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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1771/2020

ATAS/591/2021 du 09.06.2021 ( AI ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1771/2020 ATAS/591/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 9 juin 2021

4ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée ______, à Le Grand-Saconnex, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Andres PEREZ

 

 

recourante

contre

 

 

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

 

 

intimé

 


 

EN FAIT

1.        Madame A______ (ci-après : l’assurée ou la recourante), née le ______ 1985, a été victime d’un grave accident de la circulation le 29 décembre 2004 qui l’a rendue paraplégique. Depuis lors, elle se déplace en fauteuil roulant.

2.        Par pli du 11 avril 2019, l’assurée a sollicité, entre autres, le renouvellement de son fauteuil roulant, avec mise en place d’un dossier adapté, en raison de l’usure du dernier fauteuil octroyé.

3.        Dans son rapport de consultation du 23 octobre 2019, la FSCMA, qui s’était rendue au domicile de l’assurée le 5 août 2019, a indiqué que cette dernière, à la suite d’importantes douleurs dans le bras gauche, avait dû quitter son emploi en qualité d’assistante juridique, et était en attente d’une intervention chirurgicale du nerf médian. Très active, elle sollicitait un deuxième fauteuil roulant manuel. Elle sortait beaucoup et essayait de faire régulièrement du sport. Ces activités engendraient une usure rapide des composantes de son fauteuil roulant manuel et l’assurée se rendait régulièrement chez le fournisseur pour des réparations et des adaptations. Afin de ne pas être bloquée à domicile ou chez le fournisseur lors de ses jours de travail, elle demandait le financement d’un deuxième fauteuil.

La FSCMA a proposé une réévaluation de la situation lorsque l’assurée reprendrait une activité lucrative. L’usure prématurée du fauteuil roulant liée à la pratique d’un sport n’incombait pas à l’OAI. En revanche, l’assurée, qui souffrait d’un kyste à la colonne vertébrale, avait besoin du renouvellement de son dossier en raison de douleurs importantes au dos. Les tentatives d’adaptation du précédent dossier par la maison Degonda Rehab ayant été un échec, la maison Reh’actif avait confectionné un nouveau dossier sur mesure en mars 2019, dont l’assurée était très satisfaite.

4.        Par courrier du 3 janvier 2020, l’assurée, sous la plume de son conseil, a contesté ledit projet de décision. Son fauteuil roulant actuel faisait souvent l’objet de réparations en raison des activités sportives intensives qu’elle pratiquait. Étant au chômage depuis avril 2019, elle cherchait activement un nouvel emploi, et à cette fin, elle devait pouvoir se rendre aux entretiens d’embauche. Dans la mesure où en cas de chômage temporaire, les contributions d’amortissement étaient versées durant un an, il devait en aller de même s’agissant de l’octroi d’un second fauteuil roulant.

5.        Par décision du 19 mai 2020, l’OAI a nié le droit de l’assurée à la prise en charge d’un second fauteuil roulant manuel.

6.        Par acte du 19 juin 2020, l’assurée, par l’intermédiaire de son conseil, a interjeté recours contre cette décision auprès de la chambre de céans, concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation et à la prise en charge d’un fauteuil roulant manuel selon un devis joint du 29 janvier 2019 d’un montant de CHF 8’004.20. Elle reprenait ses arguments déjà développés et ajoutait qu’en en raison de ses maux aux mains et aux poignets, elle avait de plus en plus de peine à monter et démonter son fauteuil roulant pour le ranger dans la voiture. Elle pourrait éviter ces opérations si elle possédait une chaise roulante à son domicile, et une autre sur son lieu de travail.

7.        L’intimé a conclu au rejet du recours.

8.        Le 11 novembre 2020, la recourante a produit un certificat établi le 26 octobre 2020 par la doctoresse B______, spécialiste FMH en médecine interne générale, attestant de la nécessité pour sa patiente, qui exerçait une activité professionnelle régulière, d’une seconde chaise roulante.

9.        La recourante a été entendue le 3 mars 2021 par la chambre de céans.

10.    Le 23 mars 2021, elle a produit un rapport établi le 22 mars 2021 par la doctoresse C______, spécialiste FMH en chirurgie de la main, qui concluait dans un rapport motivé que la recourante dépendait de l’usage de ses membres supérieurs pour avoir une vie indépendante à domicile et qu’elle appuyait sa demande de seconde chaise pour faciliter sa vie quotidienne et préserver au maximum ses membres supérieurs.

11.    Le 3 mai 2021, l’intimé a conclu, au vu du rapport médical précité, à l’octroi d’un second fauteuil roulant manuel pour la recourante. Compte tenu du fait que ce rapport médical n’avait été fourni qu’au stade du recours et que la décision avait été rendue à juste titre, compte tenu des éléments fournis dans la demande, la recourante devait assumer ses dépens et les frais de la procédure.

12.    Le 27 mai 2021, la recourante a fait valoir que l’intimé n’ignorait pas sa problématique liée aux membres supérieurs, qui ressortait de plusieurs rapports médicaux figurant à la procédure, lorsqu’il avait pris la décision querellée.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]). Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA et 62 ss LPA).

3.        Le litige porte sur le droit de la recourante à l’octroi d'un second fauteuil roulant.

4.        Selon l'ordonnance concernant la remise de moyens auxiliaires par l'assurance-invalidité du 29 novembre 1976 (OMAI - RS 831.232.51), édictée par le Département fédéral de l'intérieur sur délégation de compétence du Conseil fédéral (art. 14 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 [RAI – RS 831.201]), l'assurance-invalidité prend notamment en charge les fauteuils roulants (art. 2 al. 1 OMAI et ch. 9 de l'annexe à l'OMAI), qu'ils soient sans moteur (ch. 9.01) ou électriques (ch. 9.02).

Selon la Circulaire concernant la remise des moyens auxiliaires par l’assurance-invalidité (CMAI) établie par l’Office fédéral des assurances sociales dans sa version valable dès le 1er janvier 2013, état au 1er janvier 2020, la remise d’un fauteuil roulant doit être justifiée sur le plan médical. L’établissement d’une nouvelle ordonnance médicale n’entraîne pas forcément la remise d’un nouveau fauteuil roulant. Parfois, il est possible d’adapter le fauteuil existant (chiffre 2073 CMAI).

En règle générale, le droit ne s’étend qu’à un seul fauteuil roulant. La nécessité d’un second fauteuil roulant doit être fondée de manière détaillée (chiffre 2075). Le Tribunal fédéral a admis la conformité au droit du chiffre 2075 de la circulaire (SVR 1996 IV n° 81 consid. 3a ; ATF 133 V 257 consid. 6.4).

Comme pour tout moyen auxiliaire, la prise en charge des frais de renouvellement d'un fauteuil roulant doit répondre aux critères de simplicité et d'adéquation (art. 8 al. 1 et 21 al. 3 LAI).

5.        En l’espèce, il n’est plus contesté que la recourante, dont l’autonomie est limitée, nécessite un second fauteuil roulant manuel pour lui permettre de continuer de participer à la vie sociale et professionnelle. Au vu du rapport du Dr C______ du 22 mars 2021, il convient d’admettre qu’il existe un rapport raisonnable entre le coût et l’utilité de la mesure. La décision querellée apparaît ainsi infondée.

6.        En conséquence, le recours sera admis et il sera dit que la recourante a droit à un second fauteuil roulant, tel que devisé.

7.        Selon l'art. 61 let. g LPGA, le recourant qui obtient gain de cause a droit au remboursement de ses frais et dépens. Des dépens peuvent toutefois être refusés au recourant qui obtient gain de cause, mais qui aurait pu éviter le dépôt d’un recours en agissant plus diligemment en procédure administrative (ATF 125 V 373).

En l’occurrence, la recourante ne s’est prévalue de ses problèmes de poignets pour justifier l’octroi d’un second fauteuil qu’au stade du recours, se limitant auparavant à faire valoir l’usure de son fauteuil. L’on doit dès lors retenir qu’elle aurait pu éviter le recours en agissant plus diligemment au stade de la procédure administrative. Il en résulte que le droit à des dépens doit lui être nié.

8.        Un émolument de CHF 200.- sera mis à la charge de l’intimé (art. 69 al.1bis LAI).

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Admet le recours.

3.        Annule la décision rendue par l’intimé le 19 mai 2020.

4.        Dit que la recourante a droit à un second fauteuil roulant.

5.        Dit que la recourante n’a pas droit à des dépens.

6.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l’intimé.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le