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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/1756/2025

JTAPI/582/2025 du 30.05.2025 ( MC ) , REJETE

REJETE par ATA/674/2025

Descripteurs : MESURE DE CONTRAINTE(DROIT DES ÉTRANGERS);DÉTENTION AUX FINS D'EXPULSION;LEVÉE DE LA DÉTENTION DE L'ÉTRANGER;SOINS MÉDICAUX;ÉTAT DE SANTÉ;DROIT D'ÊTRE ENTENDU
Normes : LEI.80.al1; LEI.80.al5; LEI.80; CEDH.3
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1756/2025 MC

JTAPI/582/2025

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 30 mai 2025

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Philippe CURRAT, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 

 


 

EN FAIT

1.             Monsieur A______ (alias B______), né le ______ 1999, est ressortissant du Maroc. Il est démuni de tout document d'identité.

2.             Le 26 janvier 2017, il a déposé une demande d'asile en Suisse, laquelle a été rejetée. Une décision de renvoi a été prononcée à son encontre le 27 juin 2017.

3.             Dans le cadre de la procédure de renvoi, il a été formellement identifié par les autorités marocaines comme étant un ressortissant de cet état. Selon les indications du secrétariat d'Etat aux migrations (SEM) figurant au dossier, un laissez-passer pourrait lui être délivré dans un délai d'environ trois semaines à compter de la réservation d'une place sur un vol à destination du Maroc.

4.             Entre le 1er juin 2017 et le 3 mai 2023, M. A______ a fait l'objet de douze condamnations pénales en Suisse, en particulier pour délit contre la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121), opposition aux actes de l'autorité (art. 286 de l'ancienne teneur du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 [CP - RS 311.0]), non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée (art. 119 al. 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 [LEI - RS 142.20]), pour avoir violé la mesure d'assignation territoriale à la commune de C______ prononcée à son encontre par le commissaire de police le 8 mai 2021, violation de domicile (art. 186 CP), vol (art. 139 ch. 1 CP), recel (art. 160 ch. 1 al. 1 CP) et rupture de ban (art. 291 al. 1 CP).

5.             Deux mesures d'expulsion judiciaire ont été prononcées à son encontre, la première, d'une durée de cinq ans, par jugement du Tribunal régional de l'Oberland du 22 mai 2018, et la seconde, pour une durée de cinq ans également, par jugement du Tribunal de police de Genève du 31 octobre 2018, mesure dont l'autorité administrative genevoise compétente a décidé de ne pas reporter l'exécution.

6.             Il a été détenu en exécution de peine à la prison de Champ-Dollon du 17 septembre au 1er décembre 2024. Pendant cette période d'incarcération, les autorités genevoises chargées de l'exécution de la décision de renvoi, ont réservé à son intention une place sur un vol avec escorte policière à destination du Maroc pour le 15 janvier 2025.

7.             Depuis sa sortie de prison, le 1er décembre 2024, M. A______ se trouve en détention administrative.

8.             Le 1er décembre 2024, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à son encontre pour une durée de quatre mois, en application de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), renvoyant à l’art. 75 al. 1 let. b, c et h LEI.

Il ressortait du dossier que l'intéressé n'avait aucun lien particulier avec la Suisse ni résidence fixe ni source légale de revenu. Il n’était pas d’accord de rentrer au Maroc, n’était pas en bonne santé et prenait des médicaments.

9.             Par jugement du 4 décembre 2024 (JTAPI/1190/2024), le tribunal a confirmé l'ordre de mise en détention pris par le commissaire de police le 1er décembre 2024 à l'encontre de M. A______ pour une durée de quatre mois, soit jusqu'au 31 mars 2025.

10.         Le 12 décembre 2024, M. A______ a déposé une demande d'asile auprès du SEM en raison de graves risques de persécution qu'il encourait s'il était renvoyé au Maroc. Vu cette demande, le vol prévu 15 janvier 2025 a été annulé le 17 décembre 2024.

11.         Par arrêt du 26 décembre 2024 (ATA/1503/2024), la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a rejeté le recours interjeté le 16 décembre 2024 par l'intéressé contre le jugement du tribunal du 4 décembre précédant.

