le délai se soit trouvée, de manière imprévue et sans aucune faute de sa part, dans l'impossibilité non seulement d'accomplir elle-même l'acte omis mais également de mandater une tierce personne à cette fin. Il faut entendre par empêchement non fautif, non seulement l'impossibilité objective d'agir dans le délai ou de se faire représenter à cette fin, mais aussi l'impossibilité subjective due à des circonstances personnelles ou à une erreur excusable. Tel sera le cas, par exemple, en cas d'accident, de maladie grave et soudaine, de service militaire, de faux renseignement donné par l'autorité ou encore d'erreur de transmission. Un empêchement non fautif a également été admis en cas de soudaine incapacité de discernement ou de perte d'un proche. Une maladie de courte durée, une absence ou une surcharge de travail ne sont en revanche pas constitutives d'un empêchement non fautif. L'empêchement perdure aussi longtemps que l'intéressé n'est pas en mesure - compte tenu de son état physique ou mental - d'agir en personne ou d'en charger un tiers (ATF 119 II 86 consid. 2a; 112 V 255 consid. 2a; arrêts du Tribunal fédéral 5A_896/2012 du 10 janvier 2013 consid. 3.2; 5A_383/2012 du 23 mai 2012 consid. 2.2; 5A_231/2012 du 21 mai 2012 consid. 2; 5A_30/2010 du 23 mars 2012 consid. 4.1; 5A_566/2007 du 26 novembre 2007 consid. 3; 7B_64/2006 du 9 mai 2006 consid. 3; 7B_108/2004 du 24 juin 2004 consid. 2.2.1; 7B_190/2002 du 17 décembre 2002; Russenberger, Minet, KuKo SchKG, 2ème édition, 2014, n° 22 ad art. 33 LP; Nordmann, Berner Kommentar, SchKG I, n° 11 ad art. 33 LP; Erard, Commentaire Romand, Poursuites et faillites, 2005, n° 22 ad art. 33 LP).

1.2 En l'espèce, la plaignante a reçu l'acte attaqué le 11 janvier 2024 selon le système de suivi postal Track & Trace, ce qu'elle ne conteste pas. Elle a adressé sa plainte à Chambre de surveillance le 31 janvier 2024, ce qui est tardif.

Elle n'a pas invoqué de motifs pour justifier ce retard de sorte qu'elle ne saurait se prévaloir de la restitution du délai de plainte. Le fait de s'être adressée dans un premier temps à l'Office, le 17 janvier 2024, soit à une date qui était encore dans le délai de plainte, puis d'avoir renvoyé ultérieurement sa plainte à la Chambre de surveillance n'est pas un motif de restitution au sens de la jurisprudence susmentionnée, car la plaignante n'a pas été induite en erreur par l'autorité ou ne saurait se prévaloir d'un autre empêchement non fautif au sens de l'art. 33 al. 4 LP. Les voies de droit étaient clairement mentionnées dans la décision entreprise.

Reste à déterminer si elle peut se prévaloir du fait que l'Office aurait dû transmettre à la Chambre de surveillance la plainte qui lui avait été adressée le 17 janvier 2024, en application de l'art. 32 al. 2 LP, ce qui aurait préservé le délai de plainte. Cette norme ne s'applique qu'en cas d'erreur d'adressage survenue de bonne foi. A nouveau, les voies de droit étaient clairement mentionnées dans la décision et la plaignante ne saurait se prévaloir de sa bonne foi, ce qu'elle ne plaide pas d'ailleurs. Elle ne pouvait par conséquent exiger de l'Office qu'il transmette sa plainte en application de l'art. 32 al. 2 LP.

La plainte est par conséquent irrecevable. En tout état, la plainte aurait été rejetée sur le fond pour les motifs suivants.

2. La plaignante soutient avoir formé opposition à temps contre le commandement de payer eu égard au fait qu'elle l'a effectivement reçu le 19 décembre 2023 et avoir posté l'opposition à D______ le 27 décembre 2023.

