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Décisions | Chambre de surveillance

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C/22025/2015

DAS/303/2024 du 19.12.2024 sur DTAE/9245/2024 ( PAE ) , REJETE

Recours TF déposé le 23.12.2024, rendu le 03.02.2025, IRRECEVABLE, 5A_895/2024
Normes : CC.426
En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/22025/2015-CS DAS/303/2024

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU JEUDI 19 DECEMBRE 2024

 

Recours (C/22025/2015-CS) formé en date du 11 décembre 2024 par Madame A______, actuellement hospitalisée à la Clinique de B______,
Unité C______, sise ______ (Genève).

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 20 décembre 2024 à :

- Madame A______
Clinique de B______, Unité C______
______, ______.

- Maître D______
c/o [Étude] E______
______, ______.

- Madame F______
Madame G______
SERVICE DE PROTECTION DE L'ADULTE
Route des Jeunes 1C, case postale 107, 1211 Genève 8.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.

Pour information à:

-       Direction de la Clinique de B______
______, ______.


EN FAIT

A.           a. A______, originaire de H______ (Genève), est née le ______ 1972.

Le 21 juin 2002, elle a épousé I______, né le ______ 1968, originaire de J______ (Tessin), décédé à Genève le ______ 2024.

Le couple a donné naissance à deux enfants, K______, né le ______ 2005, désormais majeur et L______, né le ______ 2007.

La vie commune des époux a pris fin en 2013.

b. En raison de troubles empêchant A______ de gérer ses affaires, une mesure de curatelle de représentation et de gestion a été prononcée en sa faveur par décision du Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après: le Tribunal de protection) du 2 mars 2018.

Au fil des années et des diverses expertises auxquelles A______ a été soumise, plusieurs diagnostics ont été posés, outre celui repris dans le jugement de divorce (cf. considérant c. ci-dessous) soit notamment: troubles de la personnalité émotionnellement labile, trouble de l'adaptation, trouble de l'humeur mixte, ou encore troubles de la personnalité.

c. Par jugement JTPI/13788/2021 du 29 octobre 2021, le Tribunal de première instance, statuant sur requête partiellement commune de divorce, a dissous par le divorce le mariage contracté par A______ et I______, maintenu l'autorité parentale conjointe des parents sur leurs deux enfants, restreint l'autorité parentale de la mère en ce qui concernait le renouvellement des pièces d'identité et passeports, autorisation de voyages, demandes d'allocations familiales, inscriptions et choix des établissements scolaires des enfants, dont la garde a été attribuée au père; les frais d'entretien des mineurs ont été mis à la charge de ce dernier, le droit aux relations personnelles entre les enfants et leur mère a été suspendu et il a été fait interdiction à cette dernière, sous menace de la peine prévue à l'art. 292 CP, de s'approcher à moins de 100 mètres des enfants, de leur école et de leur domicile, de prendre contact, de quelque manière que ce soit, avec les établissements scolaires qu'ils fréquentaient et avec les parents des élèves desdits établissements. Le Tribunal a par ailleurs réglé les aspects patrimoniaux entre les parties, notamment la contribution d'entretien post divorce, les parties ayant convenu qu'un montant de 3'000 fr. par mois serait versé par I______ à A______ du 1er avril 2021 jusqu'au 31 décembre 2023, puis de 2'000 fr. par mois jusqu'au 31 décembre 2025.