Examinant les problèmes de santé physique de M. A______, de même que ses intentions suicidaires, la chambre administrative a rappelé de manière générale la jurisprudence relative aux situations dans lesquelles des troubles physiologiques ou psychiques étaient susceptibles de faire obstacle au renvoi d'une personne, et plus spécifiquement la jurisprudence selon laquelle ni une tentative de suicide, ni des tendances suicidaires ne constituaient en soi un obstacle rédhibitoire à l'exécution du renvoi. À cet égard, seule une mise en danger présentant des formes concrètes devait être pris en considération. Dans le cas de M. A______, le seul diagnostic psychiatrique médicalement déterminé résultait d'un rapport médical établi le 12 avril 2021, portant sur un trouble de la personnalité antisocial et impulsif. Il résultait également de ce rapport qu'à trois reprises en 2019, le précité avait tenté d'obtenir des autorités ce qu'il estimait alors lui être dû (augmentation du dosage de certains médicaments ou opération du genou) en commettant ou en menaçant de commettre des actes auto agressifs. Ni le nombre, ni le dosage des médicaments prescrits en décembre 2024 ne permettait non plus de conclure à l'existence d'un trouble dépressif d'une certaine gravité. Le dossier ne comptait ainsi aucune mention de comportement auto agressif, hormis les épisodes relatés dans le rapport médical du 12 avril 2021, et, dans la mesure où leur réalité serait confirmée, les tentatives de suicide décembre 2024. Quand bien même il n'y avait pas lieu de mettre en doute la sincérité ni la réalité de la grande détresse dans laquelle la perspective de son retour au Maroc plongeait M. A______, cet état ne pouvait cependant être assimilé sans autre à un état pathologique durable. L'expression d'idées suicidaires était intervenue dans le contexte de l'accélération de la procédure de renvoi forcé au Maroc. Dans ces circonstances, tant cette expression d'intention que son éventuelle mise à exécution par les tentatives de suicide alléguées n'étaient pas incompatibles avec le comportement déjà adopté par M. A______ en 2019, visant à infléchir par des actes ou des menaces d'actes auto agressifs les décisions prises à son égard par l'autorité. Il ne pouvait donc être retenu qu'il souffrirait d'une pathologie psychiatrique qui l'exposerait, en cas de retour dans son pays d'origine, à un risque pour sa vie. Les mêmes considérations valaient a fortiori pour la lésion du genou droit dont il souffrait.

Sous l'angle de la proportionnalité, M. A______ avait démontré à de multiples reprises, que ce soit par la commission répétée d'infractions ou le non-respect des décisions rendues à son encontre en matière de droit des étrangers, qu'il faisait peu de cas des instructions reçues des autorités. Il existait donc un risque important qu'il ne défère pas à une convocation en vue de son départ et qu'il tente de disparaître dans la clandestinité, de sorte que sa mise en détention constituait le seul moyen pour assurer sa présence le moment venu. Par ailleurs, l'intérêt public à l'exécution de son renvoi, au vu notamment des nombreux actes délictuels commis en Suisse, l'emportait sur son propre intérêt à demeurer en liberté.

12.         Par requête du 10 janvier 2025, M. A______ a déposé une demande de mise en liberté, rejetée par jugement du 21 janvier 2025 (JTAPI/72/2025), jugement confirmé par arrêt du 17 février 2025 (ATA/170/2025), suite au recours déposé par M. A______.

13.         Par requête du 20 février 2025, M. A______ a déposé auprès du tribunal une nouvelle demande de mise en liberté, rejetée par jugement du 25 février 2025 (JTAPI/208/2025).

14.         Le 7 mars 2025, l'audition de l'intéressé par-devant le SEM a été annulée en raison de ses transferts au sein des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG).

15.         Par requête motivée du 17 mars 2025, l'OCPM a sollicité la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de trois mois.

La demande d'asile présentée par l’intéressé était toujours en cours d'instruction par le SEM ; une audition prévue le 7 mars 2025 avait dû être annulée en raison du transfert de l'intéressé à l'hôpital.

16.         À réception de cette requête, le tribunal a fixé au 25 mars 2025 une audience aux fins de procéder à l'audition de M. A______, de son conseil et du représentant de l'OCPM.

17.         Par lettre du 18 mars 2025, le conseil de l'intéressé a informé le tribunal que son mandant, alors hospitalisé au sein de l'unité hospitalière de psychiatrie pénitentiaire (D______) de l'établissement fermé Curabilis (ci-après : Curabilis), ne se déplaçait qu'en chaise roulante ; l'audience devrait dès lors être tenue dans une salle accessible par un tel mode de locomotion. Un certificat médical établi le 13 mars 2025 par le Dr E______, médecin chef de clinique au sein de l'D______, faisant état d'une indication médicale à l'utilisation d'un fauteuil roulant pour la période du 13 mars au 14 avril 2025, était annexé.

18.         Au vu de cette information, le tribunal a annulé l'audience initialement prévue et en a fixé une nouvelle, dans une salle accessible en fauteuil roulant, le 24 mars 2025 à 11h00.

19.         Par message du 19 mars 2025, le greffe du tribunal a invité la brigade de sécurité et des audiences (ci-après : BSA), chargée du convoyage des personnes détenues entre leur lieu de détention et les divers locaux du Pouvoir judiciaire, à organiser le transfert de M. A______ de Curabilis à la salle où devait se tenir l'audience nouvellement fixée. L'attention de la BSA était attirée sur le fait que la personne concernée ne se déplaçait qu'en chaise roulante.

20.         Selon un courriel adressé le 10 avril 2025 par le gardien principal responsable du greffe et de la centrale de Curabilis à l'OCPM, il avait reçu le 21 mars 2025 – trois jours avant l'audience – un appel du chargé de planification de la BSA, lequel souhaitait savoir si M. A______ pouvait être transporté dans un fourgon cellulaire « classique ». Après s'être renseigné auprès du médecin interne responsable de l'intéressé, la Dre F______, il avait répondu que celui‑ci était au bénéfice d'une prescription médicale pour l'usage d'une chaise roulante dans les espaces de vie de l'unité mais qu'aucune prescription n'imposait un transport en ambulance, un transport en fourgon cellulaire « classique » étant, selon la Dre F______, tout à fait possible. Le chargé de planification de la BSA lui avait alors indiqué que, « à des fins pratiques », il affecterait au transport un « petit véhicule de type voiture ».

