Décisions | Tribunal administratif de première instance
JTAPI/1213/2024 du 11.12.2024 ( OCPM ) , IRRECEVABLE
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
POUVOIR JUDICIAIRE
JUGEMENT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PREMIÈRE INSTANCE du 11 décembre 2024
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dans la cause
Madame et Monsieur A______ et B______, en leur noms et pour le compte de leurs enfants mineurs C______ et D______, représentés par Me Marco ROSSI, avocat, avec élection de domicile
contre
OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS
1. Monsieur B______, son épouse Madame A______ et leurs enfants mineurs C______ et D______, sont ressortissants du Kosovo.
2. Le 27 juin 2024, sous la plume de Maître E______, avocate domiciliée dans le canton de Vaud, ils ont déposé auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) une demande de reconsidération à l'égard d'une décision prise par cette autorité le 15 juillet 2022, laquelle refusait de transmettre leur dossier avec un préavis positif au secrétariat d'État aux migrations ci-après : SEM) et prononçait leur renvoi le Suisse.
3. La décision du 15 juillet 2022 était devenue définitive à l'issue d'une procédure judiciaire dans le cadre de laquelle Me E______ était constituée en faveur des précités.
4. Par décision du 12 septembre 2024, l'OCPM a refusé d'entrer en matière sur leur demande de reconsidération.
5. Cette décision a été expédiée par courrier A Plus à l'adresse de Me E______ et a été distribuée à cette dernière via sa case postale le 13 septembre 2024, selon le suivi Track and Trace de la Poste.
6. Par acte du 17 octobre 2024 déposé à l'office postal le jour même, M. B______ et Mme A______, agissant pour eux-mêmes et pour le compte de leurs enfants mineurs, ont recouru contre cette décision, sous la plume de leur nouveau conseil, auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant à son annulation. Dans ses écritures, ledit conseil indiquait que la décision querellée avait été notifiée le 17 septembre 2024
7. Par courrier du 21 octobre 2024, le tribunal s'est adressé au conseil de M. B______ et Mme A______ en relevant que selon le suivi des envois, la décision avait été distribuée à son destinataire le 13 septembre 2024. Il était ainsi invité à se déterminer une nouvelle fois sur la recevabilité du recours.
8. Par écritures du 28 octobre 2024, le conseil de M. B______ et Mme A______ a expliqué que dans l'urgence et selon les informations qu'il avait reçues de ses mandants, il s'était fié au timbre humide de l'étude de Me E______, qui indiquait une date de réception le 17 septembre 2024. Cela étant, il s'avérait en effet que cette décision avait été distribuée dans la case postale de l'avocate précitée le 13 septembre 2024. Selon un échange de courriels qu'il avait eus avec elle (produit en annexe), le vendredi 13 septembre 2024 correspondait à une veille de week-end prolongé, compte tenu du Jeune fédéral. La case n'avait donc pas été relevée le vendredi 13 septembre 2024, ni le lundi 16 septembre suivant, qui était un jour férié, mais seulement le 17 septembre 2024, de sorte que ce n'était qu'à cette date que Me E______ avait pris connaissance de la décision litigieuse.
Ainsi, tout en déplorant amèrement le mode de traitement du courrier par l'avocate précitée, M. B______ et Mme A______ persistaient dans leurs conclusions.
1. Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).
2. Aux termes de l'art. 72 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), l’autorité de recours peut, sans instruction préalable, par une décision sommairement motivée, écarter un recours manifestement irrecevable ou rejeter un recours manifestement mal fondé.
3. Selon l'art. 62 al. 1 let. a LPA, le délai de recours devant le tribunal est de trente jours s'il s'agit, comme en l'occurrence, d'une décision finale ; il court dès le lendemain de la notification de la décision contestée (art. 17 al. 1 et 62 al. 3 LPA).
Selon l'art. 63 al. 1 LPA, les délais en jours fixés par la loi ou par l'autorité ne courent pas :
du 7e jour avant Pâques au 7e jour après Pâques inclusivement (let. a) ;
du 15 juillet au 15 août inclusivement (let. b) ;
du 18 décembre au 2 janvier inclusivement (let. c).
Les délais sont réputés observés lorsque l'acte de recours est parvenu à l'autorité ou a été remis à son adresse, à un bureau de poste suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse au plus tard le dernier jour du délai avant minuit (art. 17 al. 4 LPA).
4. Les cas de force majeure, à savoir les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d'activité de l'intéressé et qui s'imposent à lui de l'extérieur de façon irrésistible (ATA/1416/2019 du 24 septembre 2019 consid. 2d), demeurent toutefois réservés (art. 16 al. 1 2ème phr. LPA). Pour établir l'existence d'un cas de force majeure, le fardeau de la preuve incombe à l'assujetti (ATA/ 463/2018 du 8 mai 2018).
5. La prestation « Courrier A Plus » offre la possibilité de suivre le processus d'expédition du dépôt jusqu'à la distribution. Elle comporte également l'éventuelle réexpédition à une nouvelle adresse, ainsi que le retour des envois non distribuables. Lors de l'expédition par « Courrier A Plus », l'expéditeur obtient des informations de dépôt, de tri et de distribution par voie électronique via le service en ligne « Suivi des envois ». Les envois « Courrier A Plus » sont directement distribués dans la boîte aux lettres ou dans la case postale du destinataire. En cas d'absence, le destinataire ne reçoit pas d'invitation à retirer un envoi dans sa boîte aux lettres (document de La Poste suisse sur Internet « Courrier A Plus - La transparence tout au long du processus d'expédition » ; aussi ATF 142 III 599 consid. 2.1).
La notification doit permettre au destinataire de prendre connaissance de la décision et, cas échéant, de faire usage des voies de droit ouvertes à son encontre. Une décision est notifiée, non pas au moment où l'administré en prend connaissance, mais le jour où elle est dûment communiquée. S'agissant d'un acte soumis à réception et adressé par pli non recommandé, telle une décision ou une communication de procédure, la notification est réputée parfaite au moment où l'envoi entre dans la sphère de pouvoir de son destinataire, à savoir dans sa boîte aux lettres ou sa case postale. Il n'est pas nécessaire que celui-ci en prenne réellement connaissance ; il suffit qu'il puisse en prendre connaissance (ATA/871/2019 du 7 mai 2019 consid. 3c et les réf.).
Ainsi, lorsqu'une décision est notifiée par « Courrier A Plus », le délai commence à courir dès sa remise dans la boîte aux lettres ou la case postale (ATF 142 III 599 consid. 2.4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_198/2015 du 30 avril 2015 consid. 3).
6. De jurisprudence constante, celui qui se sait partie à une procédure judiciaire et qui doit dès lors s'attendre à recevoir des actes du juge - condition en principe réalisée pendant toute la durée d'un procès - est tenu de relever son courrier ou, s'il s'absente de son domicile, de prendre des dispositions pour que celui-ci lui parvienne néanmoins. Ce principe s'applique également en procédure administrative. (ATF 141 II 429 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_722/2016 du 21 décembre 2016 consid. 3.3.1).
7. En l'espèce, il résulte des données provenant du système « Track and Trace », que la décision attaquée, envoyée par « Courrier A Plus », a été déposée le vendredi 13 septembre 2024 dans la case postale de l'avocate constituée à ce moment-là pour les recourants et ainsi entrée le même jour dans la sphère de puissance de ces derniers. Le fait que le vendredi 13 septembre 2024 précédait le week-end qui précédait lui-même le lundi du Jeûne fédéral (16 septembre 2024) n'a aucune incidence sur le délai de recours, les recourants ne prétendant d'ailleurs pas, à raison, que cela aurait entraîné une suspension du délai prévu par l'art. 62 al. 1 let. a LPA.
Le délai de recours, qui a donc commencé à courir le lendemain de la notification de la décision litigieuse, soit le 14 septembre 2024, est parvenu à échéance le dimanche 13 octobre 2024 et a été reporté au premier jour utile suivant (art. 17 al. 3 LPA), soit le lundi 14 octobre 2024. Formé le 17 octobre 2024, le présent recours a donc été déposé au-delà du délai légal de trente jours rappelé plus haut et est donc tardif. Le fait que l'avocate alors constituée par les recourants n'a relevé sa case postale que le mardi 17 septembre 2024 n'empêchait pas ces derniers de disposer encore d'un délai de 27 jours pour recourir.
8. Au vu de ce qui précède, le recours doit être déclaré irrecevable.
9. En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), les recourants, qui succombent, sont condamnés, pris solidairement, au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 250.- ; il est couvert par l’avance de frais de CHF 500.- versée à la suite du dépôt du recours. Le solde de l'avance de frais, soit CHF 250.-, leur sera restitué. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
10. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PREMIÈRE INSTANCE
1. déclare irrecevable le recours interjeté le 17 octobre 2024 par Monsieur B______ et Madame A______, agissant pour eux-mêmes et au nom de leurs enfants mineurs C______ et D______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 12 septembre 2024 ;
2. met à la charge des recourants, pris solidairement, un émolument de CHF 250.-, lequel est couvert par l'avance de frais de CHF 500.- ;
3. ordonne la restitution aux recourants du solde de l’avance de frais, soit CHF 250.- ;
4. dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
5. dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.
Au nom du Tribunal :
Le président
Olivier BINDSCHEDLER TORNARE
Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.
Genève, le |
| La greffière |