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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/205/2021

ATAS/740/2022 du 25.08.2022 ( LAA )

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/205/2021 ATAS/740/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Ordonnance d’expertise du 25 août 2022

6ème Chambre

 

En la cause

 

Monsieur A______, domicilié à BERNEX

 

 

recourant

contre

 

HELSANA ACCIDENTS SA, sise avenue de Provence 15, LAUSANNE

 

 

 

intimée

 


EN FAIT

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né en 1988, travaille pour B______ en tant que Senior Trader depuis le 1er juin 2018 et est assuré à ce titre, selon la loi fédérale sur l'assurance-accidents du 20 mars 1981 (LAA), auprès de HELSANA ACCIDENTS SA (ci-après : l’assurance).

b. Le 13 août 2019, l’assuré a été victime d’un accident ; il s’est tordu le genou gauche lors d’un cours de Jiu Jitsu.

B. a. L’accident a été annoncé à l’assurance le 15 août 2019, une IRM des deux genoux a été effectuée le 19 août 2019 et le Docteur C______, FMH chirurgie orthopédique et traumatologique, a attesté d’un trauma en valgus au genou gauche nécessitant une réparation par arthroscopie du genou gauche.

b. Le 16 octobre 2019, l’assurance a provisoirement refusé de garantir la prise en charge des coûts d’une hospitalisation (arthroscopie du genou).

c. Le 21 octobre 2019, le docteur D______, FMH chirurgie orthopédique et traumatologique, médecin-conseil de l’assurance, a attesté d’un diagnostic d’entorse stade (sic) du ligament latéral interne (LLI) en voie de guérison à gauche et une chondropathie F-P bilatérale ainsi qu’une séquelle d’Osgood Schlatter à droite. Il existait une lésion répertoriée selon l’art. 6 al. 2 LAA, soit une lésion ligamentaire gauche qui n’était pas due de manière prépondérante à l’usure ou à la maladie. Il y avait un état antérieur, soit une chondropathie F-P des deux côtés et l’accident avait entrainé une aggravation passagère ; le statu quo ante ou sine était atteint selon le rapport médical du Dr E______. Il n’y avait pas d’atteinte importante et durable à l’intégrité physique.

d. Le 29 octobre 2019, le docteur E______, FMH chirurgie orthopédique et traumatologique, a attesté d’une entorse du ligament collatéral médial (LCM) au genou gauche nécessitant un traitement conservateur ; sur son avis, l’assuré renonçait à l’intervention chirurgicale.

e. Le 20 janvier 2020, le docteur F______, FMH médecine physique et réadaptation, a attesté d’une fracture chondrale de la rotule gauche, avec des douleurs dans les escaliers et à la charge nécessitant de la physiothérapie.

f. Les 23 et 26 juin 2020, l’assuré a informé l’assurance qu’il était toujours en traitement pour le genou gauche, avec de la physiothérapie et qu’une IRM était prévue le 27 juillet 2020 et un suivi par le Dr F______.

g. Le 27 juillet 2020, une IRM du genou gauche a été pratiquée et le 20 août 2020, le Dr F______ a attesté d’une évolution favorable pour les activités de la vie quotidienne, avec de l’auto-rééducation et un risque de séquelle d’arthrose.

 

h. Le 25 août 2020, le Dr D______ a indiqué que la seule lésion traumatique était une entorse mineure sans déchirure significative du LCM, comme mentionné par le Dr E______, contrairement à l’avis du Dr F______, il n’y avait jamais eu de fracture chondrale patellaire gauche mais un état antérieur d’arthrose relativement marquée fémoro-patellaire à gauche et débutante à droite ; le statu quo sine était atteint au plus tard au 20 janvier 2020 (date du rapport médical du Dr F______ qui ne parlait plus de l’entorse mais du problème fémoro-patellaire, qui n’était pas une fracture chondrale). La fracture chondrale n’était pas une lésion selon l’art. 6 al. 2 LAA.

i. Le 17 septembre 2020, l’assuré a informé l’assurance qu’il continuait son traitement de physiothérapie, ayant des douleurs.