21.         Le 24 mars 2025, jour de l'audience, M. A______ a refusé d'être transporté de Curabilis aux locaux du Pouvoir judiciaire où devait se dérouler l'audience.

Selon les pièces du dossier, il a motivé ce refus par le caractère à ses yeux inapproprié du véhicule devant le transporter, paraissant exiger d'être transporté en ambulance et rappelant qu'il ne pouvait se déplacer qu'en chaise roulante. Le dossier ne permet pas de déterminer si, lors de l'expression de ce refus, M. A______ avait vu le, ou avait été informé du, véhicule effectivement prévu pour son transport.

22.         Informé de ce refus, le tribunal a décidé de maintenir l'audience, laquelle s'est tenue en présence de l'avocat de l'intéressé et d'une représentante de l'OCPM. À cette occasion, ledit conseil a requis principalement que le report de l'audience soit ordonné ou, subsidiairement, que son mandant soit entendu à Curabilis. Son absence n'était pas due à une renonciation de sa part à être entendu, mais au fait que les mesures nécessaires à son transport en chaise roulante n'avaient pas été prises.

La représentante de l'OCPM a conclu à la prolongation de la détention en vue du renvoi pour une durée de trois mois.

Le conseil de M. A______ a pour sa part renoncé à s'exprimer, indiquant ne pas être en mesure de plaider.

23.         Dans un échange de courriels intervenu peu après la fin de l'audience, la BSA a confirmé au TAPI, à sa demande, que le véhicule prévu (« 1______ ») aurait permis à A______ d'être transporté à l'audience en chaise roulante.

24.         Par jugement du 24 mars 2025, le tribunal a prolongé la détention administrative de M. A______ pour une durée de trois mois, soit jusqu'au 30 juin 2025.

Alors qu'il avait la possibilité de se rendre à l'audience en chaise roulante, la BSA ayant commandé un véhicule spécial pour ce faire, il avait délibérément choisi de ne pas s'y rendre, exigeant même d'être transporté en ambulance sans que sa condition médicale le justifie. Son absence lors de l'audience de jugement lui était donc entièrement imputable, de telle sorte qu'il ne pouvait se plaindre d'une violation de son droit d'être entendu, ce d'autant moins que son conseil, qui était présent, avait pu assurer une défense efficace.

Sur le fond, les conditions de la détention administrative prévues par les art. 76 al. 1 let. b ch. 1 et 75 al. 1 let. b et g LEI étaient toujours réalisées. Les autorités chargées de l'exécution du renvoi avaient agi avec célérité et diligence, compte tenu de la procédure d'asile engagée. Le principe de proportionnalité demeurait respecté au vu de l'intérêt public à l'exécution du renvoi, du fait que la détention constituait le seul moyen de s'assurer de la disponibilité de l'intéressé au moment de cette exécution et de la durée de la détention, encore très inférieure à celle de 18 mois prévue par l'art. 78 al. 2 LEI. Enfin, la situation médicale de l'intéressé paraissait inchangée depuis le prononcé de l'arrêt du 26 décembre 2024, avec pour conséquence que le renvoi était exigible.

25.         Ce jugement a été confirmé par arrêt de la chambre administrative du 17 avril 2025 (ATA/441/2025), suite au recours interjeté par M. A______.

Celle-ci a rejeté le grief de violation du droit d'être entendu, notamment sous l'angle de l'oralité des débats, relevant pour le surplus que le précité ne soulevait aucun grief relatif au raisonnement ayant conduit le tribunal à retenir que les conditions d'une prolongation de la détention administrative étaient réalisées, que l'autorité chargée de l'exécution du renvoi avait agi avec célérité et diligence, que l'exécution du renvoi était exigible et que le principe de la proportionnalité demeurait respecté. Il ne critiquait pas non plus la durée de la prolongation ordonnée. La motivation du tribunal étant conforme à la loi et à la jurisprudence, il pouvait y être renvoyé.

26.         Par requête du 21 mai 2025, M. A______ a invité le tribunal à revoir son cas. Il souhaitait se faire soigner dans des structures genevoises, soit partir ailleurs.

Etaient notamment joints à sa demande un certificat médical du 6 mai 2025 du Dr G______ indiquant « Indication médicale à l’utilisation d’un fauteuil roulant. Date début : 30.04.2025 », ainsi que divers documents médicaux antérieurs au mois d’avril 2025.

27.         À réception de cette requête, le tribunal a fixé au 28 mai 2025 une audience dans une salle adaptée à la mobilité réduite alléguée de M. A______ aux fins de procéder à son audition et invité la BSA – laquelle a passé le relai à la BMR – à organiser le transport de ce dernier depuis son lieu de détention administrative à Zurich, lui mentionnant l’indication médicale à l’utilisation d’un fauteuil roulant.

28.         Par courriel du 27 mai 2025, le service protection, asile et retour a transmis au tribunal l’information concernant le refus de M. A______ de prendre le JTS et de venir à l’audience du 28 mai 2025.

Il ressort du courriel du centre de détention administrative de Zurich (ci-après : ZAA) du même jour, à 09h10, que le transport de M. A______ avait dû être annulé, ce dernier ayant indiqué ne pas vouloir assister à l’audience.

Ces courriels ont été transmis au conseil du précité le même jour à 9h44.

