Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/214/2024 du 02.04.2024 ( LPP ) , ADMIS
En droit
rÉpublique et | 1.1canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/98/2023 ATAS/214/2023 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt incident du 28 mars 2023 8ème Chambre |
En la cause
Monsieur A______, domicilié ______, TROINEX
| recourant |
contre
OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE | intimé |
A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré ou le recourant), né le ______ 1970, a travaillé comme barman, au bénéfice d’un diplôme de cafetier, vendeur en kiosque et hypnothérapeute indépendant depuis 2007.
b. Depuis le 1er octobre 2013, il est en incapacité totale de travailler en raison de troubles psychiques.
c. Il est au bénéfice de prestations d’aide sociale de l’Hospice général depuis le 1er février 2014.
d. En octobre 2014, il a sollicité les prestations de l’assurance-invalidité.
e. Dans son rapport reçu à l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI) le 9 février 2015, la doctoresse B______, spécialiste FMH psychiatrie et psychothérapie, a posé les diagnostics d’état de stress post-traumatique et autres troubles dissociatifs spécifiques (confusion psychique). L’incapacité de travail était totale depuis le 1er octobre 2013 en raison d’angoisses psychogènes massives, d’idées délirantes de persécution, d’une intolérance au stress générant parfois des symptômes dissociatifs, voire une confusion. Il y avait le risque d’une évolution vers une psychose, l’effet des traitements étant limité pour les symptômes anxieux et les troubles du sommeil.
f. En mars 2016, l’assuré a été soumis à une expertise psychiatrique par le docteur C______, psychiatre-psychothérapeute FMH. Dans son rapport du 22 mai 2016, l’expert n’a retenu aucun diagnostic avec incidence sur la capacité de travail. Les diagnostics avec répercussion sur celle-ci étaient des troubles mentaux et troubles du comportement lié à l’utilisation d’alcool, syndrome de dépendance, actuellement abstinent, et un trouble anxieux et dépressif mixte. Il y avait une interaction entre ces deux diagnostics, trouble anxieux et dépressif mixte, possiblement à la suite d’un traumatisme subi dans l’enfance, ayant entraîné une symptomatologie suffisante pour amener à une consommation d’alcool secondaire. Lors de l’expertise, la symptomatologie dépressive était insuffisante pour retenir un diagnostic séparé de dépression. Il en allait de même pour la symptomatologie anxieuse. La capacité de travail en tant qu’hypnothérapeute indépendant était probablement nulle, l’exercice d’une activité en indépendant, sans remboursement par les caisses-maladie, étant source de stress et possiblement une cause de la décompensation. Quant à l’activité de vendeur en kiosque, elle serait envisageable pour l’assuré si on excluait une activité de nuit. Enfin, une activité dans la restauration était à éviter du fait de la dépendance à l’alcool et du stress constant. Dans une activité adaptée, la capacité de travail était totale, après une période de réentraînement progressif sur au maximum six mois. Les limitations fonctionnelles étaient modestes. Elles étaient liées à la gestion du stress et à une estime partiellement « affectée » par les événements des dernières années. Quant aux ressources, elles étaient suffisantes pour réintégrer le monde professionnel, pour autant que l'assuré soit abstinent.
g. Dans son complément d’expertise du 14 septembre 2016, l’expert a considéré qu’il n’y avait pas d’atteinte psychique au sens de l’assurance-invalidité et que l’assuré avait su démontrer qu’il était capable d’un fonctionnement suffisant pour exercer une activité professionnelle.
h. Le 25 janvier 2017, l’OAI a refusé à l’assuré ses prestations.
B. a. En janvier 2022, l’assuré a déposé une nouvelle demande de prestations de l’assurance-invalidité.
b. Dans son rapport du 25 février 2022, la doctoresse D______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, a posé les diagnostics de trouble de stress post-traumatique complexe, à survenue différée, sévère et chronique, et de troubles dissociatifs non spécifiés. La capacité de travail de l'assuré était nulle depuis le début des suivis par cette psychiatre, à savoir janvier 2018. Dans l’anamnèse, celle-ci a mentionné l’apparition des troubles en 2013, lors d’un voyage en Thaïlande, après une période de surcharge de travail et de stress majeur. L'assuré vivait des flash-backs en lien avec des maltraitances sexuelles pendant la petite enfance et présentait des angoisses massives, cauchemars violents, une hyper-vigilance, un épisode de déréalisation avec scarifications, puis des hallucinations acoustico-verbales. Il avait débuté un suivi au Centre de consultation pour les victimes d’abus sexuel (ci-après : CTAS) en septembre 2013 jusqu’en juin 2015, puis était suivi en raison d’une utilisation nocive d’alcool à but anxiolytique. Il y avait trois hospitalisations entre 2014 et 2017 suite à des crises paroxystiques d’angoisse avec exacerbation des hallucinations acoustico-verbales le mettant à risque auto- et hétéro-agressif. Lorsqu’il avait été adressé à cette psychiatre, il présentait une angoisse massive, des cauchemars très violents, une hyper-vigilance, des hallucinations acoustico-verbales de type persécutoire, une thymie dépressive et des idées suicidaires. Le traitement consistait en Seroquel de 200mg, plus une réserve de Paroxetine de 60mg et de Trittico de 100 mg prescrits depuis plusieurs années. Il était régulièrement incapable de participer aux groupes proposés à la Clinique Belmont, ces groupes étant générateurs d’une hyper-vigilance et d’angoisses importantes. Il était par ailleurs abstinent de toute consommation d’alcool depuis fin 2016. En raison de ses atteintes psychiques, il avait des difficultés à tenir son ménage, à garder un rythme de vie quotidien, oubliant parfois de manger durant toute la journée, inversant régulièrement le rythme de veille-sommeil. En raison des atteintes, son isolement social était majeur par manque d’intérêt et de plaisir, ainsi que du fait que l’hypervigilance rendait toute sortie hors de chez lui désagréable. Dans l’évolution de l’état de santé depuis le début de la prise en charge, la Dresse D______ a mentionné que toute tentative d’explorer le passé traumatique ou le vécu actuel de l’assuré déclenchait des crises d’angoisse, raison pour laquelle le traitement a été augmenté (Seroquel à 300mg et baisse du Deroxat à 40mg). Une reprise d’un groupe hebdomadaire à l’Arcade 84 avait été tentée, mais l’assuré n’avait pas réussi à investir ce groupe de manière suivie, en raison de ses atteintes. La mise en place d’un suivi psychothérapeutique EMDR, effectué durant l’année 2019, avait amené une amélioration lentement progressive de la symptomatologie et permis à l’assuré de se remobiliser peu à peu sur le plan personnel et réinvestir progressivement l’activité groupale à l’Arcade 84 durant quelques mois. Le traitement était actuellement de Seroquel 250mg/j et de Paroxetine de 40mg/j. Il y avait une très bonne compliance thérapeutique.
c. Dans son avis médical du 27 septembre 2022, le service médical régional de l’assurance-invalidité pour la Suisse romande (ci-après : SMR) a constaté que la nouvelle demande était fondée sur les mêmes diagnostics posés par sa psychiatre dans sa précédente demande. Or, ces diagnostics avaient été réfutés par l’expert à l’époque. Partant, les nouvelles pièces versées au dossier n’apportaient pas de nouveaux éléments médicaux objectifs notables pour une aggravation de l’état de santé depuis la dernière décision.
d. Le 30 septembre 2022, l’OAI a informé l’assuré qu’il avait l’intention de refuser d’entrer en matière sur sa nouvelle demande.
e. Par décision du 10 novembre 2022, l’OAI a confirmé son projet de décision.
C. a. Par courrier posté le 11 janvier 2023, la Dresse D______ a saisi la chambre de céans et lui a transmis le courrier daté du 22 décembre 2022 qu’elle avait rédigé au nom de l'assuré afin qu'il puisse le joindre à sa demande de recours contre la décision de l’assurance-invalidité, tout en précisant que celui-ci n’avait pas réussi à l’envoyer avant la fin de l’année en raison d’une aggravation sérieuse de son état psychique.
Dans le document du 22 décembre 2022, la Dresse D______ a confirmé pour l’essentiel son rapport du 25 février 2022. Elle a par ailleurs précisé que l’arrivée de la pandémie en 2020 avec les mesures de protection ordonnées par les autorités fédérales avait été le déclencheur d’une nouvelle aggravation progressive, l’obligation de se masquer étant quasi insupportable pour l'assuré et provoquant des angoisses de type persécutoire, liées aux agressions dont il avait été victime enfant. Le refus d’entrer en matière ne tenait pas compte des nouveaux éléments, à savoir que l’alcool n’était plus un problème et que le traitement par EMDR confirmait l’hypothèse d’agressions subies dans l’enfance, contrairement à ce que l’expert avait retenu, celui-ci ayant surtout mis en avant la dépendance à l’alcool, éventuellement du fait que les troubles du moment de l’expertisé n’avaient pas été aussi prégnants qu’ils l’ont été par la suite. La Dresse D______ a conclu à une entrée en matière sur la nouvelle demande, l’assuré étant toujours complètement isolé et incapable d’assurer un travail dans le marché de l’emploi.
b. Le 20 janvier 2023, l’intimé a informé la chambre de céans que sa décision du 10 novembre 2022 avait été retirée à la poste le 18 novembre 2022.
c. À la demande de la chambre de céans, la Dresse D______ a précisé le 10 février 2023 qu’elle avait considéré, à sa consultation du 20 décembre 2022, que le recourant était apte d’envoyer le courrier qu’elle avait rédigé en son nom le 22 décembre 2022 à titre de recours contre la décision du 10 novembre 2022, même s’il présentait depuis quelques temps déjà certains signes d’aggravation de son état psychique (augmentation de la fréquence des cauchemars et des nuits blanches notamment). Il avait été convenu qu’elle lui enverrait ce document, qu’il l’imprimerait et le joindrait à sa demande de recours. Dans les jours suivants, l’état psychique du recourant s’était cependant sérieusement aggravé, suite à une interaction familiale qui avait déclenché un fort sentiment d’injustice et de colère. Une panne soudaine de son imprimante l’avait empêché d’imprimer en outre le document, ce qui l’avait mis en état de rage et d’impuissance. Il disait « avoir vu rouge » avec des envies de tout casser, des idées suicidaires envahissantes et la résurgence de symptômes dissociatifs qui s’étaient partiellement amendés suite au traitement. Il avait réussi à se contenir au prix de se calfeutrer chez lui et de se mettre à distance des facteurs déclencheurs, dont la demande de recours. Il décrivait des idées suicidaires, des cauchemars quotidiens, une désorganisation du rythme veille-sommeil suite à des nuits blanches à répétition, un sentiment de menaces et de « présence, réapparition d’une voix » qui le provoquait et lui mettait la pression pour se faire du mal. Cette décompensation était de nature à l’empêcher de faire les démarches pour former recours. Le fait de s’adresser une nouvelle fois à l’OAI était source d’angoisses, le renvoyant à un sentiment d’incapacité difficilement tolérable et à la non-reconnaissance de ses troubles.
d. Dans un avis du 13 mars 2023, le SMR a considéré que le rapport de la psychiatre traitante du 22 décembre 2022 mettait en évidence une aggravation plausible de l’état de santé de l’assuré, postérieure à la décision de l’OAI. Concernant le dépôt tardif du recours, Dresse D______ avait reconnu qu’en décembre 2022, l’assuré avait été apte à déposer un recours. Le fait que son imprimante était en panne et l’avait mis dans un état de rage n’était pas un motif d’inaptitude à déposer un recours sur le plan médical.
e. Dans sa réponse du 13 mars 2023, l’intimé a conclu à l’irrecevabilité du recours pour cause de tardiveté. Si la chambre de céans devait considérer que les conditions de restitution du délai étaient remplies, il se réservait sa réponse sur le fond. Il a relevé qu’au moment de la consultation du 20 décembre 2022 chez la Dresse D______, le recourant avait reçu la décision litigieuse depuis plus d’un mois et s’était résolu avec l’aide de sa médecin d’y faire recours. Selon l’intimé, « On peine à comprendre pour quelle raison cet acte, dont la charge mentale afférente a déjà été en grande partie effectuée au moment de la consultation (décision de faire recours, contenu discuté avec la psychiatre) aurait provoqué un obstacle majeur, alors qu’il ne restait plus qu’à envoyer le document en question ». Par ailleurs, selon le SMR, les éléments avancés ne justifiaient pas une incapacité à déposer le recours sur le plan médical. Aucune incapacité de discernement n’était notamment évoquée. Toutefois, dans la mesure où le SMR considérait que l’aggravation de l’état de santé évoquée par la psychiatre postérieurement à la décision litigieuse était plausible, le recourant avait la possibilité de déposer une nouvelle demande de prestations.
1. Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
2. Est litigieuse la recevabilité du recours, en particulier le respect du délai légal de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).
3.
3.1 Les délais commencent à courir le lendemain de leur communication ou de l'événement qui les déclenche. Le délai fixé par semaines, par mois ou par années expire le jour qui correspond par son nom ou son quantième à celui duquel il court ; s'il n'y a pas de jour correspondant dans le dernier mois, le délai expire le dernier jour dudit mois. Lorsque le dernier jour du délai tombe un samedi, un dimanche ou sur un jour légalement férié, le délai expire le premier jour utile. Les écrits doivent parvenir à l'autorité ou être mis à son adresse à un bureau de poste suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse au plus tard le dernier jour du délai avant minuit. Les délais sont réputés observés lorsqu'une partie s'adresse par erreur en temps utile à une autorité incompétente (cf. art. 38 à 39 LPGA et art. 17 LPA).
La décision qui n'est remise que contre la signature du destinataire ou d'un tiers habilité est réputée reçue au plus tard sept jours après la première tentative infructueuse de distribution (art. 38 al. 2bis LPGA et 62 al. 4 LPA). Lorsque le dernier jour du délai tombe un samedi, un dimanche ou sur un jour légalement férié, le délai expire le premier jour utile (art. 38 al. 3 LPGA et 17 al. 3 LPA).
3.2 Aux termes de l'art. 41 LPGA (applicable selon les art. 3 let. dbis PA et 55 al. 2 LPGA, en relation avec l'art. 60 al. 2 LPGA), si le requérant ou son mandataire a été empêché, sans sa faute, d'agir dans le délai fixé, celui-ci est restitué pour autant que, dans les 30 jours à compter de celui où l'empêchement a cessé, le requérant ou son mandataire ait déposé une demande motivée de restitution et ait accompli l'acte omis.
L'art. 41 al. 1 LPGA subordonne la restitution à l'absence de toute faute quelconque. Par « empêchement non fautif » d'accomplir un acte de procédure, il faut comprendre non seulement l'impossibilité objective ou la force majeure – par exemple en raison d'une maladie psychique entraînant une incapacité de discernement (ATF 108 V 226 consid. 4; voir également l'arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 468/05 du 12 octobre 2005 consid. 3.1) –, mais également l'impossibilité subjective due à des circonstances personnelles ou une erreur excusable (ATF 96 II 262 consid. 1a; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 204/06 du 16 juillet 2007 consid. 4.1). Ces circonstances doivent toutefois être appréciées objectivement : est non fautive toute circonstance qui aurait empêché un plaideur - respectivement un mandataire - consciencieux d'agir dans le délai fixé (arrêt du Tribunal fédéral 9C_54/2017 du 2 juin 2017 consid. 2.2).
La maladie ou l’accident peuvent, à titre d’exemples, être considérés, comme un empêchement non fautif et, par conséquent, permettre une restitution d'un délai de recours, s’ils mettent la partie recourante ou son représentant légal objectivement ou subjectivement dans l'impossibilité d'agir par soi-même ou de charger une tierce personne d'agir en son nom dans le délai (ATF 119 II 86 consid. 2; ATF 112 V 255; arrêt du Tribunal fédéral 9C_209/2012 du 26 juin 2012 consid. 3.1). La jurisprudence admet également que le décès d'un proche puisse constituer un empêchement non fautif d'agir à temps et justifier une restitution du délai s'il survient peu avant l'échéance de celui-ci (arrêt du Tribunal fédéral 9C_54/2017 du 2 juin 2017 consid. 2.2).
4. En l’occurrence, compte tenu de la réception de la décision litigieuse en date du 18 novembre 2022, le délai de recours aurait en principe expiré le 19 décembre 2022, étant précisé que le 18 était un dimanche. Toutefois, selon les art. 38 al. 4 let. c LPGA et 89 let. c de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA-GE - E 5 10), les délais de recours sont suspendus du 18 décembre au 2 janvier. Partant, le délai de recours a expiré le 4 janvier 2022.
Le recours posté par la Dresse D______ le 11 janvier 2023 au nom de l’assuré est ainsi manifestement tardif.
5. Se pose dès lors la question de savoir s’il y a lieu de restituer le délai de recours en application de l’art. 41 LPGA.
Lors de la consultation du 20 décembre 2022 chez la Dresse D______, celle-ci a convenu avec le recourant qu’elle rédigerait une lettre à joindre à son recours. Elle a alors considéré à ce moment que son patient était en mesure d’envoyer ce document à titre de recours contre la décision du 10 novembre 2022. Toutefois, comme elle l’explique dans son courrier du 10 février 2023, l’état psychique du recourant s’est par la suite sérieusement aggravé, en raison d’interaction familiale qui avait déclenché un fort sentiment d’injustice et de colère. Une panne de son imprimante l’empêchant d’imprimer le document de sa psychiatre avait renforcé l’état de rage et d’impuissance. En réaction, afin de contenir ses envies de tout casser, les idées suicidaires envahissantes et la résurgence de symptômes dissociatifs, le recourant s’est calfeutré pour se mettre à l’abri des facteurs déclencheurs, dont le recours fait partie. Cela l’avait empêché d’envoyer à l'OAI le document daté du 22 décembre 2022 de sa médecin.
L’intimé n’est pas convaincu par ces explications, considérant que la charge mentale liée au recours avait déjà été épuisée au moment de la consultation, lors de laquelle la décision de faire recours avait été discutée. Par ailleurs, le SMR considère que l’empêchement n’est pas lié à une raison médicale, mais à une panne de l’imprimante.
En premier lieu, il sied de constater que la Dresse D______ certifie une aggravation de l’état de santé en raison d’une interaction familiale. Il paraît tout à fait plausible que la panne soudaine de l’imprimante ait augmenté le sentiment de rage et d’impuissance et ainsi renforcé l’aggravation. Par ailleurs, même si la décision de faire recours avait été discutée auparavant avec la psychiatre, les appréhensions et sentiments qui y sont liés ne sont pas éliminés définitivement, mais peuvent être réactivés, notamment au moment où il faut faire partir le recours. En tout état de cause, selon la psychiatre traitante, le recourant n’avait rien trouvé de mieux que de se calfeutrer chez lui et de se mettre à l’abri de tout facteur déclenchant les angoisses et autres manifestations psychiatriques, dont le recours.
En conséquence, il convient d'admettre que le recourant s'est trouvé dans une espèce de paralysie d'agir en fin d'année 2022. La chambre de céans est ainsi convaincue par les explications de la Dresse D______ et admet que le recourant était empêché de déposer le recours dans les délais, suite à une aggravation de son état postérieure au 20 décembre 2022.
6. Par ailleurs, son mandataire a déposé une demande motivée de restitution et déposé le recours dans les trente jours à compter de celui où a cessé l’empêchement.
Par conséquent, il y a lieu de restituer le délai de recours et de déclarer celui-ci recevable.
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant sur partie
1. Déclare le recours recevable.
2. Réserve le fond.
3. Octroie à l’intimé un délai au 15 mai 2023 pour se déterminer sur le fond.
4. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Nathalie LOCHER |
| La présidente suppléante
Maya CRAMER |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le