j. Par décision du 6 octobre 2020, l’assurance a informé l’assuré que son droit aux prestations s’éteignait le 20 janvier 2020, au motif que le lien de causalité n’était plus donné, le rapport du 20 janvier 2020 relevant uniquement un problème fémoro-patellaire, affection purement maladive.

k. Le 22 octobre 2020, l’assuré a fait opposition à cette décision. Il avait, par le biais d’un traitement conservateur, évité une opération couteuse ; il demandait la continuation de la prise en charge des suivis, ce d’autant qu’il présentait toujours des douleurs à la marche, notamment dans les escaliers et qu’il ne pouvait ni courir ni pratiquer les sports qu’il faisait avant ; il n’avait jamais eu de douleurs à cet endroit avant son accident.

l. Par décision du 11 décembre 2020, l’assurance a rejeté l’opposition, au motif que l’assuré n’avait été victime, selon le Dr D______, que d’une entorse mineure sans déchirure significative du LCM ; un état antérieur avait été révélé par l’évènement ; les troubles postérieurs étaient causés de manière prépondérante par l’usure, vu l’arthrose déjà marquée au niveau fémoro-patellaire. Ainsi, même si on se trouvait en présence d’une lésion assimilée, la relation de causalité serait interrompue pour cause d’atteinte dégénérative préalable révélée, mais non pas causée par l’accident. En effet, une telle lésion serait due de manière prépondérante par l’usure dans cette hypothèse. Par ailleurs, par rapport au nouveau diagnostic établi par le Dr F______ en janvier 2020 pour l’évènement du 13 août 2019, l’appréciation de la causalité devait être d’autant plus stricte que le nouveau diagnostic survenait longtemps après l’évènement assuré. Du reste, le seul fait que des symptômes douloureux ne s’étaient manifestés qu’après la survenance d’un accident pouvait constituer un indice, mais ne suffisait pas à établir un rapport de causalité naturelle avec cet accident, ce d’autant plus quand il existait un temps de latence entre les soins et l’événement.

C. a. Le 19 janvier 2021, l’assuré a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice à l’encontre de la décision précitée. Il a relevé que suite à son accident, il avait vu en premier le Dr C______ que lui avait prescrit une IRM et de porter une attelle pendant six semaines à cause de la douleur. Après six semaines et une seconde consultation, le Dr C______ lui avait demandé de se faire opérer du cartilage car la cavité de la fissure de cartilage allait jusqu’à l’os, d’où sa douleur. Il avait demandé un second avis et le Dr E______ lui avait conseillé de ne pas se faire opérer mais de muscler sa jambe au maximum et de faire de la physiothérapie, tout en étant suivi par le Dr F______. Il avait donc annulé l’opération qui devait se faire à la Clinique G______.

Le refus de prise en charge de l’assurance au-delà du 20 janvier 2020 était hâtif, injuste et infondé. Il avait bien une fissure du cartilage qui entrainait une douleur sous la rotule, jamais ressentie auparavant. Il pratiquait le sport depuis son plus jeune âge, golf à très haut niveau amateur, de la musculation, de la course à pied, de l’alpinisme et de l’escalade. Il pratiquait par exemple souvent la course à pied le midi avec ses collègues. Aujourd’hui, à cause de son accident et cette fissure dans le cartilage avec œdème osseux qu’il avait à son genou gauche, il ne pouvait toujours pas courir ou par exemple faire un squat (sic). Sa condition était en train de s’améliorer car il suivait les conseils du Dr F______ (perte de poids pour avoir moins de poids sur le genou et pratique du vélo pour muscler sa jambe ainsi que de la physiothérapie). Son genou allait de mieux en mieux et il espérait reprendre une activité normale d’ici quelques mois. En 2020, il avait donc suivi des sessions de physiothérapies, il avait passé des IRM et revu le Dr F______. Ces frais n’avaient pas été pris en charge par l’assurance et c’était pour cela qu’il faisait recours. Il n’avait jamais eu mal au genou gauche auparavant et d’après ses progrès actuels il espérait que cela soit fini bientôt.

