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Décisions | Chambre de surveillance

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C/3574/2024

DAS/108/2024 du 07.05.2024 ( ARC ) , REJETE

Normes : LPA.4.al1; CO.931; CO.929.al1
En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/3574/2024-CS DAS/108/2024

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU MARDI 7 MAI 2024

 

Recours (C/3574/2024-CS) formé en date du 15 février 2024 par A______, titulaire de la raison individuelle B______, A______ sise ______ (Genève).

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier du 8 mai 2024 à :

- B______, A______
______, ______.

- REGISTRE DU COMMERCE
Case postale 3597, 1211 Genève 3.

- DEPARTEMENT FEDERAL DE JUSTICE ET POLICE
Office fédéral de la justice, 3003 Berne.

 


EN FAIT

A. a) A______ est inscrit au Registre du commerce en qualité de titulaire de la raison individuelle B______, A______ depuis le ______ 2011 à l'adresse "route 1______ no. ______, [code postal] C______ [GE]" (IDE CHE-2______). Jusqu'en ______ 2024, le Registre du commerce indiquait, comme adresse de l'entreprise individuelle susmentionnée, "route 1______ no. ______, [code postal] C______".

b) Par réquisition datée du 4 janvier 2017, reçue le 20 janvier 2017 par le Registre du commerce, A______ a sollicité une modification de l'inscription concernant l'adresse principale ainsi que l'adresse postale secondaire de la raison individuelle B______, A______.

Il indiquait que, depuis le ______ 2017, le siège de l'entreprise individuelle susmentionnée avait été transféré à l'adresse suivante:

Rue 3______ no. ______, [code postal] C______,

et que l'adresse postale secondaire était la suivante:

A______, Rue 4______ no. ______, [code postal] D______ [GE].

c) Par courrier du même jour, le Registre du commerce a répondu à A______ que sa demande était tenue en suspens. Il l'a invité à fournir une copie de son contrat de bail, sous-location ou mise à disposition afin de démontrer qu'il disposait de ses propres locaux à l'adresse de son siège. En outre, le Registre du commerce a indiqué avoir ignoré la mention "Rue 4______ no. ______" dans la mesure où celle-ci ne semblait correspondre à aucune adresse valable.

d) Par courrier du 8 février 2018, le Registre du commerce a transmis à A______, à l'adresse inscrite au Registre (route 1______ no. ______, [code postal] C______), une demande de mise à jour de son inscription. Ce courrier a été retourné par la Poste muni de la mention "Le destinataire est introuvable à l'adresse indiquée".

e) Le 19 février 2018, le Registre du commerce a transmis à A______ une nouvelle réquisition, à sa nouvelle adresse présumée (rue 3______ no. ______, [code postal] C______), en le priant d'y donner suite, faute de quoi son entreprise ferait l'objet d'une sommation conformément à l'art. 153 ORC.

f) Le 25 juin 2018, A______ a retourné la réquisition au Registre du commerce, indiquant la nouvelle adresse (rue 3______ no. ______, [code postal] C______) et en y ajoutant la mention d'une adresse postale à "Rue 4______ no. ______, [code postal] D______".

g) Par courrier du 19 juillet 2018, A______ a confirmé qu'il refusait l'inscription d'une adresse postale autre que celle indiquée dans la réquisition du 25 juin 2018. Pour ce qui concernait l'adresse de son siège, la mise à disposition des locaux résultait d'un accord verbal, de sorte que l'attestation qu'il avait fournie était une preuve suffisante de l'existence d'un bureau/local et de son droit de l'utiliser.

h) Par courrier du 25 juillet 2018, le Registre du commerce a indiqué maintenir sa position en ce sens qu'il ne ferait pas figurer uniquement la mention "Rue 4______ no. ______" mais qu'il était possible de tenter une inscription du type "4______ de case postale no. ______, [code postal] D______", cette modification devant toutefois être soumise à l'approbation de l'Office fédéral. Concernant l'adresse principale, A______ était prié de fournir une attestation en original émanant de E______ (l'exemplaire joint au courrier du 19 juillet 2018 étant une copie) confirmant la mise à disposition d'un bureau, avec une date rectifiée (l'exemplaire transmis indiquait un début le 1er janvier 2007 en lieu et place du 1er janvier 2017).

i) Par courrier daté du 27 mai 2019, portant le timbre humide du Registre du commerce du 31 mai 2019, A______ indiquait transmettre le courrier de la Poste du 24 février 2015 concernant la location d'une boîte postale à l'adresse "Rue 4______ no. ______" ainsi qu'une attestation originale signée par E______ concernant la mise à disposition des locaux à la rue 3______ no. ______ à C______.

Tel que produit par le Registre du commerce dans la procédure, ce courrier ne comporte aucune annexe. Tel que produit par A______, il comporte en annexe une attestation de E______ datée du 19 mai 2019.

j) Le 25 janvier 2024, le Registre du commerce a adressé à A______ une sommation fondée sur une carence pour défaut d'adresse valable.

k) Entre le 2 et le 7 février 2024, le Registre du commerce et A______ ont échangé des emails, desquels il ressort que le premier cité sollicitait du second les pièces justificatives nécessaires à l'inscription de l'adresse du siège, tandis que A______ prétendait avoir déjà communiqué l'attestation idoine en annexe de son courrier du 27 mai 2019, de même que le contrat conclu avec la Poste pour la location d'une boîte postale à D______, indiquant l'adressage à utiliser.

Par email du 7 février 2024 adressé au Registre du commerce, A______ a "demand[é] encore une fois de donner suite à [sa] demande du 14 [recte: 4] janvier 2017 complétée par [ses] documents le 27 mai 2019 et d'annuler [sa] sommation.

B. a) Par acte expédié le 15 février 2024 au greffe de la Cour de justice, A______ a déclaré former recours contre la "non-exécution de [sa] requête en modification du 4 janvier 2017", la "sommation du RC du 25 janvier 2024" et le "courrier du RC du 2 février 2024", concluant à ce que la Chambre de surveillance de la Cour de justice annule la sommation susmentionnée et les frais qui s'y rapportent, ordonne au Registre du commerce de procéder à l'inscription des adresses indiquées dans sa requête du 4 janvier 2017 et condamne le Registre du commerce au paiement d'une indemnité de 500 fr. en sa faveur à titre de dédommagement "pour le retard d'enregistrement de [sa] nouvelle adresse, pour les menaces proférées et le travail et frais liés à la présente procédure".

b) Par réponse expédiée le 4 avril 2024 au greffe de la Cour de justice, le Registre du commerce a conclu au rejet du recours de A______, sous suite de frais judiciaires.

Il a indiqué qu'à la suite d'un échange téléphonique intervenu le 20 février 2024, A______ avait accepté de faire parvenir une nouvelle réquisition en vue de mettre à jour "au moins" son adresse principale. L'inscription de la nouvelle adresse du siège de B______, A______ (rue 3______ no. ______, [code postal] C______) avait été portée au journal du 6 mars 2024.

Le Registre du commerce a encore précisé avoir annulé, "à bien plaire", la sommation du 24 [recte: 25] janvier 2024 et les frais y relatifs, de même qu'il avait été renoncé à prononcer une amende d'ordre.

c) A______ a répliqué par acte expédié le 17 avril 2024. Il a conclu à ce que le montant de son dédommagement soit porté à 10'000 fr. et persisté dans ses conclusions pour le surplus.

d) Par avis du 24 avril 2024, la Cour de justice a informé les parties de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 Les décisions du Registre du commerce peuvent faire l'objet d'un recours auprès de l'autorité de surveillance dudit registre, qui, dans le canton de Genève, est la Chambre de surveillance de la Cour de justice (art. 942 al. 2 CO; art. 126 al. 1 let. d LOJ).

La loi genevoise sur la procédure administrative (LPA; E 5 10) s'applique à la prise de décision par les autorités administratives et les juridictions administratives (art. 1 LPA). Sont réputées juridictions administratives les autorités que le droit fédéral ou cantonal charge du contentieux administratif en les désignant comme autorité de recours (art. 6 al. 1 let. e LPA). Tel est le cas de la Cour de justice lorsqu'elle fonctionne sur recours comme autorité de surveillance du Registre du commerce (cf. notamment DAS/207/2014 c.1.1).

Le délai de recours est de trente jours et court dès le lendemain de la notification de la décision (art. 942 al. 1 CO; art. 62 al. 3 LPA; art 17 al. 1 LPA).

A teneur de l'art. 4 al. 1 LPA, sont considérées comme des décisions, les mesures individuelles et concrètes prises par l’autorité dans les cas d’espèce fondées sur le droit public fédéral, cantonal, communal et ayant pour objet de créer, de modifier ou d’annuler des droits ou des obligations (let. a), de constater l’existence, l’inexistence ou l’étendue de droits, d’obligations ou de faits (let. b); de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou obligations (let. c).

Au sens de l'art. 4 al. 4 LPA, lorsqu'une autorité mise en demeure refuse sans droit de statuer ou tarde à se prononcer, son silence est assimilé à une décision. L'art. 62 al. 6 LPA prescrit que dans ces cas, le recours est ouvert en tout temps.

1.2 Dans le cas d'espèce, le recours vise tout d'abord une inaction alléguée du Registre du commerce, consistant à ne pas exécuter une réquisition de modification d'une inscription. La question de savoir si le recourant a valablement mis en demeure le Registre du commerce de s'exécuter au sens de l'art. 4 al. 4 LPA peut demeurer ouverte, le recours sur ce point devant de toute façon être écarté pour d'autres motifs, comme cela découle de ce qui suit (cf. consid. 2.2 infra).

Le recourant déclare également recourir contre la sommation du Registre du commerce du 25 janvier 2024, dont il sollicite l'annulation. Or, sans qu'il ne soit nécessaire d'examiner les conditions de recevabilité d'un tel recours, il sied d'entrée de cause de constater qu'il est dépourvu d'objet, puisque le Registre du commerce a déclaré avoir annulé ladite sommation ainsi que les frais y relatifs.

Enfin, en tant que le recourant déclare former recours contre "le courrier du RC du 2 février 2024", il est observé qu'il se réfère à un email par lequel le Registre du commerce explique sa position et invite le recourant à donner suite à la sommation du 25 janvier 2024. Cette communication ne saurait être constitutive d'une décision au sens de l'art. 4 LPA. Le recours n'est par conséquent pas recevable en tant qu'il vise l'email du 2 février 2024.

2. Le recourant fait grief au Registre du commerce de pas avoir donné suite, en temps voulu, à sa réquisition tendant à faire modifier l'adresse du siège de son entreprise individuelle ainsi qu'à faire inscrire une adresse secondaire telle que libellée dans dite réquisition.


 

2.1

2.1.1 Selon l'art. 931 CO, toute personne physique qui exploite une entreprise et qui, au cours du précédent exercice, a réalisé un chiffre d'affaires d'au moins 100'000 francs, doit requérir l'inscription de son entreprise individuelle au registre du commerce au lieu de l'établissement (…) (al. 1). Selon l'al. 3 de cette disposition, les entreprises individuelles et les succursales qui ne sont pas soumises à l'obligation de s'inscrire peuvent requérir leur inscription au registre du commerce. Dans ce dernier cas, le registre du commerce se contente en général de s'appuyer sur la demande présentée, sauf lorsque les conditions à l'inscription ne sont manifestement pas remplies (Siffert, Berner Kommentar, OR-Handelsregister, 2021, Nr 9 und 31 ad art. 931) (cf. art. 37 al.1 ORC).

Selon l'art. 929 al. 1 CO, toutes les inscriptions au registre du commerce doivent être conformes à la vérité et ne rien contenir qui soit de nature à induire en erreur ou qui soit contraire à un intérêt public.

Il en va de la confiance dans les informations publiées par les registres publics (Wahrheitsgebot), de la sécurité du droit (Täuschungsverbot) et de la sécurité des transactions (Verkehrsschutz), telles que postulées par l'art 9 al. 1 CC (Siffert, op. cit. Nr 4 ss ad art. 929).

Dans cette optique, l'art. 937 CO stipule que les autorités du registre du commerce vérifient que les conditions légales requises pour une inscription sont remplies, notamment que la réquisition et les pièces justificatives ne dérogent pas à des dispositions impératives et que leur contenu est conforme aux exigences légales.

2.1.2 Il découle des garanties générales de procédure exposées aux art. 29 al. 1, 29a et 30 al. 1 Cst. que toute personne qui sollicite une décision a le droit, sinon d'obtenir que celle-ci soit effectivement satisfaite, à tout le moins qu'elle soit honorée d'une réponse (arrêt 6B_161/2009 du 7 mai 2009 consid. 2.1; Malinverni/Hottelier/Hertig Randall/Flückiger, Droit constitutionnel suisse, vol. II: Les droits fondamentaux, 2021, n° 1357 p. 671).

Aux termes de l'art. 29 al. 1 Cst., toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable. Il y a déni de justice formel lorsqu'une autorité n'applique pas ou applique d'une façon incorrecte une règle de procédure, de sorte qu'elle ferme l'accès à la justice au particulier qui, normalement, y aurait droit. L'autorité qui se refuse à statuer, ou ne le fait que partiellement, viole l'art. 29 al. 1 Cst. (cf. ATF 144 II 184 consid. 3.1 et les références citées).

2.1.3 En procédure administrative genevoise, l’autorité établit les faits d’office. Elle n’est pas limitée par les allégués et les offres de preuves des parties (art. 19 LPA).

L’autorité de recours doit en principe prendre en compte les faits et moyens de preuve qui surviennent après le dépôt du mémoire de recours et l’échange des écritures s’ils sont pertinents. De même, elle doit tenir compte de modifications des circonstances qui interviennent en cours de procédure (ATA/751/2023 du 11 juillet 2023 consid. 2.1 et l’arrêt cité; Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2e éd., 2015, p. 618).

2.2

2.2.1 Le Registre du commerce soutient, sans être contredit, que le recourant a accepté, après un échange téléphonique survenu le 20 février 2024, de signer une nouvelle réquisition afin de mettre à jour l'adresse principale, "sans ajout d'une adresse secondaire avec le terme "4______"".

Portée au journal du 6 mars 2024, l'inscription de la nouvelle adresse principale apparaît désormais au Registre. Cette inscription rend sans objet le recours sur ce point, le recourant n'ayant plus d'intérêt actuel et pratique à faire constater que le refus du Registre du commerce de donner suite à sa réquisition (cf. consid. 1.2), respectivement le retard allégué dans l'exécution de l'inscription, constituerait un déni de justice. La demande d'indemnisation pour "le retard d'enregistrement" n'y change rien, dès lors que le recourant ne démontre, ni même n'allègue l'existence d'un dommage subi à ce titre.

2.2.2 En ce qui concerne l'adresse secondaire à D______, il ressort de la procédure que le Registre du commerce a indiqué au recourant, par courriers des 20 janvier 2017 et 25 juillet 2018, pourquoi il refusait d'inscrire l'adresse telle que libellée par le recourant dans ses réquisitions des 14 janvier 2017 et 25 juin 2018. Il est vrai que le Registre du commerce n'a pas réagi à la réponse du recourant intervenue 10 mois plus tard, le 31 mai 2019. Cela étant, ce dernier n'a pas protesté contre l'absence de suite donnée, ne relançant la discussion à ce propos qu'en février 2024, après réception de la sommation du Registre du commerce visant l'inscription de l'adresse du siège. S'en est suivi un échange d'emails à teneur desquels chaque partie a maintenu sa position concernant la validité de l'adresse "Rue 4______ no. ______". Dans ce contexte, on ne saurait imputer une inaction fautive à l'autorité intimée, qui n'a pas manqué de communiquer et de motiver son refus d'inscrire l'adresse requise.

Pour le surplus, après le dépôt du recours, le recourant a déposé une nouvelle réquisition comportant uniquement une demande de modification de l'adresse principale de sa raison individuelle. Le Registre du commerce pouvait en déduire que cette réquisition remplaçait celles des 14 janvier 2017 et 25 juillet 2018 et qu'ainsi, le recourant se contentait de requérir la modification de l'adresse principale tout en renonçant à l'adresse secondaire litigieuse.

Considérant ce qui précède, le grief de déni de justice est infondé.

Le recours sera par conséquent rejeté dans la mesure où il est recevable.

3. Les frais de procédure, fixés à 500 fr., seront mis à la charge du recourant (art. 941 al. 1 CO; art. 3 OEmol-RC; art. 87 LPA).

Il n'y a pas lieu à l'allocation de dépens.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


A la forme et au fond :

Rejette, dans la mesure de sa recevabilité, le recours formé par A______ le 15 février 2024 contre la "non-exécution" de la réquisition du 4 janvier 2017, la sommation du Registre du commerce du 25 janvier 2024 et le courrier du Registre du commerce du 2 février 2024.

Le déclare irrecevable pour le surplus.

Sur les frais :

Arrête les frais à 500 fr. et les met à la charge de A______.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE et Stéphanie MUSY, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.