2.1.1 Un commandement de payer est un acte de poursuite qui doit faire l'objet d'une communication revêtant la forme qualifiée de la notification (art. 72 LP). Cette notification consiste en la remise de l'acte en main du poursuivi ou, en l'absence de ce dernier, en main d'une personne de remplacement désignée par la loi et aux lieux prévus par la loi (art. 64, 65 et 66 LP).

L'art. 64 al. 1 LP prescrit que les actes de poursuite sont notifiés au débiteur dans sa demeure ou à l'endroit où il exerce habituellement sa profession et que s'il est absent, l'acte de poursuite peut être remis à une personne adulte de son ménage ou à un employé.

Les exemplaires du commandement de payer notifiés et comportant le procès-verbal de notification avec les mentions apposées par l'agent notificateur (art. 72 al. 2 LP) constituent des titres officiels au sens de l'art. 9 CC, avec pour conséquence qu'ils font en principe foi des faits qu'ils constatent. Le débiteur conserve cependant la possibilité d'établir que ces faits sont en réalité inexacts, cette preuve n'étant soumise à aucune forme particulière (art. 9 al. 2 CC; ATF 128 III 380 consid. 1.2; ATF 120 III 117 = JdT 1997 II 54; ATF 84 III 13; DCSO/236/19 du 23 mai 2019 consid. 2.2; DCSO/418/2008 du 02.10.2008 consid. 3).

2.1.2 Le délai pour former opposition au commandement de payer, auprès de l'Office, est de dix jours dès sa notification (art. 74 al. 1 LP).

Le délai parvenant à échéance pendant les féries de Noël, du 18 décembre au 1er janvier, est reporté jusqu'au troisième jour utile après la fin des féries (art. 56 ch. 2 et 63 LP).

2.1.3 Le délai d'opposition prévu par l'art. 74 al. 1 LP peut être restitué aux conditions de l'art. 33 al. 4 LP telles que décrites ci-dessus (consid. 1.1.5).

2.2 En l'espèce, l'Office prouve par la production du commandement de payer, qui comporte au dos le procès-verbal de sa notification par l'agent notificateur, que cet acte a été remis à la plaignante le 15 décembre 2023. La plaignante allègue qu'elle ne l'aurait reçu que le 19 décembre 2023, mais n'expose aucune circonstance permettant d'expliquer cette différence de date et n'offre aucune preuve pour démontrer ce qu'elle prétend. Le procès-verbal de notification figurant au dos du commandement de payer fait par conséquent foi et la notification doit être admise le 15 décembre 2023. Le délai pour faire opposition court par conséquent dès cette date. A vrai dire, cet élément est sans pertinence pour le calcul du délai de plainte qui était en tout état suspendu par les féries de Noël et parvenait à échéance le 4 janvier 2024, que le commandement de payer ait été notifié le 15 ou le 19 décembre 2023.

La date pertinente pour considérer qu'il a été valablement formé opposition est celle du dépôt à la poste suisse ou devant une représentation diplomatique ou consulaire suisse. En l'occurrence, le pli recommandé contenant l'opposition est parvenu à la poste suisse, selon le système de suivi postal Track & Trace, le 5 janvier 2024, soit un jour trop tard. La décision de l'Office attaquée est par conséquent correcte.

La plaignante n'invoque pas d'empêchement au sens de l'art. 33 al. 4 LP autorisant la restitution du délai d'opposition. Le fait de partir en vacances n'est pas un motif suffisant compte tenu de la rigueur des conditions posées par cette disposition, rappelées ci-dessus.

En définitive, la plainte se révèle infondée et sera par conséquent rejetée dans la mesure de sa recevabilité.

3. La procédure devant l'autorité de surveillance est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP; art. 61 al. 2 let. a OELP) et ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


Rejette, dans la mesure de sa recevabilité, la plainte formée le 31 janvier 2024 par A______ contre la décision de l'Office du 8 janvier 2024 rejetant l'opposition formée au commandement de payer dans la poursuite n° 1______.

 

Siégeant :

Monsieur Jean REYMOND, président; Madame Natalie OPPATJA et Monsieur
Denis KELLER, juges assesseurs; Madame Elise CAIRUS, greffière.

 

Le président :

Jean REYMOND

 

La greffière :

Elise CAIRUS

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.