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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4068/2024

ATAS/487/2025 du 25.06.2025 ( AI ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4068/2024 ATAS/487/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 25 juin 2025

Chambre 4

 

En la cause

A______

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. A______ (ci-après : l’assuré ou le recourant), né le ______ 1970, marié et père de quatre enfants, a effectué un apprentissage de maçon, avec obtention d’un CFC et d’une maturité professionnelle.

b. Suite à un accident survenu en 1992, l’assuré a cessé toute activité jusqu’en 1994. De 1995 à 1997, il a suivi une formation de mécanicien sur machines à P______, avant d’entreprendre une nouvelle formation de 1997 à 2000 à l’École d’études sociales et pédagogiques de Lausanne, dans le cadre d’un reclassement octroyé par l’office cantonal AI de Berne. Ledit reclassement a été interrompu le 1er octobre 2000 et l’assuré a déménagé à Genève. De 2001 à 2002, il a occupé un poste de responsable du service après-vente horlogerie chez B______.

c. Arrivé à Genève, l’assuré s’est inscrit à l’office cantonal de l’emploi (ci-après : OCE) dès le 1er janvier 2003. Selon le docteur C______, spécialiste FMH en médecine générale et médecin-conseil de l’OCE, l’assuré ne présentait pas d’incapacité de travail et les limitations dans le cadre d’une activité professionnelle devaient être définies ultérieurement, étant précisé qu’il devait éviter d’être en contact avec différents produits mentionnés par la SUVA. Pour sa part, le docteur D______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, également médecin-conseil de l’OCE, a indiqué dans un rapport du 23 juillet 2003 que l’assuré ne pouvait pas porter de charges et qu’il connaissait des limitations de type allergique. Une réinsertion professionnelle était indiquée, soit dans une activité indépendante ou dans un travail d’huissier, ou encore dans le cadre d’une formation dans le domaine social.

d. Par décision du 1er juin 2004, l’OCE a prononcé l’inaptitude au placement de l’assuré, pour raisons médicales.

B. a. Parallèlement à la procédure pendante devant l’OCE, l’assuré a également déposé, en date du 16 septembre 2003, une demande de prestations d’assurance-invalidité auprès de l’office de l’assurance invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI) en raison de dorsalgies, lombalgies chroniques, d’une maladie de Scheuermann et d’une dépression récurrente, entrainant une incapacité de travail totale depuis le 1er juillet 2003. En raison de ces atteintes, il avait déjà bénéficié d’une mesure de réadaptation de l’assurance-invalidité du canton de Berne. Il avait dû réduire son activité chez B______ à 60% dès le 1er juillet 2002, ensuite de quoi son employeur avait résilié le contrat.

b. À la demande de l’OAI, le service médical régional de l’assurance-invalidité pour la Suisse romande (ci-après : le SMR) a effectué un examen rhumatologique et psychiatrique le 30 janvier 2007. Selon le rapport du 14 février 2007 y relatif, les docteurs E______, spécialiste FMH en médecine interne et rhumatologie, et F______, spécialiste FMH en psychiatrie, ont retenu les diagnostics suivants : rachialgies diffuses dans le cadre de troubles statiques et dégénératifs du rachis avec séquelles d’une maladie de Scheuermann et malformation de la charnière lombo-sacrée (M54), syndrome rotulien gauche dans le cadre d’une discrète gonarthrose débutante, status après transposition de la tubérosité tibiale antérieure gauche en 1998 (M22.2), allergies cutanées et respiratoires aux benzines, émulsions, huile de coupe et ammonium quaternaire (avec répercussions sur la capacité de travail) et accentuation de certains traits de la personnalité d’ordre narcissique, impulsif et anxieux, un ou plusieurs états dépressifs réactionnels inclassables vu le manque d’information, chaque fois avec rémission (sans influence sur la capacité de travail). Au vu des diagnostics retenus, les médecins du SMR ont conclu à une incapacité de travail totale dans l’activité de maçon, de mécanicien sur machines et dans le service après-vente de l’horlogerie si cela nécessitait la manipulation de produits allergènes non supportés. Dans une activité adaptée respectant les limitations ostéoarticulaires et allergiques (nécessité de pouvoir alterner deux fois par heure la position assise et la position debout, pas de soulèvement régulier de charges d’un poids excédant 5 kg, pas de port régulier de charges de plus de 12 kg, pas de travail en porte-à-faux statique prolongé, pas de travail sur escabeau, échelle ou escalier, pas de travail nécessitant des génuflexions répétées, des positions debout prolongées de plus d’une heure ou des marches prolongées de plus d’une heure, pas d’exposition aux produits allergènes pour l’assuré soit benzines, huile de coupe et ammonium quaternaire), la capacité de travail était totale.

c. Dans son avis du 12 mars 2007, le SMR a considéré que l’assuré était capable de travailler à 100% dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles retenues par les experts.

d. Le 8 avril 2008, l’OAI a déterminé le degré d’invalidité de l’assuré en se fondant sur les statistiques de l’enquête suisse sur la structure des salaires (ci-après : ESS) pour les revenus avec et sans invalidité.

Concernant le revenu avec invalidité, il ressortait de la table TA1 de l’ESS 2006 que dans une activité simple et répétitive (niveau 4), tous secteurs confondus (ligne « total »), un homme pouvait réaliser un revenu de CHF 4'732.- en 2006, ce qui correspondait à CHF 4'933.- par mois (ou CHF 59'197.- par année) en tenant compte d’une durée normale de travail hebdomadaire de 41.7 heures (CHF 4'732.- x 41.7 / 40 = CHF 4'933.-). Les données de l’indice suisse nominal des salaires (ISS) pour l’année 2008 n’étant pas encore disponibles au moment du calcul du degré d’invalidité, l’OAI n’a pas indexé le montant de CHF 59'197.- à 2008 mais l’a repris tel quel. En mettant l’assuré au bénéfice d’un abattement de 10%, le revenu avec invalidité se montait à CHF 53'278.-.

S’agissant du revenu annuel brut sans invalidité, la table TA7 de l’ESS 2004 indiquait que dans le domaine des « activités de la construction » (ligne 11 de la table précitée), un homme pouvait réaliser, en 2004, un revenu médian de CHF 5'350.- dans une activité de niveau 3, ce qui correspondait à CHF 5'557.- par mois (ou CHF 66’929.- par année) en tenant compte d’une durée normale de travail hebdomadaire de 41.7 heures (CHF 5'350.- x 41.7 / 40 = CHF 5'557.-). En indexant le montant annuel de CHF 66'929.- à l’ISS (table T39), on obtenait CHF 68'250.- pour l’année 2006 (CHF 66'929.- x 2014 / 1975 = CHF 68'250.-).

En comparant les deux revenus, la perte de gain était de CHF 14'972.- et le degré d’invalidité de 21.9% [(CHF 68'250.- – CHF 53'278.-) x 100 / CHF 68'250.- = 21.9%, arrondi à 22%].

e. Le 4 septembre 2008, l’OAI a rendu une décision refusant l’octroi d’une rente d’invalidité à l’assuré. Dans la mesure où elles n’étaient pas de nature à réduire le dommage, de nouvelles mesures professionnelles n’avaient pas lieu d’être accordées. En revanche, si cela s’avérait nécessaire, l’assuré pourrait bénéficier d’une aide au placement à condition d’en faire la demande.

f. L’assuré a contesté cette décision en interjetant recours par-devant le Tribunal cantonal des assurances sociales (ci-après : TCAS) alors compétent. À l’appui de sa position, il a soutenu que sans une formation, une activité adaptée à temps complet n’était pas exigible en raison du problème rachidien. Il a également fait état de problèmes psychiques lui interdisant l’accès à certaines professions. Aussi a-t-il conclu à l’octroi d’une mesure de réadaptation, subsidiairement à l’octroi d’une demi-rente d’invalidité.

g. Par arrêt du 17 septembre 2009 (ATAS/115/2009), le TCAS a partiellement admis le recours. Se référant à l’avis du SMR, il a retenu une incapacité de travail totale de l’assuré dans son activité habituelle et a jugé que si la capacité de travail était complète dans une activité adaptée, cette dernière n’avait pas été définie concrètement par le service de réadaptation professionnelle. Partant, le TCAS a annulé la décision du 4 septembre 2008, octroyé une mesure d’orientation professionnelle dans le sens des considérants et renvoyé la cause à l’OAI afin qu’il mette en œuvre la mesure, avant de se prononcer à nouveau quant à la demande de prestations de l’assuré.

h. Suite au renvoi de la cause, l’OAI a organisé une mesure d’observation professionnelle, soit un stage auprès des établissements publics pour l’intégration (EPI), lequel a été effectué du 8 février au 7 mars 2010. Dans leur rapport du 8 mars 2010, les EPI ont conclu que les capacités physiques observées étaient incompatibles avec une activité professionnelle légère, même à temps partiel, en raison des difficultés de maintien de la position assise, des alternances fréquentes de positions ainsi que du risque d’absentéisme. Dans ces conditions, l’état physique de l’assuré ne lui permettait pas de suivre une formation professionnelle. Les EPI se référaient pour le surplus aux conclusions de leur médecin consultant, le docteur G______, auxquelles ils adhéraient.

i. Dans son rapport du 17 mars 2010, le Dr G______ relevait que s’il existait indéniablement des troubles statiques et dégénératifs du rachis qui contre-indiquaient les activités physiques lourdes et le maintien à très long terme de positions statiques, il semblait cependant peu vraisemblable qu’aucune activité ne pût être exercée. Les difficultés psychiques de l’assuré, liées à des troubles de la personnalité anciens et à une certaine projectivité, semblaient constituer un obstacle significatif pour toute reprise d’activité ou tout projet de formation. Ces difficultés – qui semblaient permanentes depuis de nombreuses années si on se référait au parcours personnel très difficile de l’assuré, aux nombreux épisodes de décompensation, de tentamens et de consommation passée abusive d’alcool et de cannabis – étaient considérées comme non significatives par les experts commis par l’AI. Si les troubles psychiques n’étaient pas considérés comme invalidants de manière directe, le Dr G______ était d’avis qu’ils jouaient néanmoins un rôle déterminant dans la situation actuelle.

j. Par avis du 9 juillet 2010, le SMR a estimé que les traits de personnalité révélaient un caractère particulier, mais non une incapacité de travail durable. En l’état du dossier, les conclusions du rapport du SMR du 12 mars 2007 restaient valables.

k. Par décision du 7 mars 2011, l’OAI a rejeté la demande de prestations, au motif que, suite au stage aux EPI, le service de réadaptation avait considéré que des mesures professionnelles n’étaient pas indiquées, dès lors qu’elles ne seraient pas de nature à diminuer le dommage ou à favoriser la reprise d’une activité adaptée. Par ailleurs, l’assuré avait les capacités de trouver une activité adaptée ne nécessitant pas de formation qualifiée.

l. Le 8 avril 2011, l’assuré a interjeté recours contre cette décision.

m. Par arrêt du 24 août 2011 (ATAS/770/2011), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la CJCAS ou la chambre de céans), désormais compétente, a partiellement admis le recours, en ce sens qu’elle a confirmé la décision sur la question du droit à une mesure d’ordre professionnel et renvoyé la cause à l’OAI pour instruction complémentaire et nouvelle décision sur le droit à la rente. À l’appui de sa décision, la chambre de céans a considéré qu’elle n’était pas en mesure de statuer sur le droit à la rente dès lors que le rapport du SMR sur lequel se fondait l’OAI datait de plus de quatre ans et que le dossier ne contenait pas de renseignements médicaux postérieurs à cette expertise.

n. Les 21 janvier et 29 avril 2013, le docteur H______, spécialiste FMH en rhumatologie, médecine physique et réadaptation, et le docteur I______, spécialiste en psychiatrie, médecins auprès du SMR, ont procédé à un examen de l’assuré.

Selon leur rapport du 16 août 2013, ils ont diagnostiqué les atteintes suivantes : trouble de la personnalité mixte, narcissique, impulsif et anxieux décompensé (F61.0), majoration des symptômes pour des raisons psychologiques (F68.0), lombalgies dans un contexte de troubles dégénératifs postérieurs en L5-S1, gonalgies antérieures dans un contexte de surcharge du tendon quadricipital, de vraisemblable syndrome rotulien bilatéral (avec répercussion sur la capacité de travail) et de rachialgies chroniques, avec absence de substrat organique, dans un contexte de syndrome douloureux psychogène, obésité de classe II, arthrose débutante des mains et de trouble dépressif récurrent, épisode actuel moyen sans syndrome somatique (F33.10) (sans répercussion sur la capacité de travail).

Les atteintes diagnostiquées entraînaient les limitations fonctionnelles suivantes sur le plan somatique : pas de flexions-extensions répétées du tronc ou d’attitude prolongée en porte-à-faux ; pas de position statique assise au-delà d’une heure, debout au-delà de 30 minutes ; pas de ports de charges répétés au-delà de 10 kg ; pas de montée descente d’escaliers; pas de travail debout prolongé au-delà d’une heure ; pas de travail accroupi ou à genoux. Sur le plan psychique, les limitations fonctionnelles se présentaient ainsi : impulsivité, anxiété, vulnérabilité psychique, diminution de la résistance psychique, surestimation de soi et douleurs ressenties.

Compte tenu des atteintes diagnostiquées et des limitations fonctionnelles retenues, les médecins ont considéré que l’assuré était totalement incapable de travailler dans son activité initiale de maçon. En revanche, dans l’activité d’employé chez B______ et dans toute activité adaptée, il était capable de travailler à 50% depuis janvier 2007, étant précisé que la réduction de sa capacité de travail était due à son atteinte psychique exclusivement.

o. Par avis du 16 août 2013, la docteure J______, médecin auprès du SMR, a constaté, après avoir résumé l’expertise du 16 août 2013, que celle-ci comportait une appréciation différente d’un même état de fait. En effet, la description clinique était superposable à celle de janvier 2007 mais les avis sur les répercussions de celle-ci divergeaient. En présence de deux appréciations psychiatriques différentes portant sur un même état de fait, sans aggravation entre les deux, il convenait de mandater le docteur K______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, pour expertise.

p. Dans un rapport d’expertise du 24 janvier 2014, le Dr K______ a diagnostiqué une majoration des symptômes physiques pour des raisons psychologiques (F68.0). Présente depuis 1993, cette atteinte était sans conséquence sur la capacité de travail. L’examen clinique effectué le 22 janvier 2014 n’avait pas mis en évidence un état induisant des limitations fonctionnelles psychiques ou une incapacité de travail durable même partielle. Partant, la capacité de travail de l’assuré était complète sur le plan psychique (8 heures et 30 minutes par jour).

q. Par avis du 19 mai 2014, le SMR a considéré au vu du rapport d’expertise du Dr K______ que les conclusions du rapport du SMR du 12 mars 2007 restaient valables.

r. Le 15 avril 2015, l’OAI a rendu une décision de refus de rente d’invalidité et de mesures professionnelles.

s. Le 19 mai 2015, l’assuré a interjeté recours contre cette décision, concluant d’une part à son annulation, en tant qu’elle lui refusait le droit à un reclassement professionnel et d’autre part, à l’octroi de mesures d’ordre professionnel et d’un reclassement sous la forme d’une formation HES en éducation sociale.

t. Par arrêt du 22 décembre 2015 (ATAS/998/2015), la CJCAS a rejeté le recours en tant qu’il était recevable.

À l’appui de ce dispositif, elle a constaté que l’arrêt du 24 août 2011 n’avait fait l’objet d’aucun recours, de sorte qu’il était entré en force de chose jugée, entraînant par là même l’entrée en force de chose décidée de la décision du 7 mars 2011 en tant que celle-ci refusait le droit à des mesures d’ordre professionnel à l’assuré. Étant donné que l’OAI s’était en réalité uniquement prononcé sur le droit à une rente d’invalidité dans sa décision du 15 avril 2015, en y rappelant pour le surplus la teneur de la décision du 7 mars 2011 s’agissant des mesures d’ordre professionnel, la CJCAS ne pouvait examiner si l’assuré avait droit, au regard d’un état de fait actualisé, à des mesures d’ordre professionnel. Enfin, la décision du 15 avril 2015 n’était pas contestée par l’assuré en tant qu’elle lui niait le droit à une rente. Par conséquent, le recours devait être rejeté en tant qu’il était recevable.

u. Saisi d’un recours de l’assuré contre l’arrêt de la CJCAS du 22 décembre 2015 (ATAS/998/2015), le Tribunal fédéral a déclaré celui-ci irrecevable par arrêt 9C_84/2016 du 22 septembre 2016.

C. a. Le 29 août 2023, l’assuré a déposé une nouvelle demande de prestations auprès de l’OAI en raison d’anciennes lombalgies et sciatiques chroniques. S’y étaient ajoutées, plus récemment, des cervicalgies et une mobilité réduite des épaules et des bras (discopathie cervicale C6/C7), des troubles dégénératifs de la colonne et des articulations, un burnout, une dépression sévère et des troubles de l’anxiété. Son dernier emploi avait été celui de « Responsable Ports-Francs et Logistique », exercé à plein temps du 1er juillet 2018 au 31 octobre 2022 pour le compte de la société L______ (ci-après : L______ ou l’employeur).

b. Dans des rapports de 25 juillet et 27 septembre 2023, le docteur M______, spécialiste en médecine interne générale, a retenu que les diagnostics ayant des répercussions sur la capacité de travail consistaient en un état dépressif et une omalgie des deux côtés (tendinopathie de la coiffe des rotateurs bilatérale), dans le contexte d’un syndrome douloureux chronique cervical et lombaire sur phénomènes dégénératifs, d’une dépression enkystée et d’un trouble de la personnalité mixte, anxieux et obsessionnel compulsif. En outre, depuis un accident de vélo survenu en 2019, lui ayant causé un trauma facial et une triple fracture de l’auriculaire droit, l’assuré présentait une diplopie horizontale constante, d’origine indéterminée, qui était toutefois en régression. Dans l’activité habituelle, la capacité de travail était nulle depuis le 23 mai 2022. L’exercice d’une activité adaptée pourrait être entrevue avec une période d’essai à un taux de 50% au plus.

c. Dans un rapport du 25 septembre 2023, le docteur N______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, qui suivait l’assuré depuis novembre 2022, a évoqué un état dépressif d’intensité sévère, avec une symptomatologie psychotique, et une consommation d’alcool nocive pour la santé entrainant des répercussions psychosociales (retrait social et problématiques sociales).

d. Dans un rapport du 7 novembre 2023, le Dr N______ a précisé que le trouble dépressif récidivant, épisode actuel léger, avec syndrome somatique (F33.01) et la modification durable de la personnalité après épisode de maladie psychique (en 2022 ; F62.1) avaient des répercussions durables sur la capacité de travail. Tel n’était en revanche pas le cas pour le trouble mental et du comportement en lien avec la consommation d’alcool, usage nocif pour la santé (F10.1). Du 16 juin 2022 au 14 octobre 2023, l’incapacité de travail avait été totale. Elle le restait à 100% pour une durée indéterminée dans l’activité habituelle dans le fret aérien (responsable des dépôts aux Ports Francs et chef d’équipe logistique). Depuis le 15 octobre 2023 en revanche, sa capacité de travail était de 50% dans une activité adaptée.

e. Par avis du 8 mai 2024, le SMR a considéré que les atteintes à la santé incapacitantes consistaient en un trouble dépressif récidivant, épisode actuel léger, avec syndrome somatique (F33.01), un trouble de la personnalité, une tendinopathie de la coiffe des rotateurs des deux épaules, des lombo-sciatalgies chroniques non déficitaires à bascule, sans signe de radiculopathie lésionnelle à l’électroneuromyographie (EMG) et des cervicalgies chroniques non déficitaires dans un contexte de troubles disco-dégénératifs étagés prédominant sur l’étage C6-C7 à droite. En lien avec ces atteintes psychiatriques et rhumatologiques, la capacité de travail était nulle dans toute activité dès le 23 mai 2022 mais dès le 15 octobre 2023, elle était de 50% dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles (préexistantes et nouvelles) suivantes : il convenait de privilégier les activités permettant d’alterner les positions assise et debout au moins toutes les 20 minutes, éviter de soulever des charges conséquentes (2 kg maximum) et de travailler avec les bras au-dessus des épaules.

f. Le 13 mai 2024, dans une note relative au choix de la méthode d’évaluation de l’invalidité, l’OAI a considéré qu’il convenait de reconnaître un statut d’actif à l’assuré.

g. Le 23 juillet 2024, l’OAI a déterminé le degré d’invalidité de l’assuré à 56% en prenant pour référence l’année 2024.

h. Par projet de décision du 25 juillet 2024, l’OAI a envisagé d’octroyer à l’assuré une rente d’invalidité s’élevant à 56% d’une rente entière, dès le 1er février 2024. Pour le surplus, des mesures d’ordre professionnel n’étaient pas indiquées.

i. Par courrier du 26 août 2024, l’assuré a indiqué que l’appréciation de l’OAI était conforme à sa situation actuelle, à cela près qu’il était en désaccord avec le revenu sans invalidité pris en considération. En effet, les salaires qu’il avait perçus depuis 2000 étaient la conséquence des problèmes de santé antérieurs à l’année en question. Dans ces conditions, son revenu sans invalidité devait être déterminé en fonction du gain réalisable par un maçon qualifié, avec maturité professionnelle. Son dossier AI comportait d’ailleurs des décisions plus anciennes dans lesquelles ce revenu avait été déterminé selon les données salariales relatives au secteur de la construction. Du reste, les statistiques sur les salaires médians genevois montraient que le revenu d’un maçon – présentant un profil comparable au sien – était d’au moins CHF 78'000.- par année en 2024. En conclusion, l’assuré a invité l’OAI à prendre en compte ces éléments dans la décision finale.

j. Par décision du 7 novembre 2024, l’OAI a octroyé à l’assuré une rente d’invalidité s’élevant à 56% d’une rente entière, dès le 1er février 2024.

D. a. Le 6 décembre 2024, l’assuré a saisi la chambre de céans d’un recours contre cette décision, concluant en substance à son annulation et à la détermination du degré d’invalidité sur la base du revenu sans invalidité (maçon qualifié) tel qu’il avait été pris pour base dans la décision du « 6 mai 2008 » (recte : 4 septembre 2008).

b. Par réponse du 16 janvier 2025, l’intimé a conclu au rejet du recours, motif pris que l’atteinte à la santé incapacitante avait débuté en mai 2022 et que le droit à une rente d’invalidité n’entrait en ligne de compte que dès février 2024. C’était donc à juste titre que l’OAI s’était fondé sur le dernier revenu effectif, étant précisé que le montant retenu n’avait pas été atteint selon le compte individuel.

c. Par réplique du 12 février 2025, le recourant a persisté dans ses conclusions et produit, entre autres :

-          un extrait de son compte salaire personnel 2021, dont il ressortait que son salaire mensuel brut de CHF 4'500.- lui était versé douze fois l’an ;

-          un certificat de travail établi le 9 septembre 2024 par L______, attestant que l’assuré avait travaillé au sein de cette entreprise du 1er janvier 2021 au 31 octobre 2022. Durant cette période, son activité consistait à « réceptionner et contrôler les marchandises pour l’export, contrôler et revoir l’emballage adapté pour le transport, organiser et réserver le transport selon le délai et le type de marchandise, consigner les envois dans les délais […], préparer les fiches de facturation et les transmettre au département concerné, collaborer avec les services douaniers et établir les documents nécessaires à l’expert, tenir à jour les inventaires des ports-francs, gérer les relations clients et répondre aux courriel et appels téléphoniques, gérer les relations fournisseurs et les informer des statuts des envois, encadrer et former les apprentis ».

Commentant les pièces produites, le recourant a indiqué que le salaire que lui versait L______ n’était pas en rapport avec le cahier des charges décrit dans le certificat de travail. Ses limitations fonctionnelles avaient été souvent invoquées pour refuser tout augmentation de salaire, son invalidité étant connue de l’employeur. Il avait par ailleurs été licencié pour raisons médicales, suite à l’aggravation de son état de santé.

d. Le 14 février 2025, la chambre de céans a transmis, pour information, une copie de cette écriture à l’intimé.

e. Les autres faits seront mentionnés, si nécessaire, dans la partie « en droit » du présent arrêt.

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ – E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA – RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI – RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 À teneur de l’art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s’appliquent à l’assurance-invalidité, à moins que la loi n’y déroge expressément.

La procédure devant la chambre de céans est ainsi régie par les dispositions de la LPGA et de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985 (LPA – E 5 10).

1.3 Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 60 al. 1 et 61 let. b LPGA ; art. 62 al. 1 et 89B LPA).

2.             Le litige porte sur le point de savoir si à la suite de sa nouvelle demande de prestations déposée le 29 août 2023, le recourant peut prétendre à l’octroi d’une rente d’invalidité supérieure à 56%.

3.              

3.1 Dans le cadre du développement continu de l’AI, la LAI, le règlement du 17 janvier 1961 sur l’assurance-invalidité (RAI – RS 831.201) et l’art. 17 LPGA notamment ont été modifiés avec effet au 1er janvier 2022 (modifications des 19 juin 2020 et 3 novembre 2021 ; RO 2021 705 et RO 2021 706).

En l’absence de disposition transitoire spéciale, ce sont les principes généraux de droit intertemporel qui prévalent, à savoir l’application du droit en vigueur lorsque les faits déterminants se sont produits (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et la référence). Lors de l’examen d’une demande d’octroi de rente d’invalidité, est déterminant le moment de la naissance du droit éventuel à la rente. Si cette date est antérieure au 1er janvier 2022, la situation demeure régie par les anciennes dispositions légales et réglementaires en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021. Si elle est postérieure au 31 décembre 2021, le nouveau droit s’applique (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_60/2023 du 20 juillet 2023 consid. 2.2 et les références).

Dans les cas de révision selon l'art. 17 LPGA, conformément aux principes généraux du droit intertemporel (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1), il convient d’évaluer, selon la situation juridique en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021, si une modification déterminante pour le droit à la rente est intervenue jusqu’à cette date. Si tel est le cas, les dispositions de la LAI et celles du RAI dans leur version valable jusqu'au 31 décembre 2021 sont applicables. Si la modification déterminante est intervenue après cette date, les dispositions de la LAI et du RAI dans leur version en vigueur à partir du 1er janvier 2022 sont applicables. La date de la modification se détermine selon l'art. 88a RAI (arrêts du Tribunal fédéral 8C_55/2023 du 11 juillet 2023 consid. 2.2 ; 8C_644/2022 du 8 février 2023 consid. 2.2.3).

3.2 En l’occurrence, il n’est pas contesté qu’une modification déterminante pour le droit à la rente est intervenue après le 1er janvier 2022 (capacité de travail nulle dans toute activité depuis le 23 mai 2022 et de 50% dans une activité adaptée dès le 15 octobre 2023), de sorte que les dispositions applicables seront citées dans leur nouvelle teneur.

3.3 Lorsque l’administration entre en matière sur une demande de révision déposée par la personne assurée (art. 87 al. 2 RAI), elle doit traiter l’affaire au fond et vérifier que la modification du degré d’invalidité rendue plausible par l’assuré (prenant par ex. la forme d’un nouveau diagnostic posé au cours de la période de comparaison déterminante ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_735/2019 du 25 février 2020 consid. 4.5) est réellement survenue. Si l’office AI entre en matière sur la demande de révision, il doit procéder à un examen complet (« allseitig ») en fait et en droit (arrêt du Tribunal fédéral 9C_4/2021 du 1er mars 2021 consid. 6.1.2). S’il constate que le degré d’invalidité n’a pas changé depuis le prononcé de la précédente décision entrée en force (rejetant la demande de rente ou de révision de la rente), il rejette la demande. Dans le cas contraire, il doit en outre examiner si le degré d’invalidité permet d’ouvrir ou augmenter le droit à la rente. En cas de recours, le même devoir d’examen matériel incombe au juge (ATF 117 V 198 consid. 3a ; MEYER/ REICHMUTH, Rechtsprechung des Bundesgerichts zum Bundesgesetz über die Invalidenversicherung [IVG], 4e éd., 2022, n. 122 ad art. 30 LAI).

3.4 L’art. 17 al. 1 LPGA dispose que la rente d’invalidité est, d’office ou sur demande, révisée pour l’avenir, à savoir augmentée, réduite ou supprimée, lorsque le taux d’invalidité de l’assuré :

a. subit une modification d’au moins 5 points de pourcentage, ou

b. atteint 100%.

3.4.1 Tout changement important des circonstances propre à influencer le degré d’invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision selon l’art. 17 LPGA (ATF 149 V 91 consid. 7.5 et les références). La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l’état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important. Tel est le cas lorsque la capacité de travail s’améliore grâce à l’accoutumance ou à une adaptation au handicap (ATF 147 V 167 consid. 4.1 et les références).

Une amélioration de la capacité de gain ou de la capacité d’accomplir les travaux habituels de l’assuré n’est déterminante pour la suppression de tout ou partie du droit aux prestations qu’à partir du moment où l’on peut s’attendre à ce que l’amélioration constatée se maintienne durant une assez longue période. Il en va de même lorsqu’un tel changement déterminant a duré trois mois déjà, sans interruption notable et sans qu’une complication prochaine soit à craindre (art. 88a al. 1 RAI). Le fardeau de la preuve quant à cette amélioration de la capacité de travail incombe à l’administration (arrêt du Tribunal fédéral 8C_510/2020 du 15 avril 2021 consid. 2.2 et les références).

3.4.2 La base de comparaison déterminante dans le temps pour l’examen d’une modification du degré d’invalidité lors d’une révision de la rente est constituée par la dernière décision entrée en force qui repose sur un examen matériel du droit à la rente avec une constatation des faits pertinents, une appréciation des preuves et une comparaison des revenus conformes au droit (ATF 147 V 167 consid. 4.1 et la référence).

Lorsque la comparaison des états de fait déterminants dans le temps met en évidence une modification des circonstances pertinentes, le droit à la rente doit être examiné à nouveau sous tous ses aspects factuels et juridiques, sans que les évaluations antérieures ne revêtent un caractère obligatoire (ATF 145 V 141 consid. 5.4 ; 141 V 9 consid. 2.3 et 6.1; arrêt 9C_585/2023 du 25 janvier 2024 consid. 6.2). Il n’est pas nécessaire que ce soit l’élément de fait qui s’est modifié qui conduise à fixer différemment le droit à la rente. Selon la jurisprudence, il suffit qu’à la suite de la modification d’une circonstance, un autre élément déterminant résultant de l’examen complet du droit à la prestation entraîne une augmentation, une diminution ou une suppression de la rente (ATF 141 V 9 consid. 2.3; Margit MOSER-SZELESS, Commentaire romand LPGA, 2018, n. 27 ad art. 17 LPGA et les références).

4.              

4.1 Aux termes des art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI, est réputée invalidité, l’incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d’une infirmité congénitale, d’une maladie ou d’un accident. Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l’ensemble ou d’une partie des possibilités de gain de l’assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d’une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu’elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain.

De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2).

4.2 La notion d’invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale ; ce sont les conséquences économiques objectives de l’incapacité fonctionnelle qu’il importe d’évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

4.3 A droit à une rente d’invalidité, l’assuré dont la capacité de gain ou la capacité d’accomplir ses travaux habituels ne peut pas être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles, qui a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40% en moyenne durant une année sans interruption notable et qui, au terme de cette année, est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins (art. 28 al. 1 LAI).

4.4 En vertu de l’art. 28b LAI, la quotité de la rente est fixée en pourcentage d’une rente entière (al. 1). Pour un taux d’invalidité compris entre 50 et 69%, la quotité de la rente correspond au taux d’invalidité (al. 2) ; pour un taux d’invalidité supérieur ou égal à 70%, l’assuré a droit à une rente entière (al. 3). Pour les taux d’invalidité compris entre 40 et 49%, la quotité de la rente s’échelonne de 25 à 47.5% (al. 4).

La quotité de la rente est déterminée en fonction de l’incapacité de gain au moment où le droit à la rente prend naissance (art. 28 al. 1 let. c LAI). Le droit à la rente naît au plus tôt à l’échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré à fait valoir son droit aux prestations conformément à l’art. 29 al. 1 LPGA, mais pas avant le mois qui suit le 18e anniversaire de l’assuré (art. 29 al. 1 LAI)

4.5 Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler (ATF 140 V 193 consid. 3.2 et les références ; 125 V 256 consid. 4 et les références). En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

 

 

5.              

5.1 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b et les références ; 125 V 193 consid. 2 et les références ; cf. 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

5.2 Dans le domaine des assurances sociales notamment, la procédure est régie par le principe inquisitoire, selon lequel il appartient au juge d’établir d’office l’ensemble des faits déterminants pour la solution du litige et d’administrer, le cas échéant, les preuves nécessaires (cf. art. 43 al. 1 et 61 let. c LPGA). En principe, les parties ne supportent ni le fardeau de l’allégation ni celui de l’administration des preuves. Cette maxime doit cependant être relativisée par son corollaire, soit le devoir de collaborer des parties, lequel comprend l’obligation d’apporter, dans la mesure où cela est raisonnablement exigible, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués (ATF 138 V 86 consid. 5.2.3 ; 125 V 193 consid. 2). Si le principe inquisitoire dispense les parties de l’obligation de prouver, il ne les libère pas du fardeau de la preuve, dans la mesure où, en cas d’absence de preuve, c’est à la partie qui voulait en déduire un droit d’en supporter les conséquences, sauf si l’impossibilité de prouver un fait peut être imputée à la partie adverse (ATF 124 V 372 consid. 3 ; RAMA 1999 n° U 344 p. 418 consid. 3). Cette règle ne s’applique toutefois que s’il se révèle impossible, dans le cadre de la maxime inquisitoire et en application du principe de la libre appréciation des preuves, d’établir un état de fait qui correspond, au degré de la vraisemblance prépondérante, à la réalité (ATF 139 V 176 consid. 5.2 et les références).

6.              

6.1 Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être évalué sur la base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait pu réaliser s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 8 al. 1 et art. 16 LPGA).

La comparaison des revenus s'effectue, en règle ordinaire, en chiffrant aussi exactement que possible les montants de ces deux revenus et en les confrontant l'un avec l'autre, la différence permettant de calculer le taux d'invalidité (méthode générale de comparaison des revenus ; ATF 128 V 29 consid. 1 ; 104 V 135 consid. 2a et 2b).

Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de se placer au moment de la naissance du droit à la rente ; les revenus avec et sans invalidité doivent être déterminés par rapport à un même moment et les modifications de ces revenus susceptibles d'influencer le droit à la rente survenues jusqu'au moment où la décision est rendue doivent être prises en compte (ATF 129 V 222 et 128 V 174).

6.2 Pour déterminer le revenu hypothétique que l'assuré aurait pu réaliser sans l’atteinte à la santé (revenu sans invalidité), ce n’est pas le revenu de sa dernière activité qui est déterminant, mais le revenu qu’il aurait réalisé au degré de la vraisemblance prépondérance s’il n’était pas devenu invalide (arrêt du Tribunal fédéral 9C_887/2017 du 7 juin 2018 consid. 4.2; Madeleine RANDACHER, in KIESER/ KRADOLFER/ LENDFERS [éd.], ATSG-Kommentar, 5e éd. 2024, n. 20 ad art. 16 LPGA). Partant de la présomption que l’assuré aurait continué d’exercer son activité sans la survenance de son invalidité, ce revenu se déduit en principe du salaire réalisé en dernier lieu par l’assuré avant l’atteinte à la santé, en prenant en compte également l’évolution des salaires jusqu’au moment de la naissance du droit à la rente ; des exceptions ne peuvent être admises que si elles sont établies au degré de la vraisemblance prépondérante (ATF 144 I 103 consid. 5.3 ; 139 V 28 consid. 3.3.2 et les références ; 135 V 297 consid. 5.1 et les références ; 134 V 322 consid. 4.1 et les références). À cet égard, le fardeau de la preuve incombe à la partie pour qui la dérogation au salaire réalisé en dernier lieu avant l’atteinte à la santé est plus favorable. Il peut s’agir alternativement de l’assuré (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_818/2018 du 5 avril 2019 consid. 4.2.1 et la référence) ou de l’office AI (arrêt du Tribunal fédéral 9C_225/2019 du 11 septembre 2019 consid. 4.2.1 ; Ulrich MEYER/ Marco REICHMUTH, op. cit., n. 53 ad art. 28a LAI).

Si, exceptionnellement, le revenu sans invalidité ne peut pas être déterminé sur la base du dernier revenu de l’activité lucrative effectivement touché parce que ce dernier ne peut pas être déterminé avec suffisamment de précision, il est possible d’utiliser des valeurs statistiques. C’est le cas, par exemple, si l’assuré est absent du marché du travail depuis plusieurs années, si l’emploi qu’il occupait a été supprimé pour des raisons d’ordre opérationnel (arrêt du Tribunal fédéral 8C_513/2014 du 17 décembre 2014) ou si le revenu réalisé durant les premières années d’une activité lucrative indépendante est peu représentatif (arrêt du Tribunal fédéral 9C_148/2016 du 2 novembre 2016 ; cf. Circulaire sur l’invalidité et les rentes dans l’assurance-invalidité [CIRAI], ch. 3313).

6.2.1 Dans un arrêt du 6 mars 2009, le Tribunal fédéral a considéré dans le cas d’une personne réintégrée avec succès dans le monde du travail grâce à des moyens auxiliaires et un reclassement que son revenu sans invalidité devait être déterminé non pas sur la base du dernier revenu réalisé après son reclassement mais en fonction du revenu (plus élevé) qu’elle réalisait avant cette mesure (arrêt du Tribunal fédéral 9C_24/2009 du 6 mars 2009).

6.2.2 Dans un arrêt du 11 juillet 2024, le Tribunal fédéral a déterminé le revenu sans invalidité au moyen du revenu statistique (moins élevé) correspondant à la formation effectuée au moment de la survenance de l’atteinte à la santé (CFC de gestionnaire du commerce de détail) et non pas du revenu statistique (plus élevé) auquel il pouvait prétendre en tant que titulaire d’un CFC de commerce qu’il avait obtenu grâce aux mesures professionnelles octroyées par l’office AI, motif pris qu’il n’existait pas d’indices concrets selon lesquels l’assuré aurait entrepris de lui-même cette seconde formation, c’est-à-dire sans l’intervention de l’office AI (arrêt du Tribunal fédéral 8C_770/2023 du 11 juillet 2024).

6.2.3 Dans un arrêt du 7 juin 2018, le Tribunal fédéral a en revanche admis une exception à la prise en compte du revenu que l’assuré aurait réalisé au degré de la vraisemblance prépondérance s’il n’était pas devenu invalide, ce dans le contexte suivant : titulaire d’un CFC d’installateur en chauffage, l’assuré avait exercé cette profession durant quatre ans mais dû y mettre fin en raison d’un accident. À la faveur d’une décision de l’office AI, il avait pu bénéficier d’une formation d’employé de commerce (avec maturité professionnelle et CFC) qui lui avait permis d’accéder à un poste d’employé administratif cantonal, exercé à 100% durant dix ans jusqu’à la survenance de problèmes de santé de nature maladive qui l’avaient contraint à réduire son taux d’activité à 50%. Selon le Tribunal fédéral, si la deuxième atteinte à la santé n’était pas survenue, l’assuré aurait continué à exercer son activité d’employé administratif. Aussi convenait-il de fixer le revenu sans invalidité sur la base du salaire réalisé à plein temps dans cette activité – et non en fonction du revenu (moins élevé) d’installateur en chauffage –en prenant en compte son évolution jusqu’à la naissance du droit à la rente (arrêt du Tribunal fédéral 9C_887/2017 du 7 juin 2018).

6.2.4 Il ressort néanmoins d’un arrêt du Tribunal fédéral du 20 décembre 2023 que malgré l’arrêt 9C_887/2017 précité, la survenance d’une deuxième atteinte à la santé ne permet pas de conclure qu’il faudrait nécessairement fixer le revenu sans invalidité sur la base du revenu réalisé immédiatement avant cette seconde atteinte. Dans le cas d’un assuré victime de deux accidents à sept ans d’intervalle (chute dans un escalier en avril 2007 avec scapulalgie à l’épaule droite ; accident de la circulation en 2015 ayant entraîné des troubles psychiques et somatiques multiples), à qui l’office AI avait octroyé des mesures professionnelles (prise en charge d’une formation d’agent immobilier qu’il avait commencée de sa propre initiative après l’accident d’avril 2007), le Tribunal fédéral a estimé qu’il n’était pas manifestement incorrect de déterminer son revenu sans invalidité en 2016 sur la base du revenu tiré de l’activité indépendante accessoire qu’il exerçait dans la rénovation de bâtiments et du salaire de chauffeur à plein temps qu’il réalisait en même temps jusqu’à la fin de son contrat en octobre 2007. En revanche, le revenu (plus élevé) qu’il réalisait dès 2009 en tant que directeur d’une Sàrl n’était pas déterminant étant donné qu’il n’était pas établi au degré de la vraisemblance prépondérante qu’il aurait effectué une reconversion professionnelle si l’accident d’avril 2007 n’avait pas eu lieu (arrêt du Tribunal 8C_399/2023 du 20 décembre 2023).

6.3 Quant au revenu d’invalide, il doit être évalué avant tout en fonction de la situation professionnelle concrète de l’intéressé (ATF 135 V 297 consid. 5.2). Lorsque l’assuré n’a pas repris d’activité, ou aucune activité adaptée lui permettant de mettre pleinement en valeur sa capacité de travail résiduelle, contrairement à ce qui serait raisonnablement exigible de sa part, le revenu d’invalide peut être évalué sur la base de données statistiques, telles qu’elles résultent de l’ESS (ATF 143 V 295 consid. 2.2 ; 135 V 297 consid. 5.2 et les références). Dans ce cas, il convient de se fonder, en règle générale, sur les salaires mensuels indiqués dans la table TA1 de l’ESS, à la ligne « total secteur privé » (ATF 124 V 321 consid. 3b/aa), étant précisé que, depuis l’ESS 2012, il y a lieu d’appliquer la table TA1_skill_ level (ATF 142 V 178). On se réfère alors à la statistique des salaires bruts standardisés, en se fondant toujours sur la médiane ou valeur centrale (ATF 126 V 75 consid. 3b/bb ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_58/2021 du 30 juin 2021 consid. 4.1.1). La valeur statistique médiane s’applique alors, en principe, à tous les assurés qui ne peuvent plus accomplir leur ancienne activité parce qu’elle est physiquement trop astreignante pour leur état de santé, mais qui conservent néanmoins une capacité de travail importante dans des travaux légers. Pour ces assurés, ce salaire statistique est suffisamment représentatif de ce qu’ils seraient en mesure de réaliser en tant qu’invalides dès lors qu’il recouvre un large éventail d’activités variées et non qualifiées (branche d’activités), n’impliquant pas de formation particulière, et compatibles avec des limitations fonctionnelles peu contraignantes (cf. arrêts du Tribunal fédéral 9C_603/2015 du 25 avril 2016 consid. 8.1 et 9C_242/2012 du 13 août 2012 consid. 3). Il convient de se référer à la version de l’ESS publiée au moment déterminant de la décision querellée (ATF 143 V 295 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_655/2016 du 4 août 2017 consid. 6.3).

Toutefois, lorsque cela apparaît indiqué dans un cas concret pour permettre à l'assuré de mettre pleinement à profit sa capacité résiduelle de travail, il y a lieu parfois de se référer aux salaires mensuels de secteurs particuliers (secteur 2 [production] ou 3 [services]), voire à des branches particulières. Tel est notamment le cas lorsqu’avant l'atteinte à la santé, l'assuré a travaillé dans un domaine pendant de nombreuses années et qu'une activité dans un autre domaine n'entre pas en ligne de compte. En outre, lorsque les circonstances du cas concret le justifient, on peut s'écarter de la table TA1 (secteur privé) pour se référer à la table TA7 (secteur privé et secteur public [Confédération] ensemble), respectivement T17 (à partir de 2012) si cela permet de fixer plus précisément le revenu d'invalide et que le secteur en question est adapté et exigible (ATF 133 V 545 et les références citées ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_124/2021 du 2 août 2021 consid. 4.4.1 ; 8C_111/2021 du 30 avril 2021 consid. 4.2.1 et les références).

6.3.1 Depuis la 10e édition des ESS (ESS 2012), les emplois sont classés par l’Office fédéral de la statistique (OFS) par profession en fonction du type de travail qui est généralement effectué. L’accent est ainsi mis sur le type de tâches que la personne concernée est susceptible d’assumer en fonction de ses qualifications (niveau de ses compétences) et non plus sur les qualifications en elles-mêmes. Quatre niveaux de compétence ont été définis en fonction de neuf groupes de profession (voir table T17 de l’ESS 2012 p. 44) et du type de travail, de la formation nécessaire à la pratique de la profession et de l’expérience professionnelle (voir table TA1 « skill level » de l’ESS 2012 ; ATF 142 V 178 consid. 2.5.3). Le niveau 1 est le plus bas et correspond aux tâches physiques et manuelles simples, tandis que le niveau 4 est le plus élevé et regroupe les professions qui exigent une capacité à résoudre des problèmes complexes et à prendre des décisions fondées sur un vaste ensemble de connaissances théoriques et factuelles dans un domaine spécialisé (on y trouve par exemple les directeurs/trices, les cadres de direction et les gérant[e]s, ainsi que les professions intellectuelles et scientifiques). Entre ces deux extrêmes figurent les professions dites intermédiaires (niveaux 3 et 2). Le niveau 3 implique des tâches pratiques complexes qui nécessitent un vaste ensemble de connaissances dans un domaine spécialisé (notamment les techniciens, les superviseurs, les courtiers ou encore le personnel infirmier). Le niveau 2 se réfère aux tâches pratiques telles que la vente, les soins, le traitement des données, les tâches administratives, l’utilisation de machines et d’appareils électroniques, les services de sécurité et la conduite de véhicules. L’application du niveau 2 se justifie uniquement si la personne assurée dispose de compétences ou de connaissances particulières. L’accent est donc mis sur le type de tâches que l’assuré est susceptible d’assumer en fonction de ses qualifications mais pas sur les qualifications en elles-mêmes. Il faut encore préciser que l’expérience professionnelle de plusieurs années dont peut se prévaloir un assuré – sans formation commerciale ni autre qualification particulière acquise pendant l’exercice de la profession – ne justifie pas à elle seule un classement supérieur au niveau de compétence 2, dès lors que dans la plupart des secteurs professionnels un diplôme ou du moins des formations et des perfectionnements (formalisés) sont exigés (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_657/2023 du 14 juin 2024 consid. 6.1, destiné à la publication).

Pour les personnes assurées qui, après la survenance de l’atteinte à la santé, ne peuvent plus effectuer que des travaux légers et non exigeants sur le plan intellectuel, il convient de se baser sur le salaire mensuel brut moyen (ligne « total ») des hommes (ou des femmes) pour des activités simples et répétitives, c’est-à-dire sur le niveau de compétence 1, qui est le plus bas (arrêt du Tribunal fédéral 8C_695/2015 du 19 novembre 2015 consid. 4.2 et les références ; cité in Ulrich MEYER/ Marco REICHMUTH, op. cit., n. 101 ad art. 28a LAI).

6.3.2 Selon l’art. 26bis al. 3 RAI (dans sa teneur en vigueur du 1er janvier 2022 au 31 décembre 2023), si, du fait de l’invalidité, les capacités fonctionnelles de l’assuré au sens de l’art. 49 al. 1bis RAI, ne lui permettent de travailler qu’à un taux d’occupation de 50% ou moins, une déduction de 10% pour le travail à temps partiel est opérée sur la valeur statistique.

Dans un arrêt de principe (ATF 150 V 410), le Tribunal fédéral a considéré que le régime de déduction sur les salaires statistiques des ESS, tel que prévu de manière exhaustive à l’art. 26bis al. 3 RAI (dans sa teneur en vigueur du 1er janvier 2022 au 31 décembre 2023), n’est pas compatible avec le droit fédéral. Le Tribunal fédéral a relevé notamment qu’il ressortait des travaux préparatoires relatifs à la révision de la LAI (Développement continu de l’AI), que la jurisprudence actuelle en matière d’abattement devait être, pour l’essentiel, reprise et que la méthode d’évaluation du taux d’invalidité devait, en principe, rester inchangée (consid. 9.4.2). Or, en limitant la déduction à 10% dans le cas où les capacités fonctionnelles de la personne assurée ne lui permettent de travailler qu’à un taux d’occupation de 50% ou moins (cf. art. 26bis al. 3 RAI), le Conseil fédéral avait choisi une autre voie (cf. consid. 9.4.3). Par conséquent, si en raison des circonstances du cas d’espèce, le salaire statistique des ESS doit être adapté au-delà de ce que prévoit l’art. 26bis al. 3 RAI, il y a lieu recourir, en complément, à la jurisprudence appliquée jusqu’à présent par le Tribunal fédéral (consid. 10.6).

Le 1er janvier 2024, la modification de l’art. 26bis al. 3 RAI du 18 octobre 2023 (RO 2023 635) est entrée en vigueur.

Selon sa nouvelle teneur, l’art. 26bis al. 3 RAI prévoit désormais qu’une déduction de 10% est opérée sur la valeur statistique visée à l’al. 2. Si, du fait de l’invalidité, l’assuré ne peut travailler qu’avec une capacité fonctionnelle au sens de l’art. 49, al. 1bis, de 50% ou moins, une déduction de 20% est opérée. Aucune déduction supplémentaire n’est possible.

7.             Conformément aux considérants qui précèdent (ci-dessus : consid. 3.4.2), il convient en l’espèce de comparer la situation telle qu’elle se présentait lors de la décision du 15 avril 2015 avec celle existant au moment de la décision litigieuse, du 7 novembre 2024, pour apprécier le bien-fondé d’une éventuelle révision à opérer en application de l’art. 17 LPGA.

Il ressort en l’espèce du dossier de l’assuré que la décision du 15 avril 2015 – lui refusant une rente d’invalidité et des mesures professionnelles –, se fondait sur l’avis du SMR du 19 mai 2014, renvoyant à un précédent avis du SMR du 12 mars 2007 aux termes duquel la capacité de travail était totale dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles retenues par les Drs E______ et F______ dans leur rapport d’expertise rhumatologique et psychiatrique du 14 février 2007.

À la suite du dépôt, le 29 août 2023, d’une nouvelle demande de prestations, le SMR a estimé, à l’examen des rapports des Drs M______ et N______ et des atteintes incapacitantes nouvelles rapportées par ces médecins que la capacité de travail était nulle dans toute activité dès le 23 mai 2022, qu’elle le resterait dans l’activité habituelle de l’assuré (responsable des dépôts aux Ports Francs et chef d’équipe logistique) mais que depuis le 15 octobre 2023, elle était de 50% dans une activité adaptée permettant d’alterner les positions assise et debout au moins toutes les 20 minutes, n’impliquant ni port de charges de plus de 2 kg ni travail avec les bras au-dessus des épaules.

La chambre de céans constate que les rapports des médecins traitants sur lesquels le SMR se fonde sont suffisamment circonstanciés et explicites pour permettre de conclure à la survenance d’une aggravation de l’état de santé par rapport à la situation qui prévalait en avril 2015. Dans la mesure où l’avis du 8 mai 2024 du SMR fait siennes les appréciations bien motivées et non contestées de ces médecins, il convient de lui reconnaître valeur probante. Aussi la chambre de céans considérera-t-elle qu’il est établi, au degré requis de la vraisemblance prépondérante, que depuis le 23 mai 2022, la capacité de travail du recourant est nulle dans son activité habituelle et que depuis le 15 octobre 2023, elle est de 50% dans une activité adaptée. Il s’ensuit que la décision litigieuse pouvait valablement se fonder sur cet avis du SMR.

8.             Il reste à examiner le degré d’invalidité retenu par l’intimé.

8.1 En l’espèce, l’intimé a fixé le degré d’invalidité du recourant à 56% en 2024 sur la base du raisonnement et des calculs suivants : il convenait de déterminer le revenu avec invalidité sur la base de l’ESS et d’établir la comparaison suivante : en se référant à la table TA1 (tirage « skill level »), secteur privé, tous secteurs confondus (ligne « total »), un homme pouvait réaliser, dans une activité simple et répétitive (niveau 1), un revenu mensuel de CHF 5'261.- selon l’ESS 2020, soit CHF 63'132.- par année. En tenant compte de la durée hebdomadaire normale de travail s’élevant à 41.7 heures, le revenu avec invalidité se montait à CHF 5'484.- par mois, respectivement CHF 65'809.- (recte : CHF 65'815.-) par année (CHF 63'132.- x 41.7 / 40 = CHF 65'815.-). Les données de l’ISS n’étant pas encore disponibles pour l’année 2024 au moment du calcul du degré d’invalidité, l’OAI a indexé le montant de CHF 65'809.- à l’année 2022, obtenant de la sorte CHF 65'969.-. Après réduction de ce montant de 50% (en raison de l’exigibilité d’une activité à ce taux) et, cela fait, prise en compte d’un abattement de 20%, le revenu avec invalidité se montait à CHF 26'388.-.

S’agissant du revenu annuel brut sans invalidité, l’assuré réalisait, selon les indications de l’employeur, un salaire de CHF 4'500.- par mois, versé en treize mensualités, correspondant à CHF 58'500.- par an. De manière à vérifier si ce salaire était inférieur d’au moins 5% aux valeurs statistiques médianes usuelles dans la branche correspondante de l’ESS, l’OAI s’est référé à la table TA1 (tirage « skill level ») de l’ESS 2020, plus particulièrement à la ligne 49-52 (transports terrestres par eau, aériens ; entreposage). Il en ressortait qu’un homme pouvait réaliser un revenu de CHF 4'901.- dans une activité de niveau 1, soit CHF 5'197.- par mois (ou CHF 62'358.- par année) en tenant compte d’une durée hebdomadaire normale de travail de 42.4 heures. En l’absence d’ISS disponible pour l’année 2024, l’OAI a indexé le montant de CHF 62'358.- à l’année 2022, obtenant ainsi CHF 62'700.-. Puisque le revenu sans invalidité était inférieur de 6.7% au revenu statistique [(CHF 62'700.- – CHF 58'500.-) x 100 / CHF 62'700.- = 6.7%], il convenait de ramener cette différence à 5% au titre de la mise en parallèle des revenus, soit à CHF 59'565.- (CHF 62'700.- x 95 / 100 = CHF 59'565.-).

En comparant le revenu avec invalidité (CHF 26'388.-) au revenu sans invalidité (CHF 59'565.-), la perte de gain était de CHF 33'177.- et le degré d’invalidité de 56% [(CHF 59'565.- – CHF 26'388.-) x 100 / CHF 59'565.- = 55.7%, arrondi à 56%].

S’agissant du revenu avec invalidité, la chambre de céans considère qu’il ne prête pas le flanc à la critique, à ceci près que le revenu annuel avant indexation est de CHF 65'815.- par année et qu’en indexant celui-ci à l’ISS le plus récent disponible au moment de la décision litigieuse (soit celui de 2023, la table T39 concernant l'évolution des salaires en 2023 ayant été publiée le 25 avril 2024), on obtient CHF 67'104.- (CHF 65'815.- x 2'343 / 2'298 = CHF 67'104.-). Après réduction de ce montant de 50% et, cela fait, prise en compte d’un abattement – ni contesté ni contestable – de 20%, le revenu avec invalidité se monte à CHF 26'842.-.

Concernant ensuite le revenu sans invalidité, l’intimé explique s’être basé sur le revenu que le recourant réalisait en tant que salarié aux Ports Francs, au motif qu’il aurait vraisemblablement continué cette activité sans la nouvelle incapacité de travail survenue le 23 mai 2022. Pour sa part, le recourant soutient en substance qu’il aurait fallu déterminer le revenu sans invalidité au moyen des revenus statistiques dans la construction, à l’instar de ce que l’OAI avait effectué dans sa décision du 4 septembre 2008, prenant pour base la table TA7 de l’ESS 2004, plus précisément la ligne 11 de celui-ci (activités de la construction).

Il ressort en l’espèce d’un rapport du 23 avril 1997 de la Division médecine du Travail de la SUVA que « sur le plan professionnel, [l’assuré] a effectué un apprentissage de maçon de 1986 à 1989. Excellent ouvrier, il entrevoyait de belles perspectives professionnelles. Après son apprentissage, il effectue une école de recrue sans problèmes. Durant son école de sous-officier, il fait une chute durant le week-end qui conduira à des douleurs dorsales. En raison de cette pathologie, il doit interrompre son activité de maçon » (dossier AI, doc. 1, p. 371).

Dans le même sens, un arrêt du 26 juin 1997 du Tribunal administratif du canton de Berne précise que l’assuré, « maçon de formation […] a travaillé en tant que tel jusqu’en mars 1993. Le 8 juillet 1992, [il] a déposé une demande de prestations de l’assurance-invalidité en raison de lésions au dos et aux genoux, requérant une orientation professionnelle ainsi qu’un reclassement dans une nouvelle profession. Par décision du 24 février 1994, l’office AI Berne accédait à la demande du recourant et lui allouait la prise en charge, en tant que mesures de réadaptation professionnelle, d’un cours de préparation à l’Ecole Technique Supérieure […]. N’ayant pas pu être accepté à [l’Ecole Technique Supérieure] de Fribourg malgré – selon ses dires – la réussite des examens d’entrée, [il] aurait décidé de faire un apprentissage de mécanicien de précision auprès du Centre professionnel O______, à P______ […]. Par décision du 28 août 1995, l’Office AI a alloué [à l’assuré] la prise en charge du reclassement désiré en qualité de mécanicien de précision auprès de l’entreprise Q______, à P______, à partir du 14 août 1995 » (dossier AI, doc. 1, p. 388-389). On apprend également que cette formation de mécanicien de précision n’a pas été suivie jusqu’à son terme, ce en raison d’une décision du 30 mai 1997 de la Division médecine du travail de la SUVA déclarant l’assuré « inapte à tous les travaux au contact d’émulsions, d’huiles de coupe, de benzine et d’ammonium quaternaire, ceci avec effet immédiat » (dossier AI, doc. 1, p. 379). On soulignera enfin qu’un reclassement ultérieur en tant que moniteur socio-professionnel (ci-après : MSP ; cf. dossier AI, doc. 1, p. 317) n’a pas non plus débouché sur une formation certifiée : « à défaut de poursuivre sa formation de MSP ou d’assistant social par manque de place de stage, [l’assuré] a trouvé un emploi dans le service après-vente d’une maison de bijouterie, joaillerie, horlogerie à Genève, et ce dès le 01.05.2001 » (dossier AI, doc. 1, p. 278).

La chambre de céans constate que le parcours socioprofessionnel de l’assuré, résumé ci-dessus, ne comporte pas d’indices concrets montrant que l’intéressé aurait entrepris spontanément des démarches de reconversion à l’époque où il exerçait son activité de maçon sans aucune restriction. Il apparaît au contraire que l’apparition de la première atteinte à la santé en 1992, prenant la forme de lésions au dos et aux genoux, explique non seulement l’arrêt de cette activité, mais aussi les décisions de mesures d’ordre professionnel successives prises par l’office AI du canton de Berne, sans qu’aucune ne débouche sur une formation certifiée et, par voie de conséquence, l’exercice d’un métier dépendant de l’achèvement d’une telle formation. Sur ce dernier point, l’état de fait diffère donc nettement du cas jugé dans l’arrêt du Tribunal fédéral 9C_887/2017 précité (résumé au consid. 6.1.3 ci-dessus). La deuxième différence par rapport à cet arrêt a trait à l’activité qui a été exercée immédiatement avant la deuxième atteinte à la santé. Alors que dans l’affaire ayant fait l’objet de l’arrêt du Tribunal fédéral 9C_887/2017 précité, l’employé administratif exerçait son activité déjà depuis dix ans lors de la survenue de troubles cardiovasculaires qui n’empêchaient pas la poursuite de cette activité à 50%, on ne saurait en dire autant de l’activité de l’assuré aux Ports Francs, commencée le 1er juillet 2018 et dont la continuation s’était révélée médicalement impossible moins de quatre ans plus tard (arrêt de travail à 100% dès le 23 mai 2022) et ce de manière durable. Étant donné par ailleurs que la survenance d’une deuxième atteinte à la santé n’implique pas en soi que le revenu réalisé immédiatement avant celle-ci serve de revenu sans invalidité dans la comparaison des revenus à effectuer (cf. en particulier l’arrêt du Tribunal fédéral 8C_399/2023 du 20 décembre 2023 (cf. ci-dessus : consid. 6.1.4) et que le seul écoulement du temps – entre une première atteinte à la santé, même ancienne, et la détermination du degré d’invalidité après une deuxième atteinte à la santé – ne permet pas de déroger au principe général selon lequel le revenu sans invalidité doit correspondre au revenu que l’assuré aurait réalisé au degré de la vraisemblance prépondérance s’il n’était pas devenu invalide (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_225/2019 du 11 septembre 2019 consid. 4.3.2 ; cf. aussi ci-dessus : consid. 6.1), la chambre de céans considère qu’il n’est pas établi, au degré de la vraisemblance prépondérante, que sans l’atteinte à la santé qu’il a subie en 1992, le recourant n’aurait pas continué à exercer son activité de maçon.

Partant, il se justifie, à l’instar de ce qu’a effectué l’OAI dans sa décision du 4 septembre 2008, de se fonder sur les revenus statistiques dans le secteur de la construction. À cette époque, l’OAI avait pris pour base la table TA7 de l’ESS 2004, plus particulièrement la ligne 11 de celui-ci (activités de la construction) dans le cas d’un homme exerçant une activité de niveau 3 – ce qui correspond à une activité de niveau 2 depuis l’ESS 2012 (David IONTA, Revenu d’invalide selon l’ESS, une mise à jour, in : Jusletter 21 novembre 2022, p. 21 et les arrêts cités). Il convient cependant de rappeler que les tables TA1, T1 et TA7 des ESS n’ont été publiées que jusqu’en 2010 et que dans les ESS publiées depuis 2012, elles correspondent respectivement aux tables TA1 tirage « skill level », T1 tirage « skill level » et T17 (cf. David IONTA, op. cit., p. 18, n. 71 ; cf. aussi l’arrêt du Tribunal fédéral 8C_205/2021 du 4 août 2021 consid. 3.2.2).

Une référence à l’ancienne table TA7, publiée jusqu’en 2010, ne permettant pas de retracer de manière fiable l’évolution des salaires jusqu’au moment de la naissance du droit à la rente, il convient donc de se référer à la table T17 (de l’ESS 2020) qui l’a remplacée, plus précisément à la colonne « total » prévue pour un homme exerçant une activité de la ligne 71 (« métiers qualifiés du bâtiment et assimilés, sauf électricien »), faisant état d’un salaire médian de CHF 5'959.-, ce qui correspond à CHF 71'508.- par année. En tenant compte de la durée normale de travail dans la construction, s’élevant à 41.2 heures (selon la statistique la plus récente disponible au moment de décision ; année 2022), le revenu sans invalidité se monte à CHF 73'653.- par année (CHF 71'508.- x 41.2 / 40 = CHF 73'653.-). En indexant celui-ci à l’ISS le plus récent disponible au moment de la décision (soit celui de 2023, la table T39 concernant l'évolution des salaires en 2023 ayant été publiée le 25 avril 2024), on obtient CHF 75'095.- (CHF 73'653.- x 2'343 / 2'298 = CHF 75'095.-).

En comparant le revenu avec invalidité (CHF 26'842.-) au revenu sans invalidité (CHF 75'095.-), la perte de gain s’élève à CHF 48'253.- et le degré d’invalidité à 64% [(CHF 75'095.- – CHF 26'842.-) x 100 / CHF 75'095.- = 64.25%, arrondi à 64% ; ATF 130 V 121 consid. 3.2], ce qui ouvre droit à une rente d’invalidité correspondant à 64% d’une rente entière, conformément à l’art. 28b al. 2 LAI, en vigueur depuis le 1er janvier 2022, ici applicable (cf. ci-dessus : consid. 3.1 et 3.2).

8.2 Bien que le recouvrement d’une capacité de travail à 50% dans une activité adaptée ne soit d’actualité que depuis le 15 octobre 2023 et que l’assuré ait présenté une capacité de travail (et de gain) nulle dans toute activité du 23 mai 2022 au 14 octobre 2023, il n’est pas contesté que l’octroi d’une rente de 64% ne peut pas être précédé de l’octroi d’une rente entière pour les raisons suivantes : étant donné que le droit à la rente prend naissance au plus tôt à l’échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré a fait valoir son droit aux prestations (cf. art. 29 al. 1 LAI) et qu’en l’espèce, la demande de prestations a été déposée le 29 août 2023, le droit à la rente ne peut naître que six mois plus tard en fonction du taux d’invalidité déterminant à ce moment, qui est était alors de 64% (cf. art. 88a al. 1 RAI). Il s’ensuit que l’intimé a correctement fixé la naissance du droit à une rente d’invalidité partielle au 1er février 2024.

9.             Compte tenu de ce qui précède, le recours est admis et la décision du 7 novembre 2024 réformée, en ce sens que le recourant a droit à une rente correspondant à 64% d’une rente d’invalidité entière.

10.          

10.1 Bien qu’il obtienne partiellement gain de cause, l’assuré, non représenté et n’ayant pas fait valoir de frais engendrés par la procédure, n’a en principe pas droit à des dépens et ne remplit pas non plus les critères permettant qu’il soit dérogé à cette règle ; on ne saurait considérer, en l’espèce, que l’importance de la cause et sa complexité aient rendu nécessaires des frais ou un volume de travail excédant ce qu’un particulier peut ordinairement et raisonnablement prendre sur lui pour la défense de ses intérêts (ATF 127 V 205 consid. 5b ; cf. ég. ATF 125 II 518 et Jean MÉTRAL, in DUPONT/MOSER-SZELESS [éd.], Commentaire romand de la loi sur la partie générale des assurances sociales n. 103 ad art. 61 LPGA).

10.2 Au vu du sort du recours, il y a lieu de condamner l’intimé au paiement d’un émolument de CHF 200.- (art. 69 al. 1bis LAI).

 

*****

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet.

3.        Réforme la décision du 7 novembre 2024 en ce sens que le recourant a droit à une rente correspondant à 64% d’une rente d’invalidité entière.

4.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l’intimé.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Julia BARRY

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le