29.         Par courriel du même jour, à 17h04, le conseil de M. A______ a informé le tribunal s’être entretenu avec son client dans l’après-midi. La présentation d'un refus de sa part n’était pas conforme à la vérité. Il rappelait la problématique médicale de son client (rupture des ligaments croisés d'un genou), laquelle lui provoquait de constantes douleurs et nécessitait le port permanent d'une attelle afin d'immobiliser sa jambe en extension. Son client souffrait par ailleurs depuis quelques mois de lésions aux deux mains, qui nécessitaient aussi le port d'attelles et l'empêchaient d'user de béquilles. C’était la raison pour laquelle le recours à une chaise roulante lui était prescrit par des médecins. Or, systématiquement, toutes les autorités auxquelles il se trouvait confronté, du tribunal aux établissements de Frambois et Zurich, lui refusaient le recours à une chaise roulante, pour des motifs qui semblaient de pure convenance, sans aucune considération humaine. C’était encore ce qui s'était passé ce matin, les convoyeurs refusant de prendre en charge une chaise roulante, du fait que le véhicule prévu, soit un fourgon cellulaire ordinaire, n'était pas adapté à ces fins. Ce véhicule était inadapté à la situation de son client, du fait que l'espace dans lequel il se trouvait confiné exigeait de plier la jambe et de se placer en position assise, ce qui lui occasionnait des douleurs importantes. La représentation mensongère des faits par l’OCPM, dans son courriel de ce jour à 09h14, était inacceptable. La manière dont son mandant était traité constituait une grave atteinte à sa dignité humaine et les grandes souffrances auxquelles il était volontairement et consciemment soumis, d'une manière constante depuis son placement en détention administrative, par les personnels des établissements où il s'était trouvé successivement placé, avec l'aval du tribunal, était constitutive à tout le moins de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, si ce n'était de torture, en violation crasse de l'art. 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) comme de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Le refus d'accès aux soins appropriés, spécifiquement motivé par l'impossibilité de les prodiguer en détention, ajoutait à sa souffrance comme à la gravité de sa situation et constituait en soi une violation supplémentaire de ses droits fondamentaux. Son client lui avait par ailleurs rapporté qu’un détenu serait décédé hier ou aujourd'hui à Zurich, dans son lieu de détention, apparemment des suites d'une grève de la faim et de la soif, ce qui démontrait le total manque de la plus élémentaire considération humaine pour lui et ses codétenus. Son mandant exigeait que le tribunal prenne les mesures utiles à son acheminement, dans un transport adapté, lui permettant de disposer d'une chaise roulante à son point de départ comme à son point d'arrivée et à tout moment utile en cours de route, afin de comparaître. Il voulait comparaître en personne pour exercer son droit d'être entendu et n'entendait pas accepter une présentation des faits contraire à la vérité sur ce point. Il exigeait également qu'une enquête indépendante et effective soit diligentée sans délai pour établir les faits concernant sa situation et sa prise en charge médicale, dans tous les lieux de détention où il avait été placé, en vue de procéder à toute dénonciation utile.

30.         Par courriel du même jour, à 17h45, le tribunal a invité le service protection, asile et retour ainsi que le ZAA à se déterminer sur le courrier du conseil de M. A______, en particulier s’agissant des circonstances ayant conduit la BMR à annuler le transfert de l’intéressé.

Parallèlement, il a interpellé l’D______ au sujet du certificat médical du 6 mai 2025 afin d’avoir des précisions quant à la portée de l’« Indication médicale à l’utilisation d’un fauteuil roulant. Date début : 30.04.2025 ».

31.         Le 27 mai 2025, à 18h14, le service protection, asile et retour a transmis au tribunal un échange du 6 mai 2025 entre les médecins concernant la sortie de l’D______ de M. A______ et son retour à Frambois qui était prévu le même jour.

Dans ce cadre, la Dre H______, Cheffe de clinique D______, précisait que la prescription du fauteuil roulant avait été mise en place par leurs soins seulement pour faciliter les déplacements au sein de l’D______ et qu’elle n’était effective qu’à l’D______ (c’était une attestation faites de la part du service médical destinée aux Agents de détentions de Curabilis pour justifier l’utilisation du fauteuil). Cette prescription n’était pas fondée sur un avis spécialisé. D’autre part, le patient avait déjà séjourné à Frambois avec les mêmes difficultés somatiques, et depuis son admission du 22 avril 2025, aucune nouvelle symptomatologie n’avait été rajoutée au tableau clinique. De ce fait, ils n’avaient pas exigé des conditions particulières pour le retour en détention et n’avaient pas mentionné des besoins spécifiques si ce n’était le suivi de physiothérapie demandé par le chirurgien orthopédiste.

32.         Par courriel du 27 mai 2025, à 19h00, la Dre H______ a confirmé au tribunal les explications données le 6 mai 2025.

33.         Par courriel du 28 mai 2025, à 09h38, le service protection, asile et retour a transmis au tribunal la réponse du ZAA du même jour.

Il ressort de cette dernière que M. A______ se comportait en principe correctement avec eux. Selon ses déclarations, il n'était pas intéressé à participer à l'audience. En ce qui concernait les questions médicales, il transmettrait la demande à leur service de santé.