Il a communiqué un rapport du 25 janvier 2021 du Dr F______, selon lequel l’IRM montrait une fracture chondrale de la facette interne de la rotule avec un œdème en regard ; il avait ordonné la poursuite de la rééducation. Il l’avait vu à sept mois du traumatisme avec une amélioration des plaintes et une capacité de marche dans les escaliers, ce qui n’était pas le cas auparavant. Le dernier contrôle remontait au 4 novembre 2020, où l’assuré était asymptomatique pour toutes les activités de la vie quotidienne. Le bilan isocinétique avait montré une bonne récupération de la force avec un déficit minime de 8% en force maximale des extenseurs. Il lui avait permis de reprendre progressivement les activités sportives. Le lien de causalité entre le traumatisme au Jui Jitsu et les plaintes de l’assuré était certain ; l’assuré ne s’était jamais plaint de douleurs au niveau de son genou gauche avant cet événement traumatique.

b. Le 12 février 2021, l’assurance a conclu au rejet du recours, en relevant qu’aucun médecin autre que le Dr F______ n’annonçait le diagnostic de fracture chondrale de la facette de la rotule et que l’IRM mentionnait une fissuration.

c. L’assuré n’a pas répliqué dans le délai imparti pour ce faire.

d. La chambre de céans a requis des renseignements complémentaires auprès des médecins traitants de l’assuré.

d.a. Le 14 avril 2021, le Dr F______ a indiqué qu’il confirmait le diagnostic de fracture chondrale, laquelle était, de façon hautement probable, en relation de causalité avec l’accident et le genou gauche allait continuer de se dégrader de façon plus marquée et accélérée en raison du traumatisme.

d.b. Le 9 avril 2021, le Dr C______ a indiqué qu’on ne pouvait parler d’arthrose du genou en présence de la lésion focale du cartilage de la rotule sur 7,5 mm seulement ; la fracture chondrale évoquée par le Dr F______ signifiait une lésion focale traumatique du cartilage ; le genou, selon la description du Dr F______, était encore symptomatique sept mois après le 20 janvier 2020, date retenue par le Dr D______.

d.c. Le 19 mai 2021, le Dr E______ a indiqué qu’en n’ayant pas suivi l’assuré il ne pouvait se prononcer sur les avis des Drs F______ et D______. Il avait retenu une entorse de stade I du LCM gauche, associée à une lésion cartilagineuse du versant médial de la rotule gauche.

e. Le 16 juin 2021, l’assurance a maintenu un statu quo sine au 20 janvier 2020, en se fondant sur un avis du Dr D______ du 14 juin 2021 indiquant qu’il n’y avait pas de fracture mais une fissuration du cartilage qui atteignait l’os ; on ne trouvait qu’une réaction modérée ostéo-sous-chondrale classique dans le cadre de fissuration du cartilage qui atteignait l’os et c’était le liquide articulaire qui provoquait cette réaction ; la lésion patellaire avait été révélée par l’accident mais pas provoquée par celui-ci ; le statu quo était atteint au moment où la seule lésion traumatique, l’entorse du LCI, était guérie ; la solution de continuité évoquée par le Dr F______ n’était pas traumatique.

f. Le 17 juin 2021, l’assuré a indiqué qu’il se ralliait aux rapports de ses médecins relevant une fissure du cartilage causée par l’accident ; son état s’améliorait seulement depuis deux à trois mois, et une entorse ne pouvait être la cause de ces douleurs persistantes.

g. Par arrêt du 27 septembre 2021 (ATAS/1003/2021), la chambre de céans a admis le recours et dit que l’intimée devait prendre en charge les suites de l’accident du 13 août 2019.

h. Par arrêt du 8 juin 2022 (8C_724/2021), le Tribunal fédéral a partiellement admis le recours interjeté par l’assurance contre l’arrêt précité, a annulé celui-ci et renvoyé la cause à la chambre de céans pour mise en œuvre d’une expertise médicale.

i. Le 9 août 2022, la chambre de céans a informé les parties qu’elle entendait ordonner une expertise judiciaire qui serait confiée au docteur H______, FMH chirurgie orthopédique et traumatologie.

j. Le 22 août 2022, l’intimée a proposé que l’expertise soit confiée à un médecin titulaire d’un certificat de Swiss Insurance Medecine (SIM).

k. Le recourant n’a pas fait d’observations.

 

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA).

3.        Le litige porte sur le droit du recourant à des prestations de l’intimé au-delà du 20 janvier 2021, à la suite de son accident du 13 août 2019.

