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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/935/2025

ATAS/907/2025 du 24.11.2025 ( LAA ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/935/2025 ATAS/907/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 24 novembre 2025

Chambre 16

 

En la cause

A______

représentée par Me Thierry STICHER, avocat

 

 

recourante

 

contre

AXA ASSURANCES SA
représentée par Mes Filip BANIC et Radivoje STAMENKOVIC, avocats

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. A______ (ci-après : l’assurée), née le ______ 1962, domiciliée en France, travaillait à plein temps en qualité d’assistante de direction au sein d’une succursale de Genève d’une société étrangère active dans le service, l’assistance et les conseils notamment financiers, depuis le 1er octobre 1992 (ci‑après : l’employeuse). À ce titre, elle était assurée contre le risque d’accident, professionnel ou non, auprès de AXA ASSURANCES SA (ci-après : AXA).

b. Le 19 mars 2016, l’assurée a été victime d’une collision frontale avec un véhicule circulant à contresens sur l’autoroute, ce qui a fait l’objet d’une déclaration de sinistre le 6 avril 2016.

B. a. Dans un rapport du 8 avril 2016, le Professeur B______, anesthésiste réanimateur au Centre hospitalier C______, a posé les diagnostics suivants : fracture fermée du fémur gauche dans sa partie distale, fracture de L4 instable (burst fracture), fracture du processus transverse de L3, fracture du corps du sternum, et discrète infiltration du mésentère sans lésion digestive évidente.

b. Du 15 juin au 6 septembre 2016, l’assurée a séjourné à la Clinique romande de réadaptation (ci-après : CRR). Dans un rapport du 27 octobre 2016, le docteur D______, spécialiste en médecine physique et réadaptation, a posé les diagnostics suivants : accident de la voie publique le 19 mars 2016 avec fracture instable L4 avec recul du mur postérieur traité par spondylodèse L3-L5 avec laminectomie L4 le 19 mars 2016, fracture du processus transverse D de L3, fracture uni-corticale antérieure du 1/3 supérieur du corps du sternum et postérieure du 1/3 moyen du corps du sternum, fracture ouverte type Gustilo I métaphyso-épiphysaire du fémur G traité par ORIF par plaque LISS du fémur G le 19 mars 2016, tunnel carpien ddc (EMG du 27 juin 2016), vertige paroxystique positionnel bénin à G, et dysparesthésies nocturnes aux MI d’origine indéterminée. La situation n’était pas stabilisée du point de vue médical. De nouvelles interventions étaient à envisager.

c. À la demande d’AXA, le 15 janvier 2020, l’assurée a été examinée par le docteur E______, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur.

Dans un rapport du 11 février 2020, l’expert a retenu les diagnostics de fracture diaphyse fémorale gauche et de fracture de la 4e vertèbre lombaire traitée par ostéosynthèse. Il a relevé que l’assurée avait repris son activité professionnelle à 30% dès le 1er novembre 2016, puis progressivement jusqu’à 60% à ce jour, entrecoupée de périodes d’arrêts en raison des différentes interventions chirurgicales. L’activité de secrétaire de direction était adaptée aux séquelles accidentelles. La consolidation osseuse du fémur n’était pas encore confirmée, reportant la date de stabilisation du cas.

d. Du 10 mars au 4 mai 2021, l’assurée a séjourné une nouvelle fois à la CRR. Dans un rapport du 9 juin 2021, le docteur F______, spécialiste en médecine physique et réadaptation, a retenu, à titre de complications, un retard de consolidation distal de la fracture métaphyso-épiphysaire du fémur gauche et un probable conflit entre les irrégularités osseuses du condyle fémoral interne et la partie distale des tendons du gracilis et du sartorius. Le médecin a préconisé la poursuite d’un traitement de physiothérapie et indiqué qu’une stabilisation médicale était attendue dans un délai de quatre à six mois.

e. Par lettre du 19 septembre 2022, l’employeuse a licencié l’assurée avec effet au 31 mars 2023.

f. AXA a confié une expertise à la docteure G______, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur, qui a examiné l’assurée les 17 mai et 9 juin 2023.

Dans un rapport du 11 septembre 2023, l’experte a diagnostiqué, avec répercussion sur la capacité de travail, une fracture ouverte Gustilo I comminutive métaphyso-diaphysaire déplacée du 1/3 distal du fémur gauche, une fracture de type Burst, instable, de L4 sans déficit neurologique, un état après OS par plaque LISS fémur gauche en urgence, un état après spondylodèse postérieure L3-L5 en urgence, une pseudarthrose avec décortication-greffe du fémur G le 13 juin 2018, une pseudarthrose avec AMO décortication greffe et re-ostéosynthèse le 25 novembre 2020, une douleur lombaire sur discopathie et arthrose facettaire bilatérale L5-S1. Les diagnostics, sans répercussion sur la capacité de travail, étaient : une fracture du sternum, une coxarthrose droite, une gonarthrose F-T interne droite, un syndrome du tunnel carpien bilatéral, des dysparesthésies nocturnes aux MIS, une arthropathie MP hallux et CMT1 et métatarsalgies pied droit, et un vertige paroxystique positionnel bénin.

La capacité de travail de l’assurée était de 60% avec une baisse de rendement de 10%. L’activité habituelle était adaptée, moyennant un bureau réglable en hauteur, permettant l’alternance de la position debout/assise, une chaise ergonomique et une pause.

Le taux de l’atteinte à l’intégrité était fixé à 20%.

g. Par décision du 2 août 2024, AXA a considéré que l’état de santé résultant de l’accident était stabilisé au 30 novembre 2023, a reconnu le droit de l’assurée à une rente d’invalidité d’un taux de 60% dès le 1er janvier 2024 (étant relevé que les indemnités journalières avaient été versées jusqu’au 31 décembre 2023), et lui a alloué une indemnité pour atteinte à l’intégrité de 20% correspondant à un montant de CHF 29'640.-.

En ce qui concernait le calcul du taux d’invalidité, le revenu d’invalide résultait des données statistiques dans la branche d’activité qui était celle de l’assurée avant la résiliation de son contrat de travail, soit le secteur 3, services, activités financières et d’assurances (branche économique 64-66). Le salaire de référence était celui auquel pouvait prétendre une femme avec une qualification (niveau 3) dans les tâches qui exigeaient une capacité à résoudre des problèmes complexes et à prendre des décisions fondées sur un vaste ensemble de connaissances théoriques et factuelles dans un domaine spécialisé, soit CHF 9'524.- par mois en 2022 (Enquête sur la structure des salaires [ESS] 2022, TA1, niveau de compétences 3). Comme les salaires standardisés tenaient compte d’un horaire de travail de 40 heures, soit une durée hebdomadaire inférieure à la moyenne usuelle dans l’entreprise (41.6 heures), ce montant devait être porté à CHF 9'905.-, puis majoré du pourcentage correspondant à l’évolution estimée des salaires nominaux pour 2023 (indice 2022 = 105.7 ; indice 2023 = 104.8). Il en résultait un revenu annuel d’invalide raisonnablement exigible de CHF 117'847.90, qui devait être réduit de 50%, ce qui donnait un gain d’invalide de CHF 58'924.-. Comparé au revenu sans invalidité de CHF 146'921.50 (qui ressortait d’un formulaire de calcul figurant en annexe), le taux d’invalidité était de 59.89%, arrondi à 60%.

Le montant de la rente d’invalidité s’élevait à CHF 71'136.- par année (60% de CHF 118'560.-, ce dernier montant représentait 80% du gain assuré de CHF 148'200.-), soit CHF 5'928.- par mois.

C. a. Par courrier du 15 août 2024, l’assurée s’est opposée à cette décision, en contestant le degré d’invalidité de 60%, en particulier le revenu d’invalide. Elle a conclu à ce que celui-ci soit fixé au minimum à 84% et le montant de la rente à CHF 8'299.- par mois au minimum.

Elle a joint la décision de l’office de l’assurance-invalidité pour les assurés résidant à l’étranger (ci-après : OAIE) du 13 septembre 2023 qui augmentait son droit à un trois-quarts de rente dont elle bénéficiait depuis le 1er juillet 2021 à une rente entière à compter du 1er avril 2023 sur la base d’un degré d’invalidité de 84%. L’OAIE indiquait avoir été informé au courant du mois d’avril 2023 de la cessation de l’activité professionnelle de l’assurée, nécessitant que le revenu hypothétique d’invalide soit fixé d’après les salaires des barèmes. Selon la note « détermination du degré d’invalidité » du 5 juin 2023 annexée à l’opposition, l’OAIE se basait pour le revenu d’invalide sur la ligne 77, 79-82 (activités de services administratifs) de l’ESS 2020, niveau 2 (indexé à 2023).

b. Par décision du 27 février 2025, AXA a rejeté l’opposition.

L’évaluation de l’invalidité par les organes de l’assurance-invalidité n’avait pas de force contraignante pour l’assureur-accidents.

Sur le plan médical, l’activité habituelle d’assistante de direction demeurait exigible à 50%.

Étant donné que l’assurée ne mettait pas pleinement en valeur sa capacité résiduelle de travail, AXA s’était référée aux données statistiques résultant de l’ESS 2022 pour fixer le revenu d’invalide. La ligne 77, 79-82 de l’ESS portait sur des activités relevant du service administratif. Or, la formation et l’expérience de l’assurée apparaissaient plus vastes et impliquaient des connaissances spécifiques en finance. C’était le milieu dans lequel elle avait évolué durant toute sa carrière, en premier lieu pour une banque, puis pour l’employeuse, qui étaient des sociétés actives dans la finance. Elle avait été employée en qualité d’assistante de direction durant 35 ans dans le même secteur. Il n’y avait par conséquent aucune raison de retenir uniquement la ligne 77, 79-82 qui ne reflétait que très partiellement les tâches de l’assurée.

En ce qui concernait le niveau de compétences, l’assurée était une secrétaire de direction diplômée. Après sa formation, elle avait poursuivi des études universitaires et obtenu une maîtrise L.E.A. (langues étrangères appliquées) avec mention « affaire et commerce ». Elle avait travaillé en qualité de secrétaire de direction pour le compte de sa première employeuse de 1988 à 1992, puis pour l’employeuse de 1992 à 2023. Elle jouissait ainsi d’une formation et d’une expérience professionnelle en qualité de secrétaire de direction de près de 35 ans.

Auprès de l’employeuse, elle était chargée du suivi avec les banques suisses et étrangères, du suivi de portefeuilles, de l’ouverture de comptes, de la saisie des écritures, ainsi que de la trésorerie du groupe. Les tâches qu’elle assurait étaient complexes et vastes. Elle était notamment responsable de la gestion administrative de l’ensemble des formalités bancaires selon la législation en vigueur, dont celles liées au KYC (Know Your Client). Cette activité impliquait notamment des vérifications sur la clientèle afin de prévenir les problèmes de fraudes et de blanchiment d’argent. Elle s’occupait également du suivi de l’échéancier du renouvellement de placement à terme et avance en cours. De même, elle devait établir des positions de trésorerie et valeurs mobilières en USD. Une partie de son activité relevait du suivi du back office du portefeuille hedge funds, ainsi que la préparation de l’audit annuel des comptes.

Il ne s’agissait ainsi pas d’un ensemble de tâches relevant de la simple exécution. Il était avéré que l’assurée disposait de connaissances professionnelles spécialisées en matière financières notamment, acquises tout au long de ses études ainsi que de sa carrière professionnelle. Elle maîtrisait plusieurs langues et les activités précitées impliquaient de grandes compétences analytiques et synthétiques, une autonomie et une très bonne organisation. De telles activités correspondaient au travail d’un cadre intermédiaire, qui étaient complexes et nécessitaient un vaste ensemble de connaissances dans un domaine spécialisé. Elles ne pouvaient être assimilées à un travail de bureau de niveau 2.

D. a. Par acte du 18 mars 2025, l’assurée a recouru contre cette décision sur opposition auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice, en concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation, à la constatation que son degré d’invalidité était de 84.30% et le montant de sa rente d’invalidité de CHF 8'328.85 par mois, et au renvoi du dossier à l’intimée pour le calcul du rétroactif qui lui était dû à compter du 1er janvier 2024, y compris les intérêts à 5% l’an dès cette date.

La prise en compte de la ligne 64-66 de l’ESS 2022 relative au domaine bancaire et aux assurances pour ce qui était du revenu d’invalide était contestée. L’intimée avait pris en considération le domaine de travail de son employeuse, en lieu et place du type de tâches qu’elle réalisait. Elle ne possédait aucune compétence financière ou d’assurance. Elle n’avait acquis des compétences que dans le domaine du secrétariat (BTS – équivalent d’un CFC suisse – de secrétariat de direction, stage en secrétariat de direction en 1983-1986, secrétaire de direction de 1988 jusqu’à la date de son licenciement). Elle ne pouvait pas exercer l’activité de « courtier en assurance » ou de « banquier » et encore moins celle de « gestionnaire de patrimoine » ni prodiguer des conseils en la matière, ne possédant strictement aucun diplôme ni aucune formation à ce sujet. L’affirmation péremptoire de l’intimée selon laquelle elle disposerait de « connaissances spécifiques en finance » était dénuée de tout fondement et n’était étayée par aucune pièce au dossier. L’activité de secrétaire de direction entrait dans le domaine « activité de services administratifs », soit la ligne 77, 79-82 des statistiques, comme l’avait reconnu l’assurance-invalidité.

Selon les normes NOGA (Nomenclature générale des activités économiques), la ligne 821000 (faisant partie de la catégorie 82) comprenait « la prestation d’une combinaison de services administratifs de bureau quotidiens (par ex. réception, planification financière, facturation et tenue de livres, activités liées au personnel, services de courrier, etc.), pour le compte de tiers », correspondant parfaitement à la description d’une secrétaire de direction et à la tâche que la recourante réalisait concrètement.

Il convenait par conséquent de se référer à la catégorie statistique 77, 79-82 dans son cas.

La prise en compte du niveau de compétences 3, qui était appliqué aux assurés titulaires de diplôme universitaire ou exerçant des professions techniques spécifiques complexes, était contestée. Elle n’était titulaire d’aucun diplôme universitaire, mais d’un simple BTS de secrétariat de direction. AXA ne démontrait d’ailleurs pas qu’elle aurait des connaissances techniques ou complexes. Le simple fait de travailler dans une banque ne dénotait aucune complexité particulière, car ses tâches ne se rapportaient pas à la finance ou au domaine bancaire en tant que tel, mais bien à la gestion du secrétariat de son employeuse. AXA confondait le domaine de travail de l’employeuse avec la tâche que l’assurée réalisait concrètement. Le degré de complexité de sa tâche ne dépassait, à tout le moins, pas les professions auxquelles la jurisprudence avait reconnu un niveau de compétences 2, à savoir notamment une responsable de filiales dans une entreprise de textile, un directeur de projet d’un charpentier, ou une infirmière titulaire d’un diplôme avancé. L’assurance-invalidité avait du reste appliqué un niveau de compétences 2 à son cas. Sa longue expérience professionnelle ne justifiait pas de retenir un niveau de compétences supérieur à celui-ci.

AXA aurait dû appliquer un abattement sur le revenu d’invalide tiré des statistiques. Elle souffrait de nombreuses limitations fonctionnelles qui rendaient difficiles l’activité exercée jusqu’alors ainsi que son employabilité potentielle. Elle était âgée de 62 ans, rendant notoirement difficile la perspective d’une réinsertion dans le marché de l’emploi. Pris globalement, ces facteurs justifiaient un abattement de 25%. L’assurance-invalidité avait réduit son revenu d’invalide de 10%.

La comparaison de son revenu de valide (CHF 146'921.60) et d’invalide (CHF 23'060.08 compte tenu de l’indexation à 2023, de l’abattement de 25% et du taux d’activité de 50%) conduisait à un degré d’invalidité de 84.30%.

Le montant de sa rente d’invalidité s’élevait à CHF 8'328.40 par mois (CHF 118'560 × 84.30% / 12).

Le rétroactif qui lui était dû à compter du 1er janvier 2024 (dont AXA devait calculer le montant jusqu’à l’entrée en force de la décision de justice) portait intérêt moratoire à 5% l’an.

b. Par réponse du 16 mai 2025, AXA a conclu au rejet du recours, sous suite de frais et dépens.

Les compétences de l’assurée, qui occupait le poste d’assistante de direction au sein d’une société active dans la finance, ne reposaient de loin pas uniquement sur un BTS. Elle avait également achevé une formation universitaire avec mention « affaire et commerce ». Elle maîtrisait plusieurs langues lui permettant, selon son ancienne employeuse, de réaliser des tâches complexes sans difficulté. Les tâches dont elle était en charge auprès de son ancienne employeuse, qui exerçait une activité de hedge fund, ne se limitaient pas à de simples tâches d’exécution. Le certificat de travail décrivait un ensemble de tâches exigeantes et complexes sur le plan financier. Son cahier de charges dépassait le simple travail de secrétaire, respectivement d’exécution. L’employeuse ne mentionnait que sur une ligne, dans le certificat de travail du 2 mai 2023, l’activité pure de secrétariat qui n’était de loin pas l’essentiel du travail de l’assurée. Elle effectuait des tâches complexes en mettant à disposition ses connaissances professionnelles spécialisées en matière financière notamment.

Elle n’avait pas retenu une activité de banquière. L’assurée effectuait des tâches exigeantes en matière de finance. Le certificat de travail relevait le suivi du portefeuille de hedge fund (back office), réception des relevés mensuels, contrôle de l’exhaustivité de la documentation officielle, tenue des fichiers d’investissements, contrôle et aide à l’établissement des rapports mensuels. De surcroît, elle était chargée du suivi de la trésorerie centrale du groupe, qui comprenait notamment la saisie des mouvements bancaires dans le logiciel comptable, le suivi de l’échéancier et le renouvellement des placements à terme, de même que l’établissement hebdomadaire des positions de trésorerie et valeurs mobilières en dollars. Elle assumait également toute la gestion administrative des formalités liées au KYC, soit le regroupement des informations nécessaires à l’évaluation du risque client. Il ne s’agissait donc pas d’une simple activité de secrétariat.

Il y avait lieu de prendre en considération le salaire versé dans le secteur privé, branche relevant des activités financières et assurances (ligne 64-66).

En ce qui concernait l’abattement, les facultés réduites de rendement avaient été prises en considération lors de l’appréciation de la capacité résiduelle de travail. Elles ne pouvaient pas l’être une seconde fois dans le cadre de l’évaluation du revenu d’invalide en tant que facteur de réduction du salaire statistique. L’âge de l’assurée – 62 ans au moment du recours – ne justifiait pas à lui seul l’application d’un abattement. Le seul fait que la durée d’activité soit plus courte ne justifiait pas une déduction en raison de l’âge, car cela était le cas pour tous les travailleurs. L’assurée disposait d’une expérience professionnelle ainsi que de compétences reconnues qui pourraient compenser les désavantages compétitifs liés à son âge.

c. Par réplique du 3 juin 2025, l’assurée a persisté dans ses conclusions.

Ses tâches ne relevaient pas du domaine bancaire ou financier. Lors de la dernière expertise, elle avait remis à l’experte un document « descriptif du poste de travail » qui décrivait les tâches qu’elle réalisait. À la lecture de ce document, il n’existait aucune tâche spécialisée en matière financière. Il était question du suivi des relations avec les établissements bancaires, de suivi de la trésorerie, de suivi du « back office » d’un hedge fund, qui consistait non pas à des opérations financières complexes, mais à la tenue à jour des échéanciers et de l’inventaire des fonds, ou à la collecte des pièces comptables pour l’audit des comptes, etc., soit un travail de secrétariat. Le fait que ce travail de secrétariat correspondait au domaine de travail de l’employeuse, à savoir un établissement actif dans la finance, n’y changeait rien, sauf à considérer qu’une secrétaire de direction serait une gestionnaire de fortune en devenir, ce qui n’était pas le cas.

La ligne no 821000 de la NOGA (activités de service de bureau et de soutien administratif) décrivait précisément les tâches qu’elle réalisait, notamment la « réception, planification financière, facturation et tenue de livres, activités liées au personnel, services de courrier, etc. ». En revanche, la ligne 66 « activités auxiliaires de services financiers et d’assurance » n’était d’aucune pertinence, puisque les statistiques faisaient référence aux gestionnaires qui « décident des placements à acheter ou vendre », ce qui n’était pas sa tâche, n'ayant jamais pris de décision en ce sens pour le compte de son ancienne employeuse et étant parfaitement incapable de lire ou comprendre un bilan financier. Elle n’avait aucun pouvoir décisionnel, n’était pas inscrite au registre du commerce, ne disposait d’aucun droit de signature et ne formulait aucun conseil sur les placements à entreprendre. Il n’y avait ainsi eu aucune activité relevant du domaine financier, notamment une analyse financière et des risques, une modification de la stratégie de placement ou autre, mais de simples tâches de nature administrative et de support, en suivant les ordres de son supérieur à ce propos. Dans le cas contraire, AXA était priée d’indiquer de manière précise la référence NOGA dans la section 64-66 qui correspondrait aux tâches qu’elle déployait.

Quoi qu’il en soit, il n’existait aucune raison de limiter son domaine d’activité hypothétique avec invalidité au domaine bancaire. La fonction de secrétaire de direction était une fonction polyvalente, qui pouvait s’exercer auprès de différents employeurs (indépendamment de leur branche professionnelle) et non pas dans un domaine professionnel précis (comme le seraient un maçon ou un serveur), de sorte que la perspective de travail, pour être suffisamment réaliste, devait couvrir un large spectre d’entreprise hypothétique.

Par ailleurs, elle n’avait pas achevé une formation universitaire avec mention « affaire et commerce ». Elle était titulaire d’un L.E.A. en langue étrangère anglais/espagnol dans le domaine « affaire et commerce ». En d’autres termes, elle avait acquis les bases linguistiques suffisantes dans ces deux langues pour traiter des courriers dans le domaine des affaires et du commerce, mais non pas pour officier en qualité d’agente d’affaire ou banquière.

L’assurance-invalidité avait appliqué le niveau de compétences 2 et la ligne 77, 79-82. Il n’y avait aucune raison objective de procéder à une approche différenciée en matière d’assurance-accidents.

d. Par duplique du 15 juillet 2025, AXA a maintenu sa position.

Le raisonnement de l’assurée revenait à faire fi de toutes les années d’expérience auprès de son ancien employeur. Elle avait travaillé 30 ans dans le même milieu en qualité de secrétaire de direction. Il avait été pleinement tenu compte des possibilités de réinsertion dès lors que le calcul de l’invalidité retenait le salaire réalisable dans la même branche qu’elle avait exercée ces 35 dernières années. La recourante avait toujours travaillé dans le milieu de la finance. Après avoir terminé ses études universitaires « mention affaire et commerce », elle avait travaillé quatre années pour une banque entre 1988 et 1992, avant de rejoindre l’employeuse, qui avait résilié son contrat de travail en 2022. Il n’avait jamais été soutenu que l’assurée devrait se voir attribuer l’activité de son employeuse, mais celle correspondant à sa formation, ainsi qu’à son expérience professionnelle particulièrement importante dans le milieu de la finance.

Les activités de la ligne 64-66 comprenaient « les activités de services financiers, les activités d’assurance et les activités auxiliaires financières, quelles que soient les technologies utilisées pour mener à bien ces activités ou ces services de soutien. Trois principaux types d’activités étaient classés dans cette section : la collecte, l’obtention et la fourniture de fonds (division 64) ; la mutualisation des risques par la souscription d’assurances et de rentes (division 65) ; et la fourniture de services spécialisés facilitant ou soutenant les activités de services financiers ou d’assurance (division 66) ». Les activités auxiliaires de services financiers hors assurances et caisses de retraite regroupaient, quant à elles, notamment les activités de traitement et de règlement des transactions financières, y compris les transactions effectuées par carte de crédit. Sous le chiffre 661900 (de la NOGA) étaient regroupées les activités de prestataires de services de paiement, par ex. les services de transfert électronique de fonds.

Cela était le cas en l’espèce. L’assurée décrivait notamment avoir mis en œuvre par exemple l’établissement des instructions de transfert (papier ou via logiciel bancaire), l’envoi et le suivi de leur bonne exécution, le règlement de litiges en cas de défaut ou exécution inappropriés des instructions, tout comme l’établissement hebdomadaire des positions de trésorerie et valeurs mobilières en USD. Elle était chargée de la gestion administrative de l’ensemble des formalités bancaires selon la législation en vigueur notamment celle liée aux informations relatives aux clients et à la provenance des fonds. Elle disposait d’un pouvoir de signature (collective à deux) sur la quasi-totalité des comptes bancaires de l’ensemble des sociétés du groupe. L’intimée n’avait jamais soutenu que l’assurée pourrait exercer une activité de gestionnaire de fortune ou de courtière, mais une activité de soutien à ces professions qu’elle a du reste effectuée ces 35 dernières années. Il s’agissait donc bel et bien d’activité de soutien en matière financière, soit la ligne 64-66.

La ligne 77, 79-82 « activités de services administratifs » se rapportait aux activités de location et location-bail (ligne 77), aux activités des agences de voyage, voyagistes, services de réservation et activités connexes (ligne 79), aux enquêtes et à la sécurité (ligne 80), aux services relatifs aux bâtiments et à l’aménagement paysager (ligne 81) et les activités administratives et autres activités de soutien aux entreprises (ligne 82), telles que la planification financière, la facturation et la tenue de livres, les activités liées au personnel, la distribution physique pour le compte de tiers. Les lignes 77, 79-81 recouvraient des activités étrangères au domaine dans lequel l’assurée avait été formée ou au regard de l’expérience particulièrement importante acquise auprès de l’employeuse. La ligne 821000 « activités de service de bureau et de soutien administratif » ne constituait qu’une infime partie des activités réellement déployées par l’assurée. En sa qualité d’assistante de direction, elle n’occupait pas ses journées à réaliser des photocopies, activité pour laquelle elle n’aurait certainement pas eu besoin d’une signature collective sur les comptes des sociétés.

Le poste de secrétaire de direction relevait du niveau de compétences 3, activité exigeante et hautement qualifiée impliquant un rôle autonome. L’assurée étant au bénéfice d’une formation universitaire notamment en matière de commerce, il n’y avait aucune raison de retenir le niveau de compétences 2.

e. Copie de cette écriture a été transmise à l’assurée pour information.

 

 

EN DROIT

 

1.             1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

À teneur de l'art. 1 al. 1 LAA, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-accidents, à moins que la loi n'y déroge expressément. Selon l'art. 58 LPGA, le tribunal des assurances compétent est celui du canton de domicile de l’assuré ou d’une autre partie au moment du dépôt du recours (al. 1). Si l’assuré ou une autre partie sont domiciliés à l’étranger, le tribunal des assurances compétent est celui du canton de leur dernier domicile en Suisse ou celui du canton de domicile de leur dernier employeur suisse ; si aucun de ces domiciles ne peut être déterminé, le tribunal des assurances compétent est celui du canton où l’organe d’exécution a son siège (al. 2).

L'existence d'un for au lieu de la succursale peut être admise lorsqu'il constitue pour le litige un point de rattachement prépondérant. Tel est notamment le cas lorsque l'assuré a travaillé pour la succursale d'une société, dans un canton différent du siège principal. Il s'agit là d'une compétence alternative, dès lors qu'il est uniquement question de faciliter l'action en justice et que rien n'empêche un justiciable de saisir le tribunal du canton de l'établissement principal (ATF 144 V 313 consid. 6.5).

En l'occurrence, la recourante est domiciliée en France, mais elle a travaillé en dernier lieu dans le canton de Genève pour la succursale d’une société étrangère, inscrite au registre du commerce de ce même canton. Partant, la chambre de céans est compétente à raison de la matière et du lieu pour juger du cas d'espèce.

1.2 La procédure devant la chambre de céans est régie par les dispositions de la LPGA et de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

Interjeté dans la forme (art. 61 let. b LPGA) et le délai de trente jours (art. 60 al. 1 LPGA ; art. 62 al. 1 let. a LPA) prévus par la loi, le recours est recevable.

2.             Le litige porte sur le taux d’invalidité de la recourante, singulièrement sur son revenu d’invalide.

3.             Le 1er janvier 2017 est entrée en vigueur la modification du 25 septembre 2015 de la LAA. Dans la mesure où l'accident est survenu avant cette date (le 19 mars 2016), le droit du recourant aux prestations d'assurance est soumis à l'ancien droit (cf. dispositions transitoires relatives à la modification du 25 septembre 2015 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_662/2016 du 23 mai 2017 consid. 2.2). Les dispositions légales seront donc citées ci-après dans leur teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2016.

4.             4.1 Si l'assuré est invalide (art. 8 LPGA) à 10% au moins par suite d’un accident, il a droit à une rente d'invalidité (art. 18 al. 1 LAA).

Est réputée invalidité l’incapacité de gain totale ou partielle qui est présumée permanente ou de longue durée (art. 8 al. 1 LPGA).

Selon l'art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1) ; seules les conséquences de l'atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d'une incapacité de gain ; de plus, il n'y a incapacité de gain que si celle-ci n'est pas objectivement surmontable (al. 2).

4.2 Selon l'art. 19 al. 1 LAA, le droit à la rente prend naissance dès qu'il n'y a plus lieu d'attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l'état de l'assuré et que les éventuelles mesures de réadaptation de l'assurance‑invalidité ont été menées à terme. Le droit au traitement médical et aux indemnités journalières cesse dès la naissance du droit à la rente.

Dès qu'il n'y a plus lieu d'attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l’état de santé de l'assuré et qu'aucune mesure de réadaptation de l'assurance-invalidité n'entre en considération, il appartient à l'assureur-accidents de clore le cas en mettant fin aux frais de traitement ainsi qu'aux indemnités journalières et en examinant le droit à une rente d'invalidité et à une indemnité pour atteinte à l'intégrité (ATF 144 V 354 consid. 4.1 ; 143 V 148 consid. 3.1.1 ; 134 V 109 consid. 4.1 et les références).

4.3 Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA ; méthode ordinaire de la comparaison des revenus).

Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de se placer au moment de la naissance du droit à la rente ; les revenus avec et sans invalidité doivent être déterminés par rapport à un même moment et les modifications de ces revenus susceptibles d'influencer le droit à la rente survenues jusqu'au moment où la décision est rendue doivent être prises en compte (ATF 129 V 222 consid. 4.1 et les références).

4.3.1 Pour déterminer le revenu sans invalidité, il convient d'établir ce que l'assuré aurait, au degré de la vraisemblance prépondérante, réellement pu obtenir au moment déterminant s'il n'était pas devenu invalide. Le revenu sans invalidité doit être évalué de la manière la plus concrète possible. Partant de la présomption que l'assuré aurait continué d'exercer son activité sans la survenance de son invalidité, ce revenu se déduit en principe du salaire réalisé en dernier lieu par l'assuré avant l'atteinte à la santé, en prenant en compte également l'évolution des salaires jusqu'au moment de la naissance du droit à la rente ; des exceptions ne peuvent être admises que si elles sont établies au degré de la vraisemblance prépondérante (ATF 144 I 103 consid. 5.3 ; 139 V 28 consid. 3.3.2 et les références ; 135 V 297 consid. 5.1 et les références ; 134 V 322 consid. 4.1 et les références).

4.3.2 En l'absence d'un revenu effectivement réalisé – soit lorsque la personne assurée, après la survenance de l'atteinte à la santé, n'a pas repris d'activité lucrative ou alors aucune activité normalement exigible –, le revenu d'invalide peut être évalué sur la base de salaires fondés sur les données statistiques résultant de l'ESS (ATF 148 V 174 consid. 6.2 et les références ; 143 V 295 consid. 2.2 et les références).

Il convient de se fonder, en règle générale, sur les salaires mensuels indiqués dans la table ESS TA1_tirage_skill_level, à la ligne « total secteur privé » (ATF 124 V 321 consid. 3b/aa). On se réfère alors à la statistique des salaires bruts standardisés, en se fondant toujours sur la médiane ou valeur centrale (ATF 126 V 75 consid. 3b/bb ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_58/2021 du 30 juin 2021 consid. 4.1.1), étant précisé que, depuis l'ESS 2012, il y a lieu d'appliquer le tableau TA1_skill_level et non pas le tableau TA1_b (ATF 142 V 178).

Lorsque cela apparaît indiqué dans un cas concret pour permettre à l'assuré de mettre pleinement à profit sa capacité résiduelle de travail, il y a lieu parfois de se référer aux salaires mensuels de secteurs particuliers (secteur 2 [production] ou 3 [services]), voire à des branches particulières ; tel est notamment le cas lorsqu'avant l'atteinte à la santé, l'assuré a travaillé dans un domaine pendant de nombreuses années et qu'une activité dans un autre domaine n'entre pas en ligne de compte. Il y a en revanche lieu de se référer à la ligne « total secteur privé » lorsque l'assuré ne peut plus raisonnablement exercer son activité habituelle et qu'il est tributaire d'un nouveau domaine d'activité pour lequel l'ensemble du marché du travail est en principe disponible (arrêt du Tribunal fédéral 8C_709/2023 du 8 mai 2024 consid. 6.2.1 et les références).

En outre, lorsque les circonstances du cas concret le justifient, on peut s'écarter de la table TA1 (salaire mensuel brut [valeur centrale] selon les branches économiques dans le secteur privé) pour se référer à la table TA7 (salaire mensuel brut [valeur centrale] selon le domaine d'activité dans les secteurs privé et public ensemble), si cela permet de fixer plus précisément le revenu d'invalide et que le secteur en question est adapté et exigible. C'est le lieu de préciser que les tables TA1, T1 et TA7 des ESS publiées jusqu'en 2010 correspondent respectivement aux tables TA1_skill_level, T1_tirage_skill_level et T17 des ESS publiées depuis 2012 (arrêt du Tribunal fédéral 8C_205/2021 du 4 août 2021 consid. 3.2.2 et les références).

La valeur statistique – médiane – s'applique, en principe, à tous les assurés qui ne peuvent plus accomplir leur ancienne activité parce qu'elle est physiquement trop astreignante pour leur état de santé, mais qui conservent néanmoins une capacité de travail importante dans des travaux légers. Pour ces assurés, ce salaire statistique est suffisamment représentatif de ce qu'ils seraient en mesure de réaliser en tant qu'invalides dès lors qu'il recouvre un large éventail d'activités variées et non qualifiées (branche d'activités), n'impliquant pas de formation particulière, et compatibles avec des limitations fonctionnelles peu contraignantes (arrêts du Tribunal fédéral 9C_603/2015 du 25 avril 2016 consid. 8.1 ; 9C_242/2012 du 13 août 2012 consid. 3).

Il convient de se référer à la version de l'ESS publiée au moment déterminant de la décision querellée (ATF 143 V 295 consid. 4 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_801/2021 du 28 juin 2022 consid. 3.6).

La table TA1_skill_level repose sur un système de niveaux de compétence par branches économiques alors que la table T17 repose sur un système de groupes de professions organisé selon des niveaux de compétences homogènes pour chaque grand groupe (arrêt du Tribunal fédéral 8C_709/2023 du 8 mai 2024 consid. 6.2.1).

Depuis la 10e édition des ESS (ESS 2012), les emplois sont classés par l'Office fédéral de la statistique (ci-après : OFS) par profession en fonction du type de travail qui est généralement effectué. L'accent est ainsi mis sur le type de tâches que la personne concernée est susceptible d'assumer en fonction de ses qualifications (niveau de ses compétences) et non plus sur les qualifications en elles-mêmes. Quatre niveaux de compétence ont été définis en fonction de neuf groupes de profession (voir tableau T17 de l'ESS 2012 p. 44) et du type de travail, de la formation nécessaire à la pratique de la profession et de l'expérience professionnelle (voir tableau TA1_skill_level de l'ESS 2012 ; ATF 142 V 178 consid. 2.5.3).

Le niveau 1 est le plus bas et correspond aux tâches physiques et manuelles simples, tandis que le niveau 4 est le plus élevé et regroupe les professions qui exigent une capacité à résoudre des problèmes complexes et à prendre des décisions fondées sur un vaste ensemble de connaissances théoriques et factuelles dans un domaine spécialisé (on y trouve par exemple les directeurs/trices, les cadres de direction et les gérant[e]s, ainsi que les professions intellectuelles et scientifiques). Entre ces deux extrêmes figurent les professions dites intermédiaires (niveaux 3 et 2). Le niveau 3 implique des tâches pratiques complexes qui nécessitent un vaste ensemble de connaissances dans un domaine spécialisé (notamment les techniciens, les superviseurs, les courtiers ou encore le personnel infirmier). Le niveau 2 se réfère aux tâches pratiques telles que la vente, les soins, le traitement des données, les tâches administratives, l'utilisation de machines et d'appareils électroniques, les services de sécurité et la conduite de véhicules. L'application du niveau 2 se justifie uniquement si la personne assurée dispose de compétences ou de connaissances particulières. L'accent est donc mis sur le type de tâches que l'assuré est susceptible d'assumer en fonction de ses qualifications mais pas sur les qualifications en elles-mêmes. Il faut encore préciser que l'expérience professionnelle de plusieurs années dont peut se prévaloir un assuré – sans formation commerciale ni autre qualification particulière acquise pendant l'exercice de la profession – ne justifie pas à elle seule un classement supérieur au niveau de compétences 2, dès lors que dans la plupart des secteurs professionnels un diplôme ou du moins des formations et des perfectionnements (formalisés) sont exigés (ATF 150 V 354 consid. 6.1 et les références).

Pour la détermination du niveau de compétences, il y a lieu de rappeler que l'accent est avant tout mis sur le type de tâches que l'assuré est susceptible d'assumer en fonction de ses qualifications (ATF 150 V 354 consid. 6.4). L'application du niveau de compétences 2 a été admis dans le cas d'un directeur de Sàrl, au bénéfice d'un certificat fédéral de capacité (CFC) de dessinateur en génie civil, qui avait occupé pendant près de 25 ans des postes à responsabilités dans les secteurs secondaires et tertiaires, sans qu'ils ne se résument à l'accomplissement de tâches physiques ou manuelles simples, dans le cas d'un assuré qui, après avoir suivi un lycée technique, avait intégré l'Armée de l'Air, fait une formation de parachutiste puis avait travaillé comme aide monteur en lignes aériennes avant d'effectuer une formation d'automaticien sous l'égide de l'assurance-invalidité, métier dans lequel il avait été chargé d'études de schémas électropneumatiques et de câblage électrique et pneumatique des machines, dans le cas d'un entrepreneur indépendant en horticulture qui avait travaillé pendant de nombreuses années en tant que contremaître, chez un gérant et directeur d'une entreprise de construction qui disposait à la base d'une formation de charpentier et qui avait fait une formation continue pour devenir contremaître et directeur de projet ou encore chez un charpentier indépendant qui, au sein de son entreprise, effectuait aussi des tâches administratives et qui était responsable de quatre collaborateurs et de deux apprentis (arrêt du Tribunal fédéral 8C_330/2025 du 1er septembre 2025 consid. 3.4 et les références).

Le Tribunal fédéral a retenu le niveau de compétences 3, des branches économiques 45–47 « Commerce ; réparation d’automobiles », pour un assuré directeur d’une succursale automobile, ayant terminé avec succès un apprentissage de quatre ans en tant que mécanicien, disposant d’une expérience de plusieurs années dans cette profession, titulaire d’un brevet fédéral de conseiller à la clientèle dans la branche automobile. Les certificats de travail établis par les différents employeurs attestaient que l’assuré y a notamment effectué des tâches administratives et organisationnelles plus complexes (conseils à la clientèle, tâches comptables, organisation d’événements pour la clientèle, tâches liées à des projets, préparation des commandes des clients et surveillance des livraisons, formation des apprentis, etc. ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_431/2021 du 26 janvier 2022 consid. 5.2 ; David IONTA, Revenu d’invalide selon l’ESS – une mise à jour, in Jusletter 21 novembre 2022, p. 23).

Le Tribunal fédéral a confirmé le niveau de compétences 3 pour un assuré qui avait été durant plus de 30 ans directeur de sa société de construction, qui avait employé jusqu'à une centaine de salariés, et dont l’activité de direction comprenait 50% de tâches administratives et 50% d'activités physiques, dans les locaux de l'entreprise ou sur les chantiers. Au vu des tâches physiques dont l'intéressé s'acquittait, le niveau 4 apparaissait excessif, tandis que le niveau 2 ne tenait pas suffisamment compte des tâches nombreuses et complexes qu'impliquait la direction d'une entreprise comptant 100 employés, ni de la longue expérience de l'assuré dans cette fonction, qui compensait largement l'absence de formation spécifique (arrêt du Tribunal fédéral 8C_50/2022, 8C_76/2022 du 11 août 2022 consid. 5.4).

4.4 Selon l'art. 20 al. 1 LAA, la rente d’invalidité s’élève à 80% du gain assuré, en cas d’invalidité totale ; si l’invalidité n’est que partielle, la rente est diminuée en conséquence.

4.5 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 142 V 435 consid. 1 ; 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; 126 V 353 consid. 5b ; 125 V 193 consid. 2). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6. 1 et la référence).

5.             En l’espèce, il n’est pas contesté que l’état de santé de la recourante est stabilisé depuis le 30 novembre 2023, date à compter de laquelle celle-ci dispose d’une capacité de travail de 50% dans son activité habituelle d’assistante de direction, qui est adaptée à ses séquelles accidentelles.

Son droit éventuel à la rente prend donc naissance le 1er décembre 2023 (art. 19 al. 1 LAA). Il convient alors de procéder à la comparaison des revenus au regard de l’année 2023, comme l’a fait l’intimée.

Dans la mesure où la recourante a été licenciée avec effet à fin mars 2023, et qu’elle ne travaillait plus auprès de son employeur au 30 novembre 2023, il y a lieu d’évaluer son revenu avec invalidité sur la base des statistiques salariales figurant dans l’ESS 2022 qui était déjà publiée le 29 mai 2024 au moment où la décision litigieuse du 27 février 2025 a été rendue, puis de l’indexer jusqu’à la date de l’ouverture du droit à la rente, en 2023.

Il ressort du curriculum vitae produit par la recourante à l’appui de son recours (pièce 3) qu’elle a collaboré en tant que secrétaire de direction auprès d’une banque de juin 1988 à juin 1992, et en qualité d’assistante de direction auprès de l’employeuse, une société active dans le domaine financier également, depuis octobre 1992 jusqu’à son licenciement en mars 2023. Force est de constater que la recourante, avant son atteinte à la santé, s’est cantonnée à un seul domaine d’activité pendant de nombreuses années. Comme relevé précédemment, la recourante peut raisonnablement exercer son activité habituelle, sur le plan médical, et n’est donc pas tributaire d’un nouveau domaine d’activité. Dans ces circonstances, l’intimée pouvait s’écarter de la valeur médiane (« total secteur privé ») des salaires statistiques et se référer au salaire statistique d’une branche particulière.

À cet égard, l’intimée s’est fondée sur le salaire de référence de la branche 64-66 de la table TA1_tirage_skill_level de l’ESS 2022 « activités financières et d'assurances », niveau de compétences 3, tandis que la recourante se prévaut de la branche 77,79-82 « activités de services administratifs » de la même table de l’ESS 2022, niveau de compétences 2.

Certes, l’assurance-invalidité a retenu la branche 77, 79-82 de la table TA1_tirage_skill_level ainsi que le niveau de compétences 2 dans sa décision du 13 septembre 2023. Il y a toutefois lieu de rappeler que l'assureur-accidents n'est pas lié par l'évaluation de l'invalidité de l'assurance-invalidité (ATF 131 V 362 consid. 2.3).

Cela étant dit, il découle des notes explicatives de la nomenclature générale des activités économiques (NOGA 2025) publiée le 9 janvier 2025 par l’OFS (disponible en ligne sur https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/industrie-services/nomenclatures/noga.assetdetail.33807006.html) que la ligne 66 (qui peut être pertinente in casu), intitulée « activités auxiliaires d’activités de services financiers et d’assurance », comprend la prestation de services entrant dans des transactions financières portant sur des actifs et des passifs financiers ou soutenant de telles transactions, sans prise de possession des actifs et des passifs financiers en question (p. 357).

En particulier, la ligne 661900 qui se rapporte aux « autres activités auxiliaires de services financiers, hors assurance et fonds de pension » comprend notamment les activités de traitement et de règlement des transactions financières (p. 359).

La ligne 82 (qui peut être pertinente in casu) intitulée « activités de service de bureau, de soutien administratif et d’autre soutien aux entreprises » comprend la prestation d'un ensemble de services administratifs de bureau quotidiens, ainsi que de fonctions de soutien courantes et continues, pour le compte de tiers. Elle comprend également toutes les activités de services de soutien généralement fournies aux entreprises non classées ailleurs (p. 407).

En particulier, la ligne 821100 relative aux « activités de service de bureau et de soutien administratif » comprend la prestation d'une combinaison de services administratifs de bureau quotidiens (par ex. : la réception, la planification financière, la facturation et la tenue de livres, les activités liées au personnel, les services de courrier, etc.), pour le compte de tiers (p. 408).

En l’occurrence, selon le formulaire « Description de l’activité » complété par l’ancien employeur le 15 octobre 2020, l’activité d’assistante de direction qu’exerçait la recourante comprenait les travaux de secrétariat, la gestion des relations avec toutes les banques (suisses et étrangères), les compliance matters, et la responsabilité back office (reporting mensuel d’un portefeuille de hedge funds).

D’après le certificat de travail du 2 mai 2023 établi par l’employeuse, les tâches réalisées par la recourante étaient précisément les suivantes :

-          le suivi de la relation avec les banques pour les aspects principaux suivants : gestion administrative de toutes les formalités, dont celles liées au KYC, ouvertures de comptes bancaires, notification des changements liés aux entités (ex. : migration, changement d’adresse), modifications des pouvoirs de signature ;

-          le suivi du portefeuille de hedge funds (back office), la réception des relevés mensuels, le contrôle de l’exhaustivité de la documentation officielle, la tenue des fiches d’investissements, le contrôle et l’aide à l’établissement des rapports mensuels ;

-          le suivi de la trésorerie centrale (tenue et mise à jour sur Excel des soldes bancaires et des liquidités investies, établissement, envoi et surveillance des instructions de transfert, règlement des différences et des corrections demandées, établissement hebdomadaire des positions trésorerie et valeurs mobilières en USD, suivi de l’échéancier et renouvellement des placements à terme, saisie des mouvements bancaires dans le logiciel comptable) ;

-          le suivi du tableau récapitulatif des « management fees » intra-groupe ;

-          le support administratif (mise à jour des fiches d’identité des sociétés du groupe, préparation et convocation pour les conseils d’administration et les assemblées générales des entités suisses, paiement des frais généraux) ;

-          tous les travaux de secrétariat (rédaction de divers courriers pour la direction, commande de fournitures, gestion du courrier, organisation de l’archivage physique et digital).

Force est de constater que la recourante n’effectuait pas uniquement les fonctions générales d’une secrétaire. Dans un arrêt 9C_104/2009 du 31 décembre 2009, le Tribunal fédéral a retenu, dans le cas d’une assurée réceptionniste auprès d’une banque durant quatorze ans, le chiffre 67 (services aux activités financières et d'assurances) de la table TA1 de l’année 2006 pour fixer son revenu d’invalide (consid. 5.2), qui peut être assimilé à la ligne 66 « activités auxiliaires d’activités de services financiers et d’assurance » de la table TA1_skill_level de l’ESS 2022. De manière analogue, il y a lieu de retenir que l’activité exercée par la recourante d’assistante de direction spécialisée dans le domaine de la finance où elle a travaillé durant de nombreuses années correspond davantage à la ligne 66 de la table TA1_skill_level de l’ESS 2022 qu’à la ligne 82 de cette même table. C’est en effet le lieu de rappeler, d’une part, que la ligne 82 comprend toutes les activités de services de soutien généralement fournies aux entreprises non classées ailleurs et que l’ancienne employeuse de la recourante est précisément un établissement financier. D’autre part, quand bien même la recourante n’était pas une banquière, elle accomplissait néanmoins des activités de traitement en matière financière et donc prodiguait des services de soutien à son employeuse, ce qui correspond à la ligne 66 de la table précitée.

En ce qui concerne le niveau de compétences de la recourante, il ressort de son curriculum vitae qu’elle possède un BTS secrétariat de direction français/anglais – option espagnol obtenu en 1983, et une maîtrise L.E.A. (langues étrangères appliquées) anglais/espagnol avec mention « affaire et commerce » délivrée en 1987. Le BTS (brevet de technicien supérieur) est un diplôme national français qui confère à ses titulaires le titre de technicien supérieur breveté et leur permet une insertion professionnelle immédiate après une formation technologique de deux années en principe. Il est délivré au titre d’une spécialité professionnelle (cf. site du Ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’espace : https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/fr/brevet-de-technicien-superieur-bts-45915).

Selon le formulaire « Description de l’activité » complété par l’employeuse (déjà cité), le profil d’exigences pour le poste d’assistante de direction qu’occupait la recourante était élevé, le travail qu’elle effectuait était complexe, celle-ci assumait une responsabilité en matière de produits, elle avait des contacts quotidiens en termes d’interaction sociale, mais n’entamait jamais ou rarement des négociations et contacts avec les clients, et elle devait résoudre de manière autonome les problèmes dans le temps imparti.

La recourante ne réalisait donc pas uniquement des tâches administratives simples. Quoi qu’elle en dise, elle est titulaire d’une formation spécifique dans le domaine administratif, et elle bénéficie d’une longue expérience pratique (35 ans) en tant que secrétaire et assistante de direction dans le domaine financier. Son ancienne employeuse a attesté qu’elle assumait une certaine responsabilité dans le cadre des activités qui lui étaient confiées et qu’elle accomplissait des tâches spécifiques variées et complexes dans un environnement exigeant. Dans ces circonstances, il convient de conclure que la recourante disposait d'un vaste ensemble de connaissances dans un domaine spécialisé lui permettant d’assumer les tâches pratiques complexes afférentes. C'est donc à raison que l’intimée a pris en considération le niveau de compétences 3 dans la détermination du revenu d'invalide.

Partant, il y a lieu de se référer au salaire de référence du niveau de compétences 3 auquel peuvent prétendre les femmes, soit le salaire mensuel de CHF 8'620.- (ligne 66, TA1_tirage_skill_level, ESS 2022), et non pas celui de CHF 9'524.-, comme l’a fait à tort l’intimée, qui correspond au salaire « total » du niveau de compétences 3 de la ligne 64-66.

Le salaire mensuel de CHF 8'620.- équivaut au salaire annuel de CHF 103'440.- (CHF 8'620.- × 12). Ce montant correspond à un horaire de travail de 40 heures, de sorte qu'il doit être adapté à l'horaire usuel de la semaine dans la branche économique concernée en 2022, soit 41.6 heures (tableau « Durée normale du travail dans les entreprises selon la division économique » publié par l'OFS, branche 66 « activités auxiliaires de services financiers et d’assurance »). On obtient dès lors un salaire annuel de CHF 107'577.60 (CHF 103'440.- × 41.6 / 40).

Ce montant, indexé à 2023 – année déterminante pour la comparaison des revenus – selon l'Indice des salaires nominaux pour les femmes (tableau T1.2.20 publié par l’OFS, disponible sur https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/travail-remuneration/salaires-revenus-cout-travail/indice-salaires.html) dans la branche économique concernée, s'élève à CHF 106'716.9792 (-0.8% en 2023 ; CHF 107'577.60 × 0.8% = CHF 860.6208 ; CHF 107'577.60 - CHF 860.6208 = CHF 106'716.9792).

Il convient encore de réduire ce salaire de moitié compte tenu de la capacité de travail exigible de 50% de la recourante, ce qui conduit à un revenu d’invalide de CHF 53'358.4896.

Contrairement à ce que prétend la recourante (née le ______ 1962), son âge, soit 61 ans au moment de la naissance du droit éventuel à la rente en décembre 2023, ne justifie pas un taux d'abattement, car sa formation et son expérience professionnelle constituent un avantage en termes de facilité d'intégration dans une activité adaptée. À titre de comparaison, le Tribunal fédéral a jugé notamment, à propos d'un assuré ayant atteint 62 ans à la naissance du droit à la rente, qu'il n'y avait pas d'indices suffisants pour retenir qu'un tel âge représentait un facteur pénalisant par rapport aux autres travailleurs valides de la même catégorie d'âge, eu égard aux bonnes qualifications professionnelles de celui-ci (arrêt du Tribunal fédéral 8C_439/2017 du 6 octobre 2017 consid. 5.6.4).

Ensuite, lorsque les limitations fonctionnelles justifiant une diminution de rendement ont déjà été prises en compte dans l'évaluation de la capacité de travail – comme en l’occurrence (rapport d’expertise du 11 septembre 2023 p. 35) –, elles n'ont pas à être retenues une seconde fois lors de la détermination de l'abattement (arrêt du Tribunal fédéral 9C_778/2020 du 27 août 2021 consid. 6 et la référence).

Ainsi, le revenu d’invalide de CHF 53'358.4896, comparé au revenu de valide – non contesté – de CHF 146'921.50, aboutit à un degré d’invalidité de 63.68% ([CHF 146'921.50 - CHF 53'358.4896] / CHF 146'921.50 × 100), arrondi à 64% (ATF 130 V 121 consid. 3.2). C’est donc à tort que l’intimée a fixé le taux d’invalidité à 60%.

En conséquence, le montant de la rente mensuelle de la recourante s’élève à CHF 6'323.20 (CHF 148'200.- [gain assuré, non contesté] × 80% = CHF 118'560.‑ ; CHF 118'560.- × 64% = CHF 75'878.40 ; CHF 75'878.40 / 12 = CHF 6'323.20 ; art. 20 al. 1 LAA), au lieu de CHF 5'928.- calculé par l’intimée.

6.             La recourante sollicite l’octroi d’intérêts moratoires de 5% l’an sur le montant rétroactif des rentes auquel elle a droit.

6.1 Selon l'art. 26 al. 2 LPGA, des intérêts moratoires sont dus pour toute créance de prestations d'assurances sociales à l'échéance d'un délai de 24 mois à compter de la naissance du droit, mais au plus tôt douze mois à partir du moment où l'assuré fait valoir ce droit, pour autant qu'il se soit entièrement conformé à l'obligation de collaborer qui lui incombe.

Selon l'art. 7 al. 1 de l’ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 11 septembre 2002 (OPGA -RS 830.11), le taux de l'intérêt moratoire est de 5% l'an. L’intérêt moratoire est calculé par mois sur les prestations dont le droit est échu jusqu’à la fin du mois précédent. Il est dû dès le premier jour du mois durant lequel le droit à l’intérêt moratoire a pris naissance et jusqu’à la fin du mois durant lequel l’ordre de paiement est donné (art. 7 al. 2 OPGA).

6.2 En l’occurrence, le droit à la rente d’invalidité en tant que tel est né le 1er décembre 2023, puisque l’état de santé de la recourante a été considéré comme stabilisé au 30 novembre 2023. La recourante peut donc prétendre en principe un intérêt moratoire de 5% l’an dès le 1er décembre 2025, le premier jour du mois durant lequel le délai de 24 mois à compter de la naissance du droit a expiré. Le délai de 24 mois à compter de la naissance du droit à la rente n’a donc pas encore expiré.

Il s’ensuit que l’intimée ne peut pas (à ce stade) être condamnée au versement des intérêts moratoires.

7.             Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis et la décision litigieuse réformée, en ce sens que le taux d’invalidité de la recourante est de 64% et le montant de sa rente d’invalidité de CHF 6'323.20 par mois au moment de la naissance du droit à la rente le 1er décembre 2023. La cause est renvoyée à l’intimée pour le calcul de l’arriéré de rentes dû à la recourante.

8.             8.1 La recourante, représentée par un avocat, obtenant partiellement gain de cause, une indemnité lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03), arrêtée en l'espèce à CHF 2'000.-.

8.2 Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Réforme la décision du 27 février 2025, en ce sens que le taux d’invalidité de la recourante est de 64% et le montant de sa rente d’invalidité de CHF 6'323.20 par mois au moment de la naissance du droit à la rente le 1er décembre 2023.

4.        Renvoie la cause à l’intimée pour le calcul de l’arriéré de rentes dû à la recourante.

5.        Alloue à la recourante une indemnité de CHF 2'000.- à titre de dépens, à la charge de l’intimée.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie KOMAISKI

 

La présidente

 

 

 

 

Justine BALZLI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le