Dans ce jugement, le Tribunal de première instance a notamment retenu que A______ avait présenté des troubles psychiques qui s'étaient aggravés au fil des années et avait fait l'objet de plusieurs expertises ayant conclu à l'existence d'un trouble bipolaire de la personnalité de type borderline et d'un trouble psychotique sévère, essentiellement délirant. Lesdits troubles se traduisaient notamment par une irritabilité, une agressivité et des modalités d'expression de colère menaçantes et insultantes à l'égard de sa famille, de ses soignants, avocats, curateurs, juges et plus largement de toutes les autorités et intervenants sociaux, médicaux et judiciaires, ainsi que par un sentiment de persécution et d'injustice, des pensées de mort récurrentes avec des idées de suicide, un risque de passage à l'acte hétéro-agressif ne pouvant être exclu, notamment à l'égard de ses deux enfants, qu'elle impliquait dans ses discours mortifères. Elle leur avait ainsi adressé des messages dans lesquels elle leur faisait part de ses intentions suicidaires en raison de leur refus de la voir et contenant par ailleurs des propos injurieux à l'égard de leur père et des intervenants du Service de protection des mineurs (SPMI). Elle avait également tenté à plusieurs reprises de s'introduire dans l'appartement occupé par I______ et les enfants et y était parvenue le 4 novembre 2020; elle avait alors, en présence des enfants, notamment hurlé, menacé et fait mine de se suicider en se jetant par le balcon et il avait fallu plusieurs heures de négociations avec cinq policiers, le curateur du SPMI, trois infirmiers et un médecin pour qu'elle quitte enfin l'appartement.

d. Il ressort de la volumineuse procédure concernant A______, ouverte devant le Tribunal de protection, constituée en l'état de vingt-cinq tomes, qu'à une date indéterminée l'intéressée a quitté Genève pour l'Allemagne, pays dans lequel elle se trouvait en juin 2022; elle vivait alors chez sa mère et avait fait l'objet d'une hospitalisation.

Par décision médicale du 17 août 2022, A______, de retour à Genève, a été placée à des fins d'assistance au sein de la Clinique de B______.

Elle est ensuite retournée en Allemagne, où elle se trouvait à la fin de l'année 2022.

Depuis lors, elle a fait des allers-retours entre la Suisse et l'Allemagne. Elle est revenue à Genève en mars 2024, après être passée par le canton de Berne, qui a refusé d'entrer en matière sur sa demande de prestations sociales du fait qu'elle était officiellement domiciliée à Genève, raison pour laquelle elle est revenue dans ce canton. En juin 2024, elle résidait dans un hôtel, payé par l'Hospice général et utilisait pour le surplus la carte de crédit de sa mère.

e. Par ordonnance DTAE/4280/2024 du 12 juin 2024, le Tribunal de protection, statuant sur mesures superprovisionnelles, a ordonné le placement à des fins d'assistance de A______ en la Clinique de B______ et enjoint le Département chargé de la sécurité, soit pour lui l'unité de proximité de la gendarmerie, de prêter main forte et d'assurer l'exécution du placement.

Le Tribunal de protection a retenu, en substance, que A______ faisait l'objet d'une curatelle de représentation et de gestion étendue à tous les domaines de protection, confiée, par décision du 16 décembre 2022, à la sœur de l'intéressée, M______. Le 9 mars 2023, l'Amtsgericht de N______ (Allemagne) avait, à la suite d'un changement de résidence de A______, instauré une mesure de protection en sa faveur et désigné deux curateurs professionnels, de sorte que la mesure prononcée à Genève avait pris fin. En mars 2024, A______ avait toutefois sollicité une aide financière auprès de l'Hospice général à Genève. L'assistante sociale qui l'avait reçue avait relevé qu'elle tenait des propos incohérents et avait demandé des éclaircissements sur sa situation au Tribunal de protection. A______ manifestait l'intention d'introduire une procédure judiciaire afin de récupérer l'ancien appartement conjugal, ses enfants et ses animaux de compagnie. Elle exigeait de l'Hospice général qu'il paye sa chambre à l'hôtel O______, refusant d'être hébergée ailleurs, alors que ledit hôtel n'était pas conventionné. Elle adressait par ailleurs sans cesse des courriels à diverses personnes et institutions (dont le Tribunal de protection) pour se plaindre de ses procédures de divorce et de curatelle et tenait des propos parfois incohérents, voire impolis et inadéquats. L'assistante sociale de l'Hospice général ne parvenait pas à avoir avec elle des entretiens constructifs et était d'avis que A______, qui avait menacé de se suicider, avait besoin d'un suivi psychologique. Il apparaissait également que cette dernière conduisait un véhicule non assuré et sa mère en avait peur, au motif qu'elle l'avait poussée et avait déclaré souhaiter sa mort afin de percevoir son héritage. Selon les informations en possession du Tribunal de protection, la mesure de curatelle instaurée en Allemagne prendrait fin le 30 juin 2024.

Dans son ordonnance, le Tribunal de protection a relevé qu'il était difficile d'établir si A______ avait sa résidence habituelle en Suisse ou en Allemagne. Il a toutefois considéré, compte tenu de la présence de l'intéressée à Genève, être compétent à tout le moins provisoirement pour prendre d'éventuelles mesures urgentes en sa faveur, sur la base de l'art. 10 par. 1 ClaH 2000. Or, il apparaissait que l'état de santé de A______ s'était fortement dégradé, qu'elle menaçait de se suicider, tenait des propos incohérents et adoptait des comportements dangereux pour elle-même et pour les tiers; elle était totalement anosognosique de son état et en rupture de traitement. Ces éléments laissaient présager l'existence d'un trouble psychique décompensé et imposaient la prise de mesures de protection urgentes afin de sauvegarder son intégrité physique et psychique. Dans l'attente de l'expertise psychiatrique, il convenait d'ordonner le placement de l'intéressée à titre superprovisionnel.

f. Le 12 juin 2024, le Tribunal de protection a ordonné l'expertise psychiatrique de A______, confiée à la Dre P______, médecin adjointe, ______ [fonction] de l'Unité de psychiatrie légale auprès du Centre universitaire romand de médecine légale (CURML) et, sur mesures superprovisionnelles, a institué en sa faveur une curatelle de représentation et de gestion étendue à son assistance personnelle et au domaine médical, confiée à des mandataires du Service de protection de l'adulte.

Par ordonnance du 18 juin 2024, le Tribunal de protection a également désigné Me D______ en qualité de curateur d'office de A______, son mandat étant limité à sa représentation dans la procédure ouverte devant lui.

g. Pendant plusieurs mois, le placement à des fins d'assistance prononcé à titre superprovisionnel n'a pas pu être exécuté, A______ ayant quitté Genève. Au début du mois d'août 2024, elle se trouvait à Q______ (France), dans un hôtel qu'elle ne parvenait pas à payer et avait demandé de l'aide à une amie de la famille. Elle avait ensuite rejoint le canton de Berne, puis était repartie en Allemagne. Dans divers courriels adressés notamment à son curateur de représentation, elle manifestait l'intention de mettre fin à ses jours et persistait à se considérer victime de diverses injustices dont elle rendait notamment responsables divers avocats, magistrats et curateurs, à l'égard desquels elle proférait des injures; elle se plaignait par ailleurs de n'avoir ni toit, ni argent et d'avoir perdu ses enfants; elle contestait avoir besoin de soins.

h. Par courrier du 12 septembre 2024, le CURML informait le Tribunal de protection ne pas avoir pu rencontrer A______; l'expertise sollicitée n'avait par conséquent pas pu être diligentée.

i. Par courrier du 7 novembre 2024, le Tribunal de protection a pris contact avec le Bundesamt für Justiz de R______ (Allemagne), afin de signaler le fait que A______ résidait à nouveau en Allemagne et qu'une intervention des autorités était nécessaire.

j. De retour à Genève, A______ a été hospitalisée dans l'Unité C______ de la Clinique de B______ le 30 novembre 2024.

Elle a formé un "recours", que le Tribunal de protection a considéré comme une demande de levée du placement.

k. Une audience a eu lieu le 10 décembre 2024 devant le Tribunal de protection.

La Dre S______, cheffe de clinique au sein de l'Unité C______ de la Clinique de B______, a été entendue. Elle a indiqué qu'aucun traitement médicamenteux n'était administré à A______. Les comportements de cette dernière étaient dus "à des éléments de personnalité". Il n'était pas certain qu'un traitement de fond produise "des effets convaincants". Des difficultés comportementales à l'égard de l'équipe soignante avaient été constatées, qui nécessitaient un recadrage. En revanche, il n'existait pas de risque hétéro-agressif vis-à-vis des tiers. Selon la Dre S______, il n'existait pas de raison de maintenir le placement. L'équipe soignante n'avait pas constaté de tentative de A______ de violer les mesures qui l'empêchaient de prendre contact avec ses enfants. L'équipe était consciente du fait que l'intéressée pouvait s'exposer à la commission d'infractions pénales en raison des comportements révélés par le dossier. Toutefois, un traitement médicamenteux ne permettrait pas de modifier ce fait. La mise en place d'un suivi ambulatoire avait été tentée, mais il n'y avait pas d'alliance thérapeutique. Selon la Dre S______, A______ avait besoin d'un tel suivi, mais celui-ci n'était possible qu'avec son accord.

Selon le curateur de représentation de A______, celle-ci s'était rendue au domicile de ses enfants. Son fils aîné avait fait appel à la police, ce qui avait conduit à l'hospitalisation de l'intéressée. Les enfants avaient déclaré ne pas souhaiter reprendre contact avec elle, même en milieu médiatisé. Le curateur s'est déclaré favorable au maintien de l'hospitalisation; un traitement médicamenteux permettrait peut-être à l'intéressée d'être plus adéquate dans les relations avec ses enfants et de retrouver un lien avec eux. La curatrice de la mesure a formulé le même avis.

Selon A______ la mesure lui faisant interdiction de contacter ses enfants était illicite. Elle ne comprenait pas que l'on puisse la considérer comme un danger pour eux. Elle dormait à la Clinique de B______, car elle n'avait pas d'autre endroit où aller. Le jugement de divorce n'était, selon elle, pas valable, car signé par les curateurs. On l'avait faite beaucoup souffrir et des gens gagnaient de l'argent sur le dos de personnes comme elle.

Au terme de l'audience, la cause a été mise à délibérer.

B.            Par ordonnance DTAE/9245/2024 du 10 décembre 2024, le Tribunal de protection, statuant sur mesures provisionnelles, a confirmé le placement à des fins d'assistance de A______ ordonné par décision superprovisionnelle DTAE/4280/2024 du 12 juin 2024 (chiffre 1 du dispositif), prescrit l'exécution du placement en la Clinique de B______ (ch. 2), rendu attentive l'institution de placement au fait que la compétence de libérer la personne concernée, de lui accorder des sorties temporaires ou de transférer le lieu d'exécution du placement appartient au Tribunal de protection (ch. 3), invité le corps médical à réévaluer la nécessité de la prise d'un traitement médicamenteux par la personne concernée (ch. 4), rappelé que l'ordonnance était immédiatement exécutoire nonobstant recours (ch. 5) et rappelé la gratuité de la procédure (ch. 6).

En substance, le Tribunal de protection a retenu que A______ était connue pour un trouble de la personnalité émotionnellement labile ayant justifié à plusieurs reprises son hospitalisation en milieu psychiatrique. L'intéressée avait effectué plusieurs allers-retours entre la Suisse et l'Allemagne depuis 2023 et s'était retrouvée à Genève sans revenus et sans lieu où résider. Elle tenait des propos délirants relatifs à l'ancien domicile conjugal, qu'elle revendiquait sans droit. Par courrier du 12 novembre 2024, elle avait traité les membres du Tribunal de protection d'assassins et avait injurié deux membres du Ministère public. Le placement au sein de la Clinique de B______, ordonné par décision rendue sur mesures superprovisionnelles le 12 juin 2024, avait été exécuté le 30 novembre 2024 à la suite d'une visite inopinée de A______ à ses deux enfants, alors que, sous le coup de mesures de substitution pénale, interdiction lui avait été faite de les approcher. L'intéressée avait fugué à plusieurs reprises de la Clinique et refusait d'être expertisée; aucun traitement médicamenteux n'avait été mis en place.

L'intéressée souffrait toujours de troubles psychiatriques, dont elle était anosognosique. Aucun médicament ne lui avait été prescrit, au motif que, selon le corps médical, il n'était pas certain qu'elle puisse en tirer des bénéfices, alors même que le dossier médical des précédentes hospitalisations à T______ et les éléments médicaux contenus dans la procédure démontraient le contraire. En cas de levée du placement, les médecins de la Clinique de B______ avaient indiqué qu'un suivi ambulatoire était nécessaire, lequel ne pouvait toutefois pas être mis en place en raison de l'absence d'alliance thérapeutique et de l'opposition de la concernée. Selon le Tribunal de protection, comprenant en son sein un médecin-psychiatre chevronné, la question de l'introduction d'un traitement médicamenteux devait être réévaluée, notamment dans le cadre de l'expertise en cours, qu'il était important de pouvoir diligenter. A______ était de surcroît sans domicile fixe à Genève et sans ressources financières; elle vivait par ailleurs une période déstabilisante en raison du décès de son ex-mari et la décision judiciaire visant à désigner des personnes tierces en qualité de représentantes de son fils encore mineur. Les troubles dont souffrait l'intéressée se traduisaient notamment par l'absence de compréhension des retombées judiciaires en cas de violation du cadre pénal qui lui avait été fixé et de l'impossibilité d'entendre le refus exprimé par ses enfants de la revoir, même dans un cadre médiatisé. Il apparaissait par conséquent que A______ présentait un besoin d'assistance, ne pouvant lui être fournie d'une autre manière que par une hospitalisation non volontaire. Dans l'attente du rapport d'expertise, il se justifiait de confirmer le placement sur mesures provisionnelles.

C.           a. Le 11 décembre 2024, A______ a formé recours devant la Chambre de surveillance de la Cour de justice (ci-après: la Chambre de surveillance) contre l'ordonnance DTAE/9245/2024 du 10 décembre 2024, concluant à la levée immédiate de la mesure de placement. Elle a notamment allégué que son séjour au sein de la Clinique de B______ nuisait à sa santé. Elle a fait état de "tortures criminelles" et de "torture de couper les liens fondamentaux entre mère-enfant"; la curatelle était "aussi un crime", son dernier curateur lui ayant "volé toutes ses affaires, habits, meubles, LPP, pensions, droits". Elle a en outre fait grief aux juges de ne pas respecter les droits de l'homme et les droits des enfants et des familles. Elle a allégué avoir écrit à plusieurs Conseillers d'Etat, ainsi qu'à l'avocat qui manipulait son fils contre elle et désespérait de constater que personne "ne lève sa voix; que tout le monde se comporte comme EICHMANN de ne pas se sentir concerné". Elle demandait à la Chambre de surveillance de lever immédiatement la mesure et de "réparer les dégâts c'est-à-dire de [me]payer [mon] appartement que [j'avais] obtenu dans la convention de séparation 2013 plus les pensions".

b. Le juge délégué de la Chambre de surveillance a tenu une audience le
17 décembre 2024.

A______ a persisté dans les termes de son recours. Elle a expliqué ne suivre aucun traitement; elle n'en avait d'ailleurs jamais pris, y compris lors de ses précédentes hospitalisations. Les problèmes ne se réglaient pas en prenant des médicaments. Elle avait juste besoin de récupérer ses "habitations", sa pension et surtout ses enfants. En cas de levée de la mesure, elle entendait continuer de lutter afin de récupérer ce qu'on lui avait pris. Etant libre de voyager, elle pouvait tout aussi bien rester à Genève ou se rendre en Allemagne, pays dans lequel elle était domiciliée et où elle vivait avec sa mère. Elle se faisait du souci pour ses enfants, qui étaient manipulés par Me U______ et était disposée à entamer une thérapie familiale avec eux. En cas de levée de la mesure, elle pourrait être hébergée par V______, une amie, ou à l'hôtel de H______, propriété d'un ami.

La curatrice de la mesure a expliqué que des démarches avaient été faites pour annoncer aux autorités le retour à Genève de A______, ainsi que pour qu'elle obtienne une rente de veuve, à laquelle elle semblait avoir droit. Les arriérés des primes d'assurance maladie allaient également être réglés. Si la mesure de placement était levée, A______ devrait être logée dans un hôtel.

La Dre S______ a confirmé ses déclarations faites devant le Tribunal de protection. A son arrivée, A______ présentait le même tableau que lors de ses quatre hospitalisations précédentes, à savoir des troubles de la personnalité paranoïaque. Elle adoptait un comportement revendicateur, s'estimant lésée et avait une appétence pour les recours. Depuis son arrivée à la Clinique de B______, son état n'avait pas évolué; elle présentait toujours les mêmes éléments connus comme étant chroniques. Aucun traitement neuroleptique n'avait été proposé à A______, dans la mesure où un tel traitement n'était pas efficace contre les troubles de la personnalité; elle ne présentait par ailleurs pas de trouble délirant, ni de trouble psychotique. La Clinique de B______ avait pris contact avec le CURML, lequel avait indiqué que l'expertise ordonnée par le Tribunal de protection était "en cours". Toutefois, l'expert n'avait pas encore rencontré A______ et il semblait absent en l'état. Selon la Dre S______, il n'y avait pas d'indication médicale et thérapeutique à la poursuite de l'hospitalisation. C'était d'ailleurs la conclusion à laquelle les équipes médicales étaient parvenues lors des précédentes hospitalisations. La patiente était en effet sortie de la Clinique sans traitement de fond. Une psychothérapie paraissait indiquée, mais A______ y était opposée. Actuellement, cette dernière ne présentait pas de crise suicidaire et n'avait pas montré de signes d'auto-agressivité. Durant les quinze jours d'hospitalisation, elle n'avait pas non plus fait preuve d'hétéro-agressivité. Ainsi et dans l'immédiat, elle ne présentait pas de tels risques. Les menaces suicidaires contenues dans les courriels que A______ adressait à de nombreuses personnes et institutions n'étaient pas des menaces "authentiques", mais une manière d'alerter l'opinion; il s'agissait du mode de fonctionnement de l'intéressée. Si la mesure de placement devait être maintenue, l'équipe médicale de la Clinique de B______ serait "embêtée" sur le plan thérapeutique. Elle continuerait de proposer des entretiens à A______ et la question de la médication forcée devrait être discutée par l'équipe pluridisciplinaire. La Dre S______ et ses supérieurs étaient toutefois d'avis qu'une telle médication n'aurait qu'une efficacité très modérée. Selon la Dre S______ et contrairement à ce que le Tribunal de protection avait retenu, il n'y avait pas eu de traitement par neuroleptiques lors des hospitalisations de l'intéressée à T______ en 2019 et 2022, selon le dossier qu'elle avait pu consulter. La Dre S______ n'avait pas eu accès à toutes les expertises réalisées, mais elle avait pu consulter les courriers d'hospitalisation, qui mentionnaient tous un trouble de la personnalité paranoïaque. Lors d'une précédente hospitalisation à la Clinique de B______, une petite dose de Risperdal avait été administrée à A______; il n'y avait pas eu d'efficacité et cette médication avait été abandonnée.

V______, qui s'est présentée spontanément à l'audience, a été entendue. Elle a indiqué être une amie de la famille [de] A______ depuis quelques années; elle connaissait bien la mère de A______. Elle les avait déjà hébergées chez elle à W______ [GE]. Elle pensait pouvoir héberger A______ à sa sortie de la Clinique de B______, même si elle devait au préalable en parler à son époux; elle pensait toutefois qu'il serait d'accord, dans la mesure où ils avaient suffisamment de place.

Le curateur de représentation, représenté par Me X______, a indiqué s'interroger sur l'utilité du maintien de la mesure, si rien n'était mis en œuvre au sein de la Clinique de B______.

Au terme de l'audience, la cause a été gardée à juger.

D.           Le 19 décembre 2024, le Tribunal de protection a transmis à la Chambre de surveillance copie d'un courriel du 18 décembre 2024 reçu du CURML et signé par la Dre Y______, experte. Celle-ci indiquait être en charge de l'expertise sollicitée par le Tribunal de protection, avec le Dr Z______. Ils avaient rencontré A______ le même jour; l'entretien avait été bref, car elle avait refusé d'y participer. Selon eux, l'intéressée avait besoin de soins et un placement à des fins d'assistance était nécessaire. Leur rapport d'expertise serait rendu d'ici fin janvier 2025.

EN DROIT

1. Les décisions de l'autorité de protection de l'adulte peuvent faire l'objet d'un recours devant le juge compétent (art. 450 al. 1 CC). Dans le domaine du placement à des fins d'assistance, le délai de recours est de dix jours à compter de la notification de la décision entreprise (art. 450b al. 2 CC). Le recours formé contre une décision prise dans le domaine du placement à des fins d'assistance ne doit pas être motivé (art. 450e al. 1 CC).

En l'espèce, le recours a été formé dans le délai utile de dix jours et devant l'autorité compétente (art. 72 al. 1 LaCC). Il est donc recevable à la forme.

2. La recourante a conclu à la levée immédiate de son placement.

2.1 Aux termes de l'art. 426 al. 1 CC, une personne peut être placée dans une institution appropriée lorsque, en raison de troubles psychiques, d'une déficience mentale ou d'un grave état d'abandon, l'assistance ou le traitement nécessaire ne peuvent lui être fournis d'une autre manière (al. 1). La personne concernée est libérée dès que les conditions de placement ne sont plus remplies (al. 3). La personne concernée ou l'un de ses proches peut demander sa libération en tout temps. La décision doit être prise sans délai (al. 4).

La loi exige la réalisation de trois conditions cumulatives, à savoir une cause de placement (troubles psychiques, déficience mentale ou grave état d'abandon), un besoin d'assistance ou de traitement ne pouvant lui être fourni autrement et l'existence d'une institution appropriée permettant de satisfaire les besoins d'assistance de la personne placée ou de lui apporter le traitement nécessaire (MEIER/LUKIC, Introduction au nouveau droit de la protection de l'adulte, p. 302, n. 666).

2.2 En l'espèce, la recourante est connue depuis plusieurs années pour des troubles du comportement, ayant mené à diverses hospitalisations. Elle a fait l'objet de plusieurs expertises et des diagnostics différents ont été posés au fil des années. Entendue tant par le Tribunal de protection que par la Chambre de surveillance, la Dre S______ a mentionné un diagnostic de trouble de la personnalité. Selon elle et selon ses supérieurs, un éventuel traitement neuroleptique ne serait pas susceptible d'améliorer l'état de la recourante et il n'existait pas d'indication médicale et thérapeutique à son hospitalisation.

Cet avis ne semble toutefois pas être partagé par les experts du CURML mis en œuvre par le Tribunal de protection. De l'avis de ces derniers, qu'ils ont exprimé dans leur courrier adressé au Tribunal de protection le 18 décembre 2024, la recourante a besoin de soins et un placement à des fins d'assistance est nécessaire.

Si, certes, la co-existence d'avis médicaux aussi différents et tranchés interpelle, il n'en demeure pas moins que des experts, extérieurs à l'institution qui prend en charge la recourante, sont d'avis que le placement ordonné est nécessaire, de même que l'administration de soins.

Au vu de ce qui précède, c'est à juste titre que le Tribunal de protection a, sur mesures provisionnelles, confirmé le placement à des fins d'assistance prononcé en faveur de la recourante. Le recours sera par conséquent rejeté.

3. La procédure de recours est gratuite (art. 22 al. 4 LaCC).

 

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé par A______ contre l'ordonnance DTAE/9245/2024 rendue le 10 décembre 2024 par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans la cause C/22025/2015.

Au fond :

Le rejette.

Dit que la procédure est gratuite.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, juges; Madame Barbara NEVEUX, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.