4.        Selon l'art. 6 al. 1 LAA, les prestations d'assurance sont allouées en cas d'accident professionnel, d'accident non professionnel et de maladie professionnelle. Par accident, on entend toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort (art. 4 LPGA ; ATF 129 V 402 consid. 2.1, ATF 122 V 230 consid. 1 et les références).

La responsabilité de l’assureur-accidents s’étend, en principe, à toutes les conséquences dommageables qui se trouvent dans un rapport de causalité naturelle (ATF 119 V 335 consid. 1 ; ATF 118 V 286 consid. 1b et les références) et adéquate avec l’événement assuré (ATF 125 V 456 consid. 5a et les références).

Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré suppose d'abord, entre l'événement dommageable de caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle. Cette condition est réalisée lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout ou qu'il ne serait pas survenu de la même manière. Il n'est pas nécessaire que l'accident soit la cause unique ou immédiate de l'atteinte à la santé: il suffit qu'associé éventuellement à d'autres facteurs, il ait provoqué l'atteinte à la santé, c'est-à-dire qu'il apparaisse comme la condition sine qua non de cette atteinte (ATF 142 V 435 consid. 1).

Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la santé sont liés par un rapport de causalité naturelle est une question de fait, que l'administration ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des renseignements d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à l'appréciation des preuves dans l'assurance sociale. Ainsi, lorsque l'existence d'un rapport de cause à effet entre l'accident et le dommage paraît possible, mais qu'elle ne peut pas être qualifiée de probable dans le cas particulier, le droit à des prestations fondées sur l'accident assuré doit être nié (ATF 129 V 177 consid. 3.1, ATF 119 V 335 consid. 1 et ATF 118 V 286 consid. 1b et les références).

Le fait que des symptômes douloureux ne se sont manifestés qu'après la survenance d'un accident ne suffit pas à établir un rapport de causalité naturelle avec cet accident (raisonnement «post hoc, ergo propter hoc» ; ATF 119 V 335 consid. 2b/bb ; RAMA 1999 n° U 341 p. 408, consid. 3b). Il convient en principe d'en rechercher l'étiologie et de vérifier, sur cette base, l'existence du rapport de causalité avec l'événement assuré.

5.        En vertu de l'art. 36 al. 1 LAA, les prestations pour soins, les remboursements de frais ainsi que les indemnités journalières et les allocations pour impotent ne sont pas réduits lorsque l'atteinte à la santé n'est que partiellement imputable à l'accident. Si un accident n'a fait que déclencher un processus qui serait de toute façon survenu sans cet événement, le lien de causalité naturelle entre les symptômes présentés par l'assuré et l'accident doit être nié lorsque l'état maladif antérieur est revenu au stade où il se trouvait avant l'accident (statu quo ante) ou s'il est parvenu au stade d'évolution qu'il aurait atteint sans l'accident (statu quo sine) (RAMA 1992 n° U 142 p. 75 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_441/2017 du 6 juin 2018 consid. 3.2). A contrario, aussi longtemps que le statu quo sine vel ante n'est pas rétabli, l'assureur-accidents doit prendre à sa charge le traitement de l'état maladif préexistant, dans la mesure où il a été causé ou aggravé par l'accident (arrêts du Tribunal fédéral 8C_1003/2010 du 22 novembre 2011 consid. 1.2 et 8C_552/2007 du 19 février 2008 consid. 2).

6.        Le droit à des prestations de l'assurance-accidents suppose en outre l'existence d'un lien de causalité adéquate entre l'accident et l'atteinte à la santé. La causalité est adéquate si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s'est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 129 V 177 consid. 3.2 et ATF 125 V 456 consid. 5a et les références). En présence d'une atteinte à la santé physique, le problème de la causalité adéquate ne se pose toutefois guère, car l'assureur-accidents répond aussi des complications les plus singulières et les plus graves qui ne se produisent habituellement pas selon l'expérience médicale (ATF 118 V 286 consid. 3a et ATF 117 V 359 consid. 5d/bb ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 351/04 du 14 février 2006 consid. 3.2).

7.         

