Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/255/2025 du 14.04.2025 ( AI ) , ADMIS/RENVOI
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/2258/2024 ATAS/255/2025 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 14 avril 2025 Chambre 16 |
En la cause
A______ représentée par Me Pierre-Bernard PETITAT, avocat | recourante |
contre
OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE | intimé |
A. a. A______ (ci-après : l’assurée), née le ______ 1971, d’origine portugaise, est arrivée en Suisse le 30 novembre 1994.
b. Dès le 1er novembre 1997, l’assurée a travaillé en tant qu’aide-soignante à la Clinique B______, à Genève. Elle a été licenciée pour le 30 novembre 2021.
B. a. Le 28 janvier 2021, l’assurée a saisi l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI) d’une demande de prestations compte tenu d’une incapacité de travail depuis le 21 juillet 2020, en raison d’atteintes à l’oreille droite, à la hanche et au pied.
b. Du dossier constitué par l’OAI, il ressort ce qui suit.
c. Le 21 juin 2019, l’assurée a subi une mastoïdectomie, suite à laquelle sont survenues des douleurs neuropathiques compliquées de brûlures affectant la région hémicrânienne droite jusqu’au vertex, voire jusque derrière l’œil. Le diagnostic était alors celui de douleurs neurogènes post-matoïdectomie. La douleur rétro-oculaire droite était possiblement à l’origine de tensions cervicales et holocrâniennes, elles-mêmes à l’origine de l’émergence d’une névralgie d’Arnold, d’évolution favorable sous Neurotin, à tout le moins jusqu’en août 2020 (cf. courrier du 24 février 2021 de la docteure C______, spécialiste FMH en neurologie).
d. Début juillet 2020, l’assurée a développé des douleurs au niveau du bassin et de la hanche gauche, avec une charge quasi-impossible.
L’IRM, pratiquée le 7 septembre 2020, a montré une tendinopathie marquée du petit glutéal, associée à une bursite péri-trochantérienne et à un petit œdème osseux du grand trochanter en regard ainsi qu’une enthésopathie bilatérale et modérément active des tendons ischios-jambiers prédominant à droite (cf. rapport d’IRM du bassin et de la hanche gauche du 9 septembre 2020 et rapport du 1er octobre 2020 de la docteure D______, spécialiste FMH en médecine interne générale).
L’IRM lombo-sacrée pratiquée le 9 novembre 2020 a, quant à elle, montré une légère discopathie protrusive L3-L4 à prédominance foraminale gauche venant au contact de la racine L3 gauche, une hernie discale L4-L5 foraminale et extra‑foraminale venant en conflit sur la racine L4 droite, de discrets remaniements inflammatoires des plateaux vertébraux jouxtant le disque L4-L5 (Modic I) et une arthrose interfacettaire bilatérale étagée modérée prédominant en L4-L5 et L5-S1 sans remaniements inflammatoires associés.
Ces atteintes sont à l’origine de l’arrêt de travail de 100% dès le 21 juillet 2020 dans l’activité d’aide-soignante, avec une reprise à 50% dès mars 2021 (cf. rapport de la Dre C______ du 7 mars 2022).
En raison des douleurs ressenties au niveau de la fesse, irradiant au niveau du membre inférieur droit, l’assurée a bénéficié de plusieurs infiltrations, lesquelles ont entraîné une bonne amélioration de la symptomatologie (cf. rapport du docteur E______, spécialiste FMH en neurochirurgie du 21 décembre 2021). La sténose et le conflit foraminal L4-L5 droit entraînaient toutefois des limitations fonctionnelles (pas de travail physique lourd, pas de porte-à-faux et pas de rotations lombaires répétées) et une capacité de travail dans l’activité habituelle de 50%, avec une augmentation progressive à 80 ou 100%. En revanche, la capacité de travail était entière dans une activité adaptée (cf. rapport du Dr E______ du 24 mars 2022).
e. Parallèlement, l’assurée a également subi une recrudescence de douleurs mastoïdiennes avec mise en évidence, à l’imagerie cérébrale, de la présence de liquide pétro-mastoïdien témoignant d’une mastoïdite. Cette situation a entraîné la réapparition d’une douleur neuropathique, témoignant de la recrudescence de la névralgie d’Arnold. Les céphalées holocrâniennes étaient également réapparues dans l’intervalle. En décembre 2020, la douleur semblait contrôlée grâce à l’augmentation du Neurontin et surtout à l’infiltration, laquelle avait permis d’amender complètement la composante de névralgie d’Arnold (cf. rapports de la Dre C______ des 24 février 2021 et 7 mars 2022).
La situation était toutefois fragile, car la problématique des hanches et lombaire avait contribué au renforcement des tensions cervicales, elles-mêmes à l’origine de tensions holocrâniennes et donc d’une recrudescence tant des douleurs neuropathiques auriculaires que de celles liées à la névralgie d’Arnold. Une nouvelle infiltration pratiquée le 2 juillet 2021 a cependant permis de contrôler l’aspect névralgie d’Arnold (cf. rapport de la Dre C______ du 7 mars 2022).
En revanche, les douleurs neuropathiques auriculaires, restées inchangées malgré de nouvelles infiltrations, avaient motivé une consultation en oto‑rhino‑laryngologie (ci-après : ORL). L’évolution avait été stable jusqu’en décembre 2021, suite à la prise en charge ORL et à de nouvelles infiltrations. Toutefois, suite à une infection à la Covid-19, l’assurée avait connu, transitoirement, une recrudescence de douleurs neuropathiques auriculaires, qui étaient plutôt en voie d’amélioration fin janvier 2022. À cette date persistait au premier plan une problématique de lombosciatalgies gauches L4-L5 pour lesquelles l’assurée était justement suivie par le Dr E______ (cf. rapport de la Dre C______ du 7 mars 2022).
f. L’assureur perte de gain a mandaté le docteur F______, spécialiste FMH en rhumatologie et médecine interne, pour expertise. Celui-ci a retenu, dans son rapport du 30 juin 2021, des coxo-pygalgies gauches chroniques (avec répercussion sur la capacité de travail) et un syndrome douloureux chronifié (sans répercussion sur la capacité de travail). Pour le Dr F______, la capacité de travail était de 80% dans l’activité habituelle d’aide-soignante et de 100% dans une activité légère, excluant le port de charges au-delà de 10 kg de manière ponctuelle et de 5 kg de manière régulière, les mouvements répétitifs du rachis en porte-à-faux et favorisant un travail sédentaire, autorisant l’alternance de la position assise et debout régulière.
g. L’OAI a soumis les rapports des médecins traitants ainsi que le rapport du Dr F______ à son service médical régional (ci-après : SMR), lequel a considéré, dans un avis du 24 février 2022, que l’activité habituelle n’était plus exigible, dès lors qu’elle ne respectait pas les limitations fonctionnelles retenues par le Dr F______. En revanche, la capacité de travail était entière dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles et cela depuis le 8 mai 2021.
h. Compte tenu de l’exigibilité médicale, l’OAI a mis l’assurée au bénéfice d’une orientation professionnelle, qui s’est déroulée du 2 mai au 28 août 2022 puis d’un reclassement dans la profession de secrétaire médicale, qui a commencé le 5 septembre 2022 et devait se poursuivre jusqu'au 30 juin 2024.
i. À la demande de l’assurance perte de gain, le Dr F______ a une nouvelle fois examiné l’assurée. Dans son rapport du 20 juillet 2022, ce médecin a retenu le diagnostic incapacitant de lombosciatalgies droites chroniques, entraînant, dans l’activité habituelle, une incapacité de travail de 100% du 21 juillet 2020 au 28 février 2021, de 50% du 1er mars au 22 septembre 2021 et à nouveau de 100% dès le 23 septembre 2021, de manière durable et vraisemblablement définitive. En revanche, la capacité de travail était entière dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles qu’il avait énoncées dans son rapport du 30 juin 2021.
j. En raison d’une recrudescence des névralgies, l’assurée a, à nouveau, été incapable de travailler dès le 9 janvier 2023.
k. L’assurée a alors été examinée par la docteure G______, spécialiste FMH en anesthésiologie et en pharmacologie et toxicologie cliniques, spécialiste de la douleur SPS, laquelle a expliqué, dans son rapport du 25 janvier 2023, que l’assurée souffrait de douleurs neuropathiques chroniques post-opératoires sur le territoire du facial (CIM-11 : MG30.21), d’une névralgie d’Arnold (MG30.51) et de lombalgies communes. Des mécanismes de sensibilisation centrale s’étaient certainement installés avec le temps, contribuant au maintien et au caractère rebelle des douleurs. Cette situation pouvait s’accompagner d’une anxiété, une dépression, des symptômes de fatigue et des répercussions cognitives négatives. La Dre G______ ne proposait pas de modifications dans le traitement, lequel consistait en une infiltration du nerf d’Arnold et en une prise en charge médicamenteuse. Du point de vue psychologique, un suivi psychothérapeutique était recommandé, en raison des liens étroits et bidirectionnels entre le ressenti désagréable des douleurs et les émotions et pensées négatives.
l. Dès le 9 février 2023, l’assurée a consulté le docteur H______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, lequel a retenu, dans un rapport du 4 juillet 2023, les diagnostics incapacitants d’épisode anxieux et dépressif mixte majeur et bouffées d’angoisses réitératives invalidantes, séquelles post-traumatiques de violences et humiliations conjugales refaisant parfois surface, névralgie du trijumeau avec épisodes de crise de l’hémiface droit (pathologie du nerf d’Arnold), crises migraineuses répétitives, prenant l’orbite oculaire et l’hémicrâne droits, trouble somatoforme douloureux chronique d’origine neuropathique, douleurs dues à une grave discopathie L4-L5 et status post-opératoire de l’oreille interne avec diminution résiduelle de l’audition à droite. Le traitement médicamenteux était le suivant : Neurontin et Tramal contre les douleurs, Millepertuis et Valériane pour l’atteinte psychique, l’assurée ne désirant pas de traitement psychotrope, mais uniquement des remèdes à base de plantes. L’évolution, sur le plan de la thymie, était lente mais positive, grevée toutefois par les épisodes douloureux, les bouffées d’angoisses et les ruminations. L’assurée était capable de reprendre une activité professionnelle dans un domaine autre que le domaine du personnel hospitalier membre d’une équipe de soins, à 30% progressivement jusqu’à environ 50%.
m. Les pièces médicales précitées ont été soumises au SMR qui a préconisé, dans son avis du 21 septembre 2023, une expertise pluridisciplinaire avec volets rhumatologique, neurologique, psychiatrique et si les experts l’estimaient utile, consilium ORL.
n. Le 22 septembre 2023, l’OAI a procédé à une première comparaison des revenus, laquelle a mené à un degré d’invalidité de 21.40%, compte tenu d’une capacité de travail entière dans une activité adaptée et d’une réduction supplémentaire de 10% vu les limitations fonctionnelles.
o. L’expertise préconisée par le SMR a été confiée au CEMED, soit pour lui la docteure I______, spécialiste FMH en neurologie, ainsi que les docteurs J______, spécialiste FMH en médecine interne, K______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, et L______, spécialiste FMH en rhumatologie et médecine interne, lesquels ont établi leurs rapports respectifs, ainsi que l’évaluation consensuelle en date du 16 janvier 2024.
Du point de vue neurologique, la Dre I______ a retenu les diagnostics de migraines épisodiques et de troubles sensitifs et douloureux dans le territoire du nerf grand auriculaire droit, après mastoïdectomie en juin 2019. Ces douleurs et leur traitement pouvaient induire une fatigue fluctuante responsable d’une perte de rendement de 10% dans une activité de secrétaire médicale ou d’aide infirmière.
Quant au Dr L______, rhumatologue, il a mentionné les diagnostics de lombalgies sur troubles statiques et dégénératifs débutants du rachis lombaire, status après péri-arthrite de hanche sous forme de tendinopathie du moyen glutéale gauche et bursite péri-trochantérienne et douleurs péri-auriculaires et de l’hémiface à droite avec status après otite, mastoïdectomie et révision de la cicatrice de mastoïdectomie en 2019. Les lombalgies ou lombosciatalgies ainsi que les douleurs autour des hanches étaient nettement moins marquées qu’en 2020 selon les propos de l’assurée et les documents versés au dossier. L’assurée souffrait, depuis avril 2019, d’une symptomatologie douloureuse chronique, dont la localisation avait un peu varié au cours du temps, même si elle restait prédominante autour de l’oreille droite. Il n’y avait ni incapacité de travail ni limitations fonctionnelles sur le plan rhumatologique.
Du point de vue de la médecine interne, le Dr J______ a évoqué les diagnostics de cure de varices au membre inférieur gauche, il y a une vingtaine d’années, une otite moyenne droite perforée en avril 2019 suivie d’une mastoïdectomie le 21 juin 2019, un épisode de bradycardie d’origine indéterminée (2019), un Covid‑19 en décembre 2021 et de l’asthme dans l’enfance. Ces atteintes n’entraînaient ni limitations fonctionnelles ni incapacité de travail.
Le Dr K______ a, pour sa part, retenu, du point de vue psychiatrique, les diagnostics de trouble de l’adaptation (6B43) avec une symptomatologie dépressive et anxieuse réactionnelle aux problèmes de santé physique, ainsi qu’un diagnostic de phobie spécifique (6B03) des ascenseurs et de l’avion. Le traitement psychothérapeutique était adéquat et bien investi par l’assurée, étant précisé qu’aucun traitement psychotrope n’était prescrit. La capacité de travail était entière, sans limitations fonctionnelles, et ce dans toute activité.
Enfin, dans leur évaluation consensuelle, les quatre médecins du CEMED ont récapitulé les différents diagnostics retenus ainsi que les limitations fonctionnelles entraînées et ont conclu à une capacité de travail entière quelle que soit l’activité, avec toutefois une diminution de rendement de 10% compte tenu de la fatigabilité liée à l’aspect chronique des douleurs.
p. Les rapports précités ont été soumis au SMR qui a considéré, dans son avis du 1er février 2024, qu’il n’y avait pas de motifs de s’écarter des conclusions des experts et qu’il convenait ainsi de retenir une capacité de travail entière tant dans l’activité habituelle que dans une activité adaptée, avec une diminution de rendement de 10% en lien avec les troubles sensitifs douloureux et leur traitement et ce depuis le 21 juillet 2020.
q. Le 2 février 2024, l’OAI a procédé à deux comparaisons des revenus, la première conduisant à une invalidité de 31.68%, obtenue en prenant en considération le revenu réalisé dans une activité adaptée, et la seconde conduisant à une invalidité de 8.09% en tenant compte du revenu réalisé dans l’activité habituelle.
r. Le 7 mars 2024, l’OAI a procédé à une troisième comparaison des revenus, en fonction des modifications légales entrées en vigueur le 1er janvier 2024, le degré d’invalidité ainsi obtenu étant alors de 17.86%.
s. Le 7 mars 2024 également, l’OAI a considéré qu’au vu de la capacité de travail entière dans toute activité, avec une diminution de rendement de 10%, des mesures de réadaptation n’étaient plus de nature à réduire le dommage, n’étant ni simples ni adéquates.
t. Par projet de décision du 19 mars 2024, l’OAI a informé l’assurée qu’il entendait rejeter la demande de prestations, le degré d’invalidité de 8% et celui de 18% n’ouvrant pas droit à une rente d’invalidité, dès lors qu’ils étaient inférieurs à 40%. De plus, des mesures professionnelles n’étaient pas indiquées dans son cas.
u. Le 2 mai 2025, sous la plume d’ASSUAS, l’assurée s’est opposée au projet précité, contestant principalement la valeur probante des expertises psychiatrique et rhumatologique.
v. Par décision du 3 juin 2024, l’OAI a rejeté la demande de prestations du 28 janvier 2021, pour les mêmes motifs que ceux déjà énoncés dans le projet du 19 mars 2024.
C. a. Le 3 juillet 2024, sous la plume de son conseil, l’assurée a interjeté recours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice contre cette décision, concluant, sous suite de frais et dépens, à la constatation de son droit aux prestations d’invalidité, en particulier à une réadaptation professionnelle et une rente d’invalidité. Préalablement, elle sollicitait l’octroi d’un délai pour motiver son recours.
b. Le 27 août 2024, l’assurée a complété son recours, contestant notamment la valeur probante des rapports rhumatologique et psychiatrique, au vu des pièces au dossier.
c. Par écriture du 19 septembre 2024, l’office intimé a conclu au rejet du recours et à la confirmation de la décision attaquée. Se référant à un avis du SMR du 18 septembre 2024, joint, il a persisté dans les termes de la décision querellée.
d. Pour sa part, le 10 octobre 2024, la recourante a persisté dans ses précédentes conclusions, qu’elle a précisées.
e. Sur ce, la cause a été gardée à juger.
f. Les autres faits seront repris – en tant que de besoin – dans la partie « en droit » du présent arrêt.
1. 1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément. Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).
Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.
2. Le litige porte sur le droit de la recourante à une rente d’invalidité ou à des mesures d’ordre professionnel, singulièrement sur la valeur probante du rapport du CEMED du 16 janvier 2024.
3. 3.1 Le 1er janvier 2022, les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du 3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI ‑ RS 831.201 ; RO 2021 706) sont entrées en vigueur.
En l’absence de disposition transitoire spéciale, ce sont les principes généraux de droit intertemporel qui prévalent, à savoir l’application du droit en vigueur lorsque les faits déterminants se sont produits (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et la référence). Lors de l’examen d’une demande d’octroi de rente d’invalidité, est déterminant le moment de la naissance du droit éventuel à la rente. Si cette date est antérieure au 1er janvier 2022, la situation demeure régie par les anciennes dispositions légales et réglementaires en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021. Si elle est postérieure au 31 décembre 2021, le nouveau droit s’applique (arrêt du Tribunal fédéral 9C_60/2023 du 20 juillet 2023 consid. 2.2. et les références).
3.2 En l’occurrence, la décision querellée a certes été rendue postérieurement au 1er janvier 2022. Toutefois, la demande de prestations ayant été déposée le 12 février 2021 et le délai d’attente d’une année venant à échéance le 20 juillet 2021, un éventuel droit à une rente d’invalidité naîtrait antérieurement au 1er janvier 2022 (art. 28 al. 1 let. b et 29 al. 1 LAI), de sorte que les dispositions applicables seront citées dans leur teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021.
4. 4.1 À teneur de l’art. 28 al. 1 LAI, l’assuré a droit à une rente aux conditions suivantes : a) sa capacité de gain ou sa capacité d’accomplir ses travaux habituels ne peut pas être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles, b) il a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40% en moyenne durant une année sans interruption notable et c) au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins.
En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.
Enfin, selon l’art. 29 al. 1 LAI, le droit à la rente prend naissance au plus tôt à l’échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré a fait valoir son droit aux prestations conformément à l’art. 29 al. 1 LPGA, mais pas avant le mois qui suit le 18e anniversaire de l’assuré.
4.2 Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI).
Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2).
Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28a al. 1 LAI).
Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale ; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).
5. 5.1 Pour pouvoir calculer le degré d'invalidité, l'administration (ou le juge, s'il y a eu un recours) a besoin de documents que le médecin, éventuellement aussi d'autres spécialistes, doivent lui fournir (ATF 122 V 157 consid. 1b). Pour apprécier le droit aux prestations d’assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1). La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est incapable de travailler. Dans le cas des maladies psychiques, les indicateurs sont importants pour évaluer la capacité de travail, qui – en tenant compte des facteurs incapacitants externes d’une part et du potentiel de compensation (ressources) d’autre part –, permettent d’estimer la capacité de travail réellement réalisable (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_286/2020 du 6 août 2020 consid. 4 et la référence).
5.2 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; 133 V 450 consid. 11.1.3 ; 125 V 351 consid. 3). Il faut en outre que le médecin dispose de la formation spécialisée nécessaire et de compétences professionnelles dans le domaine d’investigation (arrêt du Tribunal fédéral 9C_555/2017 du 22 novembre 2017 consid. 3.1 et les références).
5.3 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.
5.3.1 Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 135 V 465 consid. 4.4. et les références ; 125 V 351 consid. 3b/bb).
Le but des expertises multidisciplinaires est de recenser toutes les atteintes à la santé pertinentes et d'intégrer dans un résultat global les restrictions de la capacité de travail qui en découlent. L'évaluation globale et définitive de l'état de santé et de la capacité de travail revêt donc une grande importance lorsqu'elle se fonde sur une discussion consensuelle entre les médecins spécialistes participant à l'expertise. La question de savoir si, et dans quelle mesure, les différents taux liés aux limitations résultant de plusieurs atteintes à la santé s'additionnent, relève d’une appréciation spécifiquement médicale, dont le juge ne s'écarte pas, en principe (ATF 137 V 210 consid. 3.4.2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_162/2023 du 9 octobre 2023 consid. 2.3 et les références).
5.3.2 Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI ; ATF 142 V 58 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve ; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5 ; 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1).
5.3.3 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (ATF 125 V 351 consid. 3a ; 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).
5.3.4 On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1 in SVR 2008 IV n. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 8C_755/2020 du 19 avril 2021 consid. 3.2 et les références).
5.3.5 Le fait qu'une expertise ait été réalisée sur mandat d'un assureur d'indemnités journalières selon la loi fédérale sur le contrat d'assurance du 2 avril 1908 (loi sur le contrat d’assurance, LCA - RS 221.229.1) – et donc pas selon la procédure de l’art. 44 LPGA –, ne suffit pas à nier sa valeur probante lors de l'évaluation du droit à une rente d’invalidité de l’AI. Toutefois, l'appréciation des preuves doit répondre à des exigences strictes. S'il existe des doutes, même minimes, quant à la fiabilité et à la cohérence d'une telle expertise, il convient de procéder à des clarifications complémentaires, comme cela est le cas pour les appréciations médicales internes à l’assurance. Une expertise « externe à la procédure » (« Fremdgutachten ») ne peut ainsi se voir d'emblée reconnaître la même valeur probante qu'une expertise ordonnée par un tribunal ou par un assureur selon l'art. 44 LPGA (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_452/2023 du 24 janvier 2024 consid. 5.2.1 et les références).
6. Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; 126 V 353 consid. 5b ; 125 V 193 consid. 2). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).
7. 7.1 En l’espèce, l’OAI a rejeté la demande de prestations de la recourante, au motif que celle-ci ne présentait pas une invalidité suffisante pour lui donner droit à des mesures de reclassement ou à une rente d’invalidité. À l’appui de sa décision, l’office intimé s’est référé à l’expertise pluridisciplinaire réalisée par les médecins du CEMED. C’est donc la valeur probante de cette dernière qu’il convient d’examiner principalement.
7.2 La question de savoir si les rapports des médecins du CEMED respectent les conditions formelles pour leur voir reconnaître une pleine valeur probante peut cependant en l’état rester ouverte, dès lors que leurs conclusions ne sauraient être suivies sur le fond comme cela ressort des considérations qui suivent.
7.2.1 Sur le fond, du point de vue de la médecine interne, le Dr J______ a expliqué que l’examen était dans les limites de la norme, à l’exception d’une palpation abdominale sensible à la fosse iliaque gauche. Pour lui, les plaintes concernaient essentiellement les domaines neurologique et rhumatologique. Il a donc considéré que du point de vue de sa spécialité, la capacité de travail était entière sans limitations fonctionnelles.
Sur le plan neurologique, la Dre I______ a retenu des migraines épisodiques, ainsi que des troubles sensitifs douloureux dans le territoire du nerf grand auriculaire droit, après mastoïdectomie. Ces troubles sensitifs douloureux et leur traitement pouvaient induire une fatigue fluctuante responsable d’une perte de rendement de 10% dans l’activité de secrétaire médicale ou d’aide-infirmière.
Du point de vue rhumatologique, le Dr L______ a expliqué qu’au jour de l’examen clinique, la recourante se plaignait en réalité surtout de douleurs de la région auriculaire et de l’hémiface droites. Les lombalgies, lombosciatalgies et douleurs de hanches n’étaient plus au premier plan. L’examen physique n’avait pas montré de signe pathologique significatif. Aussi, le rhumatologue précité avait-il retenu les diagnostics de lombalgies sur troubles statiques et dégénératifs débutants du rachis lombaire, status après périarthrite de la hanche sous forme de tendinopathie du moyen glutéal gauche et bursite péri-trochantérienne et douleurs auriculaires et de l’hémiface à droite avec status après otite, mastoïdectomie et révision de la cicatrice de la mastoïdectomie en 2019. Il n’y avait ni incapacité de travail ni limitations fonctionnelles. La capacité de travail était entière et ce depuis toujours.
Enfin, sur le plan psychiatrique, l’examen clinique n’avait pas objectivé de signe des lignées dépressive et anxieuse. Aucun traitement antidépresseur n’était prescrit. La fréquence du suivi psychiatrique était régulière. Le tableau constaté par le Dr K______ était compatible avec un trouble de l’adaptation (6B43) avec une symptomatologie dépressive et anxieuse réactionnelle aux problèmes de santé physique. Par ailleurs, le psychiatre retenait également un diagnostic de phobie spécifique (6B03) des ascenseurs et de l’avion. Aucune limitation fonctionnelle d’ordre psychiatrique n’était retenue. Quant à la capacité de travail, elle était entière dans toute activité et ce depuis toujours.
7.2.2 En premier lieu, la chambre de céans constate qu’aucun des médecins du CEMED n’a examiné l’évolution de la capacité de travail de la recourante depuis le 21 juillet 2020, date du début de son incapacité de travail. S’ils ont certes résumé les pièces du dossier, ils ont examiné la capacité de travail en fonction de l’état de santé de la recourante au jour des examens cliniques, soit en date des 3 novembre 2023 (neurologie), 13 novembre 2023 (médecine interne) et 15 novembre 2023 (psychiatrie et rhumatologie) puis ont fait rétroagir au 21 juillet 2020 leurs appréciations respectives et ce sans fournir la moindre explication alors que leurs conclusions étaient en contradiction avec les précédentes appréciations, notamment celles du Dr F______ et du SMR.
Cette façon de faire est particulièrement choquante du point de vue rhumatologique. En effet, peut-être qu’au jour de l’examen rhumatologique, le 15 novembre 2023, les douleurs, qu’elles soient lombaires ou autour des hanches, étaient moins marquées que par le passé. Cela ne permet toutefois pas de faire abstraction des atteintes rhumatologiques existantes et objectivables et d’apprécier leurs répercussions sur la capacité de travail en prenant en considération le fait qu’à la date de l’examen clinique, le 15 novembre 2023, la recourante n’exerçait plus son activité d’aide-soignante depuis près de deux ans. Les activités lourdes et les mouvements à risques n’étaient ainsi plus effectués depuis longtemps. Il n’est dès lors pas surprenant que les plaintes de la recourante s’agissant de son dos et de ses hanches aient évolué positivement. Par le passé, lesdites plaintes étaient toutefois suffisamment importantes et objectivables pour que le SMR et le médecin mandaté par l’assurance perte de gain, le Dr F______, retiennent une incapacité de travail complète dans l’activité habituelle et entière dans une activité adaptée.
De plus, s’agissant du volet neurologique, on peut s’étonner que la Dre I______ ne retienne aucun diagnostic en lien avec le nerf d’Arnold, tel qu’un status post névralgie d’Arnold par exemple, dès lors qu’une telle pathologie a été évoquée à plusieurs reprises par le passé, se décompensant régulièrement (cf. par exemple, rapports de la Dre C______ du 24 février 2021 et 7 mars 2022 ; rapport de la Dre G______ du 25 janvier 2023).
Aussi, pour toutes ces raisons, la chambre de céans s’écartera des conclusions des médecins du CEMED quant à l’existence d’une capacité de travail entière dans l’activité habituelle et ce depuis toujours.
7.3 Une instruction complémentaire sous la forme d’une nouvelle expertise n’est toutefois pas nécessaire au vu des pièces du dossier qui permettent de connaître l’évolution de la capacité de travail de la recourante par le passé.
En effet :
- sur le plan neurologique, la Dre C______, qui a suivi la recourante suite à la névralgie d’Arnold, a retenu, en date du 24 février 2021, une capacité de travail entière dans son activité habituelle. Le 7 mars 2022, elle a expliqué que les douleurs neuropathiques pour lesquelles elle suivait la recourante n’avaient pas justifié d’incapacité de travail. Cependant, lesdites douleurs, alors plutôt bien contrôlées sous médication et après infiltrations, pouvaient périodiquement être redécompensées par d’autres motifs, notamment les douleurs lombaires et de hanche. Durant ces périodes, la recourante n’était pas capable de travailler à plein temps (cf. rapports de la Dre C______ des 24 février 2021 et 7 mars 2022) ;
- sur le plan rhumatologique, les différents médecins ayant examiné la recourante, soit notamment les Drs E______ et F______ - qui est par ailleurs le médecin mandaté par l’assurance perte de gain - ont retenu une capacité de travail nulle dans l’activité habituelle, mais entière dans une activité adaptée (cf. rapports des Drs E______ du 24 mars 2022 et F______ du 20 juillet 2022). Avant eux, le SMR était arrivé à la même conclusion dans son avis du 14 février 2022 ;
- sur le plan psychiatrique, le Dr H______ a considéré que la recourante était capable de reprendre une activité professionnelle dans un domaine autre que le domaine du personnel hospitalier membre d’une équipe de soins, à 30% progressivement jusqu’à environ 50%, étant toutefois précisé qu’elle ne prenait aucun traitement psychotrope, mais uniquement des remèdes à base de plantes (cf. rapports du Dr H______ des 9 février 2023 et 25 juin 2024) ;
- enfin, le 18 juillet 2024, le docteur M______, spécialiste FMH en médecine interne générale et médecin traitant de l’assurée, a considéré, après avoir résumé l’évolution des différentes plaintes de la recourante, que l’activité habituelle d’aide-soignante n’était plus adaptée à son état de santé. En revanche, dans une activité adaptée, la capacité de travail était entière.
En somme, les pièces du dossier permettent de retenir que depuis le 21 juillet 2020, l’activité habituelle d’aide-soignante n’est plus exigible, au contraire d’une activité adaptée, et ce en raison de l’atteinte au rachis.
Les atteintes neurologiques n’ont, quant à elles, motivé au mieux que des arrêts de travail de courte durée, qui n’empêchent que temporairement l’exercice d’une activité professionnelle. Toutefois, dès lors que la cause est de toute manière renvoyée à l’OAI (cf. infra consid. 9), ce dernier est invité à se rapprocher des médecins traitants afin de déterminer avec exactitude les périodes durant lesquelles la recourante n’aurait théoriquement pas été en mesure de travailler à 100% en raison des douleurs neuropathiques et de leur traitement. En fonction des réponses données peut se poser la question d’une rente limitée dans le temps.
Enfin, du point de vue psychiatrique, le Dr H______ mentionne des limitations fonctionnelles nombreuses sur le plan somatique. Du point de vue psychique, dites limitations sont peu importantes et se limitent à des épisodes d’angoisses avec des sensations de manque d’air et de phobie sociale transitoire, avec une certaine fatigabilité, lesquelles n’empêchent pas la reprise d’une activité professionnelle. Au surplus, c’est le lieu de rappeler que les atteintes psychiques, par définition non objectivables, ne sont invalidantes que si la recourante ne dispose pas ou plus des ressources suffisantes pour les surmonter (cf. notamment ATF 141 V 281). Or, la recourante dispose de toute évidence encore de telles ressources, dès lors qu’elle sollicite d’elle-même l’aide de l’OAI pour une reconversion professionnelle et ce malgré les troubles psychiques dont elle souffre (cf. rapport du 18 juillet 2024 du Dr M______). Par ailleurs et en tout état, l’incapacité de travail de 50% attestée par le Dr H______ l’a été alors que la recourante ne prenait aucun traitement psychotrope et qu’elle était soignée uniquement avec des remèdes à base de plantes, ce qui permet de douter de la gravité des atteintes psychiques évoquées par le psychiatre précité. D’ailleurs, le Dr M______, médecin traitant, s’est écarté de l’appréciation du psychiatre précité, en évoquant une capacité de travail entière dans une activité adaptée, tout en reconnaissant l’existence de symptômes dépressifs (cf. rapport du Dr M______ du 18 juillet 2024).
7.4 En conclusion, il convient de s’écarter des conclusions des experts du CEMED et de retenir une capacité de travail nulle dans l’activité habituelle, mais entière dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles énoncées par le Dr F______ dans ses rapports des 30 juin 2021 et 20 juillet 2022, ainsi que par le SMR dans son avis du 24 février 2022.
8. Dans son recours, la recourante conclut également à l’octroi de mesures d’ordre professionnel.
8.1 Selon l'art. 8 al. 1 LAI, les assurés invalides ou menacés d'une invalidité (art. 8 LPGA) ont droit à des mesures de réadaptation pour autant que ces mesures soient nécessaires et de nature à rétablir, maintenir ou améliorer leur capacité de gain ou leur capacité d'accomplir leurs travaux habituels (let. a) et que les conditions d'octroi des différentes mesures soient remplies (let. b). La prestation dont il est question doit remplir les conditions de simplicité et d'adéquation, ce qui suppose qu'elle soit propre à atteindre le but fixé par la loi et apparaisse nécessaire et suffisante à cette fin. Il doit par ailleurs exister un rapport raisonnable entre le coût et l'utilité de la prestation compte tenu de l'ensemble des circonstances de fait et de droit du cas particulier (ATF 132 V 215 consid. 3.2.2 p. 221 et les références ; Ulrich MEYER-BLASER, Zum Verhältnismässigkeitsgrundsatz im staatlichen Leistungsrecht, 1985, p. 82 ss et 123 ss). Quant à la condition de l'invalidité exprimée par l'art. 8 al. 1 LAI, elle doit être interprétée au regard des art. 8 LPGA et 4 LAI et définie, compte tenu du contexte de réadaptation, en fonction de la mesure requise (Ulrich MEYER, Bundesgesetz über die Invalidenversicherung, 2e éd., 2010, ad art. 8 LAI p. 95).
8.2 8.2.1 Aux termes de l’art. 17 LAI, l’assuré a droit au reclassement dans une nouvelle profession si son invalidité rend cette mesure nécessaire et que sa capacité de gain peut ainsi, selon toute vraisemblance, être maintenue ou améliorée (al. 1). La rééducation dans la même profession est assimilée au reclassement (al. 2). Sont considérées comme un reclassement les mesures de formation destinées à des assurés qui en ont besoin, en raison de leur invalidité, après achèvement d'une formation professionnelle initiale ou après le début de l'exercice d'une activité lucrative sans formation préalable, pour maintenir ou pour améliorer sensiblement leur capacité de gain (art. 6 al. 1 RAI). Par ailleurs, seule une perte de gain de 20% environ ouvre en principe droit à une mesure de reclassement dans une nouvelle profession (ATF 124 V 108 consid. 2b et les arrêts cités).
8.2.2 Conformément à l'art. 15 LAI, l'assuré auquel son invalidité rend difficile le choix d'une profession ou l'exercice de son activité antérieure a droit à l'orientation professionnelle. L'orientation professionnelle se démarque des autres mesures d'ordre professionnel (art. 16 ss LAI) par le fait que, dans le cas particulier, l'assuré n'a pas encore fait le choix d'une profession, bien qu'il soit capable, en soi, d'opérer un tel choix. L'invalidité au sens de cette disposition réside dans l'empêchement de choisir une profession ou d'exercer l'activité exercée jusqu'alors à la suite de problèmes de santé. Est à prendre en considération tout handicap physique ou psychique propre à réduire le nombre des professions et activités que l'assuré pourrait exercer, compte tenu des dispositions personnelles, des aptitudes exigées et des possibilités disponibles, ou à empêcher l'exercice de l'activité déployée jusqu'à présent (ATF 114 V 29 consid. 1a ; voir également arrêt du Tribunal fédéral I 154/76 du 22 novembre 1976 consid. 2 in RCC 1977 p. 203). L'octroi d'une orientation professionnelle suppose que l'assuré soit entravé, même de manière faible, dans sa recherche d'un emploi adéquat à la suite de problèmes de santé (arrêt du Tribunal fédéral I 11/99 du 15 octobre 1999 consid. 6). Sont exclus les handicaps insignifiants qui n'ont pas pour effet de provoquer un empêchement sérieux et qui, par conséquent, ne justifient pas l'intervention de l'assurance-invalidité (ATF 114 V 29 consid. 1a ; Ulrich MEYER-BLASER, op. cit., p. 156 ss). L'orientation professionnelle doit guider l'assuré vers l'activité dans laquelle il aura le plus de chances de succès, compte tenu de ses dispositions et de ses aptitudes. Parmi les mesures qui peuvent entrer en ligne de compte figurent notamment les entretiens d'orientation, les tests d'aptitudes ou encore les stages d'observation en milieu ou hors milieu professionnel (arrêt du Tribunal fédéral I 552/86 du 27 novembre 1987 consid. 4a in RCC 1988 p. 191 ; voir également Ulrich MEYER, op. cit., ad art. 15 LAI p. 174).
8.2.3 Aux termes de l'art. 18 al. 1 LAI, l'assuré présentant une incapacité de travail et susceptible d'être réadapté a droit : a) à un soutien actif dans la recherche d'un emploi approprié ; b) à un conseil suivi afin de conserver un emploi.
Une mesure d'aide au placement se définit comme le soutien que l'administration doit apporter à l'assuré qui est entravé dans la recherche d'un emploi adapté en raison du handicap afférent à son état de santé. Il ne s'agit pas pour l'office AI de fournir une place de travail, mais notamment de soutenir une candidature ou de prendre contact avec un employeur potentiel. Cette mesure n'a pas été fondamentalement modifiée par l'entrée en vigueur des dispositions relatives à la 4e révision de la LAI (ATF 116 V 80 consid. 6 ; arrêt du Tribunal fédéral I 421/01 du 15 juillet 2002 consid. 2c, comparés aux arrêts du Tribunal fédéral I 170/06 et 9C_879/2008 des 26 février 2007 et 21 janvier 2009 et les références).
A notamment droit au service de placement au sens de l'art. 18 al.1 LAI dans sa teneur jusqu'au 31 décembre 2003, l'assuré qui, pour des raisons liées à son invalidité, doit faire valoir des exigences spéciales concernant le poste de travail, telles que des aides visuelles, ou vis-à-vis de l'employeur (par exemple tolérance de pauses de repos nécessitées par l'invalidité) et qui, de ce fait, doit faire appel aux connaissances professionnelles et à l'aide spécialisée de l'autorité chargée du placement pour trouver un emploi (arrêt du Tribunal fédéral I 510/04 du 19 août 2005 consid. 3.1). Il n'y a en revanche pas d'invalidité au sens de l'art. 18 al. 1 LAI dans sa teneur jusqu'au 31 décembre 2003 (et donc aucun droit à une aide au placement) lorsque l'assuré dispose d'une capacité de travail de 100% dans une activité adaptée et qu'il ne présente pas de limitations particulières liées à son état de santé, telles que mutisme, cécité, mobilité limitée, troubles de comportement, qui l'entraveraient dans sa recherche de travail, par exemple pour participer à des entretiens d'embauche, pour expliquer ses limites et ses possibilités dans une activité professionnelle ou pour négocier certains aménagements de travail nécessités par son invalidité (arrêt du Tribunal fédéral I 595/02 du 13 février 2003 consid. 1.2). Par ailleurs, les problèmes étrangers à l'invalidité, tels que le fait de ne pas savoir parler une des langues nationales, ne sont pas pris en considération lors de l'examen du droit à l'aide au placement (arrêt du Tribunal fédéral I 421/01 du 15 juillet 2002, consid. 2c).
Les arrêts précités ont certes été rendus sous l'empire de l'ancien droit, dans lequel l'art. 18 LAI avait une teneur différente mais ils demeurent valables après l'entrée en vigueur de la 5e révision de l'AI (arrêt du Tribunal fédéral 9C_416/2009 du 1er mars 2010 consid. 5.2).
9. En l’espèce, la chambre de céans constate qu’en 2022, l’OAI a mis la recourante au bénéfice d’une mesure d’orientation professionnelle, qui s’est déroulée du 2 mai au 28 aout 2022. Cette mesure a été complétée par une mesure de reclassement dans la profession de secrétaire médicale, laquelle devait se dérouler du 5 septembre 2022 au 30 juin 2024.
La recourante a validé le premier trimestre, ayant été promue avec d’excellents résultats. Elle a toutefois été contrainte d’interrompre cette mesure de reclassement en raison d’une recrudescence de la névralgie d’Arnold.
À ce moment, il lui restait deux trimestres à faire comme cela ressort d’une note de travail de l’OAI du 9 mai 2023. Il était alors même question qu’elle puisse reprendre cette formation, une fois qu’elle irait mieux, en janvier 2024.
Par la suite, dans son rapport du 4 juillet 2023 adressé à l’OAI, le Dr H______ évoque un stage « d’essai » et explique que sa patiente serait en mesure de reprendre une activité professionnelle adaptée à ses limitations, dans un autre domaine que celui du personnel hospitalier membre d’une équipe de soins.
On peut dès lors s’étonner que l’OAI ait choisi la voie de l’expertise et non celle d’une reprise de la mesure de reclassement alors que l’assurée était motivée et que les médecins la soutenaient dans ce sens.
En tout état, les conclusions du service de réadaptation de l’OAI du 7 mars 2024, selon lesquelles des mesures de réadaptation ne seraient plus de nature à réduire le dommage, n’étant ni simples ni adéquates, ne sauraient être suivies. En effet, comme on l’a vu précédemment, l’activité habituelle n’est plus exigible, au contraire d’une activité adaptée. De plus, selon les propres calculs de l’OAI, la comparaison des revenus mène à un degré d’invalidité de 31.68% en prenant en considération une capacité de travail de 90% dans une activité adaptée. Le seuil des 20% pour une mesure de reclassement est donc toujours dépassé.
Par conséquent, au vu de ce qui précède, la cause sera renvoyée à l’OAI pour que celui-ci réexamine le droit de la recourante à des mesures d’ordre professionnel, éventuellement sous la forme d’une poursuite de la formation en tant que secrétaire médicale, voire sous la forme d’une nouvelle mesure.
10. Par ailleurs, comme indiqué supra, la Dre C______ a considéré que les douleurs neuropathiques pouvaient être redécompensées et que durant ces périodes, la recourante n’était pas capable de travailler à plein temps.
Certes, la Dre C______ n’a pas délivré de certificats d’arrêt de travail en raison des troubles neuropathiques, dès lors que la recourante était déjà incapable de travailler en raison de ses atteintes au rachis et à la hanche.
Cela étant, parallèlement au réexamen des mesures d’ordre professionnel, l’OAI est invité à se rapprocher des médecins traitants de la recourante afin de déterminer dans quelle mesure les douleurs neuropathiques pouvaient théoriquement entraîner une incapacité de travail ou une diminution de rendement dans une activité adaptée et à quelle(s) période(s).
En fonction des réponses données par les médecins traitants, il appartiendra à l’office intimé d’examiner si les conditions d’une rente limitée dans le temps sont réunies et de rendre une nouvelle décision sur ce point.
11. Le recours est partiellement admis et la décision du 3 juin 2024 est annulée. La cause est renvoyée à l’office intimé pour réexamen des mesures d’ordre professionnel, établissement des périodes d’incapacité de travail passées et/ou de l'éventuelle diminution rendement dues aux atteintes neurologiques et nouvelle décision.
La recourante obtenant partiellement gain de cause, une indemnité de CHF 1'500.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03).
La procédure en matière d'assurance-invalidité n'étant pas gratuite (art. 69 al. 1bis LAI), un émolument de CHF 200.- est mis à la charge de l’office intimé.
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. L'admet partiellement.
3. Annule la décision du 3 juin 2024.
4. Renvoie la cause à l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève pour poursuite des mesures d’ordre professionnel, établissement des périodes d’incapacités de travail passées et/ou de la diminution de rendement dues aux atteintes neurologiques et nouvelle décision.
5. Condamne l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève à verser à la recourante une indemnité de CHF 1'500.- à titre de participation à ses frais.
6. Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève.
7. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Nathalie KOMAISKI |
| La présidente
Justine BALZLI |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le