34.         Bien que dûment convoqué, M. A______ ne s’est pas présenté à l'audience du 28 mai 2025 devant le tribunal, laquelle s'est tenue en présence de son conseil et d'une représentante de l'OCPM.

Le tribunal a remis aux parties les derniers courriels des 27 et 28 mai précités.

Le conseil de M. A______ a indiqué qu’il ne représentait pas son client dans le cadre de la présente audience et qu’il déposerait des demandes de mise en liberté aussi longtemps que son mandant n’aurait pas été entendu de vive voix par le tribunal. Ce dernier persistait à requérir son audition par le tribunal à qui il avait beaucoup de choses à dire. Il contestait les explications données quant à son refus de présentation à l’audience de ce jour, ce qu’il lui avait encore confirmé par courriel du 27 mai 2025 à 16h53 et par téléphone, ce matin avant l’audience. La situation médicale de son client impliquait qu’il se déplace en chaise roulante, que ce soit à l’intérieur des établissements de détention ou pour être acheminé de ces derniers aux audiences devant le tribunal. Il ne comprenait pas l’obstination des autorités à ne pas mettre en place des modalités de transport adéquates. Il renvoyait pour le surplus à son courrier du 27 mai 2025. Il a versé à la procédure un chargé de pièces déjà au dossier.

Aujourd’hui, son client contestait les conditions de sa détention en lien avec son état de santé. Pour le surplus, s’agissant d’une éventuelle demande de mise en liberté, il faudrait qu’il se renseigne auprès de lui pour savoir ce qu’il souhaitait exactement. Il estimait sa détention administrative incompatible avec son état de santé. Il connaissait M. A______, qu’il avait défendu dans le cadre de ses procédures pénales, depuis environ huit ans. Il l’avait vu dépérir au fil des années, plus particulièrement ces derniers mois, depuis qu’il était en détention administrative. Il en allait de sa survie.

La représentante de l’OCPM a versé à la procédure la décision du SEM du 16 avril 2025 rendue suite à la demande d’asile de M. A______, la demande faite à la BMR aux fins d’obtenir le rapport médical relatif au retour de l’intéressé ainsi qu’un extrait SYMIC. Elle n’avait pas d’autres informations concernant la mobilité de M. A______ et l’éventuelle nécessité pour ce dernier d’être déplacé en chaise roulante. Le séjour en Suisse, ces huit dernières années, de M. A______ n’avait pas été continu, ce dernier ayant notamment séjourné aux Pays-Bas en 2022. Il ressortait de son dossier une certaine volonté de faire échouer son renvoi ; cela s’était notamment concrétisé par des grèves de la faim, l’absorption de shampoing juste avant une audience, etc. Sa demande d’asile déposée en janvier 2025 avait par ailleurs conduit à l’annulation du vol réservé en sa faveur ce même mois, respectivement à suspendre toute démarche en vue de son refoulement. Elle a conclu au rejet de la demande de mise en liberté de M. A______. S’agissant de sa conclusion tendant à se faire soigner dans des structures genevoises, qui pouvait être comprise comme une demande de transfert dans un autre établissement, elle attendait les conclusions du rapport médical demandé au ZAA pour se déterminer.

Le conseil de l’intéressé a demandé sur quelles informations se fonderait ce rapport, rappelant que tout le dossier médical de son client se trouvait à Genève et que ce dernier n’avait séjourné que quelques semaines à Zürich. Une véritable expertise de sa situation médicale devait être mise en œuvre.

Le tribunal a enjoint la représentante de l’OCPM à préciser au service médical du ZAA que l’ensemble du dossier médical de M. A______ devrait être pris en compte dans le cadre de l’établissement du rapport médical demandé, ses auteurs étant invités à requérir toute information utile auprès des différents médecins ayant suivi le précité et connaissant ses différentes problématiques médicales.

35.         Par courriel du 28 mai 2025 à 10h00, le service protection, asile et retour a transmis au tribunal la réponse de l’équipe médicale du ZAA du même jour à 09h57.

Il ressort, en substance, de cette dernière que M. A______ utilisait actuellement des béquilles et ne se déplaçait pas en fauteuil. Il n’avait pas été accédé à sa demande de fauteuil roulant car l’ordonnance correspondante, selon un entretien téléphonique avec le médecin traitant, n’était valable que pour son séjour hospitalier. De l’avis de la cheffe d’équipe du service médical, aucun motif médical ne justifiait l’absence de M. A______ à l’audience.

36.         Par courriel du 28 mai 2025, à 15h09, la représentante de l’OCPM a transmis au tribunal deux courriels de l'Etablissement de Frambois, l’un confirmant que le dossier médical de M. A______ avait suivi celui-ci lors de son transfert à Zurich, de sorte que le service médical de ce centre de détention était en pleine connaissance de son état sanitaire, et l’autre indiquant avoir transmis son rapport médical à OSEARA. Elle joignait pour le surplus la pièce, déjà fournie dans le cadre de la procédure devant la chambre administrative, qui établissait que la mise à disposition d'une chaise roulante à M. A______ relevait du confort et que l'intéressé pouvait parfaitement voyager en fourgon cellulaire.

37.         Ces courriels et leurs annexes ont été transmis aux parties, respectivement au conseil de M. A______, pour information.

EN DROIT

1.            Le Tribunal administratif de première instance (ci-après le tribunal) est compétent pour examiner les demandes de levée de détention faites par l'étranger (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. g de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.            Selon l'art. 80 al. 5 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), l’étranger en détention peut déposer une demande de levée de détention un mois après que la légalité de cette dernière a été examinée. L’autorité judiciaire se prononce dans un délai de huit jours ouvrables, au terme d’une procédure orale.

Cela étant, l'art. 7 al. 4 let. g LaLEtr prévoit que la personne détenue peut déposer en tout temps une demande de levée de détention.

Sur ce point, il a été jugé que le droit cantonal peut déroger au droit fédéral, dans la mesure où il étend les droits de la personne détenue (DCCR du 27 mars 2008 en la cause MC/023/2008 et du 24 avril 2008 en la cause MC/026/2008).

Le tribunal statue alors dans les huit jours ouvrables qui suivent sa saisine sur la demande de levée de détention (art. 9 al. 4 LaLEtr).

3.            En l'espèce, la demande formée par M. A______ le 21 mai 2025, interjetée dans le respect du délai légal susmentionné, peut être comprise, au vu des explications données en audience par son conseil, comme une demande de mise en liberté immédiate aux motifs que sa détention administrative serait incompatible avec son état de santé. Elle sera également examinée sous l’angle d’une demande de transfert dans un autre établissement.

4.            Aux termes de l’art. 9 al. 4 LaLEtr, le tribunal statue dans les huit jours ouvrables qui suivent sa saisine sur les requêtes de prolongation de détention de l’office cantonal de la population et des migrations. Il statue au terme d’une procédure orale (art. 9 al. 5 LaLEtr).

5.            Le conseil de M. A______ requiert l’audition de son client par le tribunal et exige que ce dernier prenne les mesures utiles à son acheminement, dans un transport adapté, lui permettant de disposer d'une chaise roulante à son point de départ comme à son point d'arrivée et à tout moment utile en cours de route. Son client voulait comparaître en personne pour exercer son droit d'être entendu.

6.            Tel qu'il est garanti par l'art. 29 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu’une décision ne soit prise, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d’avoir accès au dossier, de participer à l’administration des preuves, d’en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 142 II 218 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_157/2018 du 28 mai 2018 consid. 3.1 et les références citées).

7.            Le but de la procédure orale, expressément prévue par l’art. 80 al. 5 LEI, consiste à garantir le droit d'être entendu de la personne concernée, confrontée à une atteinte grave à sa liberté personnelle. Elle ne doit toutefois pas se limiter à une simple audition de l'étranger mais doit comprendre un débat contradictoire entre, d'une part, un représentant de l'autorité compétente qui soit à même de renseigner de façon complète le juge en cours d'audience et, d'autre part, l'étranger, le cas échéant assisté de son conseil. Les débats doivent ainsi permettre au juge de la détention de se faire une impression personnelle de l'étranger, de sa situation et de sa crédibilité (ATF 139 I 206 consid. 3.4.2 ; 122 II 154 consid. 2b ; Gregor CHATTON et Laurent MERZ, Code annoté de droit des migrations, tome II, 2017, n. 28 ad art. 80 LEtr ; Beat JUCKER, in Ausländer- und Integrationsgesetz (AIG), 2024, n. 9 et 10 ad art. 80 AIG).

8.            Le principe de l'oralité des débats constitue une garantie procédurale cruciale, à laquelle l'étranger ne peut en principe renoncer et dont la violation devrait, sous réserve d'un intérêt public prépondérant, entraîner sa libération (ATF 122 II 154 consid. 2 et 3 ; CHATTON/MERZ, op. cit., n. 30 ad art. 80 LEtr). La loi prévoit toutefois des exceptions, par exemple lorsque la détention a été ordonnée en application de l'art. 77 LEI. Par ailleurs, et même en l'absence d'un cas permettant de déroger au principe de l'oralité, il n'apparaît ni utile ni proportionné pour le juge de la détention de contraindre par la force un étranger refusant de se présenter à une audience ou de s'y faire conduire à y assister contre son gré. Dans une telle hypothèse, il pourra y être représenté par son conseil (JUCKER, op. cit., n. 11 ad art. 80 LEI ; CHATTON/MERZ, op. cit., n. 30 ad art. 80 LEtr).

9.            En l’espèce, bien que dûment convoqué, M. A______ ne s’est pas présenté à l’audience du 28 mai 2025. Sur la base des pièces du dossier et des renseignements obtenus du ZAA, le tribunal retiendra que ce défaut de présentation ne se fonde sur aucun motif légitime, toutes les dispositions utiles à l’acheminement de l’intéressé de son lieu de détention à la salle d'audience ayant été prises dans le respect de son état de santé et de ses limitations fonctionnelles. Il sera pour le surplus renvoyé aux considérants de l’ATA/441/2025 précité (consid. 4.4), dès lors qu’il n’est pas allégué, ni a fortiori démontré, que l’état de santé de M. A______ se serait péjoré depuis le prononcé dudit arrêt. Le tribunal n’entend dès lors pas convoquer M. A______ à une nouvelle audience et statuera en l’état du dossier.

10.        A teneur de l’art. 80 al. 4 LEI, l'autorité judiciaire qui examine la décision de détention de maintien ou de levée tient compte de la situation familiale de la personne détenue et des conditions d'exécution de la détention.

11.        Celle-ci doit en particulier être levée lorsque son motif n'existe plus ou si, selon l'art. 80 al. 6 let. a LEI, l'exécution du renvoi s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles ou qu'elle ne peut être raisonnablement exigée, cette dernière disposition légale renvoyant à l'art. 83 al. 1 à 4 LEI.

12.        Selon ces dispositions, l'exécution n'est pas possible lorsque l'étranger ne peut pas quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers, ni être renvoyé dans l'un de ces États (al. 2), n'est pas licite lorsque le renvoi de l'étranger dans son État d'origine, dans son État de provenance ou dans un État tiers est contraire aux engagements de la Suisse relevant du droit international (al. 3) et ne peut ne pas être raisonnablement exigée si le renvoi ou l'expulsion de l'étranger dans son pays d'origine ou de provenance le met concrètement en danger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (al. 4). L'impossibilité peut être juridique (refus de l'État d'origine de reprendre la personne; ATF 125 II 217 consid. 2 = RDAF 2000 I 811) ou matérielle (état de santé grave et durable ne permettant pas de transporter la personne). La jurisprudence fédérale exige qu'un pronostic soit établi dans chaque cas. Si l'exécution dans un délai prévisible paraît impossible ou très improbable, la détention doit être levée (ATF 127 II 168 consid. 2c = RDAF 2002 I 390 ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.312/2003 du 17 juillet 2003 ; ATA/92/2017du 3 février 2017 consid. 5b).

13.        S'agissant plus spécifiquement de l'exécution du renvoi des personnes en traitement médical en Suisse, celle-ci ne devient inexigible que dans la mesure où ces dernières ne pourraient plus recevoir les soins essentiels garantissant des conditions minimales d'existence. Par soins essentiels, il faut entendre les soins de médecine générale et d'urgence absolument nécessaires à la garantie de la dignité humaine. L'art. 83 al. 4 LEI, disposition exceptionnelle, ne saurait en revanche être interprété comme impliquant un droit général d'accès en Suisse à des mesures médicales visant à recouvrer la santé ou à la maintenir, au simple motif que l'infrastructure hospitalière et le savoir-faire médical dans le pays d'origine ou de destination de l'intéressé n'atteignent pas le standard élevé qu'on trouve en Suisse (ATAF 2011/50 consid. 8.3). La gravité de l'état de santé, d'une part, et l'accès à des soins essentiels, d'autre part, sont déterminants. Ainsi, l'exécution du renvoi demeure raisonnablement exigible si les troubles physiologiques ou psychiques ne peuvent être qualifiés de graves, à savoir s'ils ne sont pas tels qu'en l'absence de possibilités de traitement adéquat, l'état de santé de l'intéressé se dégraderait très rapidement au point de conduire d'une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité physique (arrêt du TAF F-1602/2020 du 14 février 2022 consid. 5.3.4).

14.        A teneur de l’art. 81 al. 2 LEI, la détention a lieu dans un établissement servant à l’exécution de la détention en phase préparatoire, de la détention en vue du renvoi ou de l’expulsion ou de la détention pour insoumission. Si ce n’est exceptionnellement pas possible, notamment pour des raisons de capacités, les étrangers doivent être détenus séparément des personnes en détention préventive ou purgeant une peine. La forme de la détention doit tenir compte des besoins des personnes à protéger, des mineurs non accompagnés et des familles accompagnées d’enfants (al. 3). En outre, les conditions de détention sont régies : a. pour les cas de renvois à destination d’un pays tiers : par les art. 16, al. 3, et 17 de la directive 2008/115/CE240; b. pour les cas liés à un transfert Dublin : par l’art. 28, al. 4, du règlement (UE) no 604/2013241 ( ) (al. 4).

15.        Au niveau conventionnel, l'art. 3 CEDH prévoit que nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. La Suisse a également ratifié la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants du 10 décembre 1984 (RS 0.105), édictée sous l'égide des Nations Unies. Au plan constitutionnel, l'art. 7 Cst. prescrit de son côté que la dignité humaine doit être respectée et protégée. À teneur de l'art. 10 al. 3 Cst., la torture et tout autre traitement ou peine cruels, inhumains ou dégradants sont interdits. La Constitution genevoise prévoit aussi que la torture et tout autre traitement ou peine cruels, inhumains ou dégradants sont interdits (art. 18 al. 2 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 - Cst-GE - A 2 00) et que la dignité humaine est inviolable (art. 14 al. 1 Cst- GE).

Selon le Tribunal fédéral, les garanties de la CEDH relatives aux conditions de détention n'offrent pas une protection plus étendue que celles garanties par la Constitution fédérale (ATF 145 I 318 consid. 2.1 ; 143 I 241 consid. 3.4).

16.        Si les conditions de détention ne respectent pas les exigences légales, il appartient au juge d'ordonner les mesures qui s'imposent ou – s'il n'est pas possible d'assurer une détention conforme à la loi dans les locaux de l'établissement de détention préventive – de faire transférer à bref délai le recourant dans d'autres locaux. Si la situation légale n'est pas rétablie dans un délai raisonnable, le recourant doit être libéré (ATF 122 II 299 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_128/2009 du 30 mars 2009 consid. 5.2).

17.        En l'espèce, tant le tribunal de céans que la chambre administrative ont confirmé, la dernière fois le 17 avril 2025, que les conditions légales de la détention de l'intéressé étaient remplies (JTAPI/1190/2024, ATA/1503/2024, JTAPI/72/2025, JTAPI/208/2025, ATA/890/2024, JTAPI/303/2025 et ATA/441/2025 précités).

Dans ce cadre, ces juridictions ont en particulier considéré qu’il ne pouvait être retenu que M. A______ souffrirait d'une pathologie psychiatrique ou physique qui l'exposerait, en cas de retour dans son pays d'origine, à un risque pour sa vie ou, compte tenu des possibilités d'accéder à des soins dans son pays d'origine, à un risque réel d'être exposé à un déclin grave, rapide et irréversible de son état de santé entraînant des souffrances intenses ou une réduction significative de son espérance de vie ; l'exécution de son renvoi ne violait donc pas les art. 83 al. 3 et 4 LEI ni 3 CEDH. Cela valait en particulier pour sa lésion au genou droit.

De même, il a été retenu que le principe de la proportionnalité était respecté s’agissant tant de sa détention administrative, seul moyen pour assurer sa présence lors de l'exécution de son renvoi, qu’au regard de l'intérêt public important à l'exécution dudit renvoi, étant précisé qu’il appartiendrait toutefois aux thérapeutes de l’intéressé, puis aux autorités chargées du renvoi, de vérifier son aptitude au voyage et de prendre les mesures concrètes utiles pour prévenir la réalisation des intentions suicidaires qu'il avait exprimées.

Par décision du 16 avril 2025, le SEM a enfin rejeté la demande d’asile de l’intéressé, en écartant notamment tout risque de violation de l’art. 3 CEDH en cas de renvoi dans son pays d’origine, renvoi par ailleurs parfaitement exigible au regard de ses problèmes de santé.

M. A______ soutient, par la voix de son conseil, que son maintien en détention administrative, respectivement les conditions de celle-ci, seraient incompatibles avec son état de santé, ce qui justifierait la levée de sa détention avec effet immédiat. Il en allait de sa survie. Il invoque à cet égard que le recours à une chaise roulante lui est systématiquement refusé, un refus d’accès aux soins appropriés, que la manière dont il est traité constitue une grave atteinte à sa dignité humaine et que les grandes souffrances auxquelles il est volontairement et consciemment soumis sont constitutives à tout le moins de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, si ce n'est de torture. Il allègue encore le récent suicide d’un co-détenu au ZAA et exige qu'une enquête indépendante et effective soit diligentée sans délai pour établir les faits concernant sa situation et sa prise en charge médicale, dans tous les lieux de détention où il a été placé, en vue de procéder à toute dénonciation utile.

Cela étant, il ne ressort pas des pièces du dossier que l’état de santé de M. A______ se serait péjoré depuis le dernier examen de sa situation par la chambre administrative. M. A______ ne l’allègue pas ni a fortiori ne le démontre. Il n’établit pas plus qu’il bénéficierait d’une prescription médicale pour l’utilisation d’une chaise roulante, que des soins médicaux auxquels il aurait droit lui auraient été refusés et/ou que ses conditions de détention au ZAA ne répondraient pas aux conditions minimales de détention que la Suisse se doit d'observer en vertu de normes internes ou internationales. L’intéressé sera pour le surplus renvoyé aux considérants des jugements et arrêts précités du tribunal et de la chambre administrative, lesquels demeurent en tous points valables, en l’absence d’une quelconque modification déterminante de sa situation.

S’agissant enfin de l’absence de possibilité de suivi en physiothérapie au ZAA alléguée par le conseil de M. A______, si tant est qu’elle soit avérée et qu’un tel suivi soit effectivement toujours nécessaire aujourd’hui, ce qui reste à démontrer, le tribunal invitera les autorités compétentes à en tenir compte et faire le nécessaire, cas échéant, en procédant au besoin au transfert de l’intéressé dans un autre établissement de détention administrative.

A ce stade, le tribunal ne peut ainsi que constater qu’aucun élément objectif ne valide les affirmations de M. A______, relayées par son conseil. Sa situation n'a dès lors pas évolué dans un sens qui conduirait, pour protéger sa vie, à ordonner sa mise en liberté ou à exiger son transfert dans un autre établissement. En tout état, en tant que tels, les problèmes médicaux dont il se plaint ne sauraient conduire à sa mise en liberté ni à retenir les violations du droit international alléguées.

18.        Au vu de ce qui précède, sa demande de mise en liberté sera rejetée, de même que ses demandes de transfert dans un autre établissement, de soins qu’il estime appropriés, d’expertise médicale et d’ouverture d’enquête indépendante, si tant est que le tribunal soit compétent pour les ordonner. En tant que de besoin, la détention administrative sera confirmée jusqu'au 30 juin 2025, date jusqu'à laquelle elle a été prolongée selon jugement du tribunal du 24 mars 2025.

19.        Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat et à l’OCPM. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au SEM.


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable la demande formée le 21 mai 2025 par Monsieur A______ ;

2.             la rejette et confirme en tant que de besoin la détention jusqu'au 30 juin 2025 ;

3.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 10 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Marielle TONOSSI

Copie conforme de ce jugement est communiquée à Monsieur A______, à son avocat, à l’office cantonal de la population et des migrations et au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière