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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4168/2021

ATAS/791/2022 du 09.09.2022 ( PC ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4168/2021 ATAS/791/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 9 septembre 2022

5ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée ______, à GENÈVE

 

 

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES, sis route de Chêne 54, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l’intéressée ou la recourante), née en ______1969, a déposé, en date du 24 mai 2012, une requête en mesures protectrices de l’union conjugale qui a abouti au jugement du 1er mars 2013, rendu par le Tribunal de première instance (ci-après : TPI), autorisant les époux à vivre séparés et attribuant à l’intéressée la garde sur les enfants B______, née en ______ 1996, et C______, né en ______ 1999.

b. Le jugement du 1er mars 2013 donnait acte à l’époux de son engagement de verser, en main de l’intéressée, par mois et d’avance, allocations familiales éventuellement comprises et par enfant, la somme de CHF 250.- jusqu’à l’âge de 18 ans, voire au-delà en cas de suivi d’une formation ou d’études régulières et sérieuses, au titre de contribution à l’entretien des enfants B______ et C______.

c. L’intéressée a déposé, en date du 7 juin 2019, une demande de prestations complémentaires auprès du service des prestations complémentaires (ci-après : le SPC ou l’intimé).

B. a. Par décision du 26 avril 2021, le SPC a établi le droit aux prestations complémentaires de l’intéressée, rétroactivement au 1er avril 2014. Se fondant sur la date de fin des études de l’enfant C______, le SPC a, notamment, décidé que le droit aux prestations complémentaires pour ledit enfant prenait fin au 31 juillet 2018.

b. L’intéressée s’est opposée à la décision du 26 avril 2021, faisant notamment valoir que le loyer dont elle s’acquittait n’avait pas été pris en compte dans le calcul des prestations, de même qu’il n’y avait pas lieu de tenir compte de la contribution d’entretien du père des enfants.

c. Par décision sur opposition du 12 novembre 2021, le SPC a partiellement admis l’opposition de l’intéressée. Il a tenu compte d’un loyer d’un montant annualisé de CHF 23'346.- avec des charges annuelles de CHF 1'800.-. Pour l’année 2021, le SPC a tenu compte du fait que l’intéressée partageait son logement avec son fils C______. Dès lors que ce dernier avait arrêté ses études, il perdait son droit aux prestations complémentaires à compter du 1er août 2018 et le montant des pensions alimentaires potentielles devait être réduit de CHF 6’000.- à CHF 3’000.- dès cette date. S’agissant de la fille, B______, cette dernière perdait son droit aux prestations complémentaires à compter du 1er septembre 2018 suite à son départ du domicile de l’intéressée, si bien que, dès cette date, le montant des pensions alimentaires potentielles pour B______ devait être réduit de CHF 3'000.- à zéro. À la lumière de ces changements, un nouveau plan de calcul était annexé à la décision.

C. a. Par acte posté le 8 décembre 2021, l’intéressée a recouru contre la décision sur opposition du 12 novembre 2021 par-devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans), en faisant valoir que son fils C______, qui habitait avec elle, avait repris ses études de maturité, pour l’année scolaire 2021/2022. Ce changement était documenté par une attestation de l’école D______, datée du 26 août 2021, confirmant l’inscription de C______ dans la filière maturité professionnelle, pour l’année scolaire 2021/2022, dès le 30 août 2021. De surcroît, la contribution d’entretien décidée par jugement du 1er mars 2013 était en cours de modification. La recourante concluait à ce que ces éléments soient pris en compte et la décision modifiée.

b. Par réponse du 7 janvier 2022, le SPC a relevé qu’il n’avait pas eu connaissance de la reprise de la scolarité de C______ pour l’année scolaire 2021/2022. Dès lors, le SPC concluait à l’admission partielle du recours dans la mesure où l’enfant C______ devait être réintégré dans le calcul des prestations, rétroactivement au 1er septembre 2021, sous réserve que ses ressources n’excèdent pas ses dépenses reconnues. Toutefois, le montant mensuel de la contribution d’entretien, par CHF 250.-, devait être également pris en compte, dès le 1er septembre 2021, dans la mesure où le jugement du 1er mars 2013 n’avait pas encore été réformé, à la connaissance du SPC.

c. Par courrier du 12 janvier 2022, la chambre de céans a interpellé la recourante quant à la proposition d’admission partielle du recours par le SPC. Cette dernière a répondu, par courrier du 27 janvier 2022, qu’il fallait également tenir compte du changement intervenu depuis le jugement du 1er mars 2013, informant la chambre de céans qu’elle allait recevoir une copie du nouveau jugement.

d. Par courrier du 4 avril 2022, la recourante a transmis à la chambre de céans une copie de la transaction passée devant le juge conciliateur du TPI, en date du 7 mars 2022, par laquelle la contribution d’entretien du père en faveur des enfants C______ et B______ avait été supprimée, avec effet au 1er janvier 2022.

e. Une copie de la transaction du 7 mars 2022 a été communiquée au SPC, par courrier du 6 avril 2022.

f. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

g. Les autres faits seront décrits, en tant que de besoin, dans la partie « en droit » du présent arrêt.

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Interjeté dans les délai et forme prévus par la loi (cf. art. 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]), le recours est recevable.

3.              

3.1 Les dispositions transitoires relatives aux modifications des 22 mars et 20 décembre 2019 de la LPC, en vigueur dès le 1er janvier 2021, prévoient une période transitoire de trois ans pour les personnes bénéficiaires de prestations complémentaires pour lesquelles la réforme des prestations complémentaires entraîne, dans son ensemble, une diminution de la prestation complémentaire annuelle ou la perte du droit à la prestation complémentaire annuelle. Pour ces personnes, l’ancien droit reste ainsi applicable jusqu’à la fin de l’année 2023. En revanche, le nouveau droit s’applique immédiatement aux personnes qui acquièrent un droit aux prestations complémentaires fédérales après l’entrée en vigueur de la réforme (cf. Message relatif à la modification de la loi sur les prestations complémentaires du 16 septembre 2016 : FF 2016 7249, p. 7326).

3.2 En l’espèce, la décision initiale du 26 avril 2021 et la décision sur opposition du 12 novembre 2021 qui la remplace ont été rendues après le 1er janvier 2021, mais le droit potentiel de la recourante aux prestations complémentaires débute avant le 1er janvier 2021.

Dans ces circonstances, il y a lieu d’appliquer l’ancien droit pour la période allant jusqu’au 31 décembre 2020. Pour la période postérieure à cette dernière date, l’ancien droit n’est applicable que si le nouveau droit n’est pas, globalement, plus favorable et ceci jusqu’en 2023.

Après comparaison, le SPC a appliqué l’ancien droit pour l’année 2021, dans la mesure où l’application du nouveau droit est plus défavorable.

Les plans de calcul effectués pour la période allant du 1er janvier au 30 avril 2021, en application de l’ancien droit, aboutissent à des prestations complémentaires fédérales mensuelles (ci-après : PCF) s’élevant à CHF 1'611.- et des prestations complémentaires cantonales mensuelles (ci-après : PCC) s’élevant à CHF 866.-, puis de respectivement CHF 923.- (PCF) et CHF 268.- (PCC) dès le 1er mai 2021.

En appliquant le nouveau droit à la période allant du 1er janvier au 30 avril 2021, on aboutit à des PCF mensuelles de CHF 1'370.- et des PCC mensuelles de CHF 866.-, puis de zéro (PCF et PCC) dès le 1er mai 2021.

Il résulte de ce qui précède que l’application de l’ancien droit, à partir du 1er janvier 2021 est plus favorable à l’intéressée ; ce sont donc les dispositions de l’ancien droit qui s’appliquent à la décision.

4.             L’objet du litige est le bien-fondé de la décision de l’intimé, s’agissant du droit aux prestations complémentaires.

Au stade du recours, seul un aspect spécifique du calcul des prestations complémentaires est encore litigieux, à savoir la prise en compte, par l’intimé, de la reprise des études régulières par C______, le fils de la recourante, et de la modification du jugement sur mesures protectrices de l’union conjugale quant à la contribution d’entretien versée par le père de C______.

5.              

5.1 Les prestations complémentaires fédérales se composent de la prestation complémentaire annuelle et du remboursement des frais de maladie et d'invalidité (art. 3 al. 1 LPC). L'art. 9 al. 1 LPC dispose que le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants. Selon l’art. 11 al. 1 LPC, dans sa teneur – applicable en l’occurrence – jusqu’au 31 décembre 2020 - les revenus déterminants comprennent notamment les ressources et parts de fortune dont un ayant droit s'est dessaisi (let. g) et les pensions alimentaires prévues par le droit de la famille (let. h). Sont réputées comme telles, les prestations régulières d'entretien qui sont dues en vertu d'une décision judiciaire, d'une autorité ou d'une convention fondée sur le droit de la famille (Michel VALTERIO, Commentaire de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI, 2015, n. 149 ad art. 11).

5.2 Selon l’art. 9 al. 2 LPC, les dépenses et revenus déterminants des conjoints (1) des enfants ayant droit à une rente d’orphelin ou donnant droit à une rente pour enfant de l’AVS ou de l’AI (2) sont additionnés ; il en va de même pour des orphelins faisant ménage commun (3). Cette disposition est exhaustive (en ce sens : ATF 147 V 441 consid. 3.2 ; ATF 139 V 307 consid. 6.2 et 6.3).

Selon l’art. 11 al. 1 LPC (dans sa version jusqu’au 31 décembre 2020), les revenus déterminants comprennent notamment le produit de la fortune mobilière et immobilière (art. 11 al. 1 let. b LPC) et les ressources dont un ayant droit s’est dessaisi (art. 11 al. 1 let. g LPC).

5.3 Aux termes de l’art. 5 LPCC, le revenu déterminant en matière de prestations complémentaires cantonales est calculé conformément aux règles fixées dans la LPC et ses dispositions d’exécution moyennant certaines adaptations prévues par le droit cantonal. Les PCF sont ainsi ajoutées au revenu déterminant (art. 5 let. a LPCC) et, en dérogation à l’art. 11 a. 1 let. c LPC, la part de la fortune nette prise en compte dans le calcul du revenu déterminant est de 1/5ème s’agissant d’un assuré percevant une rente de vieillesse, après déduction des franchises prévues par cette disposition (art. 5 let. c LPCC).

Selon l’art. 6 LPCC, les dépenses reconnues en matière de prestations complémentaires cantonales sont celles énumérées par le droit fédéral à l'exclusion du montant destiné à la couverture des besoins vitaux, remplacé par le montant destiné à garantir le revenu minimum cantonal d'aide sociale défini à l'art. 3 LPCC.

6.              

6.1 En l’espèce, lorsqu’il a rendu la décision querellée, le SPC ignorait que C______ – qui aura 25 ans en juin 2024 - avait repris des études régulières, dès le 1er septembre 2021 ; le SPC s’est déterminé sur ce point, après réception des pièces jointes au recours et a conclu, dans sa réponse du 7 janvier 2022, à l’admission partielle du recours, précisant que « l’enfant C______ devra être réintégré dans le calcul des prestations rétroactivement au 1er septembre 2021, sous réserve que ses ressources n’excèdent pas ses dépenses reconnues ».

Ainsi, le raisonnement du SPC, articulé au stade de sa réponse, ne prête pas le flanc à la critique et correspond à la conclusion de la recourante visant à ce que son fils C______ soit inclus dans le calcul des prestations complémentaires, suite à la reprise de ses études, pour l’année scolaire 2021/2022.

6.2 S’agissant de la contribution d’entretien, la recourante a versé à la procédure - en date du 4 avril 2022, soit après que la décision querellée ait été rendue - une décision du TPI confirmant la transaction du 7 mars 2022 passée entre les parties, soit la recourante et le père de l’enfant C______, et ratifiée par le juge conciliateur.

Il sied de rappeler qu’une telle transaction à les effets d’une décision entrée en force, selon l’art. 208 al. 2 du code de procédure civile du 19 décembre 2008 (CPC - RS 272).

Selon les termes de la transaction, la contribution d’entretien mensuelle due par le père à la recourante et à son fils C______ a pris fin dès le 1er janvier 2022.

Les détails de la transaction n’ayant été portés à la connaissance de la chambre de céans et de l’intimé qu’en cours de procédure, l’intimé devra prendre en compte, dans le revenu déterminant, pour la période allant du 1er septembre au 31 décembre 2021, le montant de la contribution d’entretien, afin de calculer le montant des prestations dues à la recourante.

Étant rappelé que dès le 1er janvier 2022, la transaction valant jugement, du 7 mars 2022, prévoit que la contribution d’entretien est supprimée.

6.3 Il ressort de ce qui précède que, comme souligné par le SPC dans sa réponse, il faut tenir compte, à partir du 1er septembre 2021, d’une part, de la reprise de la scolarité de l’enfant C______ et, d’autre part, de la reprise de l’obligation du père de verser la contribution mensuelle d’entretien, par CHF 250.-.

7.             Dès lors, le recours sera partiellement admis et la cause renvoyée à l’intimé pour qu’il rende une nouvelle décision, dès lors que l’enfant C______ devra être réintégré dans le calcul des prestations complémentaires, rétroactivement au 1er septembre 2021, sous réserve que ses ressources n’excèdent pas ses dépenses reconnues, notamment après intégration du montant mensuel de la contribution d’entretien, par CHF 250.-, pour les mois de septembre à décembre 2021.

8.             La recourante, qui n'est pas représentée en justice et qui n'a pas allégué ou démontré avoir déployé des efforts dépassant la mesure de ce que tout un chacun consacre à la gestion courante de ses affaires, n'a pas droit à des dépens.

9.             Pour le surplus, en l’absence de loi spéciale prévoyant des frais judiciaires, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Annule la décision sur opposition du 12 novembre 2021 et renvoie la cause au service des prestations complémentaires pour nouvelle décision au sens des considérants.

4.        Dit que la procédure est gratuite.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le