7.1      La plupart des éventualités assurées (par exemple la maladie, l'accident, l'incapacité de travail, l'invalidité, l'atteinte à l'intégrité physique ou mentale) supposent l'instruction de faits d'ordre médical. Or, pour pouvoir établir le droit de l'assuré à des prestations, l'administration ou le juge a besoin de documents que le médecin doit lui fournir (ATF 122 V 157 consid. 1b). Pour apprécier le droit aux prestations d’assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1).

7.2      Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. A cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3 ; ATF 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux (ATF 125 V 351 consid. 3b).

7.3      Le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d'un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Etant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).

Dans une procédure portant sur l'octroi ou le refus de prestations d'assurances sociales, lorsqu'une décision administrative s'appuie exclusivement sur l'appréciation d'un médecin interne à l'assureur social et que l'avis d'un médecin traitant ou d'un expert privé auquel on peut également attribuer un caractère probant laisse subsister des doutes suffisants quant à la fiabilité et la pertinence de cette appréciation, la cause ne saurait être tranchée en se fondant sur l'un ou sur l'autre de ces avis et il y a lieu de mettre en œuvre une expertise par un médecin indépendant selon la procédure de l'art. 44 LPGA ou une expertise judiciaire (ATF 135 V 465 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_301/2013 du 4 septembre 2013 consid. 3).

7.4      En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52 ; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C/973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

7.5      On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. A cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4 ; SVR 2008 IV n. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_751/2010 du 20 juin 2011 consid. 2.2).

8.        Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3, ATF 126 V 353 consid. 5b, ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

Dans le contexte de la suppression du droit à des prestations, la règle selon laquelle le fardeau de la preuve appartient à la partie qui invoque la suppression du droit (RAMA 2000 n° U 363 p. 46), entre seulement en considération s'il n'est pas possible, dans le cadre du principe inquisitoire, d'établir sur la base d'une appréciation des preuves un état de fait qui au degré de vraisemblance prépondérante corresponde à la réalité (ATF 117 V 261 consid. 3b et les références). La preuve de la disparition du lien de causalité naturelle ne doit pas être apportée par la preuve de facteurs étrangers à l'accident. Il est encore moins question d'exiger de l'assureur-accidents la preuve négative, qu'aucune atteinte à la santé ne subsiste plus ou que la personne assurée est dorénavant en parfaite santé. Est seul décisif le point de savoir si les causes accidentelles d'une atteinte à la santé ne jouent plus de rôle et doivent ainsi être considérées comme ayant disparu (arrêt du Tribunal fédéral 8C_441/2017 du 6 juin 2018 consid. 3.3).

9.        Le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a ; RAMA 1985 p. 240 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l’administration reste possible, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu'ici, lorsqu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4 ; SVR 2010 IV n. 49 p. 151, consid. 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).

10.    En l’occurrence, vu l’arrêt du Tribunal fédéral du 8 juin 2022, il convient d’ordonner une expertise judiciaire, laquelle sera confiée au docteur H______, FMH chirurgie orthopédique et traumatologie, étant relevé que l’intimée ne prétend pas que la certification SIM soit exigée dans le cadre de l’expertise judiciaire et que la problématique du cas d’expertise requiert surtout une connaissance précise en orthopédie, laquelle est garantie par la spécialisation du Dr H______ en chirurgie orthopédique et traumatologie.

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

I.              Ordonne une expertise médicale orthopédique. La confie au docteur H______, FMH chirurgie orthopédique et traumatologie, à Fribourg.

II.           Dit que la mission d’expertise orthopédique sera la suivante :

A.           Prendre connaissance du dossier de la cause

B.            Si nécessaire prendre tous renseignements auprès des médecins ayant traité la personne expertisée.

C.            Examiner la personne expertisée et, si nécessaire, ordonner d'autres examens.

D.           Etablir un rapport comprenant les éléments et les réponses aux questions suivants :

1.             Anamnèse détaillée

2.             Plaintes de la personne expertisée

3.             Status et constatations objectives

4.             Diagnostics

4.1 Dates d'apparition

4.2 L’état de santé de la personne expertisée est-il stabilisé ?

4.2.1 Si oui, depuis quelle date ?

4.3 Les atteintes et les plaintes de la personne expertisée correspondent-elles à un substrat organique objectivable ?

4.3.1 En particulier, la personne expertisée a-t-elle présenté une fracture chondrale de la facette interne de la rotule ?

5.             Causalité

5.1 Les atteintes constatées sont-elles dans un rapport de causalité avec l’accident ? Plus précisément ce lien de causalité est-il seulement possible (probabilité de moins de 50%), probable (probabilité de plus de 50%) ou certain (probabilité de 100%) ?

5.1.1 Veuillez motiver votre réponse pour chaque diagnostic posé

5.1.2 A partir de quel moment le statu quo ante a-t-il été atteint (moment où l’état de santé de la personne expertisée est similaire à celui qui existait immédiatement avant l’accident) ?

5.1.3 Veuillez indiquer la date du statu quo ante pour chaque diagnostic posé

5.2 L’accident a-t-il décompensé un état maladif préexistant ? Si oui, lequel ?

5.2.1 Si oui, à partir de quel moment le statu quo sine a-t-il été atteint (moment où l’état de santé de la personne expertisée est similaire à celui qui serait survenu tôt ou tard, même sans l’accident par suite d’un développement ordinaire) ?

5.2.2 En particulier, la personne expertisée présente-t-elle une arthrose fémoro-patellaire antérieure à l’accident ?

5.2.3 En particulier, le statu quo sine était-il atteint au 20 janvier 2020 ?

6.             Limitations fonctionnelles

6.1. Indiquer les limitations fonctionnelles en relation avec chaque diagnostic

6.1.1 Dates d'apparition

7.             Capacité de travail

7.1 Quelle est la capacité de travail de la personne expertisée dans son activité habituelle, compte tenu des seules atteintes en rapport de causalité (au moins probable - probabilité de plus de 50 %) avec l’accident et comment cette capacité de travail a-t-elle évolué depuis l’accident ?

7.2 Si la capacité de travail est seulement partielle, quelles sont les limitations fonctionnelles qui entrent en ligne de compte ? Depuis quelle date sont-elles présentes ?

8.             Traitement

8.1 Examen du traitement suivi par la personne expertisée et analyse de son adéquation

8.2 Propositions thérapeutiques et analyse de leurs effets sur la capacité de travail de la personne expertisée

8.3 Peut-on attendre de la poursuite du traitement médical une notable amélioration de l’état de santé de la personne expertisée ?

8.4 Si non, à partir de quel moment ne peut-on plus attendre de la continuation du traitement médical une notable amélioration de l’état de santé de la personne expertisée (état final atteint) ?

8.5 Le traitement suivi au-delà du 20 janvier 2020 était-il justifié ?

8.5.1 Si oui, était-il en lien avec l’accident (avec un taux de probabilité de plus de 50% ?)

9.             Atteinte à l’intégrité

9.1 La personne expertisée présente-t-elle une atteinte à l’intégrité définitive, en lien avec les atteintes en rapport de causalité au moins probable (probabilité de plus de 50%) avec l’accident ?

9.2 Si oui, quel est le taux applicable selon les tables de la SUVA ?

9.3 Si une aggravation de l’intégrité physique est prévisible, veuillez en tenir compte dans l’évaluation de l’atteinte à l’intégrité et l’expliquer en détaillant le pourcentage dû à cette aggravation, étant précisé que seules les atteintes à la santé en lien probable (probabilité de plus de 50%) avec l’accident doivent être incluses dans le calcul du taux de l’indemnité

10.         Appréciation d'avis médicaux du dossier

10.1 Etes-vous d'accord avec les avis du Dr D______ ? En particulier avec la présence d’une lésion traumatique limitée à une entorse bénigne du ligament gauche antérieur, d’une lésion patellaire révélée par l’accident mais non provoquée par celui-ci et d’une réaction modérée ostéo-sous-chondrale classique, révélant un problème chronique ? Si non, pourquoi ?

10.2 Etes-vous d’accord avec l’avis des médecins traitants, soit les Dr F______, C______ et E______ ? Si non, pourquoi ?

E.            Invite l’expert à déposer son rapport en trois exemplaires dans les meilleurs délais auprès de la chambre de céans.

F.             Réserve le fond ainsi que le sort des frais jusqu’à droit jugé au fond.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties le