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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/8460/2024

ACJC/1168/2024 du 25.09.2024 ( SBL ) , IRRECEVABLE

Normes : CPC.319
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/8460/2024 ACJC/1168/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU MERCREDI 25 SEPTEMBRE 2024

 

Entre

A______ SA, sise ______, recourante contre une ordonnance rendue par le Tribunal des baux et loyers le 2 juillet 2024, représentée par Me Michael ANDERS, avocat, Boulevard des Tranchées 36, 1206 Genève,

et

B______ SA, sise ______, intimée, représentée par Me Jean-François MARTI, avocat, BM Avocats, quai Gustave-Ador 26, case postale 6253, 1211 Genève 6.

 


EN FAIT

A. Par ordonnance OTBL/125/2024 du 2 juillet 2024, reçue par A______ SA le 5 juillet 2024, le Tribunal des baux et loyers a notamment refusé d'ordonner la suspension de la présente procédure (ch. 1 du dispositif).

B. a. Le 15 juillet 2024, A______ SA a formé recours contre cette ordonnance, concluant à ce que la Cour de justice l'annule et ordonne la suspension de la présente cause jusqu'à droit définitif connu dans la cause C/1______/2024 pendante devant le Tribunal.

b. B______ SA a conclu le 24 juillet 2024 à ce que la Cour déclare le recours irrecevable, subsidiairement le rejette.

c. Les parties ont été informées le 22 août 2024 de ce que la cause était gardée à juger par la Cour.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier.

a. B______ SA est locataire d'un terrain nu sis rue 2______ no. ______, [code postal] C______ [GE], appartenant à la société D______ SA.

b. Le 1er janvier 2023, elle a sous-loué ce terrain à A______ SA pour une durée initiale allant jusqu'au 31 décembre 2032. Le loyer mensuel a été fixé à 21'500 fr., payable par mois et d'avance.

c. Le 12 mars 2024, B______ SA a résilié le bail de sous-location pour défaut de paiement du loyer.

d. Le 30 mars 2024, A______ SA a déposé par devant la Commission de conciliation en matière de baux et loyers une requête en contestation de ce congé. La procédure, portant la référence C/1______/2024, est actuellement pendante par devant le Tribunal.

e. Le 12 avril 2024, B______ SA a formé par devant le Tribunal une requête par voie de procédure sommaire, concluant à ce que celui-ci ordonne l'évacuation de A______ SA, l'exécution immédiate du jugement et condamne cette dernière à lui verser 43'000 fr., plus intérêts.

f. Lors de l'audience du Tribunal du 27 juin 2024, A______ SA a requis la suspension de la présente cause "jusqu'à droit de réponse".

B______ SA s'est opposée à la suspension.

La cause a été gardée à juger par le Tribunal à l'issue de l'audience.

EN DROIT

1.             1.1 La décision refusant la suspension de la cause est une ordonnance d’instruction qui peut faire l'objet du recours prévu par l'art. 319 let. b ch. 2 CPC (HALDY, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2019, n. 9 ad art. 126 CPC ; Colombini, Code de procédure civile : condensé de jurisprudence fédérale et vaudoise, 2018, § 6.3 ad art. 126 CPC).

Selon l’art. 319 let. b ch. 2 CPC, le recours est recevable contre les ordonnances d'instruction de première instance lorsqu'elles peuvent causer un préjudice difficilement réparable.

La notion de "préjudice difficilement réparable" est plus large que celle de "préjudice irréparable" consacrée par l'art. 93 al. 1 let. a LTF. Ainsi, elle ne vise pas seulement un inconvénient de nature juridique, mais toute incidence dommageable, y compris financière ou temporelle, pourvu qu'elle soit difficilement réparable. L'instance supérieure devra se montrer exigeante, voire restrictive, avant d'admettre la réalisation de cette condition, sous peine d'ouvrir le recours à toute décision ou ordonnance d'instruction, ce que le législateur a clairement exclu. Il s'agit de se prémunir contre le risque d'un prolongement sans fin du procès (ATF 138 III 378 consid. 6.3; 137 III 380 consid. 2; Colombini, Code de procédure civile, condensé de la jurisprudence fédérale et vaudoise, 2018, n° 4.1.3 ad art. 319 CPC; Jeandin, Commentaire romand, n° 22 ad art. 319 CPC).

Le préjudice sera ainsi considéré comme difficilement réparable s'il ne peut pas être supprimé ou seulement partiellement, même dans l'hypothèse d'une décision finale favorable au recourant (Reich, Schweizerische Zivilprozessordnung, n° 8 ad art. 319 CPC; Jeandin, op. cit., n° 22a ad art. 319 CPC).

En particulier, une décision de refus de suspension peut être remise en cause dans le cadre d'un appel ou un recours dirigé contre la décision finale (arrêts du Tribunal fédéral 5D_182/2015 du 2 février 2016 consid. 1.3; 5A_545/2017 du 13 avril 2018 consid. 3.2).

Le risque de ne pas obtenir gain de cause ne constitue pas un dommage difficile à réparer, mais un risque inhérent à toute procédure judiciaire. Un accroissement des frais ou une simple prolongation de la procédure ne représentent pas non plus un tel préjudice (Spühler, in Basler Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, n. 7 ad art. 319 CPC; Hoffmann-Nowotny, ZPO-Rechtsmittel, Berufung und Beschwerde, n. 25 ad art. 319 CPC).

Il appartient au recourant d'alléguer et d'établir la possibilité que la décision incidente lui cause un préjudice difficilement réparable, à moins que cela ne fasse d'emblée aucun doute (par analogie : ATF 134 III 426 consid. 1.2 et 133 III 629 consid. 2.3.1; Haldy, Commentaire romand, n. 9 ad art. 126 CPC).

1.2 En l'espèce, la recourante ne fait pas valoir qu'elle risquerait de subir un préjudice difficilement réparable au sens de l'art. 319 let. b ch. 2 CPC s'il n'était pas statué immédiatement sur la question de la suspension de la procédure.

L'on ne saurait par ailleurs considérer que l'existence d'un tel préjudice ne fait aucun doute.

Il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de déroger in casu au principe selon lequel les ordonnances d'instruction doivent être attaquées en même temps que le jugement au fond.

Le recours doit par conséquent être déclaré irrecevable, la recourante n'ayant pas établi que l'ordonnance querellée risquait de lui causer un préjudice difficilement réparable.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :


Déclare irrecevable le recours interjeté le 15 juillet 2024 par A______ SA contre l'ordonnance
OTBL/125/2024 rendue le 2 juillet 2024 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/8460/2024.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Monsieur Ivo BUETTI, président; Madame Pauline ERARD, Madame
Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Monsieur Jean-Philippe ANTHONIOZ, Monsieur Damien TOURNAIRE, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.