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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/14072/2024

ACJC/237/2025 du 18.02.2025 sur JTBL/1052/2024 ( SBL ) , IRRECEVABLE

Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/14072/2024 ACJC/237/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU MARDI 18 FEVRIER 2025

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______, appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 14 octobre 2024,

et

FONDATION B______, sise c/o C______ [banque], ______, intimée, représentée par D______ [régie immobilière].

 


Vu, EN FAIT, le jugement JTBL/1052/2024 du 14 octobre 2024, par lequel le Tribunal des baux et loyers a condamné A______ à évacuer immédiatement de sa personne et de ses biens ainsi que toute autre personne faisant ménage commun avec elle l'appartement de deux pièces au deuxième étage ainsi que la cave attribuée, situés dans l'immeuble sis rue 1______ no. ______ à Genève (ch. 1 du dispositif), autorisé la FONDATION B______ à requérir l'évacuation par la force publique de A______ dès l'entrée en force du jugement (ch. 2), condamné la précitée à verser à la FONDATION B______ 8'971 fr. 75 (ch. 3), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4) et dit que la procédure était gratuite (ch. 5);

Attendu que le Tribunal a considéré que les conditions de l'art. 257d al. 1 et 2 CO étaient réalisées, qu'en restant dans les locaux A______ violait l'art. 267 al. 1 CO, que celle-ci n'expliquait pas en quoi les dispositions constitutionnelles genevoises qu'elle invoquait permettraient de surseoir à l'évacuation, qu'il serait fait droit aux conclusions en exécution de l'évacuation, que A______ restait devoir, aux termes des pièces produites, 8'971 fr. 75 (étant précisé que le montant du loyer et des charges avait été fixé en dernier lieu à 1'148 fr. par mois) au titre d'indemnités pour occupation illicite;

Que, par acte du 9 décembre 2025 à la Cour de justice, A______ a formé appel contre le jugement précité, concluant à l'annulation de celui-ci, cela fait au constat de la nullité de la résiliation, subsidiairement au déboutement de la FONDATION B______ des fins de ses conclusions en évacuation, plus subsidiairement à l'exécution de celle-ci à partir du 1er mai 2025;

Qu'elle a requis le bénéfice de l'effet suspensif et que la Cour a, par arrêt du 18 décembre 2024, constaté la suspension de la force jugée et du caractère exécutoire du jugement précité et dit que la requête était sans objet;

Qu'elle a répété invoquer le droit constitutionnel au logement comme articulé devant le Tribunal, qu'elle a allégué nouvellement avoir connu des difficultés financières dans son activité professionnelle d'indépendante exercée à proximité de son logement, avoir une situation familiale délicate vu la santé de sa mère et la situation de rentier AI de son frère, et qu'elle a encore ajouté : "Mon ancien conseil estime que la lettre de la régie adressée le 1er septembre 2023 n'était pas suffisamment claire, puis que n'ayant pas eu droit à des bulletins de versement libellés par la régie les montants attribués ne sont pas facilement identifiables";

Que la FONDATION B______ a conclu à la confirmation de la décision attaquée;

Que, par avis du 13 janvier 2024, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger;

Qu'il résulte de la procédure de première instance que la FONDATION B______ a, le 21 juin 2024, saisi le Tribunal d'une requête, dirigée contre A______, en évacuation pour défaut de paiement du loyer avec exécution directe, et en paiement de 7'415 fr. 80, formée par la voie de la protection du cas clair, s'agissant de l'appartement de deux pièces au deuxième étage et une cave, sis dans l'immeuble rue 1______ no. ______ à Genève;

Qu'elle a déposé des pièces, dont un avis comminatoire du 1er septembre 2023 mettant en demeure A______ de régler dans les trente jours 5'134 fr. 55 à titre d'arriéré de loyers et de charges pour la période de mai à septembre 2023 et l'informant de son intention de résilier le bail conformément à l'art. 257d CO à défaut de paiement intégral du montant réclamé dans le délai imparti, et un avis officiel du 12 octobre 2023 portant résiliation du bail pour le 30 novembre 2023;

Qu'à l'audience du Tribunal du 14 octobre 2024, la FONDATION B______ a amplifié ses conclusions d'une conclusion en paiement de l'arriéré à 8'971 fr. 75, que A______, représentée par l'ASLOCA, a fait valoir exercer son activité professionnelle à proximité de son logement, être prête à faire une proposition d'arrangement et a invoqué le droit constitutionnel au logement, sur quoi la cause a été gardée à juger;

Considérant, EN DROIT, que la voie de l'appel est ouverte contre les décisions d'évacuation, lorsque la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC), alors que la voie du recours est ouverte contre les décisions du Tribunal de l'exécution (art. 309 let. a CPC; art. 319 let. a CPC);

Que pour calculer la valeur litigieuse dans les actions en expulsion initiées selon la procédure de l'art. 257 CPC, il faut distinguer les cas où seule est litigieuse l'expulsion en tant que telle, de ceux où la résiliation l'est également à titre de question préjudicielle;

Que s'il ne s'agit que de la question de l'expulsion, l'intérêt économique des parties réside dans la valeur que représente l'usage des locaux pendant la période de prolongation résultant de la procédure sommaire elle-même, laquelle est estimée à six mois. Si en revanche la résiliation des rapports de bail est également contestée, la valeur litigieuse est égale au loyer pour la période minimale pendant laquelle le contrat subsiste si la résiliation n'est pas valable, période qui s'étend jusqu'à la date pour laquelle une nouvelle résiliation peut être signifiée; comme il faut prendre en considération la période de protection de trois ans prévue à l'art. 271a al. 1 let. e CO, la valeur litigieuse correspondra en principe au montant du loyer brut (charges et frais accessoires compris) pendant trois ans (ATF 144 III 346 consid. 1.2.1 et 1.2.2.3, JdT 2019 II 235 pp. 236 et 239; arrêt du Tribunal fédéral 4A_376/2021 du 7 janvier 2022 consid.1; lachat, Procédure civile en matière de baux et loyers, 2019, pp. 69-70);

Qu'en l'espèce, il ressort des explications de la locataire qu'elle conteste la résiliation de son bail, qu'au vu du montant du loyer, la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr, de sorte que la voie de l'appel est ouverte en ce qui concerne le prononcé de l'évacuation, l'exécution de celle-ci relevant du recours;

Que selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b);

Que s'agissant des vrais nova (echte Noven), la condition de nouveauté posée par la lettre b est sans autre réalisée et seule celle d'allégation immédiate doit être examinée. En ce qui concerne les pseudo nova (unechte Noven), il appartient au plaideur qui entend les invoquer devant l'instance d'appel de démontrer qu'il a fait preuve de la diligence requise, ce qui implique notamment d'exposer précisément les raisons pour lesquelles le moyen de preuve n'a pas pu être produit en première instance;

Qu'en ce qui concerne les vrais nova (echte Noven), le Tribunal fédéral a jugé que le requérant qui a succombé en première instance et a vu sa requête déclarée irrecevable ne peut pas produire en appel des pièces nouvelles, même s'il ne lui était pas possible de les produire devant le premier juge. Il lui est par contre loisible d'introduire une nouvelle fois sa requête en cas clair devant le premier juge (arrêt du Tribunal fédéral 4A_420/2012 du 7 novembre 2012 consid. 5);

Que cette interdiction ne concerne pas la partie requise, qui n'a pas introduit la requête d'expulsion, et que l'art. 317 al. 1 CPC s'applique donc pleinement à la locataire qui a été attraite en première instance par la requête en cas clair de la bailleresse;

Qu'en vertu de l'art. 311 al. 1 CPC, il incombe à l'appelant de motiver son appel, que selon la jurisprudence, il doit démontrer le caractère erroné de la motivation de la décision attaquée et son argumentation doit être suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision qu'il attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique, que même si l'instance d'appel applique le droit d'office (art. 57 CPC), le procès se présente différemment en seconde instance, vu la décision déjà rendue, que l'appelant doit donc tenter de démontrer que sa thèse l'emporte sur celle de la décision attaquée, qu'il ne saurait se borner à simplement reprendre des allégués de fait ou des arguments de droit présentés en première instance, mais il doit s'efforcer d'établir que, sur les faits constatés ou sur les conclusions juridiques qui en ont été tirées, la décision attaquée est entachée d'erreurs, qu'il ne peut le faire qu'en reprenant la démarche du premier juge et en mettant le doigt sur les failles de son raisonnement, qu'à défaut, l'appel est irrecevable (arrêt du Tribunal fédéral 4A_621/2021 du 30 août 2022 consid. 3.1);

Que l'appelante, représentée en première instance, n'a pas allégué au Tribunal sa situation familiale ni ses difficultés financières, ni le caractère supposément imprécis des bulletins de versement reçus ni l'absence prétendue de clarté du courrier du 1er septembre 2023, sans qu'elle n'expose ce qui l'aurait empêchée de le faire;

Qu'elle n'est ainsi pas recevable à soumettre ces allégués pour la première fois en appel, ce qui a pour conséquence qu'il ne sera pas entré en matière sur les prétentions qu'elle considère pouvoir en déduire;

Que, pour le surplus, elle ne développe pas de critique à l'encontre du raisonnement des premiers juges, se limitant à répéter se prévaloir du droit constitutionnel au logement, sans discuter la motivation retenue par le Tribunal à ce propos;

Que l'acte d'appel et de recours sont ainsi irrecevables, faute de motivation suffisante;

Qu'à teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :


Déclare irrecevables l'appel et le recours formés le 9 décembre 2024 par A______ contre le jugement rendu le 14 octobre 2024 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/14072/2024.

Dit que la procédure est gratuite.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN et Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Madame Nevena PULJIC et Madame
Sarah ZULIAN-MEINEN, juges assesseurs; Madame Victoria PALAZZETTI, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.